WOW !! MUCH LOVE ! SO WORLD PEACE !
Fond bitcoin pour l'amélioration du site: 1memzGeKS7CB3ECNkzSn2qHwxU6NZoJ8o
  Dogecoin (tips/pourboires): DCLoo9Dd4qECqpMLurdgGnaoqbftj16Nvp


Home | Publier un mémoire | Une page au hasard

 > 

Réponses adaptatives d'une population de singes Colobes bais ( Colobus badius temmincki. KUHL, 1820 ) dans la Réserve de Fathala, Parc national du Delta du Saloum, Sénégal

( Télécharger le fichier original )
par Serigne Abdou Aziz Sy NDIAYE
Institut du développement rural/ Université polytechnique de Bobo- Dioulasso Burkina Faso - Diplôme de master de recherche en analyse des populations des espaces fauniques et halieutiques 2011
  

précédent sommaire suivant

Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy

ABSTRACT

This document is the result from five months of work within the animalist Reserve of Fathala, located in the Fathala forest, continental part of the National Park of the Delta of Saloum in Senegal. It relates to the study of the dynamics of the populations of Western Africa Red colobus (Colobus badius temmincki) in this site.

This zone knew during several decades a clear reduction in plant cover, at the point to compromise the survival of the most septentrional Red colobus populations of Africa which it shelters. In thirty five years, the total density of the woody plant in the forest of Fathala strongly decreased. The number of individuals/ha dropped of more than half between 1975 and 2010. Nevertheless, the fence and the intensification of the monitoring seem to give positive tests from the point of view of the regeneration of the ligneous family and conservation of the biodiversity to the level of the Fathala Reserve these last years.

A fine analysis of the traditional ecological aspects of Colobus badius temmincki was carried out. On the basis of result, it appears that this band consist of from 19 to 25 individuals. Their social structure is of heterosexual type, multimales, multifemales. Their vital domain covers a surface of 70ha. The average height of the monkeys in the trees is of 9,44 m. They pass 61,4% of their time at rest, 17,6% in feeding, 11,2% with the locomotion and 9,8% with the social activities. The food mode consists of especially young vegetable elements including 76% of young sheets and fruit 3%. Khaya senegalensis is the species most consumed with 64% of the observations.

The comparison between the results obtained and those of former studies shows that Colobus badius temmincki developed adaptations to face the degradation of its environment by an extension of the vital domain particulary.

Key words: Colobus badius temmincki, Red colobus, septentrional, Fatala forest, vegetable cover, vital domain, habitat, adaptation, survival, biodiversity, density, conservation, degradation, regeneration

2 INTRODUCTION

Les Colobes bais d'Afrique occidentale (Colobus badius temmincki) sont des primates arboricoles inféodés de la forêt intertropicale africaine. L'Union Internationale pour la Conservation de la Nature ( UICN), les compte parmi les espèces classées vulnérables. L'homme ne sait pas les maintenir en captivité. Ces singes sont donc très dépendants de la conservation de leur environnement.

Au Sénégal, la forêt de Fathala, partie terrestre du Parc National du Delta du Saloum, abrite la population de Colobe bais la plus septentrionale d'Afrique. Depuis plusieurs décennies, elle a dû faire face à une importante dégradation de son environnement. Essentiellement arboricoles (GALAT-LUONG, 1983 ) et de régime alimentaire folivore (NAPIER & NAPIER, 1967 ; DORST & DANDELOT 1970, JOLLY, 1972), ces singes ne descendent au sol qu'en milieu dégradé là où leur habitat ne leur permet plus de se déplacer d'arbre en arbre directement.

La Réserve de Biosphère du Delta du Saloum constitue l'un des rares endroits en Afrique où il est possible de rencontrer des Colobes bais qui vivent en milieu de savane arborée (DUPUY, 1972 ; DUPUY & VERSCHUREN, 1982 ; GATINOT, 1974, 1975 ; DIOUCK, 1995, 1999). Dans presque tout le reste du Continent, cette espèce vit uniquement en forêt humide tropicale (CLUTTON-BROCK, 1972, 1973, 1974a ; STRUHSAKER, 1974, 1975, 1981 ; GALAT-LUONG & GALAT 1979 ; MITANI, 1990 ; DECKER, 1996)

L'analyse de l'évolution de la végétation de 1969 à 2002, en particulier les modifications de la couverture ligneuse, la densité et la biodiversité des arbres, a montré que les trois-quarts des galeries forestières, habitat principal des colobes bais, ont disparu et que la diversité des arbres a chuté de moitié (LYKKE, 1996 ; DIOUCK 1999). Cette régression du couvert végétal risque de compromettre la survie de cette espèce car la principale menace pour la survie de la majorité des primates est la dégradation de leur habitat.

Il se pose alors la question de l'évaluation des conditions de survie de cette population à la limite de son aire de répartition et de l'aptitude d'une telle espèce à s'adapter aux changements de son environnement et à la perte de son habitat.

C'est dans ce cadre que s'inscrit l'objectif global de ce travail qui porte à la fois sur l'analyse de la dynamique de la population de Colobes bais et sur l'étude de l'évolution des habitats pendant ces 35 dernières années dans la forêt de Fathala en général et dans la Réserve de Fathala en particulier. Cela permettra d'une part d'évaluer leur capacité d'adaptation à un milieu à fortes contraintes écologiques et, d'autre part, de connaître les stratégies développées pour faire face aux modifications de leur habitat.

Pour cela, nous avons étudié une bande de Colobes bais vivant dans une forêt claire située dans la Réserve de Fathala. L'étude se base sur un travail de terrain de 5 mois.

Ce document présente une synthèse des résultats de ce travail. Dans une première partie sont présentés le contexte général pour définir la problématique, la justification de l'étude et la démarche méthodologique. Nous présentons également dans cette partie l'espèce et le site d'étude. La deuxième partie présente les résultats de nos observations sur le terrain. Nous effectuons ainsi une analyse fine de tous les aspects écologiques (évolution de la végétation, effectif, utilisation du milieu, budget-temps, régime alimentaire) pour mieux appréhender les différentes adaptations développées par le Colobe bai. En fin les résultats obtenus au cours de cette étude sont discutés dans la troisième partie et comparés à ceux relevés précédemment sur la population de Colobes bais de la forêt de Fathala GATINOT (1974, 1975) ; LYKKE(1993) GALAT (1975, 1983) ; GALAT-LUONG (1976, 1977) ; GALAT-LUONG & al, (1998b) ; DIOUCK (1995, 1999).

3 - CONTEXTE GENERAL ET DEMARCHE METHODOLOGIQUE

3.1 CONTEXTE GENERAL

3.1.1 PROBLEMATIQUE

Cette étude s'insère dans un projet initié par la Direction des Parcs Nationaux (DPN) en partenariat avec la Direction de la Reserve de Fathala. Il vise à réaliser le suivi de la dynamique d'une population de Colobes bais d'Afrique occidentale (Colobus badius temmincki) dans la Réserve animalière de Fathala.

La première revue exhaustive en cinq (05) ans des 634 espèces mondiales de primates a montré que près de 50% d'entre elles sont en danger d'extinction, selon les critères de la Liste rouge des espèces menacées de l'UICN (News-press release août 2008).

Par ailleurs, le rapport rédigé par les plus grands experts mondiaux sur les primates et rendu public lors du 22ème Congrès de la Société internationale de primatologie (IPS) à Edinbourg en Écosse, dresse un portrait effrayant de l'état des primates partout dans le monde. En Asie par exemple, plus de 70% des espèces de primates sont citées sur la Liste rouge de l'UICN dans les catégories "vulnérable", "en danger" ou "en danger critique d'extinction", ce qui signifie qu'elles peuvent disparaître à tout jamais dans un futur proche.

Les propos de Russell A. Mittermeier1(*) lors du même congrès illustre bien cette situation : « Depuis plusieurs années, nous avons tiré le signal d'alarme sur la situation des primates, mais nous disposons aujourd'hui de données concrètes qui montrent que la situation est beaucoup plus grave que celle que nous avions imaginée » a-t-il constaté, avant d'ajouter : «  la première source de menace a toujours été la destruction de la forêt tropicale».

Ici en Afrique, onze (11) des treize (13) espèces de colobes bais connues sont considérées "en danger critique d'extinction" ou "en danger". Deux espèces sont peut-être déjà éteintes : le colobe bai de Bouvier (Procolobus pennantii bouvieri) n'a pas été vu depuis 25 ans tandis qu'aucun représentant vivant du colobe bai de Miss Waldron's Red Colobus (Procolobus badius waldroni) n'a été observé par un primatologue depuis 1978 malgré des rumeurs occasionnelles sur sa survie (News-press release août 2008).

Selon Richard Wrangham, président de l'IPS « parmi les espèces africaines, ce sont les grands singes comme les gorilles et les bonobos qui ont généralement canalisé l'attention. Même si ces espèces sont très menacées, ce sont les plus petits primates comme les colobes bais qui pourraient disparaître en premier. »

La sauvegarde des écosystèmes abritant encore les rares populations de petits primates demeure de ce fait un objectif phare pour les acteurs de la conservation de la biodiversité.

Sous ce rapport, la forêt de Fahala présente un grand intérêt écologique non seulement en termes de richesse en biodiversité mais également du fait qu'elle abrite la population la plus septentrionale de Colobe bai.

Les menaces évoquées par R A Mittermeier cité plus haut sont aussi signalées en ce qui concerne cette forêt, sujette aujourd'hui à des phénomènes de déforestation (coupe illicite de bois entre autres), de feux brousse et de braconnage des animaux. Il est à noter toutefois que ce phénomène de dégradation des habitats naturels, de par leur ampleur et l'importance des régions concernées est devenu une préoccupation de portée internationale. Ainsi, les questions de l'environnement constituent de nos jours un enjeu fondamental par rapport au devenir de l'humanité dans son ensemble.

En outre, le Sénégal en tant que pays Sahélien est confronté à une dégradation accélérée de ses écosystèmes. La préservation des ressources naturelles sauvages apparaît comme un défi majeur à relever dans un tel contexte. En effet, de 1970 à 1986 le Sénégal a perdu 82 % de l'habitat de sa faune et de sa flore sauvage suite à la sécheresse, au déboisement et à l'action des feux de brousse (CONSERE, 1995). Beaucoup d'espèces sont devenues rares voire même menacées de disparition à cause de la dégradation très avancée de leurs habitats. C'est le cas par exemple des éléphants, des chimpanzés et des Colobes bais qui font l'objet de cette étude.

Les impacts négatifs de cette perte des habitats sur les ressources fauniques sont d'autant plus aigus qu'elle constitue un problème majeur et rend précaire la survie de beaucoup d'espèces sauvages qui en dépendent. Le cas du Colobe bai, espèce principalement arboricole, indicatrice de dégradation du milieu forestier, est très illustratif, en ce sens qu'il est classé par l'UICN en danger d'extinction sur l'ensemble de son aire de répartition en Afrique. La conservation de cette espèce, incapable de survivre en captivité, passe donc nécessairement par la préservation de son habitat. La sauvegarde des écosystèmes terrestres du Delta du Saloum, précisément de la forêt de Fathala, dernier refuge et limite septentrionale de l'aire de répartition des quelques rares colonies reliques de Colobes bais d'Afrique occidentale est donc devenue un impératif pour leur survie.

