Répondre par l'enseignement aux exigences professionnelles attendues par les employeurs du secteur commerce et vente niveau IV et III( Télécharger le fichier original )par Laurent HELARD Université de Cergy Pontoise - Master 2 métier de l'enseignement et de la formation dans les domaines technologiques et professionnelles - parcours économie et gestion 2011 |
INTRODUCTION:Le thème abordé dans ce mémoire correspond à ma volonté de trouver une réponse à une question que je me posais lorsque j'étais dans le milieu professionnel. En effet, j'ai travaillé 20 ans dans la grande distribution spécialisée. Durant les dix dernières années, je m'occupais de la gestion du personnel pour environ 80 personnes avec un turn-over conséquent. L'embauche était permanente et une des solutions pour assoir notre équipe était l'alternance et les stages dans l'objectif de trouver de nouveaux talents. La flexibilité et le coût économique des contrats étaient les arguments avancés par notre siège social. Lors des grandes opérations commerciales, des stagiaires venaient compléter notre force de vente. Ces renforts étaient composés aussi bien par des C.A.P, B.A.C pro commerce, des B.T.S que des écoles de commerce ou master 2. Chargé par mon entreprise de l'intégration et de la formation des apprenants, j'ai souvent été confronté à un écart significatif entre le curriculum réel (Perrenoud) des étudiants et les attentes formulées par les missions ou postes proposés. Selon les niveaux, j'ai pu constater des divergences entre les différents parcours.Chez les C.A.P EMCS ou vente spécialisée, l'écartse situe sur plusieurs niveaux. Au niveau des compétences, ils n'avaient pas acquis les fondamentaux :par exemple, les différentes étapes de vente n'étaient pas assimilées et leurs sens méconnus et surtout leur praticité non maitrisée. La détection des besoins n'était pas systématique dans leur démarche client. La vente complémentaire n'était pas compriseni systématique dans l'acte de vente. Une formation magasin était nécessaire pour pouvoir mettre ces apprenants sur notre surface de vente. Un autre exemple est la tenue de caisse. Cette compétence est développée dans le référentiel des C.A.P EMCS mais il y a tellement de modules de caisse, de procédures différentes que la formation caisse en entreprise est obligatoire et systématique. La connaissance de la gestion de stock est trop basique. Ces apprenants CAP ne sont pas rendus opérationnels et autonomes surces deux modules de formation. Concernant les savoir-être, l'écart était aussi grand. Ils ne semblaientpas savoir gérer un entretien d'embauche, peu d'entre eux avaientune conviction sur des méthodes de travail. Lorsque ces derniers arrivaient en retard et ils ne s'en formalisaient pas systématiquement. La perception qu'ils avaient de certains savoir- être vestimentaires n'étaient pas adaptée à l'image que l'on attendait pour établir un contact client de qualité. Leurs attitudes n'étaient pas conformes au milieu professionnel de la vente. Certains stagiaires étaient introvertis et ne pourraient de ce fait jamais devenir vendeur, de surcroît ils n'aimaient pas ce métier. Est-ce pour dissimuler l'échec qu'ils avançaient ces dissymétries ? En tant que professionnel, ce n'était pas de ma responsabilité de comprendre leur projet scolaire. Notre constat était le suivant : alors qu'un C.A.P. Boulangerie sait faire du pain, un postulant de même niveaudans la branche commerce semble moins apte à réaliser ses compétences finales alors que sa certification devrait lui donner la possibilité de postuler à un tel poste. Quel intérêt pour un employeur d'embaucher ces apprenants alors que des B.A.C. Pro vente ou commerce apparaissaient sur le marché du travail et que ceux-ci se trouvent en concurrence directe avec les B.T.S. de la même filière? Concernant les bacs pro commerce, les élèves sont peut-être plus matureset leur savoir être est plus adapté aux exigences professionnelles. Ils se sentent davantage concernés, plus impliqués. Les emplois accessibles après cette formation correspondent dans l'ensemble assez bien. Les manques sont essentiellement dans la gestion des stocks la compétence C.2.3.1 est mal appréhendée par les élèves. Ils ne savent pas analyser un tableau de bord, mais surtout après l'analyse, ils sont incapablesde mettre en place des plans d'actions.Ces derniers ne sont pas opérationnels sur les compétences C.1.2 « participer aux opérations de promotion. Ils appréhendent mal les chiffres en historique ou en prévisionnel. Laméthodologie n'est pas connue. La compétence « participer aux actions d'animation », La compétence C.1.3.2 n'est pas acquise. Ils n'ont pas à nos yeux assez d'idées de modèles pour construire et réaliser une animation cohérente et rentable. Selon le principe de Peter, on attend un certain niveau de compétence pour réaliser son métier jusqu'à arriver au courant de sa carrière à son seuil d'incompétence. Ce principe a largement été développé par IBM dans les années 1980. Seulement, les entreprises souhaitent vivement avoir des collaborateurs dit `évolutifs' dans leur équipe. L'acquisition de ces compétences serait un plus pour nos jeunes qui arrivent sur le marché du travail et pourraient alors mieux appréhender leur projet professionnel et non pas être directement placés dès leur arrivée sur le marché du travail en état d'incompétence.A l'encontre de ces critiques, ils sont plus opérationnels sur la vente plus apte à prendre l'initiative ou aller chercher l'information. Ils ne sont pas capables de prendre le poste de directeur adjoint même d'une petite boutique comme l'annonce le référentiel de certification. Concernant les B.T.S M.U.C, le savoir être est corrigé. Les diplômés sont plus à même à répondre à des exigences professionnelles. La tenue est acquise. Le sens de la ponctualité est compris. L'implication et la conscience professionnelle est intégrée. Le titulaire