1.3- Les circonstances sociohistoriques et les
systèmes de culture adoptés
Comme toutes les sociétés, la communauté
concernée par notre étude est passée de la chasse à
l'agriculture. Cette transition aurait été possible grâce
à l'ingéniosité métallurgique de leurs voisins
`'Taapu'' du canton de Bitchabé qui sont eux, par nature,
travailleurs du fer. C'est donc grâce aux outils achetés à
Bitchabé (houes, coupe-coupe, etc.) que l'agriculture est devenue une
activité dans laquelle la culture du mil et du millet occupait une large
place. La culture du Dioscorea sp ne sera adoptée qu'à
la suite d'une crise alimentaire.
1.3.1-De la crise alimentaire à la découverte
du Dioscorea sp
La culture du Dioscorea sp trouverait son origine
lors d'une famine qui aurait sévi dans le milieu. Cette dernière
aurait pour origine une sécheresse doublée d'une invasion des
récoltes de céréales par les sauterelles.
En effet, lors de cette calamité, les gens auraient
mangé les tubercules d'une plante appelée dans le milieu
`'Kpadji'' et en seraient mort. (Il s'agit de Icacina du
Sénégal). Cette plante à tiges herbacées annuelles
poussant en touffe ; les fruits, légèrement sucrés et
peu acides sont consommables ; par contre, le tubercule, d'un goût
aigre et plus acide, consommé, donne des maux de ventre et conduit
à la mort. On comprend dès lors pourquoi les gens en
étaient morts. D'une manière fortuite, les bouviers auraient vu
des singes et des gorilles déterrer les tubercules d'une plante sauvage
pour en manger ; ayant constaté que ces animaux n'en mouraient pas,
ces bouviers auraient imiter les animaux : une nouvelle plante alimentaire
venait d'être découverte. Il fallait donc avoir une nourriture en
abondance. C'est ainsi qu'est née l'idée de cultiver cette
plante. Cette idée répondait à un double
impératif :
- domestiquer le Dioscorea sp afin d'avoir
cette denrée alimentaire en grande quantité ;
- échapper ou du moins atténuer l'effet
néfaste des ravages perpétrés par les criquets sur les
céréales. En effet, si ceux-ci peuvent ravager ces
dernières, leur passage ne causerait aucun dégât à
ce tubercule `'souterrain''.
Cette dernière assertion rejoint celle de DUGAST S.
(1984) cité par KPANTE B. (1996) selon laquelle `'les plantes du
Dioscorea sp sont régulièrement distribués au
Nord de la Préfecture pour limiter le risque que faisaient planer les
invasions de sauterelles à cette région de monoculture de
sorgho'' (DUGAST S., 1984). Ici, il ne s'agit pas d'une introduction du
Dioscorea sp mais d'un renforcement du matériel de plantation
par l'administration coloniale.
Le Dioscorea sp n'est donc pas d'origine
étrangère comme c'est le cas pour le manioc, un tubercule
originaire d'Amérique centrale ; ce que confirme DUGAST S. (1959),
dans `'Economie de l'Ouest Africain'', lorsqu'il affirme que
« l'igname est une plante certainement africaine ».
Tout compte fait, le Dioscorea sp est une plante des
régions chaudes ; dans le cadre de notre étude, c'est la
crise alimentaire qui fut à l'origine de sa découverte et de son
adoption comme culture. Mais comment la cultive- t on ?
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