La coopération sécuritaire dans le golfe de Guinée à l'épreuve de la criminalité transfrontalière. Etat des lieux et esquisse de solution( Télécharger le fichier original )par Vernuy Eric SUYRU Université de Yaoundé II Cameroun - Master en relations internationales, option intégration régionale et management des institutions communautaires 2011 |
IV. HYPOTHÈSESUne hypothèse est une réponse provisoire à une question. « Etymologiquement, une hypothèse est une thèse mal fondée, qui n'est pas encore étayée et qui peut finalement se révéler juste ou fausse. Ainsi, les hypothèses de travail sont des réponses a priori à l'ensemble des questions que l'on se pose. Il s'agit souvent d'intuitions qui n'ont au départ comme fondement que l'expérience du chercheur ou l'avis d'une personne qui connaît bien le sujet »32(*). Ainsi comme hypothèses de travail à cette étude, nous suggérons : 1- Les difficultés de mise en oeuvre de la coopération sécuritaire seraient un facteur déterminant d'enracinement et de multiplication des actes de criminalité transfrontalière dans le golfe de Guinée. 2- Les voies de renforcement de la coopération sécuritaire passeraient par la modernisation de la gouvernance des espaces transfrontaliers et la concrétisation d'un système autonome de sécurité collective dans le golfe de Guinée. V. MÉTHODOLOGIELa méthodologie employée dans le cadre de ce travail s'articule autour de trois axes complémentaires, permettant d'assurer la logique et la cohérence de notre démarche scientifique. - Collecte des données Pour vérifier les hypothèses susmentionnées, la méthode de collecte des données axée à la fois sur l'analyse documentaire et sur l'observation empirique des faits nous a semblé opportune. En effet, la recherche documentaire consistait à consulter la littérature spécialisée sur la question faisant l'objet de notre étude d'une part, et des déclarations, résolutions, communiqués et actes juridiques officiels, ainsi que des données statistiques d'autre part émanant des organismes publics et privés. Dès lors, outre les travaux consacrés aux enjeux et défis sécuritaires dans le golfe de Guinée lues et étudiées provenant essentiellement du Centre de Recherche d'Etudes Politiques et Stratégiques (CREPS) de l'Université de Yaoundé II-SOA, de la Fondation Paul ANGO ELA de Géopolitique en Afrique Centrale (FPAE) et de la bibliothèque de l'IRIC, nous avons également exploité les supports numériques et sources fiables d'information provenant de nos recherches sur Internet. Sur le terrain, l'observation a été particulièrement sensible à l'évolution de l'actualité sur les dynamiques sécuritaires en cours, eu égard au foisonnement des actes de criminalité dans les espaces considérés. - Analyse des données Les données collectées ont été passées au crible d'une analyse pluridisciplinaire. Le choix de ce modèle d'analyse se justifie par les données de diverse nature exploitées dans le cadre de nos recherches. Le modèle économique nous a permis de mettre en exergue le paradoxe existant entre le potentiel des ressources naturelles dont regorgent les Etats du golfe de Guinée et la pauvreté dans laquelle sont plongées leurs populations. Ainsi, nous pouvons expliquer la multiplication des actes illicites et de piraterie maritimes qui essaiment la région à partir des motivations d'ordre économique. Le modèle juridique nous a permis d'analyser les instruments juridiques nationaux, bilatéraux, régionaux et internationaux adoptés par les Etats dans le golfe de Guinée pour lutter contre les actes de criminalité transfrontalière. A cet effet, nous expliquerons la faiblesse opérationnelle de la coopération sécuritaire dans cette région par l'absence de textes juridiques de coopération bilatérale, régionale et interrégionale adéquats. Le modèle sociologique nous a permis de mettre en relief les revendications des différents groupes sociaux impliqués dans la production et ou la régulation de l'insécurité dans le golfe de Guinée, susceptibles d'expliquer la diversité voire l'inconciliabilité des motivations et intérêts de chaque acteur et groupe d'acteurs. Le modèle géopolitique enfin a été convoqué pour analyser les logiques et intérêts des différents acteurs riverains et étrangers impliqués dans la sécurisation des zones dangereuses du golfe de Guinée. Etant entendu que cette région revêt une importance géostratégique, eu égard à l'importance de ses ressources naturelles. C'est donc à partir de la course vers l'exploitation de ces ressources que nous pouvons comprendre l'intérêt que les grandes puissances portent à cette région, à travers la mise en oeuvre des stratégies solitaires de sécurisation de leurs approvisionnements miniers et halieutiques. C'est donc à partir du modèle de la pluridisciplinarité que nous avons pu analyser les jeux et enjeux de la coopération sécuritaire à l'aune de la multiplication des pratiques de criminalité transfrontalière dans le golfe de Guinée. - Interprétation des données Pour interpréter les données collectées et analysées dans nos recherches, nous avons eu recours à trois paradigmes des relations internationales : Tout d'abord, il s'agit du paradigme de l'intergouvernementalisme. En effet, ce paradigme postule que les décisions des organisations internationales résultent d'un processus de marchandages-négociations entre les Etats rationnels, membres de celles-ci. Stanley HOFFMANN considère ainsi la mise en commun des souverainetés nationales au sein des organisations internationales et régionales comme un facteur de multiplication de la puissance. Ainsi, les difficultés actuelles de mise en oeuvre de la coopération sécuritaire dans le golfe de Guinée pour lutter contre la criminalité transfrontalière dans cette région semblent tributaires du faible degré de coordination et d'harmonisation des politiques sécuritaires des différentes initiatives à l'oeuvre dans cet espace. De ce fait, cette coopération sécuritaire apparait comme une contingence et comme le produit d'un processus de marchandages-négociations entre les Etats africains entre eux au sein de la CEDEAO, de la CEEAC et de la CGG, et entre ces derniers et les partenaires étrangers. Ensuite, nous avons le paradigme réaliste. A travers ce paradigme, nous voudrons montrer que le concept de sécurité nationale est à la fois au fondement et à la fin de toute politique extérieure de l'Etat, y compris celui du golfe de Guinée. Pour ce faire, ce dernier, en coopération avec d'autres, devrait concilier ses moyens politico-diplomatiques à ses capacités militaires pour mieux se prémunir des effets du phénomène de la criminalité transfrontalière qui menacent sa sécurité. D'où l'édification d'un système autonome de sécurité collective dans le golfe de Guinée, qui permettrait de lutter efficacement contre ce phénomène et de réaliser la sécurité nationale de tous par tous et pour tous, s'avère être un impératif catégorique pour la viabilité politico-sécuritaire de la région. Enfin, nous avons convoqué le paradigme du transnationalisme pour mettre en exergue l'importance du rôle de la pluralité d'acteurs autres que les Etats dans la production et la régulation de la criminalité transfrontalière dans le golfe de Guinée. Car, du fait de la nature même de la criminalité qui écume la région, nous sommes amenés à constater que les groupes criminels constitués en réseaux maffieux profitent de la porosité et du décloisonnement des frontières nationales pour transnationaliser, régionaliser et internationaliser leurs activités qui menacent l'équilibre sécuritaire du golfe de Guinée. De ce fait, il faudrait que les Etats de la région renforcent le volet opérationnel de leur coopération par l'institution de patrouilles conjointes au niveau de leurs frontières terrestre et maritime s'ils espèrent dissuader, démanteler et arrêter les gangs de banditisme transfrontalier. * 32 Frédéric HERAN, La réalisation d'un document scientifique, mémoire de DEA, thèse, article..., séminaire méthodologique de l'école doctorale des sciences économiques et sociales, Université de Lille I, 2003, p. 35 |
|