Paragraphe I : les procédures législatives
et réglementaires
Synonyme de procédés, les procédures
renvoient à une « suite d'opérations effectuées
selon un processus méthodique »23. Evoquer les
procédures législatives et réglementaires d'application
des instruments juridiques revient à analyser les procédés
de ratification d'une part (A), et les procédés
d'exécution d'autre part (B).
A. Les procédés de ratification
La ratification est une étape de la procédure de
conclusion d'un traité. C'est le document par lequel le Chef de l'Etat
ou toute autre autorité compétente confirme la validité de
la signature que son plénipotentiaire a apposée au bas d'un
traité24. La procédure de
23 Dictionnaire ENCARTA, op. cit.
24 Blaise Freddy NGUIMBI, L'impact du droit
international de l'environnement sur le droit national congolais,
mémoire, Master DICE, Université de Limoges, 2006, mémoire
online.
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ratification des traités n'est pas totalement
régie par le droit international public, il revient donc à chaque
Etat d'en préciser le régime. Ainsi, on peut distinguer trois
(03) systèmes de ratification : le système de compétence
exclusive de l'exécutif, le système de compétence
exclusive du législatif et le système mixte. C'est ce dernier
système que le Cameroun a adopté. En effet, suivant l'article 43
de la Constitution camerounaise, « le Président de la
République négocie et ratifie les traités et accords
internationaux. Les traités et accords internationaux qui concernent le
domaine de la loi, défini à l'article 2625 ci -
dessus, sont soumis, avant ratification, à l'approbation en forme
législative par le Parlement ». Ainsi, il ressort clairement
de cette disposition que la ratification des traités incombe au Chef de
l'Etat, mais le parlement est mis à contribution (pour approuver ledit
traité) lorsque l'objet de ce dernier relève du domaine du
pouvoir législatif dont le parlement en est l'incarnation. Après
ratification, l'instrument juridique international doit être
incorporé dans l'arsenal juridique camerounais, pour être
placé sur un pallier en dessous de la Constitution et au-dessus des
lois26 ; on dit alors que le traité est infra constitutionnel
et supra législatif.
Le Cameroun, comme la plupart des pays francophones est de
tradition moniste27 avec primauté du droit international.
Cela signifie qu'après ratification d'un traité, les dispositions
de celui-ci peuvent être directement invoquées par un justiciable
devant un tribunal camerounais, sans que le contenu de ce texte soit transcrit
dans un instrument juridique national (loi ou règlement). C'est en
réalité ce que le juge administratif camerounais a
admis28. Cette hypothèse est valable lorsqu'il s'agit des
traités self executing, c'est-à-dire des traités
suffisamment clairs et précis, prévoyant directement au
demeurant, des droits et obligations à l'endroit des
justiciables29. Cependant, « les normes de
conventions-cadres sont
25 Les changements climatiques ne sont pas
clairement définis par l'article 26, comme relevant du domaine de la
loi, contrairement au régime des ressources naturelles (al. d-5).
Cependant, le régime des droits fondamentaux (al. a) auquel appartient
le « droit à un environnement sain » proclamé
dans le préambule de la constitution, relève du domaine de la loi
; le climat faisant partie de l'environnement, on peut aisément
déduire que sa protection relève du domaine de la loi.
D'ailleurs, le législateur camerounais a toujours reconnu sa
compétence dans ce domaine. Ainsi, au cours de la session parlementaire
de juin 2016, l'Accord de Paris adopté le 12 décembre 2015 et
signé par le Cameroun le 22 avril 2016, a été soumis au
parlement pour approbation avant sa ratification par le Chef de l'Etat.
26 Voir les articles 44 et 45 de la Constitution du
Cameroun.
27 Le monisme est avec le dualisme les deux grandes
théories qui s'affrontent sur des questions d'application dans l'ordre
interne du droit international.
28 Confer l'Arrêt CFJ-CAY, 8 juin 1971 dans
l'affaire Compagnie Commerciale et Immobilière Africaine des Chargeurs
Réunis c. Etat du Cameroun. Dans cet arrêt, le juge énonce
: « considérant que les conventions internationales constituent
les sources de droit interne, que leur violation peut être
invoquée à l'appui d'un recours devant le juge administratif
» Voir Maurice KAMTO, « Rapport général
introductif », in Michel PRIEUR (dir), La mise en oeuvre nationale du
Droit International de l'Environnement dans le pays francophones, Limoges, PUL,
2003, pp. 9-41 (spéc. p.22).
