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Le processus de démocratisation au Maroc et en Tunisie du printemps arabe à  aujourd'hui (2015).

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par Omar Khyari
Université Libre de Bruxelles - Mémoire 1 - Science politique 2015
  

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III/ Analyse de la situation au Maroc et en Tunisie :

A- Le cas Maroc :

Le Mouvement du 20 février au Maroc a été un échec car le régime c'est maintenu sans particulièrement vacillé. Notre but est de comprendre en quoi l'organisation politique du Maroc dans un premier temps et celle de la vie social ensuite n'ont pas permis a ce mouvement de protestation de prendre de l'ampleur et de disparaitre après l'adoption de la nouvelle constitution en 2011.

D'abord, avant le Printemps Arabe le fonctionnement du pays voulu par les dirigeants s'inscrit dans la pensée de Joan Nelson, 48a savoir un développement économique caractérisé par une participation politique réduite de manière temporaire.

Mais après le Printemps Arabe, le Roi fit soumettre une nouvelle Constitution lors d'un référendum populaire. Cette solution peut être analysé dans le cadre de la théorie de Dankwart Rustow 49comme un désir du Monarque de gérer la crise politique et social causé par le Printemps Arabe et par le M20F sur le territoire national car cela constitué un danger contre son pouvoir, plutôt qu'une réelle volonté d'instaurer un régime démocratique. En effet, la « démocratie » effraye les dirigeants politique ainsi que le Roi 50car il y a le sentiment que la population n'est pas encore prête a décider de son avenir et que la situation pourrait être difficile. (nous reviendrons sur cela dans le cadre de l'analyse de Martin Seymour Lipset). C'est de manière pratique ce que Przeworski décrit comme 51« le fort degré d'incertitude qui accompagnent la démocratisation ».

48

Voir Chapitre 1

49Rustow Dankwart, « Transitions to Democracy : Toward a Dynamic Model », Comparative Politics 2(3), 1970

50Mohsen-Finan, Khadija (2013), « Changement de cap et transition politique au Maroc et en Tunisie », dans Pouvoirs, « Le Maroc », n°145, pp,105-120.

51Adam Przeworski et Fernanco Limongi, « Modernization. Theories and Facts », World Politics,49, janvier 1997, p. 155-183.

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Mais la population a soutenu la décision royal consciente que le Roi était en train d'accepter un compromis quand bien même la Constitution fut qualifié de « pratiquement inchangé » par les partisans du Mouvement du 20 février. Ils appelèrent au boycott du référendum constitutionnel mais le taux de participation (71%) et le fait que l'ensemble de la classe politique appela a voté en faveur du oui (qui emporta 94% des suffrages) leurs fit perdre toute crédibilité et cela montra que le mouvement ne pouvait pas compter sur un soutien populaire massif. 52Après cela, le mouvement de contestation s'affaiblit considérablement et devint rapidement marginal.

Le régime politique du Maroc peut être considéré comme un un régime hybride dans le cadre de la 53définition de Larry Diamond. En effet, le Maroc a plus connu une forme autoritaire de multipartisme qu'une véritable démocratie, et plus précisément le fonctionnement du régime est proche d'un autoritarisme compétitif. En effet, les échéances électorales ne sont pas qu'une simple façade démocratique comme l'on montrer les élections législatives de 2011 qui se sont déroulé dans le respect des règles normatives de la compétition électoral, et les démocraties occidentales ainsi que les observateurs internationaux ont souligné cela.54 Aussi, l55a violence politique du pouvoir central comme moyen de pression sur l'opposition c'est considérablement réduite depuis la participation du PJD a la vie politique et son institutionnalisation légale car ce parti a accepter les règles du jeu politique imposées par les pouvoirs public. Or pour Larry Diamond il est nécessaire que l'Etat permette une liberté d'expression et de mobilisation a l'opposition politique. Le fait d'intégrer les islamistes dans le jeu politique est très important car cela les « responsabilises » et cela permet a l'opposition d'avoir un cadre légal pour s'exprimer ce qui permet de canaliser les mécontentements qui peuvent se manifester dans un cadre démocratique. En ayant une fenêtre d'expression, les

52Wazid, Mohamed et Smaoui, Sélim (2013), « Etendard de lutte ou pavillon de complaisance ? », dans « Au coeur des révoltes arabes », Armand Colin, pp.55-82

53Larry Diamond, « Thinking About Hybrid » Journal of Democracy, 2002

54

Arrach, Abdeljabbar (2012), « Printemps Arabe et Mouvements sociaux au Maroc », dans « Ou va

le Monde Arabe ? », pp.64-73

55Ibid

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opposants au régime n'ont pas besoin de basculer dans la violence pour faire entendre leurs idées. De plus, il n'y a pas de tensions ni de sentiment de revanche des islamistes envers le pouvoir central car la répression policière ne s'est pas abattu sur eux contrairement par exemple au Frères Musulmans en Egypte : ainsi, il n'y a pas de raisons d'entamer une révolution aux résultats incertains.

