Florent Suxe
La vente « surprise » à l'essai face
au régime juridique des contrats à
distance :
De l'échange des consentements à
l'exercice du droit de rétractation
Mémoire sous la direction de Madame le Professeur Judith
Rochfeld
Master 2 Droit du Commerce électronique et de
l'économie numérique Année universitaire
2012-2013
Remerciements
J'adresse mes remerciements tout particulièrement
aux membres du cabinet 11-100-34 : Eléonore Zahlen, Jérôme
Giusti, Serge Vatine et Axelle Rebut.
Créé par des avocats issus de grands
cabinets d'affaires français et internationaux, le Cabinet 11.100.34.
Avocats Associés oriente résolument ses services vers les
entreprises innovantes dans le domaine des nouvelles technologies.
Conseillant des acteurs majeurs dans le secteur des
télécommunications et des médias, 11.100.34. Avocats
Associés fait également le choix de proposer son expertise
à de jeunes entrepreneurs, porteurs de projets entrepreneuriaux et
créateurs d'entreprise, en leur proposant un accompagnement juridique
spécifiquement adapté, depuis le stade de l'amorçage
jusqu'à celui des levées de fonds.
Proposant les services de véritables startup
lawyers, 11.100.34. Avocats Associés est également partenaire de
nombreux incubateurs, pépinières et accélérateurs
de projets d'entreprises à Paris et en province, en proposant des
consultations in situ et en organisant des LegalCamps sur divers
problématiques juridiques communes aux créateurs
d'entreprise.
3
Sommaire
Introduction Page 6
PARTIE PRÉLIMINAIRE - QUELLE QUALIFICATION POUR
UNE OPÉRATION HYBRIDE ? ENTRE VENTE
ET PRESTATION DE SERVICE PAGE 20
SECTION 1 : Qualification distributive Page
20
§ 1 Les justifications d'une qualification
distributive Page 20
§ 2 Les conséquences d'une
qualification distributive Page 22
SECTION 2 : Qualification unitaire Page
23
§ 1 Les justifications d'une qualification
unitaire Page 23
§ 2 Les conséquences d'une
qualification unitaire Page 25
PARTIE 1 : DE L'INFORMATION A L'ÉCHANGE DES
CONSENTEMENTS DANS LA VENTE « SURPRISE » À
L'ESSAI PAGE 26
CHAPITRE 1 : L'obligation du vendeur de définir
les caractéristiques essentielles de
la chose et son prix Page 26
SECTION 1 : L'objet de l'information : les
caractéristiques essentielles de la chose et
son prix Page 27
§ 1 Interprétation objective et
subjective des caractéristiques essentielles de la
chose Page 27
§ 2 L'information sur le prix Page
31
SECTION 2 : Les conséquences d'un manque
d'informations pour le professionnel
vendeur et l'acte conclu Page 35
§ 1 Les sanctions civiles d'un manque
d'informations par le professionnel. Page 35
§ 2 Les sanctions pénales et
administratives d'un manque d'informations par le
professionnel. .Page
39
4
CHAPITRE 2 : La procédure d'échange des
consentements dans la vente surprise à
l'essai Page 45
SECTION 1 : L'échange principal des
consentements sur le site internet Page 46
§ 1 Le champ d'application de la
procédure du « double clic » Page 46
§ 2 Le respect des étapes de la
procédure d'échange des consentements par le
vendeur
professionnel, gestionnaire du site web Page
50
SECTION 2 : L'échange complémentaire ou
contraire des consentements en dehors
du site internet Page 54
§ 1 L'exclusion européenne du
téléphone mobile et de l'email, des supports de
conclusion du contrat électronique
Page 55
§ 2 Le doute sur l'inclusion française
du téléphone mobile dans le support de
conclusion du contrat par voie électronique
Page 57
CHAPITRE 3 : La validité de l'accord des
volontés face à l'indétermination du prix et
de la chose dans la vente surprise à l'essai
Page 59
SECTION 1 : L'indétermination des biens qui
feront l'objet de la vente Page 60
SECTION 2 : L'indétermination du prix de la
vente totale et du prix propre à chaque
bien Page 62
PARTIE 2 : LE DROIT DE RÉTRACTATION
APPLIQUÉ À LA VENTE « SURPRISE » À L'ESSAI PAGE
67
CHAPITRE 1 : L'autonomie de la faculté d'essai
vis-à-vis du droit de
rétractation Page 67
SECTION 1 : La survivance de la vente à l'essai
lorsque celle-ci est conclue à
distance Page 68
§ 1 Les similitudes entre la faculté
d'essai et le droit de
rétractation Page 68
§ 2 L'application superposée de la
faculté d'essai et du droit de
rétractation Page 71
5
SECTION 2 :La survivance du droit de
rétractation au cours de l'essai Page 72
CHAPITRE 2 : L'articulation du droit de
rétractation et de la faculté d'essai....Page 75
SECTION 1 : Les raisons de la stipulation d'une
condition résolutoire Page 76
§ 1 L'inclusion du délai de
rétractation dans le délai d'essai Page 76
§ 2 Le transfert des risques Page
77
SECTION 2 : Les modalités d'exercice du droit
de rétractation Page 80
§ 1 De la rétractation sans motif au
contrôle de l'abus dans l'appréciation subjective
du bien acquis Page 81
§ 2 Les modalités d'expression de la
rétractation et de la faculté d'essai. Page 82
Conclusion Page 85
Bibliographie indicative Page 88
6
Introduction
Le développement des nouvelles technologies a
profondément modifié les rouages du commerce. De la
création de l'Arpanet1 au cours des années 1970
à l'avènement du Web 2.02, auquel lui succédera
bientôt la version 3.03, ce phénomène a
largement contribué à l'accroissement et à
l'accélération des échanges en offrant tant aux
professionnels qu'aux consommateurs de nouveaux supports de conclusion des
contrats. Un auteur écrit d'ailleurs à cet égard «
depuis que le panier d'osier ou de métal s'est transformé en
panier virtuel, la visite des magasins et autres lieux de consommation est
désormais possible en tout lieu et à toute heure.
Libéré de toute contrainte physique, le « cyber-consommateur
» peut aujourd'hui pratiquement tout acheter sans avoir à se
déplacer au-delà du lieu où se trouve son ordinateur et
sans avoir à solliciter d'autres muscles que ceux qui déplaceront
sa souris »4.
En effet, il est aujourd'hui possible d'acheter tout type de
produit directement en ligne, des biens les plus courants, comme les
denrées alimentaires ou les vêtements, aux biens les plus
spécifiques, personnalisés à la demande de l'acheteur.
C'est ainsi que la pratique recèle d'idées toujours nouvelles et
dont l'originalité rend difficile l'application du Droit.
A cet égard, nous avons décidé de porter
notre attention sur une idée qui nous semble révéler au
mieux tant l'équilibre difficile qu'entretient l'imagination des
web-entrepreneurs et le régime juridique des contrats à distance
que le constat selon lequel l'achat en ligne est devenu, d'un simple mode
alternatif de consommation, un véritable mode de vie.
1 Arpanet (acronyme anglais de « Advanced Research
Projects Agency Netwok »), est le premier réseau à transfert
de paquets développé aux Etats-Unis par la DARPA. Il est
l'ancêtre de l'internet.
2 Le Web 2.0 est l"Internet liant les personnes entre elles, au
départ par le courrier électronique, puis qui s'est
généralisé avec le phénomène des blogs, des
forums de discussion agrégeant des communautés autour de sites
internet et enfin avec les réseaux sociaux.
3 Le Web 3.0, lui, n'est pas vraiment défini. En fait,
l'expression est employée par tous les spécialistes pour
expliquer ce que sera selon eux la prochaine étape de
développement du web. Les deux thèses dominantes sont de
considérer le Web 3.0 comme l'Internet des objets1, qui émerge
depuis 2008, l'autre thèse dominante est d'en faire le web
sémantique.
4 E. Grimaux, « La détermination de la date de
conclusion du contrat par voie électronique », Comm. Comm.
Elect. 2004, chr. N° 10, p. 15.
7
Le site internet en question, récemment
créé, déploie son activité dans le
prêt-à porter. Il propose aux internautes qui ne souhaitent pas
s'embarrasser d'un déplacement physique en boutique, de renseigner leurs
goûts et leurs styles, directement en ligne, afin qu'un styliste
choisisse pour eux les habits et accessoires qui composeront bientôt leur
garde-robe.
Ainsi, l'acheteur renseigne sa taille, ses mensurations, puis
sélectionne d'une part les styles qu'il affectionne et d'autre part les
différents types de vêtements et accessoires dont il a besoin
(chemises, pantalons, chaussettes, ceintures...). En confirmant ces
informations, il réalise un premier clic qui lui donne accès
à sa commande récapitulative, affectée d'un numéro
de « malle ». A cet instant, il peut faire appel à un styliste
dont les coordonnées s'affichent à l'écran afin de donner
de plus amples informations sur ses préférences ou en vue
d'obtenir des conseils vestimentaires. Un récapitulatif des informations
qu'il a mentionnées s'affichant sur le site, il a possibilité
d'en vérifier le détail et d'en corriger le contenu avant de
valider définitivement son achat en renseignant ses coordonnées
bancaires, sans connaître précisément le prix à
payer, car la seule information dont il dispose est que la valeur de la malle
ne dépassera pas 1500 euros.
Son styliste référent détermine alors le
contenu de la malle selon les informations que l'acheteur a renseignées,
chacun ayant la possibilité de joindre l'autre afin d'obtenir de plus
amples renseignements. A la réception de la malle, l'acheteur en
découvre le contenu et a la possibilité d'en renvoyer tout ou
partie au vendeur, s'il n'est pas satisfait.
Ce n'est qu'à ce moment précis que l'acheteur
connaîtra le prix des biens qu'il a souhaité garder et que le
vendeur aura la possibilité d'obtenir un paiement correspondant à
la valeur totale de la malle, déduction faite des biens dont l'acheteur
aura souhaité se séparer le cas échéant, en
transmettant l'ordre de paiement à la banque de ce dernier.
Cette prestation nous semble être une vente dans la
mesure où s'opère un transfert de propriété
à titre onéreux, le gestionnaire du site web s'engageant à
livrer les choses vendues, et l'acheteur à les payer, comme le
prévoit l'article 1582 du Code civil, même
8
si nous démontrerons plus loin qu'elle peut
éventuellement correspondre à une prestation de service en raison
de l'intervention du styliste.
Cependant, sa singularité se dessine à travers deux
aspects particuliers.
D'une part, un certain effet de surprise attend l'acheteur qui
recevra la malle, dans la mesure où il n'a pas une connaissance
précise de son contenu, quand bien même il aurait orienté
les décisions de son styliste référent en renseignant ses
préférences. L'acheteur accepte en effet, le temps d'une
transaction, de « perdre » partiellement « la vue » en s'en
remettant au vendeur, ce qui explique que le styliste et l'acheteur aient
réciproquement la possibilité de se contacter entre chacun des
deux clics en vue de la validation définitive de l'achat. Comme nous le
verrons, ces particularités posent de nombreuses questions au regard de
l'obligation du vendeur de définir les caractéristiques
essentielles des biens vendus, de la validité de l'accord des
volontés et de la procédure d'échange des
consentements.
D'autre part, la prestation proposée par le site
pourrait correspondre à la vente à l'essai prévue par le
Code civil à l'article 1588. Non définie par la loi, une telle
qualification ne semble qu'induite par l'article 1588 du Code civil aux termes
duquel « la vente à l'essai est toujours présumée
faite sous condition suspensive ». Ainsi, la condition suspensive
consisterait en la réussite de l'essai pratiqué par l'acheteur,
autrement dit, en la satisfaction de ce dernier à l'égard des
biens qu'il a acquis. De cette façon, la formation définitive de
la vente est suspendue à la réussite de cet
évènement. La réalisation de la condition opère
rétroactivement de sorte que la vente est réputée conclue
au moment de l'échange des consentements qui a
précédé l'essai par l'acheteur.
Cette variété de vente se distingue de la vente
pure et simple comme le rappelle l'article 1584 du Code civil qui ajoute, en
outre, que la vente peut également être faite sous condition
résolutoire.
En effet, comme le confirment la Doctrine et la jurisprudence,
la vente à l'essai peut également être faite sous cette
condition5. Dès lors, le mécanisme est sensiblement
5 G. Baudry-Lacantinerie, Traité théorique et
pratique de droit civil, t. XIX : Paris, Larose et Forcel, 1901, n° 148 ;
M. Planiol et G. Ripert, Traité élémentaire de Droit
civil, t. X, par J. Hamel : LGDJ 1956 ; Cass. Req., 28 juillet 1873
: DP 1874, 1, p. 440
9
différent, la vente étant définitivement
formée dès l'échange des consentements sur la chose et le
prix. Cependant, la survenance de l'évènement - l'échec de
l'essai, c'est-à-dire, l'insatisfaction de l'acheteur en l'espèce
- met fin rétroactivement au contrat qui était
définitivement formé au moment de l'échange des
consentements.
Le choix du mécanisme de la condition dans la vente
à l'essai n'est pas sans conséquences, au regard notamment du
transfert des risques. Ainsi, lorsque la condition est suspensive, les risques
de la chose pèsent sur le vendeur tant qu'elle ne s'est pas
réalisée, par opposition à la vente sous condition
résolutoire, dans laquelle les risques pèsent sur l'acheteur
dès l'échange des consentements dans la mesure où le
contrat est définitivement formé dès cet instant.
En outre, le mécanisme pourrait produire des
conséquences autrement plus complexes à l'égard du droit
de rétractation, ce sur quoi nous nous interrogerons plus loin.
Telle que nous venons de la décrire, la vente «
surprise » à l'essai pose donc de nombreuses difficultés au
regard du régime juridique des contrats à distance. En effet, de
nombreux textes de droit interne ou de source européenne sont
susceptibles de s'appliquer à la vente « surprise » à
l'essai, lorsque celle-ci est conclue à distance et notamment par voie
électronique. Pour ne citer que ceux qui retiendront notre attention
dans le cadre de la présente étude, il est possible d'en
distinguer trois types.
Ainsi, d'une part, les articles L 111-1 et suivants du Code de
la consommation seront à envisager dans le cadre de l'obligation
générale d'information du professionnel, vendeur ou prestataire
de service. Il s'agira par ailleurs de comprendre les modifications
apportées par le projet de loi relatif à la
consommation6 transposant notamment la directive du 25 Octobre 2011
« Droits des consommateurs »7. Dans leur version actuelle,
les articles L 111-1 et suivants du Code de la consommation sont applicables si
le contrat de vente ou de prestation de services est conclu entre un
professionnel et un consommateur.
6 Projet de loi n° 1015, relatif à la
consommation, enregistré à la présidence de
l'Assemblée nationale le 2 mai 2013.
7 Directive 2011/83/CE du Parlement européen et du
Conseil du 25 octobre 2011, relative aux droits des consommateurs, modifiant la
directive 93/13/CEE du Conseil et la directive 1999/44/CE du Parlement
européen et du Conseil et abrogeant la directive 85/577/CEE du Conseil
et la directive 97/7/CE du Parlement européen et du Conseil, JOUE
n° L 304, 22 novembre 2011, p. 64.
10
Non définies de manière générale
par la loi, ces notions ont été éclaircies par la doctrine
et la jurisprudence, tant interne qu'européenne. Ainsi, le consommateur
est nécessairement une personne physique8 qui conclut un
contrat pour des besoins extérieurs à son activité
professionnelle, sans rapport direct avec elle9. Cette
définition, pour le moins restrictive, n'entend pas protéger la
personne physique qui agit pour des besoins professionnels en dehors de son
champ de compétence alors même que son degré d'ignorance
serait similaire à celui d'une personne qui agit pour des besoins
personnels. Au contraire, le professionnel est la personne physique ou morale,
qui exerce à titre habituel une activité à des fins
lucratives et qui conclut dans ce cadre, un contrat pour les besoins de son
activité professionnelle.
Notons qu'une petite « révolution » est en
marche dans ce domaine. En effet, le consommateur est défini de
manière générale par le projet de loi relatif à la
consommation10 qui fixe le champ d'application personnel du Code de
la consommation, en ajoutant un article préliminaire au livre
1er du Code, aux termes duquel « au sens du présent
code, est considérée comme un consommateur toute personne
physique qui agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son
activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale
».
Ainsi, le législateur semble ici vouloir mettre fin aux
circonvolutions jurisprudentielles en apportant au juge une définition
commune à toutes les dispositions du Code de la consommation, ce qui
nous semble être une démarche salutaire à
l'égalité de protection voulue par le législateur,
même si la définition peut sembler critiquable dès lors
qu'elle laisse faussement présumer que toute personne agissant pour des
besoins professionnels serait plus avertie qu'un contractant agissant pour des
besoins personnels et inversement.
8 CJCE 22 novembre 2001, JCP 2002. II. 10047, note
Paisant ; D. 2002. AJ 90, note Rondey ; ibid., somm., p. 2929, obs. Pizzio ;
Contrats, conc. consom., 2002, no 18, note Raymond ; ibid., chron.,
p. 14, par Luby ; LPA 2002, note Nourissat ; RTD civ. 2002.
291, obs. Mestre et Fages ; ibid., p. 397, obs. Raynard ; RTD com.
2002. 404, obs. Luby. Arrêt confirmé par Cass. Civ.
1re, 15 mars 2005, LPA 12 mai 2005, p. 12, note D. Bert.
9 V. notamment, en matière de clause abusive, la
définition retenue par la Cour de cassation, par ex., Cass. Civ
1ère., 24 janv. 2005, n° 92-18227, Bull civ. I, n°
54, Contrats. Conc. Cons. 1995, comm. N° 84, note L. Leveneur, D.
1995, p. 327, note G.Paisant et somm., p. 229, obs. Ph. Delebecque, JCP G 1995,
I, n° 3893, obs.G. Viney.
10 Projet de loi n° 1015, relatif à la
consommation, enregistré à la présidence de
l'Assemblée nationale le 2 mai 2013.
11
Ces définitions nous semblent correspondre au cas
d'espèce, au moins en ce qui concerne le gestionnaire du site web, dont
la qualification de professionnel est indiscutable.
En revanche, certains des utilisateurs du site pourraient se
voir priver de la qualification de consommateur dès lors qu'ils
feraient, par exemple, l'acquisition de vêtements afin de ne pouvoir les
porter que sur leur lieu de travail, en respect d'un « code vestimentaire
» ne correspondant pas du tout à leurs goûts personnels.
D'autre part, les textes relatifs au « contrat à
distance » seront à envisager. Ainsi, la directive du 20 Mai 1997
dite « contrats à distance »11 transposée
notamment aux articles L 121-16 et suivants du Code de la consommation par une
ordonnance du 23 août 201112, tiendra une place
particulièrement importante. De même, il s'agira d'envisager la
directive du 25 Octobre 2011 « Droits des consommateurs
»13, abrogeant celle de 1997 à compter du 13 juin 2014,
dont la transposition française est en cours au travers du projet de loi
relatif à la consommation enregistré à la
présidence de l'assemblée nationale le 2 mai 201314,
toujours susceptible d'amendements.
Enfin, il s'agira d'appliquer les textes relatifs au «
contrat électronique », notamment la directive du 8 juin 2000 dite
« Commerce électronique »15 transposée aux
articles 1369-1 et suivants du Code civil par la loi pour la confiance dans
l'économie numérique du 21 juin 200416.
11 Directive 97/7/CE du Parlement européen et du
Conseil du 20 mai 1997 concernant la protection des consommateurs en
matière de contrat à distance, JOCE n° L 144, 4
juin 1997, p. 21.
12 Ordonnance n° 2001-741 du 23 août 2001 portant
transposition de directives communautaires et adaptation au droit communautaire
en matière de droit de la consommation, JORF 25 août
2001, p. 13645. Ce texte assure la transposition fidèle de la directive
97/7/CE du 20 mai 1997.
13 Directive 2011/83/CE du Parlement européen et du
Conseil du 25 octobre 2011, relative aux droits des consommateurs, modifiant la
directive 93/13/CEE du Conseil et la directive 1999/44/CE du Parlement
européen et du Conseil et abrogeant la directive 85/577/CEE du Conseil
et la directive 97/7/CE du Parlement européen et du Conseil, JOUE
n° L 304, 22 novembre 2011, p. 64.
14 Projet de loi n° 1015, relatif à la
consommation, enregistré à la présidence de
l'Assemblée nationale le 2 mai 2013.
15 Directive 2000/31/CE du Parlement européen et du
Conseil du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des
services de la société de l'information, et notamment du commerce
électronique, dans le marché intérieur, JOCE L
178, 17 juillet 2000, p. 1.
16 Loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans
l'économie numérique, JORF, 22 juin 2004, p. 11168.
12
La définition du « contrat à distance
» ou du « contrat électronique », en tant que champ
d'application matériel de ces différents textes ne fait pas
obstacle à l'application des règles qu'ils contiennent en ce qui
concerne notre cas d'espèce. Ainsi, qu'il s'agisse d'une vente ou d'une
prestation de service, ou encore, qu'on retienne une qualification
distributive, cette question que nous envisagerons plus loin n'a pas de
conséquences sur l'éligibilité des textes, quand bien
même le régime juridique qu'ils consacrent en serait fortement
influencé.
En effet, l'ensemble de ces textes qui constituent le socle du
Droit des contrats à distance et du contrat électronique,
s'appliquent tant à la vente qu'à la prestation de services.
En revanche, des divergences sensibles subsistent en ce qui
concerne les autres critères de qualification de ces contrats. Ainsi, en
substance, l'article 2 de la directive de 199717 exige du contrat
à distance qu'il soit conclu entre un consommateur et un fournisseur,
dans le cadre d'un système de vente organisé par ce dernier et
que les parties aient utilisé une ou plusieurs techniques de
communication à distance, des pourparlers à la conclusion
définitive du contrat.
A cet égard, la directive ne définit ni le
système de vente organisé, ni les techniques de communication
à distance.
Le législateur français s'est affranchi de cette
définition en modifiant, en ajoutant ou en faisant abstraction de
certains de ses éléments - ce qui lui était permis, la
directive étant d'harmonisation minimale - par la transposition de cette
définition à l'article L 121-16 du Code de la consommation.
Pour ne décrire que les divergences, cet article exige
que le contrat à distance ait été conclu sans la
présence physique simultanée des deux parties, ce qui exclut par
exemple les contrats conclus par internet alors que les parties sont
situées dans la même pièce. En outre, la notion de
professionnel est substituée à celle de fournisseur, celui-ci
n'étant plus tenu de conclure le contrat dans le cadre d'un
système de vente organisé. Enfin,
17 Directive 97/7/CE du Parlement européen et du Conseil
du 20 mai 1997 concernant la protection des consommateurs en matière de
contrat à distance, JOCE n° L 144, 4 juin 1997, p. 21.
13
l'exigence de l'emploi d'une ou plusieurs techniques de
communication à distance est circonscrite au moment de la conclusion du
contrat.
Les notions de consommateurs et de professionnels
n'étant pas définies comme nous l'avons évoqué, il
est cependant possible ici de se référer à la
définition du consommateur telle qu'elle est envisagée par la
directive de 199718, au regard du principe de la
supériorité du Droit de l'Union européenne sur le Droit
interne. Ainsi, il s'agit de toute personne physique qui agit à des fins
qui n'entrent pas dans le cadre de son activité professionnelle.
Dans la mesure où le législateur a
préféré le terme de professionnel à celui de
fournisseur, il n'est pas possible de s'en référer à la
définition consacrée par la directive. Mais celle-ci est en
accord avec celle du professionnel que nous avons déjà
envisagée car la directive définit le fournisseur comme la
personne morale ou physique qui agit dans le cadre de son activité
professionnelle.
