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Partis politiques et processus démocratiques en République Démocratique du Congo

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par Emmanuel MUKENDI KENNEDY
Université de Lubumbashi - Licence en Sciences Politiques et Administratives  2014
  

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2. De 1965 à 1990

La prise du pouvoir par le Haut Commandement Militaire bouleversa l'ordre politique précédent, le pays avait désormais un caractère unitaire, où les provinces n'étaient plus que de simples circonscriptions administratives, il y en avait huit au total, outre la ville de Kinshasa.

Ce faisant, le Haut commandement Militaire instaurait un régime présidentiel, avec un chef de l'Etat élu pour sept ans et nanti d'une large autonomie à l'égard du pouvoir législatif. Le gouvernement qu'il nomme et révoque ne doit pas obtenir d'investiture devant l'Assemblée nationale. Il peut simplement faire l'objet de questions orales ou écrites, de contrôle par des commissions d'enquête, d'avertissements et de remontrances (art.32)

Pendant cette période, la prépondérance du pouvoir exécutif est telle que les textes législatifs qui seraient intervenus en dehors des matières qui lui sont réservées par la constitution pourraient être modifiés par ordonnances, après avis de la cour constitutionnelle (art.47).

Comme en 1964 et 1960, l'Assemblée nationale peut habiliter le président de la république à prendre par ordonnances-lois des mesures qui sont du domaine de la loi.

Le pouvoir judiciaire a une position moins forte dans la constitution de 1967. Le chef de l'Etat peut en fait déplacer les hauts magistrats par une nouvelle nomination. En outre, la proclamation de l'état de siège ou d'urgence a pour seul effet spécifique de permettre la substitution, en matière répressive, des juridictions militaires aux cours et tribunaux (art.58).

A partir de l'année 1970, la situation institutionnelle se durcit davantage. En effet, La loi no 70-001 du 23 décembre 1970 consacra le Mouvement Populaire de la Révolution comme institution suprême de la République. Toutes les autres institutions lui étaient subordonnées et étaient soumises à son contrôle.

Par modification de l'article 4, le MPR devenait en outre le seul parti politique de la République. Il en découlait qu'il n'y avait dès lors plus qu'une seule candidature aux élections présidentielles (art.21).

L'innovation essentielle était cependant que « le MPR est la nation Zaïroise organisée politiquement » (art. 29). Tout Zaïrois en est donc membre (art.8), il en résulte une nouvelle théorie de la légitimité. Le pouvoir, qui émane du peuple, est exercé, aux termes de la constitution, par les organes du MPR, le président du Mouvement Populaire de la Révolution est de droit président de la République (art. 9) et détient la « plénitude du pouvoir » (art.30). Quoique le conseil Législatif n'ait pas été mis en cause, on comprend que le président de la République n'ait désormais plus besoin de son habilitation pour promulguer des Ordonnances-lois en dehors des sessions parlementaires. Le texte ne l'explicite cependant pas, disant seulement que le Président « exerce le pouvoir de légiférer avec le concours du conseil Législatif » (art.37).

Le bureau politique et le Congrès (du MPR) sont par la même loi introduits dans la constitution, au dessus des trois pouvoirs traditionnels. Le bureau politique est appelé « l'organe de conception, d'inspiration, d'orientation et de décision du MPR » (art. 44). Il comprend alors 30 membres nommés par le président de la république, qui ne peut cependant procéder au changement de plus du tiers d'entre eux pendant un mandat.

Le pouvoir du président de la république est ainsi considérablement renforcé et il ne peut être mis en cause que pour déviationnisme (art.30). Pour le compenser, son mandat est réduit de 7 à 5 ans et il n'est renouvelable qu'une fois (art.31). Mais les restrictions qu'on vient d'énumérer ne s'appliquent pas au président fondateur.

Le conseil législatif n'a plus dans la constitution de 1974 de compétence propre, autre que le vote du budget à la session d'octobre, la plénitude du pouvoir ayant été attribuée au Président de la République. Le nombre de ses membres est en outre réduit de moitié, les élections devant dès lors se faire à raison d'un commissaire du peuple pour 100.000 habitants.

