3.3. Outils de collecte des données.
Dans la mesure où le choix de la méthode est
toujours assujetti à la nature du sujet à explorer et que notre
étude porte sur des questions d'opinion faisant appel à des
données discursives, nous estimons que la méthode qualitative est
la mieux appropriée à utiliser. Celle-ci consiste en un ensemble
de techniques qui donne un aperçu sur le comportement, les attitudes et
la perception des gens sur lesquels porte l'étude. Elle permet aussi
d'étudier leurs opinions sur un sujet particulier, de façon plus
approfondie que dans un sondage. Elle génère des idées et
des hypothèses pouvant contribuer à comprendre comment une
question est perçue par la population cible et permet de définir
ou cerner les options liées à cette question. La démarche
qualitative regorge de plusieurs méthodes. Dans notre étude,
l'entretien semi directif et les récits de vie sont mobilisées
pour la collecte des informations.
3.3.1. L'entretien semi directif
Conformément à la spécificité de
notre objectif de recherche, nous avons choisi de réaliser une recherche
de type qualitatif. A ce titre, nous avons utilisé l'entretien semi
directif en guise de technique de collecte de données. Le choix de cette
approche s'explique par le caractère exploratoire de notre recherche.
Ainsi, vu l'objectif spécifique de la présente recherche qui est
d'analyser les motivations, les expériences, les conduites et les
logiques individuelles des étudiants à l'exercice d'une
activité rémunéré, l'entretien semi directif nous a
paru comme l'outil le plus adapté pour recueillir des données de
nature subjective comme celles dont il est question ici. À ce propos,
Blanchet et Gotman nous renseignent que:
« l'enquête par entretien est
particulièrement pertinente lorsque l'on veut analyser le sens que les
acteurs donnent à leurs pratiques, aux événements dont ils
ont pu être les témoins actifs, lorsque l'on veut mettre en
évidence les systèmes de valeurs et les repères normatifs
à partir desquels ils s'orientent et se déterminent. »
(Blanchet et Gotman, 1992, p.27)
C'est «un système d'interrogation à la
fois souple et contrôlé» nous apprennent Guibert et Jumel.
Ces derniers la définissent comme la méthode qui «consiste
à faciliter l'expression de l'interviewé en l'orientant vers des
thèmes jugés prioritaires pour l'étude tout en lui
laissant une certaine autonomie. » (Guibert et Jumel, 1997,
p.102) Toujours dans le but de montrer le bien-fondé de l'entretien semi
directif, Quivy et Campenhoudt soulignent que cette méthodologie de
recherche qualitative convient particulièrement lorsqu'il est question
d'analyser le sens que les acteurs donnent à leurs pratiques et aux
événements auxquels ils sont confrontés; leurs
systèmes de valeurs, leurs repères normatifs, leurs
interprétations des situations conflictuelles ou non, leurs lectures de
leurs propres expériences, etc. (Quivy et Campenhoudt, 1995)
Dés lors, l'entretien semi directif nous permettra de recueillir des
informations concernant le sens que ces étudiants accordent au travail
rémunéré. Comme le souligne Blanchet et Gotman (1992, p.
24) l'enquête par entretien peut aussi s'inscrire dans la sociologie
compréhensive de Weber dont l'objectif spécifique comme nous nous
l'avons souligné dans les paragraphes précédentes est
l'activité, définie comme un comportement compréhensible
par le sens que lui attachent les acteurs, sens à la fois subjectif et
intersubjectif. »
Pour la réalisation des entretiens, nous avons
utilisé un guide d'entretien sur lequel nous nous appuierons pour mener
à bien notre enquête. Dans ce guide d'entretien, nous avons
proposé des thèmes à chaque répondant sous forme de
questions ouvertes ou à développement. Afin de mieux travailler
les concepts qui sont au coeur de notre réflexion, notre guide
d'entretien compte les dimensions suivantes :
Ø Emergence du projet. En effet, la question de la
préparation vers la France nécessite des préalables. Ici,
nous nous sommes intéressé à l'image et les
représentations que les enquêtés avait de la France, au
contexte social et économique de l'étudiant dans le pays de
départ, de ses motivations pour partir en France mais aussi de ses
attentes une fois dans le pays. Qui a eu cette idée (projet
élaboré de longue date, hasard d'une rencontre) : le jeune,
la famille etc. Pourquoi vouloir parti ? pourquoi la France ?
