CHAPITRE I :
UNE NAISSANCE CONTROVERSEE(1965)
L'Histoire des Relations Internationales qui englobe dans
son grand ensemble la vie politique des États et des Organisations
Internationales, nous a permis de connaître des Organisations
interafricaines qui ont vu le jour après l'indépendance en
Afrique francophone, dans les années 1960. Parmi celles-ci, figure
l'Organisation Commune Africaine et Malgache créée en vue de
renforcer la Coopération et la solidarité entre ses membres. Ce
premier chapitre abordera les questions relatives à la longue et
difficile marche conduisant à sa naissance ; et aussi, il abordera
la question relative à son mode de fonctionnement.
I/ LE PROCESSUS DE CREATION DE L'OCAM
«Habitués dans les deux
Fédérations d'Afrique Occidentale Française(AOF) et
Afrique Equatoriale Française(AEF), à la centralisation des
services économiques et financiers, les quatorze (14) États issus
de l'ancienne Afrique ont rapidement reconstitué des Unions.»5
C'est ainsi qu'après l'indépendance, les regroupements
francophones qu'ils ont mis en place se sont succédés les uns
après les autres à cause des problèmes internes et parfois
externes auxquels ils ont été confrontés. Ces
problèmes se sont posés avant et après la naissance de
l'OCAM malgré les objectifs novateurs qu'elle s'est fixée.
1)-Le début des divergences
politico-idéologiques : de l'UAM à l'OCAM (1965)
Le phénomène de récurrence de
succession des organisations africaines dans les années 1960, a
livré ses secrets. En effet, ces secrets se traduisent par la
transformation et la succession pures et simples du sigle6, du nom,
voire les objectifs, d'une organisation quelconque, dès qu'un
problème survient entre les membres. Sans toutefois chercher à
régler les différends internes comme externes, les organismes en
Afrique ne sont parvenus à résister longtemps à cause de
leur courte durée d'existence.
5Marianne CORNEVIN, Histoire de
l'Afrique Contemporaine (de la deuxième guerre
mondiale à nos jours), Paris, Petite Bibliothèque Payot,
1978, pp.320.
6Pour des contingents au sein de leur organisation,
les membres changeaient de sigles. Ainsi se sont succédées
UAM-UAMCE-OCAM qui deviendra Organisation Commune Africaine et
Mauricienne(OCAM) après le départ du Madagascar en 1973.
Cela nous permet de dire «qu'il n'y a vraiment pas en
Afrique de formules d'association d'États aussi décriées
que celles qui dans leur évolution, ont abouti à
l'OCAM.»7 Mais avant cet aboutissement, douze Chefs
d'État et de Gouvernnement8 fraichement sortis des anciennes
fédérations des ex AOF-AEF, ont décidé de
créer l'Union Africaine et Malgache(UAM) le 7 septembre 1961 à
Tananarive9, à l'exception de la Guinée et du Togo.
Cette Structure qui avait pour but d'organiser dans tous les
domaines de la politique extérieure, la coopération entre ses
membres afin de renforcer leur solidarité, d'assurer leur
sécurité collective, d'aider à leur développement,
de maintenir la paix en Afrique, à Madagascar et dans le monde, a
été l'objet de contestation, deux ans après sa naissance.
En effet, l'OUA, dès sa naissance en mai 1963 à Addis-Abeba en
Ethiopie, remet en cause l'existence de l'UAM. Les Présidents
Sékou Touré, Kwamé N'krumah, principaux instigateurs des
campagnes de dénigrement à l'encontre de ladite organisation et
adeptes de l'Organisation de l'Unité Africaine (OUA), ont
réclamé d'une vive voix la disparition de l'UAM parce que selon
eux« la création de l'OUA aurait dû faire disparaître
toute autre Organisation à vocation politique. Agir autrement, c'est se
livrer à une entreprise de sape de l'unité du
continent.»10 L'OUA devenant alors le seul organisme
habilité à prendre les décisions d'ordre politique, l'UAM
devait s'adapter à cette situation nouvelle.11 Acculés
par la pression et les divergences autour de l'existence de leur organisation,
les membres de l'UAM décident de la convertir en Union Africaine et
Malgache de Coopération Economique, et ce, après la dissolution
de l'UAM lors d'une conférence à Dakar en Mars 1964.
