Nathalie Lévêque - Marcopoli
Mémoire de DESS Développement des
Systèmes d'Organisation
septembre 2005
Le Développement de l'employabilité
à partir d'une réflexion sur
la responsabilité sociale de
l'entreprise
Comment envisager le développement de
l'employabilité dans le cadre d'une réflexion autour de la
responsabilité sociale de l'entreprise ?
CNAM de Paris
Chaire de Développement des systèmes
d'organisation
M. Yvon Pesqueux
Remerciements
La réalisation de ce mémoire et du
rapport d'activité dans le cadre du DESS Développement des
Systèmes d'Organisation vient clôturer un projet entrepris il y a
en fait presque 10 ans dans le cadre du DESTO suivi au CNAM de Nantes et qui
était resté inabouti. Ce travail prend donc pour moi une
importance toute particulière.
Je remercie la structure du CNAM qui permet, chaque
année, à de nombreuses personnes de développer leurs
connaissances, leurs compétences tout en poursuivant leur
activité professionnelle.
Je remercie le chaire DSO et les intervenants que j'ai
eu l'occasion de rencontrer lors de la préparation de mon DESS. La
diversité des interventions apporte une forte contribution à la
richesse de cette formation. Je remercie plus particulièrement Yvon
Pesqueux dont l'exigence a constitué un véritable moteur dans la
réalisation de ces travaux.
Merci à François et à Xavier pour
leurs lectures et leurs conseils.
Merci infini à Gianluca pour ses
précieux conseils et pour ses encouragements et son soutien bien
nécessaires dans les moments de doutes.
Merci à la petite Chiara Sole qui aura eu la
gentillesse de me laisser finir ces travaux avant que je ne me consacre enfin
pleinement à la préparation de son arrivée
prochaine.
SOMMAIRE
1
Introduction
5
1.1 Origine de
l'émergence du sujet traité
5
1.2 Postulats et
hypothèses
6
1.2.1 Postulats autour de la notion
d'employabilité :
6
1.2.2 Postulats autour de la notion de
responsabilité sociale de l'entreprise :
6
1.2.3 Postulats autour de la notion
d'organisation :
6
1.2.4 Hypothèses autour de la
formation professionnelle :
7
1.2.5 Hypothèses autour de la
relation entre employabilité et responsabilité sociale de
l'entreprise
8
2
Première partie : la responsabilité sociale
de l'entreprise (RSE)
9
2.1 Qu'est-ce qu'on
entend par « responsabilité sociale » ?
9
2.1.1 Qu'est-ce que la
responsabilité, être responsable ? et qu'est-ce qu'être
socialement responsable ?
9
2.1.1.1 Responsabilité ;
responsabilité sociale : définition
9
2.1.1.2 Difficultés de
définition au-delà des principes généraux
13
2.1.1.3 Questions de vocabulaire
14
2.1.2 Contexte et historique du
développement de la RSE
15
2.1.2.1 La mondialisation
15
2.1.2.2 Evolution des rapports entre
économies et sociétés
15
2.1.2.3 Synthèse
17
2.1.3 La problématique de la
légitimité du concept de RSE
18
2.1.3.1 Développement de l'aspect
théorie des organisations
18
2.1.3.2 Comment s'opère le choix de
conception de la RSE dans l'entreprise ?
24
2.2 Mise en oeuvre
de la RSE dans l'entreprise
25
2.2.1 Une ouverture vers
l'extérieure
26
2.2.1.1 Les ONG et le milieu associatif
26
2.2.1.2 Les syndicats de salariés
27
2.2.1.3 Les consommateurs
28
2.2.1.4 Les actionnaires
31
2.2.2 La prise en compte de la RS par
l'entreprise sur le plan stratégique
32
2.2.2.1 Les différentes approches
stratégiques
32
2.2.2.2 Les outils de management
stratégique
33
2.2.3 Les outils de mise en oeuvre
34
3
Deuxième partie : les objectifs RH dans le cadre de
la RSE ; développement de l'objectif d'employabilité
39
3.1
Définition de l'employabilité
39
3.1.1 Historique de la notion
d'employabilité
39
3.1.2 Analyse des différentes
approches
41
3.1.3 Définition contemporaine de
l'employabilité
43
3.2 La
problématique de développement de l'employabilité
44
3.2.1 Les facteurs de
l'employabilité
44
3.2.2 Les acteurs de
l'employabilité
45
3.2.3 Les outils de
l'employabilité
46
3.2.4 Tableau de synthèse
47
3.2.5 Le processus de développement
de l'employabilité
47
3.2.6 Les difficultés de mise en
oeuvre du développement de l'employabilité
49
3.2.7 Les conditions de développement
de l'employabilité
50
4
Troisième partie : Propositions pour un
développement de l'employabilité
52
4.1
Réflexion autour de la relation entre responsabilité
sociale de l'entreprise et employabilité
52
4.1.1 Réflexion sur l'existence de la
RSE
52
4.1.1.1 Une condition
préalable : un fait générant un impact
sociétal
52
4.1.1.2 Autres conditions d'existence de la
RSE
53
4.1.2 Réflexion sur
l'employabilité, abordée dans le cadre de la RSE
55
4.1.2.1 Objectif de la mise en relation des
concepts de RSE et d'employabilité
55
4.1.2.2 L'employabilité entre-t-elle
dans le champ d'application possible de la RSE ?
55
4.1.2.3 Mise en oeuvre de la RSE en
matière d'employabilité
56
4.2 Propositions
pour un meilleur développement de l'employabilité
58
4.2.1 Propositions d'évolutions dans
le cadre des processus existants
58
4.2.1.1 Vers une formation plus
généraliste, à plus long terme
58
4.2.1.2 Vers une réflexion
élargie sur les compétences
59
4.2.1.3 Vers une gestion des
compétences, une gestion de la mobilité et une gestion de la
formation intégrées
59
4.2.2 Propositions d'actions
formulées à partir de notre réflexion sur la notion de
responsabilité
60
4.2.2.1 Une responsabilisation de
l'individu
60
4.2.2.2 Une gestion du développement
de l'employabilité externe à l'entreprise
62
5
Conclusion
64
BIBLIOGRAPHIE____________________________________________________________________________65
AUTRES SOURCES
D'INFORMATION____________________________________________________________66
1 Introduction
1.1 Origine de
l'émergence du sujet traité
A partir de travaux réalisés sur l'organisation
de la formation dans un groupe d'assurance, un constat est apparu : les choix
réalisés en matière de stratégie de formation par
cette entreprise et leurs déclinaisons sur le plan du pilotage et de
l'organisation de la formation ne facilitaient pas la construction de parcours
de formation permettant aux salariés de mieux faire face aux risques de
changements et de ruptures dans leur parcours professionnel.
Trois éléments majeurs venaient fonder ce
constat :
- le choix de réduire le montant des dépenses en
matière de formation, donc le nombre d'actions de formation mises en
oeuvre
- le choix en terme de stratégie de formation
d'orienter les actions de formation vers des sujets répondant
exclusivement aux besoins spécifiques de l'entreprise (l'essentiel se
résumant à l'utilisation des applications informatiques de
l'entreprise, à la connaissance des produits de la compagnie et à
la connaissance des procédures internes).
- le choix d'une gestion à court terme (trimestrielle)
de l'engagement dans la réalisation des stages, impliquant une
orientation plus forte pour les stages de courtes durées, traitant donc
de thèmes ciblés, aux périmètres restreints.
Si l'on comprend aisément l'impact négatif de la
réduction du nombre de d'actions de formation sur la construction des
parcours de formation, les deux autres constats méritent que l'on s'y
attarde plus longuement.
Le développement des formations traitant des sujets
spécifiques à l'entreprise souligne l'intérêt de
cette dernière de tirer profit rapidement de ces formations en rendant
les salariés immédiatement plus productifs.
Pour l'individu, si ce type de formation vient faciliter son
travail à court terme, il ne lui permet toutefois pas, compte tenu du
caractère opérationnel et spécifique à l'entreprise
de ces formations, d`acquérir des connaissances plus
généralistes qu'il pourrait mettre en oeuvre dans des
environnements plus diversifiés. Or le contexte économique et
social amène les salariés à devoir faire face, de plus en
plus et de manière plus ou moins subie, à des changements dans
leurs parcours professionnels. Dans ces conditions, le salarié a,
contrairement à l'entreprise, intérêt à
privilégier des formations permettant de développer des
connaissances ou compétences plus transversales afin de limiter les
risques liés à ces changements.
Le caractère spécifique des formations est
renforcé par la décision de faire appel à des ressources
internes pour concevoir et faire réaliser ces formations.
Concernant le choix d'un pilotage à court terme, il
s'explique par le fait qu'en multipliant le nombre de cycles d'identification
des besoins de formation et en réduisant les délais entre
l'identification d'un besoin et sa réalisation, l'entreprise limite le
risque décisionnel lié aux décalages et
incohérences entre besoins et réalisations.
Cette approche empêche, dans le même temps, la
construction par l'individu d'un parcours de formation qui viendrait renforcer
son niveau général de connaissances et de compétences
puisqu'une telle approche de la formation ne peut se construire que sur le
moyen et long terme, en mettant souvent en oeuvre des formations de moyenne ou
de longue durée. Or, comme nous l'avons souligné
précédemment, la probabilité de plus en plus forte pour
les salariés de devoir faire face à des changements, devrait les
amener à privilégier des formations plus
généralistes, leur assurant à terme un renforcement de
compétences plus transversales aux métiers ou aux secteurs
d'activité.
1.2 Postulats et
hypothèses
L'élaboration de notre réflexion s'appuie sur
différents postulats et hypothèses que nous avons
élaborés et détaillés lors de la définition
de la problématique. Ils sont présentés dans les lignes
qui suivent.
1.2.1 Postulats autour de la notion
d'employabilité :
- les salariés doivent faire face à des
changements plus ou moins subis au cours de leur vie professionnelle
- les salariés ont intérêt à
maintenir, voire à faire progresser leur niveau
d'employabilité
- le niveau d'employabilité d'un salarié tend
à baisser naturellement dans le temps du fait de différents
facteurs (exemples : évolutions technologiques, évolutions
des métiers) ; son maintien passe par des actions
réalisées en ce sens
- le développement de l'employabilité est un axe
de progrès à fort enjeu tant pour favoriser la baisse du
chômage que pour encourager l'autonomie des individus actifs dans un
contexte d'organisation du travail qui a, au contraire, pour tendance d'imposer
des conditions d'emploi de plus en plus contraignantes.
1.2.2 Postulats autour de la notion de responsabilité
sociale de l'entreprise :
- des structures peuvent intégrer à leur
stratégie la poursuite d'objectifs de responsabilité sociale
Ce postulat implique que la question des motivations qui
amènent des structures à respecter des principes de
responsabilité sociale restera en dehors du périmètre
d'étude.
1.2.3 Postulats autour de la notion d'organisation :
- l'organisation est la déclinaison des
décisions prises en matière d'orientations stratégiques
- les changements organisationnels sont une étape
nécessaire (mais non suffisante) à la réalisation des
objectifs de responsabilité sociale
1.2.4 Hypothèses autour de la formation
professionnelle :
- la formation professionnelle joue un rôle important
dans le maintien du niveau d'employabilité des salariés
(même s'il ne reste qu'un moyen parmi d'autres)
La formation professionnelle permet l'acquisition de
connaissances et de compétences qui sont elles-mêmes des
critères de décision en terme d'embauche. Il conviendra
d'analyser précisément les autres moyens qui contribuent au
maintien de ce niveau d'employabilité.
- la formation professionnelle est un moyen de maintien ou de
développement de l'employabilité d'autant plus important qu'elle
contribue à l'acquisition ou au maintien de connaissances et
compétences transversales
Les connaissances et compétences transversales sont
reconnues et valorisées à travers un plus grand nombre
d'emplois ; elles permettent ainsi au salarié d'augmenter les
opportunités d'embauche en lui permettant de répondre aux besoins
d'un périmètre d'emploi plus large.
- la mise en oeuvre de formations exclusivement
spécifiques à l'entreprise a un effet positif limité sur
le maintien du niveau d'employabilité des salariés :
Dans le cas de ces formations, l'effet sur
l'employabilité est essentiellement circonscrit à un poste ou
à un ensemble de poste d'une entreprise ; les acquisitions de
connaissances ou compétences réalisées sont très
peu valorisées à l'extérieure de l'entreprise car ces
formations ne répondent pas ou peu aux besoins de cet environnement
extérieur.
- le pilotage à court terme a un effet positif
limité sur le maintien du niveau d'employabilité des
salariés :
Les décisions d'engagement à court terme dans la
réalisation des actions de formation empêchent de construire de
véritables parcours de formation, c'est-à-dire des constructions
cohérentes qui permettent d'acquérir dans le temps des
connaissances et compétences et qui, par leur
complémentarité, se renforcent les unes les autres. Or, cette
consolidation permet de donner un caractère transversal à ces
acquisitions et d'ouvrir le salarié à un périmètre
d'activité de plus en plus large, ce qui est synonyme de
développement de son niveau d'employabilité.
L'engagement à court terme favorise également
l'exclusion des formations dispensées sur le moyen ou long terme. Or ces
formations favorisent l'acquisition d'un vaste ensemble de connaissances et
compétences, transversal et solide du fait du niveau d'approfondissement
atteint qui, là encore, contribue au développement du niveau
d'employabilité.
1.2.5 Hypothèses autour de la relation entre
employabilité et responsabilité sociale de l'entreprise
- le maintien de l'employabilité constitue
un domaine d'application de la responsabilité sociale de
l'entreprise
Le non maintien de l'employabilité a des
répercussions économiques négatives sur les individus qui
subissent cette évolution, et des répercussions sociales au
niveau individuel (exemple : modification des conditions de vie) et au
niveau de la société (exemple : prise en charge par la
collectivité des populations en difficulté, délinquance,
...)
2 Première partie : la responsabilité
sociale de l'entreprise (RSE)
2.1 Qu'est-ce qu'on
entend par « responsabilité sociale » ?
2.1.1 Qu'est-ce que la responsabilité, être
responsable ? et qu'est-ce qu'être socialement
responsable ?
2.1.1.1
Responsabilité ; responsabilité sociale :
définition
Etre responsable
Selon la définition du dictionnaire Le Petit Robert,
être responsable est le fait d' « accepter et subir les
conséquences de ses actes ».
Cette acceptation de la responsabilité implique pour un
individu :
- qu'il se reconnaisse auteur de l'acte et des
conséquences de l'acte
- qu'il reconnaisse la nature de l'acte
réalisé
- qu'il reconnaisse la nature des conséquences de
l'acte
Cette analyse de la responsabilité fait intervenir un
tiers chargé de déterminer l'auteur, la nature de l'acte et des
conséquences de l'acte.
La détermination de la responsabilité (et donc
des conséquences pour l'auteur) est liée à la morale,
c'est-à-dire à « un ensemble de règles de
conduite considérées comme bonnes de façon
absolue »1(*). La
responsabilité d'un acte et des conséquences qui en
découlent s'apprécient à la lueur de ce que contient ou
non cet ensemble de « bonnes » règles de
conduite ; la définition de cet ensemble est plus ou moins
spécifique à chaque individu.
La responsabilité devant certains actes peut être
prévue par la loi ; dans ce cas, la notion de responsabilité
implique l'existence d'une faute ou d'une infraction et donne lieu à
sanction. Les actes prévus par la loi sont les actes dont l'appartenance
aux mauvaises règles de conduite est la plus communément
admise.
qui en est la cause, la raison suffisante.
Responsabilité de l'entreprise -
responsabilité dans le cadre de l'entreprise
La responsabilité de l'entreprise est engagée
pour des actes qui sont réalisés par des individus pour le compte
de l'entreprise. En effet, l'entreprise en tant que telle n'agit pas.
Sur le plan juridique, les individus qui agissent au nom de
l'entreprise sont couverts par la responsabilité de l'entreprise puisque
cette dernière possède une personnalité juridique.
Toutefois, l'individu peut être tenu pour personnellement responsable de
ses actes dans le cadre de l'entreprise s'il est admis qu'il a commis un acte
illégal à sa seule initiative.
Sur le plan de la morale, tout acte pour lequel aucune
sanction légale n'est prévue est laissé à
l'appréciation de chacun. La condamnation morale peut alors
différer largement d'un individu à l'autre en fonction de sa
propre morale. Dans le cas de la responsabilité de l'entreprise, la
morale dépend de la conception que chacun se fait du rôle et de la
responsabilité des entreprises dans la société.
L'entreprise responsable dans son acception actuelle trouve
son origine aux Nations unies : elle signifie que « les
entreprises ont un rôle à jouer dans l'obtention d'un
développement durable et qu'elles peuvent gérer leurs
opérations de manière à stimuler la croissance
économique et renforcer la compétitivité tout en
garantissant la protection de l'environnement et en promouvant la
responsabilité sociale ». 2(*)
Deux auteurs ont particulièrement influencé la
notion de responsabilité d'entreprise 3(*) :
- Max Weber en introduisant le concept d'éthique de
responsabilité, qui prend en compte les conséquences
prévisibles de toute action humaine,
- Hans Jonas, qui a développé le
phénomène de responsabilité de la génération
vivante envers les générations futures.
Responsabilité sociale
A partir de la définition du terme de
responsabilité que nous avons donné précédemment,
nous pouvons avancer deux définitions au concept de
responsabilité sociale : la responsabilité sociale
correspond au fait d'accepter et de subir les conséquences d'actes qui
engendrent eux-mêmes des effets de nature sociale, c'est-à-dire
des effets pour des groupes d'individus plus ou moins importants. On peut
également comprendre ce concept comme le fait d'être responsable,
donc de répondre de ces actes vis-à-vis de la
société.