Le pouvoir judiciaire est aussi intégré au MPR sous le nom de « conseil judiciaire » (art.66), il est constitué de l'ensemble des cours et tribunaux.

Par la suite, La loi no78-010 du 15 février 1978 intégra dans la constitution une série importante de réformes, qu'inspiraient à la fois le souci de renforcer l'autorité du Président Fondateur et le vent de démocratisation qui souffla sur la République après la première guerre du Shaba.

La loi de 1978 abandonna la reconnaissance au Président du MPR de la plénitude du pouvoir. Mais elle lui attribua explicitement un large pouvoir législatif : « Le Président du MPR peut, lorsque le Conseil Législatif n'est pas en session et en cas d'urgence, prendre par ordonnance loi des dispositions qui sont normalement du domaine de la loi » (art.41).

Le rôle personnel du Président Fondateur est particulièrement renforcé par des dispositions spéciales qui lui permettent notamment de réorganiser le Bureau Politique et de proposer une révision de la constitution sans avoir à consulter aucun organe ni à se conformer à aucun avis préalable. Le mandat présidentiel est, par ailleurs, à nouveau porté à sept ans et la limitation du droit au renouvellement de ce mandat est levée, la réception des candidatures étant laissée à la discrétion du Bureau politique dans le cadre de la loi.

Les éléments de démocratisation sont l'introduction de deux membres élus par région au Bureau politique et le retour à une plus nette séparation des pouvoirs.

Dans la constitution de 1978, le conseil législatif n'a pas plus que dans celles de 1967 et 1974, le pouvoir de censurer le conseil exécutif, mais le président ne dispose plus du pouvoir de dissoudre le conseil législatif avant la fin de la législature. Cette restriction ne s'applique cependant pas au président fondateur (art.110).

Le pouvoir législatif a de nouveau une compétence définie, en des termes à peu près identiques à ceux de 1967 (art.46). Mais le caractère limitatif de l'énumération de ses compétences est renforcé par le fait qu'aucun « avis de la Cour constitutionnelle »53(*) n'est plus requis pour que des ordonnances puissent modifier des lois qui seraient intervenues en dehors des matières indiquées.

Le rôle du Conseil Législatif est par ailleurs renforcé par le pouvoir de contrôle qui lui est reconnu non seulement sur le Conseil Exécutif, mais également sur le Conseil judiciaire et sur les services publics de l'Etat (art 84). C'est sur cette base qu'eurent lieu les grandes interpellations télévisées de 1980-1981 des P.D.G. de la SOZACOM, d'AIR-ZAIRE, de KILO-MOTO, de la S.N.C.Z. et de l'OZACAF.

L'immunité parlementaire était aussi mieux assurée, dans la mesure où les membres du Conseil Législatif ne pouvaient plus être poursuivis ou arrêtés, en dehors du cas de flagrant délit, sans l'autorisation du Conseil lui-même, soit de son ensemble pendant les sessions, soit de son Bureau entre les sessions.

Le pouvoir du Conseil Exécutif est aussi quelque peu renfoncé par l'instauration dans la constitution d'un Premier Commissaire d'Etat. C'est à lui que revient la proposition des autres membres de l'équipe gouvernementale. Il est cependant spécifié dans l'Exposé des motifs que « sa mission est exclusivement de veiller au respect et à l'application par tous les Commissaires d'Etat des directives présidentielles ».

Une innovation état aussi introduite dans le pouvoir judiciaire. La loi de 1978 instituait à la tête du Conseil judiciaire un Président permanent, choisi parmi les magistrats, qui devait désormais remplir les fonctions de Ministre de la Justice.

La loi n°80-012 du 15 novembre 1980 introduisit une modification de taille dans la constitution : la création du Comité Central. Composé de membres nommés et relevés, le cas échéant, de leurs fonctions par le Président du M.P.R., le Comité Central recevait les prérogatives anciennement dévolues au Bureau Politique, alors composé d'une majorité de membres élus. Il devenait l'organe de conception, d'inspiration, d'orientation et de décision du Mouvement Populaire de la Révolution (art. 60). A ce titre, il allait prendre une place considérable dans la vie nationale, enjoignant par Décision d'Etat au Conseil Législatif et au Conseil Exécutif de prendre les membres qui lui semblaient utiles (art. 64). Simultanément, un éphémère comité Exécutif du M.P.R. était chargé de coordonner les branches spécialisées du Parti (art. 93).

