ABSTRACT
The objective of this study is to find out what mainly
explain the livestock-in-kind credit performance in Burkina Faso. In others
words, it consists on determining the influencing factors of growth of
livestock transferred by Heifer-In-Trust (HIT) projects in the country. Data
bases are from the survey lead by LANKOANDE and SUMBERG in 2011, and from the
Environment and Sustainable Development Department (ESDD) 2010 data book. The
research question is: what determine livestock positive growth in the hands of
target populations? Analyses of factors determination have been made by probit
model which allowed us to answer research question.
Results show that human capital of beneficiaries,
particularly the education level and the fact to be a woman explain the success
of animal transfer interventions; respectively positively and negatively.
Social capital, through the belonging of beneficiaries to an ethnic group with
a high livestock experience, positively influences the HIT scheme
performance.
Key words:
performance, livestock-in-kind credit, informal and private social safety net,
HIT, probit, human capital, social capital.
1
INTRODUCTION
Le monde connait depuis 2007 une crise multidimensionnelle
(économique, financière, alimentaire et
énergétique) avec son lot de conséquences néfastes
sur les différentes économies et ce, indépendamment des
niveaux de développement des pays.
Dans un tel contexte, les personnes ayant accès
à la protection sociale ont été relativement moins
affectées par la crise et ont pu continuer de contribuer à
l'économie1. Cet état de fait a replacé la
protection sociale au centre des préoccupations à travers
l'adoption par le Conseil des chefs de secrétariats des organismes des
Nations Unies de « l'initiative pour un Socle de Protection Sociale »
(SPF-I) qui a essentiellement deux (02) composantes : les transferts sociaux en
direction des pauvres et vulnérables d'une part, et l'accès tant
géographique que financier aux services publics de base d'autre part.
La protection sociale est une série de mesures
destinées à assister les plus démunis et les plus
vulnérables dans la société et à aider les
individus, les ménages et les communautés à mieux
gérer les risques afin de réduire la vulnérabilité,
améliorer le lissage de la consommation, renforcer
l'équité tout en contribuant à un développement
économique de manière participative. Elle a quatre (04)
instruments : les filets sociaux de sécurité2,
l'assurance sociale (contributive)3, les services
sociaux4, la législation et règlementation
sociale5. Parmi ces instruments de protection sociale, l'emphase est
mise sur les filets sociaux de sécurité. En effet, la composante
« transferts sociaux » du SPF-I fait allusion à ces filets. Le
terme « filet social de sécurité » fait
référence à des programmes de transferts non contributifs
ciblant, d'une manière ou d'une autre les pauvres ou les personnes
vulnérables (GROSH et al., 2008). De plus, ils jouent un quadruple
rôle dans le processus de développement (GROSH et al., 2008) : (i)
un rôle de redistribution des revenus au bénéfice des plus
pauvres et des plus vulnérables, ce qui a des conséquences
positives immédiates sur la pauvreté et l'inégalité
; (ii) un rôle tampon permettant aux ménages de faire de meilleurs
investissements pour le futur (dans le capital humain de leurs enfants et dans
les moyens de subsistance) ; (iii) un rôle de gestion du risque social;
(iv) un rôle d'orientation des choix politiques de l'Etat au profit de la
croissance et de l'efficacité. En termes d'importance, dans la plupart
des pays en développement, les dépenses consacrées aux
filets
1 Organisation des Nations Unies (ONU), 2010 et Agence
Internationale de la Sécurité Sociale (AISS), 2010.
2 Appelés également filets sociaux ou
filets de sécurité.
3 Mécanisme de partage des risques à
travers des cotisations : retraite, assurance maladie, etc.
4 Eau potable, assainissement, soins de santé
et éducation.
5 Définition de WERENNE (2006) : ensemble
des dispositions relatives à l'organisation et aux règles du
travail, au bien-être des travailleurs et de leur famille.