Aujourd'hui, le PJD dirige le gouvernement et c'est un pas important franchi par le Maroc car c'est la première fois que le pays est dirigé par des islamistes : cela a renforcé la démocratie. 56De plus, les anciens partis de gouvernement ont rejoint les rangs de l'opposition et cela a eu un effet positif pour le fonctionnement démocratique du régime, ces partis ayant connu l'expérience du pouvoir.

Aussi, une remarque importante s'impose. On peut confirmer l'existence d'une forte corrélation entre le coût du changement et le degré d'intégration ou d'exclusion des partis islamistes dans le monde arabe. Les pays qui étaient plus ouverts à la participation politique des islamistes n'ont pas été balayés par le printemps arabe. 57Quant aux pays autorisant symboliquement la participation politique des islamistes, ils n'ont été que modérément touchés. Enfin, les pays dirigés par des régimes répressifs à l'égard des mouvements islamistes comme la Syrie ou la Tunisie ont plongé dans le chaos.

Il est nécessaire de s'intéresser aux comportements des élites, central dans les transitions démocratiques et dans la thèse de Guillermo O'Donnel et de Karl Schmitter. 58D'abord, les élites économiques sous Hassan II ne pouvait se constituer et se maintenir que par la volonté du Prince, elles ont été domestiquer par le Palais. Le Maroc a d'abord privilégié la reproduction des élites, plutôt que l'émergence de nouvelles catégories sociales promues par l'école. D'ou le sentiment d'un Maroc à deux vitesses où il y aurait des gens aisés d'un côté,

56Mohsen-Finan, Khadija (2013), « Changement de cap et transition politique au Maroc et en Tunisie », dans Pouvoirs, « Le Maroc », n°145, pp,105-120.

57Bauchard, Denis (2012), « Le nouveau Monde Arabe : enjeux et instabilités »,

58

Abdelmoumni, Fouad (2013), « Le Maroc et le Printemps Arabe », dans Pouvoirs, « Le Maroc », n

°145, pp. 123-128.

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et des laissés-pour-compte de l'autre. 59Cette image est sans doute un peu caricaturale, car de nombreux dirigeants d'entreprises et cadres moyens ou supérieurs de la fonction publique sont issus de l'école publique.

Aujourd'hui , Il y a une volonté des élites de privilégier un changement dans la continuité, car cela garanti une stabilité économique nécessaire a leur continuité et au bon fonctionnement du pays. Le faible investissement dans le Mouvement du 20 février de cette catégorie de la population s'explique par la volonté d'un processus démocratique dans le cadre de la légalité et surtout graduel mais aussi car ces élites sont très proches du pouvoir. Elles partagent l'idée que la population n'est pas encore prête a connaitre une démocratie a l'occidentales, 60modèle qui n'est pas exportable partout dans l'espace selon Robert Kaplan. L'impôt sur le revenu étant bas afin de lutter contre la corruption, ils ont d'autant plus d'influence que c'est eux qui supportent en grande partie les dépenses de l'Etat. 61De plus, traditionnellement, les notables locaux jouissent d'importants relais au sein de la population, ce qui est décisif lors des élections, les relations interpersonnels en province notamment influent directement sur les votes.

Cette catégorie de marocains, occidentalisée et ayant une culture de la politique, semble partagée les idées de O'Donnel et de Schmitter, 62a savoir que la démocratie ne peut être atteinte que dans le cadre d'une évolution progressive. Il y a l'idée que la démocratie ne s'obtient qu'a travers un processus d'apprentissage et non pas dans la révolution et le sang. Ainsi, durant les événements causé par le Mouvement du 20 février, 63les élites ont pris le

59Ibid

60 Robert Kaplan, « Looking the World in the Eye », The Atlantic Monthly, 288, (5), décembre 2001, p. 68-82.

61

Mohsen-Finan, Khadija (2013), « Changement de cap et transition politique au Maroc et en

Tunisie », dans Pouvoirs, « Le Maroc », n°145, pp,105-120.

