Pour trouver une convergence entre les intérêts
dissonants de ses multiples parties prenantes, l'entreprise doit définir
ses performances économiques, sociales et environnementales comme une
contribution à un bien commun. Une telle vision de l'entreprise a
été développée pour la première fois en 1953
aux États Unis par H. BOWEN dans son ouvrage
« Social Responsibilities of the Businessman »,
auteur à qui on attribue la paternité du thème sur la
Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE). Le thème sur la RSE
a été véritablement développé entre
les décennies 1960 et 1970. C'est ainsi que W.
FREDERICK (1960) affirmait que les moyens de production devaient
être utilisés de telle façon qu'ils améliorent le
bien être socioéconomique global. Mc GUIRE (1963)
a mis en évidence les obligations sociétales qui incombent
à la firme (obligations qui dépassent le cadre économique
et légal). Pour ce dernier, l'entreprise doit agir équitablement
comme devrait le faire tout citoyen. DAVIS (1967) quant
à lui, souligne la dimension éthique de la responsabilité
sociétale ; pour lui, l'entreprise doit considérer les
conséquences de ses actions sur le système social dans son
ensemble.
La responsabilité sociale présente des
spécificités lorsqu'on va d'un milieu à un autre. En
effet, aux États Unis, la RSE s'inscrit dans un registre de culture
d'entreprise. Les entreprises y posent des actes socialement responsables par
volonté et non par obligation. Leurs motivations à poser des
actes sociaux ne sont ni imposées par l'État, ni exigées
par la loi, et le plus souvent, ni même attendues par la
société civile (A. B. CARROL, 1979). On peut
regrouper les activités sociales volontaires qui y ont été
menées et qui continuent de l'être, dans les actions telles que
les contributions philanthropiques la réintégration des enfants
abandonnés dans la société, des programmes de formation
des travailleurs ou non travailleurs entre autres. L'approche de la RSE aux
États Unis est de ce fait, qualifiée d'approche
normative. Ce qui n'est pas le cas ailleurs.
En effet, en Europe, les actes de RSE posées par les
entreprises sont plus ou moins régis par des lois. L'entreprise est
comme un citoyen qui a des droits et devoirs envers la société
dont elle fait partie. En Europe, le comportement de la firme est une
réponse aux forces du marché et aux contraintes légales
(E. PERSAIS, 2007). En d'autres termes, la
responsabilité sociale de la firme implique que celle-ci soit en phase
avec les normes, les valeurs et les attentes de performance sociétale.
L'actualité européenne témoigne de la richesse du
débat quant à la prise en compte des données
environnementales. C'est ainsi que la Directive N° 2004-35 du 21 Avril
2004 sur la responsabilité environnementale en ce qui concerne la
prévention et la réparation des dommages environnementaux, impose
des nouvelles obligations pesant sur les entreprises. Les dommages
environnementaux couverts par le texte européen doivent répondre
à un certain nombre de conditions : être mesurable, consister
à une modification négative d'une ressource naturelle, survenir
de manière directe ou indirecte, être d'une gravité
significative sur l'environnement (I. TCHOTOURIAN, 2006).
C'est pourquoi l'approche européenne de la RSE est qualifiée
d'approche légale.
En Afrique en général et au Cameroun en
particulier, compte tenu du respect des normes environnementales, il existe une
légère hésitation quant à la fixation des
entreprises camerounaises dans l'une ou l'autre approche de la RSE. On note
quand même la présence d'actions philanthropiques de la part de
quelques multinationales opérant au Cameroun ; à l'instar du
Pari Mutuel Urbain Camerounais (PMUC) qui, en plus des emplois qu'il offre aux
citoyens camerounais, fait des dons de toute nature notamment dans les communes
urbaines et aux clubs sportifs. On peut aussi énumérer le cas de
MTN qui est le sponsor officiel du championnat camerounais de football des
première et deuxième divisions (« MTN elite
one » & « MTN elite two »,
respectivement) et qui sponsorise massivement les grands
évènements tels que les jeux universitaires, les foires et
concerts entre autres. Toutefois, au niveau des entreprises nationales et au
sein des multinationales de fabrication, on est un tout petit peu confus quant
au respect des normes environnementales et des valeurs des populations
riveraines qui sont pourtant des stakeholders à part entière. On
peut citer en guise d'exemple le cas de Sic CACAO qui, de par sa situation
géographique, pollue les populations environnantes sur plus de dix
kilomètres de diamètre. On peut aussi citer le cas de HYSACAM
dont les bacs à ordures empestent les populations des sous-quartiers,
par ce que toujours débordant d'ordures ménagères.
