PARAGRAHE II : L'ALLEGEMENT DU SERVICE DE LA
DPI: TECHNIQUE DE CONVERSION
Il faut entendre par allègement de la dette toute sorte
de réaménagement de celle-ci qui vise à diminuer son
fardeau total.304 Il y a donc allègement de la dette lorsque
la valeur actualisée305 des obligations au titre de service
de la dette est réduite ou les échéances sont
différées de sorte que les obligations à court terme au
titre du service de la dette sont moins élevées. Ce qui peut se
mesurer dans la plupart des cas par une durée plus longue de ces
obligations. Autrement dit les paiements deviennent plus lourds à la fin
de la durée de vie de l'instrument d'emprunt. Cependant, si le
réaménagement de la dette donne lieu à des modifications
de la valeur actualisée et de la durée des obligations dont les
effets sur le fardeau de la dette se compensent, il n'y a pas allègement
de la dette à moins que l'effet net ne soit important, comme dans le cas
d'une forte réduction de la VA ou d'un accroissement considérable
de la durée. De ce qui précède, l'allègement de la
dette publique peut consister en la remise en cause des privilèges
attachés aux titres (A), ce qui porte atteinte à leur
sécurité (B).
A. LA REMISES EN CAUSE DES PRIVILEGES
Afin d'attirer des investisseurs potentiels, l'Etat rattache
généralement des avantages aux titres d'emprunts publics. Du fait
des fluctuations monétaires et des chocs économiques, il peut
arriver que l'Etat remette en cause ces privilèges. Il s'agit des
privilèges financiers (1) et des privilèges non financiers
(2).
304 CAA, Dette publique et publiquement garantie du Cameroun :
portefeuille au 31 décembre 2010 et analyse de la viabilité ;
op.cit. P. 81.
305 Valeur actualisée (VA), elle est égale
à la somme des obligations futures au titre du service de la dette
existante (principal, intérêts, commissions...), actualisée
à un taux d'intérêt donnée sur le marché
.Quand le taux d'intérêt d'un prêt est inférieur au
taux du marché, la valeur actualisée de la dette est
inférieure au capital.
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Les mécanismes de gestion de la dette publique
intérieure du Cameroun : le cas de la titrisation
1. LA SUPPRESSION DES PRIVILEGES FINANCIERS
L'Etat pour s'attirer des éventuels investisseurs passe
généralement par le taux d'intérêt. En effet le taux
d'intérêt est un moyen par lequel l'Etat s'assure le succès
dans l'émission des titres. Ceux-ci peuvent être émis soit
au pair, soit au-dessous du pair.
En d'autres termes, il doit choisir un taux
d'intérêt assez élevé pour retenir l'attention des
prêteurs d'une part, et d'autre part, ce taux ne doit pas être trop
élevé pour ne pas favoriser la classe qui prête et qui en
bénéficie. Or, lorsque le taux d'intérêt servi est
trop élevé, il constitue une charge assez lourde pour le budget
de l'Etat. Cette charge peut empêcher celui-ci d'atteindre ses objectifs,
ce d'autant plus que la dette de l'Etat se fait par affectation spéciale
des recettes306. A cet effet et dans le but d'alléger le
service de la dette, l'Etat peut procéder lorsque les conditions du
marché le lui permettent, à la suppression de certains
privilèges financiers. Généralement, l'Etat attend qu'il y
ait abondance des titres sur le marché ce qui favorise la chute des taux
d'intérêts.
D'un autre côté, l'Etat peut par anticipation se
préserver de certains effets du service de la dette, par la technique de
l'indexation. Cette technique « dans une conjoncture
inflationniste génératrice d'évaluation de la monnaie, car
la dévaluation ou dépréciation monétaire si elle
est bénéfique pour l'Etat qui voit le service de la dette
diminuer ne l'est pas en revanche pour les investisseurs qui sont payés
en monnaie dépréciée »307.
La dévaluation du Franc Cfa intervenue en 1994, a produit de tels
effets308. L'indexation peut donc se faire sur une devise
étrangère pour limiter la fuite des capitaux à
l'étranger, sur l'or pour encourager les spéculations sur une
dévaluation ou sur certains produits. L'allègement du service de
la dette peut également passer par la suppression de certains avantages
non financiers.
306 Projet de loi portant loi de finances pour l'année
2013, op.cit.
Art. 15 du 85/1176 du 28 août 1985 créant et
organisant la CAA, op.cit. 307MUZELLEC (R), Finances
publiques, op.cit. P. 423
308Pour mieux comprendre les effets de la
dévaluation sur le service de la DPI au Cameroun, voir M. KAME BA BILLA
(T. U), « dette publique et investissement privé :
effet d'éviction versus effet de levier »,
Université de YAOUNDE II- mémoire DEA-PTCI, 2008.
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2. LA SUPPRESSION DE CERTAINS AVANTAGES NON
FINANCIERS
Les avantages pratiques, juridiques et fiscaux, font parties
des privilèges que l'Etat rattache aux titres qu'il émet. Ainsi
donc et en temps opportun309, l'Etat peut procéder à
la
suppression de certains de ces privilèges pour
l'allègement du service de la dette publique.
Les avantages pratiques et juridiques ne constituent pas une
charge qui nécessite un allègement particulier. L'accent est
plutôt mis sur les avantages fiscaux servis. En effet, les
exonérations fiscales définitives ou provisoires
constituent des manques à gagner pour le
Trésor public. Pour le Professeur
MUZELLEC, « ce système alourdi la
charge de l'Etat et favorise les nantis qui peuvent prêter le plus
». Au total tous ces procédés participent
à l'allègement effectif de la dette publique. Cependant leur mise
en oeuvre constitue à quelques égards une atteinte à la
sécurité des titres.
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