INTRODUCTION GENERALE
Une des questions les plus fondamentales
régulièrement abordées par les chercheurs et
professionnels dans le domaine des organisations accorde de
l'intérêt à la nature de celles-ci, qu'elles soient
publiques ou privées. Domaines de plus en plus concurrentiel, le secteur
public et le secteur privé se chevauchent perpétuellement dans
plusieurs aspects et compétences dévolues à l'Etat,
s'entremêlent et conjuguent leurs efforts dans le cadre de la gestion de
la chose publique, de l'accomplissement des missions d'intérêt
général
Au cours des années postindépendance, en
l'occurrence en Afrique, l'Etat était le principal acteur, l'acteur
central, primordial et même monolithique de la gestion des affaires
publiques. C'était un Etat providence qui se retrouvait à
gérer les questions les plus primaires et élémentaires
telles que l'accès à l'eau potable, à
l'électricité et surtout à l'éducation. Les deux
chocs pétroliers des années 1970 sont venus induire une
réelle crise de l'Etat providence en Afrique dans les années
1980, favorisant ainsi une mutation gestiologique de la chose publique,
relativement à une profonde ouverture au secteur privé. L'Etat
s'est vu de plus en plus concurrencé dans les domaines qui jadis,
faisaient partie de son monopole. Au nombre de ces domaines, figure en bonne
place l'enseignement en général, et l'Enseignement
Supérieur en particulier. L'Enseignement supérieur au Cameroun
avant 1990, était le monopole de l'Etat ; celui-ci recrutait, formait et
insérait professionnellement les diplômés. Ceux-ci avaient
à leur disposition, des bourses qui leur permettaient de poursuivre des
études à l'étranger et de revenir quelques années
plus tard dans leur pays pour y officier. Mais, depuis l'année
19901 marquée par l'ouverture démocratique, la
libéralisation et son corollaire, l'érection de l'entreprise
privée, le secteur de l'Enseignement supérieur a offert de
nouvelles opportunités aux étudiants, avec à la
possibilité dont ils disposent de suivre des enseignements au sein
d'institutions autres que les institutions publiques d'Enseignement
Supérieur. Parmi ces institutions privées d'enseignement
supérieur, figure l'Université Catholique d'Afrique
Centrale/Institut Catholique de Yaoundé (UCAC/ICY).
La loi d'orientation de l'Enseignement Supérieur de
1993 au Cameroun, favorisant le décongestionnement de
l'Université de Yaoundé en six Universités publiques,
marque un
1 Les années 1990 au Cameroun comme partout
en Afrique centrale marquent un réel changement, une réelle
mutation de l'Etat ; elles consacrent une révolution normative portant
sur l'ouverture à l'entreprise et à l'initiative
privées.
Efficacité comparée de l'enseignement
supérieur au Cameroun à l'heure du LMD : cas de l'Institut
Catholique de Yaoundé et de l'Université de Yaoundé II
point essentiel de l'émancipation de l'Enseignement
supérieur public au Cameroun, car elle a permis une réelle
croissance de l'accès public à l'enseignement supérieur.
De plus, avec l'ouverture de l'Institut Catholique de Yaoundé, le
service public de l'enseignement supérieur au Cameroun ne s'est plus
trouvé être l'apanage de l'Etat, mais aussi et dorénavant,
d'un secteur privé en pleine gestation dans le domaine.
A partir de ce moment, l'Université de Yaoundé
II et l'UCAC/ICY font train ensemble et remplissent toutes une mission de
service public qui se trouve être l'accès à
l'éducation, mais à une éducation de niveau
supérieur. Octroient-elles de ce fait des formations assimilables, les
étudiants pouvant migrer d'une institution à l'autre, quoique les
modalités de recrutement n'y soient pas toujours identiques. La
quasi-sélection des étudiants de l'ICY par le biais du concours
institué comme modalité de recrutement notamment en cycle
licence, permet dans une certaine mesure d'hisser l'ICY à un niveau
supérieur que celui de l'UYII, quoique l'on observe une tendance assez
paradoxale : les étudiants formés à l'ICY postulent de
plus en plus pour une inscription en thèse de doctorat à l'UYII.
Ce constat-au grand dam des partisans de l'enseignement privé- vient
remettre en cause ce construit social de la prééminence de
l'enseignement privé sur l'enseignement public.