Face à ces deux situations extrêmes, il serait
difficile de statuer sur les habitudes réelles des entreprises
camerounaises en termes de responsabilité sociale ou sociétale.
C'est la raison pour laquelle nous nous sommes intéressés au
thème intitulé « pratique de
responsabilité sociale des entreprises au
Cameroun »
Dans son ouvrage « Social Responsibilities of
the Businessman », H. Bowen analyse les
facteurs expliquant l'émergence de la RSE : « Pourquoi
est-ce que les hommes d'affaires d'aujourd'hui se sentent concernés par
leurs responsabilités sociales ? [...] Il est possible de diviser la
réponse à cette question en trois parties : (1) parce qu'ils ont
été forcés de se sentir plus
concernés ; (2) parce qu'ils ont été
persuadés de la nécessité de se sentir plus
concernés et (3) parce que la séparation entre
propriété et contrôle a créé des
conditions qui ont été favorables à la
prise en compte de ces responsabilités » (p. 103), (J.
P. GOND, 2006).
Si au cours des années 1980 les chercheurs tels que
A. Carroll, Jones, Wartick & Cochran, Epstein, Mc Guire et J.
PASQUERO entre autres, s'attèlent plus à montrer le lien
ou l'absence de lien entre CSR (Corporate Social Responsibility) et performance
économique, c'est au cours de la décennie 1990 que le concept de
CSR a servi de point d'ancrage à de nombreux courants de pensée
partageant la même philosophie : existence d'une
responsabilité extra économique de l'entreprise (Eric
PERSAIS, 2007). En effet, la place de l'entreprise dans la
société a été véritablement une
préoccupation depuis le début des années 1990, avec
« les comportements opportunistes des firmes privées mais
aussi parfois publiques, qui ont conduit à des mises en cause
sérieuses de la légitimité des entreprises et de
l'éthique de leurs dirigeants qui se sont rendus coupables d'errements
divers, à cause d'une gestion exclusivement
financière » (AMADIEU in LE DUFF, 1999).
C'est ainsi que dans la deuxième moitié de la décennie
1990, de nouvelles théories du management sociétal ont
progressivement vu le jour. Il s'agit notamment des: stakeholder theory,
business ethics, corporate citizenship.
Au niveau mondial, le mouvement autour de la RSE n'a pris de
véritable ampleur qu'au milieu de la décennie 1990 pour se
généraliser au début du troisième
millénaire (E. PERSAIS, 2007). Le thème sur la
Responsabilité Sociale de l'Entreprise (RSE) constitue l'un des sujets
phares de la recherche en sciences de gestion en ce début de
troisième millénaire (A. BENSEBAA et A.
BÉJI-BÉCHEUR, 2008). Aujourd'hui en Europe, Elle se
caractérise ainsi par : une démarche volontaire visant à
aller au-delà des obligations légales et des conventions
collectives ; un souci d'intégrer durablement les vues des
différentes parties prenantes de l'entreprise ; et un engagement
à une certaine transparence (Commission européenne,
2001). Mais une telle vision de la RSE concilie mal avec la perception
que les managers d'entreprises se font du libéralisme
économique.
En effet, outre ses avantages commerciaux indéniables,
le libéralisme économique a contribué à certaines
déviances au niveau du comportement des firmes (exemple : recherche
de la rentabilité à tout prix au détriment du bien
être des parties prenantes). Un tel comportement associé aux
pratiques de corruption et aux trafics d'influence ont accru la demande pour
une moralisation des activités économiques. La publication en
2001 du livre vert sur la RSE par la Commission
Européenne atteste la volonté de faire de cette
problématique, un élément central de la politique
économique de l'union.