La définition du contrat à distance par la
directive du 25 Octobre 201119 dérive de ces deux
définitions. Ainsi le contrat à distance consiste en «
tout contrat conclu entre le professionnel et le consommateur, dans le
cadre d'un système organisé de vente ou de prestation de service
à distance, sans la présence physique simultanée du
professionnel et du consommateur, par le recours exclusif à une ou
plusieurs techniques de communication à distance, jusqu'au moment, et y
compris au moment, où le contrat est conclu ».
En revanche, la définition des parties au contrat est
complexifiée. Ainsi, le consommateur est toujours une personne physique,
mais agit à des fins qui n'entrent pas dans le cadre de son
activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale.
De même, le professionnel est toujours une personne
physique ou morale. Cependant, la directive précise que celle-ci peut
être privée ou publique, ce qui est à notre avis une
18 Note préc.
19 Directive 2011/83/CE du Parlement européen et du
Conseil du 25 octobre 2011, relative aux droits des consommateurs, modifiant la
directive 93/13/CEE du Conseil et la directive 1999/44/CE du Parlement
européen et du Conseil et abrogeant la directive 85/577/CEE du Conseil
et la directive 97/7/CE du Parlement européen et du Conseil, JOUE
n° L 304, 22 novembre 2011, p.64.
14
précision inutile au regard du principe selon lequel il
n'y a pas lieu de distinguer là où la loi ne distingue pas. Par
ailleurs, le professionnel peut désormais agir par
l'intermédiaire d'une personne agissant en son nom ou pour son compte.
Ainsi, la personne du commissionnaire ou du mandataire s'efface devant celle de
la personne pour qui l'acte est conclu. Enfin, la directive exige que le
professionnel agisse à des fins qui entrent dans le cadre de son
activité commerciale, industrielle, artisanale ou libérale.
Le fait que la directive procède par
énumération lorsqu'elle évoque la raison pour laquelle
l'acte est conclu semble a priori plus réducteur que si elle s'en
était tenue à la notion « d'activité professionnelle
» prévue par la directive de 199720. Cependant, nous
pensons que les activités énumérées recouvrent la
totalité des hypothèses que l'on pourrait qualifier
d'activité professionnelle.
Le projet de loi relatif à la consommation,
enregistré à la présidence de l'assemblée nationale
en mai 201321 transpose fidèlement cette définition
hormis un élément qui ne semble cependant pas devoir faire
raisonnablement l'objet d'un débat. En effet, il est exigé des
parties qu'elles recourent exclusivement à une ou plusieurs techniques
de communication à distance « jusqu'à la conclusion du
contrat », sans que l'emploi d'une technique de communication à
distance soit également expressément prévu pour le moment
de la conclusion du contrat.
En théorie, « jusqu'à » est une
locution prépositive qui marque un certain point que l'on atteint et
au-delà duquel on ne passe pas, de sorte que le moment de la conclusion
du contrat est bien compris dans le délai pendant lequel il est
nécessaire d'utiliser une ou plusieurs techniques de communication
à distance.
De plus, la directive du 25 Octobre 201122 est
d'harmonisation maximale conformément à son article 4, ce qui
signifie qu'il est interdit au législateur d'aller au-delà ou
en-deça de qui est prévu par le législateur
européen, sauf autorisation expresse.
20 Directive 97/7/CE du Parlement européen et du
Conseil du 20 mai 1997 concernant la protection des consommateurs en
matière de contrat à distance, JOCE n° L 144, 4
juin 1997, p. 21.
21 Projet de loi n° 1015, relatif à la
consommation, enregistré à la présidence de
l'Assemblée nationale le 2 mai 2013.
22 Directive 2011/83/CE du Parlement européen et du
Conseil du 25 octobre 2011, relative aux droits des consommateurs, modifiant la
directive 93/13/CEE du Conseil et la directive 1999/44/CE du Parlement
européen et du Conseil et abrogeant la directive 85/577/CEE du Conseil
et la directive 97/7/CE du Parlement européen et du Conseil, JOUE
n° L 304, 22 novembre 2011, p.64.
15
Au regard de ces éléments, nous devons en
conclure que la définition du « contrat à distance »,
consacrée par le législateur français dans son projet de
loi est identique à celle retenue par le législateur
européen.
Notre cas d'espèce semble entrer parfaitement dans le
champ d'application de ces textes. En effet, comme nous l'avons
déjà évoqué, il nous semble que les utilisateurs
concluent sur le site internet pour des besoins personnels dans la
majorité des cas. De même, le gestionnaire du site web offre
nécessairement ses services en vue d'en tirer un bénéfice,
et ce, à titre habituel. Par ailleurs, il effectue des actes de commerce
par nature visés par l'article L 110-1 1° du Code de commerce
dès lors qu'il acquiert les vêtements pour les revendre de sorte
qu'il intervient dans le cadre d'une activité commerciale comme le
prévoit la directive du 25 Octobre 201123. Notons que le
projet de loi ne définit pas le professionnel. Ainsi, il convient de
s'en remettre à la définition consacrée par la directive
européenne.
Par ailleurs, que les utilisateurs recourent uniquement
à la plateforme de vente pour conclure le contrat, ou qu'ils apportent
des précisions supplémentaires auprès du styliste par
téléphone ou par email, ces circonstances étant de nature
à préciser ou redéfinir les éléments
essentiels du contrat conclu, il ne fait aucun doute qu'ils concluent sans
être présents simultanément l'un et l'autre, en utilisant
exclusivement une ou plusieurs techniques de communication à distance,
des pourparlers à la conclusion du contrat, et ce dans le cadre d'un
système de vente organisé par le professionnel.
Pour finir, il nous reste à envisager les dispositions
relatives au contrat électronique.
Sa définition consacrée par l'article 1369-4 du
Code civil est issue de la LCEN24 qui a notamment transposé
la directive du 8 juin 200025, dont il ressort en ses articles 9 et
10
23 Directive 2011/83/CE du Parlement européen et du
Conseil du 25 octobre 2011, relative aux droits des consommateurs, modifiant la
directive 93/13/CEE du Conseil et la directive 1999/44/CE du Parlement
européen et du Conseil et abrogeant la directive 85/577/CEE du Conseil
et la directive 97/7/CE du Parlement européen et du Conseil, JOUE
n° L 304, 22 novembre 2011, p.64.
24 Loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans
l'économie numérique, JORF, 22 juin 2004, p. 11168.
25 Directive 2000/31/CE du Parlement européen et du
Conseil du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des
services de la société de l'information, et notamment du commerce
électronique, dans le marché intérieur, JOCE L
178, 17 juillet 2000, p. 1.
16
de la section 3 intitulée « contrats par voie
électronique », que le contrat électronique est conclu par
voie électronique, le débiteur de la prestation de service ou de
l'obligation de transférer la propriété et de livrer la
chose étant dénommé « prestataire de service
».
L'article 2 de la directive dispose en substance que le «
prestataire » est la personne physique ou morale qui fournit un service de
la société de l'information, et renvoie à la directive du
22 juin 199826 pour connaître la définition de cette
dernière notion considérée comme « tout service
presté normalement contre rémunération, à distance
par voie électronique et à la demande d'un destinataire de
services ».
La directive du 22 juin 1998 définit également
la voie électronique pour les besoins de la définition des «
services de la société de l'information » en
considérant qu'il s'agit de « tout service envoyé à
l'origine et reçu à destination au moyen d'équipements
électroniques de traitement (y compris la compression numérique)
et de stockage de données, et qui est entièrement transmis,
acheminé et reçu par fils, par radio, par moyens optiques ou par
d'autres moyens électromagnétiques ».
Nous pensons que ces éléments nous permettent
d'éclairer la notion de contrat électronique retenue par le Droit
français.
En effet, la définition du contrat électronique
retenue en Droit français est très lacunaire. Ne semblant
qu'induite par la première phrase de l'article 1369-4 du Code civil aux
termes de laquelle « quiconque propose, à titre professionnel,
par voie électronique, la fourniture de biens ou la prestation de
services, met à disposition les conditions contractuelles applicables
d'une manière qui permette leur conservation et leur reproduction
», un tel silence laisse pantois au regard de la profusion des
critères participant à la définition du contrat à
distance.
Ainsi, le contrat électronique est un contrat
formé exclusivement par voie électronique, dont le
débiteur de l'obligation relative à la prestation de service ou
au transfert de
26 Directive 98/34/CE du Parlement européen et du
Conseil du 22 juin 1998 prévoyant une procédure d'information
dans le domaine des normes et réglementations techniques, JOCE
n° 204, 21 juill. 1998, p. 37.
17
propriété et à la livraison est un
professionnel, ce qui exclut les contrats conclus entre particuliers.
D'ailleurs, il est étonnant que le Code civil consacre
la notion de professionnel, qui ne semblait être qu'une notion purement
consumériste, ce qui peut cependant s'expliquer par le caractère
supplétif du régime juridique du contrat électronique
consacré par le Code civil dès lors que les parties ont en effet
la possibilité d'y déroger si elles concluent toutes deux pour
des besoins professionnels.
Par ailleurs, les contrats qui sont formés
exclusivement par échange d'email y échappent.
Si l'on envisage la définition française
à la lumière de son fondement européen, il est possible
d'en préciser un peu plus le contenu, en reprenant notamment la
définition de « voie électronique » consacrée
par la directive du 22 juin 199827, pour comprendre que le contrat
électronique englobe en pratique une large variété de
moyens de télécommunication : Internet, SMS, télex...
En effet, même si la directive du 8 juin
200028 ne renvoie à la directive du 22 juin 1998 que pour
définir la notion de service de la société de
l'information, on peut considérer que ce renvoi s'étend à
la définition de « la voie électronique »
consacrée par la directive en vue seulement de définir la notion
de service de la société de l'information.
D'ailleurs, le considérant 18 de la directive du 8 juin
2000 nous confirme cette interprétation en déclarant que «
les services de la société de l'information englobent un
large éventail d'activités économiques qui ont lieu en
ligne. Ces activités peuvent consister, en particulier, à vendre
des biens en ligne. Les activités telles que la livraison de biens en
tant que telle ou la fourniture de services hors ligne ne sont pas couvertes.
Les services de la société de l'information ne se limitent pas
exclusivement aux services donnant lieu à la conclusion de contrats en
ligne... ».
27 Directive 98/34/CE du Parlement européen et du
Conseil du 22 juin 1998 prévoyant une procédure d'information
dans le domaine des normes et réglementations techniques, JOCE
n° 204, 21 juill. 1998, p. 37.
28 Directive 2000/31/CE du Parlement européen et du
Conseil du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des
services de la société de l'information, et notamment du commerce
électronique, dans le marché intérieur, JOCE L
178, 17 juillet 2000, p. 1.
18
Ainsi, ce considérant confirme que la formulation
« service presté [...] à distance par voie
électronique » fait référence tant à la
conclusion du contrat qu'à l'exécution du contrat directement en
ligne.
Il nous semble que le cas d'espèce entre
également dans le champ d'application de ces textes. En effet, le
gestionnaire du site web intervient, à n'en pas douter, à titre
professionnel dès lors qu'il agit pour les besoins de son
activité lucrative, à titre habituel.
La qualité du créancier de l'obligation du
professionnel important peu au stade du champ d'application personnel du
régime juridique du contrat électronique, il n'est pas
nécessaire de déterminer la raison pour laquelle il agit. En
revanche, d'autres éléments nous semblent plus
déterminants.
Ainsi, la question est de savoir si les moyens de
communication au travers desquels les parties sont susceptibles
d'échanger leurs consentements correspondent à la voie
électronique envisagée par l'article 1369-4 du Code civil.
Il nous semble que l'internet y correspond de manière
certaine car cette technologie fonctionne bien grâce à un «
équipement électronique de traitement (y compris la compression
numérique) et de stockage de données », et qu'elle permet
d'acheminer et de recevoir « par fils, par radio, par moyens optiques ou
par d'autres moyens électromagnétiques », un service
consistant à permettre la conclusion d'un contrat, conformément
à l'article 1-2° de la directive du 22 juin 199829, qui
définit la voie électronique à l'aide de ces
critères cumulatifs.
Nous verrons cependant plus loin, que l'emploi du
téléphone lors de l'échange avec le styliste pourrait
échapper au régime juridique du contrat électronique, dans
la mesure où cette technologie ne nous semble pas mettre en oeuvre une
solution de stockage, à moins que la conversation soit
enregistrée.
29 Directive 98/34/CE du Parlement européen et du
Conseil du 22 juin 1998 prévoyant une procédure d'information
dans le domaine des normes et réglementations techniques, JOCE
n° 204, 21 juill. 1998, p. 37.
19
Ainsi, un panel complet de textes semble devoir s'appliquer
à la vente « surprise » à l'essai lorsque celle-ci est
conclue à distance et notamment au cas d'espèce qui fait l'objet
de la présente étude.
Par conséquent, il s'agit de questionner les
difficultés suscitées par la vente « surprise »
à l'essai dans le cadre de l'application du régime juridique des
contrats à distance et de proposer les solutions aptes à les
résoudre.
Nous envisagerons donc en premier lieu la qualification de
l'opération réalisée par le site internet pris pour
exemple, tant les conséquences sont lourdes notamment à
l'égard de l'existence d'un droit de rétractation (Partie
préliminaire). En second lieu, nous aborderons les difficultés
juridiques soulevées par l'information due à l'acheteur, la
procédure d'échange des consentements ainsi que la
validité de l'accord des volontés au regard des
particularités de la prestation (Partie I) avant d'aboutir à la
difficile question de l'application du droit de rétractation dans la
vente à l'essai (Partie II).
PARTIE PRÉLIMINAIRE - QUELLE QUALIFICATION POUR
UNE OPÉRATION HYBRIDE ? ENTRE VENTE ET PRESTATION DE SERVICE
La qualification est la première étape à
tout raisonnement juridique dès lors qu'elle détermine le
régime juridique applicable. Cette étape est parfois
périlleuse lorsqu'elle met en évidence l'existence d'un contrat
à objet mixte, auquel l'application cumulative de régimes
juridiques distincts occasionnerait de nombreuses difficultés.
La prestation offerte par le site internet qui fait l'objet de
la présente étude nous semble pouvoir être concernée
par cette situation dès lors qu'elle mêle transfert de
propriété et prestation de service. En effet, le gestionnaire du
site web propose aux utilisateurs un service personnalisé en confiant
à un styliste le soin de déterminer le contenu de la malle
commandée par ces derniers, tout en transférant à
l'acheteur la propriété des vêtements qu'il a acquis en vue
seulement de les revendre.
Ainsi, il apparaît fondamental de qualifier la
prestation effectuée par le gestionnaire du site web et de comprendre
s'il faut retenir une qualification unitaire (section 2) ou au contraire
appliquer une qualification distributive (Section 1) en considérant
qu'aucune des deux prestations ne semble dominer l'autre. Seule la directive du
25 Octobre 2011 définissant la vente et la prestation de service, il
nous faudra raisonner sans définition expresse pour déterminer
une qualification au regard du Droit positif.
SECTION 1 : Qualification distributive
Plusieurs éléments nous permettent
d'établir une qualification distributive (§1), dont l'application
emporterait de nombreuses conséquences à l'égard notamment
de l'existence d'un droit de rétractation au bénéfice de
l'acheteur (§2).
§ 1 Les justifications d'une qualification
distributive
20
L'article 1582 du Code civil dispose :
21
La vente est une convention par laquelle l'un s'oblige
à livrer une chose, et l'autre à la payer.
La formule consacrée par le Code civil ne met pas en
évidence la nécessité d'un transfert de
propriété. Pourtant, la vente est bien un contrat synallagmatique
à titre onéreux en vertu duquel le vendeur s'oblige à
transférer la propriété de la chose vendue et en
contrepartie de quoi l'acheteur s'oblige à la payer. En effet, le prix
n'est pas affecté à la livraison mais à la chose, ce qui
sous-entend que la vente emporte bien un transfert de propriété
au profit de l'acheteur.
La prestation de service, elle, n'est pas définie par
le Code civil qui ne consacre que la notion de louage d'ouvrage
considéré comme tout « contrat par lequel l'une des
parties s'engage à faire quelque chose pour l'autre, moyennant un prix
convenu entre elles ».
Dès lors, il convient selon nous, de s'en remettre
à la classification tripartite des obligations consacrée par
l'article 1126 du Code civil aux termes duquel « tout contrat a pour
objet une chose qu'une partie s'oblige à donner, ou qu'une partie
s'oblige à faire ou à ne pas faire ». Ainsi, dès
lors qu'une partie s'oblige à autre chose qu'à transférer
la propriété d'un bien, elle est irrémédiablement
débitrice d'une obligation de faire ou de ne pas faire. Lorsque le
créancier de l'obligation de faire s'engage à payer un prix en
contrepartie au débiteur, le contrat semble bien devoir correspondre
à la qualification de louage d'ouvrage.
A cet égard, il nous semble qu'en offrant aux
utilisateurs une prestation de conseil qui sera assurée par un styliste,
le gestionnaire se rend débiteur d'une obligation de faire, qui devra
faire l'objet d'un paiement. N'étant pas subordonné à ses
clients, il s'oblige à exécuter une prestation de service et non
un simple contrat de travail.
Ainsi, une qualification distributive pourrait être
envisagée en considérant que les utilisateurs concluent sur le
site à la fois pour acquérir la propriété des
vêtements et accessoires qu'ils ont achetés, mais également
pour bénéficier des conseils d'un styliste dans la mesure
où ces derniers ne peuvent choisir seuls.
22
§ 2 Les conséquences d'une qualification
distributive
L'application d'une qualification distributive causerait
beaucoup de difficultés dans l'application du régime juridique
des contrats à distance.
En effet, l'article L 121-20-2 du Code de la consommation nie
l'existence d'un droit de rétractation pour les contrats de prestation
de service dont l'exécution commence immédiatement après
la conclusion.
A supposer que l'acheteur, bénéficiaire de la
prestation de service, exerce son droit de rétractation et renvoie
l'intégralité des vêtements qu'il avait acquis, il ne
serait mis fin au contrat que partiellement. Le contrat conclu initialement
deviendrait donc un simple contrat de prestation de service. Il y aurait lieu
de mettre en évidence la partie du prix correspondant au service pour
que celle-ci ne soit pas remboursée.
Fort heureusement dans notre hypothèse, le gestionnaire
du site web s'est engagé à ne rien débiter sur la carte
bleue du client de sorte qu'il ne lui appartient pas de procéder
à une telle répartition. Mais au cas où l'acheteur
souhaiterait garder une partie du contenu de la malle, il y aurait lieu de
mettre en évidence le prix du service rendu pour la détermination
de la totalité du contenu de la malle et le prix correspondant à
chacun des biens pour que ne subsiste que le prix du service et celui des biens
qui ont été conservés par le client.
Comme on le voit, l'application d'une qualification
distributive complexifie la situation dès lors que les droits du
consommateur ne sont pas exactement les mêmes en fonction de la
qualification correspondant au contrat qu'il a conclu, c'est-à-dire,
selon qu'il a conclu une vente ou une prestation de service.
23
SECTION 2 : Qualification unitaire
Plusieurs éléments sont susceptibles de mettre
en évidence une qualification unitaire (§1), ce qui n'est pas sans
conséquences sur le régime juridique des contrats à
distance (§2).
§ 1 Les justifications d'une qualification
unitaire
Certains éléments commandent de
désapprouver l'application d'une qualification distributive. En effet,
sauf à remettre en question l'ensemble des qualifications juridiques en
considérant par exemple que la vente est un contrat mixte lorsque le
vendeur s'oblige à assurer la livraison du bien vendu30, il
ne paraît pas raisonnable de considérer qu'un contrat est mixte
dès lors qu'il fait naître des obligations de nature
différente.
Ainsi, il nous paraît plus raisonnable d'appliquer une
qualification unitaire à un contrat mixte dont l'une des obligations
semble ressortir plus qu'une autre, autrement dit, lorsqu'une obligation semble
accessoire à une autre qui peut être qualifiée de
principale.
Il s'agit cependant de déterminer dans quelle mesure
une obligation est accessoire à une autre, et notamment de comprendre si
l'accessoire est ce qui n'est pas prépondérant par opposition au
principal ou ce qui n'est pas suffisamment autonome en ce sens qu'il sert
d'instrument à l'exécution d'une autre obligation.
Dans le premier cas, il convient de mettre en oeuvre la technique
du faisceau d'indices.
Ainsi, si l'on s'en tient à la volonté de
l'utilisateur du site web, il nous semble qu'il paraît difficile de
mettre en évidence l'existence d'une obligation
prépondérante. En effet, si l'utilisateur souhaite
acquérir la propriété de vêtements et accessoires,
il désire tout autant obtenir un service de conseil de qualité de
la part du gestionnaire par l'intermédiaire de son styliste.
30 L'expression « livrer » consacrée par le
Code civil est malencontreuse car elle fait seulement référence
à la délivrance, impliquant la dépossession du bien des
mains du vendeur, et n'oblige pas le vendeur à assurer le transport de
la chose pour la remettre entre les mains de l'acheteur.
24
A l'égard du prix pourtant, une telle solution est
moins évidente. En effet, s'il ne fait aucun doute que le prix de vente
des biens englobe celui du service personnalisé offert à
l'acheteur lorsque l'utilisateur reçoit la facture des biens qu'il a
acquis, le gestionnaire du site l'informe cependant qu'il ne sera redevable
d'aucune dette s'il retourne la totalité du contenu de la malle, de
sorte, qu'il n'entend même pas lui faire payer le service qui lui a
pourtant été rendu par le styliste. A cet égard, la
prestation de service apparaît moins prépondérante.
Dans le second cas, il semble que la prestation de service
assurée par le gestionnaire soit accessoire à la vente,
dès lors qu'elle n'est assurée qu'en vue de permettre au vendeur
de mieux vendre et à l'acheteur de mieux acheter. Ainsi, une
qualification unitaire de vente doit être privilégiée.
Il nous semble plus logique d'appliquer le second
critère dans la mesure où ce dernier est empreint de plus
d'objectivité que le 1er critère dont la
réalité variera au gré des espèces. En effet, dans
certains cas nous pourrons considérer comme très limitée
l'importance du service aux yeux de l'acheteur dès lors que ce dernier
renseigne très précisément ses goûts, ce qui ne
laisse qu'une faible marge de manoeuvre au styliste, et démontre que son
intervention a peu d'intérêt à ses yeux. Au contraire,
certains utilisateurs ne sachant pas choisir seuls accordent une confiance
presque aveugle en la personne du styliste, ce qui confère davantage de
valeur à ce service.
La directive du 25 Octobre 2011 vient apporter une
précision qui nous paraît capitale sur ce point. En effet, en
définissant la vente comme « tout contrat en vertu duquel le
professionnel transfère ou s'engage à transférer la
propriété des biens au consommateur et le consommateur paie ou
s'engage à payer le prix de ceux-ci, y compris les contrats ayant
à la fois pour objet des biens et des services », la directive
semble privilégier une qualification unitaire de contrat de vente
lorsque le contrat a pour objet une vente et un service.
Cette lecture est confirmée par l'alinéa suivant
qui définit le contrat de service comme « tout contrat autre
qu'un contrat de vente en vertu duquel le professionnel fournit ou s'engage
à fournir un service au consommateur et le consommateur paie ou s'engage
à
25
payer le prix de celui-ci ». En effet, en
s'abstenant de préciser qu'un contrat de service peut correspondre
à une telle qualification alors même qu'il a également pour
objet une vente, le législateur européen semble vouloir
privilégier la qualification de vente le cas échéant.
Ainsi, même si le projet de loi relatif à la consommation ne
consacre pas de telles définitions, on peut néanmoins
considérer qu'un tel raisonnement devrait être suivi en
application du principe de supériorité du Droit communautaire sur
le Droit interne.
Au regard de ces arguments, il nous semble que les contrats
conclus entre les parties doivent être considérés comme des
contrats de vente.
§ 2 Les conséquences d'une qualification
unitaire
L'application d'une qualification unitaire n'a pas pour effet
d'évacuer toutes les questions comme nous le verrons plus loin.