3.1.2 Justification de l'étude

Des études réalisées par l'IRD dans la forêt de Fathala ont montré des modifications entre la période 1969 et 2002 de la couverture ligneuse (la surface occupée par les arbres et les grosses lianes), de la densité et de la biodiversité des arbres (évaluée à l'aide d'indices spécifiques). Elle a révélé que les trois-quarts des galeries forestières, habitat principal des colobes bais, ont disparu et que la  diversité des arbres a chuté de moitié (LYKKE, 1996 ; DIOUCK, 1995, 1999 ; GALAT-LUONG et al., 1998). Les activités humaines tels que le surpâturage, les prélèvements excessifs de bois et les feux incontrôlés, dont les effets s'ajoutent à un déficit important des précipitations (300 mm ces trente dernières années), sont responsables de cette dégradation.

En 2000, des aménagements nouveaux ont été effectués dans le PNDS avec la création d'une réserve privée de faune sauvage de Fathala (installation d'une clôture, de points d'eau, introduction d'espèces nouvelles, gestion privée, ...). Parallèlement, de 1974 à 1976 et de 1988 à 2002, les scientifiques ont suivi l'évolution de la population de colobes bais, qui n'a subi qu'une très faible régression de son effectif, passant de 600 à 500 individus dans le PNDS (noyau central, de la Réserve de Biosphère du Delta du Saloum, RBDS). Les études primatologiques déjà effectuées dans ce Parc (GATINOT, 1975, DIOUCK, 1995) mettent en évidence d'importantes adaptations aux modifications du milieu notamment par des changements de comportement.

Il est ainsi opportun, dix ans après, de réaliser un nouveau suivi au niveau de la zone clôturée de la dynamique de cette population.

3.1.3 Objectifs de l'étude

L'objectif général porte sur l'évaluation des capacités d'adaptation et de survie de ces espèces par rapport aux modifications de leur environnement et au degré de dégradation du milieu.

Les objectifs spécifiques se déclinent comme suit:

- Caractériser l'évolution des habitats des Colobes bais dans la réserve;

- Approfondir les connaissances sur les comportements écologiques et éthologiques des Colobes bais (régime alimentaire, rythme d'activités, utilisation verticale et horizontale du milieu, etc.)  ;

- Discuter et comparer les résultats de cette étude aux travaux botaniques et primatologiques antérieurs

3.1.4 L'espèce étudiée : le Colobe bai d'Afrique occidentale

Les Colobes bais sont des primates arboricoles vivant dans la forêt dense intertropicale. L'Union Internationale pour la Conservation de la Nature (UICN) les compte parmi les espèces les plus menacées d'extinction.

Ils appartiennent à la sous famille des Colobinés qui renferme sept genres dont six asiatiques et un (le genre Colobus) africain.

3.1.4.1 Description générale.

Le Colobe bai d'Afrique occidentale est un singe de taille moyenne, aux longues pattes, au dos arqué et à l'abdomen volumineux. La partie supérieure du corps et l'extrémité de la longue queue sont grises à noires foncées. Le dessous du corps et les pattes sont rouges à oranges. La partie ventrale et la face postérieure des cuisses sont claires. Les yeux sont entourés d'une auréole rosée, tandis que la face glabre est de couleur grise ardoise .Le pouce réduit est l'une des caractéristiques particulières de ce singe, d'où son nom de colobe qui vient du grec kolobos, qui signifie « mutilé ». Le Colobe est doté d'un appareil digestif semblable à celui des ruminants (estomac sacculé). Lors de l'oestrus, la peau sexuelle (appareil génital femelle externe) peut presque atteindre le volume de la tête.

Le poids des colobes bais adultes peut varier de 8 à 10 kg et la longueur de la queue peut atteindre 70 à 80 cm, DORST et DANDELOT (1970). A cause du dimorphisme sexuel, la femelle est légèrement plus petite que le mâle.

3.1.4.2 Ecologie et régime alimentaire.

Le Colobe bai est le singe le plus inféodé aux grands arbres de la forêt tropicale dense humide. Il s'est pourtant adapté aux forêts claires et sèches du Sénégal. Il peut être trouvé dans les galeries forestières du Parcs nationaux du Niokolo koba, de la Basse Casamance et du Delta du Saloum au Sénégal.

Totalement arboricole, il ne descend au sol qu'en Sénégambie là où la dégradation de son habitat ne lui permet plus de se déplacer d'arbre en arbre directement.

Normalement folivore à 90%, il consomme également des fleurs et des fruits quand les feuilles deviennent trop dures en fin de saison sèche. Son estomac sacculé à la manière des ruminants et les bactéries qu'il contient lui permettent de dégrader la cellulose et d'éliminer les toxines des feuilles au prix de très longues phases de digestion.

Figure1. Images de quelques individus de la bande suivie dans la Réserve de Fathala

3.1.4.3 Organisation sociale.

  Les Colobes bais forment des bandes multimâles et multifemelles de 8 à plus de 60 membres. Dans les milieux typiques du Niokolo-Badiar, les domaines vitaux couvrent 10 à 20 ha. Ils sont moins étendus dans les galeries forestières du Delta du Saloum. La troupe est peu structurée et des sous groupes peuvent s'en séparer puis la rejoindre (« scission-fusion »). Contrairement à la plupart des autres systèmes sociaux, ce sont les femelles qui quittent la troupe et émigrent.

3.1.4.4 Comportement.

Les Colobes bais effectuent des bonds impressionnants, utilisant le rebond des branches pour se propulser et la queue comme balancier. Pour atteindre un autre arbre, ils rentrent la tête dans les épaules et leurs mains antérieures aux longs doigts mais au pouce réduit s'agrippent aux branches et leur permettent de se rattraper en cas de chute.

Les bonds sont souvent utilisés par les mâles pour manifester leur dominance. Trois cris sont plus fréquemment émis : des aboiements, des éternuements et des hurlements. Contrairement à la forme des Colobes vivant en Côte d'Ivoire, les femelles n'ont au Sénégal pas de vocalisation de copulation. 

3.1.4.5 Taxonomie et répartition géographique

Le Colobe bai africain appartient à la classe des Mammifères :

- Ordre des Primates ;

- Sous ordre des Simiens ;

- Infra ordre des Cathariniens ;

- Famille des Cercopithécidés ;

- Sous famille des Colobinés ;

- Genre Colobus appelé également Procolobus ou Piliocolobus;

- Espèce badius ;

- Sous-espèce temmincki.

Les travaux de Diouck (1999) nous renseignent en détail sur la répartition géographique des Colobes bais qui se rencontrent du Sénégal à la Tanzanie. Ainsi nous avons :

- Le Colobe bai d'Afrique occidentale, Colobus badius, qui comprend deux sous espèces :

- C.b temmincki, présent dans les îlots forestiers du Sénégal, de la Gambie et de la Guinée Bissau ;

- C.b badius, dont l'aire de répartition jouxte celle de C.b temmincki. Il a été observé dans le bloc forestier d'Afrique occidentale en Côte d'ivoire et en Guinée.

- Le colobe bai, C pennanti, qui comprend de nombreuses sous-espéces :

- C. p. waldroni avec une aire de répartition située à l'est de celle de C. b. badius ;

- C. p. tephroceles signalé en ouganda et en Tanzanie ;

- C. p. oustalleti en Centrafrique ;

- C.p rufomitratus ou Colobe bai à tête rousse, noté au Kenya ;

- C.p.tholloni, d'Afrique centrale ;

Ces différentes sous-espèces sont regroupées en une seule espèce, Procolobus badius par la commission de survie des espèces de l'UICN qui maintient les mêmes noms de sous-espèces.

D'autre Colobes sont aussi observés en Afrique. C'est le cas du :

- colobe guéreza d'Angola (Colobus angolensis)

- colobe à longs poils ou à camail (Colobus polykomos)

- colobe guéreza noir (Colobus satanas)

- Le colobe roux du Cameroun (Procolobus preussi)

- Le colobe vert olive ou colobe de Van Beneden (Procolobus verus).

3.1.5 LA ZONE D'ETUDE 

La réserve de Fathala fait partie de la forêt de Fathala. Cette dernière constitue la partie continentale du PNDS, un des noyaux centraux de la Réserve de Biosphère du Delta du Saloum (R.B.D.S).

3.1.5.1 La Réserve de Biosphère du Delta du Saloum.

Le Delta du Saloum (carte 1) a été érigé par l'UNESCO et l'Etat du Sénégal en Réserve de Biosphère le 16 mars 1981 du fait de la richesse et de la diversité de ses écosystèmes. La RBDS est située sur les côtes de l'Afrique de l'Ouest, au centre ouest du Sénégal, dans la partie estuarienne du bassin hydrographique du Sine-Saloum, du Diomboss et du Bandiala, à la frontière gambienne. Elle est localisée entre 13°35 et 14°15 de Latitude Nord et 16°03 et 16°50 de Longitude Ouest. Elle couvre une superficie de 180 000 hectares. Au plan administratif, elle correspond aux arrondissements de Djilor, Toubacouta, Niodor et Fimela, partie intégrante de la région de Fatick comprenant surtout des villages et quelques agglomérations comme Sokone, Foundiougne, Niodior et Betenti. Comme toute réserve de la biosphère, elle comprend trois zones :

- les noyaux centraux représentés par le PNDS, la Réserve naturelle communautaire de palmarin et l'Amp de Bamboug ;

- la zone tampon utilisée pour les activités compatibles avec les objectifs de conservation et ;

- la zone périphérique pour des pratiques d'utilisation durable des ressources ;

Carte 1. Carte de la Réserve de Biosphère du Delta du Saloum

3.1.5.2 Le Parc National du Delta du Saloum 

Le Parc National du Delta du Saloum (PNDS), créé le 28 mars 1976 par décret N° 76.577 est située à sa partie sud-ouest et couvre une superficie de 76 000 ha. Il se caractérise par la présence de trois principaux milieux écologiques : un domaine continental riche en forêts et limité dans sa partie basse par la mangrove et les tannes ; un domaine amphibie composé de trois grands groupes d'îles bordés par un réseau dense de chenaux entourés de mangroves ; et un domaine maritime. Ces trois milieux ont des fonctions relativement différentes et sont fortement dépendants du point de vue de leur fonctionnement, leur dynamique et leur évolution.


Le domaine continental est l'habitat principal de la grande et moyenne faune sauvage, il est la principale source trophique (eau et constituants organiques et minéraux) des cours d'eau estuariens et de son écosystème mangrove. C'est aussi la zone la plus dégradée de la RBDS, plus de 80% de la superficie est défrichée, l'avancée de la langue salée et des tannes et, la dégradation de la mangrove est très remarquable à ce niveau. L'érosion hydrique drainant une forte proportion de particules sableuses est une menace à long terme pour les écosystèmes vasière-mangrove d'une part, et les galeries forestières d'autre part.

Le domaine amphibie qui constitue l'estuaire est le milieu principal de reproduction, de nourrissage et de repos des espèces halieutiques et les oiseaux d'eau. Cette richesse est maintenue grâce aux nombreuses vasières, chenaux ou bolons bordés de mangrove. Les îles et îlots inhabités constituent les derniers refuges de la grande et moyenne faune sauvage.


