CHAPITRE IV. L'O NU ET LA RESOLUTION DE LA CRISE DU
DARFOUR
Ce chapitre analyse les différentes interventions des
Nations Unies dans la résolution de la crise du Darfour ainsi que le
bilan depuis son implication.
IV.1. La position de l'ONU face à la crise du
Darfour
Au risque de paraître sévère, nous
considérons que, longtemps, les Nations Unies ne se sont pas
véritablement intéressées au Soudan. Il est singulier en
effet qu'à aucun moment, elles n'interviennent à quelque titre
que ce soit dans la résolution d'un des conflits les plus terribles que
le monde ait connus.
En fait, l'intérêt que les Nations Unies ont
manifesté au Soudan, essentiellement axé sur les aspects
humanitaires et l'assistance que la communauté internationale devait lui
apporter, a tardé à aborder les questions politiques pourtant au
coeur de tous les problèmes auxquels doit faire face ce pays depuis
toujours et, surtout, à tenter d'y apporter des solutions.
Au long des années 1980 et 1990, notamment, les Nations
Unies ont été singulièrement peu réactives
vis-à-vis de la situation au Soudan ; leur action n'a jamais non plus
visé à une réelle effectivité, dans la mesure
où seule l'Assemblée générale s'est saisie des
différentes questions, sans intervention, à une exception
près, comme on le verra, du Conseil de sécurité.
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Jusqu'en 2004, les Nations Unies semblent donc n'avoir pas
perçu l'urgence de mettre en oeuvre des moyens plus efficaces que ceux
qu'elles se contentaient de mobiliser depuis la fin des années
1980. (127)
IV.1.1. Les préoccupations de l'Assemblée
générale de l'ONU pour le
Soudan
L'Assemblée générale des Nations Unies a
eu l'occasion à plusieurs reprises d'exprimer sa préoccupation.
Dès la fin des années 1980, elle a notamment adopté
plusieurs résolutions par lesquelles elle se déclarait
alarmée par la situation catastrophique du pays, consécutive aux
diverses calamités l'affectant de manière récurrente :
présence de plus d'un million de réfugiés étrangers
sur son territoire depuis le début des années 1960 ;
sécheresse et famine de 1984 ; inondations et infestations acridiennes
en 1988 ; sécheresse et pénuries alimentaires en 1990.
Si elle a continué de s'intéresser à
l'assistance d'urgence, l'Assemblée générale a en effet
commencé à porter un regard parallèle sur la situation des
Droits de l'homme dans le pays. Ainsi, tout en réitérant la
nécessité de poursuivre la solidarité internationale
à l'égard du Soudan, la résolution 47/162 (128)
appelait pour la première fois les parties prenantes au conflit
armé à mettre un terme aux hostilités et, incidemment,
à faciliter le travail humanitaire. Simultanément, la
résolution 47/142, adoptée le même jour, prenait note, pour
la première fois également, « avec une profonde
préoccupation des informations selon lesquelles de graves violations des
Droits de l'homme seraient commises au Soudan », ainsi que les
rapports de la Commission des Droits de l'homme les relataient alors.
Déjà, l'impossibilité pour les
populations civiles d'accéder librement à l'assistance
humanitaire, les déplacements forcés, les exodes massifs de
populations vers les pays voisins, la torture, les exécutions sommaires
et autres détentions sans jugement étaient mentionnés.
Désormais, les résolutions suivantes de
l'Assemblée générale continueront la plupart du temps de
maintenir ce parallèle entre solidarité humanitaire et vigilance
en matière de
127 Rapport d'information sur la situation au soudan et la
question du Darfour par la commission des affaires étrangères
présenté par serge JACQUIN et Patrick LABAUNE, Assemblée
National, KHARTOUM ; 2009 ; p146.
128 Adoptée le 18 décembre 1992
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Droits de l'homme. Si la tonalité globale des
résolutions quant à la situation humanitaire au Soudan est
à l'inquiétude, celle des résolutions relatives aux droits
de l'homme est à la fois nettement plus grave et plus
préoccupée. L'Assemblée générale, reprenant
les conclusions de la Commission des droits de l'homme et des rapporteurs
spéciaux, ne cesse de dénoncer, au long des années 1990,
la gravité des violations des droits de l'homme au Soudan, en soulignant
d'ailleurs que les autorités gouvernementales ne sont pas seules en
cause et que les parties prenantes au conflit civil doivent trouver une
solution qui permette à la population soudanaise de
bénéficier des droits de l'homme et des libertés
fondamentales.
Nous remarquons que, malgré les prises de positions
constantes de l'Assemblée générale, la situation des
droits de l'homme, est loin de s'améliorer et s'aggrave au fil des
années.
Les résolutions de l'Assemblée
générale ne sont ainsi qu'une longue litanie
d'inquiétudes, de préoccupations et d'indignations, sans
véritable effet concret sur le terrain.
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