4.2.2. Ouverture commerciale et croissance
économique au sein de la SADC-10
La présente étude témoigne d'une
éventuelle relation de causalité entre l'ouverture commerciale
des économies de la sous-région et la croissance de leurs
économies respectives. Il ressort de l'estimation que lorsque nous
considérons les effets des variables invariants dans le temps (cfr
l'estimation des effets aléatoires), toute variation de l'ouverture
commerciale de 1% entraine une variation de la
croissance économique de l'ordre de 3.97
points. Cette significativité statistique nous montre
juste lorsque la région connait une forte intensification de ses
échanges, cela connait des effets positifs sur la croissance
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des économies de la région qui,
bénéficient de l'épanouissement du marché et des
effets induits liés à la spécialisation et
diversifications des biens soumis à l'échange tout en ayant des
retombés sur les économies respectives des pays membres en termes
d'avantages comparatifs.
Dans ce même ordre d'idées, plusieurs autres
études et même la théorie économique tentent de
donner une explication pertinente sur le lien entre ouverture commerciale et
croissance économique.
C'est par exemple le cas des études empiriques qui ont
été faites à propos de l'impact des blocs commerciaux sur
la croissance des pays en développement. Pour Jalles (2012), les blocs
commerciaux régionaux en Asie du Sud et du Sud-Est n'ont qu'un impact
peu visible, voire potentiellement néfaste sur la croissance. Concernant
l'Afrique, Sandberg et Martin (2001) ont conclu que le commerce à
l'intérieur de la SADC avait un impact négatif, encore
qu'insignifiant statistiquement, sur la croissance de la région. En
revanche, Kamau (2010) présente des éléments indiquant que
le COMESA, la CAE et la SADC favorisent la croissance dans la région.
D'autres éléments montrent nettement, à partir de
données concernant la CEDEAO, que les exportations régionales
contribuent à l'augmentation de la productivité, à la
diversification et à la création d'emplois (Von Uexkull, 2012).
Les résultats mitigés concernant l'impact des blocs commerciaux
sur la croissance donnent souvent lieu à deux interprétations
:
- La première consiste à faire valoir, comme
c'est le cas de la plupart des adversaires du régionalisme, que les
blocs commerciaux sont un obstacle à la croissance et qu'une
libéralisation générale est bien supérieure
à une libéralisation préférentielle (Schiff and
Winters, 2003).
- La deuxième, beaucoup plus équilibrée,
est que les blocs commerciaux peuvent contribuer utilement à la
croissance mais qu'en définitive leur impact dépend des
caractéristiques de leurs membres ainsi que de la conception et de
l'application des accords conclus (UNCTAD, 2009).
De plus, la théorie selon laquelle le commerce se
trouve positivement corrélé à la croissance
économique remonte à Adam Smith, qui soutenait que le commerce
permet une spécialisation accrue. La spécialisation permet de
parvenir plus rapidement à des économies d'échelle, en
particulier pour des pays ne disposant que de marchés intérieurs
exigus. Tous les moyens de production d'un pays sont aussi pleinement
exploités grâce au commerce. Les entreprises nationales sont
contraintes d'améliorer leurs technologies du fait de la concurrence
venant des importations. En outre, l'intégration économique plus
poussée avec le monde extérieur favorise l'innovation au travers
de la diffusion de nouvelles technologies provenant de pays plus
avancés.
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Dans la recherche toujours des facteurs explicatifs de cette
relation, certains économistes utilisent des modèles
néoclassiques, qui sont essentiellement des modèles
d'équilibre général, avec des rendements d'échelle
constants ou décroissants, des individus agissant de manière
rationnelle en recourant uniquement aux marchés et sans coûts de
transaction. En pareil cas, la structure des échanges entre pays est
déterminée par les avantages comparatifs.
D'autres économistes emploient des modèles de
Ricardo, dans lesquels l'avantage comparatif prend la forme des
différences technologiques. Dans les modèles Heckscher-Ohlin,
l'avantage comparatif prend la forme des différences en dotations en
ressources.
Le résultat auquel on parvient avec les modèles
néoclassiques est qu'un pays obtiendra des gains statiques de la
libéralisation du commerce, le plus important de ces gains étant
l'efficacité dans l'allocation des ressources. En baissant les
barrières commerciales, un pays fait face aux prix relatifs
internationaux qui induisent une efficacité dans l'allocation des
ressources intérieures aux secteurs présentant un avantage
comparatif, accroissant ainsi la prospérité
générale.
