4.2.- Valeurs ajoutées à l'hectare de la
production du
gombo
La production de tout bien, de quelque nature qu'il soit,
implique un minimum d'investissement de capitaux financiers comme non
financiers. Le cas de la culture des produits agricoles, même dans le
contexte actuel de notre agriculture, est manifeste car elle exige un minimum
de dépenses. La production de gombo, nécessite des
dépenses qui constituent des charges ou coûts de production,
lesquels sont de deux ordres : les coûts fixes et les coûts
variables qui représentent les coûts des «input»
directement liés au niveau de production
Les consommations intermédiaires de production à
l'hectare varient d'un arrondissement à l'autre. Le pic est noté
dans l'arrondissement de Kèrou-Centre où la majorité des
producteurs utilisent les intrants (engrais et pesticides). En ce qui concerne
le Produit Moyen Brut (PB), la formule suivante à été
appliqué :
PBi = Quanté Produite par le Producteur i X Prix Moyen
au cours de l'année (26) Pour tout l'échantillon,
le Produit Moyen Bruit s'obtient par la formule :
PB = 205 En 105(PBi - Superf ici emblavée
par le Producteur i) (27)
Tableau 11 : Valeurs ajoutées par hectare
et par arrondissement.
Commune de Kèrou
|
Rubriques
|
Arrondissement de Kèrou-Centre
|
Arrondissement de Kaoubagou
|
Arrondissement de Firou
|
Ensemble de la commune
|
Produit Moyen Brut (PB) en fcfa
|
438 056
|
400 045
|
298 765
|
383 012
|
Consommations Intermédiaires (CI)
|
Engrais
|
72 929
|
60 145
|
25 438
|
54 059
|
Pesticides
|
8 637
|
9 413
|
8 132
|
8 856
|
Semences
|
17 645
|
11 793
|
11 553
|
14 466
|
Pertes estimées en %
|
3,2
|
3,9
|
5
|
4
|
Pertes estimées en fcfa
|
14 018
|
15 602
|
14 938
|
15 238
|
Transport
|
1 200
|
985
|
950
|
1054
|
TOTAL CI
|
114 432
|
97 942
|
61 016
|
93 677
|
VALEUR AJOUTEE (FCFA)
|
323 624
|
302 103
|
237 749
|
289 335
|
Source : Réalisé à partir des
données de l'enquête 2014-2015 au SCDA-Kèrou
L'arrondissement de Firou est celle qui produit le moins le
gombo. Comparé aux autres arrondissements, Firou a une configuration
bien particulière. Ils ne sont pas aussi bien suivis et encadrés
par les animateurs de l'URCoopMA, ce qui fait que la production
maraichère n'y est pas dense. Ils
47
utilisent très peu d'engrais chimiques et ne respectent
pas les bonnes pratiques en matière de production maraichère ;
d'où les pertes. L'analyse approfondie des données
démontre que plus le produit brut est élevé, plus le
coût des consommations intermédiaires l'est tout aussi. On en
déduit alors que malgré l'utilisation des pesticides et engrais
chimiques, les producteurs ne gagnent pas vraiment en productivité. Ce
qui est gagné à la vente est déjà perdu avec
l'achat des pesticides et engrais.
Ces coûts de production deviennent élevés
lorsque la main-d'oeuvre salariée est prise en compte. Dans toutes les
communes, cette main-d'oeuvre salariée est importante. Une analyse de la
structure des coûts indique que la consommation d'engrais est
l'élément qui coûte le plus (44,26%) et ensuite la main
d'oeuvre salariée (19,4%). Cette structure des coûts met en
exergue l'importance de la marge disponible pour le producteur si ce dernier
arrivait à réduire la consommation d'engrais chimiques.
Concernant la main d'oeuvre salariée, la présence d'un coût
de main d'oeuvre salariée au niveau de chaque arrondissement
démontre qu'il existe une certaine spécialisation au niveau de la
main-d'oeuvre, à laquelle l'on a recourt le plus souvent. En d'autres
termes, il existe des personnes qui se sont spécialisées dans
certaines activités et auxquelles les producteurs ont recours en cas de
besoin.