d'un B.T.S M.U.C a pour perspective de prendre en charge la responsabilité de tout ou partie d'une unité commerciale. Les postes auquel peut prétendre un élève de B.T.S. M.U.C sont second de rayon, manager de rayon, responsable de magasin, de site. La compétence C.1 « management de l'équipe commerciale » est celle qui est le moins développé chez les candidats dont je me suis occupé durant ces 10 dernières années. La notion de management, d'exemplarité est la plus mal appréhendée par ces élèves. Dans notre réalité, durant leur stage, il est peu fréquent qu'ils soient confrontés à une animation concrète de management. La notion de projet n'est pas acquise et reste très scolaire et manque réellement d'automatisme professionnel. La gestion de l'unité commerciale est mal appréhendée. Peu de stagiaires sont aptes aujourd'hui à prendre en charge l'animation totale d'un rayon. Les postes proposés sont souvent des postes de vendeurs avec un profil évolutif. Il y a donc un décalage entre le référentiel et la réalité terrain. La question qui se pose à nous, corps professoral, est de savoir comment rendre opérationnel et autonome ces apprenants afin que les référentiels correspondent réellement à des fiches métier de l'entreprise. Il faudrait que les titulaires des C.A.P. puissent être embauchés comme vendeur et que les postes à pourvoir ne soient pas pourvus par des B.A.C pro commerce. Les titulaires des B.T.S MUC devraient être embauchés au niveau indiqués par les référentiels et non comme vendeurs.L'enquête du CEREQ démontre que les titulaires des filières commerciales (du C.A.P. au B.T.S.) sont classés dans la catégorie CSP employé1(*),alors que le référentiel des B.T.S par exemple offre la possibilité d'être responsable de site, de magasin. Un décalage existe aussi pour les diplômés de niveau 1 et 2. LES MASTER 2 sont embauchés comme responsable de rayon. Pourquoi les référentiels ne correspondent pas aux fiches métier. La finalité de ces formations professionnalisantesest de trouver du travail, d'être opérationnel et autonome. Il est nécessaire et impératif de trouver une cohérence entre diplômes obtenus et postes proposés. Il est nécessaire de justifier une réelle reconnaissance du diplôme afin de promouvoir la poursuite d'études. Il est nécessaire de rendre les titulaires des CAP sûrs d'eux et que leurs savoir- être correspondent aux exigences professionnelles. L'hôtellerie ayant résolu ce problème, on peut se demander pourquoi le commerce a du mal à faire admettre ce point de métier à ces apprenants. La sélection par dossier et entretien pour accéder à la formation est peut être une de ces raisons. Avant les années 90, le secteur tertiaire développait des formations commerciales généralistes sur le principe que les attitudes, des savoir-être requis auprès des candidats étaient dites « naturelles ». Depuis la formation s'est spécialisée. Les employeurs ont réclamé des formations spécifiques aux besoins du marché2(*). Les cursus « services » sont des filières émergentes de cette mutation. D'autres facteurs comme la certification d' « emplois jeunes » peuvent venir influencer ce mouvement. Répondre aux attentes des employeurs est un enjeu majeur pour l'éducation nationale qui par son adaptation à la régulation de marché montre son dynamisme, son adaptabilité. C'est sur cette perméabilité que le ministère trouve sa légitimité3(*). La création de filière peut aussi répondre à une fluctuation des demandes des élèves. Devant l'affluence des élèves vers les filières commerciales, le ministère a créé le B.T.S. Force de vente pour répondre aux recalés des B.T.S les plus demandés. Comme l'explique Annette Bonnin,La complexification des tâches commerciales est un élément moteur de la spécialisation des diplômes. Cette spécialisation dans le secteur tertiaire ne tue-t-elle pas les diplômes de niveau 5 ? L'étude de la relation formation emploi est garantie par la direction générale de l'enseignement scolaire (DGESCO). Le projet IVA (insertion dans la vie active) de la direction de la prospective et du développement du ministère de l'éducation nationale permettent de mener des comparaisons entre les différentes spécialités et de constater leurs évolutions4(*). Des B.T.S embauchés comme vendeur, des BAC PRO qui se trouvent en concurrence entre des BTS et CAP et ces derniers qui ne trouvent plus d'emploi est devenue une réelle problématique. Cette constatation de décalage est aujourd'hui une réalité. Que manque-t-il à la formation dispenséedans le secteur tertiaire pour répondre aux exigences professionnelles, aux postes auquel le référentiel de certification les prépare? Comment rendre une cohérence entre diplôme et niveau professionnel ? A que l niveau se pose le problème ? Au regard des études établies, il conviendra de s'enquérir du ressenti des parties prenantes : v Les apprenants des différents niveaux scolaires (niveau 4 ; 3) v Des professeurs dispensant les cours à ces mêmes apprenants v Les patrons et dirigeants recruteurs de ces apprenants Au-delà des éclairages rendus par ces entretiens semi directifs, il faudra ensuite s'accompagner d'experts comme le DGESCO qui établissent les référentiels, de spécialistes comme Gilles Moreau qui font référence sur le sujet. Cette recherche devra se réaliser en toute objectivité et faire abstraction de tout mon vécu sur ce domaine. L'enjeu de l'entreprise n'est pas des moindres car en plus de préparer les élèves à un diplôme, il s'agit d'acquérir une compétence de travail propre à favoriser leur insertion sur le marché du travail. * 1 M. Moreau (2002) Les patrons, l'état et la formation des jeunes, Courtry, La Dispute * 2M. Moreau (2002) Le Monde Apprenti, Courtry, La Dispute * 3François Cardi et André Chambon, 1997, métamorphoses de la formation, IRNP. * 4 Parcours pédagogique dans la voie professionnelle, (2004) Edition Foucher |
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