Dédicace
A tous ceux qui sont embarqués
Dans la tourmente du marché
céréalier,
Tanguant sur les vagues tumultueuses de
l'instabilité,
Fouettés par la bise cinglante de
l'incertitude,
Sans boussole ni phare pour les guider,
Mais qui, malgré les tempêtes et
l'obscurité,
S'évertuent à coups de pagaie
désordonnés
Et à rangs dispersés voire
parallèles,
A maintenir leur barque rebelle
Sur le cap de la sécurité
alimentaire.
Kossoumna Liba'a Natali
Avant Propos
La sécurité alimentaire est depuis quelques
années une préoccupation majeure de la société du
Nord Cameroun. Malgré l'actuelle proximité "ville-campagne",
cette question reste particulièrement cruciale en milieu rural.
Ce mémoire de Maîtrise est issu de
l'étude générale sur les filières
céréalières dans la province de l'Extrême-Nord
Cameroun qui entre dans la dynamique de recherche-développement
lancée par le DPGT sur le thème de la sécurité
alimentaire au Nord Cameroun. Elle se présente comme une première
approche de la filière céréalière à
l'Extrême-Nord avec un premier regard sur les acteurs et les
stratégies de commercialisation. Cette étude sur le thème
"analyse des circuits de commercialisation des céréales à
l'Extrême-Nord: Causes et conséquences de l'instabilité du
marché" a été réalisée en tandem avec un
étudiant de l'INA-PG, Nicolas Pirard en ce qui concerne la collecte des
données, leurs dépouillements et la bibliographie.
L'étude était placée sous la
direction de deux chercheurs de CIRAD, Ellen HANAK-FREUD (Paris) et Guillaume
DUTEURTRE (N'Djaména), et encadrée au niveau de
l'université de Ngaoundéré par le Professeur Jean Louis
DONGMO (Doyen de la Faculté des Arts, Lettres et Sciences Humaines) et
au niveau de l'IRAD de Garoua par Timothée ESSANG. La coordination
générale a été assurée par André
TEYSSIER, Directeur Adjoint du DPGT.
Résumé
A l'Extrême-Nord du Cameroun, les aléas
climatiques se traduisent par des variations inter annuelles importantes de la
production des céréales à l'origine de périodes de
pénurie alimentaire principalement les années de
sécheresse, mais aussi de fortes fluctuations des prix dans le temps et
dans l'espace, souvent accentuées par les spéculateurs. Avec
l'augmentation de la population, ces périodes deviennent plus
fréquentes et plus importantes. Elles se traduisent par un
fonctionnement instable des marchés de céréales de la
région. L'objectif de ce travail est de mieux comprendre le
fonctionnement des marchés à céréales et leur
rôle dans la sécurité alimentaire des populations. Pour ce
faire ont été menées des enquêtes sur 22
marchés de la province de l'Extrême-Nord et 3 marchés
frontaliers du Tchad et des entretiens auprès des opérateurs de
la filière (commerçants, transporteurs, transformateurs,
consommateurs, services publics et privés). Les résultats
montrent une augmentation forte des flux de céréales entre les
zones de production et les villes dues à l'augmentation de la population
des villes, une diversité des marchés selon leur situation et
leurs activités (production, collecte, distribution, consommation), une
concurrence dans l'utilisation des céréales consommées
pour la fabrication de bière et l'alimentation. L'instabilité des
volumes et des prix sur les marchés est due principalement aux
difficultés de maîtrise de la production, mais aussi au mauvais
état des voies de communication, et à un manque d'information
fiable en temps opportun. Réduire cette instabilité en vue
d'améliorer la sécurité alimentaire passe en premier lieu
par une meilleure maîtrise de la production en développant les
cultures irriguées, et en facilitant les flux entre les zones de
production et de consommation par l'amélioration des communications.
Abstract
The cereal market of the far north province is instable. Many
studies was done on the causes of this instability but there was no precision
on the importance of each factors on each market. Trough our study, we wanted
to show from a factorial analyse this importance in fact to act effectively.
The study was done on twenty-three markets of the Far North province and three
from Chad. On those markets we meet producers, traders, intermediaries,
hauliers, transformers, consumers. Trough each one, we collect qualitative
information which permit us to realise our factorial analyse on WINSTAT,
a software of data management. The results of the factorial analyse show
to us that the problems of deficit productions, the road and information
accessibility are important on the markets of collect while markets of
distribution and stockage are most influenced by the exponential transformation
of cereals to local beer and speculative stocking.
Key words: Cameroon, Far North, instability,
market, cereals.
Sommaire
1. Contexte général de zone
d'étude
1
1.1. Contexte agro-climatique
1
1.2. Contexte socio-économique
1
2. Problème général:
2
3. Question générale:
2
4. Revue de la littérature.
3
5. Problème spécifique
4
5.1. Question spécifique:
4
6. Objectif général
4
6.1. Objectifs spécifiques:
4
6.2. Hypothèse
4
7. Méthodologie.
5
7.1. Collecte des données
5
7.2. Traitement et analyse des
données
5
8. La filière
céréalière à l'Extrême - Nord du Cameroun
5
8.1. Les bassins de production
5
8.1.1. Les bassins de production du sorgho
pluvial.
5
8.1.2. Les bassins de production du sorgho
repiqué.
5
8.1.3. Les bassins de production du mil
pénicillaire
5
8.1.4. Les bassins de production du
maïs.
5
8.2. Trois types de marchés de la
collecte à la consommation
6
8.2.1. Les marchés de collecte.
6
8.2.2. Les marchés
intermédiaires (distribution et stockage).
6
8.2.3. Les marchés de consommation
7
8.3. Les circuits de commercialisation
7
8.3.1. Les circuits non marchands.
7
8.3.2. Les circuits marchands
7
8.3.3. Circuits de commercialisation dans le
temps.
8
8.3.4. Circuit de commercialisation dans
l'espace.
8
8.3.4.1. Les circuits de commercialisation
des sorghos de saison des pluies.
8
8.3.4.2. Les circuits de commercialisation
des sorghos repiqués.
8
8.3.4.3. Les circuits de commercialisation du
mil pénicillaire.
9
8.3.4.4. Les circuits de commercialisation du
maïs.
9
8.4. Les acteurs, leurs fonctions et leurs
contraintes.
9
8.4.1. Les producteurs.
10
8.4.2. Les grossistes.
11
8.4.3. Les intermédiaires.
12
8.4.3.1. Les collecteurs.
12
8.4.3.2. Les commissionnaires.
12
8.4.3.3. Les rabatteurs.
12
8.4.4. Les détaillants.
13
8.4.5. Les transporteurs.
13
8.4.6. Les transformateurs.
14
8.4.7. Les consommateurs.
14
9. Résultats et Discussions
16
9.1. Une instabilité causée par
la combinaison de plusieurs facteurs
16
9.1.1. Inadéquation entre l'offre et
la demande
16
9.1.1.1. Les effets d'une variation
importante de l'offre
16
9.1.1.2. Une demande croissante
17
9.1.1.3. Une gestion peu rigoureuse des
stocks de céréales par les paysans
17
9.1.1.4. Difficultés de communication
entre zones excédentaires et déficitaires : un obstacle aux
échanges
18
9.1.1.5. Concurrence dans l'utilisation des
céréales entre la fabrication de la bière locale et
l'alimentation
18
9.1.1.6. Des pratiques spéculatives
sur les marchés urbains
19
9.1.2. Des mécanismes de
régulation insuffisants et mal utilisés
19
10. Conclusion et recommandations
20
11. BIBLIOGRAPHIE
21
12. Annexes
25
Tableau
Tableau 1 : Estimations des besoins et des
productions en céréales dans la province de
l'Extrême-Nord
16
Figure et cartes
Figure 1 : Les types de marchés
distingués Carte 1 : Localisation des marchés
enquêtés
6
Figure 2 : Evolutions intra et inter annuelle
des prix du sorgho pluvial sur le marché de Yagoua (Kossoumna, 2000)
16
Annexes
Annexe 1: Guide d'entretien pour les
commerçants.
25
Annexe 2 : Guide d'entre pour les transformatrices
de céréales en bière locale
28
Annexe 3 : Guide d'entretien pour les producteurs de
céréales
29
Annexe 4 : Guide d'entretien pour les
consommateurs
29
Annexe 5 : Fiche d'enquête marchés.
30
1. Contexte
général de zone d'étude
1.1. Contexte
agro-climatique
La province de l'Extrême-Nord présente des
conditions climatiques sévères et capricieuses. Les
possibilités agricoles dépendent étroitement des facteurs
naturels, essentiellement du climat et du sol. Le climat est de type
soudano-sahélien. La température moyenne annuelle est de
28°C. Les précipitations annuelles varient de 400 à 900 mm
(630 mm à Kousseri) et beaucoup d'une année à une autre.
Les abords du lac Tchad avec trois mois de pluies ont un climat
sahélo-soudanien. Maroua baigne dans le climat soudano-sahélien
de plaine et compte cinq mois de pluies (de mai à mi-septembre avec de
fortes précipitations en juillet et août). Le climat
soudano-sahélien de montagne règne sur les Monts Mandara et est
caractérisé par une augmentation sensible de la
pluviométrie due à l'altitude.
Dans l'ensemble, les basses terres tropicales connaissent des
températures élevées aux écarts thermiques assez
importants. L'évaporation est intense à cause de la
sécheresse et accentuée par les pâturages, les feux de
brousse et la surexploitation des terres pour l'agriculture.
La végétation est formée de steppe
à épineux sahélo-soudanienne couvrant la zone du Mayo
Kani, du Mayo Sava et du Diamaré avec au Sud, une savane boisée
soudano-sahélienne. Le secteur soudanien d'altitude couvre le Mayo
Tchanaga alors que le Mayo Danay et le Logone et Chari présentent une
prairie inondable sahélo-soudanienne avec des nuances là
où l'inondation n'est que superficielle. Cette région est
couverte par un paysage boisé établi sur des argiles noires
(kare) et des harde sur les rives du lac Tchad.
Des déficits de production engendrent
fréquemment des disettes. La cause principale semble être d'ordre
agro-climatique. Les sécheresses successives auxquelles sont très
sensibles les secteurs septentrionaux, entraîne en effet un retard
important des semis et un mauvais développement des
céréales. La possible dégradation des sols pourrait
être également à l'origine de la baisse de rendement. De
même l'irrégularité pluviométrique en termes de
calendrier agricole, provoque un surcroît de travail, en obligeant les
planteurs à recommencer les semis. Or, une telle surcharge de travail
augmente la concurrence entre les cultures de rente, par exemple le coton, et
les cultures vivrières.
1.2. Contexte
socio-économique
La province de l'Extrême-Nord abrite une population de
2556778 habitants (DPS, 1997) avec un taux de croissance estimé à
plus de 3,3% (Fusillier et Bom Kondé, 1996), dépassant largement
la moyenne nationale de 2,8%. La zone se caractérise par une grande
variabilité ethnique et religieuse (animistes, musulmans et divers
groupes chrétiens). Cette région est caractérisée
par une faible disponibilité en terres cultivables, l'insuffisance des
infrastructures socio-économiques et une forte densité de
population (77 habitant/km2). Ce fort taux de croissance est en
partie responsable du fort taux de chômage, de l'exode rural massif et
souvent de la saturation foncière dans cette partie du pays auxquelles
s'ajoutent l'éloignement des marchés importants et l'enclavement,
la disponibilité financière, l'analphabétisme 80% de la
population vit en milieu rural avec tout ce qu'elle connaît comme
difficultés d'accès à la terre et aux ressources. Selon
une étude de la Banque Mondiale, l'indice de pauvreté y est le
plus élevé de tout le pays. En temps normal, 4% des enfants de
moins de cinq ans souffrent de malnutrition sévère et 24% de
malnutrition modérée; la mortalité
infantilo-juvénile de 200/1000 est très supérieure
à la moyenne nationale de 130/1000 (Rapport PAM, 1998).
Les exploitations agricoles ont une structure essentiellement
familiale. Le coton et les céréales restent le pivot de
l'agriculture. La sécurité alimentaire dans cette région
est toujours précaire en raison de l'instabilité de la production
agricole menacée périodiquement par la sécheresse, des
dérèglements pluviométriques, les dégâts
liés à l'invasion d'acridiens, d'oiseaux granivores et de
l'instabilité du marché des céréales...
Sur l'ensemble de la région, les cultures de
céréales sont peu mécanisées, l'irrigation
artificielle est marginale, la fourniture et l'utilisation d'intrants, de
fumures minérales et organiques restent faibles. La recherche agricole
avec tout ce qu'elle comporte comme innovation et amélioration de la
productivité demeure marginale pour la population cible. La
qualité des sols et des semences ne cesse de se dégrader et les
rendements tendent généralement vers la décroissance.