Le domaine maritime renferme une série d'îlots, de banc de sable et d'importants herbiers. C'est la principale zone de reproduction des oiseaux, les Laridea en particulier. L'île aux oiseaux étant le principal site. Grâce à son herbier, il est le domaine maritime de nourrissage de tortues marines, de crevettes et lieu de convergences de plusieurs espèces halieutiques. Quoique zone de haute importance en termes de conservation, il est le premier site de pêche de la RBDS.

Le Delta du Saloum constitue le 6ème estuaire dans le monde pour sa diversité ichtyofaunique (114 espèces de poissons). Il représente aussi un important site de reproduction et d'alimentation des tortues marines, du lamantin, du dauphin souza.

Le parc a été désigné site Ramsar en 1984 ce qui lui confère le statut de zone humide d'importance internationale particulièrement comme habitat d'oiseaux d'eau. Il est devenu en 2008 avec le Niumi en Gambie le premier site Ramsar transfrontière africain. Le Delta du Saloum fait aussi partie du club des plus belles baies du Monde.

Il faut également signaler que le Delta du Saloum est le troisième site d'importance ornithologique de l'Afrique de l'Ouest après le Banc d'Arguin (Mauritanie) et le Djoudj (Sénégal). C'est une terre d'asile pour des centaines de milliers d'oiseaux. Il accueille annuellement le quart de la population mondiale de sternes royales et constitue un important quartier d'hiver pour les oiseaux migrateurs du paléarctique. Le Parc National du Delta du Saloum renferme des vasières, des reposoirs et dortoirs pour de nombreuses espèces d'oiseaux et de chapelets d'îlots leur servant de lieux de reproduction. Parmi ces derniers, le plus important correspond à l'Ile aux oiseaux (environ une longueur d'une dizaine de km et une largeur maximale de 500 m) qui est une zone de nidification essentiellement pour les larideaes (sterne royale, sterne caspienne, mouette à tête grise, goéland railleur, etc.), les hérons, les tortues marines...

Le parc abrite des forêts de mangroves. La mangrove et les vasières qui y sont associées jouent un rôle important pour la fixation des côtes et l'approvisionnement des populations en multiples produits naturels de base (bois, huîtres, coquillages), mais également constituent des sites importants pour la reproduction de nombreuses espèces halieutiques. Les poissons qui trouvent dans le delta un lieu de reproduction exceptionnel comptent 114 espèces.

Le rôle socio-économique du delta du Sine-Saloum est donc essentiel dans ce pays qui dépend très largement de la pêche artisanale tant pour ses revenus que pour son apport en protéines. Aussi, près de 200 000 habitants habitent dans la périphérie immédiate du parc et dépendent en grande partie de la pêche et l'écotourisme.

Carte2. Carte de situation du PNDS dans la RBDS

3.1.5.3 La Reserve de Fathala

La réserve de Fathala est le lieu où l'essentiel de nos recherches en termes de suivi de la dynamique des colobes bais a été réalisé. Elle constitue ainsi notre principal site d'étude. Elle est partie intégrante de la forêt classée de Fathala. Cette dernière, située entre 13°41' de latitude nord et 16°30' de longitude ouest, est classée en 1934 et rattachée en 1986 au PNDS dont elle constitue la partie continentale. La forêt de Fathala couvre une superficie de 7 300 ha dont 2000 ha clôturés et consacrées à la réserve privée.

La réserve privée de Fathala fut créée vers l'année 2000, par des actionnaires privés qui travaillent en étroite collaboration avec la DPN. Elle a une superficie de 6000 ha de forêt classée. Ses 2000 ha clôturés et visitables sont ouverts au public en Avril 2003.

Il est à noter que depuis 2000, l'Etat sénégalais, dans le cadre du partenariat public/privé a concédé une partie de la forêt classée de Fathala à la Société de Protection de l'Environnement et de la Faune Sauvage (SPEFS), sur la base d'un protocole d'accord. La substance du protocole et du cahier de charges qui lui est adjoint porte sur des obligations de réintroduction et d'introduction d'espèces de la faune, l'inventaire régulier des stocks, l'aménagement des habitats, l'appui aux communautés locales vivant autour de la Réserve privée (adduction en eau à partir d'un forage, contribution à l'emploi des jeunes, etc.). En contre partie, la DPN représentant l'Etat se doit de veiller au respect des aménagements, de contribuer au suivi de la dynamique des populations introduites ou réintroduites, de lutter contre le braconnage. Bien qu'il y ait eu des acquis en ce qui concerne la remontée biologique, la reconstitution de certains habitats et l'effort d'aménagement, une bonne évaluation de l'expérience du partenariat avec le privé est toutefois nécessaire pour aider à servir d'axes d'orientation à la volonté de l'Etat du Sénégal d'impliquer d'avantage le secteur privé dans la gestion des aires protégées.

En outre, cette réserve a permis de garder des animaux dans leur milieu originel (le phacochère, le crocodile, des singes dont le Colobe bai, etc.). D'autres espèces comme l'antilope sauvage qui avaient disparu y ont été réintroduites, en même temps que des animaux originaires d'Afrique du Sud (la girafe, le rhinocéros blanc, le zèbre, l'impala, l'élan du cap...).

Pour ce qui est des ressources floristiques, la forêt classée de Fathala est marquée par une grande diversité. Elle renferme 125 espèces ligneuses appartenant à 39 familles. Parmi ces espèces, 28% sont d'affinité soudano guinéenne. Les reliques de forêts galeries et de forêts claires abritent une population de colobe bai qui se situe ainsi dans la partie la plus septentrionale de son aire de répartition et qui en plus, subit la menace de la fragmentation et de la dégradation des habitats.

Du point de vue des aménagements et infrastructures, plusieurs dizaines de kilomètres de pistes sillonnent la réserve et permettent aux visiteurs de voir de prés les animaux et de s'en approcher. Un lac artificiel est aménagé pour permettre l'abreuvement des animaux surtout en saison sèche.

Le site d'études

Carte 3. Localisation du site d'étude

3.1.5.4 Cadre institutionnel, législatif et réglementaire

Du point de vue institutionnel, le PNDS relève de la Direction des Parcs Nationaux du Sénégal qui est sous la tutelle du Ministère de l'Environnement et de la Protection de la Nature.

Il est régi au niveau national par deux textes de loi essentiellement, à savoir : le Code de la Chasse et de la Protection de la Faune et le Code Forestier. En plus de ces deux textes, le PNDS dispose d'un règlement intérieur.

Au niveau international, le cadre réglementaire de la gestion du PNDS est marqué par la ratification du Sénégal de conventions portant sur la gestion des aires protégées.

Tableau 1. Tableau synthétique des textes juridiques internationaux signés par le Sénégal concernant la gestion de la RBDS

TITRE

DATE

SIGNATURE

OBJET

Londres (Angleterre)

05-1954

02-1972

Convention sur la prévention de la pollution par les hydrocarbures en mer

Genève (Suisse)

04-1958

01-1964

Convention sur le droit de la mer (Nations Unies). Haute mer, ressources biologiques.

Alger (Algérie)

09-1968

11-1971

Convention africaine pour la conservation de la nature et des ressources naturelles.

Bruxelles (Belgique)

11-1969

 

Convention sur la pollution par les hydrocarbures en haute mer.

Ramsar (Iran)

02-1971

04-1977

Convention relative aux zones humides d'importance internationale.

Paris (France)

11-1972

 

Convention sur la protection du patrimoine mondial, culturel et naturel (UNESCO).

Washington (USA)

03-1973

06-1977

Convention sur le commerce international des espèces de la faune et de flore menacées.

Bonn (Allemagne)

06-1979

 

Convention relative à la protection des espèces migratrices du paléarctique occidental.

Berne (Suisse)

09-1979

04-1987

Convention relative à la conservation de la vie sauvage et des milieux naturels d'Europe.

Abidjan (Côte d'Ivoire)

03-1981

07-1982

Convention régionale relative à la coopération en matière de protection et de mise en valeur du milieu marin et des zones côtières de l'Afrique de l'Ouest du Centre.

Montégo Bay (Jamaïque)

12-1982

08-1984

Convention sur le droit de la mer (Nations Unies). Tracé des lignes de base.

Vienne

03-1985

09-1992

Convention pour la protection de la couche d'ozone

Montréal (Canada)

09-1987

 

Protocole relatif aux substances qui appauvrissent la couche d'ozone.

Bâle (Suisse)

03-1989

07-1992

Convention sur le contrôle des mouvements transfrontières de déchets et de leur élimination.

Rio (Brésil)

05-1992

06-1992

Convention sur la diversité biologique et les ressources génétiques.

Rio (Brésil)

05-1992

04-1994

Convention sur les changements climatiques.

TITRE

DATE

SIGNATURE

OBJET

Rio (Brésil)

05-1992

10-1994

Convention des Nations Unies pour la

conservation de la biodiversité

Paris (France)

10-1994

04-1995

Convention sur la lutte contre la désertification.

Kyoto (Japon)

11-12-1997

 

Protocole relatif aux changements climatiques

AEWA (La Haye)

1995

 

Accord sur la conservation des oiseaux d'eau

migrateurs d'Afrique-Eurasie

Tableau 1. Tableau synthétique des textes juridiques internationaux signés par le Sénégal concernant la gestion de la RBDS (suite et fin)

3.1.5.5 Caractérisation du milieu biophysique

3.1.5.5.1 Le relief

Le Delta du Saloum se situe à environ 120 km au sud de Dakar. Dans l'ensemble le relief de la région est très plat et reste inferieur à 0,5 m d'altitude. Les seules élévations observées sont les falaises de sable, les dunes et les amas coquilliers (accumulations d'origine anthropique) pouvant atteindre jusqu'à cinq mètres.

3.1.5.5.2 Le cadre pédologique

La couverture pédologique du Delta du Saloum est constituée de :

- sols ferrugineux tropicaux lessivés développés respectivement sur la couverture gréseuse du continental terminal et sur des dunes continentales. Ce sont ces types de sol qui occupent de manière générale la forêt de Fathala ;

- sols sulfatés acides des tannes, dénudés et impropres à l'agriculture. Ils servent de reposoir pour certains oiseaux tels que les Mouettes à tête grise et les Goélands railleurs ainsi que certains mammifères comme le Singe vert qui affectionne les crabes violonistes qui colonisent ce type de sol ;

- sols hydromorphes organiques peu évolués des vasières actuelles. Ils constituent des zones de gagnage pour certains oiseaux migrateurs comme le Courli courlieu et le Grand courli ;

- sols minéraux et sols peu évolués d'apport sur cordons sableux récents ou accumulation des limons éoliens qui constituent des reposoirs de prédilection des Sternideae ;

- sols calcimorphes de type rendzine riches en matière organique des amas artificiels de coquilles.

3.1.5.5.3 Hydrologie et dynamique marine

Le régime hydrographique est de type sahélien. L'écoulement fluvial est directement influencé par le régime saisonnier des pluies : les hautes eaux correspondent à la saison des pluies et les basses eaux à la saison sèche. Il n'en demeure pas moins que la marée reste le principal facteur de l'hydrodynamique estuarienne. 

L'estuaire tire la configuration de son réseau de trois bras de mers : le Saloum au nord, le Bandiala au Sud et le Diomboss entre les deux. Ceux-ci forment par leur interconnexion un lacis dense de chenaux de marées appelés bolongs. Le Saloum, partiellement séparé de la mer par la flèche de Sangomar, présente depuis la rupture de celle-ci en 1987 deux embouchures : l'une à Sangomar (environ 1800 m de large) et l'autre à Lagoba (environ 5 km, nouvelle ouverture).