2
sociaux ne représentent que 1 à 2% du Produit
Intérieur Brut (PIB) (GROSH et al., 2008). En Afrique de l'Ouest de 2009
à 2013 la part du PIB orientée vers les filets sociaux oscille
entre 0,9% pour le Bénin et 1,5% pour le Libéria (MONCHUK,
2014).
Il faut noter que sur le plan juridique, le droit à la
protection sociale pour tous (Article 22 de la Déclaration Universelle
des Droits de l'Homme) implique un système de protection universelle.
Pourtant dans le cas de la plupart de pays en développement et partant
du Burkina Faso, il y a un certain nombre de problèmes en termes de mise
en oeuvre. Le premier problème est celui de la contribution, quand on
sait que dans le cas d'espèce de l'Afrique, 90% des personnes ne sont
couvertes par aucune forme de protection sociale, car n'ayant pas les moyens
d'intégrer les systèmes contributifs. Au niveau national, le
diagnostic fait dans le cadre de la préparation de la nouvelle loi
N° 015-2006/AN du 11 mai 2006 portant régime de
sécurité sociale applicable aux travailleurs salariés et
assimilés au Burkina Faso, faisait ressortir un taux de couverture de
seulement 3% de la population. La situation n'a pas beaucoup
évolué de ce point de vue depuis l'adoption de cette loi (FAYE,
2010). Ensuite, cette protection universelle nécessite que l'Etat prenne
en charge les dépenses y inhérentes ; ce qui est hardi, au vu des
ressources financières très limitées de l'Etat. Enfin, le
problème qui se pose est celui de savoir sur quelle (s) base (s) faire
contribuer les travailleurs du secteur informel. Il existe certes l'assurance
volontaire6, dont la Caisse Nationale de Sécurité
Sociale (CNSS) fait la promotion, mais il n'en demeure pas moins qu'elle est
assortie de conditionnalités lourdes pour la majorité des acteurs
du secteur informel.
La protection sociale contributive (assurance sociale),
étant limitée au Burkina Faso, les filets sociaux7,
tels que définis par la Banque Mondiale pourraient constituer un moyen
de protection des populations ne bénéficiant pas des
systèmes contributifs. Lesdits filets sociaux suscitent un
intérêt certain de la part des différents
économistes et chercheurs de la Banque Mondiale. Un certain nombre de
recherches sur leur élaboration, leur mise en oeuvre et leur
suivi-évaluation sont alors menées. C'est dans cet ordre
d'idées qu'une étude a été réalisée
par la Banque Mondiale au Burkina Faso en 2009 sur les filets sociaux.
Cependant, après avoir fait un inventaire des programmes de filets
sociaux, cette étude montre que la portée et la couverture du
système de filets sociaux existant sont trop restreintes. En sus, elle
met l'accent sur l'échelle
6 Régime de sécurité sociale
donnant la possibilité aux travailleurs non-salariés de
s'affilier à la structure formelle en charge de la protection
sociale.
7 Programmes de transferts non contributifs
ciblant, d'une manière ou d'une autre les pauvres ou les personnes
vulnérables (Grosh et al. 2008).
3
plutôt petite et le caractère limité dans
le temps de ce type de programmes (Banque Mondiale, 2011). Cela dénote
de la difficulté de mettre en place un système de filets sociaux
adéquat, équitable, efficient et durable8.
Un regard sur la typologie des filets sociaux de
sécurité nous montre qu'il y a d'une part, les filets sociaux
formels et d'autre part, les filets sociaux informels. La différence
entre les filets sociaux formels et informels réside dans l'existence
d'un appui légal et formel de l'aide par l'Etat (REDDY cité par
PAITOONPONG S., ABE S., et PUOPONGSAKORN N., 2008). Plus
précisément, les filets de sécurité formels sont
ceux qui garantissent légalement que les individus accèdent
à l'appui économique ou social alors que les filets de
sécurité informels fournissent un appui aux individus pour les
aider à atteindre ou à rester au-dessus d'un « niveau de vie
minimum » indiqué, mais sans que cela ne tire son origine d'une
quelconque loi. Les filets sociaux de sécurité informels peuvent
être publics ou privés. Comme exemples de filets sociaux de
sécurité privés et informels, on peut citer les transferts
provenant de membres de la famille, d'amis, de voisins, de membres de la
communauté, et d'institutions volontaristes comme les Organisations Non
Gouvernementales (ONG) et les associations locales (REDDY cité par
PAITOONPONG S., ABE S., et PUOPONGSAKORN N., 2008).