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Efficacité comparée de l'enseignement
supérieur au Cameroun à l'heure du LMD : cas de l'Institut
Catholique de Yaoundé et de l'Université de Yaoundé II
I- Contexte de l'étude
Si la reconnaissance accrue du rôle de
l'éducation, sinon de l'enseignement supérieur relativement
à la croissance et au développement n'est plus à
démontrer, c'est que le système éducatif camerounais
d'enseignement supérieur se révèle être un levier
sensible à la croissance économique et à la
compétitivité. Ainsi, l'amélioration de la qualité
des programmes d'études et des établissements même au plan
infrastructurel, sera d'une importance capitale. Face à ces
défis, l'efficacité de l'enseignement supérieur au
Cameroun se trouve plongée dans une tourmente contextuelle aussi bien
politico-économique que sociale.
1- Contexte politico-économique
La vision du développement à long terme du
Cameroun passe également par la qualité et l'efficacité de
son enseignement en général et de l'enseignement supérieur
en particulier. De ce fait, le Document de Stratégie pour la Croissance
et l'Emploi (DSCE) met en avant cette volonté politique, de poursuivre
la réalisation des Objectifs du Millénaire pour le
Développement (OMD).
En effet, selon l'OMD 2, qui a pour but d'assurer globalement
l'alphabétisation, le gouvernement camerounais s'est inscrit dans cette
dynamique, du moins au niveau du troisième cycle, en adoptant un nouveau
système dit Licence-Master-Doctorat (LMD), pour rendre plus
opérationnel, qualitatif et efficace son enseignement
supérieur.
L'alphabétisation formelle de la population reste un
défi majeur. Celle-ci s'entend comme l'aptitude des personnes
âgées de 15 ans ou plus, à lire et à écrire
le français et/ou l'anglais. De plus, la crise financière qu'a
connue le Cameroun à également eu un impact considérable
sur l'enseignement supérieur, notamment sur la catégorie
étudiants. En effet, ceux-ci bénéficiaient d'une bourse
allant de 25.000 à 35.000fCFA et ne devaient pas payer les frais
d'Université comme le font les étudiants aujourd'hui. Cet
état des choses a remarquablement réduit dans une certaine
mesure, l'accès de certains citoyens à l'enseignement
supérieur car, du fait de l'instauration des droits universitaires qui
s'élèvent désormais à 50000francs CFA dans les
établissements publics d'enseignement supérieur, ceux-ci,
indigents, ne pouvaient
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supérieur au Cameroun à l'heure du LMD : cas de l'Institut
Catholique de Yaoundé et de l'Université de Yaoundé II
plus poursuivre leurs études et se sont
retrouvées au quartier, grossissant ainsi la masse d'une jeunesse
décérébrée et laissée pour compte.
2- Contexte social de l'étude
L'environnement social de l'Enseignement supérieur au
Cameroun révèle une réelle abnégation des citoyens
à poursuivre des études au niveau supérieur. Ce constat
est révélateur de l'impératif de la qualité de la
formation, relativement à la compétitivité des
étudiants sur le marché de l'emploi.
Ce postulat trouve un réel ancrage et un justificatif
perceptible au niveau de l'augmentation exponentielle de la quantité des
étudiants au niveau de l'enseignement supérieur ; si l'on prend
par exemple l'Université de Yaoundé II, celle-ci comptait en 2009
en Faculté des Sciences Juridiques et Politiques en Première
année de Licence près de 3000 étudiants, et en 2014 elle
en compte plus de 4500 étudiants. Ce fait témoigne de la
volonté citoyenne à gravir les échelons au niveau de
l'éducation, à améliorer la qualité du capital
humain du Cameroun et de ce fait, à rendre le Cameroun
émergent.
II- Cadre conceptuel
Dans le cadre de la réalisation de ce travail, quelques
notions et expressions méritent d'être éclaircies afin de
mieux renseigner sur les logiques de compréhension desdites notions et
expressions, ainsi que sur les modalités d'appropriation. Il s'agit en
effet ici de déterminer la manière dont les expressions seront
comprises dans le cadre de ce travail de recherche.