L'estuaire du Saloum s'ouvre sur une côte à marée et à forte énergie de houle. Il est ainsi noté deux types de houle, l'une en provenance de l'Atlantique nord (direction nord-ouest) agit pendant toute la saison sèche ; l'autre en provenance de l'Atlantique sud (direction sud-est) pendant la saison des pluies. La houle du nord a une action plus prépondérante, elle est responsable d'une dérive littorale qui conditionne la dynamique des cordons littoraux en amont.

Carte 4. Réseau hydrographique du PNDS

3.1.5.5.4 Le climat

Le climat se caractérise par des régimes thermiques et hydriques de type tropical soudanien subissant la double influence de la pluviométrie et des effets océaniques en particulier dans les marges maritimes de l'estuaire. Il est caractérisé par :

- une saison sèche (froide de novembre à mars, chaude de mars à juin), où les vents dominants sont les alizés maritimes, frais (de direction nord à nord-ouest) et les alizés continentaux secs (de direction est à nord-est, harmattan) ;

- une saison des pluies (chaude et humide, de juillet à octobre), où dominent les vents de mousson (de direction ouest et sud-ouest).

Les températures moyennes annuelles se maintiennent autour de 26 à 31° C. Les normales pluviométriques accusent une nette régression passant de 800-950 mm en 1931-59 à 600-750 mm pour la normale 1960-1989 soit une baisse comprise entre 18% et 24%. Cette baisse de pluviosité est l'un des principaux facteurs de dégradation du paysage du parc et de la perte de biodiversité. Les conséquences les plus remarquables de ce déficit pluviométrique sont la sursalure des eaux marines, la baisse des nappes phréatiques, la salinisation et l'acidification des terres ainsi que des eaux souterraines. Il en a résulté, d'une part une dégradation des mangroves et des formations forestières qui, à certains endroits (forêts galeries par exemple), connaissent une évolution tendancielle du type soudano-guinéen vers les types soudanien et soudano-sahélien, d'autre part une crise de l'ensemble des systèmes de productions agricoles.

Figure 2. Pluviométrie de la zone d'étude entre 1950 et 2008. (CADL de Toubacouta)

Figure 3. Données climatiques sur la zone d'étude (Bâ et al ,1999)

T : température moyenne mensuelle ; E : évaporation moyenne mensuelle ; HRA : humidité relative moyenne mensuelle de l'air ; P : pluviométrie moyenne mensuelle

3.1.5.5.5 La végétation

Le PNDS est située dans une zone de transition entre le domaine soudano-guinéen au sud et le domaine sahélo-soudanien au nord. Elle présente une végétation et une flore relativement diversifiée, en fonction de la géomorphologie de la zone et des types de sols.

La végétation est présente sur deux types de milieux : les zones submersibles marquées par la prédominance de la mangrove et les zones non submersibles (dans lesquelles se situe la Réserve de Fathala) caractérisées par une diversité d'unités géomorphologiques variant des forêts galeries aux savanes boisées en passant par les forêts claires.

AUBERVILLE (1948), définit la forêt de Fathala comme étant une forêt soudanienne claire et sèche. La forêt claire est une formation arborée dont les éléments sont suffisamment espacés pour que le sol reçoive plus de lumière que d'ombre. Ces conditions favorables d'éclairement permettent le développement d'une strate herbacée très dense, essentiellement formée de graminées.

Du point de vue des unités géomorphologiques, on observe dans la Réserve de Fathala trois communautés végétales à fort caractère saisonnier composées de :

- une strate herbacé couvrant la presque totalité de la Réserve, qui se développe pendant la période pluvieuse jusqu'à plus de trois mètres de haut et se dessèche très vite en saison sèche ;

- une savane boisée avec une strate ligneuse composée essentiellement d'arbustes (des combrétacées en majorité) et quelques grands arbres d'origine guinéenne ;

- une galerie forestière le long de la vallée qui se distingue des zones de savane par une canopée et une flore où dominent les espèces guinéenne (Pterocarpus erinaceus, Saba senegalensis, Detarium Senegalens,). Elle constitue le milieu classique des Colobes

La zone d'étude présente de nombreuses espèces ligneuses telles Daniella olivera, Cordyla pinnata, Pterocarpus erinaceus, Lanea acida, Khaya senegalensis, Parkia biglobosa, Sclerocarya birrea, Terminalia macroptera, T avicenoides, Combretum glutinosum, Piliostigma reticulatum, Parinari macrophylla, Detarium Seneglens, Acacia nilotica et Borassum aethiopium.

3.1.5.6 Le cadre socio-économique

Les habitants de la périphérie du PNDS appartiennent à deux principaux groupes ethniques:

- les Sérères, qui peuplent les îles du Gandoun et les bordures de la RBDS;

- et les Mandingues, qui habitent les îles Bétenti.

La religion dominante dans la zone est l'Islam. Les densités de population sont estimées entre 21 et 77 habitants au km² selon les arrondissements. On estime également que l'ensemble de la RBDS avait, en 1988, une aire globale d'influence regroupant plus d'1,3 millions de personnes.

Cette population est caractérisée par sa jeunesse (55% ont moins de 30 ans) et sa mobilité.

En outre, l'économie de la zone repose essentiellement sur des activités liées aux ressources naturelles. Il s'agit de l'agriculture, de la pêche, de l'élevage, de la cueillette de produits forestiers, du tourisme, de l'extraction du sel et de l'exploitation des coquillages.

3.1.5.6.1 L'agriculture et l'élevage

Durant les années 1960 et 1970, le Programme Agricole a facilité le défrichement de toutes les terres du domaine continental non classé. Le système de production est basé sur la rotation annuelle entre cultures de rente et céréales dans les terres de plateau, la culture du riz dans les bas-fonds et le développement de maraîchage dans les vallées en saison sèche. Malgré un énorme potentiel, l'agriculture est confrontée dans le Delta du Saloum dans de nombreuses zones à une salinisation des terres et une érosion des sols.

Un élevage de type extensif est pratiqué en association avec l'agriculture et est relativement développé dans la périphérie de la partie continentale du PNDS. De timides essais d'intensification sont notés dans la zone. Du fait de l'extension des terres de cultures allouées à l'agriculture, des conflits d'utilisation de l'espace sont parfois notés avec l'élevage. Il s'y ajoute en relation avec cette contrainte que la divagation du bétail est souvent notée au niveau du Parc.

3.1.5.6.2 La pêche

Les bras de mer du Delta du Saloum (Saloum, Diomboss et Bandiala) et les bolongs abritent d'importantes ressources halieutiques. Ces ressources ont permis aux populations riveraines de développer une activité de pêche et de cueillette significative associée à l'agriculture dans certaines localités. Selon le niveau d'association de ces deux activités par les populations, on distingue:

- les villages et campements de pêcheurs exclusifs qui pratiquent la pêche toute l'année ;

- les villages et campements de pêcheurs où la pêche est une activité étroitement liée à l'agriculture ;

- les villages et campements de pêcheurs occasionnels où la pêche est pratiquée à petite échelle en saison pluvieuse.

En outre, le prélèvement d'huîtres et de coquillages est la principale activité des femmes des îles du Saloum en plus de la transformation de produits dérivés de la pêche. On estime que près de 40% des mises à terres de la pêche sont transformées sur place par les femmes essentiellement.

3.1.5.6.3 Exploitation forestière

Les populations tirent de la forêt des produits ligneux (bois de chauffe, bois d'oeuvre) et non ligneux (fruits, feuilles, racines, écorces, etc.) qui leur permettent de diversifier leurs revenus et leur consommation en protéines végétales.

Les prélèvements de produits ligneux entraînent cependant une pression de plus en plus forte sur les forêts et certaines essences sont surexploitées (Pterocarpus erinaceus, Cordyla pinnata, Bombax costatum, Daniellia oliveri, etc.).

3.1.5.6.4 La chasse

L'activité cynégétique est surtout l'oeuvre des touristes dans les zones amodiées. Il existe à proximité du Parc deux zones amodiées (le long de la route transgambienne et qui constituent un territoire de nourrissage très importants pour le petit et moyen gibier) à savoir : celle des hôtels Palétuviers (20 000 ha) et la zone amodiée du relais le Saloum (30 000 ha). Le nombre de permis de chasse délivrés par an au niveau de ces zones s'élève à une centaine. Ces permis concernent surtout la petite chasse. Pour les autochtones, la chasse cible les pintades et les francolins pour la consommation familiale. L'une des principales contraintes à la chasse demeure la raréfaction du gibier liée à la dégradation de leur habitat et à l'absence d'eau.

3.1.5.6.5 L écotourisme

Le tourisme de vision occupe une place de choix dans le tissu économique de la région. Il s'y développe grâce aux grandes potentialités liées au climat, à la diversité des espèces animales et des paysages ainsi qu'aux ressources culturelles. Le tourisme de vision constitue également l'essentiel de recettes recouvrées par la Réserve animalière de Fathala, grâce aux nombreux touristes qui viennent chaque jour contempler les différents animaux de la Réserve tels que les girafes, les élands et les colobes bais.

3.1.5.6.6 Les activités extractives

Les activités extractives se limitent au niveau de RBDS à l'exploitation des coquillages et à l'extraction du sel. L'exploitation des amas coquilliers qui s'est intensifiée depuis 1982, comporte des aspects négatifs sur l'environnement (réduction de la protection physique de certaines petites îles du fait de la dégradation du couvert végétal, risque d'augmentation de la sédimentation dans les chenaux de marée) et sur le patrimoine (dégradation de sites reconnus comme faisant partie du patrimoine culturel, historique et archéologique.

3.2 LA DEMARCHE METHODOLOGIQUE

Le stage réalisé s'insère dans un projet initié par la DPN en partenariat avec la Réserve de Fathala. Nous avons ainsi pu bénéficier d'un appui de l'équipe locale du Fathala notamment pour le guidage. A ce sujet, un employé de la réserve a été mis à notre disposition pour toute la durée du stage. Il nous a servi de guide tout le temps passé dans la réserve à observer les animaux. Nous avons de ce fait profité de sa connaissance du terrain pour le repérage rapide des bandes notamment la bande étudiée, toutes les fois que nous sommes partis dans la réserve.

3.2.1 Hypothèse de recherche

Cette étude repose sur deux hypothèses qu'il conviendrait de rappeler :

A- La réserve de Fathala abrite la majeure partie des populations de Colobe bai d'Afrique occidentale rencontrées dans le Delta du Saloum ;

B- Les colobes bais du Delta du Saloum au Sénégal sont parvenus à faire face à la dégradation de leur milieu naturel et à surseoir à une disparition qui paraissait inéluctable.

3.2.2 Méthode d'étude

La méthodologie de travail est basée sur une démarche intégrée incluant la recherche documentaire, la collecte des données de terrain basée sur les observations de l'espèce, et le traitement des données recueillies. Concomitamment et en fonction des besoins de complément d'informations, nos avons effectué des recherches bibliographiques au niveau des centres de documentation des institutions de recherche (UCAD et IRD entre autres). Ainsi, l'étude menée se présente en quatre étapes citées ci-après. 