Le secteur productif non agricole est peu
développé et la population rurale ne dispose pas, le plus
souvent, de revenus indépendants et parallèles à leurs
activités agricoles. Les faibles mécanismes de survie consistent
principalement à la vente à vil prix du petit bétail dont
les prix s'effondrent avec la hausse des prix des céréales.
Le phénomène migratoire vers la plaine du
Diamaré et la province du Nord s'amplifie de façon
désordonnée avec tout son corollaire de problème foncier,
d'adaptation et de cohabitation.
La province de l'Extrême-Nord du Cameroun est
particulièrement concernée par le problème de
l'insécurité alimentaire. Chaque année dans cette
région, le mot disette revient dans l'actualité comme un
leitmotiv. Les programmes d'aides d'urgence n'ont que peu d'effets sur le cours
des vivriers et sur la situation alimentaire. Comme toujours dans de telles
situations, de « nombreuses familles se nourrissent d'herbes, de
tourteaux, voire de sons charançonnés » (Teyssier A.,
1999).
L'instabilité des prix des céréales a un
impact considérable sur la sécurité alimentaire, sur le
cours des vivriers, sur la trésorerie des producteurs et des
commerçants. Par exemple, la pénurie alimentaire qui a
sévi à l'Extrême-Nord pendant la période de soudure
de 1998 a été l'occasion pour les spéculateurs de
réaliser de somptueux bénéfices. En 1999, ces mêmes
spéculateurs et quelques groupements de producteurs qui se sont
lancés dans le stockage spéculatif, connaissant mal le
marché des céréales, sont sortis endettés,
ruinés et désillusionnés.
Les prix des céréales sur les marchés de
l'Extrême-Nord du Cameroun connaissent donc des variations inter et intra
annuelles fréquentes. Ainsi en 1998, une disette a sévi dans le
département du Mayo-Danay. Les prix des céréales
atteignaient des records alors qu'il y avait les céréales sur les
marchés. La mercuriale de la Délégation d'Arrondissement
de l'Agriculture a relève jusqu'à 55 000 Fcfa en août 1998
pour un sac de sorgho à Doukoula, alors que le même sac
était de 6 000 Fcfa en août 1999 sur le même marché.
Sur le marché de Bogo (d'après les relevés du DPGT), le
cours du sac de sorgho a atteint 30 000 Fcfa le 12 septembre 1998, alors qu'il
était inférieur à 10 000 Fcfa l'année
d'après à la même époque. En plus, les prix des
céréales diffèrent d'un marché à un autre. A
Doukoula en 1998, le sac de sorgho était de 55 000 Fcfa alors
qu'à Bogo le même sac coûtait 25 000 Fcfa.
Ces illustrations montrent que les flambées des prix
provoquant de graves crises alimentaires sont survenues à
l'Extrême-Nord sans que l'état de disponibilité ne suffise
à les expliquer. Ceci nous amène à nous interroger sur
l'importance de chaque facteur sur l'instabilité du marché des
céréales dans les différentes parties de cette
région. Dans ce climat où règnent le paradoxe et
l'équivoque, une étude minutieuse s'impose pour faire surgir les
multiples paramètres qui interviennent et pour mener à partir
d'eux, de nouvelles lectures de faits sans cesse plus complexes. Les enjeux
sociaux, économiques et politiques du marché des
céréales sont bien trop importants dans cette partie du pays pour
mériter notre motivation à réaliser cette étude.
2. Problème
général:
Le problème général de cette étude
est l'instabilité dans le temps et dans l'espace du marché des
céréales dans la province de l'Extrême-Nord Cameroun.
3. Question
générale:
La question générale est de savoir comment
s'explique l'instabilité du marché des céréales
à l'Extrême-Nord Cameroun.
4. Revue de la
littérature.
L''instabilité du marché des
céréales dans la province de l'Extrême-Nord Cameroun
s'explique dans divers rapports et études par des causes nombreuses et
variées.
La mauvaise production est l'une des causes la plus importante
et la plus fréquemment mentionnée dans les rapports
d'activités1(*) et
études réalisées (Teyssier, 1999; coopération
germano-camerounaise GTZ/MINAGRI2). Cette mauvaise production est
causée d'après tous ces rapports et études par les
sécheresses successives qui affectent le Sahel depuis 1968/1969. Aux
effets néfastes de la sécheresse s'ajoutent l'invasion des
cultures par les oiseaux granivores, les criquets, les chenilles, les
pachydermes, les rongeurs, les adventices, les inondations auxquelles il faut
ajouter les difficultés d'accès au crédit de campagne et
à des intrants de qualité au moment opportun qui jouent sur le
niveau de production et partant sur les prix des céréales sur le
marché. Parallèlement, une bonne production peut également
être une source d'instabilité sur le marché (Kossoumna,
2000). En effet, après avoir constitué des stocks importants en
prévision d'une flambée de prix, les spéculateurs ne
savent plus quoi en faire face à une bonne production. Pour laisser de
la place à la nouvelle récolte, ils sont obligés de vendre
leurs stocks. Le marché local se trouve ainsi bondé faisant
forcément chuter le cours des céréales.
La mauvaise gestion des récoltes notamment la
transformation des céréales en bière locale contribue
à la hausse des cours des céréales dans les campagnes et
villes de l'Extrême-Nord du Cameroun. D'après Yonga (1998) la
flambée des prix des céréales dans le monde rural est
principalement causée par la bière locale qui est pointée
du doigt aussi bien par les pouvoirs publics que les intervenants des
Organisations Non-Gouvernementales (ONG). A Douvangar (village où
l'étude a été menée), le pourcentage des familles
qui font de la bière locale est de 68% (41/60). Dans ce village, une
femme qui prépare régulièrement de la bière aurait
besoin de 1 260 kg de mil par an. Les 41 vendeuses utiliseraient donc 51 660 kg
par an. C'est d'après l'auteur un chiffre effroyable car une quarantaine
de femmes qui noient plus de 50 tonnes de mil dans la bière aggravent
sans doute la pénurie surtout lorsque certaines vendeuses se servent du
grenier familial comme source de matière première à leur
activité. Les rapports d'activités de l'ONG britannique Actions
Againts Hunger3(*) note
également que l'activité de transformation des
céréales en bière locale influe énormément
sur les prix et partant sur la sécurité alimentaire à
l'Extrême-Nord par « gaspillage » de quantités
non négligeables de céréales. Chez les Toupouri du Mayo
Danay, 30 % de la production de grain sont utilisées dans la fabrication
de la bière locale.
La contrainte de liquidité est également une
cause de l'instabilité du marché mentionnés par Mathieu et
Teyssier (2000). Ces contraintes obligent les producteurs à vendre une
bonne partie de leur production à la récolte pour pouvoir acheter
ce dont ils ont envie: des animaux, des produits de premières
nécessités, des cadeaux, de petits équipements, des
investissements de campagne (main-d'oeuvre, crédits-intrants,
pesticides...) et pour calmer l'ardeur des créanciers notamment les
usuriers et les commerçants (remboursement des emprunts après la
récolte...). La mise sur le marché d'une quantité
importante de céréales fait chuter les prix de ces derniers au
grand bonheur des spéculateurs qui achètent de grandes
quantités pour les stocker. Parfois, le stock de sorgho ou de maïs
qui reste dans les greniers des producteurs n'est pas suffisant pour nourrir la
famille en période de soudure. Il faut alors en acheter au marché
à des prix qui ont doublé depuis la récolte. De nouvelles
dettes sont contactées et le cycle infernal de
l'insécurité alimentaire se poursuit car rares sont les
cultivateurs à profiter de la variation saisonnière des cours des
céréales qu'ils produisent. Peu d'entre eux disposent en effet
d'une trésorerie qui leur permettrait de stocker leur production en
attendant un relèvement des prix.
Le taux élevé des pertes qui surviennent
après les récoltes et l'afflux massif, spontané et
régulier des populations en provenance des pays voisins concourent selon
l'Office céréalier4(*) à la baisse de la production vivrière et
à la hausse des prix sur le marché.
L'enclavement des régions isolées en saison des
pluies complique d'après Teyssier (1999) l'approvisionnement en
céréales de nombreux marché, ce qui se répercute
sur la disponibilité et les prix en produits vivriers des régions
septentrionales.
L'achat et le stockage d'une grande part de la production
vivrière par quelques commerçants au moment de la récolte
a également selon Teyssier (1999), une importance relative sur sa
disponibilité à la période de soudure (juillet et
août), limitant les réseaux d'approvisionnement des producteurs et
créant une pénurie artificielle qui a un impact direct et
immédiat sur les prix.
5. Problème
spécifique
La revue de la littérature mentionne plusieurs facteurs
expliquant l'instabilité du marché des céréales
dans la province de l'Extrême-Nord Cameroun: déficit ou
excédent de production, transformation exponentielle de
céréales en bière locale, contrainte de liquidité,
enclavement, stockage spéculatif. Mais il manque de précision
dans l'identification de l'importance de chaque facteur sur les
différents marchés de cette région d'où
l'intérêt de cette étude dans le cadre de ce
mémoire.
5.1. Question
spécifique:
Quel est l'importance de chaque facteur sur
l'instabilité du marché des céréales (sorghos, mil,
maïs) dans chaque partie de la province de l'Extrême-Nord Cameroun
?
6. Objectif
général
L'objectif de cette étude est de montrer l'importance
de chaque facteur sur l'instabilité du marché des
céréales (sorghos, mil, maïs) à l'Extrême-Nord
Cameroun. Ceci pourrait permettre aux opérateurs (Etat, organismes
privés) de définir les modalités d'une intervention
optimale sur chaque facteur étudié.
6.1. Objectifs
spécifiques:
- Identifier les circuits de commercialisation des
céréales dans la région;
- Identifier les principaux acteurs, leurs nombres sur les
marchés, leurs fonctions, leurs contraintes et recueillir les
données quantitatives et qualitatives sur leurs activités;
- Identifier les modes de transport des
céréales, les coûts et l'état des réseaux de
transport entre les marchés;
- Identifier les structures de stockage et les
quantités de céréales stockées;
6.2. Hypothèse
Les différentes régions de la province de
l'Extrême-Nord n'ont pas les mêmes caractéristiques
agro-climatiques et socio-économiques. Ce qui engendre un poids
inégal de chaque facteur d'instabilité sur les marchés.
7. Méthodologie.
7.1. Collecte des
données
Pour caractériser les marchés, nous avons
procédé en juillet-août 2000 à une enquête par
échantillonnage aléatoire sur des critères liés
à la position des marchés (ruraux, urbains et frontaliers). 22
marchés de la province de l'Extrême-Nord et 3 marchés
frontaliers du Tchad ont été enquêtés (cf. carte).
Cette phase nous a permis de faire une typologie des marchés de
céréales et de voir les flux entre les marchés, le niveau
d'intégration régionale et l'influence des marchés
périphériques sur ceux de l'Extrême-Nord.
Des entretiens ont été menés avec
différents acteurs de la filière pour identifier les facteurs
d'instabilité, les niveaux d'implication des acteurs, leur influence
réelle sur le marché, leurs contraintes et leurs
stratégies.
7.2. Traitement et analyse
des données
Les données essentiellement qualitatives
(témoignages sur les contraintes et les stratégies...) ont
été dépouillées manuellement. La typologie a
été utilisée comme outil pour représenter la
diversité des marchés à partir des critères
suivants : proximité des axes de communication, des sites de
production, qualité des acteurs qui y interviennent, caractère
rural ou urbain...
8. La filière
céréalière à l'Extrême - Nord du Cameroun
Dans notre zone d'étude, les grands groupes de
céréales sur lesquelles nous avons travaillé sont les
sorghos (pluvial et repiqué), le maïs, le mil pénicillaire,
le riz.
8.1. Les bassins de
production
La répartition géographique des bassins de
production des céréales étudiées varie en fonction
des caractères morpho-écologiques et climatologique.
8.1.1. Les bassins de production
du sorgho pluvial.
Les sorghos de saison des pluies se pratiquent dans les
plaines du Mayo Danay, du Mayo Kani, du Diamaré et sur les flancs des
montagnes et les piémonts des Monts Mandara et Kapsiki.
8.1.2. Les bassins de production
du sorgho repiqué.
