Les adblockers sont-ils une chance ou un danger pour la publicité en ligne ?( Télécharger le fichier original )par Sylvain Chadenas ESCEM - Master 2 Marketing Etudes et Web 2016 |
2. UN IMPACTÉNORMESUR LES REVENUS PUBLICITAIRESOn estime à 21,8 milliards de dollars les pertes liées aux bloqueurs de publicité pour les sites Internet. Aux Etats-Unis, on déplore 5,8 milliards de dollars de perte en 2014 alors qu'on estime à 10,7 milliards les pertes en 2015 et 20,3 milliards en 2016. Mondialement, les pertes pourraient atteindre 41,4 milliards d'euros en 2016. De nombreux éditeurs de sites, notamment en France, ont déjà porté plainte contre des adblockerscar ils se sentent « extorqués » mais pour le moment sans succès. Le Geste, réunissant plusieurs éditeurs et annonceurs français, a déposé une plainte car la survie de la majorité des sites Internet est liée aux revenus publicitaires. Plus de 50% des campagnes publicitaires sur Internet font perdre de l'argent aux annonceurs16(*), la plupart des publicités n'étant jamais vue. Ce qui est d'autant plus inquiétant que 20% des dépenses publicitaires totales sont consacrées à la publicité en ligne. 3. LES ADBLOCKERS COMME SOLUTION AU CARACTÈRE INTRUSIF DES PUBLICITÉS MAIS PAS SEULEMENTComme nous l'avons vu en troisième partie, l'internaute 2.0 veut avoir un accès à une information gratuite et sans publicité sur Internet. Il ne souhaite pas voir de contenus sponsorisés. Le confort de navigation est aujourd'hui une des principales causes d'utilisation des adblockers. Plus de ¾ des internautes rejettent la publicité ciblée sur leur page Facebook.17(*) Parmi les internautes n'utilisant pas encore de adblockers, 51% d'entre eux affirment qu'ils en installeraient un s'ils estiment leurs données personnelles en danger, 41% si le nombre de publicités en ligne augmente encore. Le recours de plus en plus important à l'option « do not track » des navigateurs (navigation privée) traduit également cette volonté des internautes de ne pas être tracé pour conserver leurs données personnelles. 73% des internautes utilisent des bloqueurs de publicité car les publicités interrompent leurs activités, 55% car les formats sont gênants (couleurs, pops up...), 54% car elles ralentissent leur navigation, 46% car elles ne sont pas pertinentes et 31% par souci de conserver leurs données personnelles.18(*) 4. DES SOLUTIONS PLUS OU MOINS VIABLES ET PÉRENNESIl est possible pour les sites Internet de demander à leurs internautes de désactiver leurs bloqueurs de publicité en leur expliquant les conséquences d'une telle utilisation. Mais rien ne peut contraindre les utilisateurs à le faire. Des sites Internet comme The Guardian ou Bild proposent aux internautes de payer une somme d'argent (2.99€ / mois pour Bild) afin d'avoir un site dépollué des publicités les plus intrusives. Plusieurs manipulations peuvent permettre de contourner les bloqueurs, comme l'a fait TF1 pour la dernière coupe du monde de rugby. Il est possible pour des sites Internet d'intégrer une liste blanche sous réserve de respecter une charte de « publicité acceptable ». Mais le coût peut être très élevé même si Eyeo, la société éditrice du logiciel AdBlock Plus, assure que « 90 % des personnes de la liste blanche ne paient rien et que le critère est le même pour tous ».Ad Block Plus a par ailleurs lancé un comité indépendant afin de redéfinir les conditions de cette charte de « publicité acceptable ». Des experts de la publicité et du marketing participeront à ce comité tout comme le concurrent Ad Block. Google essaie de trouver des solutions alternatives et a notamment lancé une plateforme de financement participatif, Google Contributor, sur laquelle les internautes peuvent payer Google pour pouvoir naviguer sans publicité. Google reverse ensuite cet argent aux sites partenaires. De nombreux annonceurs se tournent vers d'autres formats publicitaires sur Internet que les bloqueurs de publicité ne peuvent pour l'instant pas bloquer. Il s'agit par exemple du native advertising, un format de plus en plus plébiscité car les native ads se fondent dans l'habillage des sites Internet et n'influencent en rien le confort de navigation des internautes. Cependant, ces publicités pourraient être considérées comme déguisées et destinées à « tromper » l'internaute, ce qui ne permettrait pas d'améliorer la confiance des internautes à l'égard des publicités sur Internet. De plus, les bloqueurs travaillent actuellement afin de trouver des solutions pour bloquer ce type de publicité. L'objectif pour AdBlock Plus via sa charte de publicité acceptable est d'inciter les annonceurs à faire des publicités de qualité conformes aux nouvelles attentes des internautes. Proposer des publicités plus originales et moins intrusives semble ainsi être la solution la plus efficace aux problèmes et pourrait satisfaire toutes les parties-prenantes. Le Syndicat des Régies Internet (SRI) va d'ailleurs travailler en ce sens dans les prochaines semaines afin d'enrichir sa charte de bonnes pratiques. Comme nous l'avons vu, plusieurs agences média et régies publicitaires travaillent actuellement sur de nouveaux systèmes de diffusion de publicité. La régie Teads a par ailleurs lancé un « manifeste pour une publicité durable ». * 16 Source : Google * 17 Source : Etude du groupe ETO et Market Audit (baromètre de l'intrusion) * 18 Source : Enquête IAB UK ( juin 2015) |
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