Tableau 12 : Structure des coûts de
production par ha et par arrondissement
Commune de Kèrou
|
Rubriques
|
Arrondissement de Kèrou-Centre
|
Arrondissement de Kaoubagou
|
Arrondissement de Firou
|
Ensemble de la commune
|
Montant (FCFA)
|
0/
|
Montant (FCFA)
|
0/
|
Montant (FCFA)
|
0/
|
TOTAL (FCFA)
|
Engrais
|
72 929
|
44,26
|
60 145
|
44,23
|
25 438
|
30,38
|
54 059
|
Pesticides
|
8 637
|
5,24
|
9 413
|
6,92
|
8 132
|
9,71
|
8 856
|
Semences
|
17 645
|
10,71
|
11 793
|
8,67
|
11 553
|
13,80
|
14 466
|
Pertes
|
14 018
|
8,51
|
15 602
|
11,47
|
14 938
|
17,84
|
15 238
|
Transport
|
1 200
|
0,73
|
985
|
0,72
|
950
|
1,13
|
1054
|
Main d'oeuvre salariée (MOS)
|
31 965
|
19,40
|
22 648
|
16,66
|
13 250
|
15,82
|
23 214
|
Main d'oeuvre familiale (MOF)
|
2 315
|
1,41
|
2 055
|
1,51
|
1 675
|
2,00
|
2 035
|
Main d'oeuvre d'entraide (MOE)
|
5 789
|
3,51
|
3 455
|
2,54
|
2 135
|
2,55
|
3 915
|
Amortissement
|
10258
|
6,23
|
9875
|
7,26
|
5672
|
6,77
|
8725
|
Coût total de production par ha
|
164 756
|
100,00
|
135 971
|
100,00
|
83 743
|
100,00
|
131 562
|
Source : Réalisé à partir des
données de l'enquête 2014-2015, Ibouraima S.A.H.
(2015)
Une analyse critique des résultats vient nous
démontrer que contrairement aux thèses de Dvorak (1992), Falusi
(1996), Okoro (1997) et Savi (2009), la main d'oeuvre (coût de la main
d'oeuvre salariée dans notre cas) n'est pas nécessairement
l'élément le plus coûteux dans la production. En effet, ces
auteurs indiquent que la main- d'oeuvre est l'élément le plus
critique des coûts de production et compte pour 85
48
à 90% des coûts dans les systèmes de
production agricoles africains. Ici les résultats mettent l'achat des
engrais, pesticides et semences comme éléments essentiels des
dépenses. Toutefois, ces thèses ne sont pas si erronées
que ça car, dans le système de production analysé, la main
d'oeuvre d'entraide est très utilisée, suivie par la main
d'oeuvre familiale. Si nous estimons le coût réel de travail
effectué quelque soit la type de main d'oeuvre, effectivement, la main
d'oeuvre serait l'élément le plus coûteux de la structure
des coûts. Mais ici, la réalité est bien différente.
La main d'oeuvre familiale et la main d'oeuvre d'entraide ne sont pas
rémunérées à leur juste valeur. Nous avons juste
considéré la dépense monétaire
(décaissements) effectuée par l'exploitant agricole pour
s'assurer de l'effectivité du travail. Il s'agit entre autre de la
nourriture cuisinée pour accompagner l'équipe venue en aide, ou
les frais de déplacement de certains, etc...
Alors la question reste de savoir si les paysans arrivent
à rentabiliser leur production malgré ces consommations
intermédiaires et investissements en engrais et main d'oeuvre ? Le
résultat net d'exploitation et les divers taux de rentabilité
nous apporteront certainement plus d'éléments
d'appréciation.
Tableau 13 : Compte d'exploitation
Commune de Kèrou
|
Rubriques
|
Arrondissement de Kèrou-Centre
|
Arrondissement de Kaoubagou
|
Arrondissement de Firou
|
Ensemble de la commune
|
Produit Moyen Brut (PB) en
fcfa
|
438 056
|
400 045
|
298 765
|
383 012
|
Total Consommations Intermédiaires
|
114 432
|
97 942
|
61 016
|
93 677
|
VALEUR AJOUTEE (FCFA)
|
323 624
|
302 103
|
237 749
|
289 335
|
Main d'Oeuve salariée (MOS)
|
31 965
|
22 648
|
13 250
|
23 214
|
Résultat Brut d'Exploitation (RBE)
|
291 659
|
279 455
|
224 499
|
266 121
|
Main d'oeuvre familiale (H/J)
|
10
|
17,4
|
12,8
|
13,2
|
Main d'oeuvre d'entraide (H/J)
|
94,1
|
88,6
|
60,8
|
82,1
|
Productivité de la main d'oeuvre familiale et
d'entraide
|
2 802
|
2 636
|
3 050
|
2 792
|
Main d'oeuvre Familiale (MOF)
|
2 315
|
2 055
|
1 675
|
2 035
|
Main d'oeuvre d'entraide
|
5 789
|
3 455
|
2 135
|
3 915
|
Amortissement
|
10258
|
9 875,00
|
5672
|
8 725,00
|
Coût total de production
|
164 759
|
135 975
|
83 748
|
131 566
|
Résultat Net
d'exploitation/ha/an (FCFA)
|
273 297
|
264 070
|
215 017
|
251 446
|
Ratio VA/CI
|
2,83
|
3,08
|
3,90
|
3,09
|
Ratio RNE/CT
|
1,66
|
1,94
|
2,57
|
1,91
|
Source : Réalisé à partir des
données de l'enquête 2014-2015, Ibouraima S.A.H.
