III. ETUDE DES FACTEURS DE RISQUE DES DECES
NEONATAUX
1. FACTEURS DE RISQUES MATERNELS
v Caractéristiques socio-démographiques
Parmi les caractéristiques socio-démographiques
analysées, le statut matrimonial et le niveau d'instruction avaient un
impact sur la mortalité néonatale.
Concernant le statut matrimonial, le célibat
était un facteur de risque tandis que les enfants des mères
mariées avaient moins de risque de décéder. Ceci pourrait
être lié au fait que les femmes mariées
bénéficient généralement d'une contribution
financière et d'un appui psycho-affectif de la part de leur conjoint;
contrairement aux femmes célibataires. Somé et al, dans une
étude au Burkina Faso, ont démontré que la décision
de recours aux soins anténataux et nataux est prise par le conjoint et
la belle famille de la femme enceinte [55].Mais ce risque
lié au célibat n'avait pas persisté dans la
régression logistique. Zanini et al, au Brésil, et Simiyu au
Kenya n'avaient pas retrouvé d'association entre le statut matrimonial
et la mortalité néonatale [42, 46]. Par contre
Imad El Awour et al, en Palestine avaient montré que les enfants des
mères dans un mariage consanguin étaient plus à risque de
décès [44].
Concernant le niveau scolaire, le niveau d'instruction du
primaire ou du secondaire était un facteur de risque de la
mortalité néonatale. Ce résultat corrobore celui
d'Upadhyay et al, en Inde qui avaient trouvé qu'un bas niveau
d'instruction des parents était un facteur de risque de mortalité
néonatale [43]. En effet, nous pensons que le bas
niveau d'instruction peut constituer un frein dans l'accès et la
compréhension des messages de santé publique sur l'importance des
soins anténataux, nataux et postnataux. Aussi le bas niveau
d'instruction est très souvent associé à un faible niveau
socio-économique, ce qui constitue une limite financière dans
l'accès à ces soins. Mais ce facteur n'était pas
resté significatif dans l'analyse multivariée. Par contre, dans
les séries de Zanini et al, de Kambarami et al, et de Simiyu, le niveau
d'instruction n'influençait pas la mortalité néonatale
[42, 45, 46].
v Caractéristiques
obstétricales
Parmi les variables obstétricales analysées,
seule la parité était associée à la
mortalité néonatale.
Les nouveau-nés des mères primipares
étaient plus à risque de décès mais ce risque avait
disparu dans l'analyse multivariée. Ceci pourrait s'expliquer par le
fait que les mères primipares sont généralement sujettes
aux grossesses à risque de part le risque élevé de la
pré-éclampsie/éclampsie [56] et du
paludisme [57]. De plus, elles n'ont pas souvent une
éducation et l'expérience sur les soins des nouveau-nés.
Certains auteurs n'avaient pas retrouvé un lien entre la parité
et la mortalité néonatale [42, 45, 46].
v Pathologies des mères
Il n'y avait aucune corrélation entre les pathologies
des mères et la mortalité néonatale dans notre
étude. Ce résultat est semblable à ceux d'autres auteurs
qui n'avaient retrouvé aucune relation entre les pathologies des
mères et le pronostic du nouveau-né [41, 44,
48]. Par contre au Mali, Sidibé et al, ont trouvé que la
brûlure mictionnelle, les oedèmes des membranes inférieurs
et la fièvre pendant la grossesse étaient les facteurs
associés à la mortalité néonatale
[47].
v Caractéristiques liées au travail et
à l'accouchement
Tout comme Adetola et al, au Nigéria
[50], nous avons trouvé que la fièvre
péripartale était un facteur de risque de la mortalité
néonatale. En effet, la fièvre péripartale traduit un
état infectieux chez la mère et un potentiel risque de
contamination au foetus. Il ya donc un risque d'infection néonatale et
les infections néonatales constituaient la principale cause de
décès dans notre série. Cette association n'avait pas
persisté dans l'analyse multivariée.