Le concept d' « efficacité »
est une expression polysémique car il ne peut être
apprécié comme une valeur absolue et isolée. Dans des
organisations en l'occurrence, la notion d'efficacité est liée
à une double variable : la gestion de projet, c'est-à-dire
l'obtention d'un résultat qui dépend plus ou moins de trois
paramètres notamment la dimension du résultat à atteindre,
les ressources affectées et surtout la durée qui
caractérise le temps alloué aux ressources pour remplir la charge
; et l'évaluation, c'est-à-dire le fait de vérifier si les
objectifs ont été atteints.
Bien qu'assez récente en utilisation dans les sciences
de l'éducation, la notion d'efficacité est davantage
utilisée dans les travaux de nombreux chercheurs dans divers domaines de
la science. Ce concept est fréquent dans le domaine de
l'éducation, et utilisé par les chercheurs qui entendent
démontrer l'impact de l'effet « école » sur la
performance des étudiants.
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supérieur au Cameroun à l'heure du LMD : cas de l'Institut
Catholique de Yaoundé et de l'Université de Yaoundé II
L'efficacité c'est la capacité de produire les
résultats relatifs aux objectifs préalablement fixés. Dans
le contexte de l'éducation et dans le cadre de ce travail de recherche,
la notion d'efficacité sera entendue comme la capacité d'une
institution universitaire à faciliter la bonne progression des
étudiants en termes de connaissances acquises, aussi bien
théoriques que pratiques.
Une autre notion mérite également d'être
éclaircie ; il s'agit de la notion de « comparaison ».
Cette dernière est toujours utile pour atteindre les objectifs
que l'on s'est fixés. La comparaison est une méthode qui permet
de discerner les similitudes et les différences de degré ou de
cas dans l'étude d'un phénomène, et d'orienter vers une
analyse plus approfondie de ces similitudes et différences. La
comparaison est donc un travail d'affinement et de systématisation qui
permet d'assimiler et de contraster des phénomènes. Cependant, il
existe une pluralité d'écoles relativement aux types de
comparaison. Ainsi, dans le cadre de cette étude, nous avons
adopté l'école de la comparaison entre cas analogues, c'est
à dire une comparaison entre cas présentant des similitudes.
Toutefois, la notion d' « enseignement
supérieur » mérite aussi d'être
éclaircie. Un tel effort ne peut être possible qu'après une
mise en autarcie du concept d'« enseignement » pris isolément
par rapport à celui de « supérieur », aux fins de
définition et de compréhension. Le concept d'« enseignement
» peut révéler plusieurs sens ; il peut être une
action, c'est-à-dire le fait de transmettre des connaissances ou des
savoirs à certaines personnes qui peuvent être des
élèves ou des étudiants, tout comme il peut se
présenter sous forme de fonction, c'est à dire un métier,
une occupation permanente ou non avec rémunération. Il peut en
définitive être une mission de service public.
Dans le cadre de ce travail de recherche, l'enseignement est
compris comme le procédé par lequel les établissements
assurent la transmission des connaissances, le suivi et la réussite des
étudiants. De ce fait, l'enseignement supérieur est un service
public, qui consiste à procurer aux populations des connaissances
théoriques et pratiques de haut niveau, dans des domaines aussi
variés, concurrentiels que congruents.
L'efficacité comparée de l'enseignement
supérieur s'entendrait donc comme cette aptitude, cette capacité
des universités publiques (l'Université de Yaoundé II) et
des universités privées (l'Institut Catholique de Yaoundé)
à donner de meilleurs résultats
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Efficacité comparée de l'enseignement
supérieur au Cameroun à l'heure du LMD : cas de l'Institut
Catholique de Yaoundé et de l'Université de Yaoundé II
possibles l'une par rapport à l'autre, en raison des
objectifs de l'enseignement supérieur au Cameroun et de son
efficacité.
III- Délimitation du travail
Il s'avère impératif de circonscrire notre
travail pour un souci de précision, afin d'éviter les risques de
généralisation. Ce travail de bornage comporte donc une dimension
triangulaire, en ceci qu'il est d'abord spatial, ensuite temporel et enfin
matériel.
