L'évaluation à mi- parcours des projets de développement communautaire: le cas des puits à pompe du Projet d'Appui au Développement Communautaire ( PADC ) de Mebomo et de Bikogo (Centre- Cameroun )( Télécharger le fichier original )par Yanik YANKEU YANKEU Université catholique d'Afrique Centrale Yaoundé - Master en développement et management des projets en Afrique 2008 |
1- Les éléments socioculturelsa- La démographie et les équipements de socialisation La population de Mebomo est estimée à environ 750 habitants sur un espace de 24,5 km², soit une densité de 29 habitants au km². Mebomo comprend cinq hameaux : Mebomo marché, Chefferie, Ossan, Nkolbikon et Nkolofumbi. Les habitats ont une disposition linéaire, de part et d'autre du long des routes, qui traversent les différents hameaux. Les maisons sont en forme rectangulaire, faites soit de poto-poto ou en semi-dur. Chaque famille en compte deux : une maison plus grande servant de salle de séjour et de chambres à coucher, l'autre, la plus petite servant de cuisine ; les latrines sont situées légèrement en retrait de la maison. Le devant des maisons sert généralement de lieu de repos, de discussion et de jeux. En saison de cacao, il est le lieu où se sèche le cacao sur des nattes légèrement surmontées de cailloux ou de morceaux de bois. Derrière les maisons se trouvent les bananerais et arbres à fruits divers. Après les vergers de case, la cacao-culture prend le relais et s'étend sur au moins 80% de la superficie du village. A Mebomo, on compte une école primaire publique, une école maternelle publique et une école primaire publique bilingue en cours de réalisation. Le centre de santé le plus proche est le centre de santé intégré de Nkengué, et dans une moindre mesure l'hôpital de district de santé d'Elig Mfomo. Les institutions religieuses présentes dans le village sont : le catholicisme romain et l'église du Plein Evangile. La population du village Bikogo, selon l'ECAM II, est estimée à environ 850 habitants sur une superficie de 35 km² soit une densité de 25 habitants au km². Le village est constitué de six hameaux : Bikogo chefferie, Mikamga, Nkol nanga, Nkol otomo, Zébédé nord et sud. Les habitats ont la même spécificité que Mebomo. On y trouve une école primaire publique, une école maternelle publique et un collège, notamment le collège privé laïc popolorum progressium. Le centre de santé le plus proche est l'hôpital de district de santé d'Elig Mfomo et le centre de santé intégré de Nkengué. Les institutions religieuses présentes à Bikogo sont : le catholicisme romain, l'église du Plein Evangile et l'église presbytérienne. b- L'organisation sociale La population des deux villages est composée des Eton, qui constitue un sous-groupe du groupe septentrional ou Beti, qui au début du 17e siècle, se divise en quatre rameaux avant la traversé de la Sanaga à Nachtigal afin d'échapper au mouvement d'islamisation du nord et des razzia qui s'en suivaient. La société éton se caractérise de prime abord par sa structuration sociale segmentaire lignagère. Cette structuration a permis de distinguer : les clans13(*), les sous-clans ou lignages et de nombreux groupements de familles appelés « Nda-bot » selon Jean Joseph Awono (1990 : 23-26). Cette société est donc constituée d'une pluralité d'unités claniques dispersées. Mais en suivant les types de rapports entretenus par les groupes majeurs, que sont les clans, des regroupements en trois grandes unités de classification permettent de mieux cerner les imbrications entre les différents segments sociaux : le groupe « éton beti », le groupe « beloua beton » et le groupe « éton beloua ». Le préfixe « beti » qui équivaut sémantiquement au terme français « seigneurs », « nobles » ou « les messieurs » et utilisé pour montrer la filiation de ces différentes unités sociales au groupe originellement « pur ». Les groupes « beloua beton » et « éton beloua » sont caractérisés par l'épithète « beloua » qui signifie « les esclaves » marquent le degré de corruption du groupe original au contact des peuples « impurs » intégrés généalogiquement avec le temps à la suite des brassages avec les « seigneurs ». De façon précise, Le nom « Beloua » signifie « esclave » ou « assujetti » et désigne un ensemble hétéroclite de clans minoritaires, qui ont trainé les pas lors