La zone de production du muskwari s'étend du
lac Tchad jusqu'au centre du bassin de la Bénoué. Il est
cultivé dans les kare et son aire d'extension est
étroitement délimitée par les superficies en vertisols ou
sols hydromorphes disponibles. La grande zone de production se situe dans la
région du Diamaré (Bogo, Dargala, Gawel, Salak, Mindif, Maroua)
et au Sud du Logone et Chari (Waza).
8.1.3. Les bassins de production
du mil pénicillaire
Les mils pénicillaires, plus rustiques peuvent accepter
des conditions pluviométriques assez sévères que les
sorghos et sont cultivés sur des sols légers. Ils sont bien
adaptés aux bombements dunaires des pays Toupouri et aux sols
d'arène des massifs montagneux du Mayo Tchanaga. Les Mafas les cultivent
une année sur deux en alternance avec le sorgho pluvial pour
éviter l'épuisement de leurs champs en terrasse, exploités
sans jachère (Roupsard, 1987).
8.1.4. Les bassins de production
du maïs.
« La province de l'Extrême-Nord que l'on peut
considérer comme le berceau historique de l'implantation du maïs
dans la région, s'est avérée moins propice que les autres
provinces, à l'extension de cette culture » (Silvestre, 1994).
Le développement de cette culture à l'Extrême-Nord se
limite à la bordure du lac Tchad. Ailleurs, le maïs reste une
culture de case. Depuis, sa production n'a cessé de régresser
pour atteindre aujourd'hui un niveau marginal.
8.2. Trois types de
marchés de la collecte à la consommation
Les marchés des céréales ont
été regroupés en 3 types (collecte, intermédiaires
(distribution, stockage) et consommation dépendant les uns des autres
(Figure 1et carte 1).
Figure
1 : Les types de marchés distingués Carte
1 : Localisation des marchés
enquêtés
Ces marchés se distinguent principalement par les
volumes de transaction, les acteurs impliqués et les périodes
d'activités (Kossoumna, 2000).
8.2.1. Les marchés de collecte.
Les marchés de collecte se situent dans les zones de
production et les grosses transactions se concentrent à la
période de récolte. Ce sont les lieux privilégiés
de collecte de l'offre paysanne par les collecteurs, dans les champs ou dans
les villages environnants. L'unité de transaction à la collecte
est la tasse, l'agoda1(*), le korro2(*) ou le sacs et la revente se passe uniquement en
sac, souvent reconditionnés. Dans notre échantillon, nous pouvons
citer dans cette catégorie les marchés de Bogo, Dargala, Mindif,
Salak pour les sorghos repiqués ; Doukoula, Kouyapé, Zamay,
Hougno, Ardaf, Dogba, Vélé pour le sorghos pluviaux ;
Moulvoudaye pour le mil pénicillaire ; Blangoua, Mada, Maltam pour le
maïs (carte 1).
8.2.2. Les marchés intermédiaires (distribution
et stockage).
Les marchés de distribution se localisent dans des
centres urbains ou dans les villes frontalières. Ils assurent la
distribution des céréales vers les centres de consommation ou
vers les marchés de réexportation et de stockage ou se combinent
avec ces derniers. Les acteurs sur ces marchés sont les grossistes. Les
transports sont assurés par les gros camions (10 à 15 tonnes).
Ces marchés sont le plus souvent reliés à de grands axes
de communication. Dans cette catégorie, on peut citer les marchés
de Kousseri et Mada, Ndjaména pour le maïs ; Maroua, Yagoua,
Mokolo, Mora, Kaélé, Bongor pour les sorghos pluviaux et
repiqués.
Les marchés de stockage sont permanents et le plus
souvent localisés dans les centres urbains et les villages frontaliers.
Les transactions se passent entre les intermédiaires et les
grossistes-exportateurs. Les céréales sont stockées dans
des magasins, sous des hangars ou en plein air et vendues soit en
détail, soit en gros aux consommateurs, aux transformateurs, aux
détaillants, à des revendeurs venus d'autres villes ou à
des organismes publics ou privés (office céréalier,
PAM...). Un travail de reconditionnement des sacs est effectué au
préalable et les camions gros porteurs se chargent de
l'évacuation. Les marchés de Kousseri et de Blangoua,
Ndjaména, Fianga orientés vers le Tchad et ceux de
Kouyapé, Amchidé et Mora orientés vers le Nigeria peuvent
être classés comme marchés de stockage.
8.2.3. Les marchés de
consommation
Ce sont des marchés permanents localisés le plus
souvent dans les centres urbains. C'est la destination finale des
céréales qui sont stockées dans des magasins, sous des
hangars ou en plein air et vendues soit en détail soit en gros aux
consommateurs, aux transformateurs, aux détaillants, à des
revendeurs venus d'autres villes ou à des organismes publics ou
privés ( office céréalier, PAM...). Une partie de ces
céréales est transformée et est vendue sous forme de
farine, de bière...
8.3. Les circuits de
commercialisation
« Le système de commercialisation se
caractérise par les fonctions d'offre des producteurs, suivi de la
collecte, du transport et de la distribution des produits. De même, il
constitue un moyen de répartition des revenus entre les producteurs et
les consommateurs en passant par une foule d'acteurs constituée des
grossistes, des détaillants, des intermédiaires, des
transporteurs, des transformateurs... Il est de plus un vecteur
d'échange entre la ville et la campagne » (Silvestre, 1994). A
l'Extrême-Nord du Cameroun, il existe une diversité de circuit
dans la filière céréalière. On peut les regrouper
en deux groupes: les circuits non marchands et les circuits marchands.
8.3.1. Les circuits non
marchands.
La population urbaine reste très liée à
ses origines villageoises où vit une partie de la famille. Beaucoup de
ménages urbains reçoivent ainsi des céréales brutes
en cadeau directement du village ou sous forme d'échange de travail
agricole contre des céréales. Pendant la période des
récoltes en effet, une grande partie des populations des zones
déficitaires émigrent temporairement vers les zones de
production, particulièrement de sorghos repiqués (Maroua,
Dargala, Salak...), pour servir de main-d'oeuvre. Ils sont la plupart du temps
rémunérés en nature et rentrent ainsi chacun avec un
à trois sacs. La bibliographie existante et les résultats
d'enquêtes ne permettent pas de chiffrer de manière fiable les
volumes transitant à travers ces circuits, mais il semble être
important au regard de la forte émigration pendant les périodes
de récolte dont nous n'avons pas non plus de données
précises.
8.3.2. Les circuits
marchands
Il est, de la même manière difficile de
connaître la quantité de céréales locales qui passe
par le marché. Cependant, les taux de commercialisation
généralement avancés s'inscrivent dans une fourchette de
10 à 30 % de la production ( Fusilier et Mbom Kondé, 1997).
A la différence des cultures de rente comme le coton
dont la commercialisation est rigoureusement réglementée, les
ventes de céréales sont étalées dans l'année
et offrent la possibilité d'être directement
commercialisées sur les marchés. Bien que les ventes importantes
se passent à la récolte, les producteurs continuent à
vendre au fur et à mesure de leurs besoins monétaires.
Parallèlement à leurs fonctions dans la sécurité
alimentaire, les céréales jouent également un rôle
central dans la gestion de la trésorerie familiale au cours de
l'année. Elles constituent pour les producteurs, l'équivalent
d'un compte d'épargne au cours de l'année pour subvenir aux
dépenses ordinaires et pour faire face aux dépenses
imprévues tout au long de la campagne agricole.
Aujourd'hui, le circuit de commercialisation des
céréales est essentiellement animé par les acteurs
privés. Ce système de commercialisation assure la circulation des
céréales des zones excédentaires vers les zones rurales
déficitaires et des campagnes vers les villes qui se trouvent être
pour la plupart des chefs-lieux des départements. Les circuits de
commercialisation des céréales sont caractérisés
dans le temps et dans l'espace avec une succession d'acteurs et de lieux par
lesquels transitent les produits.
8.3.3. Circuits de
commercialisation dans le temps.
Au cours d'une même année, la circulation d'un
même produit peut changer de sens. « Si pendant la
commercialisation, la tendance générale est au drainage des
céréales du monde rural vers les villes, la direction
empruntée par ces flux, peut s'inverser durant la période de
soudure » (Baris et Couty, 1981). En effet, pendant la période
de récolte, les céréales quittent les zones de production
pour les centres de consommation. Pendant cette période, les
marchés de collecte et de production sont les plus sollicités.
Les camions ou les pick-up débarquent ainsi sur ces marchés et de
fois sur les parcelles pour le transport des céréales.
Si les ventes de céréales se concentrent pendant
la période de récolte, c'est à la fois grâce
à la disponibilité des produits à bon prix, des
contraintes financières des producteurs et de la bonne
praticabilité de la route à cette période de
l'année. Pour collecter le coton, les routes des campagnes sont en effet
raclées par la SODECOTON, généralement en
novembre-décembre permettant aux commerçants d'accéder
facilement dans les zones de production pour s'approvisionner avant que les
pluies ne les enclavent et que la disponibilité
céréalière ne diminue.
8.3.4. Circuit de
commercialisation dans l'espace.
Globalement, les céréales quittent les zones de
production excédentaires pour les zones déficitaires ou les zones
de production pour les zones de consommation ou encore les campagnes pour les
villes.
Selon qu'il s'agit du sorgho pluvial ou repiqué, du mil
pénicillaire ou du maïs, les origines et les destinations
diffèrent.
8.3.'.1. Les circuits de
commercialisation des sorghos de saison des pluies.
Les circuits de commercialisation des sorghos de saison des
pluies sont courts. L'attraction spatiale qui s'exerce autour de cette culture
est limitée autour de la zone de production sauf en période de
pénurie ou de disette. La récolte est souvent consommée
localement soit sous forme de boule, soit sous forme de bières locales
pour attendre la récolte du sorgho repiqué pour les zones qui en
produisent. La récolte du sorgho pluvial coïncide avec la
première récolte du riz et les producteurs de riz qui ne
consomment pas généralement cette dernière
céréale, la vendent pour se procurer du sorgho (à Yagoua
notamment). Les sorghos pluviaux à la récolte sont soit
auto-consommés, soit, ils quittent leurs zones de production vers celles
du riz pour la consommation soit, ils sont drainés des campagnes vers
les villes pour la consommation et la fabrication de la bière locale. Il
faut aussi noter que les habitudes alimentaires jouent beaucoup dans le
transfert de céréales d'une région à une autre.
8.3.'.2. Les circuits de
commercialisation des sorghos repiqués.
« Les sorghos repiqués représentent
près de 40 % de la production céréalière de
l'Extrême-Nord » (Fusillier et al, 1997). Son circuit de
commercialisation est beaucoup plus étendu que celui du sorgho pluvial.
Les commerçants achètent en période de récolte soit
pour revendre immédiatement sur les marchés de consommation (dont
Maroua est le plus important), soit pour les acheminer vers les zones
déficitaires (Doukoula, Yagoua, Hougno, Mokolo...), soit pour les
stocker dans les magasins en prévision d'une éventuelle hausse
des prix. Le safrari est de loin la variété la mieux
prisée par les spéculateurs pour sa bonne conservation et par les
consommateurs pour son goût.
8.3.4.3. Les circuits de
commercialisation du mil pénicillaire.
Le mil pénicillaire comme le sorgho pluvial se limite
à un circuit assez court. Produit dans la zone du Mayo Danay et du Mayo
Kani, Il est consommé localement et drainé vers les villes de
Maroua et de Mokolo où il est beaucoup consommé pendant la
période de jeûne du Ramadan.
8.3.4.4. Les circuits de
commercialisation du maïs.
A l'Extrême-Nord, le maïs est essentiellement
produit dans les défluviations du lac Tchad et du Logone et Chari
(Kousseri, Mada, Maltam, Blangoua, Fotokol...). La région du Logone et
Chari dépend peu des autres villes de l'Extrême-Nord. Ses
relations commerciales sont plutôt privilégiées avec les
villes et les villages frontaliers du Tchad et du Nigeria. Cette orientation
centrifuge des flux commerciaux peut s'expliquer par plusieurs facteurs:
- Les habitudes alimentaires des populations qui ne consomment
qu'essentiellement du maïs;
- Le mauvais état du réseau routier pendant la
saison des pluies;
- Les similitudes entre les peuples de part et d'autre de la
frontière Cameroun-Tchad et Cameroun-Nigeria;
- La facilité de communication à travers le lac
Tchad.
Les marchés de Mada, Blangoua, Kousseri, de Fotokol...
constituent des centres importants de stockage et de distribution de maïs
dans la zone du Logone et Chari. Une bonne partie du maïs est vendue dans
les marchés frontaliers. Les marchés de Makari, Mada, et de
Fotokol alimentent les marchés nigérians; ceux de Blangoua,
Goulfey, Kousseri sont beaucoup plus orientés vers le Tchad.
