Institut d'Etudes Théâtrales Université
Paris III - Sorbonne nouvelle
LES FIGURES DE LA RETROSPECTION
ET LES MODES DE RECONSTITUTION
DANS L'OEUVRE DRAMATIQUE DE SAMUEL BECKETT
Mémoire de Master 2 - Recherche en Etudes
théâtrales Sous la direction de Catherine Naugrette
Septembre 2010
MARION CANELAS
2
REMERCIEMENTS
A ma mère et à mon père
Aimants aimés Mes remparts
A Aline Dethise Compagnie salutaire Qui sut m'ouvrir le temps
Clarté venue d'en haut Qui me rendit le Nord Ma plusieurs mon calmant
Pour toujours en mémoire
Et à mon Substantif Masculin
Invariable à jamais accordé au présent
Je remercie plus conventionnellement mais non moins
chaleureusement Madame Catherine Naugrette, dont le savoir et son talent pour
le transmettre sont l'objet de ma grande admiration et la source principale de
ce mémoire. Capitaine de ma première vraie traversée de
l'oeuvre de Samuel Beckett et de ma première exploration des figures du
temps dans les dramaturgies contemporaines, elle m'a armée pour tenter
cette épreuve solitaire.
Pour sa patience et son indulgence, pour la
détermination et l'espoir que fit renaître en moi chacune de nos
rencontres, je lui adresse mon profond respect et ma reconnaissance infinie.
3
SOMMAIRE
LISTE DES ABREVIATIONS 4
INTRODUCTION 6
CHAPITRE I :
L'ETRE BECKETTIEN ET SON RAPPORT AU TEMPS : LA RETROSPECTION
COMME SUBSTITUT DE LA PROJECTION ET LA RECONSTITUTION COMME AVATAR DE
L'ACTION 12
La logique temporelle abolie et la projection interdite
13
L'habitude, reconstitution au quotidien 17
La reprise comme cadre de vie ou la
répétition-dégradation 22
La reconstitution verbale, illusoire évasion face au
souvenir .É 28
CHAPITRE II :
LA RECONSTITUTION DU PERSONNAGE BECKETTIEN ET LA RETROSPECTION
COMME VISION D'ENSEMBLE 36
Le déploiement spatial du ressouvenir 37
La rétrospection « pour se tenir compagnie »
. 43
Le memento mori permanent et le panorama
mémoriel interdit . 50
L'épiphanie ou la révélation d'un sens
à la rétrospection É. 55
CHAPITRE III :
RETROSPECTION ET RECONSTITUTION IMPOSEES : LE CRANE COMME CHAMP
DE
FOUILLE ET L'ENQUETE MALGRE L'ABSENCE DE CRIME . 63
La mémoire, une infection du crâne . 64
La mémoire imposée ou l'examen tortionnaire des
souvenirs de l'autre .. 70 L'enquête policière,
reconstitution d'indices et de preuves 75
La rétrospection perpétuelle, châtiment
pour susciter le repentir ? 81
CONCLUSION 88
BIBLIOGRAPHIE 92
4
LISTE DES ABREVIATIONS
Chronologie de rédaction des oeuvres convoquées
dans ce mémoire.
Les références aux trente-deux pièces qui
constituent le corpus étudié (dont les éditions en recueil
sont notifiées en bibliographie) seront indiquées entre
parenthèses, dans le texte, par les abréviations ci-dessous
répertoriées, suivies du numéro de la page dont la
citation est extraite.