des migrations des peuples vers le Sud du pays. Conséquence, ils se sont placés sous la protection des « Beti » lors des guerres pour les conquêtes de l'espace vital. Sévérin Cécile Abega (1987 : 21-23), l'a si bien mentionné, en relevant que, le travail de ses mains (l'esclave) profite à son maître, à qui il verse une quote-part. Il ne peut prétendre à une quelconque paternité d'un enfant. Ainsi, ils entretiennent des rapports de maître à esclave. Cependant note-t-il, un esclave particulièrement méritant pouvait être affranchi par son maître, être assimilé au rang de fils, et obtenir la permission de s'établir à son propre compte. Aujourd'hui, les « Beloua », qui ont généré une forte élite, sont frustrés par le maintien de cette dialectique, qui les place en position de « cadets sociaux », malgré les efforts d'auto-affirmation et de dynamisation dont ils font montre. Le lignage est désigné par le terme « Mvog » et se traduit par l'expression « le lignage de ». Ainsi, chaque géniteur devient fondateur d'un nouveau maillon de la chaîne parentale. Par ailleurs, le lignagère se fragmente en d'autres petits regroupements, entre lesquels, les liens de solidarité sont assez forts, les « Nda-bot ». De façon spécifique, les Esselés qui sont les Eton beti, représentent plus de 80% de la population des villages alors que les Engaps, qui représentent les 20%, font partie des « Beloua ». Toutefois, les Esselé ont trois grandes familles : la famille Menye Tsanga Bissane ; la famille Menye Yii ; la famille Menye Nguene. Ainsi que les Engap : les Mvog Zogo Mmasna (majoritaires), les Mvog Ekono Mekoua et les Mvog Ayissi. L'occupation des sols par les tribus est différenciée. A Mebomo, on retrouve les Engaps au sommet du hameau de la chefferie, les Essélés sont présents dans presque tous les hameaux. Le puits à pompe du PADC de Mebomo est situé dans le hameau de la chefferie en aval de la côte, au milieu des habitations des tribus Essele. A Bikogo, on retrouve les Engaps dans le hameau Zébédé nord et d'autres du côté de Zébédé sud, on retrouve deux à trois familles Esselés dans ce dernier hameau. Le reste des hameaux est essentiellement habités par les Esselés. Le puits à pompe de Bikogo, qui se situe presque au carrefour entre Zébédé nord, zébédé sud et Bikogo chefferie, est tout de même, sur le terrain des Engaps à Zébédé nord. Le système de parenté est basé sur les liens de consanguinité. Une fille appartient au lignage de son père. Mais, une fois mariée, ses enfants appartiennent à celui de leur père et jamais au lignage de sa mère même après le divorce. En fait, la femme éton n'a pas le même statut que l'homme, elle est destinée à un autre lignage, qu'elle contribuera à agrandir par sa progéniture. Les soeurs de la femme appellent affectueusement « mon mari », l'époux de leur soeur, en cas de décès de cette dernière, une de ses soeurs non mariées, peut-être choisie pour s'occuper du foyer de la défunte soeur. Le changement continu des rôles masculins et féminins dans la production a entraîné des conséquences importantes sur la structure sociale et dans la vie de la famille. Les femmes apparaissent comme agents économiques les plus importants. Elles assurent la subsistance du groupe en participant à tous les travaux agricoles dans le champ collectif ou de la famille restreinte. Elles travaillent aussi pour améliorer le quotidien de la famille en se livrant à d'autres travaux champêtres dans des parcelles octroyées par leur mari. Le mariage constitue un acte important et décisif dans la vie du groupe ou de l'individu. Il est, à la fois, un moyen par lequel la société assure sa survie et sa continuité. Il se présente aussi comme un rite de socialisation obligatoire aussi bien pour l'homme que pour la femme. La société ne considère comme un « vrai homme » ou une « vraie femme » que les individus mariés et capables de former une nouvelle famille, l' « élig ». * 13 « Tout clan est un rassemblement des gens qui disent descendre d'un même ancêtre, mais ne pouvant pas remonter tous les maillons de la chaîne. Par contre, le lignage est le groupe de gens qui descendent d'un même ancêtre commun connu. Il peut éventuellement se répartir en différentes branches ou lignées » note Henri Mendras (2002 : 160). |
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