7Bosco ADOTEVI, John ADOVI, op.cit.p.27.
8En 1961, douze
États francophones nouvellement indépendants
décidèrent de créer l'Union Africaine et Malgache. Il
s'agit de la Côte d'Ivoire, le Niger, la Haute-Volta, le Dahomey, le
Sénégal, la République Centrafricaine, la Mauritanie, le
Tchad, le Cameroun, le Congo-Brazzaville, le Gabon, et le Madagascar.
9Tananarive était le nom que
portait la Capitale du Madagascar. Cette appellation a changé et est
devenue Antananarivo.
10 Bosco ADOTEVI, John ADOVI(dir),
Ibidem, p. 27.
11Organisation Commune Africaine et Malgache,
Conférence de l'OCAM 1968, Yaoundé, O.C.A.M, 1970,
p.13
Enfin, suite à de nouvelles contingences, un autre
regroupement du même type devait remplacer l'UAMCE dont le
Président Moktar Ould Daddah de la Mauritanie en était le premier
président.
Au nombre de quatorze, avec
l'admission du Togo et du Rwanda respectivement en mars et le 27 juillet 1963,
les États africains regroupés au sein de l'ex-UAM ont
projeté de se retrouver en Conférence des chefs d'État
afin de signer la charte de l'UAMCE. La date et le lieu finissent par
être indiqués. Du 10 au 12 Février 1965 à
Nouakchott, les travaux ont été ouverts. Sur les quatorze
membres, seulement que onze Chefs d'Etat étaient présents ;
le Congo-Brazzaville et le Dahomey étaient représentés par
deux plénipotentiaires, et enfin le Rwanda absent de la
cérémonie. L'objectif qu'ils s'étaient fixés en
allant à cette importante réunion, n'a pas été
atteint car ils se sont détournés de cela. La charte de l'UAMCE
n'a pas été signée mais plutôt remplacée par
une nouvelle Organisation dénommée Organisation Commune Africaine
et Malgache(OCAM). Le communiqué final de la réunion annonce
officiellement sa création le 12 février 1965 à Nouakchott
dans la capitale de la République Islamique de Mauritanie. En attendant
la signature de sa charte prévue pour l'année
suivante12, elle s'est assignée une nouvelle mission
politique13. Malgré le long processus de création de
ce regroupement régional, la décision prise n'a été
acceptée de tous les membres en raison de la divergence d'opinion
où certains parmi eux, dénonçaient cet acte de
dépolitisation de leur Union. L'OCAM dont la naissance fut
sérieusement contestée, va connaître d'énormes
difficultés au lendemain de sa création avec l'affaire portant
sur l'admission du Congo-Léopoldville au sein de l'OCAM.
12La signature de la charte de l'Organisation Commune
Africaine et Malgache(O.CA.M) qui était prévue en janvier 1966, a
été rejetée à cause des coups d'Etat survenus au
Dahomey, en Haute-Volta et en République Centrafricaine. C'est donc le
27 juin 1966 à Tananarive que la charte a été
signée par le Cameroun, la Centrafrique le Congo-Brazzaville, la
Côte d'voire, le Dahomey, le Gabon, la Haute-Volta, la République
malgache, le Niger, le Rwanda, le Sénégal, le Tchad, le Togo.
13L'O.C.A.M a été créée
dans le but de renforcer la Coopération et la Solidarité entre
les États africains et malgache afin d'accélérer leur
développement dans les domaines politique, économique, social,
technique, et culturel.
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