1947-48
|
Eleutheria
|
(E)
|
1948-49
|
En attendant Godot
|
(EAG)
|
1954-56
|
Fin de Partie
|
(FDP)
|
1956
|
Tous ceux qui tombent
|
(TCQT)
|
1956
|
Acte sans paroles I
|
(ASP I)
|
1958
|
La Dernière Bande
|
(LDB)
|
1959
|
Cendres
|
(C)
|
1959
|
Acte sans paroles II
|
(ASP II)
|
1960-61
|
Oh les beaux jours
|
(OLBJ)
|
1960's
|
Fragment de théâtre I
|
(FDT I)
|
1960's
|
Fragment de théâtre II
|
(FDT II)
|
1962
|
Paroles et Musique
|
(P et M)
|
1962
|
Pochade radiophonique
|
(PR)
|
1962-63
|
Esquisse radiophonique
|
(ER)
|
1963
|
Cascando
|
(Ca)
|
5
1963
|
Comédie
|
(Co)
|
1963
|
Film (scénario)
|
(F)
|
1965
|
Va-et-vient
|
(V-et-V)
|
1965
|
Dis Joe
|
(DJ)
|
1968
|
Souffle
|
(S)
|
1972
|
Pas moi
|
(PM)
|
1974
|
Cette fois
|
(CF)
|
1975
|
Pas
|
(P)
|
1976
|
Trio du fantôme
|
(TDF)
|
1976
|
...que nuages...
|
(QN)
|
1979
|
Solo
|
(So)
|
1980-81
|
Impromptu d'Ohio
|
(IDO)
|
1980-81
|
Berceuse
|
(B)
|
1982
|
Catastrophe
|
(Cata)
|
1982
|
Quad
|
(Q)
|
|
1983
|
Nacht und Träume
|
(N und T)
|
1983
|
Quoi où
|
(QO)
|
6
INTRODUCTION
L'ogre monstrueux qu'est le temps selon Samuel Beckett hante
de ses multiples figures son oeuvre tout entière. Par l'actualisation
qu'induit souvent le théâtre, il se condense dans ses drames, ses
pièces pour la télévision, ses pièces
radiophoniques et ses dramaticules, en un présent absolu qui, parce
qu'il traîne en longueur, « mange sans appétit
»1 les êtres qu'il paralyse. Personnages dotés de
noms ou réduits à une lettre, à un chiffre, à une
fonction, à une voix ou plus radicalement à un seul organe, les
créatures de Beckett sont malgré tout
présentées sur le lieu du drame par la parole qu'elles
profèrent. Cependant, soumises à « cette existence qui ne
connaît plus ni forme ni principe et dans laquelle la vie n'avance plus
»2, elles habitent un présent d'une nature
singulière : il pèse si densément qu'il prend presque
matière et s'étend, amplifié, échangeant son
instantanéité contre une durée sans mesure. Le
passé s'y mêle sans démarcation, s'insinue dans la
pensée qui se déroule pour finalement la boucler. Tout comme
Molloy, déjà, éprouve une impossibilité à
trouver le bon mode pour décrire sa situation temporelle,
« Ma vie, ma vie, tantôt j'en parle comme d'une
chose finie, tantôt comme d'une plaisanterie qui dure encore, et j'ai
tort, car elle est finie et elle dure à la fois, mais par quel temps du
verbe exprimer cela ? »3,
les personnages de l'univers dramatique beckettien se trouvent
cloîtrés dans un présent qui s'éternise.
Transposition chronologique du dispositif spatial instauré dans Le
Dépeupleur, leur temporalité est circulaire,
hermétique à l'avenir. Ils disposent eux aussi d'échelles
diverses, plus ou moins fiables, pour tenter l'évasion mentale mais, de
même que les corps enfermés dans le cylindre
1 Allusion au poème « Ainsi a-t-on beau
», in Samuel Beckett, Poèmes suivi de
Mirlitonnades, Paris, Les Editions de Minuit, 1978, p. 14.
2 G·nther Anders, « Etre sans temps
», in L'Obsolescence de l'homme, trad. par C. David, Paris,
Ivréa / Editions de l'encyclopédie des nuisances, 2002, p.
244.
3 Samuel Beckett, Molloy, Paris, Les Editions
de Minuit, 1951, [1960], p. 53.