La commission européenne a indiqué qu' «
être socialement responsable signifie non seulement satisfaire pleinement
aux obligations juridiques applicables, mais aussi aller au-delà et
investir « davantage » dans le capital humain, l'environnement et les
relations avec les parties prenantes ». 4(*)
Ainsi la définition comprend, au-delà de
l'obligation légale, un engagement à aller plus loin ; nous
abordons le périmètre de la morale, qui fera l'objet d'approches
ou de conceptions bien différentes.
Schéma de synthèse : notion de
responsabilité
Une entité responsable
Un référentiel / une conception
théorique
Un champ de responsabilité
Une entité définissant un champ de
responsabilité
Un acte
Un comportement
Un impact
Une entité impactée
Une entité évaluatrice
Des conséquences
définit
réalise
provoque
sur
définit
pour
à partir du
référentiel
à partir du
référentiel
analysé
Commentaires :
Etre responsable, c'est accepter l'ensemble du
processus :
- reconnaître le référentiel qui a servi
de base à la définition du champ de responsabilité
- se reconnaître comme l'auteur libre de l'acte et du
résultat
- reconnaître la nature de l'acte
réalisé
- reconnaître la nature du résultat
engendré par l'acte
Un référentiel
Il peut exister différentes grilles de lecture :
la Loi, la morale, un objectif ou une finalité donnée plus ou
moins précise (ex : limiter la pollution), les us et coutumes.
Les objectifs ou finalités peuvent s'intégrer
plus ou moins à la morale.
Un référentiel répond à la
question : « au nom de quoi est-t-on
responsable ? » ou « pourquoi est-on
responsable ? ».
On peut classer les référentiels du plus
défini au moins défini (le plus défini étant la
Loi).
Ces référentiels s'appliquent à des
périmètres plus ou moins vastes.
La mature du référentiel donne la nature de la
posture.
Un champ de responsabilité
Quand on parle du champ des responsabilités, on peut
l'exprimer en terme de : finalités / objectifs, soit
exprimés en tant que tels, soit exprimés à travers le
référentiel de la morale, ou encore de la Loi (l'un n'est pas
exclusif de l'autre).
On peut plus ou moins zoomer sur un champ de
responsabilité, pour le définir de manière plus ou moins
précise.
Un acteur évaluateur
Pour réaliser l'évaluation de la
responsabilité, il est nécessaire d'utiliser une grille de
lecture, un référentiel qui permette de déterminer les
conséquences à envisager pour l'auteur.
Responsabilité sociale
Quand on parle de RS, on parle de la responsabilité
envers la société. La RSE est difficile à
appréhender car on a du mal à définir l'étendue du
champ de responsabilité des entreprises. Autrement dit, on a du mal
à répondre à la question « responsable de
quoi ? ».
2.1.1.2
Difficultés de définition au-delà des principes
généraux
Les définitions précédemment
données en matière de responsabilité d'entreprise et de
responsabilité sociale fixent les principales finalités ou les
principaux résultats à atteindre ; elles sont dans ce sens
relativement simples à appréhender. L'exercice devient plus
délicat lorsqu'il s'agit d'entrer dans le détail pour
évoquer notamment les moyens de parvenir à ces finalités.
Pour M. Capron et F. Quairel, le concept de responsabilité des
entreprises est difficile à définir dans la mesure où
plusieurs questions se posent auxquelles il n'existe pas de réponse
unique :
- quelle est l'étendue du champ de
responsabilité des entreprises ?
- qui peut légitimement définir ce champ ?
- devant qui l'entreprise est-elle responsable ?
D'autre part, ces auteurs soulignent que la difficulté
d'appréhension du concept provient également du fait que la
responsabilité peut être la conséquence soit d'un
engagement, soit d'une obligation. Ces deux conceptions existent. Dans la
réalité, il n'existe pas aujourd'hui de normes juridiques
internationales donnant la priorité au social sur le commerce.
L'approche par l'engagement est donc, de fait, privilégiée ; ceci
est particulièrement vrai pour les pays anglo-saxons pour qui l'approche
par l'engagement leur est culturellement familière.
Le fait que l'étendue du champ de responsabilité
des entreprises s'appuie sur la morale explique les difficultés de
définition de cette étendue. En effet, la morale
représente un ensemble de « bonnes » règles
dont le périmètre est plus ou moins communément admis. Les
différences de vision quant au partage de ces règles posent
problème dans la définition du périmètre de
responsabilité : ainsi, pour un acte donné, certains
considéreront qu'il fait partie des bonnes règles de conduite
(n'entraînant ainsi aucune conséquences particulières pour
son auteur responsable) tandis que d'autres considérant l'inverse,
demanderont à ce que l'acte ne soit pas autorisé.
Cette difficulté autour de la définition des
actes dont l'entreprise est précisément responsable est d'autant
plus importante que la problématique est mondiale, sur le plan de
l'étendue géographique des responsabilités des entreprises
(notamment les entreprises transnationale), sur le plan des défis
à relever en terme de risques environnementaux ou de
développement durable. La vision des actes
« acceptables » est d'autant plus
hétérogène que les cultures sont différentes.
2.1.1.3 Questions de
vocabulaire 5(*)
Social - sociétal
L'emploi, en français, de l'expression «
responsabilité sociétale de l'entreprise » permet de ne pas
restreindre le périmètre de responsabilité aux relations
entre des personnes d'une même organisation ou collectivité, ce
que peut entraîner l'emploi du mot social. Mais la traduction anglaise de
l'expression « corporate social responsability » entraîne la
subsistance de l'expression « responsabilité sociale de
l'entreprise ». Pour éviter cette confusion, l'expression «
responsabilité globale de l'entreprise » est de plus en plus
utilisée.
Entreprise
La notion d'entreprise que l'on peut retenir va au-delà
de la vision économique pour inclusion toute organisation faisant usage
de ressources humaines, sociales ou naturelles.
Ethique des affaires et responsabilité sociale
de l'entreprise
L'éthique est un terme philosophique qui
représente la science de la morale ou l'art de diriger la conduite (Le
Petit Robert).
L'amalgame entre responsabilité sociale de l'entreprise
et éthique de affaires n'est pas rare. Elles n'ont pourtant pas le
même sens et la notion d'éthique des affaires est, à
plusieurs égards, plus restreintes que la notion de RSE :
l'éthique des affaires concerne essentiellement le comportement
individuel du chef d'entreprise ; elle s'appuie exclusivement sur la
distinction entre le bien et le mal ; enfin, elle se limite aux respects
d'obligations contractuelles.
Dimension sociale
Deux significations sociales sont données au concept :
- une réponse des entreprises à la contestation
d'un capitalisme ultra-libéral
- un puissant levier de transformation des entreprises et
marchés financiers à condition de s'en saisir
Développement durable
En Europe, le développement durable est une
référence idéologique qui sert au développement du
concept de responsabilité sociale grâce à un amalgame des
deux notions. Le développement durable souffre encore
d'imprécision. Par exemple, la communication autour du
développement durable à partir du slogan du « Triple
P » connaît deux interprétations :
- People, Planet, Profit pour le monde économique
- People, Planet, Prosperity pour les organisations
internationales.
2.1.2 Contexte et historique du développement de la
RSE
2.1.2.1 La mondialisation
Le développement de la responsabilité des
entreprises est à mettre en relation le phénomène de
mondialisation et ses impacts, provoquant à la fois mouvements de
solidarité et réactions de peur. Ces mouvements ont permis de
faire émerger une réflexion autour de la conduite des
entreprises. Alors, cela a permis de constater un écart entre les
valeurs et attentes de la société civile et celles des
entreprises.
La RSE, associée au concept de développement
durable, repose sur des enjeux géopolitiques : une évolution
dans ces domaines suppose une entente nationale que les Etats-Unis viennent
remettre en cause.
La mondialisation conduit également à la
déréglementation, accordant de plus en plus de pouvoir aux
entreprises, tandis qu'elles souffrent de légitimité.
La RSE devient un outil de développement de cette
légitimité, utilisé par les entreprises.
Mondialisation
mouvements sociaux mise en évidence d'une perte de
légitimité
enjeux géopolitiques de la RSE mondialisation des
objectifs de RSE contrée par les USA
déréglementation pouvoir des entreprises
outil RSE pour plus de légitimité
La mondialisation est liée au phénomène
de fusions - acquisitions qui a généré des tailles
d'entreprises de plus en plus importantes et des groupes de plus en plus
industriels. Ces entreprises, souvent transnationales, concentrent un pouvoir
économique et financier de plus en plus important, ce qui leur laisse
l'opportunité d'opérer des déréglementations,
notamment sociales, en exerçant d'importantes pressions contre les
pouvoirs publics. Ces déréglementations sont contrées par
des mouvements citoyens qui se développent un peu partout dans le
monde.
2.1.2.2 Evolution des rapports entre économies et
sociétés
L'auteur explique dans le premier chapitre que le
développement du concept de RSE est d'abord marqué par des
rapports différents entre le monde économique et la
société.
La notion de PP est apparue en Grande Bretagne et n'a
été développée que bien plus tard en France. De
nouvelles catégories d'acteurs, à côté des
actionnaires et des salariés se sont développées.
Côté actionnaires, d'autres groupes d'investisseurs
défendant l'investissement socialement responsable ont fait leur
apparition.
Deux phénomènes sont constatés :
- la baisse du seuil d'acceptation de certains risques par la
société
- la recherche d'une plus grande légitimité par
les entreprises
Les structures de l'économie sociale et solidaire
constitue en quelque sorte un modèle des valeurs recherchées par
la société.
Les rapports entre économies et sociétés
évoluent en laissant la place à de nouveaux acteurs
« parties prenantes ».
Différents facteurs ont contribué à la
réflexion et au débat autour de la RSE :
- les cercles de dirigeants, ONG et organisations
internationales sur les questions sociales dans le commerce
international : ce sujet est lié au développement de la
mondialisation qui a fait émergé la problématique de
dumping social.
- les milieux écologistes avec la notion de
développement durable, qui n'a cessée de se développer
depuis le sommet de la Terre à Rio en 1992
- l'opinion publique avec la question du respect des droits de
l'homme : la question des droits humains et de la personne est de plus en
plus présente à travers le monde (développement de la
notion d'ingérence humanitaire lorsqu'il s'agit de situations
extrêmes en terme de violation des droits de l'homme ;
dénonciation d'activités criminelles impliquant exploitation et
souffrance humaine ; soutien des consommateurs pour les actions en faveur
de défavorisés, de minorités).
Les organisations ont du faire face à de nouvelles
contraintes qui entraînent l'apparition de nouvelles formes et lient
de plus en plus l'entreprise à son environnement :
- l'entreprise a un périmètre de moins en moins
précis et devient de plus en plus perméable à son
environnement (logiques de réseaux, mouvement d'externalisation)
- de nouvelles formes d'entreprises apparaissent : on
parle d'entreprises nomades, d'entreprises nébuleuses, de modèle
« molécule »
- dès lors, l'emploi évolue à travers de
nouveaux statuts, avec une distinction de son positionnement physique et de son
positionnement juridique
- l'organisation en firme-réseau amène
l'entreprise à développer des relations plus particulières
avec certaines parties prenantes
- l'entreprise est jugée de plus en plus responsable de
son environnement immédiat (dimension sociale, environnementale)
- leurs tailles grandissantes amènent la
société civile a exigé de plus en plus des
entreprises ;
- les attentes de la société civile porte sur
trois dimensions : économique, social et environnemental
- ces exigences les amènent à développer
de nouveaux systèmes de management
- certains demandent la prise en charge par l'entreprise de
certaines charges, trop souvent abandonnées à la
collectivité ; d'autres réfléchissent à des
actions de contrôle
- l'image de la firme, sa réputation, sont
perçues comme un capital immatériel à développer
- le comportement socialement responsable, outil de
développement de cette image, devient alors un élément
intervenant dans la performance des entreprises
Les entreprises s'intègrent dans un mouvement de
développement des préoccupations éthiques,
développées par les milieux d'affaires eux-mêmes. Elles ont
pour objectif de donner une consistance à l'utilité sociale des
entreprises et de leurs dirigeants. L'éthique s'adresse à
l'entreprise mais également à l'ensemble des parties prenantes,
d'où sa large diffusion. Pour faire face au déficit des valeurs,
l'entreprise est érigée en exemple à suivre. Le risque de
cette exigence éthique est de placer comme débat central la
recherche de croissante « socialement correcte » au
détriment d'un débat sur les choix politiques fondamentaux. Des
mouvements de réflexion ont été créés, sous
l'impulsion des entreprises. D'autres s'inscrivent, par secteur
d'activité, dans un ensemble de principes et d'engagements.
Les autorités politiques interviennent également
dans le changement de contexte, notamment en tant qu'autorités
appelées à réguler les pratiques des entreprises.
Nous noterons, sur le plan international, la création
du programme « Global Compact » par l'OIT, l'OCDE et
l'Union européenne, sensé promouvoir de meilleures pratiques en
terme de droits de l'homme, du travailleur et de l'environnement. Le manque de
contrôle limite toutefois son impact. La RSE a également
été mise en avant lors du sommet mondial du développement
durable à Johannesburg en 2002. Le retrait des Etats laisse une plus
grande place au rôle direct de l'entreprise dans la mise en oeuvre du
développement durable ; les ONG essaient de limiter ce
phénomène en demandant « un cadre international
effectif, juridiquement contraignant sur l'obligation de rendre compte et sur
la responsabilité des entreprises ».
Certains états jouent également un rôle
dans la promotion de la RSE, comme au Royaume-Uni, ou encore en France.
Les collectivités territoriales jouent, quant à
elles, un rôle important dans l'application des objectifs de Rio (Agenda
21) concernant le développement durable.
2.1.2.3 Synthèse
Le contexte dans lequel s'est développé la RSE
est le suivant :
- l'émergence du concept de parties prenantes
- le développement du respect des droits humains
- une prise en compte de la question internationale dans le
contexte social
- le développement du contexte de développement
durable
- des entreprises qui sont de plus en plus liées
à leur environnement
- le développement de l'éthique
- des autorités politiques qui s'engagent dans le
développement du DD et de la RSE
Pour comprendre les conditions d'apparition de la RSE, il est
utile d'identifier les éléments de contexte qui ont joué
un rôle dans son développement. La mondialisation a
constitué un élément important dans la mesure où
elle a entraîné dans dérèglements sociaux qui ont
donné naissance à différents mouvements de contestation.
Ces mouvements ont oeuvré pour le développement des concepts de
DD et de RSE
D'autre part, dans une société où la
communication est de plus en plus présente, la mondialisation a
donné le moyen à l'action médiatique de toucher un
périmètre très large, parfois mondial. Dès lors,
l'image de l'entreprise constitue un enjeu d'importance. Nous identifions une
détérioration de l'image lorsque les actions de l'entreprise ne
correspondent plus aux attentes de la société en terme de
valeurs. Ce décalage s'est accentué avec le développement
de la mondialisation puisque nous avons déjà évoqué
de quelle manière il avait développé différents
dérèglements. Dés lors, le travail autour de l'image est
passé par l'intégration des valeurs de la société
dans la stratégie de l'entreprise.
2.1.3 La problématique de la
légitimité du concept de RSE
2.1.3.1 Développement de l'aspect théorie des
organisations 6(*)
L'étude des théories des organisations relatives
à la RSE conduit à se poser la question du
référentiel 7(*) sur lequel reposera la conception de la RSE. Chacune
de ces théories constitue un référentiel spécifique
qui doit orienter la définition du champ des responsabilités et
qui doit servir de base à l'entité évaluatrice. Concernant
la RSE, le référentiel touche les différentes
façons de positionner l'entreprise dans son environnement, la rendant
ainsi plus ou moins responsable au regard de la société.
Autre question posée à travers l'étude de
la RSE sous l'angle des théories des organisations : celle d'un
fonctionnement conjoint de la RSE et de la performance globale possible sur le
long terme et tout à fait normalisé. Deux grandes conceptions
s'opposent : les théories économiques néo-classiques pour
lesquelles la seule finalité que doit poursuivre l'entreprise est le
profit, et les théories du courant moraliste éthique pour
lesquelles l'entreprise a une responsabilité morale et se doit d'agir de
manière socialement responsable. Entre ces deux visions extrêmes
existent divers courants qui intègrent à différents
niveaux l'entreprise dans son environnement social et admettent dés lors
une convergence plus ou moins grande entre l'intérêt
général et l'intérêt de l'entreprise. Il est
possible de les regrouper en trois tendances :
- un courant classique, économique et
libéral,
- un courant qui situe l'entreprise dans un réseau de
parties prenantes ; la responsabilité de l'entreprise est basée
sur la notion de contrats,
- un courant qui place l'entreprise au sein d'un environnement
social dans lequel l'entreprise cherchera à développer des
stratégies en cohérence avec les valeurs de la
société.
Premier courant : le courant classique
Théorie néo-classique défendant la
responsabilité sociétale au profit des actionnaires : cette
approche est représentée par Milton Friedman et l'école de
Chicago. La poursuite d'objectifs sociaux et environnementaux ne se justifie
que dans la mesure où elle assure de bons résultats financiers,
donc si elle sert les intérêts de l'actionnaire. Cette logique
n'ayant jamais été démontrée dans les faits, il est
évoqué la notion de « profit à long terme » pour
justifier l'intégration d'une stratégie sociétale à
la stratégie globale de l'entreprise. L'essentiel de cette
stratégie porte concrètement sur le contrôle des dirigeants
en vue de protéger les actionnaires (gouvernement des entreprises).