D'après les témoignages de Monsieur le Maire de
Blangoua1(*) et le Chef de
Service des Statistiques de la Délégation Départementale
de l'Agriculture du Logone et Chari2(*) , il est fort probable que les céréales
qui vont au Tchad continuent au Soudan.
Cependant, le maïs qui alimente les autres marchés
de l'Extrême-Nord proviennent essentiellement de la région de la
Bénoué (Ngong, Adoumri, Boula Ibbi, Baïla...), la production
locale étant marginale et destinée à l'auto
consommation.
Globalement, les échanges de céréales
(mils, sorghos, maïs) avec les pays limitrophes de l'Extrême-Nord
apparaissent de manière conjoncturelle, en fonction des pénuries
ou des excédents d'un côté ou de l'autre de la
frontière. Ces échanges sont le plus souvent de faible ampleur et
organisés nettement de manière locale selon des circuits assez
courts à partir des marchés frontaliers. Les mêmes
conditions climatiques de ces régions situées sur la même
latitude font d'ailleurs que, le plus souvent, l'abondance ou la disette est
simultanée.
Les circuits de commercialisations sont animés à
tous les niveaux d'organisation de la filière par des acteurs ayant des
fonctions bien définies, mais aussi des contraintes que nous allons
développer dans la prochaine partie.
8.4. Les acteurs, leurs
fonctions et leurs contraintes.
Entre le producteur et le consommateur évoluent un
certain nombre d'acteurs: intermédiaires (collecteurs, commissionnaires,
rabatteurs), transporteurs, détaillants, transformateurs. Un seul acteur
peut également remplir plusieurs fonctions. Quels sont les fonctions et
les contraintes de chaque acteur?
8.4.1. Les producteurs.
Les producteurs constituent la première chaîne du
maillon de la filière céréalière. Ils se chargent
de la production (semis, labour, sarclage, récolte, battage,
ensachage...) puis du transport sur les marchés de brousse, de collecte,
de distribution ou souvent directement au marché de consommation.
Auparavant, les producteurs de mil, sorgho, maïs ne se
contentaient que de vendre le surplus de leur production, mais aujourd'hui
leurs stratégies est de plus en plus de réaliser un surplus de
production commercialisable et surtout de produire ce qui se vend le mieux.
C'est la raison pour laquelle un engouement est constaté pour le sorgho
repiqué ou le maïs en ce qui concerne chaque zone de production.
Les producteurs vendent chacun, selon ses besoins et sa disponibilité
céréalière, des quantités variables, allant de la
calebasse à plusieurs sacs. Ils disposent rarement de moyens de
transport. Les céréales sont acheminées sur les lieux de
vente par tête, à dos d'ânes, par charrettes, par pirogue
(pour la population riveraine). Lorsque les routes sont praticables, les
pick-up viennent sillonner les villages la veille ou les jours de
marchés hebdomadaires pour acheminer les produits sur les lieux de
transaction.
Qu'elles sont les motifs de vente qui s'exercent sur les
producteurs en dépit de la fragilité des équilibres
céréaliers, mettant parfois en péril ceux-ci?
Les producteurs, s'ils ne disposent pas d'un emploi non
agricole (couture, bricolages, petite échoppe, élevage...), qui,
outre la culture du coton, leur assure un revenu monétaire, sont soumis
à des contraintes de liquidité qui les obligent à vendre
une bonne partie de leur production à la récolte. Ces ventes sont
destinées à:
- Payer les investissements de campagne (main-d'oeuvre,
crédits-intrants, pesticides...);
- Calmer les ardeurs des créanciers notamment les
usuriers et les commerçants (remboursement des emprunts après la
récolte...);
- Satisfaire les exigences domestiques (festivités,
produits de première nécessité, petits équipements,
achat d'animaux domestiques...).
Le producteur se trouve donc prisonnier de ses besoins et des
prix à lui imposés sur les marchés. La rareté du
crédit rural ne permet pas de desserrer cette contrainte. Rares sont
ceux qui peuvent investir ailleurs les fruits de vente de leur production. Les
stocks de sorgho ou du maïs ne sont pas toujours suffisants pour nourrir
toute la famille pendant la période de soudure. Il faut alors en acheter
au marché à des prix qui ont presque doublé depuis la
récolte. De nouvelles dettes sont alors contactées et le cycle
infernal recommence... Le volume des stocks mis en vente étant faible et
irrégulier, les producteurs ne peuvent favorablement influencer le
marché.
L'analyse des modalités de vente révèle
que, outre les contraintes sus cités, celle de l'enclavement tient les
producteurs prisonniers du marché local dans certaines régions
excédentaires ou déficitaires (notamment dans le Mayo Danay et le
Mayo Kani). Bien entendu, les moyens de transport dont disposent les
producteurs (charrette, âne, pousse-pousse, vélo, pirogue...), ne
sont guère favorables au transfert de lourdes charges sur de longues
distances. La charrette, par exemple, à laquelle les producteurs ont
l'habitude de recourir pour acheminer leur production sur le marché,
supporte à peine 500 kg voire moins en saison des pluies, et ne permet
de parcourir plus d'une dizaine de kilomètre.
Ainsi, les producteurs désireux de commercialiser leurs
produits sur les marchés urbains transportent de petites
quantités, supportant des coûts unitaires proportionnellement plus
importants que les grossistes. Le plus souvent, ces coûts s'expriment en
temps pour le producteur qui transporte à pied et avec peu de moyen sa
charge de production. Par ailleurs, si les producteurs ne portent pas leurs
surplus sur d'autres marchés, c'est l'incertitude d'y obtenir un
meilleur prix qui varient d'une semaine sur l'autre sans qu'il soit possible
d'anticiper ces changements. Le pouvoir de négociation des producteurs
étant faible au vu des quantités mises sur le marché.
Les conditions d'information et de transport
déficientes telles que nous les constatons entre les villes et les
campagnes de l'Extrême-Nord ne garantissent jamais d'un prix et d'un
débouché certain. Les coûts de transport et de stockage
qu'il faut supporter pour intervenir sur un autre marché sont importants
par rapport à la faiblesse des volumes commercialisés.
« Aussi, les alternatives du producteur, obligé d'intervenir
souvent là où la concurrence est la plus forte, sont-elles de
fois illusoires : Soumis au même calendrier monétaire, les
producteurs sont autant de concurrents les uns des autres alors que les
collecteurs, commerçants, et même certains gros producteurs ne
sont que les différents doigts d'une seule main à laquelle seuls
des volumes de vente importants permettent d'échapper »
(Merdaoui,. 1999). Or, cette condition reste le privilège de quelques
rares producteurs capables de gagner la confiance d'un commerçant local
ou étranger, qui leur accorde une avance financière suffisante
pour se lancer dans la collecte contre une commission.
8.4.2. Les grossistes.
« Acteurs classiques du commerce africain des
vivriers, les grossistes ont une intervention déterminante dans la
régulation des marchés » (Harre et Oyep, 1992). Seul un
groupe restreint de grands commerçants a la capacité de financer
et d'organiser l'ensemble des circuits car ils ont un capital plus important et
disposent d'un lieu de stockage dans les marchés de consommation
urbains. Leur position dominante sur les marchés repose alors sur leur
capacité à trouver et à transporter des
céréales à tout moment de l'année.
Ces acteurs sont issus des centres urbains et leur nombre est
restreint sur les marchés. Ils sont connus et répertoriés
par les services administratifs et n'ont pas une véritable
spécialisation car ils traitent à la fois plusieurs produits dont
les plus fréquents sont les mils, le maïs, les sorghos, le riz,
l'arachide... Leur capacité de stockage varie selon l'emprise des
individus dans l'activité.
Les grossistes se chargent de la collecte et de la
distribution des céréales entre les producteurs et les
consommateurs. Ils financent un réseau de collecte plus ou moins
important selon les moyens de chacun et les risques financiers qu'il peut
prendre. Ces intermédiaires opèrent dans les parcelles, dans les
marchés de collecte et de production. Il peut avoir superposition de
fonction entre producteurs et grossistes à l'instar de ceux de Bogo,
Dargala ou Salak qui vendent leur production à d'autres grossistes sur
les marchés de collecte ou de production.
Les coûts de transport prohibitifs pendant les saisons
des pluies et l'absence des structures de stockage sur les marchés
destinataires sont les principales contraintes pour les grossistes. En effet,
ces deux contraintes amène le commerçant éloigné de
sa zone d'intervention habituelle de vendre rapidement en ayant peu de chance
de réaliser les bénéfices qui l'avaient attirés
jusque là.
Par ailleurs, les marchés céréaliers de
l'Extrême-Nord sont aujourd'hui essentiellement spéculatifs. Ce
caractère peut permettre aux grossistes soient de réaliser des
bénéfices somptueux comme lors de la disette de 1998 ou faire des
pertes importantes (1999 par exemple). En effet, une pluviométrie
capricieuse, une maîtrise insuffisante de la production par la grande
majorité des producteurs, la fragilité habituelle des surplus, ne
permettent pas aux commerçants d'évaluer l'importance de la
prochaine campagne. Comme les producteurs, ils surveillent les pluies et
tentent de diagnostiquer leurs incidences mais restent soumis, jusqu'à
la dernière minute, à une grande incertitude quant à ses
résultats qu'ils n'appréhendent vraiment qu'au moment de la
récolte. Malgré une fine connaissance des risques de production,
il leur est difficile d'apprécier les incidences des aléas et des
accidents de production (manque ou excès des pluies, ravageurs...),
comme c'est fréquent à l'Extrême-Nord sur les ventes des
producteurs. « Les années de très bonnes
récoltes comme celle de 1998/99 sont pour les grossistes-stockeurs un
désagrément car ils ne savent plus que faire de leurs stocks de
l'année précédente. Ce qui les obligent souvent à
vendre à perte afin de libérer de l'espace pour stocker la
nouvelle récolte » (Kossoumna, 2000).
Disposer d'une capacité de financement s'avère
la condition déterminante d'approvisionnements réguliers et aux
meilleures conditions. Or, peu de commerçants ont accès au
crédit bancaire.
Entre les producteurs et les producteurs évoluent
souvent des intermédiaires dont le rôle n'est pas
négligeable dans l'organisation de la filière.
8.4.3. Les
intermédiaires.
Les intermédiaires (dilaali) opèrent
dans les parcelles, les marchés de brousse, de collecte ou de
production. Dans cette catégorie d'opérateurs, on peut
distinguer: les collecteurs, les commissionnaires, les rabatteurs.
8.4.3.1. Les
collecteurs.
Comme leur nom l'indique, les collecteurs assurent la collecte
des céréales dans les zones de production. Tous ne parviennent
pas à être autonomes et sont très souvent financés
par les grands commerçants, pour une partie ou pour la totalité
de leurs activités. Ils peuvent aussi agir, soit pour leur compte, soit
pour le compte même des producteurs.
Lorsqu'ils travaillent pour les grossistes, un fond leur est
alloué et ils perçoivent une commission négociée au
préalable par sac acheté. Cette commission est de 100 Fcfa/sac
pendant une période normale. Elle augmente lorsque l'approvisionnement
devient difficile pendant la période de soudure ou de disette (150
à 200 Fcfa). Ils interviennent normalement pendant la période de
la récolte. Leur rayon d'action s'étend sur plusieurs villages et
sur les marchés hebdomadaires.
Outre les marchés hebdomadaires, ils peuvent acheter au
jour le jour et des transactions ont lieux quotidiennement. Dans ce genre de
circuit en effet, ils achètent directement aux producteurs, stockent sur
place pendant quelques jours puis loue un moyen de transport pour ramasser les
stocks et les livrer aux commerçants grossistes sur les marchés
hebdomadaires de collecte, de production, de consommation urbains. Ils devront
donc payer la manutention et le déplacement qui varie en fonction de la
distance parcourue, mais aussi en fonction de la praticabilité des
routes et donc des saisons.
La collecte est organisée en sacs, en agoda ou
en korro. Ils ont une connaissance fine des variations
prévisibles des prix sur les marchés hebdomadaires grâce
à leur mobilité permanente. Ils disposent d'un faible capital,
les moyens de stockage et de transport ne leur appartiennent pas.
En outre, l'activité des collecteurs permet de
réduire les tensions pouvant survenir sur les marchés quand
l'offre est défaillante. Les quantités mises sur les
marchés par ces acteurs limitent la hausse des prix.
8.4.3.2. Les
commissionnaires.