7
ne font qu'y revenir lorsqu'ils croient s'en extraire, de
même les personnages théâtraux de Beckett sont
inexorablement ramenés au passé lorsqu'ils tendent aux modes
futur ou conditionnel. Richard N. Coe décrit l'étrangeté
du temps beckettien et l'emprisonnement qu'il constitue pour les êtres
qui l'occupent :
« Tous des étrangers de passage dans les
dimensions données de l'existence, [É] ils se savent
exilés de leur vrai domaine, [É] enfermés contre leur
volonté dans l'espace et plus particulièrement dans le temps.
Mais leurs tentatives pour échapper à ces absolus arbitraires
sont vaines et dérisoires. »4
Comme les galeries du dépeupleur débouchent dans
sa propre enceinte et interdisent la sortie, les projections mentales des
personnages du théâtre de Beckett ne conduisent jamais hors du
présent infini qui fonde leur existence Ð actuelle et révolue
Ð et dans lequel ils s'engluent. Leur acharnement à vouloir le
saisir par les mots, à le définir en langage, se renverse de
lui-même et devient un ressassement du passé pour expliquer le
présent. L'imagination et le projet ne sont plus que des impasses qui
renvoient systématiquement au vécu, proche ou lointain, dernier
ailleurs accessible, d'une banalité accablante puisqu'il est connu
d'avance.
Dans cette temporalité circulaire s'installe de fait
une tension dialectique de la rétrospection qui sera le coeur de notre
exploration : la projection vers l'avant étant annulée, le
souvenir s'impose au personnage comme une condamnation et cependant demeure sa
seule ressource pour sortir du présent. Dans un paradoxe similaire, la
reprise sempiternelle du lourd système temporel est une
malédiction dont le poids ne peut être atténué que
par la reconstitution volontaire. Comment ménager le souvenir
obligatoire grâce à la remémoration spontanée et
comment occuper un présent qui recommence sans cesse grâce
à la reconstitution décidée d'activités
rassurantes, voilà l'interrogation centrale de l'analyse que nous
proposons. Puits sans fond, la mémoire des personnages dramatiques de
Beckett est tantôt l'endroit où ils sont
précipités malgré eux, et
4 Richard N. Coe, « Le Dieu de Samuel Beckett
», in Cahiers Renaud-Barrault n°44, Samuel Beckett - Le
Petit Théâtre de France, Paris, Julliard, 1963, p. 7.
8
tantôt le refuge où ils se
précipitent. Pour le dire en termes bergsoniens5, la
mémoire en tant qu'organe de nutrition est la cause du malheur
d'être, mais elle en est également le remède en tant
qu'organe actif apaisant par sa fonction d'appel. L'individu traîne le
fardeau inaliénable de ses souvenirs et ne peut l'alléger qu'en
choisissant la façon « la moins insupportable » - Beckett
dirait sûrement « la moins pire » - de les invoquer dans sa vie
au présent.
Les figures de la mémoire cognitive que Beckett met en
place sont en effet le moyen de détourner le regard d'un passé de
trop grande portée temporelle ou affective en se référant
à celui, moins troublant, de la connaissance instinctive. Une
remémoration sans risque est alors opérée, celle que Saint
Augustin définit dans sa capacité à transformer la passion
violente vécue en une image rendue inoffensive par la mise à
distance :
« Ma mémoire conserve aussi les diverses passions
de mon esprit, non pas en la même manière qu'elles sont en lui
lorsqu'il les ressent, mais en une autre manière fort différente
et conforme au pouvoir qu'elle a de conserver les images et les espèces
des choses. Car je me souviens sans être gai, d'avoir été
dans la joie ; sans être triste, d'avoir été dans la
tristesse. »6
Dans cette approche du souvenir, le personnage de Beckett
utilise sa condition d'être invariablement tourné vers le
passé pour fabriquer du présent. Prise comme un appui, son
histoire fournit alors de la matière aux menues occupations quotidiennes
que sont par exemple la conversation ou la divagation. L'existence
passée, abordée par le filtre de la mémoire
immédiate, renferme les modèles énonciatifs et
situationnels qui permettent la reconstitution d'activités
divertissantes et derrière lesquels dissimuler des souvenirs plus
pesants.
