Conclusion
Présentation des résultats de
l'étude
Cette étude nous a permis de ressortir plusieurs
réalités dont certaines viennent juste confirmer les
études réalisées antérieurement sur la pratique de
l'excision en Côte d'Ivoire. Tout d'abord les résultats
présentés dans les statistiques descriptives nous
révèlent que la pratique de l'excision est plus répandue
chez les musulmans. En effet, parmi les femmes excisées de toute notre
population étudiée, 44% sont musulmanes. Ensuite viennent ceux
qui n'ont pas de religion, puis les catholiques, les protestants et enfin les
animistes et les autres religions viennent en dernière position. A ce
niveau nos résultats ont mis en évidences que la pratique de
l'excision est en majeure partie pratiquée par les musulmans. Cependant,
une classification réalisée sur la population des femmes
excisées nous a montré que cette population est essentiellement
peu scolarisée (les niveaux d'instruction les plus observés sont
le primaire et quelques fois le secondaire). Cette classification a fait
ressortir quatre grandes classes.
La première classe est celle des étrangers
(maliens, burkinabés, nigériens guinéens et autres). C'est
une classe dominée par les musulmans dans laquelle près de la
moitié des femmes excisées ont une forte propension à
vouloir exciser leurs filles.
Le deuxième groupe est quant à lui aussi
constitué des musulmans mais de nationalité ivoirienne cette fois
ci. C'est le groupe constitué des Mande du Sud et d'une partie des Akan.
Près du tiers des femmes présentes dans cette classe ont un avis
favorable vis-à-vis de la de l'excision.
La troisième classe est celle des groupes ethniques qui
sont pour la pratique de l'excision. Elle est constituée des Mande du
Sud, des Krou et des Gur. Cette population est structurée en deux
principales religions que sont les animistes/traditionnelles et les musulmans.
Ceux qui n'ont pas de religion représentent à peu près le
tiers de cette classe.
La dernière classe est quant à elle
constituée de détracteurs de l'excision; ce sont les Krou et les
Mande du Sud qui sont chrétiens (catholiques et protestants).
Avec cette classification, on constate de nouveau que les
groupes ethniques dans lesquels l'excision est plus répandue (Mande du
Sud, Krou et Gur) ne sont pas essentiellement totalement constitués de
musulmans. Il existe également des peuples de l'ouest de la cote
d'ivoire qui sont chrétiens ou animistes, dans lesquels l'excision est
également pratiquée. Cette dernière observation devient un
contraste avec l'idée selon laquelle l'excision est le fait des peuples
musulmans. Même si le test d'indépendance réalisé
dans cette étude nous montre une certaine liaison entre la religion et
la pratique de l'excision, la recherche
Religion et pratique de l'excision en Côte d'Ivoire
ENSEA, Mai 2012
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des motifs poussant à cette pratique
révèle le contraire. En effet, lorsqu'on considère la
population des personnes qui veulent que l'excision soit
perpétuée, on constate que la nécessité religieuse
n'est pas la raison la plus évoquée, et ceci reste valable pour
les musulmans et les animistes. En effet, c'est la tradition qui est la raison
la plus fréquente parmi les raisons évoquées par les
pratiquants de l'excision. La religion n'est pas non plus la deuxième ni
même la troisième raison la plus évoquée car
après la tradition, viennent successivement, l'espérance d'une
meilleur chance de mariage, la préservation de la virginité et
l'hygiène corporelle de la femme. Une analyse pareille faite sur les
femmes Mande du Sud, Krou et Gur qui ont été excisées
conduit à des résultats pareils. Ainsi comme le soulignait le
rapport de l'enquête VBG 2007, l'excision n'est pas le fait de la
religion, mais ce sont les traditions ancestrales qui persistent au sein des
groupes ethniques. Il est donc important de prendre des mesures qui vont
pousser les populations (qui sont pour la plupart sous-scolarisées)
à mettre de côté leurs conceptions traditionnelles afin
d'éradiquer cette pratique qui a des conséquences néfastes
aussi bien sur le plan physique que psychologique des femmes qui en sont
victimes. Les recommandations proposées à cet effet sont
donnés dans le paragraphe suivant.
Limites de l'étude
Le présente étude souffre de quelques
insuffisances qu'il convient de souligner. Tout d'abord, il convient de noter
que les données qui ont servi à notre analyse sont
teintées d'une certaine dose de «genre». En effet, dans le
questionnaire d'Abidjan, la section qui a trait à la mutilation sexuelle
ne concerne que les femmes âgées de 12 à 49 ans. Ainsi, les
avis recueillis sur la question de l'excision sont majoritairement ceux des
femmes. Ces données sont donc susceptibles de nous mener à
conclure à la réticence des individus vis-à-vis de la
pratique de l'excision.
Par ailleurs, notre étude est essentiellement
descriptive c'est-à-dire qu'elle ne fait que révéler les
caractéristiques des individus ou des groupes d'individus qui pratiquent
l'excision. Donc les résultats doivent être
interprétés avec prudence. Particulièrement, il faudrait
éviter de faire de mener des raisonnements inductifs sur la base des
observations.
Recommandations
L'excision étant un véritable fléau
social nuisant à la santé des femmes, il convient d'y
remédier. Ce qui justifie l'intérêt que porte les
organisations internationales pour cette pratique.
En effet, il ressort de notre analyse les recommandations
suivantes :
- Les femmes non excisées ayant une forte
probabilité de ne pas exciser leurs filles à leur tour, l'accent
devrait être mis sur la sensibilisation des mères sur l'aspect
néfaste de la pratique afin que celles-ci l'abandonne.
- Ayant remarqué que les musulmans ont une forte
propension à exciser leurs filles, la recommandation ne peut pas
être directe. Les individus jouissant de la liberté de
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religion, on ne peut pas les empêcher de exercer de
droit reconnu. Par contre, nous avons soulevé le fait que les musulmans
évoquent les hadith afin de justifier la pratique de l'excision, ce qui
pour certains auteurs6 découle d'une mauvaise
interprétation du coran. Nous recommandons ainsi que l'accent soit mis
sur la sensibilisation des chefs religieux.
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6. Voir chapitre 2
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Références bibliographiques
1. Violences faites aux femmes en Afrique de l'Ouest et du
Centre, Unicef, Bureau régional d'Afrique de l'Ouest et du Centre
2. Étude de cas : les déterminants de
l'excision en Côte d'Ivoire
3. Rapport pour l'examen périodique universel de
Côte d'Ivoire - Action Canada for Population and Développent
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