Toutefois, les contraintes économiques qui se
traduisent par des compressions de personnel et des délocalisations
concilient mal avec l'ambition affichée par certaines grandes
entreprises de pratiquer un management responsable. C'est ainsi qu'en France
par exemple, des entreprises telles ST Micro ou Hewlett Packard peuvent-elles
à la fois revendiquer leur statut d'entreprise socialement responsable
et fermer certains de leurs sites en France pour développer leurs
activités dans de pays où la main d'oeuvre
bénéficie de moins d'avantages sociaux
(Bénédicte .D & Christine .N, 2006). C'est
également le cas de DELL cette année.
La RSE est un concept flou par nature ; puisqu'il est
difficile de dire où commence et où s'arrête cette
responsabilité (E. Persais, 2004b). Le fait de
s'interroger sur la nature même de la RSE permet de mieux comprendre ce
qui touche à sa mise en oeuvre dans les pratiques d'entreprises.
Cependant, une telle responsabilité ne saurait
être simplement vécue comme une obligation légale ou
réglementaire. Elle se manifeste au contraire par des actes libres et
volontaires, susceptibles justement d'aller au delà des
définitions qu'en donnent les juristes (Cornu .G,
2004) : « une obligation de répondre d'un
dommage devant la justice et d'en assumer les conséquences civiles,
pénales, disciplinaires, etc. (soit envers la victime, soit envers la
société). La suggestion de Carroll (1991)
d'aborder la RSE au travers du concept de partie prenante est
intéressante. Ainsi, dans le contexte camerounais actuel, la
problématique apparaît beaucoup plus complexe dans une conception
extensive où, la RSE confronte le management à toutes les parties
prenantes dont les intérêts sont concernés par les
résultats et le développement de l'entreprise.
Dans un contexte d'internationalisation de l'économie,
la question de la RSE prend une importance croissante. Face aux critiques
formulées par les groupes de pressions vis-à-vis de comportements
opportunistes, les entreprises sont désormais tenues de démontrer
qu'elles inscrivent leurs actions dans le cadre d'une économie
responsable. En général, l'éthique de l'entreprise est
surtout un moyen d'entretenir une image positive de celle-ci, aux yeux de ses
différents publics, internes et externes. Son développement est
incontestablement lié à l'importance croissante de l'opinion des
différents publics de l'entreprise : actionnaires, salariés,
clients, partenaires économiques, pouvoirs publics (G. Bressy
& C. Konkuyt, 2000). Elle est un des moyens récents
utilisés par les firmes pour tenter de maîtriser leur image. Ceci
dit, si la question de la RSE reste au centre des préoccupations
liées à l'entreprise et à son rôle dans la
société, tel n'est pas le cas dans les pays en voie de
développement, notamment en Afrique.
Dans les pays africains, les réglementations ne sont
pas pour encourager la mise en oeuvre de la RSE. En effet, le
sous-développement, la misère et la pauvreté poussent les
États et les politiques gouvernementales à s'intéresser
uniquement à la rentabilité des entreprises.
Au Cameroun, on assiste dans les entreprises
spécialisées dans la fabrication des matériaux de
construction, à une mise en chômage technique qui se transforme
progressivement en chômage définitif (cas vécu par deux
employés de la SOBAF que nous avons rencontré). Que dira t-on des
employés à temps partiel embauchés par les
sociétés de construction des routes, qui sont remis au
chômage en fin de travaux ? L'incidence des contraintes
économiques sur la RSE a aussi été observée en
Janvier 2009 à la SCR MAYA (entreprise spécialisée dans la
fabrication des matières grasses) où les employés ont
dû observer deux semaines de congé non payant, le temps
d'écouler la surproduction réalisée pendant les
périodes des fêtes de fin d'année 2008.