Théorie de la dépendance à l'égard
des ressources : l'entreprise est soumise aux demandes des acteurs sociaux qui
lui fournissent les ressources indispensables à la poursuite de son
activité (ressources financières, humaines, naturelles, etc. ).
La nécessité de répondre à ses attentes
amène l'entreprise à poursuivre des objectifs sociétaux.
Il s'agit donc d'un engagement sous contrainte. Cette théorie constitue
un premier pallier de la théorie des parties prenantes.
Deuxième courant : théories
intégrant la notion de parties prenantes
Théorie des parties prenantes : les parties prenantes
d'une entreprise sont des acteurs intéressés par les
activités et les décisions de l'entreprise (on trouvera
également les notions de « parties intéressées »
ou de « porteurs d'enjeux »). Les différentes
définitions de ce concept engendrent la prise en compte d'un
périmètre plus ou moins large d'acteurs (acteurs
influencés, acteurs supportant un risque). La construction de typologies
de parties prenantes permet de distinguer les parties prenantes primaires,
bénéficiant d'un contrat explicite avec l'entreprise (partenaires
de l'entreprise) et les parties prenantes secondaires, liées à
l'entreprise par un contrat implicite ou moral (l'entreprise dans la
société). Pour gérer les parties prenantes, l'entreprise
les sélectionne en utilisant les critères de pouvoir, de
légitimité et d'urgence. Les limites de cette théorie sont
: l'idée qu'une résolution des conflits d'intérêts
est possible en maximisant les intérêts de chacun ; la
construction d'une vision réductrice de la responsabilité
sociétale de l'entreprise qui ne prend pas en compte les parties
prenantes muettes ou absentes 8(*). Cette vision segmentée sert de base à
l'essentiel des travaux consacrés à la responsabilité
sociale de l'entreprise.
Théorie des biens communs mondiaux : la théorie
des parties prenantes est insuffisante pour traiter la problématique du
développement durable au niveau mondial. Dune part, la diversité
des intérêts particuliers est telle que la politique du consensus
ne peut être menée ; la définition de
l'intérêt collectif doit alors être donnée par un
organe décisionnaire public. D'autre part, son mode de fonctionnement
n'intègre pas l'existence de parties prenantes muettes ou absentes, ce
qui est incohérent avec la notion de responsabilité de
l'entreprise dans le cadre d'un développement durable, telle qu'elle a
été définie par les Nations unies depuis le sommet de Rio
en 1992. Le développement de la notion de « biens communs mondiaux
» indispensables à la survie des sociétés humaines
permet une meilleure approche du développement durable à
l'échelle planétaire. Le travail autour de la
responsabilité sociétale consiste alors en une
préservation et un développement de ces biens communs de
l'humanité.
La théorie des biens communs mondiaux est une
théorie intéressante car il est possible de mettre en oeuvre
certains principes à l'échelle de la planète, ce qui est
bien moins envisageable avec la théorie des parties prenantes. Dans le
cadre de la théorie des parties prenantes, plus nous raisonnons au
niveau global, plus nous devons opérer une sélection des parties
prenantes afin de ne pas être submergé par leur nombre,
d'où la vision segmentée de la responsabilité sociale
à laquelle fait référence l'auteur. La théorie des
biens communs mondiaux permet au contraire de faire agir l'ensemble des hommes
en vue de la sauvegarde d'un bien donné, sans passer par l'étape
d'identification et éventuellement de sélection des parties
prenantes. Cette théorie facilite l'action collective de grande
envergure. Au lieu de rechercher les spécificités des attentes de
chacun pour les satisfaire au mieux au sein d'un consensus, la théorie
des biens communs mondiaux conduit à identifier les attentes communes
(concrétisées par la notion de biens communs) et à mettre
en oeuvre (sans nécessité de compromis ou consensus) la
réalisation de ces attentes. Nous noterons que cette théorie peut
s'appliquer de la même façon à n'importe quel
périmètre plus restreint que la planète, ce qui constitue
un autre de ses avantages.
Théories de la responsabilité sociétale
des entreprises : 3 théories sont identifiables. La théorie
« Business and Society » : l'absence de frontière entre
entreprise et société et la multiplicité de leurs
interactions que l'on peut traduire par l'existence d'un contrat moral
justifient l'exercice d'un contrôle social par la société.
La théorie du « Social Issue Management » fournit des outils
de gestion pour intégrer la dimension sociale à la
stratégie de l'entreprise. La théorie « Business Ethics
» prête à l'entreprise un statut d'agent moral qui lui donne
une responsabilité morale.
Les premier et deuxième courants sont basés sur
l'idée que le consensus entre entreprise et parties prenantes est
possible par l'établissement de contrats justes.
Troisième courant : le courant
sociologique
Dans l'approche sociologique néo-institutionnelle,
l'entreprise est intégrée à la société et
elle recherche en permanence une légitimité au sein de cette
dernière. Cette légitimité est institutionnalisée
dans la mesure où la société a établi des
exigences, des normes sociales et culturelles que l'entreprise doit respecter
si elle veut acquérir cette légitimité. Ce comportement
est omniprésent et non mesurable. Avec l'habitude, il peut n'être
qu'apparence et ne pas correspondre à la réalité des
activités de l'entreprise. Trois types de comportement sont possibles
pour l'entreprise : la conformité totale et partielle
(contrôlée par les contraintes légales, les contraintes
normatives ou les contraintes mimétiques) ; l'évitement (par la
construction d'une image de conformité) ; la manipulation (par
l'exercice d'une influence sur les pressions institutionnelles et les
évaluations).
Globalement, nous retiendrons qu'il existe deux paradigmes
relatifs aux liens entre entreprises et sociétés :
- une approche par les contrats
- une approche par l'encastrement de l'entreprise dans un
réseau social
Tableau de synthèse de la RSE sous l'angle des
théories
|
Courant classique
|
Courant des parties prenantes
|
Courant sociologique
|
Théorie...
|
néo-classique
|
de la dépendance à l'égard des
ressources
|
des parties prenantes
|
des biens communs mondiaux
|
de la responsabilité sociétale des
entreprises
|
sociologiques néo-institutionnelles
|
Concepts utilisés / idées
|
profit à long terme
|
acteurs détenteurs de ressource
|
partie prenante (PP)
|
biens communs mondiaux (BCM)
|
Rôle moral, social de l'entreprise
|
légitimité
|
Postulats / hypothèses
|
la seule finalité de l'entreprise est la maximisation
des profits pour les actionnaires
|
l'entreprise est soumise à des demandes des acteurs
sociaux détenteurs de ressources indispensables à l'entreprise
|
l'entreprise est environné de PP ayant des attentes
sociétales et environnementales spécifiques
|
il est possible de définir un ensemble de BCM sur
lesquels l'entreprise a un impact
|
l'entreprise a un statut d'agent moral qui l'amène
naturellement à intégrer des principes de RS
|
l'entreprise est totalement intégrée dans la
société et doit acquérir une légitimité
|
|
il est possible de satisfaire les principes de RS par
l'établissement de consensus s'appuyant sur des contrats justes
|
|
Principes de fonctionnement vis-à-vis de la RS
|
développement d'actions sur le contrôle des
dirigeants
|
développement d'actions de RS en accédant
à ces demandes
|
développement d'actions de RS en contentant les PP
|
développement d'actions de RS en cohérence avec
la notion de BCM
|
développement d'actions de RS en respect du rôle
social de l'entrep.
|
développement d'actions de RS en fonction des attentes
de la sté
|
Finalités ...
|
... de l'entreprise
développer le profit des actionnaires
|
... de l'entreprise
assurer la survie de l'entreprise
|
... de l'entreprise
faciliter le développement de l'entreprise par la
satisfaction des PP
... de la société
assurer une meilleure prise en compte des attentes des PP
|
... de l'humanité
assurer le maintien et le développement des BCM
|
... de la société
faire en sorte que l'entreprise ne détériore pas
la qualité de vie sociétale et environnementale
|
... de l'entreprise
obtenir une légitimité
... de la société
faire respecter les valeurs dominantes de la
société par l'entreprise
|
Conception du lien entre entreprise et
société
|
un lien entre l'entreprise et la société s'il
permet d'engendrer de bons résultats financiers
|
un lien existe entre l'entreprise et ses fournisseurs de
ressources indispensables à son activité
|
un lien existe entre l'entreprise et ses parties prenantes
|
un lien existe entre l'entreprise et la
société
|
un lien existe entre l'entreprise et l'ensemble de la
société
|
un lien existe entre l'entreprise et l'ensemble de la
société
|
Définition des bases du référentiel de
responsabilité
|
l'entreprise est responsable de ses impacts sur la
société dans la mesure où cette responsabilité
permet un meilleur niveau de profit des actionnaires
|
l'entreprise est responsable de ses impacts sur la
société dans la mesure où cette responsabilité
permet l'obtention des ressources indispensables à son
activité
|
l'entreprise est responsable de ses actes dans la mesure
où ils engendrent des conséquences sur les parties prenantes,
dont les attentes doivent être prises en compte
|
l'entreprise est responsable de ses actes dans la mesure
où ils engendrent des conséquences sur les BCM, dont la
sauvegarde doit être assurée
|
l'entreprise est responsable de ses actes dans la mesure
où ils sont contraires à la morale et l'équilibre social,
dont les valeurs doivent être défendues
|
l'entreprise est responsable de ses actes dans la mesure
où ils impactent sa légitimité dans la
société et où ils doivent respecter les valeurs dominantes
de la société
|
2.1.3.2 Comment s'opère le choix de conception de la
RSE dans l'entreprise ?
L'entreprise a le choix entre plusieurs conceptions de la RSE.
En effet, la diversité des théories se traduit au sein de
l'entreprise par des conceptions et des mises en oeuvre de la RSE tout à
fait différentes. La manière dont l'entreprise opère le
choix de l'une ou l'autre de ces conceptions dépend de différents
critères dont nous listons les principaux ci-après.
L'idéologie des managers 9(*)
L'idéologie ouvre un champ de responsabilité
plus ou moins important. Le modèle libéral classique, par
exemple, limite la responsabilité de l'entreprise au cadre juridique et
au respect d'une attitude loyale vis-à-vis des autres entreprises. Au
contraire, certaines grandes multinationales estiment que la
responsabilité de l'entreprise est bien plus large (car entreprise et
société sont interdépendantes) et que les limites sont
à fixer par la négociation avec les gouvernements et la
société civile.
Les acteurs intervenants dans la mise en place de la
RSE
Ces équipes sont en principe un relais des managers.
Ces derniers sélectionnent les valeurs et définissent la
stratégie. Les équipes opérationnelles déclinent
ces axes en actions concrètes ; à leur niveau, ces
équipes peuvent influer sur la conception de la RSE. D'autre part, elles
peuvent également être plus ou moins impliquée dans la
définition de la stratégie et être ainsi force de
proposition.
La culture de la structure ou d'un environnement plus
large
La nature de l'engagement de responsabilité
dépend de la culture morale et politique. Quelques exemples illustrent
ce phénomène : la RSE trouve ses origines premières
dans les préceptes religieux ; l'importance de la notion
d'Etat-providence en Europe a limité l'importance des oeuvres
privées des entreprises. Concernant la culture des structures, certaines
entreprises défendent plus que d'autres des valeurs telles que la
responsabilité collective ; c'est par exemple le cas des
coopératives ou des mutuelles.
La nature de l'activité
Certaines activités rendent plus sensibles l'entreprise
à la problématique de responsabilité. C'est par exemple le
cas lorsque l'entreprise exerce une activité qui impacte fortement
l'environnement, telle que l'activité pétrolière ou encore
l'extraction de matières premières (le groupe Lafarge s'engage
par exemple avant exploitation à remettre en état les sites
exploités, après extraction).
Les entreprises qui commercialisent directement auprès
du grand public sont également plus sensible au thème de la RSE.
L'individu consommateur ou encore citoyen a de fait une image de l'entreprise
que cette dernière doit améliorer ou maintenir pour gagner sa
légitimité devant la société et ainsi
développer son marché.
L `évolution de la société
dans sa globalité
L'entreprise est en recherche permanente de
légitimité auprès de la société ; c'est
pourquoi les valeurs défendues par la société ont une
influence sur la manière dont l'entreprise appréhende la RSE. Par
exemple, plus l'impact de diverses parties prenantes est important, plus
l'entreprise va être amenée à développer une
politique de RSE. De la même manière, le périmètre
de responsabilité sociale des entreprises, c'est-à-dire le fait
qu'elle rende des comptes, se développe au fur et à mesure par
l'intégration des nouvelles parties prenantes.
Les comportements des autres concurrents du
secteur
Aux yeux de la société, le développement
de la RSE au sein de l'entreprise peut apparaître comme un avantage
concurrentiel. Dès lors, une entreprise ne peut pas toujours
restée en dehors de cette problématique si ses concurrents
utilisent cet argument pour communiquer auprès du public.
2.2 Mise en oeuvre
de la RSE dans l'entreprise 10(*)
Traiter de la mise en oeuvre de la RSE, c'est traiter du mode
d'exercice ou du mode d'expression concret de ce concept. C'est le stade de la
concrétisation après l'énonciation de valeurs ou de grands
principes. Une première étape de concrétisation correspond
à ce que l'on peut appeler une stratégie d'approche ou
d'action ; cette étape est suivie de la mise en place d'outils, de
moyens.
Nous développerons dans cette partie les changements
majeurs que peut engendrer le développement de la RSE dans l'entreprise
et les approches et outils utilisés pour sa mise en oeuvre.
Idée : le niveau d'engagement de l'entreprise
dans la RSE dépend de l'intégration de cette RSE dans le
système de management et l'activité économique de
l'entreprise
Faits : Un type d'évaluation consiste à
appréhender les éléments positifs réalisés
par l'entreprise en matière de RSE
Un autre type d'évaluation consiste à
repérer les nuisances négatives
Idée : Deux types d'évaluation existent
qui ne donnent pas lieu aux mêmes résultats
Idée : La responsabilité de
l'entreprise s'apprécie à partir de trois dimensions (sociale,
économique et environnementale), et de plus en plus dans une optique de
performance globale
2.2.1 Une ouverture vers
l'extérieure
La RSE induit un dialogue avec des parties prenantes et une
ouverture de l'entreprise vers l'extérieur. Le développement du
concept de RSE est d'abord marqué par des rapports différents
entre le monde économique et la société, à savoir
que ces deux sphères sont beaucoup plus liées l'une à
l'autre qu'avant.
L'énonciation des enjeux, c'est-à-dire de ce qui
se joue à travers le concept de RSE, se fait souvent en utilisant comme
point d'entrée les principaux acteurs parties prenantes aux
activités de l'entreprise. En effet, la RSE se réalise
principalement par l'exercice de pressions des parties prenantes sur les
entreprises, afin de modifier leurs comportements. Trois catégories
principales seront développées : les ONG, les syndicats de
salariés et les consommateurs.
2.2.1.1 Les ONG et le milieu associatif
Les interactions entre ces parties prenantes (ONG et
associations) et les entreprises sont un phénomène nouveau. Leurs
pressions s'exercent de différentes manières :
- manifestations lors de rencontres internationales ou grands
rassemblements tels que ceux des mouvements altermondialistes qui organisent
les Forums Sociaux (Mondiaux, Européens)
- opérations de boycott ou de menace de boycott
d'entreprises, de produits
- opérations de promotion de l'épargne
solidaire
- développement du commerce équitable (ce type
de commerce privilégie les rapports directs entre consommateurs et
producteurs et veille à assurer, dans un souci de protection des
producteurs, un partage équitable de la marge entre producteurs et
distributeurs)
- mise en place des labels sociaux et éthiques,
consistant à mettre en évidence des distinctions positives
concernant des marques ou des produits qui s'engagent sur le terrain social ou
environnemental
- établissement de normes sociales
Ces différentes actions traduisent des modes de
pression bien différents, qui vont de la dénonciation au dialogue
avec les entreprises. Il semblerait que la tendance aille plutôt en
direction d'une recherche de dialogue et de collaboration.
En France, les approches de type partenarial ont du mal
à se mettre en place, du fait d'une importante méfiance. Ce type
d'approche ne fait d'ailleurs pas l'unanimité dans le milieu des ONG en
général, qui craignent un renforcement du secteur privé au
détriment des Etats.
Cette diversité d'actions a pour conséquence une
multitude d'outils. Nous noterons également des finalités, des
périmètres géographiques d'actions
différents ; tout ceci conduit au constat d'une grande
hétérogénéité au sein de ce groupe de
parties prenantes.
2.2.1.2 Les syndicats de salariés
Les problématiques sociales sont familières des
syndicats de salariés. Toutefois, ces derniers doivent
intégrés de nouvelles questions, telles que l'environnement, la
cohésion sociale globale. La mondialisation a engendré une
détérioration des conditions sociales. Ces problématiques
se posent au niveau mondial ; l'enjeu pour les syndicats est d'agir par le
biais d'un cadre institutionnel de dimension également mondiale. Des
accords mondiaux sont signés. Ils permettent de prendre en compte
l'entreprise dans sa conception élargie, ce qui permet
d'appréhender des problématiques relevant de la RSE et le DD,
comme le montrent plusieurs exemples.
Les syndicats expliquent qu'ils pallient une carence des
gouvernements et organisations internationales à protéger les
travailleurs des mauvaises conditions de travail.