Cependant, celle-ci a le mérite d'éviter l'application
distributive de deux régimes juridiques distincts au contrat conclu par
le consommateur.
C'est ainsi qu'à l'égard du droit de
rétractation notamment, l'acheteur est supposé
bénéficier d'un tel droit sans qu'une partie du contrat survive
au cas où il déciderait de se séparer de la
totalité des biens qu'il avait acquis. En effet, le service dont il a pu
bénéficier dans le cadre du contrat qu'il a conclu à
distance par l'intermédiaire du site web étant accessoire au
transfert de propriété, il est comme absorbé par la figure
principale du contrat, la vente, de sorte qu'il y a lieu d'appliquer le droit
de rétractation pour le tout sans avoir à distinguer ce qui
relève de la vente et ce qui au contraire relève du service.
26
PARTIE 1 : DE L'INFORMATION À L'ÉCHANGE
DES CONSENTEMENTS DANS LA VENTE
« SURPRISE » À L'ESSAI
De nombreuses particularités relatives à la
vente conclue par le site internet entrent directement en conflit avec le
régime juridique des contrats à distance. Ainsi en effet, le
vendeur, tenu en principe d'informer l'acheteur à l'égard des
caractéristiques essentielles de la chose vendue et de son prix
(chapitre I), occultera éventuellement une partie de ces informations
afin de provoquer un « effet de surprise » chez l'acheteur. Ce
dernier ne découvrira en effet le contenu de la malle et le prix des
vêtements et accessoires qu'il souhaitera éventuellement garder,
qu'après l'avoir reçue et ouverte. C'est pourquoi nous avons
d'ailleurs décidé de surnommer l'acte juridique conclu « la
vente surprise ».
D'autres questions non moins importantes y sont également
liées.
Ainsi, les dispositions relatives au régime juridique
du contrat électronique contraignent le vendeur à respecter une
certaine procédure dans l'échange des consentements, ce qui pose
notamment problème si des échanges complémentaires ou
contradictoires pouvaient avoir lieu entre l'acheteur et le styliste en dehors
du site internet (chapitre II).
Enfin, les particularités de la vente conclue sur le
site internet méritent d'être analysées sous l'angle des
conditions de validité de la vente « surprise », lorsqu'elle
est notamment conclue à distance par voie électronique (chapitre
III).
CHAPITRE 1 : L'obligation du vendeur de définir
les caractéristiques essentielles de la chose et son prix
Il ne s'agit pas ici d'analyser de manière
générale l'ensemble des informations que le vendeur doit
délivrer à l'acheteur, ainsi de celles prévues par
l'article L 121-18 du Code de la consommation qui impose au vendeur de
mentionner dans son offre un panel d'informations relatives notamment à
son identité, aux moyens de paiement, frais de livraison et à
l'existence d'un droit de rétractation et ses limites
éventuelles.
27
Nous nous en tiendrons aux seules informations prévues
par les articles L 111-1 et L 113-3 du Code de la consommation (Section 1),
auquel renvoie d'ailleurs l'article L 121-18 du même code, et qui doivent
en outre être fournies au consommateur, par écrit ou sur un autre
support durable à sa disposition, en temps utile et au plus tard au
moment de la livraison, à moins que le vendeur n'ait satisfait à
cette obligation avant la conclusion du contrat, comme le prévoit
l'article L 121-19 1° du Code qui intègre ces informations au
dispositif.
Dans un second temps, il s'agira de déterminer les
sanctions qu'encourt l'acte conclu ou le professionnel vendeur en cas de
manquement de ce dernier à son obligation d'information prévue
par le Code de la consommation (section 2).
SECTION 1 L'objet de l'information : les
caractéristiques essentielles de la chose et son prix
L'actuel article L 111-1 du Code de la consommation exige
seulement du professionnel vendeur, qu'il mette le consommateur acheteur en
mesure de connaître les caractéristiques essentielles du bien,
avant la conclusion du contrat (§1).
Réitérée par l'article 4 du projet de loi
relatif à la consommation qui modifie le libellé de l'article L
111-1 dudit Code, cette exigence s'accompagne désormais31
d'une obligation pour le professionnel de renseigner l'acheteur sur le prix du
bien (§2).
§ 1 Interprétation objective et subjective des
caractéristiques essentielles de la chose
La version actuelle du Code de la consommation sépare
de façon très nette la vente et la prestation de service dans le
cadre de l'obligation générale d'information, en consacrant
à chacun de ces contrats un article propre.
Ainsi l'information due par le vendeur est quasiment
circonscrite aux caractéristiques essentielles de la chose à la
différence de celle due par le prestataire de services qui est tenu de
délivrer au consommateur un ensemble d'informations beaucoup plus
large,
31 Auparavant, elle ne figurait pas dans l'obligation
générale d'information mais seulement à l'article L
113-3.
28
ainsi notamment de son identification et des conditions
générales du services... Il n'en a pas toujours été
ainsi. En effet, la loi du 26 juillet 199332 qui avait introduit cet
article dans le Code de la consommation33 traitait de manière
commune34 l'obligation générale d'information du
vendeur et du prestataire de service, au sein d'un même article L
1111.
Cependant, malgré les réformes successives de
l'obligation générale d'information du professionnel, la notion
de « caractéristiques essentielles du bien » n'a jamais
été définie par le législateur. A cet égard,
on peut se demander si l'obligation du vendeur de renseigner l'acheteur sur les
caractéristiques essentielles du bien se confond avec l'obligation
générale de renseignement découverte par la jurisprudence.
En effet, prenant acte de l'évolution des rapports entre contractants et
de l'inégalité de savoir dans laquelle sont parfois
placées les parties, la jurisprudence a mis à la charge de «
celui qui sait » une obligation de renseigner son co-contractant.
Néanmoins, pour que cette obligation existe, il est
nécessaire de réunir certaines conditions et notamment que le
débiteur de cette obligation sache détenir une information «
pertinente », c'est-à-dire, essentielle aux yeux de son
co-contractant car susceptible de lui faire renoncer au projet de conclure le
contrat ou à tout le moins de lui faire changer les conditions de son
accord.
On peut donc se demander si l'article L 111-1 du Code de la
consommation donne un support textuel à cette obligation dans les
rapports entre professionnels et consommateurs ou consacre une obligation
différente. En effet, nous savons que les caractéristiques d'un
bien sont les éléments qui permettent de le distinguer d'un autre
d'une même nature. Mais la question est de savoir si celles qui sont
essentielles au sens de cet article sont celles qui sont déterminantes
du consentement de l'acheteur, essentielles à ses yeux, ou celles qui,
de manière différente, sont essentielles aux yeux de tout
consommateur.
32 Loi n° 93-949 du 26 juillet 1993 relative au code de
la consommation, JORF n°171 du 27 juillet 1993 p. 10538.
33 Avant d'être codifiée à l'article L
111-1 du Code de la consommation, cette disposition avait toutefois
été créée par la loi du 18 janvier 1992.
34 Hormis l'obligation spécifique pour le vendeur
d'informer l'acheteur de la période pendant laquelle les pièces
de rechanges seront disponibles sur le marché.
29
Dans le premier cas, une interprétation subjective des
caractéristiques essentielles du bien obligerait l'acheteur à
prouver à chaque fois que telle ou telle lacune avait été
déterminante de son achat, même s'il se pourrait cependant qu'on
oblige le consommateur à fournir une telle preuve dans le cas seulement
où il serait impossible de présumer le caractère essentiel
de cette caractéristique35.
Dans le second cas, il s'agit plutôt d'une
interprétation objective des caractéristiques essentielles du
bien qui nous semble plus conforme à l'esprit du Droit de la
consommation.
En effet, apparu en France dans les années 1970, le
mouvement consumériste a milité en faveur de la
consécration d'un ordre juridique de protection propre à prendre
en compte l'inégalité des parties au sein du contrat au travers
d'une vision objective et catégorielle des parties. Ainsi,
l'économie essentiellement rurale et artisanale ayant laissé
place à une économie industrielle constituée d'acteurs au
poids considérable, la vision libéraliste du droit a
laissé place à une vision plus protectrice des
intérêts du plus faible, percevant les consommateurs tels une
masse une et indivisible face aux professionnels édictant leurs
conditions au travers d'une nouvelle figure contractuelle
dénommée contrat « d'adhésion »36.
Il nous semble donc que l'article L 111-1 du Code de la
consommation oblige le professionnel vendeur à renseigner le
consommateur acheteur sur les caractéristiques objectivement
essentielles aux yeux de tout consommateur, c'est-à-dire, les
éléments qui sont susceptibles de distinguer une chose d'une
autre, et auxquels tout consommateur attache une importance déterminante
de son consentement.
Si cette interprétation peut sembler plus protectrice
du consommateur sur le terrain notamment probatoire, dès lors qu'il
n'aura pas à établir devant une juridiction qu'une
35 Comme en matière d'erreur, où le juge se
livre à une interprétation subjective des qualités
substantielle d'un objet mais dispense la victime de l'erreur de prouver qu'une
qualité était substantielle à ses yeux dans le cas
où on ne pourrait pas douter qu'elle le serait aux yeux de chacun. Voir
sur ce point Aubry et Rau, Cour de droit civil français, t. IV, 6e
éd. Par Bartin, § 343bis p. 433 ; v. déjà Demolombe,
Cour de Code Napoléon, t. XXIV, 1970, n° 89 p. 91 et s, v. depuis
en ce sens, P. Malinvaud, De l'erreur de l'acheteur, L'authenticité du
bien d'art (étude critique), RTD civ. 1982, p. 55 et s.
36 Cette expression signifie que le consommateur n'a pas la
possibilité de négocier les termes du contrat de sorte qu'il ne
peut qu'y consentir purement et simplement.
30
caractéristique du bien qu'il a acheté
était pour lui essentielle37, il n'en reste pas moins qu'elle
empêche cependant ce dernier d'obtenir une protection en fournissant une
telle preuve au cas où une étude statistique démontrerait
qu'une caractéristique du bien vendu n'était pas essentielle aux
yeux de la majorité de ses semblables.
Cette analyse ne nous semble pas devoir être remise en
question par la directive du 25 Octobre 201138 qui reprend cette
obligation pour le professionnel au sein de ses articles 6.1 a) et 6.1 b), en
la circonscrivant à la notion de « caractéristiques
principales ». Transposée dans les mêmes termes au sein du
futur article L 111-1 1° du Code de la consommation consacré par le
projet de loi relatif à la consommation, cette notion nous semble devoir
être interprétée de la même manière eu
égard à l'objectivité voulue par le législateur en
la matière.
En ce qui concerne notre cas d'espèce, on peut penser
que de nombreuses caractéristiques sont susceptibles d'être
caractérisées comme telles. Ainsi, le type de vêtements et
leurs tailles répondent à n'en pas douter à cette
qualification. Cependant, si le gestionnaire du site web demande aux
utilisateurs de renseigner leurs mensurations, il s'abstient de leur demander
combien de pantalons ou de vestes leur sont nécessaires, se contentant
de laisser à ces derniers le soin de cocher des cases correspondant au
type de vêtements et accessoires dont ils ont besoin. De même, il
est simplement demandé au potentiel acheteur de renseigner le ou les
styles qu'il affectionne (classique, rétro, vintage, etc...) sans donner
plus de détail sur la forme, la couleur et la coupe des vêtements
et accessoires.
Il nous semble que ces caractéristiques sont
essentielles aux yeux de tout consommateur, dans la mesure où
l'habillement contribue à renforcer l'identité de chacun. Il
paraîtra nécessaire à certains de choisir des
vêtements dont la coupe est susceptible de mettre en évidence ou
de dissimuler leurs formes, ou encore dont le ton de couleur est à
même de révéler leur excentricité ou au contraire
leur discrétion.
37 Ce qui nous semble plus difficile que de prouver qu'une
caractéristique est objectivement essentielle aux yeux de tout
consommateur grâce à un sondage.
38 Directive 2011/83/CE du Parlement européen et du
Conseil du 25 octobre 2011, relative aux droits des consommateurs, modifiant la
directive 93/13/CEE du Conseil et la directive 1999/44/CE du Parlement
européen et du Conseil et abrogeant la directive 85/577/CEE du Conseil
et la directive 97/7/CE du Parlement européen et du Conseil, JOUE
n° L 304, 22 novembre 2011, p.64.
31
C'est pourquoi l'esprit original dont s'inspire le vendeur, en
retenant volontairement certaines informations afin de garantir un effet de
surprise à l'acheteur, nous apparaît assez peu conforme à
l'objectif de protection visé par le législateur au travers de
l'information. En effet, le gestionnaire du site procède au contraire
à une rétention d'informations sur les caractéristiques
essentielles des biens qui seront livrés à l'acheteur en vue de
lui réserver un effet de surprise. L'acheteur peut d'ailleurs renoncer
à cet effet de surprise en contactant le styliste pour obtenir des
informations supplémentaires ou afin de préciser un peu plus ses
goûts et ses styles.
Le système semble ainsi diamétralement contraire
à celui voulu par le législateur car tout se passe comme si
c'était l'acheteur qui renseignait le vendeur et non le contraire. Il
semble donc que le vendeur méconnaisse les termes de l'article L 111-1
du Code de la consommation.
Cependant, nous tâcherons plus loin de nous demander si
la circonstance selon laquelle les lacunes informatives sont imputables
à l'acheteur, resté passif alors même qu'il avait la
possibilité de demander des informations supplémentaires, est de
nature à influer sur les sanctions encourues par le vendeur.
§ 2 L'information sur le prix
L'article L 113-3 alinéa 1 du Code de la consommation
prévoit que : « tout vendeur de produit [...] doit, par voie de
marquage, d'étiquetage, d'affichage ou par tout autre
procédé approprié, informer le consommateur sur les prix
[...] selon des modalités fixées par arrêtés du
ministre chargé de l'économie, après consultation du
Conseil national de la consommation. »
D'inspiration différente que celle qui a guidé
le législateur dans la rédaction de l'article L 111-1 du Code de
la consommation39, cet article semble néanmoins s'appliquer
à la vente à distance. En effet, l'alinéa 3 définit
le champ d'application de cette règle en prévoyant qu'elle est
applicable à toutes les activités visées au dernier
alinéa de l'article L 113-2 du Code de la consommation, dont
l'activité de distribution fait partie.
39 Cette règle est issue de l'ordonnance de 1986, relative
à la liberté des prix.
32
L'arrêté du 3 décembre 198740
définissant les modalités générales d'application
de l'alinéa 1er de l'article L 113-3 du Code de la
consommation, prévoit alors en son article 14 que le prix de tout
produit proposé au consommateur selon une technique de communication
à distance 41, doit être indiqué de
façon précise au consommateur, par tout moyen faisant preuve,
avant la conclusion du contrat.
L'article 1er de l'arrêté
définit la manière dont cette information est
délivrée en précisant que quel que soit le support
utilisé, l'information sur le prix doit faire apparaître la somme
totale toutes taxes comprises, qui devra être effectivement payée
par le consommateur, exprimée en euros.
L'article 2 prévoit par ailleurs que le vendeur doit
informer de façon complète le consommateur du montant des frais
de livraison, par tout moyen approprié, avant la conclusion du
contrat.
Ces dispositions posent beaucoup de difficultés en
l'espèce dans la mesure où le vendeur est tenu de délivrer
ces informations au consommateur avant la conclusion définitive du
contrat. En effet, dès lors que l'acheteur ne sait pas ce qu'il recevra,
il commande à l'aveugle un ensemble de vêtements et accessoires
sans connaître leur prix. Le gestionnaire du site web informe alors les
utilisateurs qu'ils doivent inscrire leurs coordonnées bancaires pour
valider définitivement leur achat. Ainsi, le vendeur prend une empreinte
des coordonnées bancaires et informe l'acheteur que ce dernier commande
une malle dont la valeur ne dépassera pas 1500 euros, et qu'il ne sera
débité que du montant correspondant à la valeur des biens
et accessoires qu'il aura souhaité conserver.
La question est donc de savoir si la seule mention d'un prix
maximal suffit à libérer le vendeur de son obligation
d'information en matière de prix. La question des frais de
40 Arrêté du 3 décembre 1987 relatif
à l'information du consommateur sur les prix, JORF du 10
décembre 1987 p. 14354.
41 Constitue une technique de communication à distance,
au sens de l'arrêté, toute technique permettant au consommateur,
hors des lieux habituels de réception de la clientèle, de
commander un produit ou de demander la réalisation d'un service Sont
notamment considérés comme des techniques de communication
à distance la télématique, le téléphone, la
vidéotransmission, la voie postale et la distribution
d'imprimés.
33
livraison ne pose pas de difficultés ici car le
gestionnaire du site web informe l'acheteur que la livraison est gratuite.
Si l'article de l'arrêté évoque une
information sur la somme totale toutes taxes comprises, l'article 14,
spécifique aux contrats conclus à distance oblige le vendeur
à délivrer une telle information pour tout produit et de
façon précise, le contraignant ainsi à indiquer un prix
propre à chaque produit. Il ne fait donc aucun doute que l'information
délivrée par le site internet en matière de prix n'est pas
assez précise et que le vendeur encourt les sanctions prévues par
l'article L 113-3 du Code de la consommation que nous aurons l'occasion
d'aborder plus loin.
Le projet de loi relatif à la consommation42
apporte pour sa part quelques modifications à l'obligation d'information
du vendeur en matière de prix, conformément à la directive
du 25 Octobre 201143. En effet, le prix fait maintenant partie
intrinsèque de l'obligation générale d'information
à l'article L 111-1 2° du Code de la consommation qui dispose qu'
« avant que le consommateur ne soit lié par un contrat de vente
[...], le professionnel communique de manière lisible et
compréhensible, au consommateur les informations suivantes :2° le
prix du bien [...] conformément aux articles L 113-3 et L 113-3-1 du
Code de la consommation. »
Un mécanisme dérogatoire est cependant
prévu par le projet de loi et pourrait éventuellement
résoudre les difficultés du vendeur dans ce cas. En effet, il est
prévu d'insérer un nouvel article L 113-3-1 aux termes duquel
« lorsque le prix ne peut être raisonnablement calculé
à l'avance du fait de la nature du bien ou du service, le professionnel
fournit le mode de calcul du prix .... ».
Si la disposition faire référence à la
nature du bien ou du service, ce qui est pour le moins restreint, on peut
néanmoins raisonnablement penser que l'esprit du texte est de prendre en
compte la spécificité de certains contrats dont l'architecture ne
permet pas de calculer un prix à l'avance.
42 Projet de loi n° 1015, relatif à la consommation,
enregistré à la présidence de l'Assemblée nationale
le 2 mai 2013.
43 Directive 2011/83/CE du Parlement européen et du
Conseil du 25 octobre 2011, relative aux droits des consommateurs, modifiant la
directive 93/13/CEE du Conseil et la directive 1999/44/CE du Parlement
européen et du Conseil et abrogeant la directive 85/577/CEE du Conseil
et la directive 97/7/CE du Parlement européen et du Conseil, JOUE
n° L 304, 22 novembre 2011, p. 64.
34
Cette interprétation plus extensive pourrait fonder une
solution pour le vendeur consistant par exemple à fixer des prix
généraux propres à chaque type de vêtement en
prévoyant par exemple qu'un prix de 90 euros correspondant au
vêtement « pantalon » sera à multiplier par le nombre de
produits de ce type que l'acheteur aura souhaité garder.
Ainsi, sans pouvoir faire connaître à l'acheteur
le prix total de la malle qu'il a commandée, dans la mesure où ce
prix total ne sera connu qu'après la validation définitive de
l'achat lorsque le styliste aura déterminé le contenu de la
malle, le vendeur peut néanmoins l'informer du prix maximal que la malle
ne pourra dépasser en tout état de cause et informer l'acheteur
du prix correspondant à chaque catégorie de produit susceptible
de figurer dans la malle. L'acheteur peut alors se faire une idée du
prix qu'il aura éventuellement à débourser, ce qui nous
semble être conforme à l'esprit du mécanisme
consacré par le projet de loi transposant sur ce point l'article 6 1. E)
de la directive du 25 Octobre 201144.
Si l'on peut établir des manquements relatifs à
l'obligation d'information du professionnel vendeur en ce qui concerne le prix
ou les caractéristiques essentielles du bien, il reste à
déterminer les sanctions actuelles et à venir.
44 Directive 2011/83/CE du Parlement européen et du
Conseil du 25 octobre 2011, relative aux droits des consommateurs, modifiant la
directive 93/13/CEE du Conseil et la directive 1999/44/CE du Parlement
européen et du Conseil et abrogeant la directive 85/577/CEE du Conseil
et la directive 97/7/CE du Parlement européen et du Conseil, JOUE
n° L 304, 22 novembre 2011, p. 64.
35
SECTION 2 : Les conséquences d'un manque
d'informations pour le professionnel vendeur et l'acte conclu
De nombreuses sanctions sont susceptibles de s'appliquer au
manquement du vendeur dans le cadre de son obligation d'information. Nous
envisagerons dans un premier temps les sanctions civiles (§1), puis dans
un second les sanctions pénales et administratives, actuelles ou
à venir (§2).
§ 1 Les sanctions civiles d'un manque d'informations
par le professionnel
L'article L 111-1 du Code de la consommation ne consacre
aucune sanction spécifique à la violation de l'obligation
générale d'information par le professionnel.
Il faut donc s'en remettre au Droit commun pour les
déterminer.
Ainsi, dans la mesure où le professionnel est tenu
d'informer le consommateur sur les caractéristiques essentielles du bien
à vendre et son prix avant la conclusion du contrat, il apparaît
que cette obligation n'est pas de nature contractuelle de sorte que sa
violation ne devrait traditionnellement se résoudre qu'en
dommages-intérêts si le consommateur établissait la preuve
d'un préjudice qui en résulte.
Ayant cependant considéré que la personne qui
omettait de délivrer à son co-contractant une information
déterminante de son consentement commettait un Dol par réticence
rendant nul le contrat qui avait été conclu, la jurisprudence
avait consacré implicitement une obligation générale de
renseignement préalable à la conclusion du contrat et qui
permettait d'en invalider la formation.
Si l'on raisonne par analogie, on peut donc raisonnablement
penser que la nature pré-contractuelle - donc délictuelle - de
l'obligation légale générale d'information dont est
débiteur le professionnel est susceptible d'être
sanctionnée sur le terrain des vices du consentement.
36
La question est donc de savoir ce qu'il appartient à
l'acheteur de prouver au cas où il se prétend victime d'une
lacune informative, dans la mesure où le Dol s'entend
généralement d'un acte positif ou négatif -
élément matériel - de la part d'une partie dont
l'intention était de tromper - élément intentionnel - son
co-contractant.
L'article L 111-1 III du Code de la consommation oblige le
professionnel à prouver qu'il a exécuté son obligation
d'information de sorte qu'il n'appartient pas au consommateur de prouver la
carence informative du vendeur, comme le rappelle la jurisprudence sur ce point
sur le fondement des articles L 111-1 du Code de la consommation et 1315 du
Code civil45. Ainsi l'élément matériel est
établi assez facilement.
Concernant cependant l'élément intentionnel, la
jurisprudence relative à l'obligation générale de
renseignement a parfois tendance à le présumer en
considérant que de par sa qualité de professionnel, un
contractant ne pouvait méconnaître l'information qui était
due au partenaire et son importance de sorte qu'en omettant de la lui
délivrer, il pouvait s'en déduire qu'il avait eu l'intention de
le tromper46. Cette jurisprudence maintes fois contredites par la
suite47, pourrait cependant naturellement être
transposée à l'obligation générale d'information
consacrée par le Code de la consommation. En effet, si l'on s'en tient
à une vision objective des caractéristiques essentielles, le
consommateur acheteur n'aurait même pas à prouver qu'une
caractéristique était essentielle à ses yeux. Une simple
démonstration de ce que cette caractéristique est essentielle aux
yeux de tout consommateur suffirait donc.
Partant, il serait paradoxal de considérer qu'une
caractéristique est essentielle à tout consommateur mais qu'un
professionnel peut méconnaître cette circonstance de
notoriété publique.