3.2.2.1 Recherche bibliographique 

Plusieurs revues et articles sur le Colobe bai et sa conservation dans le Saloum sont exploités pour une meilleure connaissance de l'espèce (biologie, comportement, habitat). Le maître de stage, en l'occurrence Dr DIOUCK dont les travaux sur les primates sont souvent cités en référence dans ce document a mis à notre disposition une documentation très fournie sur le Colobe bai. Cela nous a permis de faire l'état des connaissances actuelles sur cette espèce et de collecter beaucoup d'informations importantes pour mieux aborder la phase de terrain. Cette revue documentaire s'est poursuivie tout au long du stage et même durant la phase de rédaction.

En outre, nous avons parallèlement pris contact avec des spécialistes et personnes ressources des différentes disciplines participant au projet et sur lesquels nous nous sommes beaucoup appuyés à chaque fois que le besoin d'informations et de conseils en termes d'orientation et d'amélioration de l'étude s'est fait ressentir. Les sources d'informations et de données sont : les gestionnaires de la réserve de Fathala, les agents du PNDS, les agents des eaux et forêts, les Institutions de recherches (IRD, UICN etc.), les autres acteurs du Secteur de l'Environnement et de la Protection de la Nature et enfin les communautés locales.

3.2.2.2 Prospections et pré enquêtes

Nous avons débuté cette étape au mois de mai. Elle a duré deux semaines et a consisté à sillonner toute la réserve pour repérer les animaux en général et les bandes de colobes bais en particulier. Nous avons été assisté les trois premiers jours par le Dr DIOUCK qui a tenu à être à nos côtés sur le terrain pendant le démarrage du stage pour nous expliquer de façon pratique la manière de procéder aux observations mais également pour s'assurer que nous nous sommes appropriés la méthode.

Nous avons parcouru toutes les pistes aménagées dans la réserve en véhicule tout terrain. Un parcours ponctué par des arrêts répétés où, à pied, nous sommes entrés régulièrement à l'intérieur de la forêt pour observer de prés à la fois la faune, l'habitat, le sol, le relief, la végétation et les différents aménagements.

Ces observations ont été complétées par des enquêtes auprès des agents de la réserve notamment ceux qui nous ont servi de guides. Nous avons ainsi mis à profit cette étape de prospection pour identifier les différentes unités du milieu biophysique et caractériser les modes d'occupation de l'espace par les animaux afin d'avoir une compréhension globale de l'organisation de l'espace et de son utilisation.

3.2.2.3 L'étude de terrain

3.2.2.3.1 Étude botanique

Il est ici question d'étudier le paysage et son rôle dans la conservation de la biodiversité dans la réserve de Fathala. Ce paysage est le support de la biodiversité au sein d'un écosystème et il représente souvent une entrée pour les modèles biologiques de dynamique des espèces.

Cette étude botanique va permettre à terme de répondre à un certain nombre de questions concernant l'évolution de la dynamique du peuplement végétal.

Observe - t'on une stabilité d'un équilibre dynamique ou, au contraire, le peuplement est-il en évolution ? Dans ce cas cette évolution se traduit-elle par des modifications quantitatives (abondances, biomasses, production) ou concerne-t-elle également des changements dans la biodiversité (apparition ou/et disparition d'espèces ou de groupes fonctionnels) ? Quelles sont les variables qui interviennent, et en particulier quels sont les rôles respectifs des causes naturelles (climatiques à grande échelle) et locales (anthropiques) dans ces changements ?

Ainsi dans le cadre de l'analyse des habitats nous avons pris des indicateurs composites prenant en compte différents paramètres (nombre d'espèces et leurs effectifs). Il s'agit des indices de diversité. Celles que nous avons utilisées pour étudier la structure taxonomique du peuplement sont l'Indice de Shannon et celui de Simpson. Ces deux indices précis et pratiques étaient également les plus couramment utilisées dans la littérature.

3.2.2.3.2 Densité des ligneux.

GATINOT (1975) et LYKKE (1993) ont effectué des relevés floristiques dans la forêt de Fathala respectivement entre 1971-1972 et 1991-1992. DIOUCK (1999) a également effectué des relevés floristiques au niveau de la forêt de Fathala en 1996.

Nous avons effectué 9 relevés floristiques sur des parcelles de 20 m x50 soit une superficie totale de 0,9 ha. Seuls ceux mesurant plus de 1,5 m de haut ont été répertoriés dans chaque parcelle. Leur hauteur est mesurée à l'oeil nu et leur diamètre mesuré à hauteur de poitrine à l'aide d'un ruban métrique.

Cette méthode de travail est compatible avec celle utilisée par GATINOT (1975), LYKKE (1993) et DIOUCK (1999). C'est une approche très appropriée notamment pour les études comparatives

3.2.2.3.3 Indice de Shannon-Weawer

H = - Ó ((Ni / N) * log2 (Ni / N))

Ni : nombre d'individus d'une espèce donnée, i allant de 1 à S (nombre total d'espèces).

N : nombre total d'individus.

Diversité maximale ou équiprobalité Heq= log2S

La diversité relative (H') est le rapport entre la diversité observée H et la diversité maximale théorique H'=H/Heq

3.2.2.3.4 Indice de Simpson

L'indice Simpson ou dominance (D) se définit comme :

D = - Ópi²

On peut l'interpréter comme la probabilité que deux individus pris au hasard parmi le peuplement soient de la même espèce. Elle montre prédominance de certaine espèce dans le milieu

3.2.2.3.5 Étude éco-éthologique des Colobes bais

Suivre une bande de Colobe bai implique une phase de familiarisation des individus observés à l'observateur, avant de pouvoir noter chez les sujets un comportement naturel. Dans le cadre de cette étude nous supposons que les sujets observés s'étaient accoutumés à notre présence dans la mesure où aucun changement relatif à leur comportement n'a été noté à notre approche.

3.2.2.3.6 Choix de la bande.

A la suite des premiers entretiens avec l'administration de la Réserve de Fathala (prise de contact), au cours desquels nous avons exposé l'objectif de notre étude, les guides nous ont signalé une bande qu'ils avaient l'habitude de voir le long d'une piste dénommée « piquenique ». Nous nous sommes aussitôt intéressés à cette piste que nous avons parcourue pendant la phase de prospection pour observer ladite bande. D'autres pistes ont été visitées également durant la même période pour identifier d'autres bandes.

Somme toute, nous avons choisi de suivre cette bande sur conseil de nos guides et surtout par rapport aux études antérieures et pour des études comparatives

3.2.2.3.7 Effectif et structure sociale des bandes.

Le passage des singes d'un arbre à l'autre et leur déplacement du sol vers un arbre ou inversement, permet de faire le dénombrement de la bande. Du coup, c'est au coucher du soleil, entre 19h et 20h quand les colobes se regroupent pour regagner leurs dortoirs et au petit matin, entre 7h et 8h quand ils repartent à la recherche de nourriture que nous avons procédé au décompte. En réalité c'est durant ces horaires que l'on a le plus souvent, l'occasion d'observer toute la bande réunie.

Nous avons utilisé les critères de GALAT-LUONG (1983) pour déterminer le sexe et l'âge des colobes que nous avons suivis.

Tableau 2. Critères d'âge et de sexe, extrait de GALLAT-LUONG (1983)

Classes

Description

Taille

Maturité sexuelle

MA

- Scrotum développé.

- Silhouette massive

- Favoris accentués

Adulte

+

FA

- Tétons dépassant la fourrure

- Peau sexuelle cyclique (volume en fonction du cycle sexuel)

- Silhouette gracile

4/5 du MA

+

MS

- Scrotum non développé.

- Silhouette massive

- Favoris accentués

4/5 du MA

-

FS

- Tétons ne dépassant pas la fourrure

- Favoris réduits

- Silhouette gracile

4/5 du MA

-

J

- Silhouette gracile

2/3 A

-

E

- Porté

½ J

-

I

- Porté de teinte pâle

< ½ E

-

Légende : MA : mâle adulte ; FA : Femelle adulte ; MS : mâle subadulte ; FS : Femelle subadulte ;

J : Juvénile ; E : enfant II; I : enfant I

3.2.2.3.8 Rythme circadien

L'échantillonnage séquentiel a été utilisé pour mesurer le temps passé par les colobes bais à mener les différentes activités journalières. Les observations se font de 7h à 20h. Un intervalle de temps de 15 mn est devenu la norme standard notamment pour les études comparatives (CLUTTON-BROCK, 1972, 1973, 1974, STRUSHAKER, 1975 ; GALAT, 1975, GALLAT-LUONG, 1977).

Le principe consiste à relever l'état (hauteur dans l'arbre par exemple) ou l'activité (locomotion, alimentation...) des sujets observés à intervalles de temps réguliers (tous les quarts d'heure), par balayage aux jumelles de gauche à droite (sens unique) pour éviter de compter deux fois le même individu dans une même séquence.

Tous les quarts d'heure, une durée maximale de 7mn30s a été retenue conformément aux méthodes citées en référence. Cinq secondes d'observation sont nécessaires pour s'assurer que l'animal est indifférent à notre présence et déterminer les autres paramètres à étudier (sexe, âge). Les valeurs retenues sont celles mesurées à la cinquième seconde. Toutefois, le temps requis pour consigner les activités d'une bande de colobe est fonction de la visibilité.

Pendant la journée, les animaux consacrent le temps disponible à l'exécution des tâches en relation avec la survie des individus et des espèces, GALAT, G (1983). Aussi, nous nous sommes focalisés pour cette étude, aux quatre types d'activités retenus par cet acteur, notamment l'alimentation, la locomotion, les activités sociales (épouillage, sautillement, câlins...), le repos.

L'alimentation correspond à l'absorption d'énergie nécessaire au métabolisme et à l'ensemble des activités.

La locomotion correspond à la dépense de l'énergie nécessaire au déplacement des animaux sur les lieux propices à l'exécution de l'ensemble des activités.

Les activités sociales se définissent comme étant des comportements assimilés à un investissement préservant l'avenir de l'espèce (câlins, vigilance, stratégie anti-prédateur, jeux et alloépouillage)

Le repos comprend les comportements favorisant la réduction des dépenses énergétiques. Le maintien pendant la journée, d'un niveau minimal de vigilance permet de réduire le danger lié à cette activité.

3.2.2.3.9 Domaine vital

Nous avons relevés au GPS tous les endroits où les Colobes bais ont été rencontrés durant nos observations de terrain. Nous avons reporté les points sur une carte aérienne de la forêt de Fathala. Nous avons relié les points extrêmes pour déterminer le domaine vital de la Bande. Nous avons mesuré la surface correspondant au domaine vital en superposant la zone délimitée et une grille de quadras d'un hectare. Le comptage des carrés dans la surface, permet d'estimer l'aire du domaine vital. C'est une méthode simple, couramment utilisée en primatologie et permettant des études comparatives (GALAT, G 1983 ; Benhamou, 1998).

3.2.2.3.10 Régime alimentaire

Nous avons noté l'espèce et la nature de l'aliment consommé lors de nos observations. Pour cette étude, nous ne prenons en compte que les prises alimentaires observées lors des échantillonnages séquentiels.

Nous avons prélevé des échantillons que nous avons identifiés par la suite en nous référant aux ouvrages de BERHAUT (1967) et MAYDEL (1990). Nous avons également profité de la connaissance des plantes, de certains guides.

Les préférences alimentaires sont exprimées en termes de proportion, en pourcentage des aliments consommés en N observations sur le total des observations.