Des études ont montré que les filets sociaux
privés informels étaient spécifiques à chaque pays
et sont donc empreints des caractéristiques socio-économiques des
Etats (RUBIO et SOLOAGA, 2003). En considérant ce postulat, il ressort
que les filets sociaux privés du Burkina Faso sont en relation d'une
part, avec les valeurs de solidarité (soutien dans l'adversité,
aide entre membres d'une communauté, etc.), et d'autre part, avec
l'agriculture et l'élevage vu que le pays est à vocation
agro-pastorale. Il faut souligner que le secteur agricole emploie entre 80 et
85% des actifs. Les résultats de l'enquête Questionnaire
Unifié des Indicateurs de Base du Bien-être (QUIBB)-2007 montrent
également que 82,4% (moyenne) des ménages ruraux pratiquent
l'élevage d'animaux de moyenne ou grande taille et que cette proportion
varie de 67% à 89% selon les régions.
Il est à relever que certains auteurs
considèrent le bétail comme moyen d'existence. En effet, il est
fréquemment reconnu le rôle important du bétail domestique,
allant de l'élevage de poules aux chameaux dans le revenu en milieu
rural africain (ALARY et al., 2011). En tant qu'actif, le bétail peut
être une source d'alimentation plus équilibrée et/ou de
revenu (à partir par exemple de la vente des différents produits
dérivés) et de croissance au niveau du capital (en passant par
8 Certaines des caractéristiques d'un bon filet
social.
4
une augmentation de poids et une reproduction accrue). De
plus, dans les domaines où les services bancaires et d'assurance sont
limités, l'importance du bétail en tant que forme
d'économie (banques mobiles) est souvent mise en relief. En outre,
pendant les périodes de sécheresse ou d'aléas climatiques
dans les zones arides, la vente de bétail sert comme mécanisme de
survie permettant une bonne consommation (FAFCHAMPS et al., 1998).
Par conséquent, il y a au Burkina Faso des associations
volontaristes ayant comme activité le transfert (non contributif) de
bétail aux personnes pauvres et vulnérables. Ce type d'appui est
appelé Heifer-In-Trust (HIT) en anglais, que nous traduirons par le
concept « capitalisation animale »9. Ainsi, la
capitalisation animale peut être considérée en premier lieu
comme un filet social. En effet, elle vise la protection (garantie d'un seuil
minimum) et la promotion sociale (amélioration du revenu et des
capacités), tout en s'intégrant dans une logique de
transformation (renforcement du statut social et des droits des exclus et des
marginalisés). En second lieu, c'est un filet social informel puisque ne
tirant son origine d'aucune loi, et privé en ce sens qu'elle
n'émane pas de l'Etat.
Il faut mentionner que très peu d'auteurs ont
publié des résultats de travaux sur la relation existant entre
capitalisation animale et filets sociaux informels privés dans le cadre
du Burkina Faso. Les auteurs s'étant intéressés à
ce sujet sont LANKOANDE et SUMBERG (2013, 2014). Les deux (02) chercheurs ont
basé leur réflexion sur les projets HIT en tant que vecteurs de
protection sociale. Leur recherche avait pour objectifs de déterminer le
sens d'évolution du bétail des bénéficiaires
d'intervention HIT dans le temps ; et de trouver les facteurs potentiels de
cette évolution. A travers une analyse, les auteurs montrent qu'au sein
de l'échantillon considéré, il y a une certaine
égalité entre la décroissance (37,4%), la croissance
stable (27,1%) et la croissance positive (35,5%). Ils ont mené une
analyse descriptive statistique. Il serait alors intéressant de
compléter l'analyse statistique par une modélisation
économétrique du phénomène de « croissance
positive » du bétail transféré dans le cadre de la
capitalisation animale au Burkina Faso.