Néanmoins, le cas qui fait l'objet de la
présente étude nous apparaît révéler le
caractère excessif de cette jurisprudence. En laissant à
l'acheteur la liberté de demander au
45 Cass. Civ 1ère , 13 décembre 2012
n° 11-27766.
46 Cass. Civ 1ère, 19 janv. 1977, Bull.
Civ. I, n° 40, p. 30 ; 18 avril 1989, Bull.
Civ. I, n° 150, p. 99.
47 V. par exemple. Cass. Civ 1ère, 21 janv. 1981,
Bull civ. I, n° 25, p. 23 ; 23 janvi. 1987, D. 1987. IR
p. 168, qui exigent un silence volontairement gardé. V. aussi Cass. Civ
3ème, 25 fév. 1987, Bull. Civ. III, n° 36, p. 21 ;
Cass. Civ 1ère, 12 Nov 1987, Bull. Civ. I, n° 293
p. 211, Défresnois 1988. 1092, obs Aubert, RTD civ. 1988.339,
obs. J. Mestre ;
Cass. Com ; 28 juin 2005, D.2006.2774,
note Chauvel, RTD civ. 2005.591, obs. Mestre et Fages. qui exigent que
la dissimulation ait été pratiquée «
intentionnellement pour tromper le contractant et le déterminer à
conclure le contrat ».
37
vendeur par l'intermédiaire du styliste des
informations supplémentaires, le gestionnaire du site web met en place
un système d'informations à la demande. Ainsi, il ne retient pas
les informations sur les caractéristiques essentielles des
vêtements et accessoires de manière purement intentionnelle et qui
plus est, en vue de tromper l'acheteur. La rétention à laquelle
il procède effectivement est subordonnée à la
volonté de l'acheteur de jouir d'un effet de surprise lors de la
réception de la malle, celle-ci pouvant être déduite de sa
passivité48.
Autrement dit, il nous paraît évident que le
comportement du vendeur professionnel, en l'espèce, le gestionnaire du
site web, ne révèle pas une intention de tromper son
cocontractant, mais de manière tout à fait différente, une
simple intention de « surprendre ».
Il nous semble ainsi qu'au regard de la version actuelle de
l'obligation du vendeur d'informer l'acheteur sur les caractéristiques
essentielles du bien, sous réserve cependant que la jurisprudence
confirme notre lecture de la théorie des vices du consentement, le
gestionnaire du site web n'encourt aucun risque.
A supposer néanmoins qu'on puisse retenir un Dol en
l'espèce, on peut tout de même s'interroger sur d'autres moyens de
contester la sanction. Le Droit de la consommation étant d'ordre public,
il nous semble impossible pour le gestionnaire du site web de se
décharger de son obligation d'information en insérant une clause
dérogatoire au sein de ses conditions générales de
vente.
En revanche, il peut sembler opportun d'analyser la question
sous l'angle de la passivité du comportement de l'acheteur, qui avait la
possibilité de demander l'ensemble des informations qui lui
étaient dues avant la conclusion définitive du contrat.
S'il ne nous semble pas possible de considérer que
l'acheteur ait renoncé à la protection qui lui était
offerte par le Code de la consommation49, une solution pourrait,
à tout le
48 C'est d'ailleurs pourquoi il ne fait aucun doute, que
l'acheteur ne pourrait agir sur le terrain de l'erreur, laquelle serait «
inexcusable » au regard du principe « De non vigilantibus non
curat praetor » (Des insouciants, le préteur n'a cure),
l'acheteur ayant refusé de s'informer alors même que le vendeur
lui en avait laissé la possibilité.
49 Alors même que le Droit de la consommation relève
d'un Ordre public de protection.
38
moins, consister à mettre à la charge de
l'acheteur une obligation de diligence en insérant une clause aux termes
de laquelle le vendeur fait savoir à l'acheteur qu'il a la
possibilité d'obtenir la communication de l'ensemble des informations
qui lui sont dues, s'il fait une demande expresse en ce sens à son
styliste avant de valider définitivement son achat.
Autrement dit, le vendeur permettrait à l'acheteur de
renoncer au système d'information à la demande qui lui est
proposé, tout en verrouillant sa responsabilité et la
validité des actes juridiques conclus.
Il pourrait d'ailleurs être opportun que le Code de la
consommation consacre une telle obligation à la charge du consommateur
afin de rééquilibrer les rapports des parties. En effet, comme on
le voit dans une telle situation, l'impératif de protection du
consommateur n'est pas en parfaite corrélation avec la
réalité, et tend à déresponsabiliser le
consommateur et à mettre injustement en danger le professionnel.
Ce constat est d'autant plus cinglant si l'on analyse les
nouvelles sanctions consacrées par le projet de loi relatif à la
consommation, que nous verrons plus loin.
Quant à la lacune informative du vendeur professionnel
à l'égard du prix, ni l'article L 113-3 du Code de la
consommation, ni l'arrêté du 3 décembre 198750
ne consacrent de sanction à la violation de cette obligation.
La 1ère chambre civile de la Cour de
cassation a cependant affirmé par un arrêt du 15 décembre
199851 que la sanction de nullité ne pouvait résulter
du seul manquement aux exigences d'information sur les prix formulées
par l'article L 113-3 du Code de la consommation.
Cet arrêt est venu confirmer une décision rendue
par une cour d'appel qui avait considéré qu'une telle disposition
n'édictait aucune sanction civile, et qu'aucun vice du consentement ne
pouvait être relevé en dehors de tout agissement malhonnête
ou de manoeuvre dolosive.
50 Arrêté du 3 décembre 1987 relatif à
l'information du consommateur sur les prix, JORF du 10 décembre 1987
page 14354.
51 Cass. Civ 1ère 15 décembre 1998
n° de pourvoi 96-19898.
39
Il semblerait donc que la jurisprudence rejette le Dol par
réticence en cas de violation de l'obligation d'information du
professionnel sur les prix, et n'admette un tel vice qu'au cas où des
manoeuvres positives du vendeur pourraient être
démontrées.
Ainsi en l'espèce, une telle jurisprudence nous semble
être favorable au professionnel, en exigeant un acte positif
démontrant l'intention de tromper, dans la mesure où le vendeur
dont la prestation fait l'objet de la présente étude, n'aurait
commis qu'un acte négatif, dans l'intention de « surprendre »
le consommateur, et non de le tromper. En effet, l'idée du vendeur est
de dissimuler tout indice de nature à lever le voile sur le contenu de
la malle.
Si les sanctions civiles nous apparaissent vouées
à l'échec de même que les sanctions pénales qu'il va
s'agir désormais d'étudier, un tel constat semblera plus
difficile à établir concernant les sanctions administratives
futures.
§ 2 Les sanctions pénales et administratives
d'un manque d'informations par le professionnel
Il existait auparavant des sanctions pénales
générales à l'obligation d'information du vendeur en
matière de prix consacrée par l'article L 113-3 du Code de la
consommation.
En effet, le décret du 29 décembre
198652 considérait que la violation d'une telle obligation
constituait dans certains cas une contravention de cinquième classe mais
a été abrogé par un décret du 30 avril
200253, de sorte que tout risque de contravention semble
écarté pour le vendeur sur ce fondement54. Les
sanctions prévues par le Code de
52 Décret n° 86-1309 du 29 décembre 1986
modifié fixant les conditions d'application de l'ordonnance n°
86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des
prix et de la concurrence (J.O. 30 décembre).
53 Décret n° 2002-689 du 30 avril 2002 fixant les
conditions d'application du livre IV du code de commerce relatif à la
liberté des prix et de la concurrence, JORF n°103 du 3 mai
2002, p. 8055.
54 L'article R 121-1 du Code de la Consommation prévoit
cependant qu'est puni d'une peine d'amende prévue pour les
contraventions de cinquième classe, le fait de méconnaître
les termes des article L 121-18 et L 121-19 du Code de la Consommation. En ce
qui concerne le premier de ces articles, il n'est pas certain que la
contravention soit constituée lorsque le vendeur viole les articles L
111-1 et L 113-3 du Code de la consommation. En effet, on ne sait pas si la
contravention est seulement constituée lorsque le vendeur omet de
délivrer l'une des mentions énumérées par la
disposition, ou
40
la consommation en ce qui concerne les pratiques commerciales
déloyales présentent un risque cependant. En effet, l'article L
120-1 du Code de la consommation considère comme telle une pratique
« contraire aux exigences de la diligence professionnelle »
lorsqu'elle « altère, ou est susceptible d'altérer
de manière substantielle, le comportement économique du
consommateur normalement informé et raisonnablement attentif et
avisé, à l'égard d'un bien ou d'un service
»55.
Le point II de cet article répute notamment comme
telles les pratiques commerciales trompeuses définies aux articles L
121-1 et L 121-1-1 du Code de la consommation, de sorte que nous nous en
tiendrons uniquement à l'analyse de ces dispositions qui font l'objet
d'une sanction pénale précise.
Ainsi l'article L 121-1 I du Code de la consommation
réprime les pratiques commerciales trompeuses par action à la
différence du II qui traite des pratiques commerciales par omission.
Dans la mesure où le gestionnaire du site web ne
formule pas d'allégations fausses ou de nature à induire en
erreur, il nous semble que la responsabilité pénale de ce dernier
ne pourrait être recherchée qu'au titre des pratiques commerciales
par omission. En effet, c'est bien la rétention d'informations
substantielles qui semble être problématique en
l'espèce.
Bien que l'article L 121-1-1 du Code de la consommation vienne
en aide au juge en lui fournissant une liste limitative de pratiques
commerciales réputées trompeuses en toute
lorsqu'il viole également les articles L 111-1 et L
113-3 du Code de la consommation auxquels l'article L 121-18 renvoie. En
revanche, concernant le second de ces textes, il ne fait aucun doute que le
vendeur s'y conforme dès lors qu'il envoie à l'acheteur une
facture détaillant l'ensemble du contenu de la malle et le prix de
chacun des vêtements et accessoires, afin que l'acheteur puisse la
consulter au moment de la livraison, de sorte qu'il ne fait aucun doute que
l'information incriminée est délivrée sur un support
durable.
55 L'autonomie de ce texte par rapport aux pratiques
commerciales déloyales et aux pratiques commerciales agressives a
été reconnue par la jurisprudence en matière civile, voir
notamment C. Cass. Civ 1ère 12 juillet 2012, Hewlett Packard
France/ UFC Que choisir, 11-18.807 Cependant il nous semble que des sanctions
pénales ne puissent pas être envisagées en application de
ce texte. En effet, le principe d'interprétation stricte de la loi
pénale ne nous permet pas d'étendre les sanctions pénales
propres à ces deux infractions aux pratiques commerciales
déloyales, de sorte que selon le principe constitutionnel «
Nullum crimen, nulla poena sine lege », considérer que la
pratique commerciale déloyale visée au premier alinéa de
l'article L 120-1 du Code de la consommation serait une infraction serait
inconstitutionnel.
41
circonstance56, il nous semble qu'aucune des
pratiques énumérées dans cette liste ne correspond
à la situation en présence.
L'article L 121-1 II du Code de la consommation répute
comme pratique commerciale trompeuse celle qui « compte tenu des
limites propres au moyen de communication utilisé et des circonstances
qui l'entourent, [...] omet, dissimule ou fournit de façon
inintelligible, ambiguë ou à contretemps une information
substantielle ou [...] n'indique pas sa véritable intention commerciale
dès lors que celle-ci ne ressort pas déjà du
contexte.
Dans toute communication commerciale constituant une
invitation à l'achat et destinée au consommateur mentionnant le
prix et les caractéristiques du bien ou du service proposé, sont
considérées comme substantielles les informations suivantes
:
1° Les caractéristiques principales du bien ou
du service ;
2° L'adresse et l'identité du professionnel
;
3° Le prix toutes taxes comprises et les frais de
livraison à la charge du consommateur, ou leur mode de calcul, s'ils ne
peuvent être établis à l'avance... »
Cet article tend donc à réprimer le
professionnel qui omet de délivrer certaines informations susceptibles
d'être qualifiées comme substantielles aux yeux des
consommateurs.
L'alinéa 2 vient en aide au juge afin de
déterminer dans quels cas les informations sont substantielles, et fait
logiquement référence aux caractéristiques principales du
bien ou du service et au prix toutes taxes comprises.
Il nous semble que cet alinéa est applicable à
la situation présente dans la mesure où l'offre de vente qui est
faite à l'acheteur sur le site internet constitue bien une invitation
à l'achat au sens de la directive du 11 mai 200557 relative
aux pratiques commerciales déloyales vis-à-vis des consommateurs.
En effet, est considérée comme telle au sens de
56 Cet article institue une présomption
irréfragable en considérant que certains comportement
limitativement énumérés doivent être
qualifiés comme tels sans qu'il soit besoin faire la preuve d'un
élément moral.
57 Directive 2005/29/CE du 11 mai 2005 relative aux pratiques
commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des
consommateurs dans le marché intérieur et modifiant les
directives 84/450/CEE, 97/7/CE, 98/27/CE et 2002/65/CE et le règlement
(CE) n° 2006/2004 (directive sur les pratiques commerciales
déloyales).
42
l'article 2 de ladite directive « une communication
commerciale indiquant les caractéristiques du produit et son prix de
façon appropriée en fonction du moyen utilisé pour cette
communication commerciale et permettant ainsi au consommateur de faire un achat
».
Il n'est cependant pas certain que l'élément
matériel de cette infraction soit établi dans la mesure où
l'article prévoit que le caractère trompeur doit être
établi en prenant en compte les circonstances qui entourent la
pratique.
A cet égard, on peut penser que la disposition entend
prendre en compte la spécificité des situations. Ainsi, en notre
espèce, un bon moyen de défense pourrait consister à
démontrer que l'effet de surprise proposé par le vendeur et
accepté par l'acheteur était une circonstance de nature à
neutraliser la pratique commerciale trompeuse.
Il faut cependant analyser les autres éléments
de l'infraction au cas où un juge considérerait que
l'élément matériel est établi. Ainsi, un
délit est toujours composé d'un élément
intentionnel comme le rappelle l'article L 121-3 du Code pénal qui
dispose « il n y a pas de délit sans intention de le commettre
».
Cependant, depuis 2009, la jurisprudence de la Cour de
cassation est instable sur la qualification de cet élément
intentionnel. En effet, après avoir fait montre d'une conception
très large de cet élément en matière de pratique
commerciale trompeuse par un arrêt du 15 décembre
200958 aux termes duquel, sans contester le caractère
intentionnel de cette infraction, elle considérait cependant qu'elle
était commise dès lors que la loi avait été
violée, la Cour de cassation a consacré une interprétation
plus stricte de cet élément par un arrêt du 23 mars
201059. En effet, elle considère par cette décision
que la négligence du professionnel ayant omis de délivrer au
consommateur des informations substantielles ne peut lui être imputable
que s'il a connaissance des textes qu'il a violés. Ainsi, il serait donc
nécessaire qu'il ait uniquement conscience de violer les textes sans
pour autant avoir la réelle intention de tromper le consommateur.
58 Cass. Crim, 15 Déc. 1989, n° de pourvoi 09-83.059,
Bull crim 2009, n° 212.
59 Cass. Crim, 23 mars 2010, n° de pourvoi 09-82.545.
43
Cette jurisprudence nouvelle fait preuve de réalisme
dans la mesure où peu de professionnels respectent scrupuleusement la
loi. Néanmoins, cette décision n'est pas parfaite dans la mesure
où elle tendrait en l'espèce à sanctionner le gestionnaire
de site web qui a pris de la peine de s'informer de la législation
applicable alors même qu'un de ses concurrents qui se serait inscrit dans
son sillage sans avoir fait cet effort n'encourrait pas de sanction
pénale. En outre, même si cette décision est moins
menaçante pour le professionnel que celle rendue en 2009, il n'en reste
pas moins qu'elle ne prend pas en compte la spécificité de
chacune des situations.
Ainsi, en l'espèce, le gestionnaire du site web qui se
serait renseigné aurait parfaitement conscience de violer les
règles qui s'imposent à lui en matière de transparence et
de loyauté informationnelle. Pour autant, il n'aurait aucunement
l'intention de tromper ses clients. Nous pensons donc que la jurisprudence
devrait revenir à une conception plus stricte encore du délit de
pratique commerciale trompeuse en exigeant une réelle intention de
tromper.
Imaginons d'ailleurs qu'un professionnel ait l'intention de
tromper le consommateur en ayant cependant aucune conscience qu'il viole les
règles qui lui sont applicables, un tel comportement serait
difficilement pris en compte par la jurisprudence de la Cour de Cassation.
La qualification de l'infraction de pratique commerciale
trompeuse est donc un enjeu de taille. En effet, les sanctions actuelles sont
lourdes à l'égard de la personne qui la commet mais le sont
encore plus dans la version actuelle du projet de loi relatif à la
consommation. Effectivement, l'article L 121-6, renvoyant aux articles L 213-1
et L 213-6 du Code de la consommation, pour la détermination des peines,
punit d'une peine de deux ans d'emprisonnement et d'une amende de 37 500 euros
la personne responsable de l'infraction, le montant de l'infraction
étant multiplié par cinq pour les personnes morales. Ainsi la
société exploitant le site internet de vente à distance
encourrait une peine de 187 500 euros.
Pourtant, désireux d'introduire des sanctions plus
dissuasives à l'égard du professionnel, le législateur a
considérablement aggravé le montant de la peine
44
d'amende au sein du projet de loi relatif à la
consommation60, en hissant son montant à 300 000 euros de
sorte qu'une personne morale encourrait une sanction pénale de 1 500 000
euros61.
Cependant, il est respectivement ajouté à
l'alinéa 2 de cet article ainsi qu'à l'article L 121-4 du Code
que la peine peut être portée à 50 % du montant des
dépenses de publicité et que le tribunal peut ordonner la
publication du jugement. Ainsi, en l'espèce, un juge pourrait faire
monter le montant de l'amende à un niveau supérieur à 187
500 euros, ou dans le futur, à 1 500 000 euros si les dépenses
d'investissement nécessaires à la publicité
s'avéraient être deux fois supérieures à ce
montant.
Le projet de loi relatif à la consommation
réitère la possibilité pour le juge de procéder
à la publication du jugement en précisant qu' « en cas
de condamnation, le tribunal peut ordonner, par tous moyens appropriés,
l'affichage ou la diffusion de l'intégralité ou d'une partie de
la décision, ou d'un communiqué informant le public des motifs et
du dispositif de celle-ci. »
Une telle mesure pourrait évidement être
très périlleuse pour l'entreprise dont l'image de marque est un
élément capital dans lequel les consommateurs placent leur
confiance.
Concernant les sanctions administratives cette fois, le projet
de loi relatif à la consommation les introduit pour la première
fois pour sanctionner l'obligation d'information du professionnel, en
consacrant au Code de la consommation un nouvel article L 111-5 aux termes
duquel « tout manquement aux dispositions des articles L 111-1
à L 111-3 du Code de la consommation est passible d'une amende
administrative dont le montant ne peut excéder 3000 euros pour une
personne physique et 15 000 euros pour une personne morale.
62».
60 Projet de loi n° 1015, relatif à la
consommation, enregistré à la présidence de
l'Assemblée nationale le 2 mai 2013.
61 Notons que cette somme est largement supérieure
à celle qui est prévue par le Code pénal au cas où
un crime aurait été commis par une personne morale (1 million),
alors même qu'il s'agit d'une infraction d'une gravité
jugée supérieure.
62 Une même sanction s'applique lorsque le prix ne peut
être raisonnablement calculé à l'avance du fait de la
nature du bien ou du service et que le professionnel s'en tient à la
simple fourniture d'un mode de calcul.
45
Une telle sanction apparaît véritablement
objective, dans la mesure où il est précisé qu'elle est de
nature administrative. Ainsi, la circonstance selon laquelle le professionnel
aurait omis de délivrer certaines informations exigées par les
articles L 111-1 et suivants sans avoir néanmoins eu l'intention de
tromper le consommateur serait parfaitement inopérante. A défaut,
cette sanction se rapprocherait d'une sanction pénale où
l'intention est communément exigée. Si le projet venait donc
à être adopté tel quel, le gestionnaire du site web
encourrait un véritable risque, en plus des sanctions pénales
qu'il pourrait éventuellement encourir au titre des pratiques
commerciales trompeuses.
Comme nous venons de le voir, le Code de la consommation rend
le professionnel débiteur d'une obligation d'information très
lourde lorsqu'il propose une fourniture de biens à distance. Si le
bien-fondé des sanctions peut être discuté eu égard
à la spécificité de la prestation assurée par le
gestionnaire du site web qui fait l'objet de la présente étude,
il n'en reste pas moins qu'un véritable risque existe de ce point de
vue.
Il s'agit donc pour l'entreprise gestionnaire du site de faire
un choix entre perdre une certaine originalité afin de mieux se
conformer aux obligations prévues par le Code de la consommation ou
gérer financièrement le risque juridique.
D'autres risques sont également à redouter,
ainsi comme nous allons le voir, le code civil instaure une véritable
procédure d'échange des consentements lorsque le contrat à
distance est conclu par voie électronique, dont le non-respect semble
faire obstacle à la formation du contrat.
CHAPITRE 2 : La procédure d'échange des
consentements dans la vente surprise à l'essai
Les articles 1369-4 et suivants instaurent une
procédure spécifique d'échange des consentements lorsqu'un
contrat est conclu par voie électronique en exigeant du professionnel
qui propose par ce biais notamment la fourniture de biens, qu'il mette en place
une interface permettant au destinataire de son offre de formuler une double
acceptation.
46
Le respect de cette procédure dite du « double
clic » étant fondamental pour la personne qui exerce à titre
professionnel une activité via Internet, il est nécessaire de
comprendre de quelle manière le gestionnaire du site web qui fait
l'objet de la présente étude peut s'y conformer (Section 1).
L'analyse de cette procédure appelle cependant d'autres
commentaires concernant la possibilité donnée à
l'utilisateur d'échanger avec le styliste en dehors du site internet
(Section 2), afin de déterminer notamment si l'utilisation d'autres
supports de communication que le site internet ne fait pas obstacle à
l'application d'une telle procédure concernant les échanges qui
seraient intervenus par ce biais.
SECTION 1 : L'échange principal des
consentements sur le site internet
Loin de définir le contrat électronique,
l'article 1369-4 du Code civil semble uniquement imposer une règle
à tout professionnel proposant, par voie électronique, la
fourniture de biens ou d'une prestation de service, en précisant les
mentions qui doivent figurer dans son offre tout en délimitant le cas
dans lequel il serait engagé par elle.
La première étape consiste donc à se
demander si cet article est autonome ou entend définir le champ
d'application de la procédure d'échange des consentements
prévue à l'article 1369-5 afin de comprendre dans quels cas une
telle procédure devrait s'appliquer (§1).
En second lieu, il convient alors de comprendre, au cas
où cette procédure serait applicable à notre cas, les
étapes qui composent celle-ci afin de déterminer si elle est
respectée (§2).
§ 1 Le champ d'application de la procédure du
« double clic »
« L'offre » mentionnée à l'article
1369-5 du Code civil doit selon nous respecter des conditions de fond et de
forme. Du point de vue des conditions de fond, une offre est une proposition de
conclure un contrat qui doit être ferme et précise,
c'est-à-dire
47
qu'elle doit être faite sans réserve et porter
sur les éléments essentiels du contrat dont la conclusion est
projetée.
En l'espèce, pour que le gestionnaire du site web fasse
donc une offre valable, il faudrait donc qu'il fasse mention d'un prix
déterminé et qu'il détermine de manière
précise l'objet du contrat. En effet, la vente est parfaite entre les
parties dès qu'on est convenu de la chose et du prix comme le
prévoit l'article 1583 du Code civil de même que l'article 1589
qui nous précise qu'auquel cas, la promesse de vente vaut vente.