Ils constituent une catégorie proche de celle des
collecteurs dans le sens qu'ils interviennent d'une manière identique au
stade de la collecte. Toutefois lorsque le commerçant est uniquement
commissionnaire, il n'intervient qu'à la collecte et n'a donc qu'un
faible rôle sur le marché. Il n'achète que des
quantités de céréales pour lesquelles il dispose d'un
financement, à un prix concerté auparavant avec le
créancier. Son intervention peut contribuer à une baisse de prix
d'achat au producteur, car il cherche à maximiser sa marge en achetant
à un prix plus faible que celui convenu. Il n'est pas rare qu'un
commissionnaire travaille pour plusieurs commerçants.
8.4.3.3. Les rabatteurs.
Ceux là collectent pour les grossistes à la
journée. Ils opèrent généralement sur les
marchés ruraux hebdomadaires et achètent au comptant dans la
journée aux producteurs ou aux détaillants pour vendre au
comptant aux grossistes le soir même. L'heure de revente constitue leur
principale stratégie car le soir, les céréales sont finis
sur les marchés et les commerçants ne peuvent qu'acheter leurs
marchandises à un prix qui les arrange. Leur capacité
financière étant très réduite, ils
n'achètent souvent que quelques sacs (6 à 10) qu'ils vendent avec
une marge de bénéfice de 200 à 300 FCFA.
Les intermédiaires ont ainsi leurs cartes à
jouer dans l'approvisionnement des céréales et une marge
d'arbitrage au niveau des prix.
Les principales contraintes pour ces acteurs sont celles de
l'accès au capital, à la logistique de stockage et aux moyens de
déplacement. Ils ont en effet une capacité de financement
réduite et leurs gains unitaires sont souvent faibles.
Quelle que soit la dimension de leur activité, Les
intermédiaires ont des stratégies communes. Ces acteurs
s'approvisionnent en effet sur les mêmes marchés et dans les
mêmes villages. Les pratiques commerciales sont assouplies au maximum, de
manière à assurer la rotation la plus rapide du capital et
à limiter les coûts intermédiaires (transport, manutention,
stockage, immobilisation sur les lieux de collecte ou de vente).
L'emplacement pour l'achat et la revente des
céréales constitue également un atout qu'exploitent les
intermédiaires. En ce qui concerne l'achat, les intermédiaires
choisissent l'endroit de leurs transactions en fonction des facilités
d'avoir une bonne quantité de céréales à un moindre
coup. Les marchés de brousse, de collecte ou de production sont
appropriés pour ces acteurs, mais ils peuvent se poster sur les
principales voies d'accès au village les jours de marché et
sillonnent les villages environnants le reste du temps pour constituer par
agoda ou par korro, un, deux ou trois sacs. Si le stock ainsi
constitué le justifie, le commerçant commanditaire pourra envoyer
une pick up, voire un camion loué aux commerçants urbains de
passage, pour rassembler ces stocks.
8.4.4. Les détaillants.
Ils sont les plus nombreux sur le marché (50 à
100 sur les marchés de collecte, 150 à plus de 250 sur les
marchés de consommation). Constitués majoritairement des femmes,
ils forment un groupe cosmopolite où on rencontre des ethnies et des
religions diverses. Ils évoluent sur tous les marchés que ce soit
hebdomadaires (de brousse, de collecte, de production, de distribution) ou
permanents de consommation... Leurs sources d'approvisionnement sont
variées:
- L'auto approvisionnement à partir de leur propre
production;
- L'achat à la tasse auprès des producteurs sur
les marchés;
- L'achat de un à deux sacs auprès des petits
commerçants ou des grossistes ayant magasins ou hangars sur les
marchés;
- L'emprunt de quelques sacs auprès des grossistes
qu'ils remboursent en espèces après la vente une à deux
semaines plus tard.
Les quantités vendues pour toutes les
céréales sont réduites (allant de quelques tasses à
un ou deux sacs de 100 kg par jour). Ils peuvent vendre un à deux sacs
par semaine et le volume de vente varie selon les saisons. Il est faible
pendant la période de récolte et élevé à la
soudure. Les céréales sont exposées dans des sacs, des
calebasses, des assiettes, et même étalées sur des sacs ou
des bâches. Une même personne peut vendre plusieurs
variétés différentes de sorghos, de maïs, de mils.
L'unité de vente est la tasse, l'agoda ou le korro et
même le sac selon les régions et la demande de la clientèle
constituée de consommateurs, de transformateurs, des
intermédiaires.
Les contraintes des détaillants se situent au niveau de
leurs sources de financement. Leurs moyens sont en effet limités et leur
champ d'action réduit. Souvent le petit cadeau que les
détaillants ajoutent à un client peut constituer un manque
à gagner après la vente des sacs d'autant plus qu'ils n'ont pas
droit à ce petit cadeau lorsqu'ils achètent en sac chez les
grossistes.
8.4.5. Les transporteurs.
Ils constituent les acteurs principaux permettant le flux des
céréales. Propriétaires des camions et des pick up, ils se
chargent très rarement eux-mêmes du transport. Ce travail est
laissé à des chauffeurs qui reviennent verser la recette chaque
soir ou à la fin de chaque semaine. Ils sont organisés en
Syndicat. Sur les marchés des zones rurales essentiellement, nous
rencontrons des transporteurs propriétaires de charrettes qui
opèrent sur des distances réduites. D'autres transporteurs
à l'intérieur même des marchés, que ce soit urbains
ou ruraux, sont les manutentionnaires. Ils acheminent les
céréales du lieu de vente auprès des camions ou des pick
up et du marché vers l'intérieur des quartiers.
La contrainte majeure des transporteurs se situe au niveau de
la saisonnalité. La plupart du réseau routier dans les zones
d'approvisionnement pendant la saison des pluies sont impraticables. Ceci
amène les commerçants soit à cesser leurs activités
sur ces axes comme c'est le cas à Blangoua, à Doukoula, Ardaf,
Hougno... ou à ne transporter qu'une quantité de marchandise
réduite par rapport à la charge utile. Ceci constitue un manque
à gagner important au regard du prix du carburant utilisé pour
parcourir ce trajet.
La durée du trajet constitue également une
conséquence des mauvaises routes que doivent subir aussi bien les
transporteurs, les commerçants que les consommateurs. Selon les
témoignages recueillis au cours de nos enquêtes, lorsque les
routes sont impraticables, les transporteurs passent deux à trois jours
en chemin pour desservir les marchés ruraux. Les voitures de transport
de céréales qui sont la plupart des camions se trouvent ainsi
vite amorties à cause d'innombrables crevasses qui jonchent les
pistes.
Face à toutes ces contraintes, les transporteurs n'ont
pas beaucoup d'alternatives. Ils sont de fois obligés d'arrêter
les trafics sur certains axes routiers impraticables. La seule stratégie
qu'ils utilisent est de s'informer sur l'état des pistes à
emprunter qu'ils recueillent à travers leurs collègues
transporteurs.
8.4.6. Les transformateurs.
Les transformateurs intègrent plusieurs
opérateurs selon le degré et la destination des produits
transformés. Nous pouvons ainsi rencontrer dans les régions de
l'Extrême-Nord les transformatrices de bières locales, les
restaurateurs, les ménagères...
Compte tenu de l'influence importante des transformatrices de
bières locales sur l'instabilité du marché des
céréales, nous avons choisi de ne parler que de ces
dernières dans cette étude.
Dans les villes comme dans les villages, les boissons
alcooliques sont vendues soit dans les concessions soit sur les
marchés.
Les acteurs de ce secteur d'activité sont
essentiellement les femmes et c'est surtout les ethnies Toupouri, Moundang,
Massa, Guiziga, Mandara, Sarah qui y dominent. Ces opératrices sont
organisées en groupe de 2 à 6 dans une concession où elles
se relaient quotidiennement pour la transformation. Le second niveau de
regroupement se situe dans le quartier où on rencontre regroupée
au sein d'une même tontine des transformatrices d'un même
quartier.
Elles peuvent se regrouper en association de fabricantes de
bil-bil surtout en milieu urbain comme nous l'avons vu à
Maroua. Le but de leurs organisations est de renforcer la solidarité au
sein des membres. Par contre il n'y a aucune entente sur la fixation des prix.
Les prix du pot de bil-bil ou de la bouteille d'arki
dépendent des prix des céréales sur les marchés. Il
est donc évident que les prix fluctuent en fonction des saisons. Un pot
de bil bil qui coûte 100 Fcfa à la récolte peu
coûter 150 voire 200 Fcfa à la soudure. Une bouteille
d'arki qui coûte 100 Fcfa à la récolte peut
coûter 150 à 200 voire 300 Fcfa à la soudure. Cependant, si
les prix de l'unité de vente évoluent au cours de l'année,
les quantités transformées elles, ne changent pas.
Les prix du bil bil et de l'arki varie aussi
dans l'espace. Il est plus bas en milieu rural qu'en milieu urbain. Un pot qui
coûte 100 Fcfa en campagne coûte 300 Fcfa en ville à la
récolte.
Les transformatrices se ravitaillent directement sur les
marchés. Elles ne stockent donc pas spécialement des
céréales pour leur activité. Elles achètent au jour
le jour ½ sac, un ou deux sacs selon le volume de leur activité.
Les céréales sont achetées au comptant pour se
sécuriser par rapport à une éventuelle perte au cours de
la vente. Par contre, certaines transformatrices prennent à
crédit un à deux sacs chez des détaillants pour rembourser
en espèces après la vente du produit transformé.
8.4.7. Les consommateurs.
Les consommateurs occupent le dernier maillon de la
chaîne de commercialisation des céréales. Les centres
urbains concentrent la grande partie des consommateurs. Les marchés
constituent leurs principaux sources d'approvisionnement. Le marché des
consommateurs urbains peut être estimée pour la province de
l'Extrême-Nord autour de 80.000 tonnes de céréales (Bom
Kondé et Fusilier, 1996). Les échanges céréaliers
internes en milieu rural ne sont toutefois pas négligeables.
Les céréales constituent la base de
l'alimentation à l'Extrême-Nord du Cameroun. Elles donnent lieux
à une variété de produits transformés et de
préparation, le choix s'opérant selon le mode de consommation
(nature du repas selon l'heure de prise, le caractère festif ou
courant), le niveau de revenu et l'appartenance socioculturelle du
consommateur. En plus de ces critères sociologiques on peut ajouter les
critères telles que la nature et la qualité du grain qui sont
liés à la céréale. Toutes les
céréales peuvent être consommées sous forme de boule
ou de bières et liqueurs locales. Une partie marginale est
consommée par les animaux domestiques.
Les populations rurales restent très attachées
à leurs habitudes alimentaires. Sauf en cas de pénurie pendant
les périodes de disette, la population rurale achète très
peu de céréales sur les marchés. Par contre le taux de
consommation des céréales en milieu urbain est moins
élevé que celui du milieu rural. Ceci s'inscrit en effet dans un
mouvement de diversification de l'alimentation qui intervient à la
faveur du brassage des populations et de l'interpénétration des
modèles alimentaires régionaux. Ainsi, les tubercules et le
plantain, aliments de base des populations originaires du sud Cameroun,
connaissent une large diffusion auprès des consommateurs du nord les
plus aisés.
Les contraintes de toutes les opérations commerciales
retombent sur les consommateurs. Ils ont en effet, une marge d'arbitrage faible
par rapport aux cours des céréales. Ils sont avec les
producteurs, les victimes les plus touchées par les situations de
pénurie qui se présentent entre les années.
La description de la filière
céréalière nous a donc permis de comprendre le
fonctionnement du marché dans la province de l'Extrême-Nord. Cette
présentation préalable nous aidera sans doute à comprendre
l'importance de chaque facteur d'instabilité sur chaque marché de
la région.
9. Résultats et
Discussions
9.1. Une instabilité
causée par la combinaison de plusieurs facteurs
Tous ces marchés ont comme caractéristiques
communes une fluctuation importante des prix des céréales entre
les années et sur l'année (figure 2) due à la combinaison
de plusieurs facteurs.
Figure 2 : Evolutions
intra et inter annuelle des prix du sorgho pluvial sur le marché de
Yagoua (Kossoumna, 2000)
9.1.1. Inadéquation entre
l'offre et la demande
Cette inadéquation entre offre et demande
apparaît entre les années à cause des variations
importantes de production, et sur les années entre les périodes
de récolte et de soudure à cause d'une gestion peu rigoureuse des
stocks de céréales par les paysans et des pratiques
spéculatives.
