2.1.2. Réunion de présentation du
projet
Dans le but de démarrer le projet, vingt-deux
réunions furent organisées représentant les vingt-deux
aires sanitaires retenues, visant à sélectionner et
présenter ces nouveaux protagonistes aux différentes populations
de la région et ainsi obtenir leur adhésion. Cela se produisit en
valorisant d'emblée la place croissante des «
bénéficiaires » dans le processus de décision et de
leur prise en charge médicale. Les séances furent
réalisées en partenariat avec les RFS, le personnel de terrain de
3ASC chargé d'assurer le bon déroulement des activités et
les autorités administratives et locales des cantons. De plus, une
pléthore de groupements prit place dans ce processus.
Lors d'une rencontre avec la CS de Nanergou, Tône, les
membres présents expliquèrent leur vision des
événements qui aboutit à la création de ces
groupements :
« C'est 3ASC qui a envoyé un assistant pour qu'on
installe ça, il est venu nous expliquer pourquoi on veut installer
ça : pour appuyer le COGES, nous n'avons pas le même rôle
qu'eux mais c'est pour les appuyer, c'est pour ça qu'on veut installer
ça, parce que il remarque que un peu partout dans les villages, il y a
des malades qui sont cachés, qui ne veulent pas se présenter au
centre, donc s'il y a ces Commissions Santé, ça peut changer. On
a pris un membre dans chaque quartier de chaque village pour former. Pour
former, ça n'a pas été facile, les gens n'ont pas compris
pourquoi. Pour avoir ce comité, c'était pas facile » [Propos
recueillis par la présidente et le secrétaire de la CS de
Nanergou, Tône].
Sur base de ces propos, il est constatable que les personnes
présentes ont éprouvé quelques difficultés à
percevoir les raisons même de la création d'un tel groupement. Ce
projet exogène semblait rencontrer des complications lors de son
implantation locale. « Un savoir-faire « prend » difficilement
dans un système de sens qui lui est étranger, et selon des
mécanismes fort peu prévisibles a priori »118.
« Interviennent aussi des logiques d'ordre symbolique ou cognitif, de
nature plus implicite. Les malentendus et incompréhension entre
institutions de développement et populations relèvent pour une
part d'un registre de « conceptions latentes » ou de «
représentations sous-jacentes ». Il ne s'agit pas là de
« visions globales du monde » respectivement cohérentes qui
s'affronteraient mais de « blocs culturels particuliers » ou de
« configuration spécifiques de représentations » qui
seraient en décalage (É). Plus simplement et plus
prosaïquement, certaines notions évidentes pour les «
développeurs » ne sont pas partagées par les
développés. [Nous entendons] évidemment par là des
notions qui jouent un rôle direct ou indirect important quant à la
conception ou la mise
118 Olivier de Sardan, 1995a, op. cit., p. 141.
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en oeuvre d'une action de développement : peu importe
au fond les différences de « conception du monde » (É)
dès lors qu'elles ne sont pas au principe de comportements divergents
autour d'actions de développement (É) Il y a par contre certains
malentendus notionnels qui interviennent directement dans les interactions
entre intervenants et populations »119.
Toutefois, le conseiller de la CS de Bogou tient à
préciser formellement que « son utilité c'est d'aider la
population : de sensibiliser la population pour qu'ils viennent vers le centre
de santé pour se soigner et aider aussi l'infirmier dans sa tâche
de vaccination et de stratégies avancées » [Conseiller de la
CS de Bogou, Tandjouaré].
À la lecture de ces mots, il est admissible de
mentionner que le message du dispositif en place fut, au final, bien
transmis ; sous couvert d'actes philanthropiques, ils servent prioritairement
les intérêts du système en place.
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