Autre point intéressant : les syndicats analysent
les codes de conduite des entreprises pour vérifier dans quelle mesure
les entreprises mettent réellement en oeuvre leur responsabilité
sociale, ou dans quelle mesure, au contraire, elles ne répondent
qu'à une pression de l'opinion publique.
Au niveau européen, les syndicats s'attachent à
conserver la primauté de la réglementation et de la
législation sur l'approche volontaire des entreprises. Cette approche a
été notamment relayée en France par la CGT et la CFDT
à travers une première initiative concernant l'épargne
salariale, en vue d'une plus grande sécurité et justice par le
biais de la mise sous label des fonds gérés. Le levier d'action
« épargne salariale » ne fait pas
l'unanimité et pose la question du pouvoir réel qu'elle
apporte aux syndicats.
Dés lors, plusieurs questions se posent aux
syndicats : comment utiliser les formes d'actions offertes à
l'actionnaire tout en oeuvrant pour une population qui reste avant tout
salariée ? Comment entrer dans un dialogue avec l'employeur sans se
noyer dans la masse des autres parties prenantes ? Comment s'ouvrir
à de nouveaux modes de raisonnement intégrant les
problématiques globales de société ?
En matière sociale, un enjeu important se situe dans sa
capacité à travailler sur la responsabilité individuelle
afin de renforcer le pouvoir du salarié face à celui de
l'entreprise. Les syndicats continuent de développer une approche
collective de l'action dans un monde où l'individualisme est la
règle, dans un monde où chacun sait inconsciemment qu'il ne peut
plus compté que sur lui-même pour acquérir du pouvoir face
à celui de l'entreprise, qui grandit sans cesse.
Pour progresser dans ce sens, la solution consiste à
redonner la responsabilité de son parcours à chaque
salarié, ce qui permet d'individualiser les problématiques
posées.
D'autre part, des combats ont perdu de leur
légitimité : le combat pour une protection de l'emploi
réalisée par l'entreprise par le biais d'une approche d'emploi
à vie ; le combat pour des augmentations collectives des salaires
alors que ces augmentations ne sont que minimes. Les syndicats demandent encore
à l'entreprise de prendre des décisions en faveur des
salariés alors que cette dernière a tout pouvoir pour ne pas les
prendre, étant donné l'état du marché de l'emploi,
le resserrement des acteurs « grandes entreprises »,
l'abandon par les individus du combat collectif.
Il est nécessaire de quitter la position d'attente
vis-à-vis de l'entreprise car elle a, aujourd'hui, le pouvoir
nécessaire pour ne pas donner.
2.2.1.3 Les consommateurs
Un jeu d'influence mutuelle
Le rapport entre entreprises et consommateurs est basé
sur une recherche d'influence réciproque. Les entreprises ont un pouvoir
d'influence sur les consommateurs par la nature des produits et services qu'ils
mettent sur le marché et par leur utilisation du marketing qui
développe la société de consommation. Mais les
consommateurs ont également un pouvoir d'influence sur les entreprises
en tant que décideur de leur acte d'achat (remarque : ce pouvoir ne
s'exerce que s'il est relayé collectivement).
D'autre part, le pouvoir d'influence des consommateurs est
limité. Les associations de consommateurs ont encore du mal à
s'imposer en tant que partie prenante influente (par manque d'attrait pour le
combat collectif de la part des individus) et leur influence s'exerce
plutôt à travers les ONG qui sollicitent le consommateur -
citoyen. Les techniques marketing de plus en plus élaborée
limitent également le pouvoir d'influence des consommateurs. Il existe
une différence entre l'intention du consommateur d'intégrer dans
ses choix de consommation des critères sociaux et environnementaux (75%
des consommateurs) et son acte d'achat réel (seuls 3% des consommateurs
passent à l'acte).
Toutefois, Le pouvoir existe, se construit. Nous noterons, par
exemple, que les associations de consommateurs et les ONG développent
des outils d'aide à la consommation responsable. Il existe des exemples
de d'actions de boycott (Shell, Nestlé). L'action du consommateur -
citoyen est différente de celle du consommateur dans la mesure où
le consommateur - citoyen défend à la fois son
intérêt de consommateur (rapport qualité - prix,
sécurité) et son intérêt de citoyen, à la
recherche de principes de bien-être collectif à travers ses actes
de consommation.
Un pouvoir limité
Le consommateur peut opter pour l'un des trois types d'actions
pour faire jouer son pouvoir : consommer mieux (chercher des entreprises
responsables), consommer moins (report sur des produits concurrents), ou
boycotter. Mais le pouvoir du consommateur - citoyen est
limité. Le consommateur - citoyen est avant tout un consommateur,
conditionné par les actions de marketing et sensibles aux
critères traditionnels de l'acte d'achat (prix, packaging, marque ...).
Il existe peu d'informations crédibles sur les pratiques des
entreprises. Les consommateurs se sentent concernés par les produits
mais non par les pratiques des entreprises. La conscience de constituer un
pouvoir à travers ses actions personnelles est peu présente en
France.
Un marketing manipulateur
Il existe une évolution des valeurs qui amènent
les entreprises à transformer leurs actions marketing. Certaines
entreprises développent des stratégies telles que le
« cause related marketing ». Ces actions augmentent le CA
tout en étant une réponse aux besoins de justification de
éthique des consommateurs. Les outils traditionnels du marketing
reposent sur la persuasion et la manipulation ; ils continuent de
l'être en défendant les valeurs de responsabilité sociale
et de développement durable (ex : labels autoproclamés,
politique des grandes surfaces). Cette évolution ne permet pas au
consommateur d'accéder à une véritable consommation
responsable et citoyenne ni à l'entreprise d'avoir une réelle
politique de responsabilité sociale. Le coût d'une
véritable politique de responsabilité sociale et environnementale
est trop élevé en regard des bénéfices potentiels.
De plus, la pression des consommateurs manque de force. Ainsi, l'entreprise se
contente de stratégies de différenciation pour développer,
auprès d'un certain type de consommateurs, une image d'entreprise
engagée sur le plan de la responsabilité sociale et
environnementale. Un réel engagement ne se fera qu'à la condition
d'une information plus fiable et de meilleurs outils.
Les organisations de consommateurs
L'influence du consommateur-citoyen s'est surtout
développée à partir de la création d'organisations
de consommateurs. Aux USA, les organisations de défense des
consommateurs furent parmi les premières à exercer des pressions
sur les entreprises. Ce mouvement permettait de faire face à
l'évolution des techniques marketing de plus en plus
élaborées. En France, un travail commun des associations de
consommateurs et des ONG a permis aux associations de consommateurs
d'élargir leurs objectifs et de renforcer leur action.
L'information objective sur les produits est la
première revendication des organisations de consommation car elle seule
permet l'exercice d'un achat responsable, c'est-à-dire un achat en toute
connaissance de cause. La publicité ne remplit en aucun cas ce
rôle puisqu'elle conduit, au contraire, à une manipulation de
l'information. L'association de consommateurs UFC- Que Choisir avait par
exemple demandé à ce qu'une information plus complète soit
donnée concernant les produits dits
« allégés » ; la commission
européenne ne lui a pas donné raison.
Un second mode d'action largement utilisé par les
associations de consommateurs consiste à favoriser la création
de labels écologiques ou sociaux
Le rôle des organisations de consommation est
central, ou pour le moins important
Un premier objectif du consommateur est d'obtenir
l'information la plus juste possible sur le produit (composition, durée
de vie, utilisation), sur l'entreprise ou les entreprises qui ont
participé à son élaboration (comportement social), et sur
l'ensemble des conséquences qu'a engendré la fabrication du
produit (impacts environnementaux, sociaux). C'est ce premier objectif que
poursuit le consommateur responsable, c'est-à-dire un consommateur qui
ne peut être que tenu responsable de son achat, compte tenu de son bon
niveau d'information. On se trouve là en présence d'une
responsabilité recherchée car elle procure au consommateur soit
une plus grande sécurité d'achat, soit une plus grande
cohérence entre ses valeurs et ses actes de consommation. Dans ce cas,
la responsabilité n'entraîne pas le risque d'être
évalué et de subir les conséquences de cette
évaluation (contrairement à l'entreprise) et mais
l'impossibilité de recourir, par exemple, à une action contre
l'entreprise, à cause d'un préjudice subi, l'information ayant
été donné en amont.
Un second objectif concerne la demande d'assistance suite
à un achat pour lequel le consommateur estime avoir été
lésé.
Les consommateurs ont du mal à se
libérer de l'influence de l'entreprise
Les actionnaires responsables bénéficient de
plus de pouvoir car une seule décision d'investissement peut concerner
de nombreux actionnaires, de par l'intervention des investisseurs
institutionnels.
Le pouvoir du consommateur, quant à lui, reste faible
car la décision d'achat se prend au niveau individuel.
2.2.1.4 Les actionnaires
Le concept d'Investissement Socialement
Responsable
Même si l'ISR diffère dans sa définition
en fonction des pays, il est possible de dégager des critères
communs aux fonds d'ISR. Le niveau de développement des fonds ISR et
très différent d'un pays à l'autre.
Le pouvoir des actionnaires
Les actionnaires socialement responsables sont un enjeu
important pour les entreprises. Ils exercent leur pouvoir à deux
niveaux : par la vente des titres et par leur vote lors des
assemblées générales. Les investisseurs peuvent avoir un
poids non négligeable dans le capital, ce qui augmente d'autant leur
pouvoir.
La performance financière
Le principe supposé d'une corrélation entre
performance financière et performance sociétale ne s'impose pas.
Malgré de nombreuses études réalisées, aucune ne
prouve que les fonds ISR sont au moins aussi rentables que les fonds
classiques. D'ailleurs, même s'il existait une corrélation, cela
ne signifierait pas qu'il existe un lien de causalité entre le social et
le financier. Toutefois, il est établi que le choix d'investissement
étant plus réduit, le risque est plus fort
La gestion des fonds
Les gérants ne s'inscrivent pas dans une
démarche de rupture avec l'investissement classique. Pour eux, l'ISR
doit apporter quelque chose en plus de la gestion purement capitaliste. De la
même manière, les épargnants ne poursuivent pas
obligatoirement un objectif de transformation de l'entreprise vers plus de
responsabilité sociale.
Il existe différents modes de gestion qui donnent
à l'actionnaire un caractère plus ou moins activiste. La gestion
exclusive désigne des portefeuilles constitués exclusivement
d'entreprises ayant bénéficié d'une évaluation
positive. La gestion intégrée intègre des entreprises
ayant bénéficié d'évaluations positives à un
portefeuille d'entreprises classiques et les surpondère. Cette gestion
peut donner lieu à dialogue avec les dirigeants pour influencer les
stratégies (on parle alors d'actionnaires actifs).
Le positionnement des actionnaires
L'actionnaire peut être activiste ou citoyen, ce qui
engendre des modes d'action différents. L'actionnaire activiste cherche
un changement de pratiques en faisant usage de ses droits d'actionnaire.
L'actionnaire citoyen défend une cause indépendante de la
rentabilité par les mêmes moyens que l'actionnaire activiste
(ex : ONG).
2.2.2 La prise en compte de la RS par
l'entreprise sur le plan stratégique
2.2.2.1 Les différentes approches
stratégiques
La question de l'orientation de
l'entreprise
Le développement de la RSE ne va pas de soi pour toutes
les entreprises et doit donner lieu à étude. L'essor du DD peut
comporter certains avantages, tels que des gains de coûts, un
enrichissement des compétences de l'entreprise. Ces avantages sont
utilisés pour développer une approche
« gagnant-gagnant » (M. Capron et F. Quairel utilisent
l'appellation d'approche « Business Case 11(*)). Cette approche
développe l'idée que l'essor du développement durable dans
l'entreprise profite autant à l'entreprise qu'aux défenseurs du
développement durable. Par ailleurs, la littérature
managériale développe peu les inconvénients d'une prise en
compte du développement durable.
Mais beaucoup d'entreprises ne se laissent pas convaincre par
une stratégie de développement du DD et mettent en place des
stratégies d'évitement. Plusieurs éléments
conduisent à dire que la prise en compte du développement durable
n'est pas évidente pour toutes les entreprises. Elle donne lieu à
questionnement et nécessite une phase préalable d'analyse. Ainsi,
la prise en compte de la RSE élargit le nombre de partenaires à
prendre en compte, l'horizon temporel, implique un raisonnement sur la
rentabilité à long terme, nécessite un changement
d'évaluation des performances, donc du système d'information. La
prise en compte de la RSE entraîne de devoir faire face à des
difficultés concrètes.
D'autre part, les entreprises n'ont pas toutes la même
vulnérabilité par rapport à leur image, par rapport
à la pression des parties prenantes ; elles ne connaissent pas les
mêmes contraintes concurrentielles. Il existe donc un dilemme entre
performance financière et engagement sociétaux. Le management
stratégique consiste alors à arbitrer et à élaborer
des compromis.
Dés lors, l'approche « business
case » existe peut-être pour éviter le
développement d'une régulation contraignante
Les types de stratégie
La prise en compte de la RSE et du développement
durable se traduit par deux types de stratégie : les
stratégies substantielles (rapprocher l'entreprise des valeurs de la
société) et les stratégies symboliques (faire accepter les
comportements de l'entreprise par la société sans en modifier les
fondements). Les entreprises qui développent la RSE adoptent l'un de ces
trois positionnements : la responsabilité sociétale est
complètement séparée de l'activité
économique de l'entreprise ; des actions de responsabilité
sociétale sur des activités marginales de l'entreprise
(intégration faible) ; la dimension environnementale et
sociétale transforme le système de management (exemple :
éco-conception des produits). Plus le développement de la RSE
s'intègre dans la stratégie globale, plus il s'agit d'une
stratégie substantielle
Ainsi, la classification des approches stratégiques
permet de clarifier l'intention de l'entreprise quant à son niveau
d'engagement dans la logique de RSE. La stratégie de l'entreprise dans
ce domaine est d'abord définie par ce niveau d'engagement :
cherche-t-on un engagement sincère ou souhaite-t-on simplement donner
une image. De cette première prise de position découle une
intégration plus ou moins grande de la RSE dans la stratégie
globale de l'entreprise.
2.2.2.2 Les outils de management stratégique
L'efficacité de la mise en oeuvre d'une
stratégie passe par la mise en place d'un système de pilotage,
sans quoi il ne peut y avoir de véritable engagement dans la RSE. La
mise en oeuvre d'un système de pilotage de la RSE comporte des
défis ; tout d'abord parce que les outils restent encore largement
à construire ; ensuite parce qu'ils sont mis en place par des
hommes marqués par les logiques de performance économiques et
financières. Toutefois, la démarche traditionnelle de
contrôle de gestion peut être conservée tout en faisant
évoluer des outils existants.
Les principaux outils : balanced scorecard et
management des risques
Les deux principaux types d'outils sont les tableaux de bord
et le management du risque.
Avec le balanced scorecard est menée une tentative
d'instrumentalisation du management de la RSE. Cet outil permet
d'intégrer au pilotage d'autres dimensions que la dimension
financière. Un des derniers développements autour de cet outil
concerne l'axe « développement durable » qui lui a
été ajouté.
Le management des risques constitue un outil important de
management de la RSE dans la mesure où, même si la dimension
économique reste prédominante dans l'entreprise, le social et
l'environnemental peuvent engendrer des risques financiers à plus ou
moins long terme.
Autres outils
Le pilotage du capital intellectuel fait également
partie du management stratégique de la RSE. Le capital humain s'appuie
sur les compétences, la motivation, les capacités d'adaptation et
d'innovation du personnel. Le capital structurel porte sur les relations avec
les parties prenantes, l'organisation du travail, les procédures, la
culture et le potentiel d'innovation. Le capital intellectuel, qui comprend
à la fois le capital humain et le capital structurel, est
considéré comme un facteur majeur de création de valeur et
est, à ce titre, un outil de management stratégique de la RSE.
Ainsi, les entreprises suédoises ont instrumentalisé ces concepts
pour les piloter. La généralisation de cet outil reste toutefois
complexe.
Autres éléments utilisés pour le
management stratégique de la RSE
Aujourd'hui, il n'existe pas véritablement de mesure de
la performance globale, souvent parce que les différents outils sont mal
intégrés au sein de l'entreprise. Cette incohérence des
outils est liée à l'incontournable incohérence des
demandes des différentes parties prenantes. Ainsi, la mesure de la
performance globale reste souvent dans les discours. C'est un axe pourtant
important en matière de pilotage de la RSE puisqu'il permet notamment
d'intégrer les performances sociales, environnementales à la
performance financière.
Structures et procédures conditionnent les
modalités de prise en compte de la RSE. Les entreprises mettent en place
des moyens pour la mise en oeuvre de la RSE, notamment la fonction
développement durable (rôle fonctionnel tourné vers
l'extérieur ou vers la recherche d'opportunités
stratégiques). Les dénominations et les rattachements
hiérarchiques diffèrent d'une entreprise à l'autre. Ces
changements organisationnels traduisent les objectifs poursuivis par
l'entreprise, révélateurs de la nature de l'engagement pris en
matière de RSE. Ils sont également révélateurs de
la conception de la RSE. Après la mise en place des moyens, la question
de l'influence et du fonctionnement de la fonction développement durable
par rapport au reste de l'entreprise reste largement posée ; la
mise en place des comités permet en partie d'y répondre. Enfin,
les procédures impactent la manière dont la RSE est mise en
oeuvre et participent à la cohérence des différents
objectifs de l'entreprise (logique de fixation des limites de l'action).