Or, dans la vente surprise, il est justement très
difficile de respecter ces conditions sauf à dénaturer l'effet de
surprise recherché au travers d'un tel contrat, comme nous le verrons
plus loin en analysant cette question sous l'angle des conditions de
validité du contrat.
Ainsi, nous arriverions à la conclusion surprenante
selon laquelle les échanges auxquels auraient procédé les
parties sur le site internet correspondraient à la phase des pourparlers
de sorte que l'offre ne serait finalement faite qu'au moment où
l'acheteur a reçu la facture accompagnant la malle, sur laquelle
figureraient, précisément cette fois ci, l'ensemble des
vêtements et accessoires, leur prix ainsi que le prix total de la
malle.
Ainsi, deux hypothèses seraient en présence.
Soit l'acheteur formule son acceptation de manière
expresse par retour de courrier électronique ou postal.
Soit il accepte de manière tacite l'offre qui lui est
faite, en procédant au paiement de la facture qui lui a
été envoyée ou de celle qui lui sera ensuite
envoyée, après que le vendeur ait déduit le prix des
objets que l'acheteur a retournés. Auquel cas, il procède en
effet à l'exécution du contrat de sorte que l'acceptation doit
être déduite d'un tel comportement.
Les conséquences seront tout à fait
différentes en fonction de ces deux hypothèses. Ainsi, même
si la vente reste à distance et qu'il est clair qu'on ne peut plus
considérer
48
qu'elle ait été conclue par voie
électronique, elle emporte des conséquences en ce qui concerne le
point de départ du délai de rétractation et du
délai d'essai que nous étudierons plus loin. En tout état
de cause, il nous semble donc que la proposition formulée par le
professionnel gestionnaire du site web pourrait ne pas être
qualifiée d'offre au sens du Droit commun, dans la mesure où le
prix ainsi que les vêtements et accessoires vendus ne sont pas
suffisamment déterminés de sorte que de tels
éléments seraient de nature à faire obstacle à la
formation du contrat sur internet.
Cependant, il nous faut tout de même envisager les
conditions de forme de l'offre dont il est question à l'article 1369-5
du Code civil, au cas où la proposition faite sur le site internet
serait jugée suffisamment précise pour constituer une offre, afin
de déterminer la procédure d'échange des consentements
juridiquement applicable à la vente « surprise » conclue
à distance par voie électronique. A cet égard, les
articles 1369-4 et 1369-5 du Code civil font tous deux référence
à « l'offre ». Ainsi, dans la mesure où le premier de
ces articles mentionne un ensemble de mentions à faire figurer dans
l'offre, on peut se demander si la procédure d'échange des
consentements prévue à l'article 1369-5 du Code civil serait
applicable, au cas où l'une de ces mentions, dont la liste
énonciative semble limitative, ferait défaut.
En d'autres termes, la question est de savoir si l'article
1369-4 définit le champ d'application de l'article 1369-5 ou si ces
articles sont autonomes. Il n'existe pas de jurisprudence rendue par la Cour de
cassation sur cette question.
En revanche, la cour d'appel de Toulouse a déjà
eu à se prononcer à ce sujet. Ainsi, aux termes d'une
décision rendue le 2 février 201163, la Cour a
considéré que les mentions que les articles 1369-4 du Code civil
et L 121-18 du Code de la consommation exigent de faire figurer dans l'offre
sont des « conditions de forme exigées pour la validité de
l'acte juridique », pour conclure qu'en l'espèce l'offre qu'avait
diffusée un concessionnaire sur un site internet au sujet de la vente
d'un véhicule, ne respectant pas l'ensemble de ces exigences «
avait donc valeur de publicité et de proposition de pourparlers mais pas
celle d'une offre de vente 64».
63 CA Toulouse, 2ème chambre section, 2
fév. 2011, n° RG 09/ 00005.
64 La cour a également rejeté la demande
introduite par l'acheteur du véhicule tendant à obtenir la
réalisation forcée de la vente, en considérant que le
concessionnaire n'était pas l'auteur de l'offre dans la mesure
où, bien qu'apparaissant encore sur un site internet alors même
que le concessionnaire
49
L'inclusion des mentions prévues à l'article L
121-18 du Code de la consommation nous apparaît contestable dans la
mesure où les articles 1369-4 et suivants du Code civil n'y font pas
référence. En effet, comme le précise très
justement la décision de la Cour sur ce point, ces mentions ne sont que
des conditions de forme de sorte qu'il ne s'agit pas de les confondre avec les
éléments essentiels du contrat requis par principe pour qu'une
offre soit valable juridiquement.
Par conséquent, si les informations exigées par
l'article L 121-18 du Code de la consommation apparaissent aussi peu
essentielles65 que celles exigées par l'article 13694 du Code
civil, il ne semble cependant pas qu'elles soient nécessaires à
la validité de l'offre mentionnée aux articles 1369-4 et 1369-5
du Code civil, qui n'y font pas référence expressément.
En dépit de cette réserve, il n'en reste pas
moins que deux observations peuvent être faites, à l'appui de
cette jurisprudence, concernant la conclusion du contrat par voie
électronique.
D'une part, il semble bien que la procédure
spécifique d'échange des consentements consacrée à
l'article 1369-5 du Code civil ne doive être respectée que lorsque
l'offre qui est faite par le professionnel respecte les mentions exigées
par l'article 1369-4 du Code civil à peine de nullité de
l'offre.
D'autre part, un professionnel qui proposerait la vente d'un
bien ou la fourniture d'un service par voie électronique, ne serait pas
lié par sa proposition si l'une des mentions exigées faisait
défaut, de sorte qu'il y a lieu de distinguer :
· offre faite par un professionnel par voie
électronique et offre faite par ce dernier par la voie traditionnelle.
Dans le premier cas, il ne suffit pas que l'offre soit faite sans
réserve et qu'elle comporte les éléments essentiels du
contrat dont la
l'avait retirée, celle-ci n'était plus accessible
de son fait.
65 Mis à part les informations prévues aux
articles L 111-1 et suivants auxquels renvoie l'article L 12118 du Code de la
consommation.
50
conclusion est proposée. Il faudrait en outre qu'elle
énonce, selon l'article 1369-
4 :
1° Les différentes étapes à
suivre pour conclure le contrat par voie électronique ;
2° Les moyens techniques permettant à
l'utilisateur, avant la conclusion du contrat, d'identifier les erreurs
commises dans la saisie des données et de les corriger ;
3° Les langues proposées pour la conclusion du
contrat ;
4° En cas d'archivage du contrat, les
modalités de cet archivage par l'auteur de l'offre et les conditions
d'accès au contrat archivé ;
5° Les moyens de consulter par voie
électronique les règles professionnelles et commerciales
auxquelles l'auteur de l'offre entend, le cas échéant, se
soumettre.
A défaut, la proposition faite par le professionnel ne
serait pas une offre mais une simple invitation à entrer en pourparlers,
quand bien même la chose et le prix seraient déterminés.
· offre faite par voie électronique par un
professionnel et celle qui est faite par un particulier. Ce dernier serait
lié par une offre ferme et précise, c'est-à-dire, l'offre
qui est faite sans réserve et qui contient les éléments
essentiels du contrat dont la conclusion est proposée, à la
différence du professionnel qui ne serait pas lié par cette offre
au cas où l'une des mentions prescrites à l'article 1369-4 du
Code civil ferait défaut.
Comme nous le verrons cependant plus loin, les articles 1369-4
et 1369-5 du Code civil sont également inapplicables au contrat conclu
par échange d'email comme le prévoit l'article 1369-6.
§ 2 Le respect des étapes de la
procédure d'échange des consentements par le vendeur
professionnel, gestionnaire du site web
A supposer qu'on considère qu'une offre conforme
à l'article 1369-4 du Code civil a été faite par un
professionnel sur Internet, la procédure spécifique
d'échange des consentements prévue par l'article 1369-5 du
même Code s'applique, à moins que les parties soient toutes deux
des professionnels ou que leurs échanges aient lieu par email.
51
Dans le premier cas, la procédure s'applique à
défaut de stipulation contraire tandis que dans le second, la
procédure n'est de toute façon pas applicable, comme nous le
verrons plus loin.
A première vue, l'article 1369-5 du Code civil semble
formuler dans des termes compréhensibles aux yeux du grand public, la
règle du double clic.
Ainsi, la disposition oblige en son alinéa 1 le
destinataire d'une offre conforme à l'article 1369-4 du Code civil,
à accepter celle-ci en deux temps, comme suit :
Pour que le contrat soit valablement conclu, le
destinataire de l'offre doit avoir eu la possibilité de vérifier
le détail de sa commande et son prix total, et de corriger
d'éventuelles erreurs, avant de confirmer celle-ci pour exprimer son
acceptation..
Le premier clic correspondrait donc à la commande
tandis que le second correspondrait à la confirmation de l'acceptation
de l'offre, après que le destinataire de l'offre a eu la
possibilité de vérifier le détail de sa commande et son
prix total et de corriger d'éventuelles erreurs.
Cette lecture nous semble confirmée par l'alinéa 3
de ce même article qui dispose :
La commande, la confirmation de l'acceptation de l'offre
et l'accusé de réception sont considérés comme
reçus lorsque les parties auxquelles ils sont adressés peuvent y
avoir accès.
Selon cette disposition en effet, la commande
précède la confirmation de l'acceptation de l'offre, de sorte
qu'elle correspond au premier clic tandis que la confirmation correspond au
second, ce qui est conforme à la chronologie de la procédure
prévue à l'alinéa 1er.
A y regarder cependant de plus près,
l'interprétation de l'article 1369-5, dont les termes sont peu
juridiques, met en présence deux hypothèses.
52
En effet, l'alinéa 2 dispose :
L'auteur de l'offre doit accuser réception sans
délai injustifié et par voie électronique de la commande
qui lui a ainsi été adressée.
Ainsi, l'articulation des alinéas 1 et 2 donne la
chronologie suivante : commande, accusé de réception et
confirmation de l'acceptation de l'offre.
En revanche, l'articulation des alinéas 1 et 3 donne
une chronologie différente : commande, confirmation de l'acceptation de
l'offre, accusé de réception.
L'enjeu de l'interprétation n'est pas des moindres car
il s'agit de savoir quel rôle joue l'accusé de réception
dans le cadre de la procédure d'échange des consentements et
l'incidence de son absence.
Dans le premier cas, il s'agirait d'une étape qui
participe à la formation du contrat dans la mesure où on pourrait
considérer que, n'ayant pas reçu l'accusé de
réception de la part de l'offrant, le destinataire ne pouvait
valablement confirmer l'acceptation de l'offre. Selon cette
interprétation, la négligence du professionnel qui n'accuserait
pas réception de la commande après qu'elle a été
validée par un premier clic, serait de nature à fait obstacle
à la formation du contrat.
Dans le second cas, l'accusé de réception ne
serait qu'une preuve de ce que le contrat a été conclu, venant
récapituler au destinataire de l'offre, le contenu de la commande dont
il a confirmé la première validation. Ainsi, le contrat serait
tout de même valablement conclu en son absence mais il serait impossible
à chacune des parties de prouver l'existence du contrat qu'elles ont
conclu.
Ces deux hypothèses mettent en présence des effets
théoriques diamétralement différents mais emportent des
conséquences pratiques semblables : l'impossibilité de pouvoir se
prévaloir du contrat qui a été conclu ou qui devait
valablement l'avoir été. Malheureusement, il n'existe pas de
jurisprudence venue consacrer l'une de ces théories, de sorte qu'il est
difficile de savoir à quoi s'en tenir.
53
Il n'en reste pas moins que, dans notre cas présent, la
procédure est fidèlement respectée par le gestionnaire du
site web.
Ainsi, le destinataire de l'offre - on suppose ici que l'offre
faite via internet est conforme à l'article 1369-4 du Code civil et
comporte les éléments essentiels du contrat dont la conclusion
est projetée - effectue son premier clic correspondant à la
commande lorsqu'il valide une première fois la page sur laquelle figure
ses goûts vestimentaires, ses besoins, ses mensurations et son adresse.
Il effectue alors son second clic lorsque s'affiche la page récapitulant
la commande qu'il vient d'effectuer, sur laquelle figure une case lui
permettant de modifier son panier, ainsi qu'un encart au sein duquel il doit
renseigner ses coordonnées bancaires et valider définitivement
son achat.
L'accusé de réception pourrait alors
correspondre, dans notre première hypothèse, à la page
récapitulant la commande qu'il a passée et sur laquelle s'affiche
l'encart lui permettant d'inscrire ses coordonnées bancaires et de
valider définitivement son achat. Il pourrait cependant correspondre,
dans notre seconde hypothèse, à l'email que l'acheteur recevra
après avoir validé définitivement son achat ou encore
à la page qui s'affichera dans un troisième temps, lui faisant
savoir que son paiement a été accepté et que son achat a
bien été validé, après qu'il a effectué son
second clic.
Fort heureusement pour notre gestionnaire de site web, il
effectue toutes ces diligences de sorte qu'aucun risque n'existe pour lui du
point de vue de la procédure d'échange des consentements, si l'on
considère qu'ayant fait une offre conforme à l'article 1369-4 du
Code civil, il était tenu de respecter une telle procédure.
Il reste à envisager cependant cette même
question du respect de la procédure d'échange des consentements
en ce qui concerne cette fois-ci, les échanges qui ont lieu entre
l'acheteur et le vendeur représenté par son styliste, en dehors
du site Internet.
54
SECTION 2 : L'échange complémentaire ou
contraire des consentements en dehors du site internet.
Comme nous l'avons déjà évoqué,
l'acheteur a la possibilité de contacter son styliste par tout moyen de
son choix, entre les deux clics.
En effet, le numéro de téléphone et
l'adresse mail du styliste s'affichent à l'écran sur la page
récapitulant le détail de la commande que le destinataire de
l'offre a adressée à l'offrant, avant qu'il ne procède
à la confirmation de son acceptation.
Cette possibilité permet ainsi à l'acheteur de
préciser ses choix ou de les contredire et donc de modifier les termes
de l'accord pendant la phase d'acceptation ou après celle-ci. Cette
particularité démontre les failles de l'exigence d'une double
acceptation, dans la mesure où des échanges peuvent de nouveau
avoir lieu entre chacun des deux clics et modifier peu ou prou la commande dont
il est accusé réception. Ainsi, le deuxième clic
permettrait-il de conclure valablement le contrat électronique ?66
Nous pensons qu'il y a lieu de distinguer selon le support de
communication utilisé par les parties pour échanger entre les
deux clics. En effet, la procédure spécifique d'échange
des consentements consacrée à l'article 1369-5 du Code civil
s'applique pour les contrats conclus « par voie électronique »
comme le prévoit l'article 1369-4 du Code civil. La question est donc de
savoir si le téléphone mobile, l'email, et le
téléphone audiovisuel par Internet, sont des supports de
communication « électroniques ».
Deux strates de textes doivent êtes analysées pour y
répondre :
-la strate européenne composée de la directive
du 8 juin 200067 dite « Commerce électronique » qui
consacre une section 3 « Contrats par voie électronique »
(§1) ;
66 Il ne s'agit pas de savoir quel contrat a été
conclu, mais de savoir si la procédure d'échange des
consentements est respectée.
67 Directive 2000/31/CE du Parlement européen et du
Conseil du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des
services de la société de l'information, et notamment du commerce
électronique, dans le marché intérieur, JOCE L
178, 17 juillet 2000, p. 1.
55
-la strate interne, l'article 11 de la directive ayant
été transposé par la LCEN du 21 juin 200468 aux
articles 1369-1 et suivants du Code civil, devenus les articles 1369-4
après qu'elle a été modifiée par une ordonnance du
16 juin 200569 (§2).
§ 1 L'exclusion européenne du
téléphone mobile et de l'email, des supports de conclusion d'un
contrat électronique.
La section 3 de la directive du 8 juin 2000, intitulée
« contrats par voie électronique », ne définit pas la
« voie électronique ». Il semble néanmoins que cette
notion puisse être définie au travers de la notion de «
service de la société de l'information ».
En effet, les articles 10 et 11 qui prévoient
respectivement les informations à délivrer et la procédure
de passation d'une commande, font référence successivement au
prestataire de service et au destinataire de service, qui semblent être
les parties au contrat électronique.
Or, l'article 2 de la directive, définit le «
prestataire » comme une personne qui fournit un « service de la
société de l'information », et le destinataire de service
comme la personne qui utilise un « service de la société de
l'information », de sorte qu'il y a tout lieu de considérer que le
contrat par voie électronique est celui qui a pour objet un «
service de la société de l'information ».
L'article 2 a) procède alors à une
définition du « service de la société de
l'information » par renvoi à l'article 1er paragraphe 2
de la directive 98/34/CE70, telle que modifiée par la
directive 98/48/CE, étant précisé qu'aux termes du
considérant 18 de la directive, la conclusion des contrats en ligne est
un service de la société de l'information en tant que tel.
68 Loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans
l'économie numérique, JORF, 22 juin 2004, p. 11168.
69 Ord. n° 2005-674 du 16 juin 2005 relative à
l'accomplissement de certaines formalités contractuelles par voie
électronique, JORF n°140 du 17 juin 2005, p. 10342.
70 Directive 98/34/CE du Parlement européen et du
Conseil du 22 juin 1998, prévoyant une procédure d'information
dans le domaine des normes et réglementations techniques et des
règles relatives aux services de la société de
l'information, Journal officiel, n° L 204 du 21/07/1998 p. 0037 -
0048.
56
Cet article définit le service de la société
de l'information comme :
Tout service presté normalement contre
rémunération, à distance par voie électronique et
à la demande individuelle d'un destinataire de services.
Ainsi, un service de la société de l'information
est en tout état de cause délivré à titre
onéreux, fourni à distance, c'est-à-dire, sans que les
parties soient simultanément présentes, et à la demande
individuelle d'un destinataire de services, ce qui ne pose cependant pas de
problème en l'espèce.
En revanche, les autres éléments de la
définition font l'objet de plus de difficultés.
En effet, on entend par « voie électronique »
aux termes de cet article « un service presté à
l'origine et reçu à destination au moyen d'équipements
électroniques de traitement (y compris la compression numérique)
et de stockage de données, et qui est entièrement transmis,
acheminé et reçu par fils, par radio, par moyens optiques ou par
d'autres moyens électromagnétiques ».
Au regard de cette définition, il semblerait que
l'utilisation du téléphone mobile nous empêche de
considérer qu'un service de la société de l'information
aurait été fourni par le vendeur à l'acheteur, dans la
mesure où cette technologie ne met pas en oeuvre une technique de
stockage et de traitement de données.
En effet, comme le confirme l'annexe 5 de la directive
98/34/CE qui fournit une liste - simplement indicative cependant - de services
« non fournis par voie électronique », doivent être
considérés comme « non fournis par voie électronique
» les services qui ne sont pas fournis au moyen de systèmes
électroniques de stockage et de traitement des données, ainsi des
services de téléphonie vocale. L'utilisation du
téléphone mobile entre les deux clics n'aurait donc pas
d'incidence en ce qui concerne le cas qui fait l'objet de la présente
étude.
En revanche, un service fourni par email serait tout de
même un service de la société de l'information de sorte
qu'on ne pourrait pas exclure l'application de la procédure
prévue à l'article 11 sur ce fondement.
57
Ainsi, s'il faut considérer qu'on peut délivrer
un service de la société de l'information par email, il faut
cependant exclure la procédure spécifique prévue à
l'article 11 car dans ce cas, l'article 11 3° considère qu'une
telle procédure n'est pas applicable aux « contrats conclus
exclusivement au moyen d'un échange de courrier électronique ou
au moyen de communication individuelles équivalente
»71.
§ 2 Le doute sur l'inclusion française du
téléphone mobile dans le support de conclusion d'un contrat par
voie électronique
La transposition de la directive européenne par la
LCEN72 modifiée par une ordonnance du 16 juin
200573 n'est pas exactement fidèle.
Ainsi, il nous faut se reporter à l'article 1 II du
chapitre 1 intitulé « la communication au public en ligne »,
pour trouver des dispositions semblant définir la « voie
électronique ». En effet, cet article modifie la loi du 30
septembre 198674 relative à la liberté de
communication pour considérer qu'on entend par « communications
électroniques les émissions, transmissions ou réceptions
de signes, de signaux, d'écrits, d'images ou de sons, par voie
électromagnétique » et « par communication au
public par voie électronique toute mise à disposition du public
ou de catégories de public, par un procédé de
communication électronique, de signes, de signaux, d'écrits,
d'images, de sons ou de messages de toute nature qui n'ont pas le
caractère d'une correspondance privée. »
La première phrase nous semble donc être
suffisamment générale pour inclure tout moyen de communication
dès lors qu'il est technologique.
71 Il y aurait tout lieu d'exclure le téléphone
et skype également sur ce point dans la mesure où par analogie,
un tel moyen de communication nous semble être un moyen de communication
individuelle, équivalent à l'email.
72 Loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans
l'économie numérique, JORF, 22 juin 2004, p. 11168.
73 Ord. n° 2005-674 du 16 juin 2005 relative à
l'accomplissement de certaines formalités contractuelles par voie
électronique, JORF n°140 du 17 juin 2005, p. 10342.
74 Loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 dite Leotard,
relative à la liberté de communication, JORF du 1
octobre 1986, p. 11755.
58
Cependant, la deuxième phrase fait appel à la
notion de public et de catégorie de public, pour exclure notamment les
moyens de communications qui relèvent d'une correspondance
privée. Tout l'enjeu est de savoir si « la voie électronique
» dont il est question à l'article 1369-4 du Code civil doit
être définie en appliquant cumulativement ces deux phrases ou
uniquement la première qui semble être plus
générale.
L'article 1369-6 alinéa 1er du Code civil
doit nous conduire à favoriser la deuxième hypothèse dans
la mesure où cet article n'exclut pas le contrat conclu par
échange d'emails de la définition du contrat électronique
- à la différence des conséquences qu'il faudrait tirer de
l'application de la deuxième phrase précitée - mais
uniquement du régime juridique prévu aux articles 1369-4 et
suivants.
Ainsi il y aurait tout lieu de penser qu'un contrat conclu par
voie électronique est un contrat conclu via un moyen de communication
conforme à la première phrase de l'article 1 II de la LCEN, ce
qui englobe les contrats conclus directement sur un site internet ou par emails
ou par téléphone mobile, mais que les règles
prévues aux 1° à 5° de l'article 1369-4 et aux deux
premiers alinéas de l'article 1369-5 du Code civil, ne sont pas
applicables aux contrats conclus par email.
Au vu de ce qui vient d'être dit, le styliste devrait
donc respecter la procédure prévue à l'article 1369-5 du
Code civil lors de sa conversation avec l'acheteur si ce dernier venait
à préciser ou modifier sa commande. Ainsi, il lui appartiendrait
de récapituler à la fin de la conversation, toutes les demandes
que l'acheteur a formulées, et de lui faire accepter une deuxième
et dernière fois le contenu de sa commande complémentaire ou
modificative.
Cependant, une question autrement plus importante se pose.
En effet, il s'agirait de savoir si le vendeur doit accuser
une nouvelle fois réception de sa commande en faisant apparaître
un récapitulatif modificatif à l'écran, pour permettre
à l'acheteur de valider valablement son achat. Il nous semble qu'une
telle conclusion devrait être tirée dans la mesure où
à défaut, l'acheteur confirme accepter une commande qui aura
pourtant été modifiée.
59
Si cependant l'échange a lieu par email, le respect de
la procédure prévue à l'article 1369-5 du Code civil ne
nous semble pas devoir être remis en question dès lors qu'une
telle procédure est exclue pour les contrats qui sont conclus par
échange d'emails.
Ainsi, comme on le voit, la procédure d'échange
des consentements applicable au contrat électronique n'est pas sans
poser de nombreuses difficultés à la vente surprise à
l'essai lorsque cette dernière est conclue à distance et que,
pour compliquer le tout, le vendeur offre à l'acheteur la
possibilité d'échanger avec lui en dehors du site Internet.