(2015)
49
Notons que la main d'oeuvre d'entraide est largement
supérieure à la main d'oeuvre familiale. En
réalité, pour des raisons de simplification de la recherche, nous
aurions pu intégrer la main d'oeuvre d'entraide parmi la main d'oeuvre
familiale. Mais nous avions voulu les séparer afin de refléter au
mieux la réalité. Rappelons que les unités de production
enquêtées travaillent tous autour des bas-fonds et partagent par
petits groupes le même espace et bénéficie de l'appui
technique et financier du même individu qui est soit animateur
maraîcher ou représentant de la CLCAM dans le cas de la
présente recherche. Ces maraîchers ont alors
développé, sous l'impulsion des animateurs, l'entraide. A chaque
moment libre, les propriétaires des parcelles voisines se regroupaient
pour aider. Certaines parcourent des distances plus lointaines pour aider.
Certaines femmes sont acculées par leur mari pour d'autres
activités agricoles, ce qui ne leur permet pas de très bien
s'occuper de leurs planches. L'entraide a permis de surmonter cette contrainte
dans la commune de Kèrou. Le principal avantage de cette main d'oeuvre
comparativement à la main d'oeuvre familiale est sa qualité. Elle
est constituée dans sa quasi-entièreté de maraichers.
Finalement, la main d'oeuvre familiale n'est plus autant utilisée, et
les enfants sont très souvent sur les champs du papa ou à
l'école. Ce qui explique le niveau élevé de la main
d'oeuvre d'entraide.
Ce compte d'exploitation nous permet de lire que la main
d'oeuvre familiale et d'entraide a une productivité de 2.792 francs la
journée de travail, soit un peu plus du double du SMIG béninois
qui est de 1.333 francs CFA pour la journée de travail. En absence de
données de la région de Kèrou concernant la culture du
gombo et même les cultures maraichères, nous avions tenté
une comparaison avec les données existantes sur l'exploitation dans la
vallée du Mono.
En ce qui concerne le résultat net d'exploitation, il
varie considérablement d'une étude à une autre.
Adégbola (2003) trouvait pour la région de Grand Popo, un
résultat net d'exploitation annuel de 989 841 FCFA pendant que Savi
(2009) trouvait un montant de 38 355 FCFA. Il faut toutefois remarquer que les
spéculations sur lesquelles ont portées les études varient
tous autant. Adégbola (2003) a travaillé sur le piment, l'oignon,
la tomate et la carotte, pendant que Savi (2009), lui a travaillé sur le
crincrin. La présente recherche évalue le résultant net
annuel d'exploitation de la commune de Kèrou de 251 446 FCFA.
Le ratio VA/CI démontre que sur toute la commune, la
production du gombo rapporte en valeur ajoutée 3 fois environs le
montant investi durant la production. Le gombo rapporterait donc sur
l'exploitation, trois fois le montant investi. Paradoxalement, c'est à
Firou, où le produit le moins et où l'on utilise le moins les
engrais chimiques que la rentabilité brute est élevé, soit
3 fois le montant investi. Cela s'explique par le fait que
l'élément le plus coûteux est l'engrais. Etant donné
qu'ils n'en n'utilisent que très peu, et que la productivité est
relativement acceptable, les producteurs de gombo de Firou gagnent sur la
marge. Quand au ratio RNE/CT, on en déduit que sur toute la commune de
Kèrou, pour un coût total de 100 FCFA, le producteur
récupèrerait son investissement et gagnerait en
bénéfice 91 FCFA.
50
Les résultats de cette recherche démontrent que
contrairement à l'imagination populaire dominante à Kèrou,
cette culture rapporte énormément. Cela justifie d'une part
l'engouement que les femmes de cette commune y mettent et
l'intérêt accordé par les autorités locales qui
estiment que c'est le meilleur moyen d'atteindre l'autonomisation des femmes de
cette commune.
|
|