3.2.2.3.11 Estimation des hauteurs des arbres et des distances

Après plusieurs exercices d'estimations des hauteurs connues (arbres adjacents à des bâtiments et à des poteaux électriques), nous avons au cours des échantillonnages séquentiels, estimé à l'oeil nu la hauteur des arbres et des Colobes par rapport au sol. Les distances interindividuelles ont été également estimées à l'oeil nu. Elles donnent une idée sur la cohésion des classes d'âge au sein de la bande.

3.2.2.3.12 Classification des supports

En nous référant sur la classification de GALAT (1983), nous avons considéré quatre types de support. Il s'agit, des supports de type I, II, III, IV (cf. figure 4).

Figure4. Classification des différents types de support utilisés par les Colobes bais (extrait de GALAT 1983)

3.2.2.4 Traitement des données et rédaction du mémoire

Le traitement des données collectées se fait principalement à l'aide des logiciels Excel pour les analyses statistiques, l'élaboration des figures mais également à l'aide de logiciels de cartographie pour élaborer les cartes.

3.2.2.5 Les limites de l'étude

Ce travail réalisé dans la Reserve de Fathala ne s'est pas effectué sans quelques difficultés.

La non accessibilité des lieux d'observation des Colobes pendant la saison des pluies liée à l'impraticabilité de la plupart des pistes du fait des inondations, a beaucoup ralenti le travail de terrain pendant les mois d'août, de septembre et d'octobre. Qui plus est, l'existence d'une strate herbacée comportant un tapis de grandes herbes graminéennes mesurant plus de un mètre de hauteur et la densité du couvert végétal ont facilité le camouflage des animaux et rendu les observations difficiles pendant cette période.

La principale conséquence de ceci a été une rallonge de trois mois, sur le délai initialement prévu pour mener cette étude.

4 RESULTATS

4.1 DYNAMIQUE DE LA VEGETATION LIGNEUSE

Les primates arboricoles sont très dépendants de leurs habitats. L'évolution des habitas dans la forêt classée de Fathala a été étudiée par GALAT-LUONG & al. (1998b), LYKKE (1993) et DIOUCK (1999)

4.1.1 Densités globales des ligneux, hauteur et diamètre des arbres

Les relevés floristiques effectués au niveau de la Réserve de Fathala nous ont permis de recenser 194 individus sur une superficie de 0,9 ha correspondant aux neuf échantillons (parcelles) de 1000 m² ; soit une densité de 214 individus / ha.

Tableau 3. Fréquence des différentes espèces répertoriées dans la Réserve de Fathala au cours de cette étude.

ESPÈCES

FRÉQUENCE (%)

NOMBRE

Sclerocarya birrea

3,10880829

6

Khaya senegalensis

0,51813472

1

Acacia macrostachya

7,77202073

15

Pterocarpus erinaceus

11,9170984

23

Cordyla pinnata

3,10880829

6

Lannea acida

3,62694301

7

Daniella Oliveri

28,4974093

56

Combretum nigricans

3,62694301

7

Borassus flabellifer

0,51813472

1

Terminalia macroptera

3,10880829

6

Piliostigma reticulatum

2,07253886

4

Terminalia avicemoides

19,6891192

38

Combretum glutinosum

5,69948187

11

Prosopis africana

2,59067358

5

Guiera senegalensis

3,62694301

7

Parkia biglobosa

0,51813472

1

TOTAL

100

194

L'évolution de la densité globale des ligneux et des indices de biodiversité (Shannon et Simpson) a été faite en comparant, selon les méthodes de GATINOT en 1975, de LYKKE en 1993, les espèces constituant plus de 90% des relevés

Figure 5 : Pourcentage des différentes classes de hauteur des arbres dans les milieux de savane de la Réserve de Fathala

Trente cinq pour cent (35%) des arbres ont une hauteur comprise entre 2 et 4 m contre 9% pour les essences de 10 m et plus de haut.

Sur ce registre, il est à noter que la mise en défens de la Réserve et la réalisation d'une clôture grillagée en 2002 pour limiter les facteurs de dégradation d'ordre anthropique (exploitation sélective de bois, feux tardifs entre autres) ont permis une meilleure conservation du couvert végétal qui s'est traduite par une bonne régénération des arbres d'où la prédominance des arbustes de diamètre à hauteur de poitrine compris entre 0,1 et 0,5% avec un pourcentage d'environ 60% des observations (figure 6).

Figure 6. Proportions des arbres des différentes classes de diamètre

4.1.2 Evolution de la densité des principales espèces ligneuses

La comparaison des densités tirés des travaux de GATINOT (1975), LYKKE (1993) et DIOUCK (1999) et cette étude laissent apparaître des variations très marquées.

Figure 7. Variation des densités des principales espèces ligneuses de 1972 à 2010 dans la Forêt de Fathala

La figure 7 montre une augmentation assez nette de la densité des espèces qui faisaient l'objet d'une surexploitation sélective (Pterocarpus erinaceus, Daniellia oliveri...). En effet, la densité à l'hectare du Pterocarpus erinaceus (très recherché par les coupeurs de bois) a quadruplé en moins de 15 ans en passant de 7 individus/ha en 1972 dans la forêt de Fathala à 28 individus/ha en 2010 dans la partie clôturée pour les mêmes raisons que celles déjà évoquées.

4.1.3 Evolution de la biodiversité des ligneux dans la forêt de Fathala

4.1.3.1 Indice de Shannon

1972 : H' (diversité relative) = 0,79

1992 : H' (diversité relative) = 0,57

1996 : H' (diversité relative) = 0,30

2010 : H' (diversité relative) = 0,42

Figure 8. Variation de la diversité floristique entre 1972 et 2010 dans la forêt de Fathala

La figure 8 montre une baisse de la diversité de 49% entre 1972 et 1996 et une remontée de la diversité de 12% entre 1996 et 2010. Cette augmentation de la diversité entre 1996 et 2010 est le résultat du mode de gestion qui prévaut dans la Réserve de Fathala depuis 2003 basée sur l'interdiction totale de toute forme de prélèvement des ressources ligneuses.

4.1.3.2 Indice de Simpson

1972 : D (Dominance) = 0,15

1992 : D (Dominance) = 0,31

1996 : H' (diversité relative) = 0,53

2010 : H' (diversité relative) = 0,15

Figure 9. Variation de la Dominance entre 1972 et 2010 à Fathala

La figure 9 montre une augmentation de la dominance de l'ordre de 38% entre 1972 et 1996 et une diminution du même ordre de grandeur (38%) entre 1996 et 2010.

4.2 PARAMÈTRES SOCIO-ÉCOLOGIQUES : TAILLE ET STRUCTURE SOCIALE DE LA BANDE

Nous avons pu déterminer l'effectif de la bande après plusieurs comptages effectués à des moments où la bande regagne les dortoirs (fin de journée) et tôt le matin ainsi que lors des descentes au sol.

Onze comptages ont été effectués sur la bande (23 ; 22 ; 21 ; 19 ; 20 ; 22 ; 21 ;22 ; 22 ; 22 ; 25). Nous avons dénombré une fois un effectif de 23 individus et une fois un effectif de 25 individus. Les neuf autres comptages sont compris entre 19 et 22 individus. Du coup, l'effectif moyen considéré est de 22 individus. Cet effectif correspond au comptage le plus régulier (45% des décomptes) que nous avons effectué et le plus proche de la moyenne (21,72 individus) que nous avons obtenu.

La bande de 22 individus ainsi étudiée est composée 3 MA, 8 FA, 2 S, 4 J, 2 E et 3 I.

4.3 DOMAINES VITAL

Le domaine vital est estimé à 28 ha (figure 10). La densité est estimée à 0,78 individu /ha.

Figure 10. Domaine vital de la bande de Colobes bais dans la Réserve de Fathala

4.4 ARBORICOLISME

Nous avons dans le cadre de nos travaux, cherché à connaître la façon dont ces primates se comportent en termes d'utilisation verticale du milieu. Nous nous sommes ainsi intéressés à la hauteur occupée par les singes dans les arbres, leur présence au sol, l'utilisation des différents types de support et leur variation.

4.4.1 Stratification

L'examen de la figure (12) montre que les strates supérieures sont les plus utilisées par les Colobes bais. Elles représentent 65% des observations. Par contre le taux de présence au sol des Colobes bais représente 2,3% des observations.

Figure 11. Niveau d'utilisation des différentes strates par les Colobes bais

4.4.1.1 Hauteur moyenne

La hauteur moyenne de la bande dans les arbres est de 9, 44 m. Il faut toutefois noter que cette hauteur varie au cours de la journée notamment en fonction de l'activité, de l'âge et du sexe.

4.4.1.1.1 Hauteur moyenne et âge

L'analyse de la figure 12 montre que la hauteur moyenne des adultes et des immatures dans les arbres varie au cours de la journée. Toutefois on note une légère variation de la hauteur de ces deux classes d'âge.

Figure 12. Variation journalière de la hauteur des Colobes bais en fonction de l'âge

4.4.1.1.2 Hauteur moyenne et sexe

Figure 13. Variation journalière de la hauteur des Colobes bais en fonction du sexe

Cette figure montre que c'est à 12 h que la différence de hauteur entre les mâles (8 m) et les femelles est la plus importante. La hauteur dans les arbres des mâles est supérieure à celle des femelles entre 10 h et 13 h et entre 17 h et 19 h. Par contre, la hauteur dans les arbres des femelles est supérieure à celle des mâles entre 7 h et 10 h et entre 14 h et 15 h. Le reste du temps, les mâles et les femelles sont presque au même niveau de hauteur.

4.5 LA PRÉSENCE AU SOL

Le taux de fréquence au sol des Colobes bais suivis est également calculé comme pour les hauteurs moyennes.

Le taux de présence des Colobes au sol est estimé à 2,33% avec une fréquence de 80% pour les mâles et de 20% des observations pour les femelles. Aucun immature n'a été observé au sol.

4.6 UTILISATION DES SUPPORTS

La figure 14 montre que les supports de type III sont les plus utilisés par les Colobes bais avec 54 % des observations. Les supports de type I sont les moins fréquentés. Ils représentent 3% des observations.

Par ailleurs, on observe une variation de l'utilisation des quatre types de support au cours de la journée (figure 15). Le temps de présence maximum est enregistré au niveau des supports avec des pics à 14 h pour le type III, à 7 h pour le type IV et à 19 h pour les deux. Les supports de type I et II sont faiblement utilisés.

Types de support

Figure 14. Niveau d'utilisation des différents types de support par les Colobes bais

Figure 15. Variation et niveau d'utilisation des différents types de supports au cours de la journée.

Figure 16. Niveau d'utilisation des supports par les Colobes bais en fonction du sexe

La figure 16 montre que les femelles utilisent d'avantages les supports de types III. Par contre, il n'y a pas de grande différence dans l'utilisation des supports de type I, II et IV entre les femelles et les mâles

4.7 LES ESPÈCES D'ARBRES UTILISÉES PAR LES COLOBE BAIS

Il ressort de nos observations (figure 17) que le Khaya senegalensis est l'espèce la plus utilisée par les Colobes bais. Ce sont des arbres de grande taille pouvant faire plus de 13 m de haut.

Figure 17. Niveau d'utilisation des différentes espèces d'arbres par les Colobes bais

Am: Acacia macrostachya ; Do : Daniellia oliveri ; Ds : Detarium senegalense ; Gs: Guiera senegalensis ; Ks : Khaya senegalensis; Pe : Pterocarpus erinaceus

4.8 RYTHME CIRCADIEN

La figure 18 donne le pourcentage moyen du temps passé par les Colobes bais à exercer les différentes activités au cours de la journée.