D'autres difficultés sont également
suscitées par le caractère indéterminé des
éléments essentiels qui sont l'objet du contrat, dans la mesure
où, en particulier dans la vente, le législateur exige que le
prix et la chose soient précisément déterminés au
stade de la conclusion du contrat.
CHAPITRE 3 : La validité de l'accord des
volontés face à l'indétermination du prix et de la chose
dans la vente surprise à l'essai
L'article 1108 du Code civil prévoit quatre conditions
essentielles à la validité du contrat :
Le consentement de la partie qui s'oblige ;
Sa capacité de contracter ;
Un objet certain qui forme la matière de l'engagement
; Une cause licite dans l'obligation.
Nous nous en tiendrons ici à l'analyse de la condition
relative à l'objet du contrat, dans la mesure où les autres
conditions ne semblent pas poser de problème en l'espèce.
Ainsi, il s'agit de savoir si la « vente surprise »
peut est valable au regard de la condition de validité relative à
la détermination du prix (section 2) et de la chose (section 1).
60
A supposer que l'on considère que le contrat ait
été conclu au moment de la validation définitive de
l'achat par l'utilisateur sur le site internet, la question se pose
effectivement en l'espèce.
SECTION 1 : L'indétermination des biens qui
feront l'objet de la vente
Le Code civil oblige les parties à définir le
contenu de la prestation de chacune des parties.
Lorsque celle-ci a pour objet une chose, la
détermination de l'objet s'entend de la détermination de la
chose. Cette détermination est effectuée avec plus de
difficulté lorsque la prestation a pour objet une chose de genre et non
un corps certain. En effet, le corps certain étant par nature unique, il
suffit de faire référence à l'une de ses
particularités pour que l'on sache de quel bien il s'agit. En revanche,
lorsque le bien est une chose de genre, ce qui semble être le cas en
l'espèce dans la mesure où les vêtements acquis en vue de
leur revente sont produits en série, il est nécessaire que
celle-ci soit déterminée au moins quant à son
espèce et que sa quotité puisse être
déterminée, comme le prévoit l'article 1129 du Code
civil.
En l'espèce, la question est de savoir si la
détermination du style de vêtements et accessoires suffit à
rendre la chose déterminée quant à son espèce et si
le fait que le vendeur ne propose à l'acheteur que de déclarer
les types de vêtements dont il a besoin - pantalons, vestes, ceintures -
sans lui permettre de demander une quantité, est de nature à
rendre la quotité déterminable.
Au sujet de la première de ces exigences, il semble que
la jurisprudence considère que l'objet n'est pas déterminé
lorsque sa définition est laissée à la libre
discrétion du débiteur de la prestation. Ainsi, deux
jurisprudences s'affrontent sur ce point, toutes deux rendues à propos
du contrat de location entre un propriétaire de vidéogrammes et
un vidéo-club.
61
Ainsi, la première chambre civile de la Cour de
cassation75 a considéré, que l'objet d'un tel contrat
était suffisamment déterminé dès lors qu'il ne
mentionnait que le genre de films donnés en location mais non le titre,
dans la mesure où, en stipulant la possibilité pour le locataire
de bénéficier d'un échange gratuit, « son
identification dépendait, pour le surplus, de la volonté du
locataire, et non du bailleur ».
Au contraire, mais en tenant un raisonnement identique, la
chambre commerciale76 a considéré que l'objet d'un tel
contrat n'était plus suffisamment déterminé lorsque le
loueur de vidéo-cassettes appliquait une tarification différente
en fonction du type de film, sa notoriété et son
actualité, tout en se réservant la faculté
discrétionnaire de définir les films qui seraient loués au
locataire en application du contrat, sans donner la possibilité au
locataire de procéder à des échanges gratuits.
Il ressort donc de ces deux jurisprudences, qu'un objet peut
être déterminé lorsque le style ou le genre seul de la
chose est défini, sous réserve que le contrat permette au
créancier d'échanger gratuitement la chose qui lui aura
été livrée. Comme on le voit, la jurisprudence
considère que l'objet est déterminé au stade de la
formation du contrat, si le contrat prévoit qu'il peut être
unilatéralement défini de manière plus précise au
stade de son exécution par le créancier de l'obligation portant
sur la chose77.
Cependant, nous sommes convaincus qu'une telle circonstance a
été mise en évidence par la jurisprudence qu'afin de
prouver que l'objet n'était pas discrétionnairement
déterminé par le débiteur de la prestation qui a pour
objet la chose.
Ainsi en l'espèce, même si le contrat qui est
conclu par l'intermédiaire du site n'offre pas une telle faculté
à l'acheteur, qui ne dispose que de la faculté de se
rétracter, mais pas d'échanger ses vêtements avec d'autres
qui correspondraient plus à ses goûts, on pourrait tout de
même considérer que l'objet n'est pas discrétionnairement
déterminable par le vendeur. En effet, l'acheteur a la
possibilité de contacter un styliste afin de mieux
75 C. Cass. Civ 1ère, 23 mai 1995, n° de
pourvoi 94-14255.
76
C. Cass. Com, 19 Novembre 1996, n°
pourvoi 94-14530.
77 Il ne s'agit que de préciser l'objet et non de le
redéfinir. Ainsi, le locataire aurait le droit de demander à ce
qu'une vidéocassette « James Bond » remplace le film «
Léon » qui lui a été envoyé, mais ne pourrait
en aucun cas demander qu'on lui envoie une comédie romantique dans la
mesure où le contrat prévoyait qu'il ne lui serait livré
que des films d'action. Par ailleurs, seule la faculté de
préciser unilatéralement l'objet est admise. La
nécessité d'un nouvel accord de volontés ne serait pas
admise.
62
renseigner ses goûts et styles de sorte que cette
faculté de définir discrétionnairement le contenu de la
malle est suspendue à la volonté de l'acheteur qui souhaite se
réserver un effet de surprise ou non.
Il ne semble donc pas que la nullité de la vente
pourrait être encourue sur ce point dans la mesure où la chose
nous apparaît suffisamment déterminée quant à son
espèce, au regard de ces jurisprudences.
En revanche, il paraît plus délicat de
démontrer que la chose est déterminable quant à sa
quotité. En effet, l'acheteur n'est pas à même de savoir au
moment où il valide définitivement son achat, le nombre de
pantalons ou de vestes qu'il recevra.
Cependant, on peut défendre qu'en sélectionnant
les choix de vêtements qu'il a pu faire et au regard de la connaissance
qu'il a de la valeur maximale de la malle, il lui est possible de se faire une
idée du nombre de vêtements qu'il recevra. Ainsi, s'il n'a
commandé que des pantalons, il peut penser qu'il en recevra entre dix et
quinze. En revanche, s'il a commandé des pantalons et des vestes, il
peut penser qu'il recevra des ensembles, et donc moitié moins de
pantalons et de vestes. En effet, un style se conçoit de la tête
aux pieds.
Un problème plus important encore se pose concernant la
détermination du prix dans la mesure où le vendeur ne renseigne
qu'un prix maximal.
SECTION 2 : L'indétermination du prix de la
vente totale et du prix propre à chaque bien
Comme nous l'avons déjà précisé,
le gestionnaire du site web ne mentionne qu'un prix maximal au moment où
l'acheteur valide définitivement son achat, en précisant que la
valeur de la malle ne dépassera pas, en tout état de cause, la
somme de 1500 euros. Ainsi non seulement l'acheteur ne connaît pas
précisément le prix total qu'il aura à débourser
s'il souhaite conserver l'intégralité du contenu de la malle,
mais surtout, il ne connaît pas en toute logique le prix propre à
chaque vêtement et accessoire.
63
Il convient donc, en premier lieu, de se demander si la
détermination du prix est une condition de validité du contrat de
vente avant de comprendre dans quelles circonstances cette condition est
respectée.
La jurisprudence a été très fluctuante en
la matière. Considérant d'abord que le prix était une
condition de validité de tout contrat et qu'il devait être
déterminé ou déterminable, elle a fait du prix une
condition de la validité des contrats par principe en considérant
ça et là que certains contrat faisaient exception, comme le
contrat d'entreprise ou encore le mandat.
Ainsi dès lors que la détermination du prix
supposait un nouvel accord des parties en cours d'exécution du contrat
ou que cette détermination dépendait de la volonté
unilatérale d'une des parties le contrat devait être
annulé.
La Cour de cassation a ensuite assoupli ses exigences par deux
arrêts du 29 novembre 199478 en considérant que le prix
devait toujours être déterminé ou déterminable, mais
qu'il pouvait néanmoins être déterminé de
manière subjective par une des parties dotée du pouvoir de fixer
unilatéralement le prix. Ainsi, en l'espèce, une clause du
contrat faisait référence au tarif fournisseur de sorte qu'une
des parties avait la possibilité de fixer unilatéralement le
prix.
La juge contrôlait alors l'abus dans la fixation du prix
en sanctionnant celui qui fixait le prix, sous l'angle de la bonne foi
exigée dans le cadre de l'exécution des contrats.
Après quoi, la Cour de cassation s'est réunie en
assemblée plénière le 1er Décembre
199579 afin de modifier sa jurisprudence, en renversant le principe
et l'exception.
Au vu de sa nouvelle décision, elle considère
d'une part que l'article 1129 du Code civil n'est plus applicable à la
détermination du prix, d'autre part que lorsqu'une convention
78 C.Cass. Civ 1ère, 29 Nov 1994, I
D.1995.122 note Aynès, JCP 1995.II.22371 note Ghestin,
CCC 1995, n° 24, note Leveneur, RTD civ. 1995. 358, obs.
Mestre, RTD Com. 1995.464, obs. Bouloc.
79 C. Cass. Ass. Plén., 1er déc 1995
(4 arrêts), Gaz Pal. 9 Déc 1995, note P. de Fronbressin,
JCP 1996.II.22565 concl.Jeol, note Guestin, JCP E 1996, II,
776, note Leveneur, et N., I, 93, obs. D.Boulanger, D.1996.13 concl.
Jéol ; note Aynès, LPA, 27 Déc 1995, n° 155,
p.11, note D.Bureau et N. Molfessis, CCC 1996, n° 5 et chron.
Leveneur, RTD civ. 1996. 153, obs. J. Mestre, Defrénois
1996.748, obs. Delebecque, Grands arrêts, t. 2, n°
152-155. - V. aussi, M. A. Frison-Roche, De l'abandon du carcan de
l'indétermination à l'abus dans la fixation du prix,
RJDA, 1996, n°1, p. 3.
64
prévoit la conclusion de contrats ultérieurs,
l'indétermination du prix de ces contrats dans la convention initiale
n'affecte pas, sauf dispositions légales particulières, la
validité de celle-ci, l'abus dans la fixation du prix ne pouvant donner
lieu qu'à résiliation ou indemnisation.
Depuis cette jurisprudence réaffirmée par la
suite80, il semble que le prix ne soit plus une condition de
validité des contrats sauf lorsque la loi en dispose autrement.
Ainsi, à l'égard de la vente, l'article 1591
consacre clairement une exception au principe posé par la jurisprudence
rendue par l'assemblée plénière de la Cour de cassation en
1995 dans la mesure où il dispose :
Le prix de la vente doit être déterminé
et désigné par les parties.
La jurisprudence entend néanmoins de manière
assez souple cette exigence en considérant, qu'il n'est pas
nécessaire que le prix soit déterminé dès la
conclusion du contrat pourvu qu'il soit déterminable. Tel est notamment
le cas lorsqu'un individu commande une automobile auprès de son
concessionnaire qui la lui vend en insérant dans le contrat une clause
au terme de laquelle le prix à payer sera celui du constructeur au jour
de la livraison. En effet, auquel cas, la jurisprudence considère que le
prix est déterminable dans ce cas dans la mesure où sa
détermination était indépendante de la volonté du
vendeur81.
A priori, il semble difficile de considérer que le
contrat conclu par Internet, tel que l'envisage aujourd'hui le vendeur
gestionnaire du site web, comporte un prix déterminé ou
déterminable.
En effet, la fixation d'un prix maximal, ne permet pas de
connaître de manière précise le prix qui serait à
payer. Par ailleurs, nous pensons que l'exigence d'une détermination du
prix oblige les parties à définir le prix correspondant à
chacun des vêtements et objets vendus dans la malle. Aussi, la situation
actuelle laisse entendre que le prix est déterminé de
manière purement subjective par le vendeur, ce qui n'est pas permis
dans
80 En toute matière :arrêt Civ
1ère 12 mai 2004 n° pourvoi 03-13847, pour le prêt
à intérêt :
Cass. Com 9 juillet 1996.
81 C. Cass Civ 1ère 2 décembre 1997,
n° de pourvoi 95-16720.
65
le cadre d'une vente, dans la mesure où ce dernier ne
communique pas le prix des vêtements et accessoires qui pourraient
composer la malle.
Une solution pourrait consister à déterminer le
mode de calcul du prix total en précisant ainsi un prix correspondant
à chaque type de vêtement et accessoires, ainsi par exemple, 100
euros pour un pantalon, 35 euros pour une ceinture, 150 euros pour une veste...
L'acheteur pourrait alors se faire une idée du prix qu'il aurait
à payer dans la mesure où il connaîtrait le montant maximal
que le prix total de la malle ne pourra dépasser, ainsi que le prix des
catégories de vêtements qu'il a demandés, sans
connaître tout à fait précisément le prix total de
sa commande, ne sachant pas en quelle quantité lui seront livrés
les catégories de vêtements qu'il a achetés.
Le vendeur pourrait même s'abstenir d'affecter un prix
à chaque catégorie de vêtement, ce qui serait
commercialement plus réaliste, en indiquant à l'acheteur que le
prix des vêtements et accessoires sera celui de leur fournisseur,
majoré d'un pourcentage de 20 % correspondant à sa marge.
Auquel cas, la déterminabilité du prix ne serait
qu'indirectement subjective, car le vendeur pourrait faire monter le prix total
en remplissant en majorité la malle des catégories de
vêtements les plus chères.
La question de la détermination du prix est donc
liée à celle de la détermination de la chose dans la vente
surprise. Il ne fait aucun doute que la sanction de l'indétermination du
prix consisterait en la nullité du contrat conclu dans la mesure
où le prix est une condition de validité du contrat de vente.
Cependant, on peut débattre de la nature de la nullité.
En effet, la théorie classique des nullités
enseigne qu'un contrat privé d'un de ses éléments
essentiels est nul de nullité absolue, en se fondant sur le
critère de la gravité.
Au contraire, la théorie moderne des nullités
prévoit que la nature de la nullité est fonction de
l'intérêt qu'on entend protéger. Ainsi, un contrat serait
nul de nullité absolue lorsque la règle qui a été
violée entend protéger l'intérêt
général tandis que la nullité ne devrait être que
relative lorsque celle-ci entendait protéger une personne en
particulier.
66
Il n'existe pas de jurisprudence considérant qu'un
contrat est nul de nullité absolue dès que le prix est
indéterminé ou indéterminable82.
Il nous semble par conséquent que la théorie
moderne des nullités devrait être appliquée à une
telle situation dans la mesure où la règle relative à la
détermination objective du prix entend protéger l'acheteur et non
la société tout entière. Ainsi, il serait possible de
considérer que l'acheteur a renoncé à agir en
nullité en confirmant de manière tacite l'acte qu'il a conclu
dès lors qu'il a procédé au paiement.
Comme nous venons de le voir, l'originalité du
modèle économique mis en oeuvre par le gestionnaire du site web
rend très difficile l'application du Droit, tant du point de vue de
l'obligation d'information que le Code de la consommation fait peser sur ce
dernier, qu'en ce qui concerne la procédure d'échange des
consentements, et les règles relatives à la détermination
de l'objet du contrat.
Le régime juridique des contrats à distance pose
d'autres difficultés en ce qui concerne le droit de rétractation
dont bénéficie l'acheteur lorsque la vente conclue à
distance correspond également à la qualification de vente
à l'essai.
82 A la différence de la conclusion que tire une partie
de la doctrine d'un arrêt
Cass. Com, 9 mai 1985, n° de pourvoi
83-16578 83-16823 ,faisant référence à la caducité
du contrat et non à la nullité absolue. Un arrêt rendu le
30 novembre 1983,n° pourvoi 82-12045, par la même chambre a
cependant considéré qu'un contrat était dépourvu
d'existence légale dans le cas où le prix était
inexistant, ce qui est selon nous une situation différente du cas
où le prix n'est que déterminable subjectivement.
67
PARTIE 2 : LE DROIT DE RÉTRACTATION
APPLIQUÉ À LA VENTE « SURPRISE » À
L'ESSAI
Comme nous l'avons déjà évoqué, la
vente à l'essai est prévue par l'article 1588 du Code civil, qui
prévoit en substance que celle-ci n'est formée que sous la
condition suspensive de la réussite de l'essai.
Cette disposition n'est pas sans poser beaucoup de
difficultés, en particulier au regard de notre espèce, dans la
mesure où la frontière entre la faculté qui est
donnée à l'acheteur de faire échec à l'essai et le
droit de rétractation qui est attribué à ce dernier
lorsque la vente est conclue à distance, est ténue, voire,
inexistante.
Ainsi, il s'agit de se demander dans un premier temps si, la
circonstance selon laquelle la vente est conclue à distance, fait
obstacle à la qualification de vente à l'essai, dans la mesure
où le cyberacheteur dispose déjà au travers de son droit
de rétractation, des mêmes avantages que ceux qui lui seraient
offerts par la faculté de faire échec à l'essai (Chapitre
1).
En second lieu, il s'agira cependant d'envisager
l'articulation de la faculté de faire échec à l'essai et
du droit de rétractation, au cas où l'on devrait
considérer que ces deux droits se distinguent et se cumulent (Chapitre
2).
CHAPITRE 1 : L'autonomie de la faculté d'essai
vis-à-vis du droit de rétractation
Loin de se substituer à la qualification de vente
à l'essai, la qualification de vente à distance semble s'y
superposer. En effet, nous tâcherons de démontrer que la
première de ces qualifications, consacrée par les
rédacteurs du Code, à une époque où le droit de
rétractation n'avait pas été inventé, survit
à la seconde (section 1).
Il n'en reste pas moins qu'en raison de ses similitudes avec
la faculté de faire échec à l'essai, on peut s'interroger
sur la capacité du droit de rétractation à survivre
à la réalisation de l'essai et envisager son éventuelle
disparition au stade de l'exécution du contrat, malgré son
existence au stade de la conclusion (section 2).
68
SECTION 1 : La survivance de la vente à l'essai
lorsque celle-ci est conclue à distance
Comme nous le verrons, il semble que des similitudes
évidentes existent entre le droit de rétractation et la
faculté de faire échec à l'essai, de sorte qu'il est tout
naturel de se demander si le droit de rétractation ne se substitue pas
à la faculté de faire échec à l'essai lorsque la
vente est conclue à distance (§1).
Cependant, en dépit de ces similitudes, il nous semble
qu'il faille considérer que le droit de rétractation s'ajoute
à la faculté de faire échec à l'essai sans s'y
substituer, dans la mesure où sa consécration en droit de la
consommation n'apparaît pas incompatible avec le droit commun du code
civil (§2).
§ 1 Les similitudes entre la faculté d'essai et
le droit de rétractation
La vente à l'essai doit être qualifiée
comme telle lorsque le vendeur offre à l'acheteur la possibilité
d'essayer, de tester et d'apprécier le bien dont il fait
l'acquisition.
Deux possibilités découlent alors d'une telle
circonstance. En effet, si l'article 1588 du Code civil présume que la
vente faite à l'essai est conclue sous la condition suspensive que
l'essai soit réussi, les parties peuvent néanmoins décider
que la vente soit conclue sous la condition résolutoire de
l'échec de l'essai.
Ainsi, dans le premier cas, la réalisation de la
condition emporte la formation définitive du contrat,
rétroactivement au jour de sa conclusion, tandis que dans le second,
elle emporte l'anéantissement rétroactif du conclu qui
était définitivement formé au moment de sa conclusion.
Si les parties ont parfois totalement conscience que leur
contrat correspond à la qualification de vente à l'essai et
qu'ils ont une connaissance parfaite des conséquences qui en
découlent, cette qualification est parfois découverte par les
parties au cours d'un
69
litige lorsque le juge interprète une clause au terme
de laquelle il est possible de déduire que le bien n'était acquis
que sous réserve qu'il corresponde à certains
critères83.
Cependant, la question est de savoir si une vente peut
être qualifiée de « vente à l'essai » et
être présumée faite sous condition suspensive, si les
parties ne stipulent pas une condition résolutoire, lorsque la vente est
conclue à distance. En effet, auquel cas, l'article L 121-20 du Code de
la consommation offre déjà un droit de rétractation
à l'acheteur, de sorte qu'en stipulant une clause au terme de laquelle
le vendeur fait savoir à l'acheteur qu'il a la possibilité de
retourner la chose s'il n'est pas satisfait, le vendeur ne fait qu'informer
l'acheteur qu'il dispose d'un droit de rétractation qui lui est offert
par la loi.
On peut ainsi se demander si la qualification de vente
à l'essai n'est pas uniquement réservée aux contrats dans
lesquels un droit de rétractation légal n'existe pas, ainsi des
ventes à distance dont il est question aux articles L 121-20-2 et L
121-20-4 du Code de la consommation où il est fait exception à
l'existence d'un droit de rétractation, ou des ventes qui ne sont pas
conclues à distance et qui sont conclues dans le monde physique, ainsi
des ventes de vêtements qui ont lieu en magasin lorsque l'enseigne offre
à l'acheteur la possibilité d'obtenir le remboursement du prix
qu'il a payé en restituant les vêtements dont il n'était
pas satisfait.
La vente à distance où un droit de
rétractation existe au profit de l'acheteur, apparaît telle une
variété légale de vente à l'essai. Ainsi, la vente
à l'essai prévue par l'article 1588 du Code civil est
qualifiée comme telle lorsque la faculté d'essai dont
bénéficie l'acheteur n'existe que par la volonté des
parties, ce qui n'est pas le cas de notre espèce. En effet, même
si le vendeur déclare à l'acheteur qu'il a la possibilité
de retourner les vêtements dont il n'est pas satisfait, il n'en reste pas
moins que l'acheteur bénéficie de cette faculté au regard
de la loi, et qu'il serait déroutant d'imposer au vendeur qu'il informe
l'acheteur de son droit de rétractation tout en interprétant
cette information comme la volonté de lui offrir une faculté
supplémentaire que lui offre déjà la loi. Les similitudes
entre le droit de rétractation et la faculté de faire
échouer l'essai se déduisent d'ailleurs des ressemblances entre
le mécanisme de la condition dans la vente à l'essai
83 C. Cass. Civ 1ère 13 Octobre 1998, à
propos d'une vente de chevaux, le contrat mentionnant « si la jument fait
l'affaire » et « si elle est qualifiée pour le central
classique de 1993 ».
70
et le débat sur les effets du droit de
rétractation. En effet, la doctrine s'est longtemps divisée sur
les effets du Droit de rétractation84.
Tandis qu'une partie d'entre elle considérait que
l'existence d'un tel droit avait pour effet d'anéantir un contrat
déjà formé, le reste de la doctrine considérait au
contraire le non exercice du droit de rétractation comme une
étape dans le processus de formation du contrat, venant parfaire
l'effectivité de l'acceptation.
Dans le premier cas, le droit de rétractation
opérait donc telle une condition résolutoire tandis qu'il
opérait plutôt telle une condition suspensive dans le second. On
le voit, ces deux mécanismes renvoient à ceux qui peuvent
être mis en oeuvre dans le cadre d'une vente à l'essai.
Le Droit des contrats à distance semble cependant
plutôt pencher pour la première interprétation.
En effet, l'article 12 a) de la directive du 25 Octobre 2011
dispose que
L'exercice du droit de rétractation a pour effet
d'éteindre l'obligation des parties :
D'exécuter le contrat à distance ou le contrat
hors établissement.