29 La Cour Permanente de Justice Internationale
(ci-après : « CPJI ») a reconnu les tribunaux nationaux
peuvent statuer sur l'exécution des accords internationaux. Voir Cour
Permanente de Justice Internationale, Avis
rarement self-executing, l'intervention des
législateurs est indispensable pour leur mise en oeuvre
»30. Ces mesures permettent l'exécution des
instruments des obligations contenues dans les instruments juridiques
internationaux.
S'il existe les mécanismes de réception, qu'en
est-il des mesures d'exécution ? B. Les procédés
d'exécution
En matière de lutte contre les changements climatiques,
plusieurs procédés sont mis à contribution pour
l'application des instruments juridiques internationaux y relatifs. Qu'il
s'agisse des lois, règlements, politiques et même des
programmes.
En ce qui concerne les lois, il convient de relever que, pour
l'instant, il n'en aucune spécifiquement dédiée à
la lutte contre les changements climatiques au Cameroun. Cependant, la
Loi-cadre relative à la gestion de l'environnement au
Cameroun31 consacre une section à la protection de
l'atmosphère32 dans l'optique de prévenir la
production des GES. Par ailleurs, la loi relative à la gestion des
forêts33 contribue également, de manière
indirecte à la lutte contre les changements climatiques. Cette loi
intervient indirectement dans la mesure où elle vise la protection et la
conservation des forêts, lesquelles constituent des puits de carbone.
Celui-ci est un GES, d'ailleurs l'un des plus importants.
Quant à l'aspect réglementaire, il existe
quelques décrets et arrêtés. A titre d'exemple, l'on peut
citer les décrets portant création de certaines institutions
compétentes dans la lutte contre les changements climatiques. C'est le
cas du Décret n° 2009/410 du 10 décembre 2009 portant
création, organisation et fonctionnement de l'Observatoire National des
Changements Climatiques (ci-après : « ONACC »). Par
ailleurs, on peut évoquer le Décret n°2008/064 du 04
février 2008 fixant les modalités de gestion du Fonds National de
l'Environnement et du Développement Durable. Ensuite, il convient de
noter le Décret n°2011/2582/PM du 23 août 2011 fixant les
modalités de protection de l'atmosphère.
Pour ce qui est des politiques et programmes relatifs à
la lutte contre les changements climatiques, on constate que l'exécution
des normes internationales relatives à la lutte contre les changements
climatiques se fait par des politiques et programmes environnementaux d'une
part, et à travers des politiques et programmes économiques
d'autre part. Au sujet du premier groupe, le Plan National de Gestion de
l'Environnement (ci-après : « PNGE »),
Consultatif sur la compétence des tribunaux de DANTZIG
(réclamations pécuniaires des fonctionnaires ferroviaires
DANTZIKOIS passés au service polonais contre l'administration polonaise
des chemins de fer), Publication de la CPJI, Série B n°15, le 03
mars 1928, pdf, 49p.
30 Maurice KAMTO, op. cit. p.24
31 Loi n°96/12 du 5 août 1996 sur la
gestion de l'environnement.
32 Il s'agit de la section I du chapitre III.
L'atmosphère est en réalité une couche de l'espace
déterminante pour le climat. Car elle est composée de gaz qui
constituent le phénomène climatique.
33 LOI N°94/01 du 20 janvier 1994 portant
régime des forêts, de la faune et de la pêche.
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élaboré en février 1996 est une boussole
pour le Cameroun en matière de gestion de l'environnement. La lutte
contre les changements climatiques y figure, certes pas de manière
suffisante, mais l'on peut observer des mesures de conservation et de
protection des forêts, lesquelles sont importantes à la
stabilité du climat. Ce document, fait également allusion
à la protection de l'atmosphère. Quant au second groupe, il
convient de relever que dans le Document de Stratégie pour la Croissance
et l'Emploi (ci-après : « DSCE »), le programme de
développement du Cameroun jusqu'en 2035, le Gouvernement camerounais
intègre la lutte contre les changements climatiques dans la
stratégie de développement économique et social y
énoncée. Ainsi, le paragraphe 528 énonce que leur examen
se fera « dans la phase de planification comme dans celle de la
programmation et de la budgétisation ».
En somme, les procédures législatives et
règlementaires marquent la volonté du Cameroun d'appliquer les
instruments juridiques internationaux de lutte contre les changements
climatiques, cette volonté est accentuée par les
procédures institutionnelles.
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