1- Délimitation spatiale
La délimitation spatiale rend compte de l'espace ou du
milieu au sein duquel nous mènerons nos investigations. De ce fait, nous
avons deux points d'ancrages spatiaux. D'une part l'Université de
Yaoundé II qui est un établissement public d'enseignement
supérieur. Elle est née de la réforme de l'Enseignement
supérieur au Cameroun en 19932 qui consacra
l'émiettement de l'Université de Yaoundé en
six3 Universités d'Etat. Elle est composée de deux
Facultés4, de deux Instituts5, d'une
Ecole6 et est caractérisée par une
géo-localisation disparate7. C'est la raison pour laquelle
notre champ d'étude se limitera au niveau du campus de Soa, notamment la
Faculté des Sciences Juridiques et Politiques. D'autre part, il s'agit
de l'Institut Catholique de Yaoundé (ICY), établissement
privé d'Enseignement supérieur, qui a été
créée en 1991. Elle est une Université sous
régionale et comporte six campus en l'occurrence celui de Nkolbisson, de
Messa, de Bertoua, d'Ekounou, de Pointe-Noire et de Douala. Le régime
linguistique qui y est appliqué est le français. Toutefois, dans
le cadre de ce travail nous nous limiterons au campus de Nkolbisson, notamment
la Faculté de Sciences Sociales et de Gestion
Le choix de tels espaces de travail ne s'est pas
opéré au hasard car, ces deux institutions présentent des
similarités et des divergences. En effet, les deux institutions
2 Notamment le décret n°93/026 du 19
janvier 1993 portant création d'Universités, le décret
n°93/027 du 19 janvier 1993 portant dispositions communes aux
Universités et le décret n°93/037 du 29 janvier 1993 portant
organisation administrative et académique de l'Université de
Yaoundé II
3 Il s'agit des Universités de Yaoundé
I, Yaoundé II, Dschang, Douala, Buéa et
Ngaoundéré.
4 La Faculté des Sciences Economiques et de
Gestion (FSEG) et la Faculté des Sciences Juridiques et Politiques
(FSJP).
5 L'Institut des Relations Internationales du
Cameroun (IRIC) et L'Institut de Formation et de Recherches
Démographiques (IFORD).
6 Il s'agit de l'Ecole Supérieure des Sciences
et Techniques de l'Information et de la Communication (ESSTIC)
7 En effet toutes ces Facultés, Instituts et
cette Ecole ne se situent pas au même endroit ; pendant que la FSJP et la
FSEG se situent dans la ville de Soa, l'IRIC se situe à OBILI, et
l'IFORD à la Poste centrale à quelque pas du Musée
National. Quant à l'ESSTIC, elle se situe à NGOA EKELE.
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Efficacité comparée de l'enseignement
supérieur au Cameroun à l'heure du LMD : cas de l'Institut
Catholique de Yaoundé et de l'Université de Yaoundé II
universitaires ont toutes été mises sur pied en
période de transition, l'une en 1991 et l'autre en 1993. De plus, elles
offrent des formations qui peuvent faire objet de rapprochement et de ce fait,
les enseignants peuvent officier aussi bien à l'Université de
Yaoundé II qu'à l'institut Catholique de Yaoundé.
2- Délimitation temporelle
S'il est admis que le temps conditionne dans une certaine
mesure la recherche en science en général, c'est que les
dynamiques temporelles d'un travail de recherche informent parfois sur sa
qualité, son originalité voire son actualité.
En effet, la transition systémique de l'Enseignement
supérieur au Cameroun rend compte du point de départ temporel de
notre travail de recherche. 2008 marque ainsi l'année où le
Cameroun a commencé à appliquer le système LMD dans son
système d'Enseignement Supérieur. La vision du Cameroun à
l'horizon 2035 compte plusieurs phases parmi lesquelles, celle de 2015 qui
intègre la vision à court terme. Ceci étant dit, il serait
judicieux pour nous de mesurer l'efficacité de l'Enseignement
supérieur au Cameroun dans une première phase de son
émergence selon une logique comparative.
3- Délimitation matérielle
Mener à bien ce travail de recherche nécessite
la mobilisation de plusieurs disciplines scientifiques car il s'inscrit dans
une logique pluridisciplinaire.
De ce fait, l'ancrage disciplinaire de ce travail de recherche
est la sociologie des organisations qui a permis d'exhumer les modalités
d'organisation et de fonctionnement des deux institutions universitaires
choisies comme cadre d'étude et de mesurer leurs impacts sur la
performance estudiantine. Il a été également important de
mobiliser la politique comparée afin de faire de ce repérage
spatial le vecteur d'une explication des processus, c'est-à-dire cette
capacité et cette légitimité à postuler que
l'Institut Catholique de Yaoundé et l'Université de
Yaoundé II sont comparables, donc qu'ils partagent suffisamment des
points communs pour relever d'une même catégorie et rendre ainsi
la comparaison valide, tout en étant marqués par des
différences assez perceptibles pour rendre la comparaison
utile8.