62Philippe Schmitter and Karl Terry, « What democracy isÉand it is not », in L.Diamond and Plattner (eds), The global resurgence of Democracy, Baltimore, John Hopkins University, 1993

63Wazid, Mohamed et Smaoui, Sélim (2013), « Etendard de lutte ou pavillon de complaisance ? », dans « Au coeur des révoltes arabes », Armand Colin, pp.55-82

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parti du pouvoir et cela a porté un coup aux envies révolutionnaires car sans le soutien des élites économiques il deviens difficile d'entamer un changement politique majeur dans le cadre de la théorie de la transitologie.

Enfin, le Roi est le Commandeur des Croyants et a ce titre, il détient le pouvoir religieux. Le Mouvement du 20 Février n'a jamais revendiquer la fin de la Monarchie mais le départ de certains collaborateurs du Roi et surtout la démission du gouvernement. 64Le solide lien entre le Trône Alaouite et la religion a permis de canaliser les contestations et de mettre a mal toute tentative révolutionnaire dans le pays car le Maroc est un pays très attaché a l'Islam et aux valeurs traditionnels musulmanes.

L'organisation de la vie politique marocaine qui permet a l'opposition de s'exprimer combiner au fait que l'élite économique et traditionnel du pays s'est tenu au coté du pouvoir central a empêcher le mouvement de protestation issu du Mouvement du 20 février de prendre de l'importance. Egalement, dans le cadre de l'Ecole de la Modernisation, il est aisé de saisir les raisons socio-économiques qui ont induit une protestation de faible ampleur.

Selon Martin Seymour Lipset, fondateur de la théorie de la Modernisation, 65il existe des déterminants socio-économiques qu'il faut atteindre pour pouvoir prétendre a entrer dans la démocratisation .

D'abord, il convient de s'intéresser au rôle de la classe moyenne car « une forte classe moyenne tempère les heurts des extrêmes par le soutien qu'elle accorde aux partis modérés et démocratiques ». Selon une étude du HCP, fondée sur des critères économiques, les classes moyennes au Maroc regroupent 53% de la population, soit 16,3 millions de personnes dont

64Bellal, Youssef, (2013), « L'islam politique au Maroc «, dans Pouvoirs, « Le Maroc », n°145, pp. 71-79.

65Seymour Lipset, « Some Social Requisites of Democracy : Economic Development and Political Legitimacy », American Political Science Review, 53, 1959,

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62,9% vivent en milieu urbain. 66Les classes moyennes étant par nature mouvantes il serait intéressant de connaître leur évolution dans le temps afin de mesurer les impacts des politiques publiques sur leur promotion ou, au contraire, leur stagnation voire leur recul . Le rôle de l'éducation nationale dans la promotion des classes moyennes mérite à cet égard d'être examiné. En France et dans de nombreux pays, la construction et la consolidation de la classe ou des classes moyennes s'est faite par l'école qui a servi de puissant ascenseur social à tous ceux qui, n'ayant pas hérité de fortunes, aspirent à améliorer leur statut social. L'importance de la classe moyenne au Maroc confirme l'affirmation de Martin Seymour Lipset car on observe que l'échec du Mouvement du 20 février est du a son incapacité a capter une large partie de l'opinion public67 alors que dans le même le PJD semble séduire cette partie de la population qui voit un excellent compromis dans ce partage du pouvoir entre le Roi et ses collaborateurs d'un coté et les membres de ce parti islamiste de l'autre. En effet cela sert la recherche d'une stabilité économique et donc d'une amélioration de la condition social cher a la classe moyenne, qui joue un réel rôle politique aujourd'hui. En cela elle ne s'est pas tourner vers les extrêmes tel que le Mouvement du 20 février.

Aussi, il est nécessaire de s'intéresser a l'éducation qui est un facteur de légitimité de la démocratie dans le cadre de la théorie de la Modernisation. 68Le Maroc est passé de 43% d'analphabète en 2004 a 28% aujourd'hui. Suivant les idées de Lipset, il est difficile de mettre en place une démocratie alors même que la population est peu éduquée, car elle sera moins réceptive aux idéaux démocratiques. De fait, avoir une personne analphabète sur trois rend très délicat l'installation et la propagation de normes démocratiques dans les esprits. De ce fait le discours des membres du Mouvement du 20 février a eu du mal a s'installer dans les perceptions collectives de la population.