Le management de la RSE prévoit une dimension de
dialogue avec les parties prenantes. Cette dimension peut bouleverser les
modalités d'exercice des relations sociales et de la gouvernance
d'entreprise. Cette ouverture vers de nouvelles parties prenantes ne satisfait
pas les syndicats, même si le principe de concertation n'est pas
contesté, ni par ces derniers, ni par les ONG. Les problématiques
liées au dialogue avec les PP sont au nombre de 3 : identifier et
choisir les PP ; définir les structures d'information et de
concertation ; définir les modèles et les règles de
discussion. Des espaces de concertation sont créés à un
niveau plus global pour répondre à ces questions.
Les entreprises passent à des réalisations
concrètes tout en maintenant le même type d'outil que ceux du
contrôle de gestion. Des organismes avancent pour améliorer toutes
ces initiatives, notamment à travers la standardisation des outils
2.2.3 Les outils de mise en oeuvre
Les types de dispositifs
Il existe un nombre très important de dispositifs,
développant des démarches différentes ; cette
multitude d'outils provoque une grande confusion. Les dispositifs de mise en
oeuvre poursuivent deux types de finalités. Un premier groupe de
dispositifs aide à la compréhension et au management de la RSE.
Un second groupe sert à crédibiliser l'image de l'entreprise
à l'extérieur. L'information est crédibilisée par
des standards internationaux ou par la législation. Dans les deux cas,
la qualité de l'information est primordiale, notamment quand elle est
destinée à l'extérieure.
Les spécificités du management du
développement durable
Les dispositifs sont, pour partie, mis en place dans un
objectif de certification. Dans ce cas, ils s'inscrivent dans la logique des
modèles de notation et d'évaluation des performances externes. Il
semble possible, d'après la littérature sur le sujet,
d'établir un modèle de management standard de la RSE. D'autre
part, les outils de management de la qualité sont bâtis sur les
mêmes principes que ceux du management de la RSE et il est mis en avant
un système de management du développement durable qui repose sur
un modèle standard. Mais les enjeux, l'étendue spatiale et
temporelles sont différents. De plus, l'objectif d'intégration
peut être plus ou moins étendu.
Les outils
normatifs
Le référentiel SD 21000 et la norme AA 1000 sont
des modèles de contrôle administratif et bureaucratique
insuffisamment orientés vers les résultats et vers un pilotage
effectif. En 2000, les normes ISO 9000 ont introduit la prise en compte de la
satisfaction des clients. Le référentiel SD 21000 a introduit la
prise en compte systématique des attentes de PP et fait du DD un
méta-principe qui doit conditionner l'ensemble de la démarche. La
norme AA 1000 (AccountAbility 1000) se donne comme principe d'intégrer
les autres normes existantes en matière sociale et environnementale, en
matière de qualité et en matière financière.
Les outils d'aide au
diagnostic
Le diagnostic peut concerner les pratiques ou les
résultats de l'entreprise. Il permet de définir des objectifs et
des plans d'action (pilotage vers les objectifs). Les outils de diagnostic
intègrent une dimension qualitative et non exclusivement
financière et donnent une vision large de la RSE. La première
phase du diagnostic donne une représentation des performances
sociétales de l'entreprise
Les outils de construction
de la crédibilité
Les règles et normes sont les outils d'accès
à la légitimation pour l'entreprise Faits : Les normes se
développent. Les normes concernent les 3 dimensions du
développement durable, le domaine social étant le moins
avancé. Nous pouvons citer les normes suivantes : séries des ISO
9000 (80') ; environnemental : ISO 14000, EMAS (90') ; risques
de santé et sécurité au travail : OHSAS 18001
(90') ; santé alimentaire : HACCP (90'). Les entreprises
développent d'autres types de démarches que les normes. Ces
démarches doivent être crédibilisées par des audits,
avec comme enjeu la construction d'une norme sociale internationale
Les audits
Les démarches volontaires des entreprises en terme de
RSE peuvent être remises en cause par les problématiques d'audits
et de vérification des engagements pris.
Tableau de synthèse des outils de mise en oeuvre
|
apports de l'outil
|
finalités
|
principes d'action
|
Les outils normatifs
|
|
|
|
référentiel SD 21000
|
a intégré une prise en compte
systématique des attentes de PP et fait du DD un méta-principe
qui doit conditionner l'ensemble de la démarche
|
intégrer dans la stratégie de l'entreprise des
finalités de DD et de RS
|
- joue le rôle d'un système intégrateur
des autres référentiels déjà présents dans
l'entreprise
- principe d'amélioration continue (donc sans
définition d'un niveau de performance à atteindre)
|
norme AA 1000
|
englobe les autres normes existantes en matière
sociale, environnementale, de qualité et de finance
|
amener l'entreprise à une intégration de toutes
les normes utilisées (notamment les nouvelles normes sociales et
environnementales)
|
- des principes normatifs inspiré de l'audit comptable
et des normes de processus pour valider les procédures mise en place
pour l'atteinte des objectifs fixés dans le cadre de cette norme
- mesure les progrès effectués (et non la
performance atteinte) en vue d'une amélioration permanente
|
Les outils de diagnostic
|
|
|
|
Le bilan sociétal (c)
|
concernait en premier lieu les entreprises de
l'économie sociale
|
- évaluer le comportement sociétal de
l'entreprise et amener à un développement du dialogue pour aller
vers plus de DD
- connaître le niveau d'adéquation entre
organisation et valeurs
|
- outil d'aide à la décision par
l'autodiagnostic sous forme d'une grille de question
- outil de concertation en servant de support de dialogue en
vue d'un changement de comportement
|
La SME Key
|
concerne les PME
|
faire en sorte que les PME se préoccupent de leur
responsabilité sociétale
|
outil d'aide en ligne sous la forme d'une grille de
question
|
L'indice social danois
|
|
évaluer dans quelle mesure l'entreprise est à la
hauteur de ses responsabilités sociales
amener l'entreprise à réfléchir sur son
engagement social
|
utilisation d'une grille de questions
|
Les outils de construction de la crédibilité
|
|
|
|
Les codes de conduite
|
|
anticiper les initiatives des pouvoirs publics
|
identifier et satisfaire les mouvements de consommateurs et
citoyens
|
La certification sociale
|
instaure une démarche de normalisation en
matière sociale et de certification
|
donner une crédibilité en terme de
responsabilité sociale
|
démarche de normalisation puis de certification par des
intervenants agréés
|
Social Accountability 8000
|
|
|
|
ISO 10011-2 et 19011
|
entreprises européennes
|
|
|
La labellisation sociale
|
|
donner une crédibilité en terme de
responsabilité sociale
|
certification qu'un produit ou qu'un service est conforme
à des caractéristiques décrites dans un
référentiel (CdC) avec réalisation de contrôles
|
|
|
|
|
3 Deuxième partie : les objectifs RH dans le
cadre de la RSE ; développement de l'objectif
d'employabilité
3.1
Définition de l'employabilité
3.1.1 Historique de la notion
d'employabilité 12(*)
Aux Etats-Unis
Le concept d'employabilité a évolué avec
le temps. Son apparition remonte au début du XXème siècle
en Angleterre mais son véritable développement a lieu dans les
années 1930 aux Etats-Unis en parallèle avec l'augmentation du
chômage. L'employabilité est alors appréciée
à partir de la mesure des capacités de chacun à occuper un
poste. En Angleterre comme aux Etats-Unis, on identifie deux catégories
parfaitement distinctes de personnes : les « employables »
qui pourront prétendre à un emploi stable et les
« inemployables », destinés à l'aide sociale
ou à la charité.
Dans les années 1950 - 1960, la catégorie des
employables s'affine grâce à un ensemble de tests médicaux
qui permet de mieux apprécier la distance qui sépare un individu
du travail ainsi que sa capacité productive. Les mesures
réalisées concernent en premier lieu les aptitudes physiques.
Les années 1960 - 1980 sont marquées, toujours
aux Etats-Unis, par l'introduction de la notion de comportement au travers de
tests réalisés auprès des individus pour mesurer leur
employabilité. Ces tests conduisent à l'élaboration de
plans de développement de l'employabilité.
En France
En France, à cette même période,
l'employabilité est abordée sous l'angle de calculs statistiques
définissant des probabilités de retour à l'emploi pour des
catégories de population ; ces dernières sont construites
à partir de critères dont on pense qu'ils impactent
`employabilité (l'âge, le sexe, la qualification ...).
Dans les années 1980 - 1990, des travaux
français s'attardent sur la problématique de «
compréhension des processus globaux et collectifs de sélection
des demandeurs d'emploi sur le marché du travail ».
L'employabilité représente alors la capacité à
sortir du chômage. Le sociologue Raymond Ledrut met en évidence la
distinction entre l'employabilité moyenne, qui dépend des
conditions générales de l'économie et
l'employabilité différentielle, qui dépend des aptitudes
et caractéristiques du travailleur. Avec l'augmentation du
chômage, des outils sont conçus pour travailler
spécifiquement sur l'employabilité différentielle. Enfin,
l'employabilité devient partie intégrante de la politique sociale
de certaines entreprises, étendant ainsi cette notion aux travailleurs,
au-delà des chômeurs. Il est alors mis en évidence la
responsabilité conjointe des individus, des entreprises et de
l'état vis-à-vis de l'employabilité.
Tableau synthétique de l'évolution
retranscrite
|
Etats-Unis
|
France
|
1930
|
|
|
Sur quels éléments porte la mesure
|
caractéristiques physiques
|
|
Périmètres de mesure
|
l'ensemble de la population active
|
|
Objectifs liés à la mesure de
l'employabilité
|
déterminer la capacité d'une personne à
occuper un emploi
|
|
Objectifs liés au développement de
l'employabilité
|
- - -
|
|
1950 - 1960
|
|
|
Sur quels éléments porte la mesure
|
caractéristiques physiques par des tests
médicaux
|
|
Périmètres de mesure
|
personnes défavorisées
|
|
Objectifs liés à la mesure de
l'employabilité
|
apprécier la distance à l'emploi d'une personne
pour un métier donné
|
|
Objectifs liés au développement de
l'employabilité
|
- - -
|
|
1960 - 1980
|
|
|
Sur quels éléments porte la mesure
|
caractéristiques physiques, sociales, comportements,
critères d'intégrabilité professionnelle (ex :
habillement)
|
caractéristiques personnelles
|
Périmètres de mesure
|
l'ensemble de la population active
|
les demandeurs d'emploi
|
Objectifs liés à la mesure de
l'employabilité
|
apprécier l'attractivité d'un individu aux yeux
des employeurs
|
calculer une probabilité de retour à l'emploi
par catégorie de personnes
|
Objectifs liés au développement de
l'employabilité
|
construire des plans de développement de
l'employabilité
|
|
1980 - 1990 : 1ère
phase
|
|
|
Sur quels éléments porte la mesure
|
|
1 - caractéristiques des conditions
générales de l'économie
2 - caractéristiques personnelles
|
Périmètres de mesure
|
|
les demandeurs d'emploi
|
Objectifs liés à la mesure de
l'employabilité
|
|
mesurer la vulnérabilité au chômage de
certains groupes sociaux
|
Objectifs liés au développement de
l'employabilité
|
|
|
1980 - 1990 : 2ème
phase
|
|
|
Sur quels éléments porte la mesure
|
|
caractéristiques personnelles
|
Périmètres de mesure
|
|
les demandeurs d'emploi
|
Objectifs liés à la mesure de
l'employabilité
|
|
mesurer la vulnérabilité au chômage de
certains groupes sociaux
|
Objectifs liés au développement de
l'employabilité
|
|
développer des programmes pour traiter les
désavantages de chaque groupe
réaliser des bilans d'évaluation
construire des passerelles entre les professions
|
3.1.2 Analyse des différentes
approches
Afin de mieux appréhender la notion
d'employabilité, nous analysons les principaux travaux qui ont
été réalisés depuis l'apparition de cette notion
dans les années 1930.
Pour ce faire, nous caractériserons les travaux selon 4
critères, chacun se déclinant en deux options : A (option
caractérisant une forme de simplicité des travaux) ou B
(option caractéristique de travaux plus élaborés).
1 - le périmètre de mesure
retenu
|
|
A - périmètre réduit
- ex : les chercheurs d'emploi
|
B - périmètre large
ex : l'ensemble de la population active
|
2 - la nature des critères
mesurés
|
|
A - critères sans action possible sur le
critère
ex : l'âge
|
B - critères avec ou sans action possible sur ce
dernier
|
3 - le niveau de diversité du
résultat
|
|
A - résultat tranché
- employables / non employables
|
B - résultats nuancés
- distinctions selon les métiers
- plus ou moins employable pour un métier
donné
|
4 - la finalité des travaux
|
|
A - constat du niveau d'employabilité
|
B - action de développement de
l'employabilité
|
Ces critères sont analysés pour chaque situation
retraçant l'évolution de la notion d'employabilité dans le
paragraphe 3.2.1.1.
|
|
Etats-Unis
|
|
France
|
1930
|
|
|
|
|
1 - périmètre
|
B
|
toute la population active
|
|
|
2 - critères
|
A
|
caractéristiques physiques
|
|
|
3 - résultat
|
A
|
employables / inemployables
|
|
|
4 - finalités
|
A
|
déterminer la capacité d'une personne à
occuper un emploi
|
|
|
1950 - 1960
|
|
|
|
|
1 - périmètre
|
A
|
personnes défavorisées
|
|
|
2 - critères
|
A
|
caractéristiques physiques par des tests
médicaux
|
|
|
3 - résultat
|
B
|
résultats nuancés
|
|
|
4 - finalités
|
A
|
apprécier la distance à l'emploi d'une personne
pour un métier donné
|
|
|
1960 - 1980
|
|
|
|
|
1 - périmètre
|
B
|
toute la population active
|
A
|
les chercheurs d'emploi
|
2 - critères
|
B
|
caractéristiques physiques, sociales, comportements,
critères d'intégrabilité professionnelle (ex :
habillement)
|
A
|
caractéristiques personnelles
|
3 - résultat
|
B
|
résultats nuancés
|
B
|
résultats nuancés
|
4 - finalités
|
B
|
- apprécier l'attractivité d'un individu aux
yeux des employeurs
- construire des plans de développement de
l'employabilité
|
A
|
calculer une probabilité de retour à l'emploi
par catégorie de personnes
|
1980 - 1990 :
1ère phase
|
|
|
|
|
1 - périmètre
|
|
|
A
|
les chercheurs d'emploi
|
2 - critères
|
|
|
A
|
- caractéristiques des conditions
générales de l'économie
- caractéristiques personnelles
|
3 - résultat
|
|
|
B
|
résultats nuancés
|
4 - finalités
|
|
|
A
|
mesurer la vulnérabilité au chômage de
certains groupes sociaux
|
1980 - 1990 : 2ème
phase
|
|
|
|
|
1 - périmètre
|
|
|
A
|
les chercheurs d'emploi
|
2 - critères
|
|
|
B
|
caractéristiques personnelles
|
3 - résultat
|
|
|
B
|
résultats nuancés
|
4 - finalités
|
|
|
B
|
mesurer la vulnérabilité au chômage de
certains groupes sociaux
développer des programmes pour traiter les
désavantages de chaque groupe
réaliser des bilans d'évaluation
construire des passerelles entre les professions
|
Nous constatons qu'au fur et à mesure, les travaux sont
de plus en plus élaborés, tant sur le plan des critères,
des résultats que des finalités : on intègre des
critères qui peuvent être améliorés (ex : le
niveau de qualification) ; les résultats sont de plus en plus fins,
jusqu'à l'évaluation de l'employabilité de groupes
très ciblés ; les finalités intègrent des
objectifs de développement de l'employabilité.
Les deux types de finalité sont cumulatifs : soit
les travaux ne servent qu'une finalité de constat, soit on ajoute
à cette dernière une finalité de développement de
l'employabilité.
Les choix des critères et des finalités sont
partiellement liés : une finalité de développement de
l'employabilité sera plus facile à mettre en oeuvre s'il est
possible de faire évoluer les niveaux des critères retenus
(exemple : le niveau de qualification, grâce à l'outil
« formation »). Le développement de
l'employabilité par un travail sur des critères non modifiables
est possible mais sa mise en oeuvre est plus complexe car il nécessite
une action sur un périmètre plus large que l'individu
(exemple : le développement de l'employabilité des plus de
50 ans implique de modifier la perception qu'ont les employeurs de cette
catégorie de population ; le travail de changement s'opère
donc sur le périmètre global des employeurs).
Concernant le périmètre d'analyse retenu, un
périmètre englobant les personnes en poste permet de mener des
actions de type préventif tandis que la prise en compte des chercheurs
d'emploi seuls signifie que l'on se situe sur un mode de type gestion de crise,
donc sur un développement de l'employabilité moins complet.
Nous pouvons donc, à partir de ces remarques, conclure
que les études concernant l'employabilité seront d'autant plus
abouties :
- qu'elles porteront sur l'ensemble de la population active,
permettant une approche préventive
- qu'elles intégreront à la fois une
finalité de mesure et une finalité de développement, afin
d'opérer un changement
- qu'elles porteront en premier lieu sur des critères
modifiables, ce qui facilitera la mise en oeuvre du développement de
l'employabilité.