8 Bertrand Badie et Guy Hermet, Politique
comparée, Paris, Presses Universitaires de France, 1990, p 18.
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Efficacité comparée de l'enseignement
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Catholique de Yaoundé et de l'Université de Yaoundé II
IV- Objectifs de l'étude
Le projet de réalisation de ce travail de recherche
est lié à la satisfaction ou à l'atteinte d'un certain
nombre d'objectifs.
En menant une telle étude, nous entendons faire
ressortir les modalités d'organisation, de fonctionnement et de gestion
des deux institutions universitaires, et leurs impacts sur la réussite
des étudiants. De plus, nous ambitionnons de comprendre les raisons pour
lesquelles l'Institut Catholique de Yaoundé forme des étudiants
plus habilités sur le terrain que ceux formés sur le campus de
Soa, ceci faisant en effet ressortir la problématique de la nature du
procédé et de la pédagogie des enseignements ; enfin, nous
entendons mesurer l'efficacité relativement à l'insertion
professionnelle des étudiants de chaque institution, en rapport avec
l'initiative privée ou l'auto-emploi.
V- Intérêt de l'étude
Mener une étude comparative sur l'efficacité de
l'Enseignement supérieur au Cameroun, notamment entre deux
Universités de nature différente n'est pas chose aisée. De
ce fait, l'intérêt d'un tel travail se veut non seulement
scientifique, mais également social.
1- Intérêt scientifique de
l'étude
L'intérêt de cette étude au plan
scientifique relèverait même de sa nature. Une comparaison de
l'efficacité de l'Enseignement Supérieur public à celui
privé permettra d'obtenir des résultats sur les modalités
de gestion des institutions universitaires et de leurs impacts sur la
performance estudiantine. Ce paramètre relancera le débat des
traditions gestiologique anglo-saxonne et romano-germanique9 car
aujourd'hui, on assiste de plus en plus à un double mouvement de
privatisation des entreprises publiques et de publicisation des entreprises
privées10.
Au-delà, les outils de collecte des données
(combinaison des méthodes quantitative et qualitative) qui ont
été mobilisés dans le cadre de ce travail ont permis la
production des résultats, lesquels pourront certainement faire avancer
la recherche dans cette veine et susciter de nouveaux débats et de
nouvelles réflexions autour du sujet traité.
9 Pendant que la tradition romano-germanique
prône une séparation tranchée entre le secteur public et le
secteur privé, la tradition anglo-saxonne elle, établit un
réel rapprochement entre les deux secteurs.
10 Lire dans cette direction, Nicole Decoopman,
« Entreprises privées, entreprises publiques », La
société civile, Paris, PUF, 1986, Pp.182-205.
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supérieur au Cameroun à l'heure du LMD : cas de l'Institut
Catholique de Yaoundé et de l'Université de Yaoundé II
2- Intérêt social de
l'étude
Le travail de recherche que nous avons menée pourrait
être bénéfique pour la société camerounaise
dans son ensemble. En effet, il pourrait faire ressortir l'impact du niveau
social sur la réussite de l'étudiant et de ce fait semer une
révolution psychologique qui viserait à se donner des moyens pour
pouvoir avoir un bon niveau social afin de réussir dans la vie, ce par
rapport à une jeunesse qui sombre de plus en plus dans le pessimisme.
VI- Construction de la problématique 1- revue de
littérature
La réflexion sur les organisations s'émancipe au
travers d'un questionnement sur la bureaucratie. À ce titre, Max Weber
(1864-1920) est unanimement reconnu comme l'initiateur de cette
réflexion, même si sa contribution se résume au chapitre
trois de son ouvrage Economie et Société11.
En effet, si sous le terme bureaucratie, on se représente ipso facto
une administration caractérisée par des lenteurs et des
lourdeurs, on se dénie de comprendre l'intrigue de la réflexion
au cours de la première moitié du 20e siècle,
c'est tout à l'opposé, le degré de rationalisation des
ensembles humains qui est au coeur des premières analyses sociologiques
et plus précisément de la pensée de Max Weber.