Cependant, Rodrik (1988), Devarajan et Rodrik (1989) et
Krugman (1994) et de nouveau Rodrik (2001), ont mis en doute ces
résultats, arguant du fait que les modèles néoclassiques
ne retiennent que les augmentations du niveau des revenus et que, dès
lors, la libéralisation du commerce peut ne pas conduire à une
augmentation durable du taux de croissance. Ils soutiennent que, dans des
conditions marquées par des économies d'échelle et par une
concurrence imparfaite, l'effet de la libéralisation du commerce sur la
prospérité générale peut être négatif.
Ils pensent ainsi que l'ouverture est probablement une conséquence
plutôt qu'une condition préalable de la croissance.
Pour traiter du problème du lien de causalité,
Fränkel et Romer (1999) n'analysent que l'effet de la composante du
commerce qui ne peut pas subir d'influence de la croissance à court
terme, principalement imputable aux populations, à la superficie des
territoires concernés et aux distances. Ils relèvent que cette
composante entre pour une part significative dans les différences entre
pays, en termes de revenu et de croissance, et laissent entendre qu'il existe
une relation générale entre un volume d'échanges plus
important et une croissance plus forte.
Somme toute, la nature du lien entre le degré
d'ouverture commerciale et la croissance économique est souvent
tributaire des spécificités de chaque pays membre. Les
possibilités pour un pays de pouvoir se spécialiser dans un
secteur productif lui offre des avantages comparatifs énormes au sein de
la région et lui confère un marché très
épanoui pour l'élargissement de ses échanges. Les
différences de dotation en facteurs et la structure de chaque
économie sont un facteur déterminant des effets
prévisibles sur la croissance de son économie.
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Le défi auquel la SADC doit faire face consiste, par
conséquent, à diversifier et intensifier les échanges
intra-régionaux en les portant à des niveaux similaires à
ceux des autres CER en dehors du continent, notamment en Amérique latine
et en Asie. Pour ce faire, les États membres doivent approfondir,
harmoniser et libéraliser leur environnement commercial, tout en
allégeant les contraintes inhérentes à l'offre, notamment
la quasi-inexistence d'infrastructures de liaison, qui limitent les
échanges intra-SADC. Cependant, au sein de la sous-région, il
semble n'exister aucun lien entre les échanges commerciaux et
l'intégration, aux plans tant régional que mondial. Les
résultats issus du modèle à effets fixes individuels en
disent beaucoup plus, où le coefficient associé à
l'ouverture commerciale ne présente aucune signification
statistique.
Conclusion
Dans ce chapitre, l'accent fut mis sur la présentation
des résultats de notre analyse. La première partie de ce chapitre
fut la présentation des résultats d'estimation.
Ainsi, sur base des méthodes retenues dans l'analyse,
il ressort que la spécification d'un modèle d'ensemble n'a pas
donnée des résultats satisfaisant tel que l'a
témoigné le test de Fisher ayant servi de choix entre une
spécification du modèle à effets fixes et celui
d'ensemble. Le test a présenté l'existence d'une
hétérogénéité entre les pays,
témoignant ainsi en faveur d'une spécification à effets
fixes individuels.
Par la suite, nous passons à une estimation conjointe
modèle à effets fixes et à erreurs composées ou
effets aléatoires. Certes, le test d'Housman réagissait en
défaveur d'une spécification à erreurs composées
mais les résultats de ce dernier modèle entant plus efficaces,
nous avons retenu les résultats de deux méthodes afin de bien
cerner les contours liés aux aspects de l'intégration
économique régionale.
De ce fait, les résultats issus de la
spécification du modèle à effets aléatoires
montrent une existence de lien positif de causalité entre l'ouverture
commerciale et la croissance économique où toute variation de
l'ouverture commerciale de 1% entraine une variation de la croissance de
l'économie de la région de l'ordre de 3.97 points ; les IDE ne
présentent qu'un effet statistiquement non significatif au seuil de 5%
et ses effets très marginaux, ne sont prévisibles qu'au seul
seuil de 10% montrant ainsi que toute variation positive des flux d'IDE
entrants d' 1% n'entraine qu'une variation positive de la croissance des
économies de la région de l'ordre de 0.36 points ; une situation
qui pourrait s'expliquer par l'endogénéité des IDE face
à la croissance, un aspect dont on a pas pris compte dans cette analyse.
En dehors de la population, les autres variables de contrôles
présentent une influence significative sur la croissance de
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la sous-région et le développement financier n'a
présenté que d'effets négatifs sur la croissance
contrairement au signe escompté. Cet effet négatif sur la
croissance peut s'expliquer par plusieurs raisons :
(hétérogénéité des pays en matière de
développement financier, la non linéarité de la relation,
la présence d'un effet seuil, etc.).
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