9.1.1.1. Les effets d'une
variation importante de l'offre
Pour la province de l'Extrême-Nord, les données
du Ministère de l'Agriculture (citées par Pirard 2000) sur la
production annuelle de céréales en tonnes pour la province et par
habitant, et celles de muskwaari et de riz sont à la base des calculs et
des estimations présentées dans le tableau 1. La production
annuelle a été divisée par la production par habitant pour
obtenir la population, et les besoins ont été calculés sur
la base de 200 kg de céréales par habitant et par an selon
les normes de la FAO.
Tableau 1 :
Estimations des besoins et des productions en céréales dans la
province de l'Extrême-Nord
Années
|
Estimation population
|
Besoins à 200 kg/hab
|
Production en tonnes
|
Bilan en tonnes
|
% muskwaari
|
% riz irrigué
|
1994-1995
|
2 420 063
|
484 013
|
578 395
|
94 382
|
29 %
|
8 %
|
1995-1996
|
2 451 075
|
490 215
|
490 215
|
0
|
25 %
|
9 %
|
1996-1997
|
2 498 429
|
499 686
|
289 755
|
- 109 931
|
17 %
|
11 %
|
1997-1998
|
2 572 386
|
514 477
|
372 996
|
- 141 481
|
29 %
|
13 %
|
1998-1999
|
2 633 042
|
526 608
|
373 892
|
- 152 716
|
21 %
|
15 %
|
Source : Wambo et al., 2002
Le tableau 1 montre une forte variabilité inter
annuelle de l'offre (conjoncturel), et une demande qui croît rapidement
(structurel), qui se sont traduites par des déficits importants (1996
à 1998). Cette situation est la résultante de
phénomènes non maîtrisables (aléas climatiques
importants, demandes extérieures), et d'autres plus ou moins
maîtrisables (croissance démographique, gestion de la production
et des stocks par les paysans, choix des assolements dans les exploitations
agricoles...). Cette forte variabilité de l'offre s'est traduite par une
fluctuation importante des prix des céréales sur l'année
et entre les années.
Inversement ces fluctuations de prix se répercutent
immédiatement sur l'offre, car si les prix sont bas, les paysans
réduisent la part des céréales dans leur assolement, et si
les prix sont élevés, ils l'augmentent. Ainsi, sur les terroirs
du PRASAC3(*) situés
dans les provinces du Nord (Mafa Kilda et Fignolé) et de
l'Extrême-Nord (Mowo, Gadas et Balaza Domayo), les prix peu
élevés des céréales entre novembre 1999 et
septembre 2000 ont eu pour effets une réduction de 20 % des
superficies en céréales dans les exploitations entre les
campagnes 1999/2000 et 2000/2001, au profit du coton et de l'arachide. Comme
conséquence directe, la proportion des exploitations agricoles
incapables de satisfaire leurs besoins alimentaires à partir de leur
propre production est passé de 47 % en 1999/2000 à 60 %
la campagne suivante (Havard et Abakar, 2001).
9.1.1.2. Une demande
croissante
Le tableau 1 montre aussi que la population de la
région croît plus vite que la quantité de vivres produite.
Dans les zones les plus vulnérables, cette croissance
démographique débouche sur des migrations importantes de la
province de l'Extrême-Nord vers celle du Nord sur des fronts pionniers
rapidement saturés et repoussés toujours plus loin4(*). De même, les mouvements
humains des zones rurales vers les centres urbains se poursuivent. Alors, la
part de la population agricole et celle des actifs agricoles sur la population
totale diminue ; donc un actif agricole doit produire toujours plus. Sachant
que dans une exploitation agricole, 1 personne sur 2 est
considérée comme actif (Havard et al, 2001), et en prenant deux
hypothèses de répartition entre la population agricole et la
population rurale (1/3 et 2/3 d'urbains), alors 1 actif agricole doit produire
la nourriture de 3 personnes dans le premier cas, et 6 personnes dans le second
cas.
De plus, la demande est affectée significativement par
les zones limitrophes à déficits céréaliers plus
élevés5(*),
Il est donc difficile de prévoir les évolutions de la demande
d'une année à l'autre.
9.1.1.3. Une gestion peu
rigoureuse des stocks de céréales par les paysans
Les pratiques de gestion de leurs stocks de
céréales par les paysans augmentent l'insécurité
alimentaire des exploitations. En effet, une gestion peu rigoureuse
entraîne souvent des gaspillages de ressources au cours de la
« période d'euphorie » post récolte, par des
ventes intempestives, ne prenant pas compte des besoins de la famille. Cette
absence de prévision ne saurait garantir la sécurité
alimentaire pour une population sur le long terme, quand bien même les
quantités produites suffiraient à couvrir les besoins de la
famille. La prédominance de l'incertitude sur la prévision dans
les pratiques de gestion explique en partie cette situation (Legile, 1999).
Les pertes post-récolte sont également un
élément important. Elles se justifient essentiellement par la
non-maîtrise des techniques de conservation et de traitements par les
populations, mais également par le coût élevé des
produits insecticides. Le taux de pertes après récoltes et durant
la période de stockage des céréales serait compris entre
25 et 40 % de la production stockée6(*). Une réduction de ces pertes permettrait une
économie de céréales mobilisables pour la consommation
locale.
9.1.1.4. Difficultés
de communication entre zones excédentaires et déficitaires : un
obstacle aux échanges
Les marchés situés dans les zones de faible
production de sorgho sont les plus difficilement accessibles (Kossoumna, 2001).
Les marchés de Doukoula, Hougno, Blangoua, Mada, Ardaf se trouvent dans
cette situation pendant la saison des pluies. Les routes non praticables en
saison des pluies entraînent des coûts de transport qui, par
conséquent impose une variation des prix des céréales sur
les marchés. Ainsi, les régions qui se caractérisent en
général par des déficits céréaliers comme
celles du Mayo Danay (Doukoula, Ardaf, Hougno...) et qui en plus sont
inaccessibles aux périodes les plus critiques (juillet, août) sont
insuffisamment couvertes par les commerçants. Les quantités de
céréales sur ces marchés s'en trouvent réduites.
Alors, elles sont chères et inaccessibles à la grande
majorité des populations aux revenus très faibles pendant cette
période de l'année. Le coût de transport est d'autant plus
important que l'on se trouve dans des régions pauvres et à
l'équilibre alimentaire fragile
D'un autre côté, certaines régions
isolées du Logone et Chari (Mada, Blangoua) qui produisent en
général des excédents de maïs lorsque la
pluviométrie y est favorable, se trouvent bloquées par des
contraintes de débouchés à cause notamment des coûts
de transport importants, de leur déconnexion des grands centres de
consommation (Kousseri, N'djaména, Maroua...) et certains obstacles non
officiels (tracasseries policières, coupeurs de routes sur ces axes). En
saison pluvieuse, les pistes deviennent impraticables pour les camions (10
tonnes) chargés du transport des céréales. Il s'ensuit
ainsi une immobilisation et une accumulation des céréales et par
conséquent une chute des prix sur ces marchés. Ces contraintes
limitent, en outre le mouvement des céréales vers les zones
déficitaires où une demande réelle existe.
Finalement, l'approvisionnement des zones enclavées
dépend traditionnellement des cercles de production régionaux qui
s'épuisent à mesure que la campagne s'écoule alors que les
sources d'approvisionnement des marchés des grandes villes sont
diversifiées. A la source du problème d'information, on trouve le
producteur et les commerçants qui éprouvent des
difficultés à connaître les rendements pour pouvoir
anticiper sur leurs effets sur le marché. En plus les difficultés
d'accessibilité ne permettent pas une bonne circulation des informations
concernant la production et le marché, ce qui contribue à
renforcer l'incertitude des prix sur ces marchés.
9.1.1.5. Concurrence dans
l'utilisation des céréales entre la fabrication de la
bière locale et l'alimentation
Le nombre de transformatrice de bières locales est
important dans les villes et par conséquent, il y a une forte
consommation des céréales pour cette activité. En effet,
la crise économique de la fin des années 80, puis la
dévaluation (janvier 1994), ont fortement stimulé la demande de
bières artisanales, en substitution de la bière industrielle.
Toutes les couches sociales en consomment. Dans la ville de Maroua par exemple,
23 359 kg de céréales sont transformés par jour en
boissons alcooliques (CDD, 1999) et en milieu rural cette quantité est
de 5 833 kg (Yonga, 1998). La présence importante dans ces villes des
peuples Massa, Toupouri, Sara, Moundang, Guiziga... traditionnellement
consommateurs de bières locales explique cette situation. La
transformation de bière locale est si importante qu'il existe dans ces
villes des quartiers réservés pour cette activité qui ne
désemplissent pas tous les jours de l'année (Joli soir à
Yagoua, Pont et Domayo à Maroua, Bakassi à
Kaélé...). Les transformatrices de bières locales se
ravitaillent en détail sur les marchés locaux au jour le jour. En
plus, la quantité de céréales utilisée pour cette
activité ne diminue pas même en période de pénurie.
9.1.1.6. Des pratiques
spéculatives sur les marchés urbains
Les pratiques spéculatives existent surtout dans les
marchés urbains où il existe de grands magasins de stockage. Ces
marchés sont également stimulés par une importance demande
des consommateurs et des transformateurs. D'après le témoignage
des commerçants sur les marchés, le nombre de stockeurs a
doublé depuis la disette de 1998. Cette augmentation va de paire avec la
quantité de céréales stockée provoquant un
déficit ou un excédent artificiel selon les années et
faussant ainsi les conditions naturelles d'ajustement de l'offre à la
demande. Ceci nous amène à considérer que
l'instabilité sur ces marchés n'est pas toujours le
résultat des aléas climatiques. Elle est aussi provoquée
par les spéculateurs. Cette pratique à double revers peut
provoquer deux situations tout à fait contraire : la hausse ou la
chute des prix à des moments inattendus. Ainsi, les
références aux prix passés entretiennent voire accroissent
l'instabilité du marché. En effet la pratique du stockage
spéculatif ne produit pas toujours la hausse des prix sur le
marché. Cela veut tout simplement dire que les commerçants
n'arrivent pas toujours à tirer bénéfice de cette pratique
même lorsqu'ils font un stockage sur plusieurs mois, afin de profiter de
la « soudure » (mai/juin à septembre/octobre) pour
vendre plus cher. Il faut noter que le marché est sensible à la
récolte suivante. En cas de bonnes récoltes, les producteurs
ainsi que les commerçants mettent sur le marché des
quantités importantes de céréales stockées afin de
faire de la place pour la nouvelle récolte, ce qui justifie une baisse
des prix pendant la soudure en juillet/août. Certaines années,
comme en 1999 et 2000, les prix moyens pendant la soudure peuvent même
être inférieurs à ceux de la période de
récolte précédente. C'est un risque inhérent
à la spéculation.
9.1.2. Des mécanismes de
régulation insuffisants et mal utilisés
Pour réguler les variations du marché des
céréales, un Office céréalier a été
mis en place par décret n°75/440 du 21 juin 1975 à Garoua.
Très rapidement, les objectifs de l'Office se sont
révélés trop ambitieux et son comportement
vis-à-vis du marché n'est guère différent de celui
des commerçants. Les achats sont opérés après la
récolte au moment et aux endroits où les cours sont les plus bas.
Les ventes sont faites à des prix trop proches de ceux pratiqués
ailleurs et en quantités trop faibles pour peser vraiment sur le
marché. Aujourd'hui, les moyens financiers manquent à
l'organisation pour constituer un véritable stock régulateur. De
plus, ces stocks de réserve coûtent cher, non seulement parce
qu'ils immobilisent des quantités de céréales et donc des
sommes d'argent considérables et, mais surtout parce qu'il faut les
protéger, les garder, lutter contre les insectes, les déplacer et
que finalement, malgré ces précautions, il y a des pertes
inévitables et une diminution de la valeur. Partagé entre la
volonté d'assurer un prix suffisamment rémunérateur aux
producteurs et d'assurer la sécurité alimentaire des
consommateurs, l'Etat n'a pas su maintenir un différentiel suffisant
entre les prix officiels d'achat (aux producteurs) et de vente (aux
consommateurs) pour permettre à l'Office de couvrir ses coûts de
fonctionnement et ceci d'autant moins que le principe des prix pan-territoriaux
et pan-saisonniers est de nature à augmenter l'importance des fonds pour
supporter les coûts de régulation. Les pertes inhérentes
aux stocks de sécurité destinés à couvrir les
aléas climatiques et l'approvisionnement des populations pauvres et des
zones enclavées, deux fonctions souvent mal assurées par le
commerce privé, participent bien entendu, au déficit de l'Office.