Le développement exponentiel des structures
bureaucratiques, aussi bien publiques que privées apparait comme un
trait marquant de toute société à la fin du 20e
siècle. En Amérique en l'occurrence, l'initiative privée
révèle un sens et une puissance qui tend de plus en plus à
prendre le pas sur les organisations publiques. Le secteur de
l'éducation sinon de l'enseignement en effet, se trouve
géré sous la houlette de deux types d'organisations à
savoir l'organisation publique que sont les Universités d'Etat, et
l'organisation privée que sont les Universités Privées ou
les Instituts Privés d'Enseignement Supérieur (IPES). De ce
constat, il est possible de retracer deux tendances en ce qui concerne
l'efficacité de l'enseignement supérieur au Cameroun. Ces deux
tendances révèlent les dynamiques pertinentes qui permettent de
produire les résultats escomptés et l'engagement des parties
prenantes dans l'atteinte de ses objectifs.
L'enseignement supérieur privé est en
perpétuelle croissance au Cameroun. L'on note un taux
élevé d'instituts privés d'enseignement supérieur.
Ce constat permet ainsi de mettre
11 Paris, Plon, 1971 (réédité aux
éditions Presses-Pocket, coll. « Agora », 1995).
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Efficacité comparée de l'enseignement
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en évidence la tendance de l'efficacité de
l'enseignement privé par rapport à l'enseignement public. Henri
Ngonga le démontre si bien dans sa thèse intitulée «
Efficacité comparée de l'enseignement public et privé au
Cameroun »12. L'auteur pense que, le système
éducatif camerounais porte encore les marques de la colonisation, que
celui-ci est passé par trois phases à savoir : la phase
précoloniale, coloniale et postcoloniale. Il postule en effet que, le
système éducatif camerounais actuel se caractérise par une
forte demande d'éducation à tous les niveaux aussi bien primaire
que secondaire et supérieur, et que l'offre d'éducation reste
encore insuffisante tant dans le secteur public que dans le secteur
privé.
Toutefois, Henri Ngonga prend position en postulant que
l'enseignement privé est plus efficace que l'enseignement public. Il
justifie sa position en arguant, qu'un grand nombre de parents
d'élèves choisissent de scolariser leurs enfants dans les
structures scolaires privées, ceux-ci estimant que le secteur
d'enseignement privé est plus efficace que le secteur d'enseignement
public. A l'analyse comparée des deux secteurs, Henri Ngonga
démontre que les écoles privées sont associées
à une meilleure progression des élèves. Un
élève ou un étudiant scolarisé dans le secteur
privé obtient en moyenne, de meilleurs résultats que son camarade
qui fréquente le secteur d'enseignement public. Par conséquent,
les écoles privées sont en définitive plus efficaces que
les écoles publiques.
Quoique se situant non seulement dans une perspective
économique, mais également se limitant au niveau de
l'enseignement primaire, la pensée de Henri Ngonga mérite ici
d'être évoquée, car elle rend véritablement compte
de la dynamique de l'éducation au Cameroun dans son ensemble. En effet,
par effet d'habitus, si aux cycles primaire et secondaire, un enfant a
été scolarisé dans un établissement d'enseignement
privé et qu'il a toujours ramené de bons résultats, la
tendance serait de continuer à scolariser cet enfant dans le même
secteur d'enseignement jusqu'au cycle supérieur. Mais, force est de
constater et de relever que l'enseignement supérieur est un service
public, et donc originellement dévolu à l'Etat, à la
puissance publique. En effet, ce service public nécessite la mise sur
pied des institutions et organisations universitaires se caractérisant
d'une part par un rôle déterminant de l'Etat ou des
collectivités publiques dans les décisions résiduelles
liées notamment à la possibilité de nommer les dirigeants
et de leur accorder une latitude décisionnelle plus ou moins
importante
12 Henri Ngonga, « Efficacité
comparée de l'enseignement public et privé au Cameroun
», thèse de doctorat en science économique,
Université de Bourgogne, 2010, 356 pages.
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Efficacité comparée de l'enseignement
supérieur au Cameroun à l'heure du LMD : cas de l'Institut
Catholique de Yaoundé et de l'Université de Yaoundé II
sur certaines options stratégiques, et d'autre part,
par une appropriation majoritaire des gains résiduels.