Car l'esprit contient aussi des événements d'une
antériorité plus difficile à supporter, que nous
appellerons ressouvenirs par fidélité à la
définition qu'en donne Sren Kierkegaard et qui leur confère une
épaisseur plus complexe :
5 Voir Henri Bergson, Matière et
Mémoire, Paris, P.U.F., « Quadrige », 1939, [1993], p.
66.
6 Saint Augustin, Les Confessions, trad.
par R. Arnauld d'Andilly, Paris, Gallimard, « Folio Classique »,
1993, Livre X, Chap. XIII, p. 351.
9
« Tout ressouvenir est un secret, puisqu'on est toujours
seul à en avoir conscience. Même si plusieurs sont
intéressés à l'événement objet du
ressouvenir chez l'homme qui en prend conscience, celui-ci est néanmoins
seul à connaître son ressouvenir dont le caractère public
apparent est purement illusoire. »7
Cette dimension secrète du ressouvenir nous fera
examiner chez l'être beckettien l'opposition interne des deux
mémoires distinguées par Bergson. Il s'agira de montrer la lutte
qu'elles mènent quand la mémoire logique arme le personnage
contre sa propre mémoire profonde. Des attitudes
remémorées, langagières ou comportementales, se posent
dans ce cas en remparts contre l'invasion du ressouvenir ou contre son
apparition claire et lisible. Cette reconstitution machinale, comme nous le
démontrerons, repose sur la mémoire intellectuelle et entrave le
rappel de la durée. Grâce à elle, le personnage s'aveugle
volontairement devant la succession des jours et des heures.
D'autres fois, au contraire, il faudra nous pencher sur
l'option accordée à l'introspection mémorielle
appliquée, celle qui délaisse l'intellectualité pour
l'idéalité et, lénifiante, reconstitue un univers spatial
où le personnage se retrouve et retrouve les autres qu'il
contient. Dans le monde dramatique beckettien, la sentence proustienne selon
laquelle « l'homme est l'être qui ne peut sortir de soi, qui ne
connaît les autres qu'en soi, et, en disant le contraire, ment
»8 redouble sa nécessité. La compagnie n'est plus
accessible que par la mémoire des êtres disparus et par la
convocation de leur voix grâce au souvenir. Voilà pourquoi dans la
pénombre chère à Beckett, l'être se livre à
l'appel du passé et se recrée un monde. Les souvenirs sont alors
l'équivalent d'objets, de traces, d'indices laissés par les
anciens locataires de l'esprit du souvenant. Le ressouvenir devient un secret
murmuré à soi-même comme une histoire du soir, pour se
calmer et trouver le repos.
7 Sren Kierkegaard (sous le pseudonyme de William
Afham), « In vino veritas », in Stades sur le chemin de
la vie, in OEuvres, trad. par P.-H. Tisseau, Paris, Robert
Laffont, « Bouquins », 1993, p. 810.
8 Marcel Proust, A la recherche du temps
perdu, Paris, Gallimard, « Bibliothèque de la Pléiade
», 1987-89, vol. IV, p. 34.
10
Par ailleurs, nous pointerons aussi qu'à l'heure tant
espérée du grand sommeil, les personnages ne parviennent pas
toujours à la mémoire finale, trop attachés à leur
habitude d'une vision détaillée. Enclins comme toutes les figures
beckettiennes à la réconfortante reconstitution qu'est
l'inventaire, ils n'aperçoivent en se retournant sur leur existence
qu'une succession d'instants dont ils n'arrivent pas à concevoir
l'ensemble. Le panorama du mourant leur est dénié et avec lui
l'idéalisation globale de leur vie révolue. Dans l'éternel
problème beckettien d'indistinction entre motif et conséquence,
la mort apparaît aussi impossible que la prise de conscience dont elle
dépend. De même que les nuages du ciel de Molloy ne se
dégagent qu'au soir pour laisser voir le soleil se coucher, de
même la vie semble réclamer une « dernière lueur
» pour pouvoir définitivement s'éteindre9. Cette
éclaircie de paix nécessaire à la fin ne surgit chez
Beckett que malgré son personnage. Penché sur un souvenir
isolé, il assiste parfois à l'assomption soudaine d'une
vérité sur l'intégralité de son vécu.