Les emprunts destinés à l'aide aux populations sinistrées
ne sont pas remboursés par l'Etat. Plus reprimables encore est le
gaspillage, les détournements en nature et en argent en plus des effets
pervers inhérents aux modes de décision et d'intervention de
l'Office (décisions centralisées, prix uniformes,
spéculation risquée, politisation des interventions...) qui ne
tiennent pas compte des contraintes et des risques des producteurs, et
compromettent ainsi une intervention durable et efficace dans ce secteur.
En plus, en cherchant à évincer les
commerçants privés du marché, mais incapable de trouver la
juste mesure des prix compte tenu d'une dispersion de l'information pertinente,
l'Etat ne parvient qu'à placer l'Office dans une situation
délicate. Loin de réduire l'incertitude des producteurs,
l'incapacité de l'Office à tenir ses engagements et les
contraintes imposées à l'intervention experte des
commerçants privés participent, au contraire, à augmenter
les risques et à décourager la production.
Les distributions gratuites des aides alimentaires visant en
principe à secourir les populations vulnérables ont aussi des
effets pervers sur le marché des céréales. Compte tenu des
difficultés de ciblage des populations nécessiteuses, les
céréales distribuées dans le cadre d'opérations
d'urgence sont parfois réintroduites dans les circuits marchands
engendrant des risques dépressifs sur les prix.
En plus, le ciblage des périodes d'octroi de l'aide
alimentaire ne correspond pas toujours à des périodes de
pénurie. Ces aides arrivent parfois en retard au moment où les
populations n'en n'ont plus besoin. Les quantités souvent
importantes7(*)
entraînent une baisse des prix des céréales sur les
marchés décourageant ainsi les productions. Et ceci d'autant plus
que s'agissant de dons et non d'achats, la commercialisation de ces
céréales n'est pas soumise à la même contrainte de
rentabilité que celles des circuits marchands. Aussi, les
commerçants ou autres bénéficiaires ne perdent-ils rien en
les vendant à des prix bas si en plus ces aides ne correspondent pas aux
habitudes alimentaires des populations.
10. Conclusion et recommandations
L'instabilité du marché des
céréales à l'Extrême-Nord du Cameroun est
causée par une mosaïque de facteurs naturels, humains, infra
structurels et conjoncturels, qu'il apparaît difficile de
maîtriser.
- Dispersion et non-superposition des zones de production et
de commercialisation nécessitant l'organisation de la commercialisation
et du transport des céréales des zones de production vers les
zones de consommation en période de récolte principalement, et
inversement en période de soudure, d'où les différents
types de marchés mis en évidence : collecte dans les zones
de production, intermédiaires pour assurer le stockage et la
distribution, consommation principalement dans les centres urbains ;
- Sensibilité extrême de la production aux
aléas climatiques et aux différences de prix entre les
années. Ainsi, entre une année normale et une année
"sèche" les différences de production atteignent 30 à 40%.
Une année de bonne production, donc de prix faibles amène
l'année suivante les paysans à réduire leurs surfaces en
céréales, ce qui se traduit par une baisse de production, donc
une augmentation des prix ;
- Les pratiques spéculatives des commerçants
accentuent les effets sur les prix et les disponibilités des
céréales sur les marchés, non sans risques pour les
stockeurs (privés ou organisations de producteurs) ;
- La combinaison entre une offre dispersée et un
mauvais réseau de transport à une incidence majeure sur
l'instabilité des prix sur les marchés. Les régions de
l'Extrême-Nord ont en effet, un accès inégal aux
réseaux de communication. La précarité de ce réseau
rend inaccessibles aux véhicules de transport certaines zones rurales en
période de soudure (saison des pluies) où la demande est
forte.
- Ces résultats montrent que quels que soient les
marchés, l'accès à une information juste, fiable en temps
opportun est primordial. En effet la plupart des acteurs ne suivent pas
systématiquement le cours des céréales sur le
marché local et extérieur à la radio. Les informations sur
lesquelles ils se fondent sont pour la plupart formées à base de
rumeurs et des discussions sous les hangars et les places des marchés.
En fait, la difficulté de choix entre diverses informations souvent
contradictoires et les incertitudes quant à la qualité de
celles-ci obligent les différents acteurs à recourir à la
routine pour prendre des décisions d'achat, de vente, de stockage... Les
désillusions des spéculateurs et des groupements de stockeurs du
Diamaré, du Mayo Danay pendant la saison fortement excédentaire
de 1998/99 sont là pour illustrer cette situation. Ceci impose de porter
une plus grande attention à la pertinence des anticipations et des
procédures de décisions des différents acteurs puisque
l'efficience de l'équilibre dépend du succès des agents
économiques à réunir l'information pertinente et
nécessaire aux transactions.
Ils montrent aussi que les causes de l'instabilité ont
un poids inégal sur les différents marchés de
l'Extrême-Nord Cameroun. Les cours des céréales ne sont pas
seulement distincts par leur localisation dans l'espace mais aussi dans le
temps, et les contraintes d'ajustement de l'offre à la demande
s'expriment aussi bien en termes de conditions de production, de
disponibilité en quantité et en qualité, de
saisonnalité, de transport, d'information, de stockage, de gestion, des
coûts de transaction, des contraintes et des risques d'approvisionnement
et de débouchés.
Ces conclusions nous amènent à formuler quelques
recommandations visant à limiter et réduire ces variations
importantes des flux et des prix sur les marchés des
céréales.
Dans un contexte où domine un mode d'exploitation
traditionnel, le déterminisme des conditions agro-climatiques reste une
contrainte forte à une production régulière. Pour ce
faire, il est nécessaire de réfléchir à de nouveaux
systèmes de production et à accorder plus d'importance à
l'irrigation qui limite les effets d'une pluviométrie
irrégulière.
Pour éviter en pluvial que la forte demande ne provoque
de fortes fluctuations de prix, on cherchera à sécuriser les
approvisionnements ou à favoriser les substitutions. Une modernisation
de la production favorable à la maîtrise des récoltes, la
réalisation d'un stock de sécurité et l'importation de
céréales en cas de déficit devraient participer à
ces objectifs.
La tâche la plus évidente, et en même temps
la plus importante, que doit réaliser le gouvernement consiste à
améliorer les communications, mais aussi la circulation et la
fiabilité des informations sur les marchés, entre les zones de
production et de consommation, des régions excédentaires vers les
régions déficitaires, des villes vers les campagnes.
Les différences écologiques entre les pays
limitrophes et les possibilités de complémentarité
qu'elles procurent doivent être exploitées pour mettre en place
une politique commune de gestion de la commercialisation et du stockage des
céréales au niveau régional. De même que les
arbitrages dans le temps ne se limitent pas à l'horizon d'une campagne,
ceux dans l'espace ne se limitent pas toujours au territoire national. Une
collaboration étroite est ainsi nécessaire entre tous les pays
qui participent au circuit commercial des céréales, de la
production à la transformation et de la commercialisation à la
consommation. Ainsi, pour étayer la coopération dans le domaine
des échanges et du stockage, il est nécessaire qu'un faisceau
cohérent et convergent de mesures soient prises par les pays de la
région dans le domaine de la politique des prix et de la
législation douanière et commerciale, de l'information.
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1998, Bureau Central des recensements et des états de population,
MINPAT.
Rapport atelier de réflexion sur la
sécurité alimentaire tenu à Dobiko du 21 au 22 Avril
1999.
Rapport d'activité final -- ECHO/TPS/B7-219/97/0513,
Action against hunger UK.
Rapport d'activité final -- TPS/219/1998/02003,
programme de préparation aux catastrophes nutritionnelles et
alimentaires dans l'Extrême-Nord du Cameroun, Action against hunger
UK.
Enquête et documentation: Action against
hunger/Cameroun, Mars 1999.
Rapport , nutrition des jeunes enfants et de leur mère,
USAID, Mars 1999.
Rapport annuel d'activité, CDD, 1999.
Rapport annuel d'activité, délégation
d'arrondissement de l'agriculture de Maroua, MINAGRI, 1995, 1996, 1997, 1998,
1999, 2000.
Rapport annuel d'activité, délégation
d'arrondissement de l'agriculture de Kaélé, MINAGRI, 1995, 1996,
1997, 1998, 1999, 2000.
Rapport annuel d'activité, délégation
d'arrondissement de l'agriculture de Yagoua, MINAGRI, 1995, 1996, 1997, 1998,
1999, 2000.
Rapport annuel d'activité, délégation
d'arrondissement de l'agriculture de Moulvoudaye, MINAGRI, 1995, 1996, 1997,
1998, 1999, 2000.
Rapport annuel d'activité, délégation
d'arrondissement de l'agriculture de Wina, MINAGRI, 1995, 1996, 1997, 1998,
1999, 2000.
Rapport annuel d'activité, délégation
d'arrondissement de l'agriculture de Doukoula, MINAGRI, 1995, 1996, 1997, 1998,
1999, 2000.
Rapport annuel d'activité, délégation
d'arrondissement de l'agriculture de Bogo, MINAGRI, 1995, 1996, 1997, 1998,
1999, 2000.
Rapport annuel d'activité, délégation
d'arrondissement de l'agriculture de Kousseri, MINAGRI, 1995, 1996, 1997, 1998,
1999, 2000.
Rapport annuel d'activité, SEMRY, 1995, 1996, 1997,
1998, 1999, 2000.
AGRI-STAT, Cameroun, bulletin trimestriel sur les statistiques
du secteur agricole, n°003, Janvier-Févier-Mars 1999.
Rapport du service provincial des enquêtes
agro-économiques à l'Extrême-Nord Cameroun, MINAGRI,
1999.
Rapport du bas projet des services agricoles et pastoraux
(ONDR/PSAP), alerte (Office Nationale de développement rural, Mayo
Kebbi, Bongor (Tchad).
Rapport d'activité, aides alimentaires d'urgence aux
populations de l'Extrême-Nord Cameroun affectées par l'invasion
des criquets migrateurs et des pertes de récoltes PAM, Octobre 1997.
Statut portant réorganisation de l'Office
céréalier, décret n°89/1806 du 12 Décembre
1989.
Rapport d'activité, Office céréalier,
Garoua, 91/92, 92/93, 96/97, 97/98.
Rapport final EMOP 59 73 00, aide d'urgence à
l'Extrême-Nord, département du Logone et chari, première
tranche, PAM, Avril 1998.
Rapport d'activité, EMOP 6084, assistance alimentaire
d'urgence aux victimes des calamités naturelles dans la province du Nord
et de l'Extrême-Nord du Cameroun, PAM, 13-16 Août 1999.
Rapport final, volet administration du processus de
distribution des 2500 tonnes de maïs, programme d'aide alimentaire de la
commission de l'Union Européenne aux populations des Monts Mandara,
SNV-Cameroun, Juillet 1998.
Rapport final, volet préparation des listes, plan de
distribution et supervision des centres de distribution de l'aide alimentaire
d'urgence dans la province de l'Extrême-Nord par la SNV-Cameroun,
Août 1998.
Rapport d'activité de la direction de production
agricole, SODECOTON, campagne agricole de 95/96, 96/97, 97/98, 98/99.
REVUE ET JOURNAUX.
Courrier du monde rural, août 1999, Bulletin
d'information et de formation pour le monde rural édité par
INADES-Formation/Cameroun n° 32.
Faim Développement Magasine, avril 2000, Mensuel du
Comité Catholique Contre la Faim et pour le Développement,
n° 158.
Le Paysan Nouveau, avril 1998, Journal illustré pour le
développement des organisations rurales de producteurs de coton et
vivriers partenaires de la SODECOTON, n° 4/98.
Marchés tropicaux, -- 2247, 17 octobre 1997.
Agriculture et développement, n° 23, septembre
1999: cultures alimentaires, le défi des nouveaux marchés.
Annexes
Annexe 1: Guide d'entretien
pour les commerçants.
1. Présentation
Nom (facultatif) Age
Ethnie Sexe
Historique des activités jusqu'à l'installation
comme commerçant
Activité antérieure :
Avez-vous une autre activité que le commerce des
céréales ?
2. Approvisionnement
Lieux d'approvisionnement et origine des produits
pour :
- mil
- sorgho rouge
- sorgho repiqué
- maïs
Qu'est ce qui justifie le choix des lieux
d'approvisionnement :
- disponibilité du produit
- qualité du produit
- prix
- facilité de transport
- autres (précisez)
Ces lieux changent-ils au cours de l'année ?
Quels sont les différents changements au cours de
l'année ?
Quelles sont les raisons des différents changements de
lieux d'approvisionnement:
- prix
- qualité
- disponibilité
- transport
- autres
Modes de transport depuis les lieux
d'approvisionnement ?
Qui effectue le transport depuis les lieux d'approvisionnement
(vous-même, le fournisseur...)
