I.7. DIAGNOSTIC
I.7.1.CLINIQUE
Le délai d'incubation de l'infection à M.
ulcerans est de 6 à 12 semaines. Les lésions d'UB se situent
sur les membres dans 85% des cas. 60% environ siègent sur les membres
inférieurs, 30% environ sur les membres supérieurs. Les autres
lésions peuvent se situer sur le tronc, les fesses ou la région
périnéale, le visage, le cuir chevelu.
En l'absence d'autre (sur)infection :
- lésion en général indolore
(y compris les ulcères, même étendus)
- pas d'altération de l'état
général, pas de fièvre,
symptômes généraux rares
- pas d'adénopathie clinique.
Selon la classification officielle reconnue par l'OMS, deux
formes cliniques se distinguent : forme inactive et forme évolutive.
Ø La forme inactive se
caractérise par un antécédent d'infection à M.
ulcerans avec une cicatrice affaissée en étoile, avec ou
sans séquelles.
Ø La forme évolutive
revêt trois aspects : non ulcérative,
ulcérative, et un stade de cicatrisation.
Retenir donc que malgré son nom, l'UB n'est pas
toujours une lésion ulcérée, d'où
l'intérêt de le diagnostiquer précocement, au stade - non
ulcéré justement - où un traitement pourra aboutir
à une guérison souvent sans séquelle
fonctionnelle.
Les FORMES NON ULCERATIVES (ou
PRE-ULCERATIVES) peuvent être :
PAPULE :
Lésion cutanée surélevée, de moins
d'un centimètre de diamètre. Indolore mais parfois
prurigineuse.
Un érythème est fréquemment
observé autour de la lésion. Forme la plus fréquente en
Australie.
NODULE
Lésion sous-cutanée ferme, palpable, de 1
à 2 cm de Diamètre, parfois plus grande. Froid, indolore, souvent
prurigineuse. Adhérente à la peau, mobile au plan profond.
Parfois entourée d'un halo oedémateux. La peau en regard est
souvent dépigmentée. Forme courante en Afrique.
PLAQUE
Lésion en placard, bien démarquée mais
à bords irréguliers, surélevée, ferme et
indurée, de plus de 2 cm de diamètre. Froide, indolore. La peau
en regard est souvent dépigmentée (ou rouge).
OEDEME
Tuméfaction diffuse, étendue, froide et ferme,
ne prenant pas le godet, à bords mal définis, parfois
douloureuse, avec ou sans modification de la pigmentation de la peau
affectée. Localisations possibles : membre (entier ou une partie),
tronc, visage, région périnéale.(10.)
Les FORMES ULCERATIVES :
Sans traitement, les formes pré-ulcératives
ci-dessus aboutissent en général à la formation d'un
ulcère. Celui-ci, symbole de la maladie, peut apparaître à
n'importe quelle partie de la lésion initiale. Il possède les
caractéristiques suivantes:
Ø Perte de substance dermo-épidermique
Ø Indolore (ou très peu
douloureux) et non malodorant, en l'absence de surinfection
Ø Fond nécrotique, jaunâtre
(peut être blanc cotonneux)
Ø Bords creusés,
décollés
Ø Induration périphérique,
classiquement noirâtre
Ø Fréquent oedème cutané en
périphérique
Ø Pas ou peu de signes
généraux
Complications de la forme ulcérée
:
- surinfection de la plaie (staphylocoque,
streptocoque, pyocyanique, Corynebacterium sp) avec évolution
possible vers phlegmon et sepsis
- atteinte osseuse : elle peut survenir sous
forme de
- ostéite réactionnelle
(contiguë) : elle survient lorsque la nécrose a
détruit les tissus sus-jacents à l'os. Elle attaque donc celui-ci
de la périphérie à la profondeur.
Il arrive que l'exposition de l'os atteigne le stade de la
dévascularisation, de la nécrose de l'os cortical, du
séquestre, parfois jusqu'à l'ostéomyélite.
- ostéomyélite véritable
à M. ulcerans : souvent par métastases septiques,
parfois par contiguïté. Cette nécrose infectieuse
débute donc cette fois à partir du centre de l'os
(médullaire), à partir d'un ou plusieurs foyers, parfois à
distance de la lésion cutanée ou après sa
guérison.
Au-dessus de l'os, la peau est souvent intacte, sans
lésion apparente. L'ostéomyélite à M. ulcerans
est indolore au départ avant de devenir franchement douloureuse
(douleur exquise).
Au niveau cutané, on retrouve alors en regard une zone
inflammatoire, chaude, oedematiée avec possible fistule et
extériorisation de tissu nécrosé. En cas d'incision, en
dessous d'un tissu gélatineux on observe un os totalement
rongé.
Les complications classiques de l'ostéomyélite
sont possibles, à savoir déformation osseuse, séquelles
fonctionnelles, surinfection, sepsis...
- atteinte loco-régionale profonde,
par extension contigüe de l'ulcère : destruction des tissus mous
(gaines de tendons, muscles, aponévroses / atteinte possible des tissus
périorbitaires avec perte de l'oeil, en cas de localisation au visage),
arthrite
- déformations de membres, rétractions
: elles résultent des cicatrices au niveau de muscles
(contractures), d'articulations. Ankylose parfois associée,
séquelles fonctionnelles majeures
- handicap social et/ou esthétique
- complications
Le STADE DE CICATRISATION
:
La cicatrisation spontanée des lésions
apparaît après plusieurs mois (voire années)
d'évolution. Elle fait suite à la détersion de
l'ulcère, puis à l'accolement des bords d'où part
l'épidémisation. Le tissu cicatriciel est fibreux,
scléreux et les invalidités définitives sont
fréquentes à type de rétraction (contractures des
muscles), d'ankylose, d'amputation de membre parfois de lymphoedème par
striction cicatricielle. Selon les études, ces séquelles
fonctionnelles seraient présentes chez 25% à 66% des patients
« guéris » de leur infection. Elles entraînent des
incapacités majeures qui font l'objet d'une prise en charge
spécifique.
NOUVELLE CLASSIFICATION:
Depuis 2004, la modification du traitement de l'UB
(introduction des antibiotiques dans les recommandations de stratégie
thérapeutique) a entraîné la création d'une nouvelle
classification validée par l'OMS.
Cette nouvelle classification est fondée sur la taille
des lésions. Son but est de de séparer les lésions
potentiellement guérissables par traitement antibiotique seul de celles
qui nécessiteront une chirurgie ; elle a donc un intérêt
évident pour les soignants qui diagnostiquent les cas sur le terrain.
Elle permettra également aux organisations sanitaires de mieux suivre
les progrès diagnostiques (plus de lésions réduites
diagnostiquées = reflet d'une politique de diagnostic précoce
efficace) dans chaque pays touché.
On classe les lésions en 3 catégories:
Ø Catégorie I : une
lésion unique < 5 cm de diamètre. La plupart de ces
lésions guérissent complètement avec le traitement
antibiotique seul (pas besoin de chirurgie).
Ø Catégorie II : une
lésion unique de 5 à 15 cm de diamètre. Certaines de ces
lésions peuvent guérir complètement avec le traitement
antibiotique seul.
Ø Catégorie III : une
lésion unique > 15 cm de diamètre ou
lésions multiples ou une ou plusieurs
lésions sur des localisations critiques (oeil, sein, organes
génitaux) ou ostéomyélite.
Pour la plupart de ces lésions, il faudra avoir recours
à la chirurgie (excision, greffe cutanée ou amputation dans les
cas graves).
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