La conception cartésienne de léhomme selon René Descartes( Télécharger le fichier original )par Placide IPAN MOLOUASHUNI Institut supérieur de philosophie Saint-Joseph MUKASA Yaoundé Cameroun - Baccalauréat 2011 |
III.2. THEORIE OCCASIONALISTEA en croire Christian GODIN, l'occasionnalisme est une « doctrine des causes occasionnelles défendue par Malebranche (1638-1715) et des disciples de Descartes comme G. de Cordemoy (1628-1684) et A. Geulincx (1624-1669). Elle soutient que Dieu est la seule cause réelle de tous les événements qui affectent la nature et l'existence humaine »75(*). Mais, l'occasionnalisme dont il est question ici est celle de Malebranche, qui tire son origine dans cette affirmation très religieuse de Descartes, quand il dit : « je conçois un Dieu souverain, éternel, infini, immuable, tout connaissant, tout-puissant, et créateur que universel de toutes les choses qui sont hors de lui, celle-là, dis-je, a certainement en soi plus de réalité objective que celles par qui les substances finies me sont représentées »76(*). Mais dans la pensée malebranchienne, l'occasionnalisme est une doctrine qui opine que : « Dieu seul est une cause véritable, et que les êtres créés ne sont que des causes occasionnelles, c'est-à-dire que ce système attribue à Dieu seul la puissance d'agir et ne regarde la créature comme une occasion dont Dieu se sert pour produire tous les effets que nous admirons dans le monde »77(*). Dans son livre Lumière et mouvement de l'esprit, Malebranche stipule « [...] qu'il est absolument nécessaire que Dieu ait en lui-même les idées de tous les êtres qu'il a créés, puisque autrement il n'aurait pas pu les produire, et qu'ainsi il voit tous ces êtres considérant les perfections qu'il renferme auxquelles ils ont rapport »78(*). Et il ajoute : « Dieu a dû établir en nous les causes occasionnelles de nos connaissances pour bien des raisons dont la principale est, que sans cela nous n'eussions pas été les maîtres de nos volontés. Car, comme nos volontés doivent être éclairées pour être excitées, s'il n'était nullement en notre puissance de penser, il n'y serait pas de vouloir. Nous ne serions donc point libres d'une parfaite liberté, ni par conséquent en état de mériter les vrais biens pour lesquels nous sommes faits »79(*). C'est en reprenant le problème posé par Descartes que Malebranche essaiera de le résoudre à sa manière comme une philosophie qui prend sa source, défend et affirme obligatoirement l'existence de Dieu. Toutefois, il renonce de l'expliquer biologiquement et déplace le problème au niveau métaphysique en faisant intervenir Dieu. Dans la recherche de la vérité, il explique les mouvements physiques par l'intervention de Dieu, alors même que nous croyons décider de nos faits et gestes. Selon Malebranche, en vertu de ce système des causes occasionnelles ou occasionnalisme, le corps et l'âme sont deux substances complètes et indépendantes qui ne peuvent rien l'une sur l'autre : leur union se fait en et par Dieu. Le corps n'est que l'occasion pour Dieu d'agir en nous et de réaliser ainsi sa providence. Le corps n'est donc pas la cause occasionnelle de l'action divine sur la terre. Il continue cette démonstration de l'occasionnalisme en établissant une nette distinction entre la foi et l'intelligence : « la foi est un don de Dieu qui ne se mérite point : mais l'intelligence ne se donne ordinairement qu'aux mérites. La foi est pure grâce en tous sens : mais l'intelligence de la vérité est tellement grâce, qu'il faut la mériter par le travail ou la coopération à la grâce »80(*). Et Louis DIMIER dira dans l'avant propos des oeuvres choisies de Descartes que : « Don Robert, enseigne fort témérairement une théorie de l'Eucharistie que Descartes n'avait fait que proposer, et qu'il tira des lettres communiquées. Enfin avec ses causes occasionnelles, sa vision en Dieu, Malebranche mit en paradoxe tout le système »81(*). En résumé, l'occasionnalisme dont nous venons de parler est une affirmation très religieuse de la pensée cartésienne reprise par Malebranche. Ce dernier, prêtre de l'oratoire et disciple de Descartes, a compris la tendance très religieuse de la pensée de son maître. C'est une vision qui attribue tout à Dieu et l'homme qui est créé par Dieu devient un sujet dirigé et commandé par l'être infini. Une telle position bien entendu est contestée par les athées. Aussi n'y a-t-il pas lieu de penser l'athéisme s'enracine également dans « le cogito ergo sum » du fait que Descartes a mis l'homme au centre de toute sa pensée ? Autrement dit « Je pense donc je suis » n'est-il pas une façon de nier indirectement voire discrètement l'existence de Dieu ? * 75 Christian GODIN, op.cit, p.898. * 76 René Descartes, OEuvres choisies de Descartes, Tome premier Metaphysique et physique, op. Cit, p.107 * 77 P. VALLET, Histoire de la philosophie, Ed. Imprimerie Emile Martinet, Paris, 1881, p.418. * 78 Nicolas MALEBRANCHE, Lumière et mouvement de l'esprit, op.cit, p.122. * 79 Ibidem, p.p. 223-224. * 80 Ibidem, p.224. * 81 René Descartes, OEuvres choisies de Descartes, Tome premier Metaphysique et physique, Ed. Gernier frères, op.cit, p.XX |
|