Par contre au Cameroun, le comportement des entreprises
à l'égard des exigences de RSE est surprenant. En effet, il est
de coutume de retrouver, des entreprises qui se veulent citoyennes de par
certaines oeuvres sociales et qui, en même temps nuisent aux populations
qui leur sont riveraines. C'est le cas par exemple de la société
Sic CACAO qui a mis à la disposition des populations environnantes, un
forage (oeuvre sociale) et qui en même temps, pollue l'atmosphère
sur plus de dix kilomètres à la ronde. Le cas des
« Brasseries du Cameroun » qui, en dépit des
évènements sportifs pour jeunes qu'elle organise (coupe top),
pollue la zone de Koumassi où elle brasse du vin. Ou encore la Guinness
qui, elle aussi, pollue l'environnement des populations environnantes
malgré le puits d'eau potable qu'elle met à la disposition de ces
mêmes populations.
Face à cet état des choses, on est enclin de se
demander : quelles sont les réalités de la RSE au
Cameroun ? En d'autres termes, les préoccupations et les
pratiques réelles des entreprises camerounaises correspondent-elles
véritablement aux valeurs véhiculées par le concept de
RSE ?
Cette question principale suscite les sous-questionnements
suivants :
- Peut-on caractériser la RSE au Cameroun ?
- Quelle est la spécificité de la RSE dans les
entreprises au Cameroun ?
- Vers quel modèle la RSE tend-t-elle au
Cameroun ?
L'importance majeure de ce thème sur la
Responsabilité Sociale des Entreprises (RSE) est qu'il constitue l'un
des sujets phares de la recherche en sciences de gestion en ce début de
troisième millénaire.
L'intérêt de travail apparait principalement
à deux niveaux :
- Vu sous un angle purement académique, ce travail va
contribuer au renforcement de la recherche sur les thématiques de la
RSE, particulièrement dans le contexte camerounais. En effet, la
littérature abonde ailleurs sur le thème de la RSE, mais au
niveau camerounais, il y a un vide à combler ;
- Pour les entreprises, ce travail s'inscrit dans le cadre de
la recherche par celles-ci, d'objectifs extra économiques
(environnementaux et sociaux) à moyen et long terme. En plus, ce travail
servira d'outil de positionnement stratégique aux entreprises, par
rapport à leur environnement endogène et exogène.
Pour répondre aux questions posées plus haut,
nous nous sommes fixés un certain nombre d'objectifs. De manière
générale, ce travail vise à caractériser la
Responsabilité Sociale des Entreprises au Cameroun. Pour y
arriver, il faudra spécifiquement :
- Découvrir la réalité de la RS au sein
des entreprises ;
- Ressortir la spécificité et la logique de la
RSE dans les entreprises camerounaises ;
- Déterminer un modèle de RSE convenable aux
entreprises camerounaises.
Si les problèmes d'ordre sociaux concernent aussi bien
les entreprises commerciales qu'industrielles, il va de soi que les
problèmes d'ordre environnementaux (la pollution par exemple) font
majoritairement recours aux entreprises de fabrication. C'est dans cette
perspective que nous avons mené une étude exploratoire sur une
population majoritairement constituée d'entreprises du secteur
industriel.
Après avoir parcouru la littérature sur la RSE,
nous avons effectué une première descente sur le terrain (dans
les zones industrielles de Ndobo-Bonaberi, MAGZI de Bonaberi et MAGZI Douala
Bassa) où nous avons constaté que les pratiques des entreprises
en matière de responsabilité sociale étaient ambigües
et prêtaient à confusion. Aussi avons-nous décidé
d'appliquer à la fois les méthodes qualitatives et quantitatives
de la recherche. Le volet qualitatif ayant pour objectif de comprendre le
phénomène étudié, consiste en une approche
constructiviste appliquée à quatre entreprises de la place (par
voie d'entretiens semi-directifs). Le volet quantitatif ayant un objectif de
généralisation, consiste à analyser vingt-huit
questionnaires administrés à autant d'entreprise, pour confirmer
ou infirmer les résultats de la recherche exploratoire. Nous nous sommes
limités uniquement à la ville de Douala, parce que, non seulement
Douala est la capitale économique, mais aussi, la principale ville
industrielle du Cameroun.