3.1.3 Définition contemporaine de
l'employabilité 13(*)
Nous retiendrons la définition que le cabinet
Développement et Emploi utilise depuis 1993 et qui a permis de
développer le concept de l'employabilité, à savoir :
« compétences du salarié et conditions de gestion des
ressources humaines, nécessaires et suffisantes, lui permettant à
tout moment de retrouver un emploi, à l'intérieur ou à
l'extérieur de l'entreprise, dans des délais et des conditions
raisonnables. »
Afin de rendre la définition de l'employabilité
plus dynamique, Alain Finot propose une définition inspirée de
celle du cabinet Développement et Emploi : « Développer
l'employabilité, c'est maintenir et développer les
compétences des salariés et les conditions de gestion des
ressources humaines leur permettant d'accéder à un emploi,
à l'intérieur ou à l'extérieur de l'entreprise,
dans des délais et des conditions favorables. » 14(*)
L'employabilité se construit d'abord sur des
compétences, c'est-à-dire des savoir-faire validés et
exercés. Celles-ci doivent être du plus en plus mises à
jour, au gré des évolutions techniques et de marchés. Les
compétences transversales, communes à plusieurs métiers
sont de plus en plus valorisées. Ainsi, l'employabilité consiste
à faire correspondre le plus possible les offres de compétences
du marché du travail avec les compétences demandées par
les entreprises.
Les conditions de gestion des ressources humaines font
référence aux outils mis en place pour le développement de
l'employabilité, dont la formation continue constitue un
élément clé, à côté de la
mobilité ou des outils d'évaluation (notamment
d'évaluation des compétences).
L'objectif de « retrouver un emploi », dans la
définition du cabinet Développement et Emploi, met en
évidence le fait qu'on se situe moins dans une situation d'anticipation
de crise que de gestion de crise. La définition d'A. Finot rend, sur
cette question, le concept plus dynamique.
3.2 La
problématique de développement de l'employabilité
3.2.1 Les facteurs de
l'employabilité
Pour identifier les conditions de développement de
l'employabilité, il est nécessaire de rechercher les facteurs qui
influencent positivement ou négativement le niveau
d'employabilité. Nous les organiserons autour de deux catégories
: ceux sur lesquels il est impossible d'agir et ceux sur lesquels, au
contraire, il est possible de mener une action. Ces derniers constituent alors
de véritables leviers.
Facteurs sur lesquels aucune action n'est possible (ou
très limitée, ou complexe)
- l'âge, le sexe, la situation familiale (pour les
femmes)
- la formation initiale
- l'appartenance sociale, ethnique, culturelle d'origine ou
actuelle
- certaines caractéristiques physiques ou
esthétiques
Ces quatre premières catégories se rapportent
aux individus. Il est également possible d'y ajouter un facteur se
rapportant à l'entreprise concernant la reconnaissance ou l'image par le
marché du travail de l'expérience professionnelle acquise dans
une entreprise donnée.
Facteurs sur lesquels il est plus ou moins possible
d'agir
- l'éducation, le comportement
- les compétences (regroupant l'expérience
professionnelle et la qualification)
- certaines caractéristiques physiques ou
esthétiques
Là encore, ces trois catégories se rapportent
aux individus. D'autres facteurs caractérisant le marché du
travail sont identifiables. Nous noterons :
- le dynamisme du marché de l'emploi
général
- le dynamisme du marché de l'emploi du secteur
d'activité du salarié
Dans la liste de facteurs que nous avons tentée
d'ébaucher, les caractéristiques identifiées se rapportent
à trois entités distinctes : l'individu, l'entreprise et le
marché du travail. L'état des lieux de ces
caractéristiques permet d'apprécier le niveau
d'employabilité. Et c'est en modifiant l'état de ces trois
entités qu'il est possible de faire évoluer le niveau
d'employabilité.
3.2.2 Les acteurs de
l'employabilité
Pour agir sur ces facteurs de l'employabilité, nous
pouvons mettre en oeuvre des outils dont l'usage est à l'initiative de
trois acteurs : l'individu, l'entreprise et la société
(relayée par l'Etat).
Ces trois acteurs peuvent également être
identifiées en tant que partie prenante, c'est-à-dire qu'elles
ont toutes trois des intérêts dans l'évolution du niveau
d'employabilité. Pour chacune d'elle, nous identifierons quelle
employabilité elles défendent (chacun ne défend pas, par
exemple, l'employabilité du même groupe de personne) ; il est
également indispensable que soit préciser quels sont les
objectifs poursuivis par chacune des parties prenantes et à quel
périmètre de compétences cet intérêt de
développement fait référence (nous distinguerons à
ce niveau deux types de périmètre : des compétences
spécifiques à l'entreprise ou tout type de compétences).
L'individu
L'individu a intérêt à développer
sa propre employabilité afin de garantir ses revenus, voire de les
augmenter sur le moyen ou le long terme. Il sera susceptible de
développer toute compétence correspondant à son profil ou
à ses aspirations.
L'entreprise
L'entreprise a un intérêt limité quant au
développement de l'employabilité. Elle a avant tout besoin d'un
personnel performant. Or, une amélioration de la performance des
individus va, de fait, améliorer leur employabilité.
L'employabilité est en quelque sorte un sous-produit de
l'amélioration de la performance des individus. Elle va donc, pour ces
besoins de performance, être amenée à développer
l'employabilité. En ce sens, nous pouvons dire que l'entreprise a
intérêt à développer l'employabilité de son
propre personnel ; elle a également intérêt à voir
se développer l'employabilité d'individus extérieurs
à l'entreprise disposant de compétences dont elle a besoin de se
munir. Dans les deux cas, l'employabilité concernera des
compétences spécifiques à l'entreprise. Elle a d'autant
plus intérêt à développer des compétences qui
lui sont spécifiques qu'il existe un risque de départ des
individus bénéficiant d'une très bonne
employabilité vers d'autres employeurs afin, pour ces salariés,
de bénéficier d'une augmentation de revenus. L'entreprise, dans
ce cas, fait intervenir d'autres leviers afin de fidéliser ses
salariés (niveau de salaire mais également avantages en nature,
souplesse des modalités d'organisation du travail, etc.). Il est
intéressant de remarquer qu'un meilleur niveau d'employabilité
peut signifier pour un individu la possibilité de prétendre
à une plus grande rémunération. Il faut donc que
l'entreprise augmente l'employabilité de son personnel dans la limite de
ce qu'elle accepte de rémunérer pour conserver son
salarié, compte tenu de la nouvelle « valeur » du
salarié. Celui constitue un autre type de limite de l'entreprise
à l'augmentation de l'employabilité.
L'entreprise a également intérêt à
développer l'employabilité en ce qui concerne le personnel dont
elle souhaite se séparer car il ne possède pas ou plus les
compétences dont l'entreprise a besoin ou parce que l'entreprise est en
sureffectif. Dans ce cas, le développement de l'employabilité
recherché par l'entreprise pourra se faire vers n'importe quel type de
compétences.
La société
La société a, quant à elle,
intérêt à développer l'employabilité de
l'ensemble des salariés sur tout type de compétences afin de
limiter l'impact social d'une perte d'emploi (limitation des indemnités
chômage mais également toutes les nuisances plus ou moins
directement associées à la perte d'un emploi - dépression,
alcoolisme, suicide, échec scolaire des enfants,
désintégration sociale, etc.).
3.2.3 Les outils de
l'employabilité
Les principaux outils de développement de
l'employabilité qu'il est possible d'identifier sont les suivants :
- la formation continue
- la mobilité
- l'organisation du travail
- la gestion et l'évaluation des compétences
- la politique de l'emploi
Ils permettent d'agir sur certains facteurs de
l'employabilité.
Nous ne traiterons pas dans nos travaux les actions qui
permettent d'agir sur des facteurs plus culturels tels que le regard de la
société sur telle ou telle partie de la société.
3.2.4 Tableau de synthèse
3.2.5 Le processus de
développement de l'employabilité
Lorsque nous avons évoqué la notion «
d'acteur » dans le paragraphe précédent, il s'agissait de
l'entité à l'initiative de l'action de développement,
autrement dit, l'entité qui en était le moteur. Mais en terme de
réalisation, plusieurs acteurs décident, agissent sur l'ensemble
du processus. Ainsi, l'aboutissement de l'action, et son résultat
positif, c'est-à-dire un accès à l'emploi dans des
délais et des conditions favorables, pour reprendre la formulation de A.
Finot, sont conditionnés par une cohérence du partage de
l'action entre les trois acteurs précédemment identifiés
et par une bonne coordination. Ces impératifs sont rarement
observés, notamment en ce qui concerne la cohérence du partage de
l'action en fonction des intérêts de chacun.
Afin qu'une action de développement de
l'employabilité produise un effet positif, il est nécessaire
d'identifier les étapes du processus et de cerner le rôle jouer
à chaque étape par les différents acteurs. Nous
présentons dans le tableau suivant un extrait des questions qui peuvent
être posées ; nous aurons l'occasion de le détailler
ultérieurement, au moment du développement concernant
l'organisation cible.
ETAPES DU PROCESSUS
|
QUESTIONS
|
Initiation
|
Qui est à l'origine de la demande de l'action ?
|
Décision de financement
|
Qui finance ?
|
Décision de réalisation
|
Qui décide de la nature de l'action à mener ?
|
Préparation
|
Qui choisit l'action, ses modalités de mise en oeuvre
?
|
Réalisation
|
Qui bénéficie de l'action ?
|
L'individu actif constitue une partie prenante
particulière dans la problématique de l'employabilité
puisque c'est sur lui que le changement va s'opérer. Les
définitions retenues nous le confirment : l'employabilité est le
fait, pour un individu actif d'obtenir un emploi dans des délais et
conditions qui lui sont favorables.
Une des difficultés de mise en oeuvre et de
succès des actions de développement de l'employabilité
réside probablement là : les outils de l'employabilité et
leur gestion, les décisions de leurs mise en oeuvre sont aujourd'hui
laissés à l'initiative de l'entreprise alors que cette
dernière :
- n'est pas la seule, loin de là, à avoir des
intérêts dans le développement de l'employabilité
- n'est pas la partie prenante sur laquelle s'opère le
changement
Il existe ainsi une incohérence dans la mesure
où dans bon nombre de cas, l'entité qui maîtrise les outils
de l'employabilité n'est pas celle qui en est le
bénéficiaire. Et même dans les cas où elle en est
bénéficiaire, le changement ne porte pas sur l'entité qui
maîtrise les outils puisque c'est toujours sur l'individu que porte le
changement.
Par ailleurs, que dire des individus actifs qui ne sont pas en
poste ? Existe-t-il des dispositifs en dehors de l'entreprise qui permettent de
développer l'employabilité ? Cette question est d'autant plus
importante que les individus sont de plus en plus souvent amenés
à vivre des ruptures dans leur vie professionnelle. Ils peuvent se
trouver à plusieurs reprises au cours de leur carrière
professionnelle en dehors d'une structure professionnelle et devoir envisager,
du fait de l'évolution plus importante des métiers, une
reconversion pour retrouver un nouvel emploi.
Plusieurs outils sont laissés aujourd'hui à la
responsabilité de l'entreprise alors qu'ils pourraient être
réenvisagés pour être en responsabilité
partagée par l'entreprise et l'individu. Certains salariés
s'approprient déjà ces outils mais ils sont encore minoritaires.
Cette appropriation se fait d'ailleurs souvent dans le cadre d'un changement
professionnel subi. D'autre part, elle est souvent partielle puisque la nature
des actions à engager est régulièrement
décidée par d'autres entités (l'entreprise ou
l'état à travers les modalités des plans sociaux, par
exemple).
Il est possible qu'il faille envisager différentes
organisations à partir de la notion de parties prenantes puisque nous
avons vu qu'au-delà de leur intérêt commun pour le
développement de l'employabilité, elles ne partageaient pas
forcément totalement leurs objectifs.
|
Individu
|
Entreprise
|
Etat
|
Initiation de l'action
|
X
|
X
|
|
Décision de financement
|
X
|
X
|
X
|
Décision de réalisation
|
X
|
X
|
X
|
Préparation
|
X
|
X
|
X
|
Réalisation
|
X
|
|
|
3.2.6 Les difficultés de mise en
oeuvre du développement de l'employabilité
Un mouvement collectif des entreprises dans ce sens permet de
mieux préparer les transitions professionnelles de chaque individu,
rendues fréquentes :
- par une évolution plus rapide des entreprises pour
répondre le plus vite possible aux exigences du marché ; par une
évolution des technologies également plus rapide ;
- par le mouvement de globalisation qui offre des
opportunités de développement plus importantes, mais
également plus risquées ;
- par une approche plus libérale des activités
économiques qui autorise plus de flexibilité, synonyme
d'insécurité pour les salariés.
L'entreprise récupère son investissement en
intégrant des individus qui ont été mieux
préparés au changement professionnel au sein de leur
précédente entreprise.
Les entreprises trouveraient bénéfice à
adopter cette nouvelle conception de la formation mais les
bénéfices restent hypothétiques et elles peuvent continuer
à fonctionner de manière non intelligente.
Du point de vue des nuisances créées, les
entreprises en adoptant des comportements impliquant plus de
flexibilité, provoquent plus d'insécurité, des ruptures de
vie professionnelle, dont les conséquences sont assumées pour
partie par les entreprises mais, pour l'essentiel, par la société
et les individus eux-mêmes.
Cette nouvelle conception permet d'entrer dans un cercle
vertueux où l'individu voit que l'entreprise prend en compte les
intérêts des individus à côté de ses propres
intérêts ce qui le pousse à donner à son tour plus
à l'entreprise.
D'autres difficultés de mise en oeuvre de ce type
d'action sont relatives aux individus actifs eux-mêmes. Développer
l'employabilité est le moyen de faire face au risque pour chaque
individu actif de se voir priver d'emploi pendant une période plus ou
moins longue. Nous savons que ce risque est de plus en plus présent du
fait d'une plus grande évolution des activités des entreprises,
provoquant l'obsolescence des métiers ou des compétences, du fait
d'une plus grande flexibilité et instabilité des activités
économiques (notamment par le transfert des activités fortement
utilisatrice de main d'oeuvre vers des pays émergents), amenant les
entreprises à licencier plus qu'auparavant. Pourtant, une réelle
prise de conscience de la nécessité de faire face
individuellement à ce risque tarde à venir. En effet, aucun
dispositif n'existe aujourd'hui qui permette d'agir simplement en ce sens. Ce
type d'engagement, qui s'inscrit dans le temps, apparaît pour beaucoup
difficilement conciliable avec l'activité professionnelle, la vie
familiale, les divers engagements dans la vie sociale et les éventuelles
activités de loisirs. L'importance de la tâche à accomplir,
les obstacles, contraintes auxquels il faudra faire face pour entamer une
réflexion autour de sa propre employabilité, sans même
parler d'actions de développement, sont tels que bien des individus
préfèrent vivre avec le risque d'une perte d'activité,
d'autant plus qu'elle reste dans l'esprit de chacun tout à fait
hypothétique. Il sera alors toujours tant d'entreprendre des actions de
formation, d'évaluation des compétences une faut le risque
réalisé.
Un autre obstacle réside dans la manière dont
est perçu le concept d'employabilité par les individus. Il
renvoie immédiatement au risque de perte d'emploi et est ainsi
chargé de connotations négatives au lieu d'y voir
l'opportunité, dans le temps, d'une meilleure évolution
professionnelle au plus proche de ses aspirations.
Enfin, la difficulté de mise en oeuvre du
développement de l'employabilité du fait des individus actifs
s'explique également par le refus encore présent de prendre une
responsabilité qui était jusqu'ici celle des entreprises : la
responsabilité de la garantie de l'emploi. Nous sommes passés
d'une responsabilité de l'entreprise de garantir l'emploi à une
responsabilité partagée de garantir l'employabilité dans
que ce changement n'est véritablement donné lieu à une
réelle prise de conscience.
3.2.7 Les conditions de
développement de l'employabilité
Une prise de conscience des enjeux par le
salarié
La condition première au développement de
l'employabilité est la prise de conscience par le salarié qu'il
lui est aujourd'hui indispensable d'entreprendre des actions dans ce sens car
les risques de désagréments dans son poste actuel sont trop
importants pour qu'il accepte de les subir sans chercher à les limiter.
Le premier de ces désagréments bien sûr est la perte de cet
emploi mais il n'est pas le seul ; une évolution du contenu ou des
conditions d'exercice de son poste, un changement managérial ou de
culture d'entreprise sont autant d'évolutions possibles qui peuvent
amener le salarié à souhaiter occuper un nouveau poste. Un
meilleur niveau d'employabilité l'aidera dans cette démarche.
Cette prise de conscience implique de positionner le
développement de l'employabilité comme une finalité dans
laquelle vient s'inscrire un ensemble d'actions que nous avons passé en
revue en développant le paragraphe sur les outils. Nous soulignons
là l'importance pour le salarié de systématiquement
replacer les actions réalisées (formations, acquisitions de
nouvelles compétences) dans cette finalité afin d'en optimiser
l'efficacité par plus de cohérence d'action et une meilleure
synergie. Une conception nouvelle de la formation, par exemple, afin qu'elle
contribue à améliorer le niveau d'employabilité, ne
donnera pas de résultat concluant si l'individu ne partage pas cet
objectif de maintien de son niveau d'employabilité.
Cette prise de conscience est aujourd'hui encore très
limitée : la complexité du travail à accomplir
apparaît bien lourde au regard du risque encouru de se trouver dans une
position professionnelle inconfortable. En effet, aucun outil n'est directement
mis à la disposition du salarié pour le faire progresser dans
cette voie. D'autre part, les discours politiques, patronaux ou syndicaux sur
cette question se limitent dans le meilleur des cas à quelques grands
principes, n'incitant guère à l'action.