Nature et type des fournisseurs
- producteurs
- grossistes
- détaillants
- intermédiaires (dilal)
- autres
Type de liens avec les fournisseurs :
- aucun
- parenté
- voisinage
- connaissance de longue date
- autres
Avez vous des fournisseurs attitrés ?
Quelles relations particulières avez-vous avec
lui/eux ? (contrat, etc_)
Qu'est-ce qu'il vous garantit :
- prix rémunérateur
- qualité
- crédits
- approvisionnement stable (régulier)
- autres
3. Mode de paiement
Comment payez-vous :
- cash,
- en rapportant une partie du prix de la vente
- autres modes de paiement
4. critères de fixation des prix:
- qualité
- quantité
- prix sur d'autres marchés (lesquels)
Qui fixe les prix ?
Ces prix varient-ils au cours de l'année?
Si oui pourquoi?
Quelle est l'unité de mesure pour vos achats (tasse,
koro, kg, sac, tonne,_)
Pourquoi le choix de l'unité d'achat?
Quantité achetée lors de la dernière
transaction et prix de l'unité ?
Lieu d'approvisionnement (achat) de la dernière
transaction ?
5. Activités de stockage
Depuis combien de temps avez-vous commencé cette
activité?
Pourquoi vous êtes vous lancé dans le
stockage?
mode de stockage :
- en sac
- en vrac
- en épi
Lieu de stockage: quelle ville/village ?
Quantité stockée :
Etes-vous propriétaire d'un magasin ?
Locataire?
Durée de stockage
- stockage court Pourquoi?
- stockage long Pourquoi?
Evolution des quantités stockées pendant
l'année / depuis quelques années ?
Pourquoi cette évolution?
Capacité du magasin ?
Coûts du stockage :
main d'oeuvre
gardiennage
location magasin
traitement des marchandises
Autres coûts liés au stockage ?
Ces coûts influencent-ils les prix de vente?
6. Activités de vente
Quels sont vos lieux de ventes ? (si plusieurs,
précisez par ordre d'importance)
Raisons du choix de ces lieux ?
- prix
- débouchés
- transport
- autres raisons
Y a-t-il des changements pendant l'année ?
- si oui lesquels ?
- quelles en sont les raisons ?
Modes de transport vers les lieux de revente ?
Difficultés éventuelles de transport et
évolution pendant l'année ?
Autres difficultés
Durée de transport vers les lieux de revente ?
Quelle unité de mesure est utilisée pour la
revente ?
- tasse
- kg
- koro
- sac
- tonne
Pourquoi le choix de l'unité de vente?
Qui fixe les prix de revente,
Quels sont les critères ?
- qualité?
- quantité?
- prix sur des marchés de référence (les
préciser)
- période?
Existe-t-il une entente pour la fixation des prix de revente
entre les commerçants ?
Si oui, quel type d'entente ?
Nature et type des acheteurs :
- grossistes
- détaillants
- collecteurs
- intermédiaires (dilal)
- consommateurs
- transformateurs
- autres (par exemple des gens qui achètent pour
stocker...)
Quels liens entretenez-vous avec votre
clientèle ?
Avez-vous une clientèle attitrée ?
Si oui quelle relation particulière entretenez-vous
avec elle ?
Accordez-vous des crédits ?
Si oui, en nature, en argent, autres ?
Quels sont les modes de remboursement ?
Période où plus de crédits sont
accordé ?
période où sont concentrés les
remboursements
Pourquoi le choix de ces périodes ?
Avez-vous des employés ?
- salariés?
- temporaires?
Pour quelles raisons y a t-il des variations des prix de
transport pendant l'année ?
- état des routes
- prix du carburant
- disponibilité des véhicules
- autres
Années récentes où le commerce n'a pas
bien marché ? Pour quelles raisons ?
Années récentes où le commerce a bien
marché ? Pour quelles raisons ?
7. Discussion sur les stratégies
Votre point de vue sur l'évolution du commerce des
céréales dans la région pour les mois et les années
à venir ? Pour quelles raisons ?
Comment vous informez-vous sur les prix dans d'autres
marchés de la province ou de l'étranger ? (N'djamena,
Nigeria, Maroua...)
Comment vous informez-vous sur le niveau de la production,
celui des stocks ?
Comment prévoyez-vous l'évolution de votre
activité ? (investissements, changement d'activité...)
Pour quelles raisons?
Annexe 2 : Guide d'entre
pour les transformatrices de céréales en bière
locale
Depuis combien de temps pratiquez-vous l'activité de
fabrication de la bière locale?
Quelles sont les céréales que vous utilisez pour
votre activité?
Combien de fois par semaine fabriquez-vous de la bière
locale?
Quelle quantité de sacs ou kgs utilisez-vous par jours
de fabrication?
Ces quantités changent-ils au cours de l'année?
Si oui, pourquoi?
Quels sont les lieux d'approvisionnement?
Pourquoi le choix de ces lieux?
Ces lieux changent-ils au cours de l'année?
D'année en année?
Si oui, quels sont les nouveaux lieux d'approvisionnement?
Pourquoi le changement de lieux d'approvisionnement?
Pourquoi le choix de ces nouveaux lieux
d'approvisionnement?
Qui sont vos fournisseurs? Producteurs? Grossistes?
Détaillants?
En cas de pénurie sur le marché, quelles sont
vos stratégies pour vous approvisionner?
Faites-vous du stockage pour votre activité? Pourquoi?
Quelles quantités de céréales stockez-vous?
Les quantités de bières locales
fabriquées changent-elles au cours de l'année? En cas de
pénurie?
Annexe 3 : Guide
d'entretien pour les producteurs de céréales
A quels moments se concentrent les ventes de votre
production?
Quelles quantités vendez-vous au cours de
l'année?
Quelles sont les contraintes majeures qui vous poussent
à vendre votre production à tel ou à tel moment de
l'année?
Quels sont les lieux de ventes privilégiés?
Marché local? Marché urbain? Pourquoi?
Quels moyens de transport utilisez-vous?
Qui sont vos principaux acheteurs?
Pratiquez-vous les activités de stockage? Si oui,
depuis combien de temps et pourquoi?
Faites-vous le stockage individuellement ou en groupement?
Quelles quantités de céréales
stockez-vous par an?
Sur quels indices décidez-vous des quantités de
céréales à stocker?
A quel moment décidez-vous d'ouvrir votre magasin pour
la vente des céréales stockées?
Avez-vous des indices qui vous permet de percevoir la hausse
ou la baisse du cours des céréales sur les marchés?
Vous renseignez-vous sur les prix des céréales
sur les autres marchés? Par quels moyens?
Pourquoi d'après vous les prix des
céréales baissent ou augmentent dans votre région à
certaines périodes de l'année? Certaines années?
Que faites-vous pour lutter contre la hausse ou la baisse des
prix des céréales sur les marchés?
Annexe 4 : Guide
d'entretien pour les consommateurs
Combien de personne en moyenne avez-vous à nourrir?
Combien vous faut-il de sacs de céréales par
mois/an pour votre ration?
Quelles sont les céréales les plus
consommées dans votre région?
Cette préférence change-t-elle au cours de
l'année? Certaines années? Pourquoi?
Quels sont les produits que vous substituez aux
céréales préférées en cas de
pénurie?
Ces produits sont-ils produit localement? Si non, d'où
viennent-ils?
Comment faites-vous pour vous approvisionner en
céréales? Sur le marché local? Sur d'autres
marchés? Lesquels et pourquoi?
Les lieux d'approvisionnement changent-ils au cours de
l'année? Certaines années? Pourquoi?
Avez-vous des fournisseurs attitrés? Grossistes?
Détaillants? Pourquoi ce choix?
Quelle est l'unité d'achat de vos
céréales sur le marché? Sac? Agoda? Pourquoi?
En dehors du marché avez-vous d'autres moyens de vous
procurer des céréales? (Propre production, don, ...)
Stockez-vous des céréales pour votre
consommation? Si oui combien de sac au maximum par année?
Que faites-vous en cas de pénurie de
céréales sur les marchés?
Pourquoi d'après vous les prix des
céréales sont-ils instables sur les marchés au cours de
l'année? Certaines années?
Vous renseignez-vous sur les prix des céréales
sur le (marché local/sur d'autres marchés) avant de faire vos
achats?
Si oui, qui sont vos informateurs?
Avez-vous les moyens pour gérer l'instabilité
des prix des céréales sur le marché? Si oui, quelles sont
vos stratégies?
D'après vous est-il possible de stabiliser les prix des
céréales au cours de l'année? D'année en
année? Comment? Quels doivent être les rôles de chacun dans
la gestion de l'instabilité des prix?
Annexe 5 : Fiche
d'enquête marchés.
Date:
Nom du marché Jour du marché
Typologie:
Etat d'enclavement
- distance au goudron
- accessibilité pendant la saison sèche:
- accessibilité pendant la saison des pluies:
Types de céréales présentes et
leur prix
Nom Français
|
Nom Foulfouldé
|
Origine
|
Destination
|
Prix (sac)
|
prix détail (unité)
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Quelles céréales dominantes ?
Quantités présentes sur le marché (nombre
de sacs)
Nombre de détaillants
de grossistes
de collecteurs
d'intermédiaires
Evolution récente du marché (5 ans)
Nombre de véhicules et destination
camions
pick-up
autres transporteurs de céréales
Les prix de transport entre quelques
marchés.
Du marché de...
|
Au marché de...
|
Pendant la saison sèche
|
Pendant la saison pluvieuse
|
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* 1 Rapports annuels
d'activités des délégations d'agriculture de Maroua, de
Kousseri, de Kaélé, de Yagoua, de Moulvoudaye, de Doukoula, de
Bogo, de Wina pour les années 1995, 1996, 1997, 1998, 1999, 2000;
Rapport annuel d'activité du CDD de 1999; Rapports d'activité de
l'Office céréalier de 1991/1992, 1992/1993, 1996/1997,
1997/1998;
2 Rapport de l'atelier de réflexion sur la
sécurité alimentaire tenu à Dobiko du 21 au 22 avril 1999,
GTZ, Mora.
* 3 Rapport d'activité
final - TPS/219/1998/02003, programme de préparation aux catastrophes
nutritionnelles et alimentaires dans l'Extrême-Nord du Cameroun, Actions
Against Hunger Uk, 1998; Enquête et documentation, Actions Against
Hunger/Cameroun, mars 1999.
* 4 « Le
projet », 20 février 1998, aide mémoire des
réunions entre les représentants du gouvernement de la
république de Cameroun et la mission de la Banque Islamique de
Développement relatif à l'évaluation du projet de
construction des magasins de stockage de grains pour la sécurité
alimentaire au Cameroun.
* 1 Petite tasse en fer
utilisée comme mesure des céréales sur les
marchés
* 2 Tasse en fer
utilisée comme mesure des céréales sur les
marchés
* 1 Entretien du 13 juin 2000
à Blangoua
* 2 Entretien du 16 juin 2000
à Kousseri
* 3 Pôle
Régional de Recherche Appliqué au Développement des
Savanes d'Afrique Centrale
* 4 On peut prendre comme
exemple le village de Mafa kilda situé à la
périphérie de Garoua et créé il y a près de
deux décennies. Ce village de migrants de l'Extrême-Nord est
arrivé à saturation ; des signes de dégradation des
ressources naturelles y sont désormais perceptibles. Comme les migrants
continuent d'arriver, les paysans repoussent toujours plus loin les limites du
terroir à la recherche des terres agricoles ; d'autres quittent le
village pour aller plus loin.
* 5 L'intervention
alternative ou simultanée des pays frontaliers à l'instar du
Nigeria et du Tchad à l'achat ou à la vente des
céréales dues pour la plupart aux aléas ou aux
conjonctures, mais également aux surproductions sont des facteurs
d'instabilité des cours céréaliers. Très difficile
à déterminer tant en valeur qu'en volume puisque pour la grande
partie clandestin, son importance dans les fluctuations des prix n'est pas
négligeable. La demande extérieure est instable et
imprévisible. En 1999 par exemple, les Tchadiens qui avaient l'habitude
de s'approvisionner, en cas de déficit, au Cameroun ont reçu des
aides de la Libye et ne se sont pas présentés sur les
marchés fortement excédentaires de l'Extrême-Nord.
* 6 Document de
synthèse du séminaire - atelier de concertation sur la promotion
du stockage villageois, tenu à Garoua du 19 au 21 février 2002.
* 7 12 040 tonnes en avril
1998, 2 651,1 tonnes en août 1999 (Rapport d'activités PAM, avril
1998 et août 1999)
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