Nous avons donc procédé par voix d'enquête
sur un échantillon d'entreprises qui opèrent dans les domaines
d'activités suivants : matériaux de construction, parfums et
produits de toilettes, imprimeries, entreprises brassicoles, industries
agro-alimentaires, industries textiles, savonneries, matières
plastiques, peintures, câbles électriques, incinération des
déchets. La sélection au sein de chaque sous secteur s'est faite
de manière probabiliste.
Notre recherche étant exploratoire, la collecte des
données s'est faite par voie d'entretiens avec les responsables de la
mise en oeuvre de la RSE. Nous avons nous-mêmes effectué ces
entretiens (observation participante) afin d'éviter l'introduction des
biais dans les résultats de recherche.
Enfin, les données collectées ont
été analysées à l'aide de deux outils d'analyse
pour une bonne lisibilité du phénomène. Nous avons
premièrement procédé par analyse du contenu, ensuite, pour
répondre aux objectifs de spécificité et de
modélisation de la RSE au Cameroun, nous avons procédé par
tri-croisé, notamment les tableaux et coefficients de contingence.
L'ensemble du travail rapporté dans
ce mémoire s'articule autour de deux parties :
La première partie reprend de manière
dynamique, les appuis théoriques existants sur la thématique de
la responsabilité sociale d'entreprise. Elle est subdivisée en
deux chapitres : le premier explore et retrace la genèse et
l'évolution du concept de responsabilité sociale à travers
les théories modernes existantes à cet effet, et aborde les
différents domaines d'application et instruments de mise en oeuvre de
responsabilité sociale. Le second chapitre est consacré aux
enjeux, aux risques et à l'importance croissante de la
responsabilité sociale dans un contexte de mondialisation.
La deuxième partie, la phase empirique de notre
travail, comprend elle aussi deux chapitres. L'un s'intéresse à
la démarche adoptée, tout en revenant sur la population
étudiée, et l'échantillon de notre recherche. L'autre
chapitre (le dernier), présente les résultats obtenus, en fait
une analyse détaillée, les interprète et propose un
modèle de responsabilité sociale propre aux entreprises
situées au Cameroun.
PREMIÈRE PARTIE :
NÉCESSITÉ ET MISE EN OEUVRE DE LA
RESPONSABILITÉ SOCIALE DE L'ENTREPRISE
Selon les acteurs de la théorie évolutionniste
de la firme, ce sont leurs « savoir-faire » et
leurs « compétences organisationnelles »
qui différencient les entreprises. L'identité de l'entreprise se
reflète dans l'image de l'entreprise qui est perçue par
son environnement et que l'entreprise peut influencer par ses actions de
communication et de relations publiques. L'entreprise voit ainsi
s'élargir, la sphère des tiers à qui elle doit rendre
compte, de ses partenaires à l'ensemble de la
société : on dit que l'entreprise devient citoyenne. Cette
citoyenneté se traduit par des interventions dans différents
domaines socioculturels et on parle de Responsabilité Sociale de
l'Entreprise.
Ainsi, cette partie essentiellement théorique, a
été consacrée à la nécessité de la
Responsabilité Sociale de l`Entreprise et à sa mise en oeuvre au
sein des pratiques de gestion d'entreprise. Elle se subdivise en deux
chapitres. Nous nous sommes attardés dans un premier temps sur la
genèse et l'évolution du concept de responsabilité sociale
de l'entreprise (Chapitre 1). Il est question ici de retracer l'historique de
ce concept aux contours multiples et d'en présenter les modèles
(anglo-saxon et européen), domaines et instruments. Dans en second
temps, nous avons mis exergue la place désormais incontournable des
pratiques de responsabilité sociale au sein des entreprises (Chapitre
2). Pour y parvenir, nous avons, dans une première section,
dégagé les enjeux, risques et avantages liés à la
mise en oeuvre de la responsabilité sociale. Dans une deuxième
section, nous avons illustré l'importance et le rôle des instances
internationales dans les pratiques de responsabilité sociale.