Une responsabilité partagée
Une autre condition nécessaire au développement
de l'employabilité est la responsabilité partagée de
l'individu, de l'entreprise et l'état dans le développement de
cette employabilité. Le caractère partagé de cette
responsabilité est nécessité par l'organisation du process
actuel qui implique souvent ces trois acteurs à la fois, à des
niveaux différents (décisionnel, financeur,
bénéficiaire).
Une volonté partagée
Cette responsabilité partagée doit s'accompagner
d'une volonté partagée par chacun (individu, mais aussi
entreprise et société, à travers l'état) de mettre
en oeuvre des actions qui assureront une cohérence entre l'offre de
compétences des salariés et les besoins du marché.
4 Troisième partie : Propositions pour un
développement de l'employabilité
La meilleure connaissance que nous avons acquise des concepts
de responsabilité sociale de l'entreprise et d'employabilité nous
permet, au cours de cette troisième partie, de questionner le
développement de l'employabilité lorsque cette dernière
est analysée dans le cadre théorique de la responsabilité
sociale de l'entreprise.
4.1
Réflexion autour de la relation entre responsabilité sociale de
l'entreprise et employabilité
4.1.1 Réflexion sur l'existence
de la RSE
Si la définition du concept de RSE est simple à
établir, la question de son champ d'application et de sa mise en oeuvre
sont des points qui font encore largement débat si l'on en juge par les
écrits sur le sujet et l'existence de plusieurs approches
théoriques bien différentes.
Poser la question de la RSE, c'est poser nécessairement
à un moment donné la question de la légitimité de
son existence puisque nous voyons qu'elle n'est pas reconnue par tous et que
même si ce concept est reconnu, son application conduit à des
orientations bien différentes. Et poser la question de l'existence de la
RSE, c'est poser la question des conditions de cette existence même.
Cet aspect nous semble devoir être approfondi afin qu'il
nous donne quelques pistes de réflexion pour mieux situer
l'employabilité par rapport au champ d'application possible de la
responsabilité sociale de l'entreprise.
Une des idées importantes que nous défendrons au
cours de cette réflexion est qu'il existe des conditions de premier
niveau qui permettent de définir des frontières plus
étroites au champ de responsabilité sociale de l'entreprise
discuté dans le cadre des approches théoriques.
4.1.1.1 Une condition préalable : un fait
générant un impact sociétal
Pour envisager la notion de responsabilité sociale de
l'entreprise, il est nécessaire qu'existe un fait
généré dans le cadre de l'entreprise, entraînant un
impact sur son environnement, donc sur la société (d'où la
notion d'impact sociétal). Un tel impact appartient à l'une de
ces 3 catégories : économique, sociale ou
environnementale.
L'entreprise peut générer des impacts positifs
(dont elle pourrait tirer bénéfice si elle en est estimée
responsable) ou des impacts négatifs (dont elle aura à assumer
les conséquences en cas de mise en responsabilité). Lorsque l'on
aborde la question de la responsabilité sociale de l'entreprise, nous
nous concentrons sur les impacts néfastes puisqu'en matière de
reconnaissance d'une responsabilité, les impacts positifs ne posent
généralement pas de difficultés.
Afin de compléter l'analyse sur cette première
condition, il est nécessaire de faire la distinction entre les faits qui
représentent des réalisations (que l'on peut appeler des actes)
et les faits qui représentent des non réalisations (que l'on
pourrait appeler des « non-actes »). Dans ce dernier cas,
c'est le fait de ne pas faire une action qui génère l'impact
néfaste. Nous verrons que l'introduction de conditions
supplémentaires se fait de manière différente selon que
l'on est dans le cas d'un acte ou d'un non-acte.
4.1.1.2 Autres conditions d'existence de la RSE
Dans le cas des actes
Tous les actes générés dans le cadre de
l'entreprise et ayant des impacts néfastes n'entrent pas dans le champ
de responsabilité de l'entreprise. Pour clarifier cet aspect, nous
introduisons les critères suivants :
- l'acte est ou n'est pas réalisé par
l'entreprise (autrement dit, l'acte est réalisé avec les moyens
de l'entreprise)
- l'acte fait partie ou ne fait pas partie de
l'activité normale de l'entreprise
Nous aboutissons à l'existence des cas
suivants :
1er type de conditions :
- l'acte n'est pas le fruit d'une réalisation de
l'entreprise ; l'acte générant l'impact néfaste est
en général issu de l'intervention d'un élément
extérieur (événement naturel, malveillance) ;
à partir de ce cas, deux points de vue peuvent exister :
o l'entreprise ne pouvait prévoir l'acte ; dans ce
cas, nous disons que la responsabilité de l'entreprise n'existe pas
o l'entreprise pouvait prévoir l'acte ; nous
disons que ce cas est susceptible d'entrer dans le champ de la RSE
- l'acte est le fruit d'une réalisation de
l'entreprise : l'acte peut entrer dans le champ de la RSE sous
réserve de conditions complémentaires ci-dessous
2ème type de
conditions complémentaires :
- l'acte ne s'inscrit pas dans l'activité
normale de l'entreprise ; il pourra s'agir par exemple d'une erreur
humaine ou d'une défaillance d'un matériel ; comme dans le
cas précédent, deux points de vue peuvent exister :
o l'entreprise ne pouvait prévoir l'acte ; dans ce
cas, nous disons que la responsabilité de l'entreprise n'existe pas
o l'entreprise pouvait prévoir l'acte ; nous
disons que ce cas est susceptible d'entrer dans le champ de la RSE
- l'acte fait partie de l'activité normale de
l'entreprise ; l'acte est organisé par l'entreprise ; nous
disons que ce cas est susceptible d'entrer dans le champ de la RSE ;
certains de ces actes entrent même sans discussion dans le champ de la
responsabilité sociale de l'entreprise ; ils sont mis en oeuvre de
manière obligatoire et ne sont d'ailleurs en général pas
identifié comme entrant dans le champ de la RSE car ils sont
intégrés à cadre différent, légal cette
fois-ci (nous pourrons citer, par exemple, les obligations légales de
l'entreprise en matière de congé maternité)
Pour définir si un fait donné est susceptible
d'entrer dans le champ possible de la RSE, le fait doit répondre aux
conditions suivantes :
1er scénario
|
A le fait génère un impact sociétal
néfaste, et
B le fait est généré par l'entreprise,
et
C le fait entre dans le cadre de l'activité normale de
l'entreprise
|
2ème scénario
|
A le fait génère un impact sociétal
néfaste, et
B' le fait n'est pas généré par
l'entreprise mais il est prévisible
|
3ème scénario
|
A le fait génère un impact sociétal
néfaste, et
B le fait est généré par l'entreprise,
et
C' le fait n'entre pas dans le cadre de l'activité
normale de l'entreprise mais il est prévisible
|
Dans ces scénarios, une discussion autour des
différentes approches théoriques peut s'engager. En dehors de ces
cas, le fait considéré n'entre pas dans le champ d'application de
la RSE.
Dans le cas des non-actes
Là encore, tous les non-actes ou
non-réalisations observés dans le cadre de l'entreprise et
générant des impacts néfastes n'entrent pas dans le champ
de la responsabilité sociale de l'entreprise. Pour déterminer
lesquels peuvent être identifiés comme susceptibles
d'intégrer ce champ, nous introduisons les critères
suivants :
- l'entreprise peut ou ne peut pas réaliser l'acte
- la non-réalisation de l'acte est le résultat
d'une décision purement interne à l'entreprise ou est le
résultat d'un élément subi par l'entreprise
Nous aboutissons à l'existence des cas
suivants :
1er type de conditions :
- l'entreprise ne peut réaliser l'acte : la
responsabilité de l'entreprise n'est pas en jeu
- l'entreprise peut réaliser l'acte : le non-acte
constaté peut entrer dans le champ de la RSE sous réserve de
conditions complémentaires ci-dessous
2ème type de conditions
complémentaires :
- la non-réalisation de l'acte est le résultat
d'un élément subi par l'entreprise : la
responsabilité de l'entreprise n'est pas en jeu
- la non-réalisation de l'acte est le résultat
d'une décision purement interne à l'entreprise : le non-acte
constaté peut entrer dans le champ de la RSE
Pour définir si un non-acte donné est
susceptible d'entrer dans le champ possible de la RSE, le fait doit
répondre aux conditions suivantes :
1er scénario
|
A le non-acte génère un impact sociétal
néfaste, et
B l'entreprise peut réaliser l'acte, et
C la non-réalisation de l'acte est le résultat
d'une décision purement interne à l'entreprise
|
4.1.2 Réflexion sur
l'employabilité, abordée dans le cadre de la RSE
4.1.2.1 Objectif de la mise en relation des concepts de RSE
et d'employabilité
Penser l'employabilité en terme de
développement
La mise en relation de ces deux concepts permet d'aborder
l'employabilité sous l'angle de son développement. En effet, le
développement de l'employabilité suppose l'action d'une ou
plusieurs entités qui, dès lors qu'elles disposent de moyens
d'actions, sont susceptibles d'être considérées comme
responsables de ce développement. L'entreprise peut être vue comme
une de ces entités puisqu'elle met en oeuvre pour ses propres besoins
des outils qui sont des facteurs de développement de
l'employabilité (formation, gestion des compétences,
mobilité,...).
4.1.2.2 L'employabilité entre-t-elle dans le champ
d'application possible de la RSE ?
Nous aborderons cette question à partir de l'analyse
que nous avons menée sur les conditions d'existence de la RSE par
rapport à un fait donné.
Le fait génère un impact
sociétal
Le fait qui doit être pris en compte est le
phénomène de manque de développement de
l'employabilité. Ainsi, nous sommes dans d'un manque ou d'une absence de
réalisation, autrement de ce que nous avons appelé un
non-acte.
L'entreprise peut réaliser l'acte
L'acte correspond au développement de
l'employabilité. L'entreprise est en mesure, en règle
général, de mener des actions de développement de
l'employabilité. Ce type d'actions fait partie de ses activités
ordinaires (former ou organiser la formation d'une personne ; organiser la
réalisation d'un bilan de compétences, ...)
La non-réalisation de l'acte est le
résultat d'une décision purement interne à
l'entreprise
C'est en général le cas par le biais des
décisions prises en matière de diminution des budgets Formation,
par l'orientation de formation opérationnelle qui servent moins le
développement de l'employabilité que les formations plus
généralistes, par exemple.
Nous en déduisons que le non développement de
l'employabilité est susceptible d'entrer dans le champ de la
responsabilité sociale de l'entreprise.
4.1.2.3 Mise en oeuvre de la RSE en matière
d'employabilité
Afin de préciser notre réponse quant au niveau
de responsabilité de l'entreprise pour le développement de
l'employabilité, il est possible de mettre à jour plusieurs
arguments contradictoires. Le niveau de responsabilité s'exprimera en
terme de responsabilité d'engagement ou de responsabilité
d'obligation.
L'entreprise peut avoir un effet positif sur le
développement de l'employabilité
Lorsque l'entreprise fait évoluer un individu en terme
de responsabilité, en terme de poste, lui assurant une
complémentarité dans les diverses expériences, lorsqu'elle
fait accompagner cette évolution de formation, nous aurons tendance
à dire qu'elle opère un effet positif sur
l'employabilité.
Un minimum garanti d'effet positif
Le lien entre RSE et employabilité soulève
la question suivante : le fait que l'entreprise ne met en oeuvre que peu,
voire aucune action en faveur d'un développement de
l'employabilité signifie-t-il qu'elle a un effet négatif sur
l'employabilité ?
Une première réflexion conduit à
répondre par la négative dans la mesure où le fait
même d'employer l'individu joue un rôle positif sur
l'employabilité. Sous cet angle, la situation où l'entreprise ne
mène aucune action n'existe pas véritablement : pour le
moins, elle emploie l'individu.
La détention du pouvoir
L'entreprise exerce également une responsabilité
dans la mesure où elle détient le pouvoir sur des actions qui
découlent d'obligations légales en faveur de
l'employabilité des salariés. C'est le cas de la formation dont
les niveaux minima sont fixés par la Loi. C'est également le cas
des bilans de compétences, ou encore du nouveau dispositif de formation,
le DIF.
Elle est également responsable de
l'employabilité dans la mesure où l'on sait qu'un
développement de l'employabilité n'est possible que dans la
mesure où les actions s'inscrivent dans le temps et demandent donc une
disponibilité sur le long terme. Ainsi, l'individu doit concilier le
développement de l'employabilité avec son activité
professionnel. Il doit alors composer avec l'entreprise pour trouver une
organisation facilitant des actions en faveur de son employabilité. Nous
voyons, à travers ces arguments que responsabilité rime avec
pouvoir : pouvoir de décision, pouvoir de mise en oeuvre, pouvoir
d'empêchement. Là où il y a pouvoir, il y a
responsabilité.
Une responsabilité conjointe
Mais le développement de l'employabilité n'est
pas aisé à obtenir pour l'entreprise, en premier lieu parce qu'il
dépend de plusieurs acteurs, dont le principal est l'individu et non
l'entreprise. L'acteur qui est le premier responsable de l'employabilité
est l'individu lui-même. C'est en effet sur lui qu'intervient le
changement et ce changement ne peut se faire sans sa participation.
Un acte pour des effets incertains
L'employabilité dépend d'une multitude de
facteurs dont certains sont influençables, d'autres pas. D'autre part,
le développement de l'employabilité ne peut se réaliser
que grâce à la réalisation de diverses actions
exercées dans la durée. Ainsi, une même action
exercée sur deux individus et impactant a priori l'employabilité
n'aura, bien souvent, et sans avoir des effets radicalement différents,
pas le même impact sur l'employabilité.
Les actions de l'entreprise qui devraient a priori
améliorer le niveau d'employabilité de l'individu ne produiront
donc pas toujours, loin de là, les résultats positifs
escomptés. Ce constat constitue une limite forte à la
responsabilité de l'entreprise en matière de progression de
l'employabilité.
A la lumière de tous ces éléments, nous
en concluons que le premier responsable de l'employabilité est
l'individu lui-même. L'entreprise constitue un contributeur
éventuel (aucune contrainte ne peut s'exercer sur l'entreprise pour
l'obliger à développer l'employabilité) et
aléatoire dans la mesure où son action peut être
contrée par une absence de volonté de l'individu de faire
évoluer son employabilité.
Ainsi, si l'entreprise peut impacter le niveau
d'employabilité, on ne peut parler de responsabilité sociale de
l'entreprise obligatoire en la matière dans la mesure où elle ne
peut être tenue pour première responsable de l'échec d'une
action réalisée et dans la mesure où une absence pure et
simple d'action en faveur de l'employabilité n'existe pas (le simple
fait d'employer une personne à un effet positif sur son
employabilité). En matière d'employabilité, un
développement sera plus certainement assuré si nous abordons la
problématique à partir d'une approche de type
responsabilité par l'engagement, correspondant mieux à la
réalité de la situation.
4.2 Propositions
pour un meilleur développement de l'employabilité
Nous organisons nos propositions autour de deux parties :
la première donne des orientations sans remettre en cause
fondamentalement l'organisation des processus existants. Une seconde partie
développe au contraire des solutions à partir des conclusions
émises en terme de responsabilité relativement à
l'employabilité. Elle amène dès lors à formuler des
propositions impliquant des changements plus profonds.
Afin d'illustrer notre réflexion, nous
évoquerons deux processus clés du développement de
l'employabilité : la gestion de la formation et la gestion des
compétences.
4.2.1 Propositions d'évolutions
dans le cadre des processus existants
4.2.1.1 Vers une formation plus généraliste,
à plus long terme
Pour que la formation professionnelle continue contribue de la
meilleure manière possible au développement de
l'employabilité, deux orientations, déjà plus ou moins
présentes dans les entreprises, nous semblent devoir être
généralisées.
La formation envisagée dans une vision à
long terme
La première orientation concerne l'inscription
systématique de la formation de chaque individu dans une vision à
long terme. Cela suppose l'abandon des prises de décision de formation
« au coup par coup », pour des raisons parfois bien
différentes de l'évolution des compétences
(« remplissage » de sessions, formations
« récompenses », liquidation des enveloppes
budgétaires,...). Le choix des formations mises en oeuvre pour un
individu est au contraire réalisé en lien avec une
réflexion de l'individu sur son avenir professionnel à moyen ou
long terme. Chaque formation s'inscrit donc dans un tout cohérent. Sur
le périmètre de la formation, cet ensemble prend la forme d'un
parcours ou cursus de formation. Sur un périmètre englobant les
différents outils de développement de l'employabilité, cet
ensemble cohérent correspond au projet professionnel auquel l'individu
aura réfléchi.
Vers un élargissement des sujets de
formation
Une seconde orientation qui nous semble devoir être
largement généralisée concerne la mise en oeuvre de
formations plus généralistes et moins centrées sur
l'amélioration stricte de la tenue du poste de travail. Lorsqu'une
formation a pour objectif l'évolution des compétences de la
personne, deux types de besoins peuvent être évoqués : les
besoins de formation en vue d'une amélioration de la réalisation
des activités actuelles de l'individu ; et les besoins de formation en
vue d'une évolution plus ou moins importante de la situation
professionnelle de la personne. Pour cette seconde catégorie de besoins,
deux cas de figure peuvent alors se présenter : l'orientation reste dans
le champ des besoins actuels ou futurs de l'entreprise ; ou l'orientation est
sans lien avec les besoins actuels ou futurs de l'entreprise. C'est pour
répondre à cette seconde catégorie de besoins que la
formation se doit d'être plus généraliste, en
développant des sujets, des approches qui permettront à
l'individu de franchir certaines barrières qui l'amèneront
à faire véritablement évoluer sa position professionnelle,
en terme de métier ou de responsabilité. C'est dans ce cadre, en
prenant en compte ce type de besoins, que la formation contribue à un
meilleur développement de l'employabilité.