La rupture prolongée des membranes de plus de 12
heures, c'est-à-dire le délai entre la rupture des membranes et
l'expulsion du nouveau-né, était fortement associée
à un risque plus élevé de décès dans notre
série. Cette rupture prolongée des membranes est souvent
associé à un risque élevé d'infections
néonatales [58]. Ce facteur de risque avait
persisté dans l'analyse multivariée avec régression
logistique. Chelo et al, à Yaoundé avaient trouvé que la
rupture prolongée des membranes de plus de 12 heures était un
facteur de risque de la mortalité néonatale précoce
[15]. Ce qui n'était pas le cas pour Imtiaz et al, au
Pakistan qui n'avaient pas trouvé de lien entre la rupture
prolongée des membranes et la mortalité néonatale
[40].
Nous avons trouvé que le liquide amniotique
méconial était un facteur de risque de la mortalité
néonatale. Ceci pourrait s'expliquer par le fait qu'un liquide
amniotique méconial reflète généralement une
asphyxie périnatale. Cette trouvaille est semblable à celle
d'Eloundou à l'HGOPY en 2006, qui avait trouvé qu'une anomalie
dans la coloration du liquide amniotique était responsable d'une
mortalité plus élevée en période néonatale
précoce [16]. Imtiaz et al avaient également
trouvé une association entre le liquide amniotique méconial et la
mortalité néonatale [40]. Mais dans notre
étude, cet impact avait disparu dans l'analyse multivariée.
L'accouchement en milieu extra-hospitalier
prédisposait aux décès néonataux dans notre
série, bien que plusieurs études n'ont trouvé aucun
rapport entre le lieu d'accouchement et la mortalité néonatale
[40, 42, 43, 44, 46].Notre résultat corrobore celui de
Lawoyin et al, au Nigéria [49]. Ceci pourrait
s'expliquer par le manque de ressources humaines et matérielles lors des
accouchements en milieu extra-hospitalier, et le mode de transfert pas souvent
médicalisé de ces nouveau-nés. De ce fait, le
nouveau-né est ainsi prédisposé aux infections et à
d'autres troubles tels que l'hypothermie. Ce facteur n'a pas persisté
dans l'analyse multivariée.
Concernant le mode d'accouchement, la césarienne
était un facteur protecteur, et cette association a persisté dans
l'analyse multivariée. Ceci serait lié au fait que l'HGOPY est un
hôpital de référence où sont
référées dans la plupart du temps des parturientes
nécessitant des césariennes d'urgences dont les indications
(pré-éclampsie/éclampsie, souffrance foetale...)
compromettent généralement la survie du foetus. De ce fait, ces
césariennes seraient probablement effectuées avant que ces
indications n'aient un impact néfaste sur le foetus et
éventuellement sur le nouveau-né. Cette trouvaille est similaire
à celle de Zanini et al, et de Kambarami et al [42,
45]. Par contre, dans notre étude, l'accouchement par voie
basse était un facteur de risque de la mortalité
néonatale. Ceci pourrait s'expliquer probablement par le fait que les
indications de césarienne n'étaient pas toujours bien
posées. Ainsi certains accouchements ayant des facteurs compromettant la
survie du foetus et éventuellement celle du nouveau-né, et
nécessitant une césarienne étaient parfois
effectués par voie basse.Cette prédominance de la
mortalité chez les nouveau-nés nés par voie basse pourrait
aussi être liée au fait qu'à l'HGOPY, les
nouveau-nés issus des césariennes étaient
systématiquement admis à l'UNN pour une surveillance pendant au
moins deux jours (période pendant laquelle un bilan paraclinique
était effectué), tandis que ceux nés par voie basse
n'étaient admis à l'UNN que lorsqu'ils étaient issus des
grossesses à risque ou quand ils présentaient des symptômes
et/ou signes de pathologie. De même Ribeiro et al,au Brésil
avaient une trouvaille similaire à la nôtre chez les
nouveau-nés avec faible poids de naissance [33]. Selon
eux, cette association pourrait être due à une mauvaise
qualité des soins lors des accouchements par voie basse, et aux mauvais
choix des modes d'accouchement. Aussi, pour Imtiaz et al, la césarienne
était un facteur de risque des décès néonataux
[40]. Pour d'autres auteurs, le mode d'accouchement n'avait
pas d'influence sur le pronostic des nouveau-nés [41, 42, 44,
46].
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