Chapitre I :
GENESE ET EVOLUTION DE LA RESPONSABILITE
SOCIALE DES ENTREPRISES
Dans ce chapitre, nous nous proposons de situer sur l'axe du
temps, l'éclosion du concept de Responsabilité Sociale de
l'Entreprise et d'en ressortir l'évolution depuis sa conception
jusqu'à nos jours. Pour ce faire, nous développerons dans une
première section, l'émergence du concept de la RSE à
travers son historique jusqu'à son importance en passant par ses
différentes approches organisationnelles. Ensuite, nous
présenterons dans une deuxième section, les modèles de
RSE, les différents domaines d'application de la RSE et les instruments
de la RSE.
Section I : EMERGENCE DU CONCEPT DE RESPONSABILITE
SOCIALE DE
L'ENTREPRISE.
Dans cette section, nous allons après avoir
retracé son histoire, définir le concept de RSE, présenter
la théorie des parties prenantes, développer quelques approches
organisationnelles de la RSE et en ressortir l'importance croissante.
I - 1 - LA RESPONSABILITE SOCIALE DE L'ENTREPRISE :
HISTORIQUE,
DEFINITION ET
PRINCIPE
Nous retraçons d'abord l'histoire de
la RSE, puis nous définissons ce concept aux contours multiples que nous
abordons par la suite selon l'approche des parties prenantes.
I - 1 - 1 - Aperçu historique de la
Responsabilité Sociale de l'Entreprise
On associe souvent la RSE au
développement durable ou encore à la mondialisation, alors que
cette notion a vu le jour bien avant ces phénomènes. En
réalité, la RSE est apparue dès les années 1950'
aux États-Unis, mais sa diffusion vers d'autres contextes s'est faite de
manière décalée dans le temps. Nous allons dans ce qui
suit nous intéresser à l'historique de ce concept et aux diverses
acceptions auxquelles il a donné lieu.
Le thème de la Responsabilité Sociale des
Entreprises n'est pas véritablement nouveau. À partir des
années 1920, plusieurs dirigeants s'expriment publiquement sur leur
responsabilité à l'égard de la société. Si
aucune doctrine clairement formulée de la responsabilité sociale
n'avait émergé à la fin de la décennie, les
discours de l'époque sont très marqués par les concepts de
« public service » et de « trusteeship »
qui stipulent l'idée d'un contrat implicite, caractérisant la
relation entre l'entreprise et la société (Heald, 1961,
1971).
Ces débats, bien que controversés, ont
été mis en application par Henri Ford, surtout sur le plan
interner avec l'instauration du salaire journalier minimum (principe du
five dollars per day). Des discours et pratiques relatifs à la
responsabilité sociale se développent ainsi de manière
précoce dans le milieu des affaires. Au début des années
1930, notamment en 1932 le débat entre Berle et Dodd
sur la question de la gouvernance d'entreprise (stakeholders versus
shareholders) conduit aux premières réflexions sur la RSE.
Mais ce n'est que dans les années 1950 que des efforts significatifs en
matière de RSE voient le jour.
Dans son expression et dans son sens actuel, la RSE est
essentiellement liée au contexte nord américain de l'après
Deuxième Guerre mondiale (Charles et Hill, 2004). C'est
l'ouvrage de Bowen en 1953 qui marque l'avènement du concept et le
début de la recherche autour de lui (Carroll, 1999 ; Acquier et
Gond, 2005 ; Locket et coll., 2006 ; Windsor, 2006). En effet, Bowen y
pose les fondements de la responsabilité sociale de l'entreprise,
même s'il y relève plus tard (en 1978), un caractère
idéaliste et normatif faisant prévaloir deux principes. Le
premier renvoie au fait que les hommes d'affaires ne doivent prendre que des
décisions qui vont dans le sens des orientations et des valeurs
souhaitées par la société. Le deuxième stipule que
la prise en compte de préoccupations sociales par la firme doit se faire
d'une manière volontaire. C'est donc H. BOWEN qui a
fait passer ce concept dans l'ère moderne du management.
Si Bowen est reconnu dans la littérature comme
étant le père de la RSE, Caroll (1999) signale
que les idées qu'il a exprimées dans son ouvrage ne sont pas
nées ex nihilo et qu'on en trouve la trace dans certains essais
de la littérature managériale, notamment dans les années
1930' et 1940'. Notons tout de même qu'il est possible que la RSE, telle
que formulée à l'époque par Bowen, repose sur les valeurs
culturelles et managériales qui prévalaient à son
époque. Le contexte ayant évolué, l'acception de la RSE a
progressivement changé.
