Section III- La description par les sources de
l'attitude des autorités
après la publication par
Kamerun mon pays d'un article portant
sur l'interdiction d'une
réunion publique des nationalistes
Cette section entend présenter les informations
recueillies auprès des sources consultées sur l'attitude de
l'administration après la publication par le journal Kamerun mon
pays d'un article faisant état de l'interdiction par les
autorités coloniales d'une réunion publique des nationalistes.
Pour y parvenir nous allons évoquer ledit article (paragraphe I), puis
indiquer les informations données par les sources consultées au
sujet de l'attitude des autorités après la publication de cet
article (paragraphe II).
III-1- La publication par Kamerun mon pays d'un article
portant sur
l'interdiction d'une réunion publique
des nationalistes
Dans un article publié le 27 novembre 1956, le
quotidien Kamerun mon pays (parution No33) publie un
article dans lequel il dénonce l'interdiction par l'administration
coloniale d'une réunion publique organisée par des nationalistes
réunis au sein du Mouvement d'Union Nationale, un regroupement de
plusieurs partis fondé après la dissolution de l'UPC. La
réunion était prévue à Douala le 27 novembre 1956
mais suite à son interdiction, les organisateurs ont été
contraints à son annulation. C'est cette information que Kamerun mon
pays tente donc de relayer dans ses colonnes. Seulement, dès la mise en
vente du numéro 33 de ce journal qui contient ladite information,
plusieurs sources évoquent une réaction des autorités
coloniales à son encontre.
III-2- La description par les sources de la
réaction des autorités coloniales après
la publication par Kamerun mon pays de
l'article portant sur l'interdiction
d'une réunion publique des
nationalistes
Plusieurs sources indiquent une réaction de
l'administration coloniale après la publication par le journal
Kamerun mon pays d'un article indiquant l'interdiction par les
autorités d'un regroupement public des nationalistes à Douala.
· D'abord la correspondance
No 1.126/CF/RWI du 27 novembre 1956 (ANY, Correspondance
No 1.126/CF/RWI du 27 novembre 1956) signée du chef de la
Région du Wouri. Dans ce document adressé au Commissaire de
police du 2e arrondissement de New-Bell, le chef de Région
lui ordonne de saisir le journal Kamerun mon pays No33. Il
motive cette décision par les propos suivants : « le
numéro en question contient des diffamations, publications de fausses
nouvelles pouvant troubler l'ordre public ». Le
motif est donc trouvé : diffamations et publications de fausses
nouvelles. Si on s'en tient à cette source, le journal a
été saisi et le motif a été trouvé. C'est
une source qui indique par la même occasion les raisons avancées
par l'administration coloniale pour confisquer le numéro 33 de cette
publication.
· Ensuite Simon Thadée Beyaga (in
« Un drame à Kamerun mon pays »,
Kamerun mon pays No35 du jeudi 29 novembre 1956 :
3) ; Dans cet article, le rédacteur raconte les
circonstances de la saisie de la parution No33 de ce journal. Voici
ce qu'il dit à ce propos :
« Le 27 novembre à 9h30 M. le commissaire
de police du 2e arrondissement de New-Bell, accompagné de 2
secrétaires de police MM. Nsoka Zachée et Dibonga Mathieu, et
trois agents de police, arriva à la direction de Kamerun mon pays. Il
pénétra brusquement dans la maison et après avoir
défendu aux clients et au personnel du journal de ne pas sortir, M. le
commissaire procéda à une perquisition policière
arbitraire et illégale. Il ramassa tous les journaux et documents qu'il
trouva dans la maison. A une question du personnel qui lui demandait s'il
s'agissait d'une saisie du journal ou d'un numéro, le commissaire
répondit : il s'agit de la saisie du numéro du journal
d'aujourd'hui. Nous fûmes, Missongo Raymond et moi transportés au
commissariat de police de New-Bell où l'on procéda à
l'examen des journaux et documents. Monsieur le commissaire de New-Bell
confisqua le numéro du journal du 27 novembre 1956 et nous restitua les
autres documents. Je ne savais exactement de quoi il s'agissait et c'est
à ce moment qu'il me fût révélé que la saisie
du journal a été ordonnée par M. le Chef de la
Région du Wouri ».