Toutefois, l'annuaire statistique de l'Enseignement
supérieur au Cameroun13 vient remettre en cause la vulgate
diffusée par Henri Ngonga. En effet, cet annuaire démontre dans
une posture qualitative, une prédominance du secteur public
d'enseignement supérieur. Ainsi, dans cet annuaire, la composante
publique de l'enseignement supérieur est restée
prédominante. Les Universités d'Etat avaient enrôlé
86.7% de l'ensemble des étudiants, de plus, la population du personnel
enseignant (Professeurs titulaires, Maitres de Conférences,
Chargés de Cours, Assistants, Attachés d'Enseignement et de
Recherche), a été évaluée à 2748 enseignants
en 2008. Ce degré et ce niveau correspondent sans doute d'après
cet annuaire, à une progression de 25% par rapport à 2007,
à la faveur du recrutement de 1000 enseignants autorisé par le
Chef de l'Etat. Cette progression a contribué à améliorer
les ratios d'encadrement, qui sont passées de 01 enseignant pour 53
étudiants à 01 enseignants pour 48 étudiants. A la
consultation de cet annuaire, nous y voyons des pesanteurs institutionnelles
qui s'abattent sur les logiques de rédaction de celui-ci. Ainsi, si du
crédit peut être accordé à cet annuaire statistique,
force est de noter qu'une autre trajectoire d'analyse vient battre en
brèche cette posture institutionnelle.
En effet, le taux de demande de création d'Instituts
Privés d'Enseignement Supérieur (IPES) est en perpétuelle
croissance, et le rythme de cette création est remarquable. La
treizième Commission Nationale de l'Enseignement Supérieur a
permis l'examen de plus de soixante demandes de création d'IPES. Selon
le communiqué du Ministre de l'Enseignement
Supérieur14, sept IPES ont reçu une autorisation
d'ouverture, ce qui a porté à soixante-onze, le nombre d'IPES
habiletés à former les étudiants. Par la même
occasion, dix-sept IPES ont reçu l'accord de création, et deux
IPES, un accord d'extension. Au regard de cette graduation, l'on remarque que
le rythme de création des IPES est important. De plus, pour
l'année académique 2008/2009, 17 IPES ont ouvert les portes pour
accueillir les nouveaux bacheliers. En 2007, les IPES ont attiré 16.391
étudiants dans les filières professionnelles, soit 12% de la
population universitaire, et ce chiffre a pratiquement doublé par
rapport à l'année académique 2004/2005, où 8862
bacheliers se sont inscrits dans des IPES. Les filières Commerce, Droit
et Sciences Sociales regorgent un total de 10748 étudiants, soit
exactement deux tiers des
13 Annuaire statistique de l'Enseignement
supérieur au Cameroun, 2008.
14 Communiqué du 03 octobre 2008.
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Efficacité comparée de l'enseignement
supérieur au Cameroun à l'heure du LMD : cas de l'Institut
Catholique de Yaoundé et de l'Université de Yaoundé II
effectifs totaux en 2008. Toujours pour le compte de
l'année 2008, le taux de défection était de 0.18% tandis
que le taux de réussite était de 51% notamment au BTS.
Les IPES s'investissent de plus en plus dans des formations
longues, consacrées par des Licences professionnelles et des Masters,
voire des Doctorats, généralement en partenariat avec des
universités occidentales. Cette trajectoire démontre de fort
belle manière que les IPES conjuguent désormais deux types de
savoirs : le savoir savant ou le savoir théorique, et le savoir-faire ou
le savoir pratique, et deux types de formations : les formations
professionnelles et les formations diplomantes. De ce point de vue, le
système Licence Master Doctorat (LMD) trouve plus un terrain fertile
dans les IPES que dans les établissements publics d'Enseignement
Supérieur.
A l'exposé de cette littérature, nous avons une
tendance dominante qui est celle de l'efficacité de l'enseignement
supérieur privé par rapport à l'enseignement
supérieur public. Ainsi, au-delà des propriétés
contextuelles et sous le prisme des données conceptuelles, ce travail de
recherche consiste donc à déceler les causes, les raisons qui non
seulement poussent à penser mais également à
démontrer que l'enseignement supérieur public est moins efficace
que l'enseignement supérieur privé, en faisant une réelle
sociologie des deux secteurs d'enseignement recensés dans notre
délimitation spatiale en prenant pour cadre de référence,
la communication, la motivation, l'encadrement et la performance des parties
prenantes, ainsi que l'insertion professionnelle et l'admission des
étudiants des deux institutions universitaires au sein des
universités étrangères.
