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La primauté du droit communautaire de l'UEMOA sur le droit des états membres

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par Ahmed Rémi OUOBA
Université Saint Thomas d'Aquin de Ouagadougou Burkina Faso - Maitrises sciences juridiques et politiques option droit public 2010
  

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B:L'EXAMEN DU RENVOI PREJUDICIEL

La saisine de la Cour se fait par le juge national lui-même, qui détient l'exclusivité de cette initiative. Il décidera d'y procéder, après une série d'interprétations, dont il a été maître.

Dès qu'il décide de recourir à la CJUEMOA, le juge national sursoit à statuer et saisit la CJUEMOA par toutes voies de droit admises par le droit national (ordonnance, jugement, arrêt). La procédure, au principal, sera donc suspendue jusqu'à ce que la Cour ait statué. Le juge national doit indiquer les raisons pour lesquelles l'avis de la Cour est nécessaire à la solution du litige et préciser le cadre factuel et juridique du litige ; il est tenu de joindre les pièces pertinentes du dossier à sa demande qui doit avoir un lien avec l'objet du litige144(*).

La juridiction nationale soumet des questions relatives à l'interprétation ou à la validité d'une disposition communautaire, généralement sous forme d'une décision juridictionnelle conformément aux règles nationales de procédure145(*). Le greffier notifie la demande aux parties impliquées, aux Etats membres à la commission et le cas échéant, au conseil des ministres. Les parties, les Etats et les organes de l'Union ont un délai pour soumettre à la cour leurs observations écrites.

Les arrêts de la cour sur le renvoi sont rendus à la majorité et sont exécutoires dès leur prononcé. En effet les arrêts préjudiciels de la cour ont une force exécutoire qui lie le juge national sur les points tranchés, lui laissant seulement le soin d'en tirer les conséquences pour la solution du litige qui lui est soumis. Ils ont en outre une portée générale en ce qu'il s'impose à toutes les juridictions statuant sur le même litige, que ce soit en appel ou en cassation. Les arrêts ont enfin une portée rétroactive146(*), mais cette portée peut être limitée par l'arrêt même compte tenu des perturbations trop graves qu'elle pourrait entraîner en ce qui concerne les relations juridiques déjà établies. (Article 10 du Protocole additionnel n°1 et arrêt n° 03/2005 du 05 avril 2005 dans l'affaire Eugène YAI contre la Conférence des Chefs d'Etats et de Gouvernement.). 147(*)

Le juge national est lié à l'interprétation donnée148(*) par la cour soit qu'il l'ait provoquée lui-même, soit qu'il soit saisi d'une question matériellement identique ; cependant il conserve la faculté de saisir la cour d'un nouveau renvoi. Dans ce cas, lorsque la question posée à titre préjudiciel est manifestement identique à une question sur laquelle la Cour a déjà statué, elle peut après avoir informé la juridiction de renvoi et après avoir entendu les intéressés par leurs observations ainsi que l'Avocat général, statuer par voie d'ordonnance motivée149(*).

En ce qui concerne l'arrêt en appréciation de validité, l'acte déclaré invalide ne peut être appliqué par le juge de renvoi ainsi que tous les juges des Etats membres qui auront l'obligation de refuser d'en faire application lorsqu'ils seront saisis en aval. Par contre lorsque l'examen de la question posée n'a pas révélé d'élément de nature à affecter la validité de l'acte, la cour ne déclare jamais un acte légal, elle se borne simplement à déclarer non fondés les griefs développés contre lui150(*).

Le seul arrêt rendu par la CJUEMOA est l'arrêt n° 01/05 du 12 janvier 2005 suite au renvoi préjudiciel introduit par le Conseil d'Etat Sénégalais le 10 novembre 2003 dans l'affaire Syndicat des Agences de Voyages et de Tourisme du Sénégal (SAVTS) c/ Compagnie Air France.151(*)

Le dispositif des arrêts préjudiciels révèle leur caractère déclaratoire. En effet la cour « dit pour droit » à la différence des procédures contentieuses à l'issues desquelles la cour « déclare et arrête »152(*). La réponse du juge communautaire doit donc être utile au juge national.

* 144 R. FOFANA ibid.

* 145 La saisine de la cour se fait selon les règles procédurales de son droit national (cf. J. BOULOUIS, droit institutionnel des communautés européenne, Paris, Montchrestien, 1991, p. 224). La CJUEMOA n'a pas à vérifier si la décision de saisine a été prise dans les formes et selon les procédures exigées par le droit national. Pour cela cf. CJCE arrêt REINA du 14 Janvier 1982 Aff. 65/81 et CJCE arrêt EURICO ITALIA du 03 Mars 1994 Aff. C332 et 335/92.

* 146 On parle dans ce cas d'effet ex tunc des arrêts préjudiciels du à leur caractère déclaratoire. A ce sujet cf. S. DENYS, le système juridique communautaire, 3è édition, Paris, PUF, 1997, p. 703 note 582.

* 147 R. FOFANA ibid.

* 148 L'inobservation de ces interprétations peut donner lieu à un recours en manquement (art 13 Proto Add. n°1).

* 149 Dans ce cas la cour peut statuer par voie d'ordonnance motivée comportant référence à l'arrêt précédent (art 86 al 3 Règlement de procédure) ; cf. aussi S. DENYS, le système juridique communautaire, 3è édition, Paris, PUF, 1997, p. 695 note 575.

* 150 A. PECHEUL, Droit Communautaire Général, Paris, Ellipses, 2002, p. 221.

* 151 Le Conseil d'Etat sénégalais saisit le 25 septembre 2003 la CJUEMOA à l'occasion d'un litige ayant opposé la compagnie Air France et le syndicat des agents de voyage et de tourisme du Sénégal. Le Conseil d'Etat avait été saisi par Air France aux fins de cassation de la décision du 27 décembre 2002 de la commission nationale sénégalaise de la concurrence. Il se trouvait que la compétence du Conseil d'Etat posait problème compte tenue d'une directive datée du 23 mai 2002 prévoyait qu'a partir du 1er janvier 2003, le contentieux de la concurrence devrait être porté devant la Commission de l'Union. Le Conseil d'Etat demanda alors à la CJUEMOA de dire quelle est la juridiction compétente pour statuer du recours introduit le 17 février 2003 tendant à faire casser et annuler la décision de la commission national de la concurrence du Sénégal, dans la mesure où les directives communautaires avaient fixé un délai au-delà duquel les instances nationales ne seraient plus compétentes. La CJUEMOA se déclara incompétente pour désigner la juridiction qui doit statuer sur le recours tendant à faire casser et annuler la décision n°02/D-02 de la commission nationale de la concurrence du Sénégal du 27 décembre 2002, considérant que le renvoi ne se justifiait pas dans la mesure où le litige a eu lieu avant la publication des actes sur la concurrence. Cf. A. SALL, op. cit., p. 217-224.

* 152 S. DENYS, le système juridique communautaire, 3è édition, Paris, PUF, 1997, p. 698 note 577.

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