Ainsi, en considérant que les parties avaient
l'obligation d'exécuter le contrat à l'égard duquel le
droit de rétractation est exercé, il paraît clair que
législateur européen considère que l'exercice de ce droit
met fin au contrat qui avait été formé, de sorte que
l'exercice du droit de rétractation se rapprocherait de la
réalisation d'une condition résolutoire.
Cependant, comme nous allons le voir, le Code de la
consommation ne consacre pas un Droit dérogatoire sur ce point de sorte
qu'il y a tout lieu de considérer que la figure de vente à
l'essai semble se superposer à la figure spéciale de la vente
à distance et que les
84 V. sur ce débat, E. Poillot, et E.Bazin, « La
droit de repentir en droit de la consommation », D. 2008, p.
3028, spéc. n° 1.
71
régimes juridiques qui leur sont propres se cumulent
lorsque le vendeur offre à l'acheteur un allongement du délai
légal de rétractation.
§ 2 L'application superposée de la
faculté d'essai et du droit de rétractation
Il y a tout lieu de considérer que le Droit des
contrats à distance ne fait pas exception à l'article 1588 du
Code civil en rejetant son application dans le cadre d'une vente à
distance de sorte que sans violer l'adage« lex specialia generalibus
derogant », il ne s'agit pas de substituer un Droit spécial
qui déroge au Droit commun mais d'appliquer un Droit spécial qui
vient compléter le Droit commun.
Dès lors qu'on peut dénoter une volonté
de la part du vendeur d'attribuer à l'acheteur une faculté de
rétractation, d'essai, qui ne lui est pas offerte par la loi, la
qualification de vente à l'essai et le régime qui en
découle peut donc se superposer à celui de la vente à
distance.
Ainsi, en l'espèce, le vendeur offre à
l'acheteur la possibilité d'essayer les vêtements qui lui seront
livrés et de les retourner au cas où il ne serait pas satisfait,
dans un délai de 10 jours à compter de la réception de la
malle. La volonté du vendeur d'attribuer une faculté à
l'acheteur qui n'est pas déjà offerte par la loi ne se
conçoit selon nous que s'agissant de l'allongement du délai
légal de 7 jours correspondant au délai pendant lequel l'acheteur
peut exercer son droit à compter de la réception
conformément à l'article L 121-20 du Code de la consommation, au
délai de 10 jours à compter du même point de départ.
Ainsi, en donnant trois jours de plus à l'acheteur que le délai
de 7 jours que lui offre déjà la loi, le vendeur fait preuve
d'une véritable volonté qui emporte la qualification de vente
à l'essai prévue par l'article 1588 du Code civil.
La question de l'articulation entre le délai d'essai et
le délai de rétractation devra donc être envisagée
dans le cas de la présente espèce, mais pourra selon nous
être évitée lorsque le délai légal de
rétractation sera porté à 14 jours comme le prévoit
le projet de loi85 de transposition de la directive du 25 Octobre
201186, sous réserve que le vendeur
85 Projet de loi n° 1015, relatif à la
consommation, enregistré à la présidence de
l'Assemblée nationale le 2 mai 2013.
86 Directive 2011/83/CE du Parlement européen et du
Conseil du 25 octobre 2011, relative aux droits des consommateurs, modifiant la
directive 93/13/CEE du Conseil et la directive 1999/44/CE du Parlement
72
ne décide pas d'allonger une fois encore le
délai pendant lequel l'acheteur peut revenir sur sa volonté.
Comme nous le voyons, il est possible de considérer que
le délai d'essai se superpose au délai de rétractation
dans certains cas, comme en l'espèce. Cependant, il reste à
savoir si, bien qu'existant au moment de la réception des biens, le
droit de rétractation prévu par le Code de la consommation n'est
pas susceptible de disparaître en cours d'exécution du contrat
lorsque l'acheteur essaiera les vêtements.
SECTION 2 : La survivance du droit de
rétractation au cours de l'essai
Dès lors que le délai d'essai se superpose au
délai de rétractation, on peut se demander si le droit de
rétractation survit à l'essai réalisé par
l'acheteur. En effet, conformément à la directive du 20
décembre 199787, l'article L 121-20-2 3° et 4° du
Code de la consommation dispose que le droit de rétractation ne peut
être exercé, sauf si les parties en ont convenu autrement, pour
les contrats :
30 De fourniture de biens confectionnés
selon les spécifications du consommateur ou nettement
personnalisés ou qui, du fait de leur nature, ne peuvent être
réexpédiés ou sont susceptibles de se
détériorer ou de se périmer rapidement ;
40 De fourniture d'enregistrements audio ou
vidéo ou de logiciels informatiques lorsqu'ils ont été
descellés par le consommateur.
La première de ces exceptions est
interprétée de manière large par la jurisprudence. Ainsi,
à cet égard, le tribunal de Grande Instance de Bordeaux a
jugé que la clause des conditions générales de vente de
CDiscount excluant le droit de rétractation à l'égard
notamment de « l'ensemble des produits des rayons sous-vêtements
(homme et femme, lingerie, chaussettes, piercing et boucles d'oreilles ; ceci
par mesure d'hygiène) »88, était valable, en
considérant que l'hygiène pouvait être un motif valable
justifiant que
européen et du Conseil et abrogeant la directive
85/577/CEE du Conseil et la directive 97/7/CE du Parlement européen et
du Conseil, JOUE n° L 304, 22 novembre 2011, p. 64.
87 Directive 97/7/CE du Parlement européen et du
Conseil du 20 mai 1997 concernant la protection des consommateurs en
matière de contrat à distance, JOCE n° L 144, 4
juin 1997, p. 21.
88 TGI Bordeaux, 11 mars 2008, UFC Que Choisir c/ CDiscount
(n°3703/2006), Contrats Conc. Cons. 2008. Comm.
n° 69, note A.Debet.
73
certains produits soient considérés comme
faisant partie de ceux qui de fait de leur nature, ne peuvent être
réexpédiés.
Quoique circonscrite au cas des sous-vêtements, ce qui
ne concerne pas le cas du vendeur dans notre espèce, dans la mesure
où ce dernier ne vend pas de tels objets, cette interprétation
extensive a été relayée par Directive du 25 Octobre 2011
qui consacre en son article 16 e) une telle exception concernant « la
fourniture de biens scellés ne pouvant être renvoyés pour
des raisons de protection de la santé ou d'hygiène et qui ont
été descellés par le consommateur après livraison
».
Une interprétation plus extensive encore de cette
disposition transposée fidèlement au sein du projet de loi
relatif à la consommation permettrait d'exclure l'existence d'un droit
de rétractation dans notre cas d'espèce. A défaut, il
semble que les vêtements autres qu'intimes puissent être
essayés sans que des raisons d'hygiène ne fassent obstacle
à leur renvoi.
En outre, l'exception prévue au 4° de l'article L
121-20-2 précité prévoit que le droit de
rétractation ne peut être exercé, lorsque les
enregistrements audio et vidéo ou logiciels informatiques ont
été descellés. Il semble donc que le Code de la
consommation prévoit des cas dans lesquels l'ouverture d'un colis ferait
obstacle à l'exercice du droit de rétractation de sorte qu'on
pourrait se demander si, de manière générale, le droit de
rétractation ne pourrait plus être exercé dès lors
qu'un bien a été essayé, commencé d'être
utilisé. Il ne fait aucun doute que directive du 25 Octobre 2011 conduit
à tenir un raisonnement totalement inverse. Ainsi, en effet, dans son
considérant 37, la directive indique que « le consommateur
devrait être autorisé à essayer et inspecter le bien qu'il
a acheté, dans la mesure nécessaire pour établir la
nature, les caractéristiques et le bon fonctionnement ».
D'autre part, elle indique dans son considérant 42 que
« pour établir la nature, les caractéristiques et le bon
fonctionnement des biens, le consommateur devrait uniquement les manipuler et
les inspecter d'une manière qui lui serait également permise en
magasin. Par exemple, il devrait seulement essayer un vêtement et non pas
le porter. »
74
C'est ainsi qu'il paraît difficile de considérer
que le fait d'essayer un bien fait disparaître le droit de
rétractation, dans la mesure où l'essai ne semble pas impliquer
plus que ce qui est prévu dans le considérant 42 de la directive
du 25 Octobre 2011. En effet, en revêtant les vêtements qu'il a
acquis, l'acheteur les essaye comme il lui serait permis de le faire dans une
boutique. La faculté d'essai qui lui est attribuée par le vendeur
dans le cadre de la vente à l'essai ne lui donne pas la
possibilité de le porter à l'extérieur de chez lui et
pendant une durée excédant celle qui est nécessaire pour
se faire un avis.
Par ailleurs, à supposer que le vendeur permette
à l'acheteur de porter le vêtement afin de se faire un avis sur
les vêtements et accessoires qu'il a acquis, le considérant 42 de
la directive prévoit que « certains consommateur exercent leur
droit de rétractation après avoir utilisé les biens dans
une mesure qui excède ce qui est nécessaire pour établir
la nature, les caractéristiques et le bon fonctionnement du bien. Dans
ce cas, le consommateur ne devrait pas perdre son droit de rétractation,
mais devrait répondre de toute dépréciation des biens.
»
Ainsi, il est bien malaisé de plaider la disparition du
droit de rétractation en cours d'exécution du contrat par la
réalisation de l'essai qui est permis à l'acheteur.
Même si ce principe est prévu par les
considérants de la directive uniquement, il n'en reste pas moins que
celle-ci en tire toutes les conséquence à l'article 14.2 aux
termes duquel « la responsabilité du consommateur n'est
engagée qu'à l'égard de la dépréciation des
biens résultant de manipulations des biens autres que celles
nécessaires pour établir la nature, les caractéristiques
et le bon fonctionnement de ces biens ». Fidèlement
transposée par le projet de loi relatif à la consommation, cette
disposition fait clairement obstacle à la théorie de la
disparition du droit de rétractation en cas de manipulation du bien
excédant celle qui est permise pour que le consommateur se fasse un
avis.
Partant, il est nécessaire de considérer que le
Droit de rétractation se cumule avec le droit de l'acheteur d'essayer et
de retourner, en cas d'échec, les vêtements qu'il a acquis dans le
cadre de la présente espèce. Ainsi, l'autonomie du Droit de
rétractation vis-à-vis
75
de la faculté d'essai est bien réelle de sorte
qu'il y a lieu de comprendre comment articuler au mieux ces droits pour ne pas
alourdir la charge qui pèse sur le vendeur.
CHAPITRE 2 : L'articulation du droit de
rétractation et de la faculté d'essai
Dès lors que nous avons démontré que le
droit de rétractation pouvait être réellement
indépendant de la faculté d'essai lorsque la vente était
conclue à distance, il reste à savoir comme articuler ces
droits.
En effet, deux hypothèses sont à envisager,
ainsi les parties peuvent faire de la réussite de l'essai une condition
résolutoire dont la réalisation vient former
rétroactivement et de manière définitive le contrat au
jour de sa conclusion. Au contraire, les parties peuvent préférer
faire de l'échec de l'essai une condition résolutoire venant
mettre rétroactivement fin au contrat qui a été conclu.
Même si l'article 1588 du Code civil laisse entendre que
la vente à l'essai est présumée être faite sous
condition suspensive, la possibilité que les parties ont d'y
déroger en stipulant une condition résolutoire s'explique dans la
genèse de l'article 1588.
Ainsi, Pothier pensait en son temps que le Droit romain
faisait de la vente à l'essai un contrat affecté d'une condition
résolutoire. Cette analyse était cependant erronée dans la
mesure où le Droit romain n'avait pas consacré une nature
juridique déterminée à la vente à l'essai, en
assignant, de plein droit, à la condition d'essai un effet plutôt
résolutoire que suspensif. Prenant connaissance de l'erreur qui avait
été commise par Pothier, les rédacteurs du Code civil ont
alors consacré un principe diamétralement inverse, mais seulement
à titre de présomption, afin de laisser aux parties la
possibilité d'y déroger.
Plusieurs raisons, quelque peu incertaines cependant, nous
incitent à préférer la condition résolutoire
à la condition suspensive (section 1). Aussi, dans un second temps, nous
verrons qu'il est nécessaire au vendeur de calquer les modalités
d'exercice du droit d'essai de l'acheteur sur celles du droit de
rétractation (section 2).
76
SECTION 1 : Les raisons de la stipulation d'une
condition résolutoire
Même si l'article L 121-20 alinéa 2 du Code de la
consommation fait courir le délai de rétractation de l'acheteur
de 7 jours à compter de la réception du bien, on peut se demander
s'il n'est pas nécessaire que le contrat soit définitivement
formé avant que ce délai ne commence à courir, de sorte
qu'il y a lieu de s'interroger sur l'incidence du choix de la condition
résolutoire ou de la condition suspensive à cet égard
(§1).
Si le choix de la condition résolutoire ou suspensive
n'a pas de réelles conséquences du point de vue du point de
départ du délai de rétractation, et donc du point de vue
de la durée du délai effectif pendant lequel l'acheteur peut
retourner les biens qu'il a acquis, nous verrons que la question du transfert
des risques peut influencer ce choix (§2).
§ 1 L'inclusion du délai de rétractation
dans le délai d'essai
Le délai qui est laissé à l'acheteur pour
essayer le bien est déterminé par les parties ou par un usage
dans la vente à l'essai à la différence de celui qui est
laissé au cyber-acheteur qui est déterminé par la loi.
La question est cependant de savoir si le délai d'essai
et le délai de rétractation partagent le même point de
départ.
Ainsi, nous savons que le délai de rétractation
commence à courir pour 7 jours à compter de la réception
des biens dans le cadre d'une vente à distance selon l'article L 121-20
alinéa 2 du Code de la consommation.
Aussi, dans le cas où les parties auraient
stipulé une condition résolutoire aux termes de laquelle le
contrat est formé à la date de conclusion du contrat mais
anéanti de manière rétroactive si l'essai n'est pas
satisfaisant, il ne fait aucun doute que le délai de rétractation
commencerait à courir au même moment que le délai
d'essai.
Il y a donc tout lieu de penser qu'en l'espèce, le
délai d'essai étant de 10 jours, ce dernier se terminerait au
plus tard trois jours après le délai de rétractation de 7
jours
77
dans la mesure où il aura commencé à
courir au même moment que le délai de rétractation : au
moment de la réception des biens.
Cependant, on peut se demander s'il en serait de même si
les parties avaient décidé de stipuler une condition suspensive
plutôt que résolutoire. En effet, dans ce cas, la réussite
de l'essai emportant la réalisation de la condition suspensive, c'est
cet évènement qui marque la formation définitive du
contrat qui a été conclu. Or, on peut se demander si le
délai de rétractation peut commencer à courir alors
même que le contrat n'est pas définitivement formé, et donc
si le délai de rétractation commence à courir au moment
seulement où la condition suspensive se réalise. Auquel cas, une
telle circonstance ferait peser une charge très lourde sur les
épaules du vendeur en laissant l'acheteur libre de cumuler 10 jours
d'essai et 7 jours pendant lesquels il pourrait se rétracter, ce qui
porterait à 17 jours le délai pendant lequel l'acheteur peut
retourner les biens qu'il a acquis. En effet, dans le pire des cas, la
condition suspensive ne se réaliserait qu'à l'expiration du
délai d'essai.
Ce raisonnement est cependant contraire à l'effet
rétroactif de la condition suspensive. En effet, la réalisation
de la condition suspensive a pour effet d'emporter la formation
définitive du contrat, de manière rétroactive, au jour de
sa conclusion.
Ainsi, à supposer qu'on considère qu'il est
nécessaire que le contrat soit définitivement formé avant
que le délai de rétractation ne commence à courir quand
bien même l'acheteur aurait reçu les biens qu'il a acquis, la
réalisation de la condition suspensive emporte de manière
rétroactive et donc purement fictive la formation définitive du
contrat au jour de sa conclusion. Selon ce raisonnement, il y a tout lieu de
penser que le délai de rétractation pourrait, au même titre
que si une condition résolutoire avait été
stipulée, être compris dans le délai d'essai.
§ 2 Le transfert des risques
La question du transfert des risques incite cependant à
choisir une condition résolutoire plutôt qu'une condition
suspensive.
78
En effet, le transfert des risques a lieu, en Droit
français, conformément à l'article 1138 du Code civil, au
moment du transfert de propriété. C'est ainsi qu'au cas où
la malle ou une partie de son contenu serait perdu au cours du transport avant
que l'acheteur ne rentre effectivement en sa possession, il appartiendrait
à l'acheteur d'en assumer les conséquences car le transfert de
propriété a lieu au moment de la formation définitive du
contrat qui correspond en principe au moment de l'échange des
consentements.
Cependant, dans le cas où les parties auraient
stipulé une condition suspensive en considérant que le contrat ne
sera définitivement formé qu'au moment de la réussite de
l'essai, la formation définitive du contrat - qui serait certes
réputée correspondre au moment de sa conclusion, la
réalisation de la condition ayant un effet rétroactif - serait
suspendue à la réalisation de la condition.
Ainsi, il y aurait tout lieu de penser que celle-ci ne se
réaliserait pas au cas où la malle ou une partie de son contenu
aurait été perdu pendant le transport de sorte que, le contrat
n'ayant jamais été formé, l'acheteur n'aurait jamais
été propriétaire et ne devrait pas supporter les
conséquences d'un tel évènement.
C'est pourquoi il est préférable pour le vendeur
de stipuler une condition résolutoire afin que l'acheteur soit
propriétaire des biens qu'il a acquis, dès le moment de la
conclusion du contrat. Auquel cas, le transfert des risques s'opérerait
effectivement au moment de la conclusion du contrat de sorte que le vendeur ne
devrait pas assumer les conséquences de la perte de la chose.
Remarquons cependant que si un tel raisonnement se tient
à l'heure actuelle, il n'en sera peut-être plus de même
à l'avenir dans la mesure où la directive du 25 Octobre
201189 prévoit en son article 20 un mécanisme de
transfert dérogatoire lorsque la vente est conclue entre un consommateur
et un professionnel, ce qui est le cas en l'espèce. En effet, le
transfert des risques ne se réalise plus, auquel cas, au moment du
transfert de propriété, mais au moment du transfert de
possession, de sorte qu'il faudrait considérer que les risques seraient
de toute façon transmis à l'acheteur au moment de la
réception
89 Directive 2011/83/CE du Parlement européen et du
Conseil du 25 octobre 2011, relative aux droits des consommateurs, modifiant la
directive 93/13/CEE du Conseil et la directive 1999/44/CE du Parlement
européen et du Conseil et abrogeant la directive 85/577/CEE du Conseil
et la directive 97/7/CE du Parlement européen et du Conseil, JOUE
n° L 304, 22 novembre 2011, p. 64.
79
des biens, quand bien même les parties auraient
stipulé une condition suspensive subordonnant la formation
définitive de leur contrat à sa réalisation, sauf à
considérer que le transfert de propriété reste une
condition préalable mais non suffisante au transfert des risques.
Ce mécanisme dérogatoire est fidèlement
transposé par le projet de loi relatif à la
consommation90 qui consacre les nouveaux articles L 138-4 et
suivants aux termes desquels :
Art. L. 138-4. - Tout risque de perte ou d'endommagement
des biens est transféré au consommateur au moment où ce
dernier ou un tiers désigné par lui, et autre que le transporteur
proposé par le professionnel, prend physiquement possession de ces
biens.
Art. L. 138-5. - Lorsque le consommateur confie la
livraison du bien à un transporteur autre que celui proposé par
le professionnel, le risque de perte ou d'endommagement du bien est
transféré au consommateur à la remise du bien au
transporteur.
Ainsi, le transfert des risques aurait lieu au moment de la
remise du bien entre les mains de l'acheteur ou encore entre les mains du
transporteur si ce dernier a été choisi par le consommateur
lui-même en refusant de choisir celui qui avait été
proposé par le professionnel.
Dans le cas qui fait l'objet de la présente
étude, l'acheteur devrait donc assumer la perte de la malle ou d'une
partie de son contenu en cours de transport s'il choisit un transporteur qu'il
considère comme étant plus compétent ou plus rapide que
celui que lui a proposé le vendeur. Il assumerait cependant les risques
au moment de la réception de la malle seulement s'il a fait appel au
transporteur qui lui a été proposé par le vendeur.
Il y a donc lieu de considérer qu'au cas où le
projet de loi relatif à la consommation entrerait en vigueur dans sa
version actuelle, aucune raison n'obligerait le vendeur à choisir de
stipuler une condition résolutoire plutôt qu'une condition
suspensive, à moins
90 Projet de loi n° 1015, relatif à la consommation,
enregistré à la présidence de l'Assemblée nationale
le 2 mai 2013.
80
cependant, qu'on considère que le transfert de
propriété reste une condition préalable mais non
suffisante au transfert des risques.
Remarquons d'ailleurs que les parties n'auraient pas la
possibilité de déroger au mécanisme consacré par le
projet de loi dans la mesure où ce dernier précise :
Art. L. 138-6. - Les dispositions du présent
chapitre sont d'ordre public.
Ainsi, comme nous venons de le voir, Le Droit actuel incite
à préférer la condition résolutoire à la
condition suspensive en raison surtout de la question du transfert des
risques.
Il est donc possible au vendeur de stipuler une clause aux
termes de laquelle il fait savoir à l'acheteur que son droit de
rétractation est compris dans son droit d'essai et qu'il y a lieu
d'imbriquer le délai de rétractation de 7 jours dans le
délai, plus long, de 10 jours pendant lequel le vendeur offre à
l'acheteur la possibilité d'essayer les vêtements et de les
retourner.
Cependant, on peut se demander de quelle façon il
appartient à l'acheteur d'exercer les droits qui lui sont offerts par le
contrat et par la loi.
SECTION 2 : Les modalités d'exercice du droit de
rétractation
Dès lors que l'acheteur peut retourner au vendeur les
biens qu'ils a acquis en vertu tant d'une faculté qui lui est
accordée par la loi que d'une faculté que lui a accordé le
vendeur, il reste à déterminer s'il doit respecter des conditions
au titre de l'une ou de l'autre, ainsi de savoir notamment s'il doit fournir un
motif. (§1).
Enfin il s'agira de déterminer la manière dont
l'acheteur doit exprimer sa rétractation et sa faculté de
retourner les biens qu'il a acquis (§2).
81
§ 1 De la rétractation sans motif au
contrôle de l'abus dans l'appréciation subjective du bien
acquis
L'article L 120-20 alinéa 1er du Code de la
consommation donne au Consommateur le droit de se rétracter sans avoir
à «justifier de motifs ni à payer de
pénalités, à l'exception, le cas échéant,
des frais de retour ».
On devrait donc admettre que l'exercice du droit de
rétractation est purement discrétionnaire de sorte qu'il n'est
pas possible d'en contrôler l'abus et de remettre en cause son exercice
par l'acheteur.
Il n'en est cependant pas ainsi du droit d'essai dans la vente
à l'essai. Ainsi, même si le débat doctrinal n'est toujours
pas tranché sur la question de savoir si le droit de refuser le bien
essayé est discrétionnaire91, il n'en reste pas moins
que deux situations doivent être distinguées en toute logique.
Ainsi, lorsque le contrat fixe des critères objectifs
que le bien est censé remplir, il paraît clair que l'abus de
l'acheteur dans l'exercice de son droit pourra être
contrôlé. En effet, dans ce cas, si l'essai a par exemple pour
objet de mesurer une performance, telle que la vitesse de rotation d'un moteur
ou la consommation d'un véhicule, l'acheteur ne sera pas libre de sa
décision de sorte que le vendeur pourra démontrer que l'essai a
été satisfaisant contrairement aux allégations de
l'acheteur92.
Mieux encore, le juge pourra parfois suppléer
l'acheteur en commettant un expert chargé de démontrer que les
qualités mesurables et objectives étaient bien conformes à
ce qui avait été prévu au contrat93. Il ne fait
cependant aucun doute que le droit de l'acheteur de refuser le bien qu'il a
acquis est bien plus difficilement contrôlable lorsque les
qualités à essayer sont d'ordre esthétique et sont
empreintes de subjectivités.
