Nous distinguons la liquidité d'une entreprise et la
liquidité d'un actif. Cette dernière est définie comme la
capacité de l'actif à pouvoir être vendu rapidement et
à un juste prix (C. Karim, 2008).
Cependant, « la liquidité d'une entreprise
est son aptitude à faire face à ses échéances
financières dans le cadre de son activité courante, à
trouver de nouvelles sources de financement, et à assurer ainsi à
tout moment l'équilibre entre ses recettes et ses dépenses
»49.
Ainsi, le risque d'illiquidité provient des
difficultés à mobiliser des fonds à coût raisonnable
(emprunts) ou à vendre des actifs financiers. Toute institution
financière doit faire l'arbitrage entre liquidité et
rentabilité. Selon C. Karim (2008), il existe trois sources
d'incertitudes face au risque de liquidité qui poussent les banques
à développer une gestion spécifique. La première
est le retrait massif des clients lors d'un choc macroéconomique ou une
crise systémique. La deuxième source d'incertitude est le fait
que l'arrivée de nouveaux clients et de nouveaux emprunts est
incertaine. Et la troisième est que la banque peut avoir pris des
positions dans des produits dérivés à effet de levier
générateurs de grands besoins en liquidités dans les
périodes de crises. Cependant il faut noter que pour les banques
islamiques cette dernière source d'incertitude ne les concerne pas car
les produits dérivés sont prohibés par la
Gharia.
Pour les IFI, le risque d'illiquidité est d'une
importance particulière. En effet, sachant que les emprunts à
intérêt sont prohibés par la Gharia, les banques
islamiques ne peuvent pas recourir à ce mécanisme pour se
ressourcer en argent liquide. De même la Gharia n'autorise pas
la vente d'une créance en dehors de sa valeur nominale. Par
conséquent, il est exclu pour les institutions financières
islamiques de s'alimenter en argent liquide en vendant des actifs financiers
(BID, 2002. p.59). Ainsi la finance islamique ne dispose pas d'un marché
secondaire50 lui permettant de se refinancer sur un marché de
gré-à-gré. Ensuite, la spécificité des
actifs conformes à la Charia les rend difficilement
négociable.
49 VERNIMMEN.
http://www.vernimmen.net/html/glossaire/definition
liquidite du bilan.html
50 Le marché secondaire est celui sur
lequel sont échangés des titres financiers déjà
créés (sur le marché primaire). En assurant la
liquidité des investissements financiers, le marché secondaire
assure la qualité du marché primaire et l'évaluation des
titres
financiers.
VERNIMMEN. www.vernimmen.net
L'Analyse des produits financiers islamiques et la gestion des
risques : Moucharaka et Mourabaha
DIOP Moussa 46
De même, le système financier islamique manque
d'un marché interbancaire international qui lui permettrait de se
refinancer rapidement mais aussi ne dispose pas de préteur de dernier
recours qui éviterait au système de tomber dans une crise majeure
lors de pénurie de liquidité.
Gestion du risque d'illiquidité
Les banques conventionnelles utilisent plusieurs
méthodes afin de se prémunir de ce genre de risque.
Premièrement, elles peuvent faire appel au marché interbancaire
où elles empruntent les fonds nécessaires au remboursement des
dépôts. Deuxièmement, elles peuvent utiliser leurs
liquidités au bilan et troisièmement, vendre des actifs dont
elles disposent. L'ensemble de ses méthodes est défini sous
l'acronyme GAP (Gestion Actif-Passif).
Pour les IFI, c'est très délicat de
gérer ce risque par manque de préteur de dernier recourt ou bien
un marché interbancaire permettant de se refinancer.
En effet les IFI ont beaucoup d'actifs qui sont de courts et
moyens termes car les comptes de dépôts sont majoritaires. Ainsi
pour réduire le risque de maturité des actifs, elles ont
développé des capacités pour le financement et
l'investissement, ce qui augmente la maturité moyenne des actifs, mais
le refinancement demeure essentiellement à court terme. Il est
nécessaire d'apporter des solutions efficaces pour la gestion ALM
51 (gestion actif-passif).
C'est ainsi qu'en 2008, La Banque Centrale de Bahreïn
(BCB) a lancé un nouvel instrument financier islamique nommé
l'Islamic Sukuk Liquidity Instrument (ISLI) permettant
l'amélioration de la liquidité à court-terme. En effet, ce
produit est conçu pour permettre aux IFI et aux banques conventionnelles
d'avoir accès à une liquidité à court terme contre
des Soukouk Ijara souverains.
Le but de la stratégie de la BCB est de créer
un marché Soukouk plus profond et plus liquide, ce qui devrait
stimuler et promouvoir un marché financier islamique plus actif.