L'analyse de cette figure montre que les Colobes bais passent bien plus de la moitié de leur temps au repos (environ 61% du total des observations contre 18% pour l'alimentation, 11% pour la locomotion et 10% pour les activités sociales)

Figure 18. Pourcentage moyen du temps passé par les Colobes bais

à exercer les différentes activités au cours de la journée.

As : activité sociale ; R : repos ; L : locomotion ; A : alimentation

4.8.1 Les variations journalières

Nous observons comme l'illustre la figure 19 des variations journalières des quatre activités retenues.

Figure 19. Variation journalière des activités de la bande suivie

As : activité sociale ; R : repos ; L : locomotion ; A : alimentation

4.8.2 Activités et âge

Une variation nette est observée en fonction de l'âge des animaux suivis pour les quatre types d'activités (figure 20)

Figure 20. Variation des activités en fonction de l'âge

L'examen de ce graphique montre que concernant la bande suivie, les adultes s'alimentent, se déplacent et se reposent plus que les jeunes. Seules les activités sociales sont plus importantes chez les jeunes que chez les adultes

4.8.3 Activités et sexe

Figure 21. Variation des activités en fonction du sexe

L'analyse de la figure (24) montre que les femelles s'alimentent, font du social et se reposent plus que les mâles. Par contre, ces derniers se déplacent plus que les femelles

4.8.4 Activité et hauteur moyenne

Suivant les différentes heures de la journée, nous observons une variation de la hauteur moyenne des Colobes bais suivis dans les arbres. Les Colobes bais effectuent leurs activités à des hauteurs différentes au cours de la journée.

Nous avons également constaté que les activités sont en majorité effectuées à des hauteurs de 9 m et plus.

4.8.5 Activité, hauteur moyenne et âge

La hauteur moyenne des Colobes bais suivis en fonction des activités et des classes d'âge est illustrée par la figure 22

Figure 22. Hauteur moyenne des Colobes bais suivis dans les arbres en fonction de leur âge et de leur activité

L'analyse de cette figure montre que par rapport aux jeunes, les adultes s'alimentent et se déplacent à des hauteurs plus élevées. Quant aux jeunes, ils effectuent des activités sociales et se reposent à des hauteurs plus élevés que les adultes.

4.8.6 Activités, hauteur moyenne et sexe.

La figure (23) présente les résultats de la hauteur moyenne des individus suivis dans les arbres en fonction des quatre activités et du sexe.

Figure 23. Hauteur moyenne des Colobes bais suivis dans les arbres en fonction de leur sexe et de leur activité

Les résultats présentés par cette figure montrent que les mâles s'alimentent et se déplacent plus haut que les femelles. Les femelles quant à elles, se reposent et effectuent des activités sociales à des niveaux de hauteur plus élevés que les mâles.

4.8.7 Activité et présence au sol

Le tableau (4) donne les résultats de la présence au sol de la bande étudiée.

Tableau 4. Taux de présence au sol de la bande

TYPES D'ACTIVITÉS

PRÉSENCE AU SOL (%)

Alimentation

0

Social

0

Locomotion

60

Repos

40

Total

100

L'analyse de ce tableau montre que seuls les déplacements (60%) et le repos (40%) sont effectués au sol par les Colobes bais. Les autres activités n'ont pas été observées au sol pendant toute la durée de notre étude.

4.8.8 Activités et support

En fonction du type d'activité, nous observons une variation dans l'utilisation des supports par les Colobes bais.

Types de supports

Figure 24. Taux de présence des Colobes bais sur les différents types de supports

Nous constatons à travers ce graphique qu'à part l'alimentation, les supports III sont les plus utilisés par les Colobes bais pour toutes les trois autres activités (76% pour le social, 54% pour la locomotion et 52% pour le repos). Les supports de type IV sont de préférence utilisés pour l'alimentation (53% des observations). Le repos est effectué sur les supports de type II et III. Les supports I sont essentiellement utilisés pour la locomotion.

4.9 RÉGIME ALIMENTAIRE

Les résultats de cette étude montrent que les végétaux constituent l'essentiel des aliments consommés par la bande suivie. Nous n'avons pas observé de consommation ni d'aliments d'origine animale ni d'eau.

4.9.1 Espèces végétales consommées

Cinq espèces végétales sont consommées par les Colobes de la bande suivie. Il s'agit de Acacia macrostachya (Am), Daniellia oliveri (Do), Detarium senegalens (Do), Khaya senegalensis (Ks) et Pterocarpus erinaceus (Pe).

Khaya senegalensis joue un rôle important en matière d'alimentation des Colobes bais. Il représente 64% des observations parmi les cinq espèces qui participent au régime alimentaire de la bande. Il est suivi du Detarium senegalens 17,65%. Daniellia oliveri est l'espèce la moins consommée avec environ 3% (figure 25).

Figure 25. Taux de consommation des différentes espèces végétales par les Colobes bais

Am: Acacia macrostachya ; Do : Daniellia oliveri ; Ds : Detarium senegalense ; Gs: Guiera senegalensis ; Ks : Khaya senegalensis; Pe : Pterocarpus erinaceus

4.9.2 Types d'aliments consommés

Les résultats montrent une préférence dans le choix des types d'aliments consommés (figure26).

Figure 26. Taux de consommation des différents types d'aliments par les Colobes bais

L'analyse de cette figure montre une forte prédominance des jeunes feuilles dans l'alimentation de ces Colobes bais. Ainsi, trois quarts des aliments consommés sont constitués de feuilles jeunes (76%). Les autres catégories d'aliments sont constituées de feuilles adultes (18%) d'écorces (3%) et de fruits (3%).

5 - DISCUSSION

5.1 EVOLUTION DES HABITATS.

La faune sauvage est très dépendante de la végétation qui constitue généralement les habitats. L'évolution de la densité globale des ligneux et des indices de biodiversité (Shanon et Simpson) a été faite en comparant les espèces constituant plus de 90% des relevés botaniques de GATINOT en 1975, de LYKKE en 1993 et celles que nous avons prises dans la Réserve de Fathala.

Tableau 5 .Évolution de la densité ligneuse de la forêt de Fathala

TYPE

DENSITÉ (INDIVIDUS/HA)

1975 1996 2010

Forêt claire et savane

517 238 214

En trente cinq ans, la densité globale des ligneux dans la forêt de Fathala a nettement diminué. Ainsi, le nombre d'individus par hectare a baissé de plus de la moitié entre 1975 et 2010 dans les forêts claires où nous avons effectué nos observations. Selon LYKKE (1996), la dégradation de la forêt de Fathala est très rapide et les galeries forestières sont très menacées. La savane devient de plus en plus ouverte avec une diminution du nombre d'espèces et une raréfaction des essences forestières.

L'une des contraintes les plus importantes porte sur la forte densité démographique qui tourne autour de 77 habitants au km² dans les villages situés à la périphérie du PNDS contre une moyenne nationale de 35 habitants au km². Face à cette croissance démographique rapide, la surexploitation des ressources naturelles dans cette zone à fort potentiel est devenue inévitable.

Ainsi la Réserve de Fathala fait l'objet d'une forte pression anthropique avec la recrudescence des cas de braconnage, d'exploitation frauduleuse de bois et de produits forestiers non ligneux ainsi que des feux incontrôlés. Malgré sa mise en défens et la pose d'une clôture pour mieux conserver les ressources in-situ, cette Réserve ne reste pas moins sujette au phénomène de dégradation progressive des écosystèmes observé au PNDS.

Tableau 6. Indices de variation de la diversité et de la dominance à Fathala entre 1972 et 2010

 

DIVERSITÉ RELATIVE I. SHANNON

1972

1992

Variation

1996

2010

Variation

Forêt claire

0,79

0,57

-22%

0,30

0,42

+12%

 

DOMINANCE I. SIMPSON

1972

1992

Variation 1996 2010 Variation

Forêt claire

0,15

0,31

+10% 0,53 0,15 - 0,38

Le tableau (6) montre l'évolution de la diversité et de la dominance dans la forêt de Fathala entre 1972 et 2010.

L'analyse comparative montre une baisse de 49 % de la diversité ligneuse entre 1972 et 1996 et inversement une augmentation de la dominance de 38%.

En effet certaines espèces d'arbustes comme les combrétacées (Combretum glutinosum, Combretum nigricans) très adaptées au milieu sahélien sont devenues dominantes pendant cette période. Galat-Luong et al (1998b) avait mis en évidence le cas du Combretum nigricans, une espèce indicatrice de dégradation du milieu forestier qui a vu sa densité multipliée par six.

Cette dégradation du couvert ligneux (perte de densité, baisse de la biodiversité) est relative à une diminution de 30% de la pluviométrie sur prés de 40 ans (depuis 1971) avec comme corollaire l'accroissement de la mortalité du couvert arboré d'une part et la dégradation des ressources hydrologiques (baisse de la nappe phréatique, assèchement du réseau hydrographique) d'autre part.

Il s'y ajoute que les premières analyses faites par LYKKE (1993) ont mis en cause des feux tardifs et du surpâturage dans le processus de dégradation de la forêt de Fathala. Elle a montré qu'en l'absence de feu précoce, ou si celui-ci n'a pas été mené efficacement, il y a de fortes chances pour qu'un feu tardif de saison sèche se déclare et compromette sérieusement l'équilibre écologique de la forêt. Cela arrive d'ailleurs très souvent à Fathala et seules les plantes très résistantes pourront subsister dans les zones fortement brûlées (on peut citer les feux de brousse de novembre 1995 et de novembre 2009 qui ont eu à brûler à deux reprises le poste de commandement du PNDS). Ces feux provoquent d'importantes modifications de la physionomie et de la diversité végétale et limitent la régénération des essences forestières et surtout guinéennes.

Par ailleurs, entre 1996 et 2010 on a noté dans la réserve, une évolution positive de la biodiversité de l'ordre de 12% accompagnée d'une diminution de la dominance d'environ 38%. Cela démontre l'amélioration de l'état de conservation de la biodiversité dans la Réserve avec la nouvelle politique de mise en défens axée sur le renforcement des moyens de surveillance et l'installation d'une clôture en 2002. Ces nouvelles mesures de conservation ont également légèrement contribué à la régénération du peuplement des ligneux, très recherché par le Colobe bai. Les résultats de nos relevés floristiques illustrent bien cette situation avec un pourcentage de 58% des arbres de diamètre (mesuré à la hauteur de poitrine) compris entre 0,1 et 0,5 m.

5.2 PARAMÈTRES SOCIO-ÉCOLOGIQUES

5.2.1 Taille des bandes

Les deux groupes de Colobes bais suivis par DIOUCK (1999) dans la même forêt comportent respectivement 12 et 22 individus et les trois groupes recensés par GALAT-LUONG (1988) comprennent respectivement 18, 17, 20 individus. Ces effectifs sont très proches de ceux que nous relevés sur la bande étudiée. Ils correspondent à ceux déterminés en Gambie par STARIN (1981, 1990) compris entre 22 et 32 individus.

Par ailleurs, pour le sexe ratio, le taux de masculinité est égal à celui observé par GATINOT, (1975) et largement supérieur à celui noté par DIOUCK (1999).