2- formulation de la problématique
En nous accordant avec Gaston Bachelard lorsqu'il affirme que
« la science réalise toujours ses objets sans jamais les trouver
tout faits... elle ne correspond pas à un monde à décrire,
elle correspond à un monde à construire... le fait est conquis,
construit, constaté »15, nous constatons de
fort belle manière et avec Northrop que, la science ne commence pas avec
des faits et des hypothèses, mais avec un problème
spécifique.
De ces postulats, il importe de noter que l'éducation
dans son ensemble et de manière générale se lit toujours
en termes de performance ou encore d'efficacité. Dans de nombreux pays,
l'éducation est, ou a été la base du développement,
c'est la raison pour laquelle
15 Gaston Bachelard, cité par Madeleine
Grawitz in Méthodes des sciences sociales, Paris, Dalloz,
8e édition 1990, p. 422.
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Efficacité comparée de l'enseignement
supérieur au Cameroun à l'heure du LMD : cas de l'Institut
Catholique de Yaoundé et de l'Université de Yaoundé II
l'éducation aujourd'hui ou du moins son accès
constitue un droit fondamental. Garantir la performance ou l'efficacité
d'un système éducatif, passe par la mise sur pied non seulement
d'une politique sui generis, mais également des institutions
fortes et capables d'assurer l'efficacité de celui-ci. Le système
éducatif camerounais notamment le secteur de l'enseignement
supérieur se trouve davantage confronté à cette
problématique d'efficacité. Les Universités Publiques ou
d'Etat en l'occurrence, n'ont pas une crédibilité substantielle
pour ainsi à elles seules garantir dans son ensemble l'efficacité
du système camerounais d'enseignement supérieur. Ces
Universités d'Etat se voient talonnées par des IPES, qui de plus
en plus tendent à leur ravir la vedette ou à les supplanter car,
ceux-ci semblent être plus efficaces et plus aptes à hisser le
système camerounais d'enseignement supérieur au pinacle de
l'efficacité.
Au regard de ces considérations d'ordre
général et, en partant du constat selon lequel les
étudiants scolarisés dans les IPES réussissent plus et
mieux que les étudiants scolarisés dans les Universités
d'Etat, une multitude d'interrogations peuvent alors être
formulées. Qu'est ce qui justifie le nivellement des performances entre
les étudiants de l'Université de Yaoundé II et ceux de
l'Institut Catholique de Yaoundé ?
Comment le management de la motivation au sein des deux
institutions universitaires peut-il avoir un impact sur l'efficacité de
l'organisation ? Dans quelles mesures le suivi et l'encadrement des
étudiants dans les deux institutions impactent sur la réussite de
ceux-ci ? Comment les mécanismes interpersonnels de communication au
sein des deux institutions conditionnent l'efficacité et la performance
des parties prenantes ? Enfin, quelle appréciation pouvons-nous donner
de l'admission des étudiants des deux institutions dans les
universités étrangères et de leur insertion dans le monde
de l'emploi ?
La série de questions constituant ainsi notre
problématique pour la réalisation de ce travail de recherche,
permet de mettre en exergue l'emprise que peut avoir une organisation sur la
performance de ses parties prenantes et sur tout un système dans son
ensemble. La tendance la plus générale est que, les Institutions
Privées d'Enseignement Supérieur emboitent de plus en plus le pas
aux Universités d'Etat.
Ainsi, l'exploration, des méandres de cette
montée en puissance des IPES constitue le socle de cette
problématique. La compréhension de l'univers organisationnel
aussi bien de l'Institut Catholique de Yaoundé que de
l'Université de Yaoundé II relativement à la
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supérieur au Cameroun à l'heure du LMD : cas de l'Institut
Catholique de Yaoundé et de l'Université de Yaoundé II
performance des étudiants et à
l'efficacité du système camerounais d'enseignement
supérieur constitue un point d'ancrage important pour la satisfaction de
ces préoccupations dans la mesure où en science, toute
connaissance est une réponse à une question, car rien ne va de
soi, rien n'est donné, mais tout est construit.
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