91 V. sur ce point D.Escarra et J.Rault, Traité
théorique et pratique de droit commercial, les contrats commerciaux, t.
I par J. Hémard : Sirey 1954, n° 165, considérant que
l'acheteur dispose toujours d'un choix discrétionnaire. Au contraire,
voir G.Ripert, Traité élémentaire de Droit commercial par
R. Roblot, T. 2, LGDJ, 10e éd., 1986, n° 2514.
Qui considère que le vendeur pourrait prouver que l'essai a
été satisfaisant.
92
T.Com. Paris, 27 Novembre 1968.
93 Cass. Civ 1ère, 7 juillet 1964.
82
Ainsi, en l'espèce, il s'agit bien évidement
pour l'acheteur de faire preuve de subjectivité en essayant les
vêtements et accessoires qui lui ont été livrés afin
de savoir si ceux-ci lui conviennent. Néanmoins, la jurisprudence admet
même dans ce cas, un contrôle judiciaire de la loyauté de
l'essai réalisé94, voire condamne un acquéreur
pour avoir émis « un refus fondé sur un caprice et une
fantaisie et non sur un motif sérieux »95. A cet
égard, on comprend alors que la jurisprudence peut exiger un motif et en
contrôler la légitimité même si l'hypothèse
reste assez marginale. Auquel cas, ne devrait-on pas considérer que le
droit de rétractation, libre et purement discrétionnaire,
l'emporte sur la faculté d'essai, dont l'exercice est parfois
contrôlé par le juge qui exige un motif ? En effet, il parait
conforme à l'objectif de protection du consommateur de permettre au
droit de rétractation spécial et légal, de primer la
faculté d'essai contractuelle.
Ainsi, on pourrait par exemple considérer en
l'espèce que l'acheteur peut se rétracter sans motif les 7
premiers jours à compter de la réception du bien, mais qu'il lui
appartiendra de se munir d'un motif sérieux s'il souhaite retourner le
bien qu'il a acquis au-delà de ce délai, son droit de
rétractation ayant expiré.
Il reste en outre à comprendre comment l'acheteur doit
exprimer sa rétractation et son refus de conserver le bien qu'il a
acquis en vertu de son droit d'essai.
§ 2 Les modalités d'expression de la
rétractation et de la faculté d'essai
Le droit actuel, composé de la directive du 20
décembre 199796 et du Code de la consommation en ses articles
L 121-16 et suivants, n'impose pas à l'acheteur d'exercer son droit de
rétractation en accomplissant une ou plusieurs formalités.
Ainsi, on peut considérer que cette rétractation
peut être exprimée de manière expresse, par courrier postal
ou par l'envoi d'un email, ou encore de façon tacite par le retour des
biens de l'acheteur entre les mains du vendeur.
94 CA paris, 9 mai 1980.
95 T. paix Paris, 19 juin 1936 : Gaz. Trib. 1936, 2, p. 289.
96 Directive 97/7/CE du Parlement européen et du Conseil
du 20 mai 1997 concernant la protection des consommateurs en matière de
contrat à distance, JOCE n° L 144, 4 juin 1997, p. 21.
83
En pratique, il est cependant plus commode à l'acheteur
de remplir un formulaire de sorte que la directive du 25 Octobre
201097 a légiféré en la matière en
prévoyant en son article 11 1° que le consommateur doit :
a) utiliser le modèle de formulaire de
rétractation figurant à l'annexe 1, partie B ; ou
b) faire une autre déclaration
dénuée d'ambiguïté exposant sa décision de se
rétracter du contrat.
Il semble dont que la rétractation ne puisse
qu'être expresse dans la mesure où la directive exige une «
déclaration dénuée d'ambiguïté » de sorte
qu'il faut exclure la rétractation tacite, déduite du
comportement de l'acheteur retournant les biens qu'ils a acquis entre les mains
du vendeur.
En outre, la directive vient d'instaurer pour la
première fois un modèle de formulaire que les Etats membres
doivent également transposer fidèlement, afin de faciliter la
rétractation. En effet, en fournissant un modèle de formulaire
uniforme, il s'agit de favoriser le commerce transfrontière, en
permettant de manière simple et lumineuse à l'acheteur d'exercer
sa faculté de rétractation.
Par ailleurs, l'article 11 3° de la directive donne
également au vendeur la possibilité de mettre le formulaire
à disposition de l'acheteur directement en ligne, sur le site internet
par lequel il a vendu les biens dont l'acheteur souhaiterait se séparer.
Auquel cas, il lui appartient alors de lui fournir un accusé de
réception sur un support durable.
Nous comprenons cependant que ce système est
parfaitement optionnel dans la mesure où le consommateur peut,
conformément à l'article 11. 1° b) faire une autre
déclaration dénuée d'ambiguïté, exposant sa
décision de se rétracter du contrat.
Ainsi, à l'heure actuelle, il semble plus
approprié que le vendeur mette à disposition de l'acheteur un
formulaire permettant à l'acheteur d'exercer tant son droit d'essai que
son droit de rétractation. Cependant à l'avenir, dans la mesure
où le délai de rétractation sera
97 Directive 2011/83/CE du Parlement européen et du
Conseil du 25 octobre 2011, relative aux droits des consommateurs, modifiant la
directive 93/13/CEE du Conseil et la directive 1999/44/CE du Parlement
européen et du Conseil et abrogeant la directive 85/577/CEE du Conseil
et la directive 97/7/CE du Parlement européen et du Conseil, JOUE
n° L 304, 22 novembre 2011, p. 64.
84
porté à 14 jours, conformément à
l'article 9 1° de la directive du 25 Octobre 2011, dont le projet de loi
relatif à la consommation assure fidèlement la transposition, la
qualification de vente à l'essai devrait disparaître dans le cas
de la présente espèce dans la mesure où le vendeur
n'offrira pas à l'acheteur plus que ce que la loi lui offrira
déjà.
En effet, à moins qu'il n'accorde à l'acheteur
un allongement du délai de 14 jours, la faculté de
rétractation dont bénéficiera l'acheteur sera uniquement
légale de sorte qu'il suffira au vendeur de fournir à l'acheteur
le formulaire prévu à l'annexe 1, partie B de la directive, afin
de lui permettre d'exprimer valablement sa rétractation.
85
Conclusion
La présente étude nous a démontré
qu'il pouvait être bien difficile à la pratique de trouver un
cadre juridique sécurisant et satisfaisant.
Ainsi, comme nous avons pu le voir, le vendeur dont la
prestation a fait l'objet de la présente étude paye son
originalité au prix d'une méconnaissance potentielle de plusieurs
règles contraignantes.
Qu'il s'agisse des informations qu'il a choisi de retenir,
conformément cependant à la volonté de l'acheteur, de
l'indétermination de l'objet du contrat, ainsi du prix et de la chose,
ou encore des difficultés auxquelles il a pu être confronté
en accordant à ce dernier un allongement du délai pendant lequel
il peut retourner les biens qu'il a acquis, nombreux sont les obstacles que
l'entrepreneur doit franchir pour proposer ses prestations, qui plus est par
Internet, en respectant la loi.
Ainsi, une réflexion pourrait être
envisagée tant en ce qui concerne l'opportunité d'accorder un
régime juridique propre à la vente surprise à l'essai,
qu'en ce qui concerne de manière plus générale les liens
qu'entretiennent le droit et l'économie. En effet, qu'on le
considère comme archaïque, novateur, ou excessivement protecteur
des intérêts du plus faible, il n'en reste pas moins que le Droit
de la consommation et en particulier le droit des contrats à distance a
bien du mal à concilier protection du consommateur et impératif
économique, a-t-elle enseigne que nombreux ont été les
efforts à accomplir pour inciter le législateur européen
à retirer de son projet de directive la règle du paiement des
frais de retour à la charge du professionnel. La menace que la loi fait
peser sur l'économie est d'autant plus grandissante si l'on prend
conscience des effets que la consécration prochaine de l'action de
groupe en Droit français pourrait causer à l'économie
toute entière.
En effet, ainsi que le déclare le législateur
français dans l'exposé des motifs du projet de loi relatif
à la consommation « Les litiges nés des conditions de
formation et d'exécution des contrats de consommation peuvent concerner,
dans certains cas, un très grand nombre de consommateurs. Eu
égard à la faiblesse des montants sur lesquels
86
portent ces litiges, les consommateurs renoncent souvent
à toute action individuelle. Néanmoins, compte tenu de l'ampleur
des pratiques en cause, le nombre des victimes concernées peut
être considérable. Il y a donc bien, aujourd'hui, une demande de
droit importante et insatisfaite. L'action de groupe, en permettant de
regrouper en une seule procédure les demandes de réparation
émanant d'un grand nombre de consommateurs, qui se trouvent dans des
situations de fait et de droit identiques ou très largement similaires,
victimes des pratiques illicites ou abusives d'un même professionnel,
apparaît comme la forme d'action en réparation la plus
adaptée pour le traitement des contentieux de consommation de masse
».
Il paraît donc d'autant plus important que le Code de la
consommation assouplisse ses exigences qu'une action de groupe permettant aux
consommateurs de demander, à moindre coût, la réparation de
leur préjudice, fera bientôt son entrée dans le droit
procédural français.
Même si le champ d'application d'une telle action est
limité à la réparation des dommages matériels subis
par les consommateurs, et qu'il peut paraître loyal de permettre à
ces derniers d'obtenir, grâce à une action collective et peu
onéreuse, la réparation d'un préjudice si peu
conséquent qu'ils n'auraient pas agi seuls à défaut, il
est certain qu'il existe un risque pour les entreprises les plus fragiles, de
rencontrer de plus grandes difficultés encore à subsister face
aux entreprises les plus aisées.
Plusieurs retouches pourraient donc opportunément
être effectuées au sein du Code de la consommation afin de
responsabiliser un peu plus le consommateur, en introduisant notamment une
obligation de diligence à la charge de ce dernier lorsque l'intervention
du consommateur est nécessaire au professionnel afin qu'il accomplisse
avec rigueur les obligations qui s'imposent à lui. Ainsi, par exemple,
l'exigence d'un support durable pourrait être assouplie en permettant au
professionnel de mettre les informations qu'il est tenu de délivrer
à l'acheteur, sur son site Internet, via un lien hypertexte, de telle
sorte qu'il appartiendrait à l'acheteur d'aller chercher l'information
que son cocontractant lui a pourtant délivrée.
En outre, il serait possible d'introduire plus de
subjectivité dans le Code de la consommation en considérant qu'un
consommateur a parfois renoncé à la protection qui
87
lui était offerte, eu égard à la nature
de la prestation dont il a demandé à bénéficier. A
cet égard, il ne s'agirait pas de faire du Code de la consommation un
code purement supplétif de volonté, sauf à empêcher
de manière quasi-systématique son application dès lors que
le professionnel aurait tout intérêt à stipuler une clause
au terme de laquelle il déclare que les règles du code de la
consommation sont inapplicables au contrat qu'il conclut.
Cependant, il s'agirait de considérer que le
consommateur a parfois renoncé à la protection qui lui
était offerte eu égard à la nature objective de la
prestation dont il a bénéficié, ainsi par exemple dans le
cas de la vente surprise. En effet, en souhaitant se réserver un effet
de surprise, l'acheteur a souhaité bien évidemment
décharger le professionnel de l'obligation d'information qui pesait sur
lui afin de parfaitement méconnaître la physionomie ou les
caractéristiques des biens qui lui ont été
livrés.
En conclusion, nous pensons qu'un équilibre plus juste
pourrait être trouvé par le législateur au sein du Code de
la consommation afin de concilier protection du consommateur et
impératif économique. Par ailleurs, le champ de la protection
offerte par le Code de la consommation pourrait être redéfini,
afin d'écarter toute protection lorsqu'elle s'avère inutile,
comme pour l'acheteur dans le cadre de la vente « surprise », ou
encore afin d'en étendre le champ lorsqu'au contraire une personne n'est
pas protégée alors qu'elle devrait l'être, ainsi du
professionnel qui agit pour les besoins de son activité, tout en
étant placé dans le même degré d'ignorance que tout
consommateur98.
98 Rappelons que cette possibilité est
écartée de manière très regrettable par le projet
de loi relatif à la consommation qui consacre pour la première
fois une définition légale et générale de la notion
de consommateur.
88
Bibliographie indicative
I/ Ouvrages généraux
-G. BAUDRY-LACANTINERIE, Traité théorique et
pratique de droit civil, Larose et Forcel, 1901.
-A. BENABAN, Droit civil, Les obligations,
Montchrestien, 11ème éd., 2007.
-J. CARBONNIER, Droit civil, Les obligations,
22ème éd. refondue, Paris, PUF, coll. Thémis,
2000.
-P. DELEBECQUE, Droit des obligations, Litec,
4ème éd., 2007.
-M. FABRE-MAGNAN, Droit des obligations, Tome 1, PUF,
coll. Thémis, 2ème éd. 2010.
-B. FAGES, Droit des obligations, Littec, 3ème
éd., 2011.
-J. FLOUR, J-L AUBERT, E. SAVAUX , Droit Civil, les
Obligations, Sirey, 7e éd., 2011.
-J.-P.GRIDEL, Introduction au droit et au droit
français, Dalloz, 3ème éd., 1999.
-P. MALAURIE, L.AYNES, Les obligations,
Defrénois, 25e éd., 2011.
-M. PLANIOL et G. RIPERT, Traité
élémentaire de Droit civil, LGDJ 1956.
-F.TERRE, P.SIMLER, Y.LEQUETTE, Les obligations, Dalloz
coll. Précis, 10e éd.,
2008.
-P. VOIRIN, G.GOUBEAUX, Droit Civil, Introduction au
Droit, LGDJ, 33e éd. 2011.
II/ Ouvrages spéciaux
-ASSOCIATION HENRI CAPITANT, Le contrat électronique:
journées nationales, Toulouse 2000, éd.
Panthéon-Assas, 2002.
89
-C. CASTETS RENARD, Le droit de l'internet,
Monchestien, Lextensoéditions, 2012.
-C. FERAL-SCHUL, Cyberdroit, Dalloz, 2011-2012.
-E. MONTERO, Les contrats de l'informatique et de
l'internet, Larcier, 2005.
-J. ROCHFELD, L'acquis communautaire, le contrat
électronique, collection études juridiques, Economica,
2ème éd., 2010.
-J. ROCHFELD, Les nouveaux défis du commerce
électronique, LGDJ, 2010.
III/ Articles et Chroniques
-O. CACHARD, « Le contrat électronique dans la loi
pour la confiance dans l'économie numérique », Rev. Lamy
Droit civil (RLDC), sept. 2004.
-E. CARBIT, « La directive sur le commerce
électronique. Le projet « Méditerranée » »,
Revue du droit de l'Union Européenne, n°4, 2000.
-G. DECOCQ, « Directive sur le commerce
électronique »,
Comm. Com. Electr.,
n°94, 2000.
-D. FENOUILLET, « Commerce électronique et droit
de la consommation : une rencontre incertaine », RDC, 2004.
-J. GATSI, «La protection des consommateurs en
matière de contrats à distance dans la directive du 20 mai 1997
», D 1997.
-E. GRIMAUX, « La détermination de la date de
conclusion du contrat par voie électronique », Comm. Comm.
Elect., chr. n° 10, 2004.
-J. HUET, «La problématique du commerce
électronique au regard du projet de directive communautaire du 23
décembre 1998 », Com. comm. électr., 1999.
-J. HUET, « Encore une modification du Code civil pour
adapter le droit des contrats à l'électronique », JCP G
2004, I, 178.
-P. MALINVAUD, « De l'erreur de l'acheteur,
L'authenticité du bien d'art (étude critique) », RTD
civ. 1982.
90
-N. MATHEY, « Le commerce électronique dans la loi
n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l'économie
numérique », Contrats, conc. consom., chron. n° 13, 2004.
-A. PENNEAU, « Contrat électronique et protection
du cybercontractant », LPA, 13 mai 2004.
-E. POILLOT, et E.BAZIN, « La droit de repentir en droit
de la consommation », spéc. n° 1, D. 2008.
-J. ROCHFELD, « Le contrat, si j'veux », Commentaire
de l'Ordonnance n° 2001-741 du 23 août 2001 portant transposition de
directives communautaires et adaptation au droit communautaire en
matière de droit de la consommation RTD civ. 2001.
-Ph. STOFFEL-MUNCK, « La réforme des contrats du
commerce électronique »,
Comm. Com. Electr.,
Numéro spécial sous la dir. X. Linant de Bellefonds, chron.
n° 30, septembre 2004.
-A. STROWEL et N. IDE, F. VERHOETRAETE, « La directive du
8 juin 2000 sur le commerce électronique : un cadre juridique pour
internet », Journal des tribunaux, 17 février 2001.
IV/ Textes
-Arrêté du 3 décembre 1987 relatif
à l'information du consommateur sur les prix, JORF du 10 décembre
1987.
-Décret n° 86-1309 du 29 décembre 1986
modifié fixant les conditions d'application de l'ordonnance n°
86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des
prix et de la concurrence (J.O. 30 décembre).
-Décret n° 2002-689 du 30 avril 2002 fixant les
conditions d'application du livre IV du code de commerce relatif à la
liberté des prix et de la concurrence, JORF n°103 du 3 mai 2002.
-Directive 97/7/CE du Parlement européen et du Conseil
du 20 mai 1997 concernant la protection des consommateurs en matière de
contrat à distance, JOCE n° L 144, 4 juin 1997
91
-Directive 98/34/CE du Parlement européen et du Conseil
du 22 juin 1998 prévoyant une procédure d'information dans le
domaine des normes et réglementations techniques, JOCE n° 204, 21
juill. 1998.
-Directive 2000/31/CE du Parlement européen et du
Conseil du 8 juin 2000 relative à certains aspects juridiques des
services de la société de l'information, et notamment du commerce
électronique, dans le marché intérieur, JOCE L 178, 17
juillet 2000.
-Directive 2005/29/CE du 11 mai 2005 relative aux pratiques
commerciales déloyales des entreprises vis-à-vis des
consommateurs dans le marché intérieur et modifiant les
directives 84/450/CEE, 97/7/CE, 98/27/CE et 2002/65/CE et le règlement
(CE) n° 2006/2004 (directive sur les pratiques commerciales
déloyales).
-Directive 2011/83/CE du Parlement européen et du
Conseil du 25 octobre 2011, relative aux droits des consommateurs, modifiant la
directive 93/13/CEE du Conseil et la directive 1999/44/CE du Parlement
européen et du Conseil et abrogeant la directive 85/577/CEE du Conseil
et la directive 97/7/CE du Parlement européen et du Conseil, JOUE
n° L 304, 22 novembre 2011.
-Loi n°86-1067 du 30 septembre 1986 dite Leotard,
relative à la liberté de communication, JORF du 1 octobre
1986.
-Loi n° 93-949 du 26 juillet 1993 relative au code de la
consommation, JORF n°171 du 27 juillet 1993.
-Loi n° 2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans
l'économie numérique, JORF, 22 juin 2004.
-Projet de loi n° 1015, relatif à la consommation,
enregistré à la présidence de l'Assemblée nationale
le 2 mai 2013.
-Ordonnance n° 2001-741 du 23 août 2001 portant
transposition de directives communautaires et adaptation au droit communautaire
en matière de droit de la consommation, JORF 25 août 2001. Ce
texte assure la transposition fidèle de la directive 97/7/CE du 20 mai
1997.
92
V/ Jurisprudence
-C. Cass. Req., 28 juillet 1873 : DP 1874, 1.
-T. Paix Paris, 19 juin 1936 : Gaz. Trib. 1936, 2.
-C. Cass. Civ 1 ère, 7 juillet
1964. -T.Com. Paris, 27 Novembre
1968.
-C. Cass. Civ 1 ère , 19 janv.
1977, Bull. Civ. I, n° 40, p. 30 ; 18 avril 1989, Bull. Civ. I, n°
150.
-CA Paris, 9 mai 1980.
-C. Cass. Civ 1 ère , 21 janv.
1981, Bull civ. I, n° 25.
-C. Cass. Com 30 novembre 1983,n°
pourvoi 82-12045
-C. Cass.Com, 9 mai 1985,n°
de pourvoi 83-16578
-C. Cass.Civ 3 ème , 25
fév. 1987, Bull. Civ. III, n° 36.
-C. Cass. Civ 1 ère, 12 nov 1987, Bull.
Civ. I, n° 293 p. 211, Défresnois 1988. 1092, obs Aubert, RTD civ.
1988.339, obs. J.Mestre ;
Cass. Com.
-C. Cass. Crim, 15 Déc. 1989, n° de pourvoi
09-83.059, Bull crim 2009, n° 212.
-C. Cass. Civ 1 ère , 29 nov
1994, D.1995.122 note Aynès, JCP 1995.II.22371 note Ghestin, CCC 1995,
n° 24, note Leveneur, RTD civ. 1995. 358, obs. Mestre, RTD Com. 1995.464,
obs. Bouloc.
-C. Cass. Civ 1 ère , 23 mai
1995, n° de pourvoi
94-14255. -C. Cass.Com,
9 juillet 1996.
-C. Cass. Civ 1 ère , 13 octobre
1998.
-C. Cass. Ass. Plén., 1er déc
1995 (4 arrêts), Gaz Pal. 9 Déc 1995, note P. de Fronbressin, JCP
1996.II.22565 concl.Jeol, note Guestin, JCP E 1996, II, 776, note Leveneur, et
N., I, 93, obs. D.Boulanger, D.1996.13 concl. Jéol ; note Aynès,
LPA, 27 Déc 1995, n° 155, p.11, note D.Bureau et N. Molfessis, CCC
1996, n° 5 et chron.
93
Leveneur, RTD civ. 1996. 153, obs. J. Mestre, Defrénois
1996.748, obs. Delebecque, Grands arrêts, t.2, n° 152-155.
-C. Cass. Com, 19 novembre 1996,
n° pourvoi 94-14530.
-C. Cass Civ 1 ère , 2 décembre
1997, n° de pourvoi 95-16720. -C. Cass. Civ 1 ère
, 15 décembre 1998 n° de pourvoi 96-19898.
-CJCE 22 novembre 2001, JCP 2002. II. 10047, note
Paisant ; D. 2002. AJ 90, note Rondey ; ibid., somm., p. 2929, obs. Pizzio ;
Contrats, conc. consom., 2002, no 18, note Raymond ; ibid., chron., p. 14, par
Luby ; LPA 2002, note Nourissat ; RTD civ. 2002. 291, obs. Mestre et Fages ;
ibid., p. 397, obs. Raynard ; RTD com. 2002. 404, obs. Luby.
-Cass Civ 1 ère , 12 mai 2004 n°
pourvoi 03-13847.
-C. Cass. Civ 1 ère , 24 janv.
2005, n° 92-18227, Bull civ. I, n° 54, Contrats. Conc. Cons. 1995,
comm. N° 84, note L. Leveneur, D. 1995, p. 327, note G.Paisant et somm.,
p. 229, obs. Ph. Delebecque, JCP G 1995, I, n° 3893, obs.G. Viney.
-C. Cass. Civ. 1 ère , 15 mars 2005, LPA
12 mai 2005, p. 12, note D. Bert.
-TGI Bordeaux, 11 mars 2008, UFC Que Choisir c/
CDiscount (n°3703/2006), Contrats Conc. Cons. 2008. Comm. n° 69, note
A. Debet.
-C. Cass. Crim, 23 mars 2010, n° de pourvoi
09-82.545.
-CA Toulouse, 2 ème , chambre
section , 2 fév. 2011, n° RG 09/ 00005.
-C. Cass. Civ 1 ère , 12 juillet
2012, Hewlett Packard France/ UFC Que choisir, 1118.807.
-C. Cass. Civ 1 ère , 13 décembre
2012 n° 11-27766.
|