1.4.3 Contexte
Les mathématiciens et théoriciens travaillent la
plupart du temps sur des graphes générés
aléatoirement. Les graphes de terrain sont utilisés pour des
modélisations d'espaces réels et davantage étudiés
par des spécialistes du domaine. La théorie des graphes est ainsi
utilisée dans de nombreuses disciplines, comme la biologie, la chimie,
les réseaux d'ordinateurs, l'épidémiologie et la
sociologie. Les linguistes utilisent aussi les graphes pour représenter
les relations entre « termes » (relations sémantiques,
proximités d'usage ...)
Les contextes où l'on rencontre des graphes de terrain
ne doivent pas être réduits à cette liste ; elle n'est en
rien exhaustive : des bancs de dauphins aux interactions entre sites Web, les
espaces où s'exerce l'étude de ces réseaux est en
constante augmentation.
Nous proposons un panorama des travaux de recherche
associés aux domaines cités précédemment :
? En biologie, les réseaux représentent des
éléments du vivant comme par exemple les protéines. Les
travaux de Mashaghi concluent à la classification en « petit monde
» (cf. paragraphe 1.1.4) d'un réseau de protéines
[Mashaghi&al-2004]. Il nous faut aussi citer les travaux
de Palla et al. sur la clusterisation avec recouvrements de graphes. Nous
reparlerons dans la section 2.3.1 de ces travaux qui sont eux aussi
appliqués aux réseaux de protéines
[Palla&al-2005].
1.4. Grands graphes de terrain 42
Chapitre 1. État de l'art, notions, définitions et
vocabulaire sur les graphes
? En chimie, les éléments sont souvent des
molécules ou des atomes. Nous pouvons citer le travail de Francesco Rao
et al. qui, dans « Structural Inhomogeneity of Water by Complex
Network Analysis », appliquent les méthodes d'analyse des
grands graphes de terrain à un ensemble de molécules d'eau
à température ambiante [Rao&al-2010], afin
de mieux comprendre la structure moléculaire de l'eau et les changements
de niveau d'entropie.
? En informatique et en électronique, les exemples
foisonnent. Pour n'en citer que quelques-uns, nous évoquerons, dans le
domaine des réseaux d'ordinateurs, les travaux de Matthieu Latapy et de
son équipe sur les réseaux points à points
[Aidouni-2009-1] ainsi que ceux sur la topologie d'Internet
[Aidouni-2008]. Citons également les travaux d'Estrada
et al. qui portent sur la recherche de communautés de pixels à
l'intérieur d'images [Estrada&al-2010] et les
travaux de Hagen et al. sur la conception de circuits imprimés
multicouches visant à limiter les connexions inter-couches
[Hagen&al-1992].
? Dans le domaine de l'épidémiologie, les
réseaux représentent les relations entre des objets du monde du
vivant. En cela, ces réseaux se rapprochent de ceux
étudiés en biologie. Mais la finalité de l'étude
est différente. Le but de ces recherches est la détection des
mécanismes de transmission d'agents pathogènes. On peut
mentionner les travaux de Romualdo Pastor-Satorras et Alessandro Vespignani sur
la relation entre les structures des réseaux et la propagation des
maladies [Pastor-Satorras&al-2001]. Faisant un
parallèle entre virus informatiques et pathologies contagieuses
humaines, les auteurs arrivent, par une modélisation informatique,
à la conclusion qu'une infection peut se développer quelque soit
son ou ses points de départ et son niveau de contagion, avec un risque
de pandémie toujours faible.
? En sociologie, les réseaux sont constitués
d'êtres humains. La première réflexion ayant mis en oeuvre
les grands graphes de terrain est sans doute celle menée par Travers,
Jeffrey et Stanley Milgram, mieux connue sous le nom de l'expérience des
« petits mondes » ou « des six poignées de main »
[Millgram&al-1969]. Nous reparlerons en détail de
cette expérience initiatrice et de ses limites dans le paragraphe
suivant.
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