Le taux d'immature est presque deux fois plus élevé que celui relevé par DIOUCK (1999). La dégradation de la forêt de Fathala ne semble pas avoir affecté la structure sociale de la bande étudiée.

Tableau 7. Comparaison des effectifs et de la structure sociale et démographique des populations de Colobes bais de Fathala et ceux relevés chez une population à Pirang

AUTEUR

EFFECTIF

TAUX DE MASCULINITÉ

TAUX D'IMMATURES

STRUCTURE SOCIALE

Cette étude

22

2,66

1

Multimâles- multifemelles

DIOUCK (1999)

12-22

1 à 1,33

0,5 à 0,7

Multimâles-multifemelles

GALAT-LUONG (1988)

17-20

?

?

Multimâles-multifemelles

GATINOT (1975)

9-62

1,25 à 2,66

?

Multimâles-multifemelles

5.2.2 Domaine vital

Le domaine vital de la bande étudiée s'étend sur 28 ha, environ deux fois supérieure à celui mesuré par GATINOT (1975) en forêt claire. Il est également plus important que celui relevé par DIOUCK (1999), qui est de 17 ha contre 28 ha. Cela ne s'écarte pas des conclusions de GALAT (1983) et GALAT-LUONG (1983) selon lesquelles plus la taille de la bande est importante, plus le domaine vital est grand.

Tableau 8. Comparaison des domaines vitaux des Colobes bais des forêts de Fathala et

de Pirang en Gambie

Auteur

Domaine vital (ha)

Nombre de bandes

Type de milieu

Cette étude

28

1

Forêt claire

(valeur extrême)

DIOUCK (1999)

17

1

Forêt claire

28

1

Galerie forestière

(valeurs extrêmes)

 

 

GALAT-LUONG (1988)

22,26

3

Ilôts forestiers

(valeur moyenne)

GATINOT (1975)

9-19,7

7

Galerie forestière

8,5-14,6

2

Forêt claire

(valeurs extrêmes)

 

 

Cet écart entre cette étude et celles d'autres auteurs (Tableau 8) pourrait être la résultante des nombreuses modifications observées dans la forêt de Fathala. Les forêts claires sont devenues par endroits très ouvertes. La ressource est moins abondante et moins variée même si on note une certaine reprise de la biodiversité dans la réserve de Fathala.

Alors qu'il y a trois décennies, la végétation était dense et variée, au point de permettre l'exploitation d'une petite surface pendant plusieurs jours consécutifs sans se déplacer, les Colobes bais parcourent aujourd'hui des distances plus importantes à la recherche d'une nourriture de plus en plus dispersée dans le milieu.

Il faut donc aux Colobes bais deux fois plus d'espace en 2010 pour satisfaire les mêmes besoins alimentaires qu'en 1972.

5.2.3 Arboricolisme et présence au sol

Il y a 35 ans, la hauteur moyenne des Colobes bais dans les arbres était estimée à 9 m (GATINOT, 1975). Cette hauteur est la même que celle mesurée au cours de cette étude (9,44 m) largement supérieure à celle relevée par DIOUCK (1999) estimée à 5,7 m.

Ainsi, même si globalement on note une dégradation de la forêt de Fathala, dans la partie clôturée, les nouvelles mesures de conservation ont permis de préserver des essences ligneuses essentielles pour la survie des Colobes bais.

A cet effet, GATINOT (1975) a montré que les Colobes bais cherchaient toujours de préférence le quart supérieur des arbres. Ces observations sont faites également par GALALT-LUONG (1988) chez les Colobes bais de la forêt de Pirang en Gambie, localité située environ à 40 km au sud de la Gambie. Les Colobes étudiés à Pirang passent prés de 80% de leur temps dans les plus hauts arbres contre 18% seulement au niveau des strates inférieures. La présence de ces singes arboricoles dans les plus hautes strates de la végétation est relative à leur mode d'alimentation constituée en majorité de jeunes feuilles abondantes au niveau de la canopée.

Tableau 9. Variation de la hauteur moyenne des Colobes bais dans la végétation

AUTEUR

HAUTEUR MOYENNE (M), OU STRATE, % DES COLOB

Cette étude

9,44m

DIOUCK (1999)

5,7m

GATINOT (1975)

9m

GALAT-LUONG (1988)

Emergent+Canopée (>20m), 80% des observations

Strate inférieure (4-5m), 17,6% des observations

Sol (0m), 2,4% des observations

Par rapport à l'utilisation des différentes strates, la bande suivie utilise de préférence, non plus le premier quart supérieur comme l'avait mesuré GATINOT (1975), mais le deuxième quart supérieur (entre 8-12 m pour cette étude) avec 57,62% des observations, alors que le pourcentage des observations pour le premier quart supérieur n'est que de 10%.

Ce changement d'utilisation de la végétation notamment peut être lié à une diminution des grands arbres (essences guinéennes) et de leur densité.

Les descentes au sol des Colobes bais se sont nettement accrues entre 1972 et 1996 avec des taux d'utilisation qui ont varié entre 0,1% GATINOT (1975) et 5%, DIOUCK (1999). Cette différence de comportement peut être relative à la régression du couvert végétal et particulièrement de la canopée. La disparition de cette canopée, oblige souvent les Colobes bais à descendre au sol pour se déplacer d'un arbre à l'autre, à la recherche de nourriture.

Entre 1996 et 2010, la présence au sol est passée de 5% à 2,32%. Il faut donc souligner que même si on a noté une certaine évolution positive de la biodiversité dans la réserve, les Colobes utilisent toujours le sol pour surtout leur déplacement d'un point à l'autre. Ce comportement adaptatif est lié à la faible densité des arbres et aussi à l'état de dégradation de la forêt comparé aux données de 1972.

5.2.4 Rythme circadien

L'étude du rythme d'activités montre la prédominance du repos par rapport aux autres activités. Cela peut s'expliquer par un régime alimentaire essentiellement folivore nécessitant une plus longue période de digestion.

Le temps passé par les Colobes bais à exercer les différentes activités varie en fonction de la journée. Elles sont interdépendantes. Les activités alimentaires sont plus importantes en début de matinée et en fin d'après-midi. Ce sont des animaux diurnes qui n'effectuent aucune activité durant la nuit. Ils doivent donc combler le déficit énergétique accusé durant la nuit et emmagasiner le maximum d'énergie pour leur repos nocturne. Les activités alimentaires sont observées pratiquement toute la journée. La valeur nutritive peu élevée de la nourriture des Colobes bais essentiellement constituée de feuilles, nécessite une alimentation répétée tout au long de la journée.

Le temps consacré aux différentes activités est aussi fonction de l'âge, du sexe, de la hauteur par rapport au sol et du type de support. Les adultes consacrent beaucoup plus de temps à l'alimentation que les jeunes. Cela est lié à leur poids plus important qui demande un apport alimentaire plus élevé. En revanche, les jeunes passent plus de temps aux activités sociales, les jeux notamment, qui selon GALAT-LUONG (1983) sont liés à l'apprentissage de la vie (apprendre à s'alimenter, à mener des relations sociales, à se déplacer vite et à déjouer les pièges). L'alimentation a lieu de manière générale pour l'ensemble des individus de la bande à des hauteurs supérieures à 7 m et sur des supports de types III et IV principalement. C'est dû à une plus grande disponibilité des feuilles jeunes dans les hautes strates.

Les descentes au sol étaient très occasionnelles. La présence d'une canopée au niveau des galeries forestières facilitait les déplacements des Colobes bais d'un point à un autre. Nous avons observé une disparition progressive de cette strate au niveau de ces biotopes obligeant les singes à descendre plus souvent au sol. Aujourd'hui nous observons une régénération du couvert végétal ainsi qu'une diminution du taux de présence au sol à l'intérieur de la Réserve liées à la nouvelle politique de préservation de ce site.

5.2.5 Le régime alimentaire

L'essentiel du régime alimentaire des Colobes bais de la Réserve est constitué d'espèces végétales. Les jeunes feuilles prédominent dans leur ration alimentaire. La préférence des éléments jeunes par les Colobes bais s'explique par leur teneur élevée en protéines et en eau, ce qui les dispense de boire. Cette stratégie d'évitement des éléments végétaux adultes démontre d'une manière générale le comportement opportuniste des Colobes bais du Fathala. Les aliments matures ne sont consommés que par nécessité. Ils ne sont en aucun moment prédominant dans l'alimentation des Colobes. En effet, selon HLADICK (1977), les teneurs en sucres assimilables et en protéines des feuilles matures sont sensiblement inférieures à celles des jeunes filles. De plus elles sont susceptibles de contenir des quantités importantes de tannins (qui constituent un obstacle contre les consommateurs de feuilles en diminuant leur taux d'absorption des protéines, d'alcaloïdes éventuellement toxiques et de fibres non digestibles.

La diminution du nombre des espèces végétales utilisées dans le régime alimentaire des Colobes bais (5 pour cette étude, contre 30 en 1996, DIOUCK (1999) et 39 en 1976, GATINOT (1977)) peut être liée à la baisse de la diversité végétale observée aussi bien dans les forêts claires que dans les galeries forestières entre les années 70 et 80.

Nous avons observé que la prédominance de Khaya senegalensis dans la ration alimentaire des Colobes bais est plus liée aux variations de leur cycle phénologique, donc de leur relative richesse en feuilles jeunes au moment des observations qu'à leur densité dans le peuplement ligneux.

L'examen du tableau 10 montre que les Colobes bais mangent aujourd'hui beaucoup plus de feuilles jeunes (76%) qu'en 1996 (56,7%). Cette différence de comportement entre 1996 et 2010 peut être liée à l'amélioration des conditions du milieu avec la régénération des ligneux enregistrée depuis la clôture de la Réserve en 2002.

Tableau 10. Régime alimentaire comparé des Colobes de la Réserve de Fathala en 2010 avec celui observé  dans ma forêt de Fathala en 1996

ALIMENT

CETTE ÉTUDE

DIOUCK (1999)

Aliments végétaux

100%

100%

Feuilles jeunes

76%

56,7%

Feuilles adultes

18%

7%

Ecorces

3%

0,7

Bourgeons

?

13,9%

Fleurs

?

0,8%

Pétioles

?

1,7

Fruits

3%

18,8

Eau

0

0

pédoncules

 

0,2

Divers

0

0

La diversification de la composition des aliments qui constituaient le régime alimentaire du Colobe bai en 1996 (quand la dégradation du couvert végétal était manifeste), illustre la remarquable capacité de cette espèce classiquement considérée comme un mangeur strict de feuilles, à développer des réponses adaptatives aux changements de leur environnement. En fait, ce changement de comportement alimentaire est nécessaire au Colobe bai de Fathala qui est souvent confronté à des problèmes écologiques sévères.

Cette grande capacité d'adaptation explique certainement le maintien de la population de Colobes bais dans cette zone de savane dégradée (600 individus en 1972 contre 500 en 2002).

* 1 Président de longue date du Groupe de spécialistes des primates de la Commission de la sauvegarde des espèces de l'UICN et président de Conservation International (CI).

précédent sommaire suivant










Bitcoin is a swarm of cyber hornets serving the goddess of wisdom, feeding on the fire of truth, exponentially growing ever smarter, faster, and stronger behind a wall of encrypted energy



"Un démenti, si pauvre qu'il soit, rassure les sots et déroute les incrédules"   Talleyrand