L'entreprise a certains intérêts à entrer
dans cette nouvelle conception de la formation : elle maintient l'individu dans
une dynamique d'évolution et d'apprentissage dont on peut penser qu'elle
a un effet bénéfique sur le comportement de l'individu à
travail. En le rendant plus acteur de son évolution professionnelle,
l'individu devient plus acteur dans son poste actuel.
4.2.1.2 Vers une réflexion élargie sur les
compétences
En préalable au choix des formations, une
réflexion régulière doit être menée avec
l'individu sur l'état des lieux de ses compétences acquises, sur
son évolution à venir compte tenu de ses aspirations, mais
également compte tenu des évolutions et possibilités
intéressantes au niveau du marché du travail.
En terme d'organisation, cela suppose des moyens en terme de
gestion des compétences qui vont au-delà d'une gestion des
carrières dans l'entreprise qui ne concerne qu'une part réduite
de l'effectif.
4.2.1.3 Vers une gestion des compétences, une gestion
de la mobilité et une gestion de la formation
intégrées
Une réflexion élargie sur les compétences
suppose de faire tomber la frontière qui existe aujourd'hui entre la
gestion des compétences et la formation. Le premier est envisagé
comme un préalable au second. Elles s'inscrivent dans le même
processus, ce qui implique des moyens de coordination très importants
entre ces deux activités, comme par exemple une même direction.
Toutes ces propositions inscrivent l'individu dans un projet
le concernant, ce qui modifie la manière dont il s'envisage dans le
travail. Cela modifie l'image qu'il a de lui-même dans le travail en le
valorisant plus. Cette évolution provoque un changement dés que
l'individu entre dans la démarche, modifiant donc son comportement dans
son poste actuel.
4.2.2 Propositions d'actions
formulées à partir de notre réflexion sur la notion de
responsabilité
4.2.2.1 Une responsabilisation de l'individu
Aujourd'hui, certains discours autour de la
responsabilité appliquée au domaine de l'employabilité
bloquent le développement de cette dernière.
Premier exemple : Alain Finot15(*) évoque en
matière d'employabilité, une responsabilité
partagée entre l'entreprise et l'individu afin d'en assurer le
développement. Mais pour que cette solution soit efficace, il est
nécessaire que ce partage de responsabilité soit clairement
explicité, tant en terme de processus que de moyens, sans quoi nous nous
retrouvons finalement dans une situation d'absence de responsabilité,
chaque entité estimant l'autre responsable.
D'autres (c'est le cas de plusieurs syndicats) tiennent un
discours qui consiste à vouloir confier absolument la
responsabilité du développement de l'employabilité
à l'entreprise. Or, nous avons déjà évoqué
le fait que la motivation de l'entreprise à faire évoluer
l'employabilité est très limitée puisqu'elle ne cherchera
qu'à répondre à ses propres intérêts (qui
sont, dans la majorité des cas, différents de ceux de
l'individu). Elle ne répondra donc que de façon très
partielle à l'objectif de développement de
l'employabilité. D'autre part, l'organisation actuelle du travail est
configurée de telle manière que rien n'amène l'entreprise
à prendre en charge cette responsabilité 16(*) : ni obligations
légales, ni obligations liées au marché de l'emploi, ce
dernier étant très favorable aux entreprises.
Ainsi, ces positions limitent la prise de
responsabilité par les individus sans qu'elle soit pour autant
assumée par l'entreprise.
Dans ces conditions, nous pensons au contraire, qu'une
affirmation claire de la responsabilité individuelle en matière
d'employabilité constitue un premier pas, mais indispensable, vers le
développement de cette dernière.
A partir de cette posture, quelques éléments
complémentaires nous semblent devoir être
développés.
Formalisation et communication des actions de
l'entreprise en faveur de l'employabilité
Une première remarque concerne les actions de
développement de l'employabilité réalisées par
l'entreprise dont il nous semblerait important qu'elles soient clairement
formalisées et communiquées auprès d'un organisme
centralisateur de cette information. Cette formalisation ne pourrait
s'envisager que dans le cadre d'un système incitatif, l'entreprise
n'ayant, au départ, aucun intérêt à réaliser
ce travail déclaratif. Cette information permettrait de faire le point
sur ce qui est réellement réalisé par l'entreprise, le
système incitatif (composé d'incitations financières par
exemple) conduisant l'entreprise à développer ce type d'action,
sur le mode d'un développement de la RSE par l'engagement.
Gestion individualisée de
l'employabilité
Une seconde remarque concerne l'orientation
nécessairement individuelle de l'analyse de l'employabilité. Ceci
remet en cause les analyses de l'évolution de l'employabilité par
catégories d'individus, souvent peu efficaces lorsqu'il s'agit d'en
développer le niveau, individu par individu. Conséquence
immédiate de cette position : la formalisation et la communication
par l'entreprise de ses propres actions en faveur de l'employabilité,
dont il est question ci-dessus, doivent être réalisées au
niveau individuel. Alors seulement, cette information prend toute sa valeur
puisqu'elle permet de prendre la mesure de ce qui a été fait pour
certains, de ce qui n'a pas été fait pour d'autres, et de
véritablement adapter les plans d'actions et donc les moyens au plus
juste. Responsabilité individuelle et gestion individuelle de
l'employabilité sont doublement liées : si l'affirmation du
principe de responsabilité individuelle est immédiatement
associée à une gestion individuelle de l'employabilité
pour des raisons d'efficacité, il est également vrai qu'une
gestion individualisée de l'employabilité ne peut s'envisager que
dans la mesure où la responsabilité est assumée par chaque
individu, sans quoi le système est ingérable car trop lourd.
L'individualisation de la gestion de l'employabilité permet de tenir
pleinement compte du fait qu'aujourd'hui, la gestion des ressources humaines au
sein de l'entreprise est réalisée de manière
différenciée et que l'entreprise n'offre pas à tous les
individus les mêmes « prestations »17(*).
Avantages de la responsabilisation
individuelle
On améliore globalement le niveau de
responsabilité des individus, ce qui correspond à un besoin
actuel de l'entreprise, dans le cadre d'activité de plus en plus
complexe.
4.2.2.2 Une gestion du développement de
l'employabilité externe à l'entreprise
Le deuxième axe de nos propositions consiste à
redonner à l'individu la maîtrise des processus, des outils et des
moyens de développement de l'employabilité en même temps
que lui est rendue la responsabilité de l'objectif de
développement de son employabilité. Cette proposition signifie
que l'entreprise demeure maîtresse des processus et moyens de
développement de l'employabilité pour les actions dont elle est
à l'initiative. Mais pour ce qui est des actions à l'initiative
de l'individu, processus et moyens deviennent totalement externes à
l'entreprise.
Pour illustrer notre propos, nous développerons les cas
de la formation et de la gestion des compétences. Nous évoquerons
également ce que cette orientation peut signifier en terme de moyens
alloués.
Le cas de la formation
Concernant le processus « formation », une
orientation vers une responsabilité de l'individu a déjà
été prise avec le DIF (Droit Individuel à la Formation).
Mais ce dispositif laisse encore une large place à l'entreprise,
aboutissant ainsi à un système lourd, peu efficace et qui peut
être détourné de son objectif premier par l'entreprise
(nous retiendrons, à titre d'exemple, le cas d'une entreprise qui
« négocie » avec ses salariés la
possibilité d'utiliser le dispositif du DIF pour des actions dont elle
est à l'initiative, alors que le dispositif du DIF est
réservé aux actions à l'initiative du salarié -
ceci afin de vider au maximum les « compteurs DIF »). Il
s'agit donc, pour ce qui nous concerne, d'aller plus loin et de sortir
l'ensemble du processus de l'entreprise pour le périmètre des
actions dont l'individu est à l'initiative.
Le cas de la gestion des
compétences
Concernant le processus relatif à l'évolution et
la gestion des compétences, le principe est de ne plus intégrer
l'entreprise aux actions mises en oeuvre du fait de l'individu.
Ces orientations supposent que d'autres entités que
l'entreprise, existantes (organismes de formation, syndicats) ou à
créer (sur le modèle associatif, par exemple), intègrent
de nouvelles compétences ou renforcent des prestations existantes afin
d'accompagner les individus dans leur réflexion et leur progression.
Les moyens
Pour ce qui est des moyens, une des orientations pourrait
consister à dégager un
« crédit-temps » à chacun, faisant ainsi du
développement de l'employabilité, une partie du temps de travail.
Le financement de ce crédit-temps serait un financement conjoint des
entreprises (qui resteraient absentes de la gestion des processus), de l'Etat
et de l'individu. Le financement de l'entreprise se justifie notamment par le
fait qu'elle n'assume plus la responsabilité de l'évolution
professionnelle de ses salariés sur le long terme.
Avantages
L'orientation vers une gestion des processus et moyens
externes à l'entreprise est cohérente avec l'évolution
constatée en terme de contrats de travail et de développement de
la mobilité inter-entreprises.
Le fait d'aller vers une indépendance vis-à-vis
de l'entreprise permet de mieux prendre en considération et
développer les aspirations des individus mais également des
besoins sociétaux non couverts aujourd'hui. Ainsi, par le biais d'un
système incitatif, il est possible de promouvoir plus facilement des
domaines d'activités qui représentent des potentialités
d'emplois non exploitées.
5 Conclusion
Au cours d'une mission d'organisation que nous avons
menée en entreprise concernant la fonction Formation, certaines
décisions de cette structure ont fait émerger une
intuition : les orientations qu'elle prenait en matière de
formation pouvaient avoir des répercussions fortes sur
l'employabilité. Il nous semblait que l'entreprise, à travers ces
décisions, pouvait aussi bien contribuer au développement de
l'employabilité que le bloquer.
Considérant l'employabilité comme un levier fort
en faveur de l'émancipation des individus, il nous a semblé
dès lors important de nous interroger sur ce phénomène.
Notre finalité était de faire émerger quelques
idées concrètes en faveur du développement de
l'employabilité. Pour cela, et compte tenu de notre expérience
précédente, nous devions vérifier si le pouvoir de
l'entreprise en matière d'employabilité était aussi
important qu'il nous était apparu. Si tel était le cas,
l'entreprise pouvait être considérée comme responsable du
développement de l'employabilité. Cette employabilité
ayant des répercussions sociétales, elle entrait alors dans le
champ d'application de la responsabilité sociale de l'entreprise.
Après une étude détaillée des
notions de responsabilité sociale de l'entreprise et
d'employabilité, la mise en relation de ces deux concepts nous a
montré que notre intuition, si elle était en partie exacte ,
devait être largement reconsidérée.
L'entreprise, s'il est vrai qu'elle peut développer
l'employabilité, et qu'elle le réalise par différentes
actions qui font partie de sa gestion quotidienne, ne doit pas apparaître
comme étant l'intervenant exclusif du développement de
l'employabilité ; en premier lieu, parce que le pouvoir qu'elle
détient effectivement en la matière sert d'abord ses propres
intérêts, souvent éloignés de ceux des
salariés ; en second lieu, parce qu'elle n'est pas l'intervenant
exclusif de l'employabilité. Ainsi, utiliser un mode de mise en oeuvre
« obligatoire » de la responsabilité sociale de
l'entreprise n'est en aucun cas une garantie de développement de
l'employabilité.
Au contraire, le fait de maintenir ce mode de raisonnement
empêche d'explorer de nouvelles approches, telle que celle que nous avons
développée, à savoir une prise en responsabilité
par l'individu de son employabilité, mais accompagnée des
pouvoirs et des moyens qui sont nécessaires à son
développement, et qui sont pour une bonne part détenus pour
l'instant par l'entreprise. Cette « externalisation » de
l'activité de développement de l'employabilité vers
l'individu nous semble être une des meilleures garanties de
résultat. Cette idée suppose de reconsidérer plus
profondément les liens existant entre entreprises et salariés et
de repenser, en particulier, sous cet angle toute une partie de la fonction
« Ressources Humaines » afin que son développement
servent plus efficacement les attentes des individus.
BIBLIOGRAPHIE
Y. Biefnot, Y. Pesqueux, L'éthique des affaires,
Editions d'Organisation, Paris, 2002
M.Capron, F.Quairel-Lanoizelée, Mythes et
réalités de l'entreprise responsable, La Découverte,
2004
Alain Chauveau, Jean-Jacques Rosé, L'entreprise
responsable : développement durable, responsabilité sociale de
l'entreprise, éthique, Éd. d'Organisation, 2003
Commission des Communautés européennes,
Glossaire du Livre Vert de l'Union Européenne, Promouvoir un cadre
européen pour la responsabilité sociale des entreprises ,
Bruxelles, juillet 2001
Thomas Coutrot, Critique de l'organisation du travail,
Editions La Découverte, Collection Repères,
2ème édition, 2002
Christian Darvogne, Didier Noyé, Organiser le travail
pour qu'il soit formateur : quels dispositifs mettre en oeuvre ? , INSEP
consulting éd., Pratiques en question, 2000
Anne Dietrich, Frédérique Pigeyre, La gestion
des ressources humaines, Editions La découverte, Collection
Repères, 2005
Claude Dubar, La formation professionnelle continue, Editions
La Découverte, Collection Repères - 28, 5ème
édition, 2004
Grégoire Évéquoz, Les compétences
clés : pour accroître l'efficacité et
l'employabilité de chacun, Ed. Liaisons, Entreprises et
carrières, 2004
Alain-Frédéric Fernandez, Le Dif : comprendre et
mettre en oeuvre la réforme de la formation professionnelle, Dunod,
Fonctions de l'entreprise, 2004
Alain Finot, Développer l'employabilité, INSEP,
novembre 2000
Arnaud Gonzague, Sylvie Touboul, Vous avez dit Entreprises
Responsables ?, Editions Vie et Cie, mai 2003
Jean-François Guillot, Gérard Rouquié, La
formation au coeur de l'entreprise : un investissement durable : concevoir la
formation, la planifier, la mettre en oeuvre, Ed. Retz, Coll. Au coeur de la
formation, 1996
Jean-Luc Guyot, Christine Mainguet, Béatrice Van
Haeperen, La formation professionnelle continue : l'individu au coeur des
dispositifs, Ed. De Boeck, Coll. Économie, société,
région, 2003
Institut de recherche FSU, Toute la vie pour apprendre :
un slogan ou un véritable droit pour tous ? , Actes du colloque des
30 novembre et 1er décembre 2001, Syllepse, 2002
Michel Ledru, Naïma Bouda, Agnès Wolff, Travail et formation : quels nouveaux
dispositifs ?, Liaisons, avril 2004
Paul Santelman, La formation professionnelle : nouveau
droit de l'homme ? , Gallimard, Coll. Folio-Actuel, 2002, Coll. "Le Monde"
actuel, 2001
Philippe Zarifian, Le modèle de la compétence,
Liaisons, mai 2001
AUTRES SOURCES D'INFORMATION
novethic.fr
orse.org Observatoire sur le Responsabilité
Sociétale des Entreprises
alliances-asso.org
imsentreprendre.com
* 1 Dictionnaire Le Petit
Robert
* 2 Glossaire du Livre Vert
de l'Union Européenne, Commission des Communautés
européennes, Promouvoir un cadre européen pour la
responsabilité sociale des entreprises ,Bruxelles, juillet 2001
* 3 M.Capron,
F.Quairel-Lanoizelée, Mythes et réalités de l'entreprise
responsable, La Découverte, 2004, p10
* 4 Glossaire du Livre Vert
de l'Union Européenne, 2001, op.cit.
* 5 Les
éléments de ce paragraphe ont été
développés à partir de l'ouvrage de M.Capron,
F.Quairel-Lanoizelée, op.cit., 2004, p11
* 6 Les
éléments de ce paragraphe ont été
développés à partir de l'ouvrage de M.Capron,
F.Quairel-Lanoizelée, op.cit., 2004, p92
* 7 Voir paragraphe 2.1.1.1
concernant cette notion
* 8 Y. Biefnot, Y. Pesqueux,
L'éthique des affaires, Editions d'Organisation, Paris, 2002
* 9 M.Capron,
F.Quairel-Lanoizelée, Mythes et réalités de l'entreprise
responsable, La Découverte, 2004
* 10 Les éléments
de ce paragraphe ont été développés à partir
de l'ouvrage de M.Capron, F.Quairel-Lanoizelée, op.cit., 2004
* 11 M.Capron,
F.Quairel-Lanoizelée, op.cit., 2004
* 12 Les
éléments de ce paragraphe ont été
développés à partir de l'ouvrage de A.FINOT,
Développer l'employabilité, INSEP Consulting, 2000, p.10
* 13 Les
éléments de ce paragraphe ont été
développés à partir de l'ouvrage de A.FINOT,
Développer l'employabilité, INSEP Consulting, 2000, p.14
* 14 A.FINOT,
Développer l'employabilité, INSEP Consulting, 2000, p.17
* 15 Alain Finot,
Développer l'employabilité, INSEP, novembre 2000
* 16 T. Coutrot, Critique de
l'organisation du travail, La Découverte, Repères, 2002
* 17 Anne Dietrich,
Frédérique Pigeyre, La gestion des ressources humaines, La
découverte, Repères, 2005
|