2.3.2. Les limites liées
à la délicate appréciation du risque fiscal
Lorsque les règles sont précises, qu'elles
portent sur des obligations de forme ou même de délai, leur
contrôle ne soulève aucune difficulté.
Dans d'autres cas en revanche, la
généralité du texte, l'évolution continue de la
législation fiscale et, en conséquence, sa complexité
compromet la possibilité de définir un ensemble de
critères objectifs permettant de caractériser
l'irrégularité ou l'absence d'irrégularité.
En effet, le caractère régulier ou
irrégulier au regard du droit fiscal est alors partiellement fonction de
l'appréciation du vérificateur ou de l'auditeur fiscal. La
détermination du pourcentage au-delà duquel l'entreprise franchit
le pas qui sépare la légalité de
l'illégalité est une affaire d'appréciation, relève
du jugement personnel du vérificateur ou de l'auditeur fiscal.
L'auditeur fiscal peut au plus y déceler une zone de
risque et attirer l'attention de l'entité auditée sur l'existence
d'une source possible de redressement, sauf cas particulièrement
significatifs, il lui est difficile d'émettre un avis
définitif.
L'auditeur fiscal n'a pas de pouvoir pour sonder la
conscience, ou parier sur la psychologie d'un vérificateur fiscal.
En définitive, force est de constater que la
pluralité des prescripteurs et la diversité de leurs attentes et
de leurs préoccupations conduisent à un éventail des
missions d'audit fiscal très étendu. Cet audit fiscal qui
revêt une importance particulière dans la mesure où il
constitue une pièce maîtresse dans l'élaboration du
diagnostic fiscal de l'entreprise.
En effet, pour une entreprise en difficulté soucieuse
d'élaborer un plan de redressement, il est primordial de rechercher si
les efforts qu'elle envisage de déployer ne risquent pas d'être
remis en cause par l'apparition d'un risque fiscal. Or le fait de
négliger les tâches administratives et juridiques ne peut que
contribuer à l'installation du risque fiscal. Là aussi, l'audit
fiscal se révèle un outil incontournable pour éviter une
déperdition des efforts fournis pour assurer la croissance de
l'entreprise.
Le contrôle contractuel de la régularité
dans le cadre d'une mission d'audit fiscal se veut ainsi, pour reprendre les
termes de CHADEFAUX (1987) (Président du jury national du diplôme
d'expertise comptable en France depuis 2010), à la fois pathologique et
préventif. Il est pathologique en ce sens qu'il porte sur une situation
passée. En matière fiscale, un contrôle effectué sur
une situation passée ne constitue pas vraiment un handicap. En effet le
contrôle exercé par l'administration fiscale, qui est la source du
risque, repose lui même sur l'examen d'une situation passée. En
outre, les contrôles à posteriori ont le mérite de mettre
en lumière des irrégularités que l'entreprise est encore
en mesure de rectifier, sans préjudice de sanctions. Même si dans
certains cas, il n'est plus possible de réparer les erreurs commises, il
est utile pour l'entreprise de repérer ces erreurs ne serait ce que pour
pouvoir se préparer au contrôle fiscal et réfléchir
sur les éléments de défense qu'il pourra invoquer.
Par ailleurs, l'audit fiscal constitue un moyen donné
à l'entreprise et à ses partenaires de ne plus laisser à
l'administration le privilège de détenir la vérité
fiscale de l'entreprise parce qu'en dehors du contrôle fiscal
diligenté par l'administration, l'audit fiscal est le seul type de
mission permettant de se renseigner sur le risque fiscal encouru par
l'entreprise. En outre, l'utilité des conclusions formulées
à l'issue d'une mission d'audit fiscal dépasse largement le cadre
strictement fiscal. Les liens étroits qui existent entre
fiscalité et finance permettent aux dirigeants d'entreprises
d'évaluer les retombées financières des risques
décelés par les auditeurs et de prendre les mesures
destinées à faire face à la réalisation du
risque.
La notion de risque fiscal, la règle fiscale et
l'audit fiscal sont des notions étroitement liées, d'où la
nécessité pour l'auditeur de les maitriser afin de mener au mieux
sa diligence.
|