Dans ce contexte, la question de recherche est la suivante :
Quels sont les facteurs explicatifs de la performance de la capitalisation
animale en tant que filet social de sécurité privé
informel ? En d'autres termes, qu'est-ce qui détermine la croissance
positive du bétail, une fois celui-ci transféré par les
projets HIT aux populations cibles ?
9 Constitution d'un capital de départ sous
forme d'animaux au profit d'un ménage pauvre en vue de
l'amélioration de ses conditions de vie de manière durable.
5
Il s'agit donc de renseigner les pouvoirs publics sur les cas
de réussite engendrés par l'action des projets HIT, et de
contribuer à l'avancée de la recherche en sciences
économiques, et plus précisément dans ce domaine. C'est
dans ce cadre que s'inscrit la présente étude sur les «
Déterminants de la performance de la capitalisation animale comme filet
social informel privé au Burkina Faso ».
La plupart des études menées dans le domaine des
filets sociaux ne considèrent que les caractéristiques
liées aux différents programmes et projets y intervenant, sans
tenir compte des caractéristiques des bénéficiaires ainsi
que de leur milieu de vie. De plus, ces études, se sont basées
sur des données macroéconomiques, sans vraiment se pencher sur ce
qui se passe au niveau microéconomique.
Des problèmes spécifiques ci-dessus
mentionnés, découlent quatre (04) questions spécifiques
:
y' Quels sont les déterminants de la performance de la
capitalisation animale ayant pour source les bénéficiaires ?
y' Quels sont les facteurs explicatifs de la performance de la
capitalisation animale émanant des projets Heifer-in-trust ?
y' Qu'est-ce qui explique la performance de la capitalisation
animale du point de vue des zones d'interventions ?
y' Quels sont les déterminants de la performance de la
capitalisation animale ayant pour source le milieu social dans lequel vivent
les bénéficiaires ?
Pour répondre à toutes ces questions, l'objectif
général de cette étude est d'identifier les principaux
déterminants de la performance de la capitalisation animale via les
projets HIT au Burkina Faso.
Pour atteindre cet objectif, l'étude se fixe les objectifs
spécifiques suivants :
y' identifier les déterminants de la performance de la
capitalisation animale en relation avec les caractéristiques des
bénéficiaires au Burkina Faso ;
y' déterminer les facteurs explicatifs de la
performance de la capitalisation animale émanant des projets HIT au
Burkina Faso ;
6
y' identifier les déterminants de la performance de la
capitalisation animale liés aux régions d'intervention ;
y' déterminer les facteurs explicatifs de la
performance de la capitalisation animale en relation avec les
caractéristiques du milieu social des bénéficiaires.
Afin d'atteindre les objectifs fixés, les
hypothèses suivantes sont formulées :
Hypothèse 1 : Le capital humain des
bénéficiaires influence positivement la performance des
interventions de capitalisation animale.
Hypothèse 2 : Le capital institutionnel des
projets HIT contribue à la croissance positive des troupeaux des
bénéficiaires.
Hypothèse 3 : Le capital social
constitué par les relations sociales des bénéficiaires
contribue à l'accroissement du bétail reçu.
Hypothèse 4 : Le capital naturel des
régions d'intervention agit positivement sur la performance de la
capitalisation animale comme filet social de sécurité
privé informel.
La suite de l'étude s'organise comme suit : le chapitre
1 présente le cadre théorique sur lequel reposent les analyses ;
le chapitre 2 expose la situation de la capitalisation animale comme filet
social informel privé au Burkina Faso ; le chapitre 3 renseigne sur
l'approche méthodologique, et présente une étude de cas
sur les interventions HIT au Burkina Faso ; le chapitre 4 fait l'analyse
empirique en présentant les résultats d'estimation des facteurs
de la performance de la capitalisation animale. En conclusion, quelques
recommandations sont proposées.
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