Il est à noter qu'il s'agit là d'une source
primaire car le témoignage est fait par quelqu'un qui a vécu cet
événement.
Ainsi, cette section a permis de présenter les
différentes sources ayant indiqué une réaction des
autorités coloniales après la publication par le journal
Kamerun mon pays d'un article relatif à l'interdiction par
l'administration d'une réunion publique à Douala. Cette
présentation n'était que l'amorce d'une procédure
scientifique qui nous conduira à une confrontation desdites sources.
En définitive, ce chapitre était centré
sur la présentation des informations fournies par des sources
d'information sur l'attitude des autorités coloniales après la
publication dans les colonnes des journaux fondés par les nationalistes
de certains articles dénonçant la colonisation. Ainsi, il s'est
agit tout d'abord de présenter les principaux journaux
édités par les nationalistes à savoir La voix du
Cameroun fondée en 1949 et Kamerun mon pays lancé
en 1956. Aussi, il a été vu que plusieurs sources ont
indiqué des réactions des autorités coloniales notamment
après la publication par La voix du Cameroun d'un article
relayant les résolutions du premier congrès de l'UPC et
après la publication dans les colonnes de Kamerun mon pays
d'un article indiquant l'interdiction par l'administration coloniale d'une
réunion organisée par les nationalistes. Certaines ont
mentionné des suspensions de journaux, d'autres des saisies. Ce chapitre
n'ayant été que l'amorce d'une procédure scientifique ,
ces faits historiques restent à être confirmés dans la
troisième partie de ce travail .Celle-ci consistera entre autre à
confronter lesdites sources, conformément à une méthode
reconnue en histoire, et à procéder à leur
interprétation afin de voir en quoi ces réactions des
autorités vis-à-vis des journaux fondés par les
indépendantistes ont pu constituer une raison de la non-publication par
ces organes de presse des sujets d'actualité liés aux grandes
manifestations de réclamation de l'autonomie complète du
Cameroun.
Cette partie entièrement centrée sur la
présentation des informations recueillies sur le terrain nous a
amené à nous intéresser au contenu des organes de presse
publiés par les Français vivant au Cameroun et à la
description par diverses sources de l'attitude des autorités coloniales
après la publication d'articles publiés dans des journaux
fondés par les nationalistes et qui dénonçaient la
présence française au Cameroun. Ainsi, le premier constat est que
les publications des Français ne s'intéressaient pas aux sujets
liés aux revendications d'indépendance. Les organes de presse
publics s'intéressaient en priorité aux activités du
Haut-commissariat de la République, aux réalisations de la France
au Cameroun et à la politique intérieure de la France. Quant aux
journaux fondés par les hommes politiques français vivant au
Cameroun ils traitaient surtout les sujets d'actualité liés aux
activités politiques de leurs fondateurs et à celle du
Haut-commissariat de la République alors que les publications
fondées par les hommes d'affaires préféraient les faits
concernant la politique intérieure de la France , les activités
des autorités coloniales et celles des ressortissants français
vivant au Cameroun .Des analyses qui seront approfondies dans la
troisième partie de ce travail. Les journaux fondés par les
nationalistes ont pour leur part relayé plusieurs informations
liées aux manifestations anticoloniales. Seulement, certaines rencontres
organisées par ces nationalistes n'ont pas
bénéficié de la couverture médiatique de leurs
propres organes de presse. Les sources que nous avons consultées nous
ont indiqué des réactions de l'administration coloniale
après la publication d'article dénonçant la gestion du
Cameroun par la France. Plusieurs d'entre elles ont même
évoqué des pressions des autorités coloniales sur ces
journaux. Des faits qui restent à être prouvés dans la
confrontation des sources qui sera menée dans la suite de ce
travail.
La partie qui va suivre nous amènera par
conséquent à procéder à l'analyse et à
l'interprétation de ces différentes informations, ce qui nous
permettra de voir les causes de la non-publication par les journaux des sujets
d'actualité liés aux revendications d'indépendance
formulées par les nationalistes.
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