66

Le Haut Commissariat au Plan est l'équivalent marocain de l'INSEE - http://www.hcp.ma/

Enquetes_r10.html

67

Mohsen-Finan, Khadija (2013), « Changement de cap et transition politique au Maroc et en Tunisie », dans Pouvoirs, « Le Maroc », n°145, pp,105-120.

68

Chiffres fourni par le HCP sur son site officiel - http://www.hcp.ma

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Un autre facteur de légitimité de la démocratie selon Lipset est l'urbanisation de la population. 69La société marocaine est sorti de son carcan historique traditionnel : elle est aujourd'hui largement urbanisé (elle passe de 10% d'urbain en 1970 a 66% en 2015) mais il reste encore plus de 16 millions de ruraux. Le groupe des pays démocratique atteint en moyenne un taux d'urbanisation de 76% et il y a donc un retard a ce niveau pour le Maroc. 70De plus, les campagnes sont un socle de la légitimité hégémonique de la Monarchie et il est nécessaire de maintenir une population plutôt rural (donc peu développé). Ces ruraux, loin des villes, n'ont pas participer au Mouvement du 20 Février et ont jouer leur rôle de soutien traditionnels a la Monarchie, et ils n'adhérent pas aux valeurs démocratiques portés par le Mouvement du 20 février car il n'y se reconnaissent pas.

D'un autre coté, la croissance économique est peu basé sur l'industrialisation car comme on l'a montrer précédemment, 71le pays reste encore très rural et l'Etat mise principalement sur le tourisme et il y a très peu de dépenses en recherches et développement.

Lipset s'est aussi interrogé sur la différence de niveau de vie entre les élites et les classes populaires dans les pays a faible ou moyen développement. car cela induit un clientélisme et une forte corruption ainsi qu'une reproduction des élites. 72Cela empêche d'avoir une administration et une bureaucratie efficace alors que c'est indispensable dans un Etat démocratique. De ce fait, des efforts ont été déployés par le pouvoir qui a octroyé d'importants moyens aux HCP afin de rationaliser l'administration et qui a augmenter la salaire de la majorité des fonctionnaires afin de faire baisser la corruption qui reste un défi majeur aujourd'hui et l'une des causes principales du mécontentement populaire. Ces mesures ont été accueilli favorablement même si elles ne sont pas suffisante a éradiquer ces pratiques anti-démocratique. Néanmoins, le Roi semble prendre la mesure du problème et

69

Ibid

70Abdelmoumni, Fouad (2013), « Le Maroc et le Printemps Arabe », dans Pouvoirs, « Le Maroc », n 145, pp. 123-128.

71Arrach, Abdeljabbar (2012), « Printemps Arabe et Mouvements sociaux au Maroc », dans « Ou va le Monde Arabe ? », pp.64-73

72Seymour Lipset, « Some Social Requisites of Democracy : Economic Development and Political Legitimacy », American Political Science Review, 53, 1959,

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cela conduit a un soutien de la population et surtout des élites a sa politique, préférant une avancée graduelle plutôt qu'un bouleversement induisant une redistribution des pouvoir qui n'est pas certaine de leurs profiter.

La thèse de Lipset selon laquelle un pays n'ayant pas connu un développement économique, social et culturelle suffisant ne peut devenir une démocratie se vérifie dans le cas marocain. Les retards socio-économique sont encore trop importants dans une perspective de démocratisation : le pays est peu industrialisé économiquement, la population encore trop peu éduquée et donc peu inspirer par les idéaux démocratique et enfin la société est faiblement urbanisée. A mesure que le Maroc se modernise, la démocratie progresse car un pas a été franchi avec la nouvelle Constitution, c'est une libéralisation démocratique. Il faut dorénavant passer un cap au niveau socio-économique afin d'entrer dans une période de transition et de consolidation démocratique.

C'est ainsi que nous allons analyser le cas Tunisien dans cette seconde partie avec une méthode similaire a savoir expliquer le bouleversement induit par la Révolution du Jasmin par l'analyse des événements connu par le pays au sein du cadre théorique de notre première partie.

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"L'imagination est plus importante que le savoir"   Albert Einstein