La loi n°82-004 du 31 décembre 1982 supprima le Comité Exécutif du M.P.R. et remplaça l'appellation « Commissaire Politique » par celle de « Membre du Bureau Politique ». Elle modifia en outre le calendrier des élections législatives de manière à situer les élections juste avant la session budgétaire d'octobre. Le texte révisé issu de cette loi à été publié sous le titre de « Constitution de la République du Zaïre» (mise à jour au 1er janvier 1982).

La commission Permanente de Discipline créée au sein du Comité Central dès sa première session eut un rôle beaucoup plus important. Elle contribua à renforcer le rôle dirigeant du Parti, en sanctionnant de nombreux cadres pour manquement à la discipline. Les premiers frappés furent les 13 parlementaires impliqués dans ce qu'on appela le complot de la Saint Sylvestre, le 31 décembre 1980.

En somme, la situation institutionnelle qui prévalait de 1965 à 1990 peut se résumer avec acuité par la résolution de politique générale adoptée au cours du 3ème Congrès ordinaire du M.P.R., qui s'était tenu à la N'Sele du 6 au 11 décembre 1982, résolution dans laquelle il était affirmé notamment que :

1°) Le Mouvement Populaire de la Révolution est l'unique Institution de la République du Zaïre :

2°) Le Mouvement Populaire de la Révolution est la Nation Zaïroise organisée politiquement ;

3°) Le Mouvement Populaire de la Révolution est un Parti-Etat et, en tant que tel, il est l'unique source de pouvoir et de légitimité au Zaïre...

La décision elle-même proclamait que « le M.P.R. commande et oriente l'Etat, qui est devenu son instrument pour la réalisation de ses objectifs ». Elle soulignait que tous les cadres de la Nation étaient dès lors avant tout des cadres du M.P.R.

3. De 1990 à 1997

En 1990, Mobutu subit une pression populaire qui demanda coute que coute la formation d'un gouvernement parlementaire. Cette demande obligea Mobutu d'abolir le système de parti unique. Une conférence nationale souveraine sera organisée dans la suite. A la fin de celle-ci, une constitution provisoire fut adoptée. La révision constitutionnelle portée par la loi n° 90-002 du 5 juillet 1990 soit plus de deux mois après le discours de rupture du 24 avril 1990, le pouvoir judiciaire est réhabilité en tant que pouvoir traditionnel aux côtés de deux autres, le législatif et l'exécutif. Cette constitution prévoyait la réintégration de la séparation des pouvoirs ainsi qu'une formule pour le partage équitable du pouvoir.

Après plusieurs négociations et compromis Mobutu et Tshisekedi devinrent co-premier ministres. Ce compromis stipulait que Mobutu reste Président pendant une période de transition de 2 ans, mais cette fois-ci dans un rôle symbolique plutôt qu'exécutif. La formule « le Président règne mais ne gouverne pas ». Un parlement fut également mis en place. Cependant, cet arrangement ne dura pas, car Mobutu renvoya Tshisekedi et son gouvernement. En 1993, Mobutu réintroduit l'ancienne constitution et rassembla son ancien parlement. Ce conflit aboutit à la duplication des institutions politiques : deux gouvernements, deux parlements et deux monnaies coexistèrent au Zaïre. Cette impasse politique fut finalement résolue après compromis. Un parlement provisoire sera mis en place.

En 1995, le parlement provisoire mit en place une commission électorale comprenant 44 membres : 22 de l'opposition et 22 membres pro-Mobutu. Un projet de loi électoral fut publié en mars 1997. Il proposa un système de victoire par majorité absolue pour les élections présidentielles et un système pluralitaire pour le conseil législatif national. Les électeurs devaient s'inscrire auprès de leurs commissions électorales locales qui établissaient une liste des électeurs, mais le processus fut interrompu lors de la guerre de 1997.

* 53 Constitution de 1967 (format numérique).

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"Piètre disciple, qui ne surpasse pas son maitre !"   Léonard de Vinci