L'épiphanie joycienne déploie alors le présent, non plus
comme quelque chose qui dure, mais comme un instant prégnant qui
rassemble dans le signifiant fugace d'un détail passé l'infini
signifié de l'existence entière.
Enfin, un autre tiraillement de l'être entre
mémoire superficielle et mémoire pénétrante
révèlera la seconde comme dangereuse pour l'esprit à cause
du passé peu connu ou trop sensationnel qu'elle pourrait
révéler. Révéler à soi ou
révéler aux autres. A soi, en effet, lorsque les personnages de
Beckett se font surprendre, déborder, par leur propre ressouvenir, qui
côtoie alors la définition platonicienne de la
réminiscence, en tant qu'il est contenu dans une mémoire
exhaustive qui annule l'oubli par son resurgissement impétueux. Le
personnage est alors la victime de sa mémoire elle-même, assailli
par le flot qui s'en déverse et qu'il ne peut endiguer. Il ne dispose
plus que d'un médiocre arrangement avec lui-même : l'attribution
du ressac des bribes à une voix étrangère, combattant son
ressouvenir comme son système immunitaire
9 Voir Samuel Beckett, Molloy, op.
cit., p. 88.
11
rejetterait un virus. Egalement tenu secret au regard des
autres, le ressouvenir semble parfois convoité par des forces
extérieures qui poussent à une reconstitution policière.
Dans une analyse du langage beckettien, à propos de
Catastrophe, Marie-Claire Pasquier montre bien l'examen Ð presque
chirurgical Ð auquel sont soumis les personnages :
« La créature, sur son piédestal,
affublée d'un sinciput, y prend quelque chose de la bête curieuse,
de l'objet prétexte à une leçon d'anatomie. Quant à
ceux qui l'examinent, ils se réduisent à un rôle, à
une fonction, à une certaine conception de l'art et du pouvoir. Le mot
fige l'organe vivant en chose. »10
L'humanité beckettienne, comme l'énonce Alain
Badiou, « n'est plus composée que de crânes d'où
suintent les mots »11. Elle est réduite à ce que
la tête renferme : la mémoire. Aussi, dans le théâtre
de Beckett, on Ð des êtres, quelqu'un, une voix, un
projecteur Ð cherche à tirer du crâne de l'Autre la
vérité qu'on suppose qu'il recèle. Dernier lieu
d'un avatar de collision dramatique, l'intérieur de la tête du
personnage est investi par autrui qui réclame une sorte de confession.
Mais comme l'objet sur lequel doit porter cette confession n'est pas
explicitement indiqué, le souvenant dévide en vrac et en boucle
l'intégralité de sa mémoire, dans l'espoir confus de se
délivrer en donnant par hasard satisfaction à la puissance
inquisitrice qui le harcèle.
C'est alors que la rétrospection acquiert sa
qualité de torture : aux questions sur le passé lui-même
s'ajoutent celle du sens de sa poursuite. En se souvenant sans cesse et par
obligation, le personnage s'interroge quant à la raison de ce mouvement
de pensée, quant à son statut apparemment punitif et à son
commanditaire inconnu ou méconnaissable. La traque qu'on
inflige à sa mémoire ne se justifie pas et produit un
sentiment de faute qui ne s'éclaircit jamais. Dans le
théâtre de Beckett, le souvenir est une pénitence à
perpétuité, qui invite au repentir mais n'offre pas la
rédemption.
10 Marie-Claire Pasquier, « Blanc, gris, noir,
gris, blanc », in Cahiers Renaud-Barrault n°106, Duras
Ð Beckett, Paris, Gallimard, 1983, p. 63.
11 Alain Badiou, Beckett. L'Increvable
désir, Paris, Hachette Littératures, « Pluriel Lettres
», 1995, p. 25.
12
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