3.2.3.
Milieu humain
La plaine d'inondation du Logone et sa zone d'impact sont
depuis des siècles habitées par une multitude de
communautés ethniques et culturelles dont chacun ayant ses propres
intérêts par rapport à l'accès et à
l'utilisation des ressources naturelles de la plaine (Loth, 2004). Elles sont
composées essentiellement des Kotoko, des Mouzgoum, des Arabe Choa, des
Foulbé (Peul) et des Bornouang (Kanouri) (Mvondo et al.,
2003).
Les Arabes Choa représentent 42 % de la population du
département du Logone et Chari (Mvondo et al., 2003 citant
Seignobos). Ils étaient, à l'origine, des pasteurs nomades. Se
déplaçant dans une région à cheval sur l'actuel
Tchad et l'actuel Soudan, ils vinrent coloniser les abords du Lac Tchad vers la
fin du 18ème siècle, se heurtant, alors, aux
populations Kotoko. Avant les Peuls, les Arabe Choa constituèrent la
première société de pasteurs nomades du Nord Cameroun. Ils
devaient, peu à peu, se sédentariser. Alternant, dans un premier
temps, culture pluviale de sorgho et transhumance, ils devaient, bientôt,
devenir de véritables agropastoralistes sédentaires (Mvondo
et al., 2003).
Eleveurs par excellence, les Peuls, localement appelés
`'Foulbé'' se subdivisent en Jamare'en, Woila'en,
Alijama'en, Adanke'en et Anagamba'en, sont
présents dans la région vers la fin du 17ème
siècle (Scholte, 2005). Ils y seraient arrivés par l'Ouest (le
Mali). Les Foulbé sont, à l'heure actuelle, des pasteurs nomades,
ou semi-nomades, ou bien encore, des agro-pastoralistes semi-sédentaires
(Loth, 2004). Ils sont particulièrement présents dans et autour
de la plaine inondée, au Sud du Parc National de Waza (PNW). Ils
pratiquent la transhumance à la recherche de bons pâturages pour
leurs bovins (Mvondo et al., 2003).
A ces populations sédentaires qui vivent dans les
secteurs exondés de la plaine, il faudrait ajouter les bergers nomades
qui viennent des différents pays de la région pour faire
paître leurs animaux en saison sèche de décembre à
mai. La population directement concernée par l'écosystème
du yaéré peut-être actuellement évaluée
à plus de 200 000 habitants (ACEEN, 2007 ; Loth, 2004, Moritz
et al., 2011).
3.2.4.
Principales activités économiques de la zone
Selon Khari (2011), les principales activités
économiques pratiquées dans la zone dépendent des
ressources naturelles fournies par la plaine. Ces activités sont
fortement influencées par les saisons, lesquelles sont en particulier
caractérisées par l'absence ou la présence des pluies et
d'inondation. Par conséquent, les habitants de la plaine ont plusieurs
moyens d'existence, avec des degrés de spécialisation allant du
pastoralisme à l'agriculture en passant par la pêche et d'autres
activités économiques (Loth, 2004 ; Roggeri, 1995).
Tableau 1: Climat et types d'utilisations des
terres dans la plaine d'inondation de Waza-Logone.
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Mois
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Jan
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Fev
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Mars
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Avr
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Mai
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Juin
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Juil
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Août
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Sept
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Oct
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Nov
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Déc
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Sytèmes hydrologiques
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Saison des pluies
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Inondation par les rivières locales
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Inondation par le fleuve Logone
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Agriculture
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Agriculture pluviale
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Riz inondé
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Agriculture de saison sèche
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Elevage
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Pâturage de saison sèche
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Faune sauvage
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Pâturage des ongulés et
éléphants
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Source : Loth (2004)
3.2.4. 1. Elevage
Le Tableau 1 montre que l'élevage est une
activité qui se pratique durant toute la saison sèche ; soit
pendant sept mois.
La plaine d'inondation de Logone a toujours été
la zone de pâturage par excellence pour des milliers d'éleveurs
dans le bassin du Lac Tchad. En saison sèche, la plaine offre une
végétation verdoyante. C'est pour cette raison qu'elle est le
lieu d'attraction de milliers d'éleveurs (Loth, 2004).
La transhumance se caractérise par des
déplacements d'amplitude variée fortement liée à la
pluviométrie et à la recherche de pâturages et de points
d'eau. Ces mouvements permettent aux pasteurs de s'adapter aux contraintes
saisonnières de l'environnement sahélien et d'exploiter au mieux
les ressources pastorales des zones traversées (GEPIS, 2000). En
élevage transhumant, les animaux se déplacent selon un
schéma devenu classique. L'élevage nomade est l'apanage des
pasteurs Bororo et concerne surtout les petits ruminants. Les
déplacements s'effectuent dans des directions imprévisibles avec
pour seul souci la recherche des points d'eau et des pâturages.
En élevage extensif sédentaire, les troupeaux
effectuent des mouvements de très faible amplitude qui consistent
à paître aux environs du village dans la journée. Dans ce
type d'élevage, les animaux sont le plus souvent confiés à
un berger salarié (GEPIS, 2000 ; Ziébé et
al., 2005).
Les bovins sont les principales espèces
présentes chez la plupart des éleveurs de la plaine, quoique
certains élèvent aussi d'autres espèces notamment les
ovins, les chameaux et les ânes. Par le passé, les effectifs
étaient constitués principalement de bovins des
départements du Diamaré et du Logone et Chari. Avec la
dégradation du climat dans l'ensemble du bassin du Lac Tchad, les bovins
ont sensiblement augmenté. En plus des animaux appartenant aux
éleveurs sédentaires que sont les Mouzgoum, la plaine accueille
chaque année, de décembre à mai, plus de 300 000
têtes de bovins et ovins venant d'origines diverses : Niger,
Nigéria, Tchad et autres zones de la région de
l'Extrême-Nord Cameroun (ACEEN, 2007 ; Mvondo et al.,
2003). Ces animaux exercent une forte pression sur les ressources pastorales de
la plaine déjà fragilisées par la baisse d'inondation et
le changement climatique. En plus des conflits qui arrivent occasionnellement
entre les éleveurs et les agriculteurs, ou entre les éleveurs et
les pêcheurs, les éleveurs font face à d'autres contraintes
notamment les maladies liées à l'eau telle que la douve du foie
et les parasitoses (digestives, sanguines et externes). La prédation des
animaux par les carnivores du PNW affecte l'élevage autour de la zone
périphérique du parc. Les pertes d'animaux dues à ces
contraintes sont estimées à 6,7 % de la taille totale des
troupeaux (Loth, 2004).
La plaine de Logone est une zone économiquement
importante pour le pastoralisme où les échanges commerciaux du
bétail et de lait ont lieu. Environs 300 têtes de boeufs sont
vendues chaque semaine dans les marchés environnants (Zimado, Pouss,
Bourkoumandje, et Mazera) pour alimenter d'autres grands réseaux de
commercialisation de bétail (Loth, 2004).
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