Ø Mise en oeuvre du Projet : Dans cette partie, nous
avons pensé à relever des informations très
précises sur l'ensemble des démarches que l'étudiant a du
accomplir pour partir (démarches administratives auprès de
l'ambassade, financement etc.) comment le voyage s'est réalisé ?,
les acteurs impliqués dans la réalisation du projet (qui a fait
quoi ?) le rôle joué par la famille et l'entourage etc. Nous nous
sommes également intéressés aux conditions de vie de
l'étudiant dans le pays d'accueil, du financement de ses études,
de sa perception actuelle de la France etc.
Ø Rapport au travail : la question du travail de
l'étudiant pendant les études a été directement
abordée ici. Pourquoi travail t-il ? Comment perçoivent-ils ce
travail ? Ces différentes questions nous ont permis de recueillir les
opinions et points de vu des enquêtés par rapport à
l'exercice d'une activité rémunérée.
Ø Liens avec le pays de départ : Cette
dernière partie consiste à recueillir des données sur les
types de relation que les étudiants entretiennent avec leurs origines
sociales. Bénéficient-ils d'un soutien familial ? s'adonnent-ils
à des transferts d'argent ? pourquoi ? Envisagent ils un retour au pays
de départ ?si oui pourquoi ? si non pourquoi ? ces questions
subsidiaires nous permettront de compléter nos informations.
3.3.2. Récit de vie
A coté de l'entretien, nous nous sommes aussi fait des
récits de vie. Cette méthode constitue une méthode
qualitative congruente pour appréhender le sens des
phénomènes humains à travers leurs temporalités,
tels la construction identitaire individuelle, les trajectoires sociales, les
changements culturels, etc. C'est un type d'entretien particulier puisqu'il est
demandé à quelqu'un de se remémorer sa vie et de raconter
son expérience propre. L'intérêt de cette méthode
dans notre travail est qu'il nous nous a permis de saisir les logiques d'action
selon le sens même que nos enquêtés confèrent
à leurs trajectoires migratoires. Loin de singulariser les cas, le
récit de vit permet de situer le réseau dans lequel les
enquêtés se positionnent et d'inscrire les
phénomènes sociaux dans un enchaînement de causes et
d'effets. Nous nous situons dés lors dans une approche
compréhensive du vécu (Kaufmann, 1996, p.23) qui conçoit
les enquêtés comme des « producteurs actifs du social, des
dépositaires d'un savoir important qu'il s'agit de saisir de
l'intérieur, par le biais du système de valeurs des individus
». Le vécu est donc envisagé comme source d'un savoir
phénoménologique (Bertaux, 2003).
Nous avons utilisé cette méthode dans le but de
saisir la trajectoire de chaque personne interrogée. Au cours de cet
exercice, trois points fondamentaux ont été pris en compte:
l'avant départ, l'arrivée en France et la vie présente en
France. Ce qui nous permettrait de compléter les informations obtenues
avec les entretiens en ayant des idées larges sur les motifs de
départ, les moyens de financement du voyage bref sur ce qui a
engendré la décision de partir à l'étranger. Cette
méthode a permis aussi de savoir s'il existe un lien entre les motifs de
départ et le recours au travail dans le pays d'accueil mais aussi
d'analyser le type de lien social que les personnes interrogées
entretiennent avec leur nouvel environnement d'accueil, les différents
passages qui ont marqué leur séjour dans le pays et qui pourrait
influer sur la décision de travailler.
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