La RSE est devenue un thème de recherche à
l'origine de l'émergence d'un nouvel espace académique, à
savoir le courant « Business and Society »
s'intéressant aux relations entre l'entreprise et son environnement
sociétal (Acquier et Gond, 2005). Son influence s'est
progressivement renforcée à travers le monde pendant les
années 1960. Depuis lors, la responsabilité sociale de
l'entreprise fait l'objet de nombreux débats entre chercheurs,
praticiens, État, organisations non gouvernementales et autres acteurs
de la société moderne.
Après avoir occupé les chercheurs
américains et suscité quelques controverses émanant
d'académiciens libéraux, la recherche sur la RSE diminuera
d'intensité à partir du milieu des années 1980 et muera
vers d'autres concepts comme la citoyenneté de l'entreprise ou
l'approche par les parties prenantes (Caroll, 1999).
Toutefois, cette pensée de Carroll, bien que séduisante, ne
s'applique qu'au contexte américain. Elle va alors se heurter au nouvel
ordre économique mondial établi, qui prône le
libéralisme économique.
L'émergence de la grande entreprise au delà des
frontières nord-américaines est à l'origine du regain
d'intérêt que connait la RSE en ce début de siècle,
en redevenant un phénomène de plus en plus présent sur la
scène politique et économique.
En Europe, on a commencé à s'intéresser
à la RSE dès le milieu des années 1990 suite aux actions
des organismes de la société civile à l'encontre des
entreprises ayant causé un tort environnemental (Shell, Total ...),
social (Danone, Renault...) ou sociétaire (Parmalat, Vivendi...). D'un
autre côté, le regain d'intérêt pour la question
s'est accentué à partir du début des années 2000
aux États-Unis avec les faillites touchant de grands groupes
américains (Enron, Arthur Andersen, Worldcom, Xerox...). C'est sans
doute la raison pour laquelle Doh et Guay (2006) attribuent le
regain d'intérêt pour la RSE à deux éléments
: la montée de la société civile d'un côté,
et les scandales financiers des grandes entreprises de l'autre.
I - 1 - 2 - Définir la Responsabilité
Sociale de l'Entreprise : ambiguïtés
institutionnelles,
managériales et académiques
La RSE est un concept en pleine évolution pour lequel
il n'existe pas, à l'heure actuelle, de définition
universellement acceptée. Les qualificatifs ne manquent pas à son
égard : concept vague, flou sémantique,
ambiguïté lexicale, concept ombrelle, notion ondoyante et
protéiforme, sont autant d'expressions sensées décrire
l'hétérogénéité à la fois des
discours et théories sur la RSE et des pratiques plus éparses.
Elle est généralement interprétée comme
étant la façon dont les entreprises intègrent les
préoccupations sociales, environnementales et économiques
à leurs valeurs, à leur culture, à leur prise de
décisions, à leur stratégie et à leurs
activités d'une manière transparente et responsable, et donc la
façon d'instaurer des pratiques exemplaires, de créer de la
richesse et d'améliorer la société.
Sue le plan de la généalogie, le concept de RSE
fait référence à deux visions distinctes: la RSE comme
obligation contraignante et la RSE comme engagement volontaire. Cette
distinction est au coeur des discussions internationales sur la RSE entre ceux
qui veulent que des contraintes s'imposent sur les entreprises (ONG,
syndicats...) et ceux qui ne le souhaitent pas (milieu d'affaires).
Depuis les années 1960 et 1970, on assiste à une
multiplication de définitions du concept de responsabilité
sociale de l'entreprise. L'une des explications à cette connotation
polysémique de la RSE est que ce domaine est non seulement
influencé par les évolutions théoriques, mai aussi, par
des agendas politiques, sociaux et managériaux. D'où la
difficulté à concilier les attentes de l'ensemble des parties en
question. Selon Allouche et al. (2004), les tentatives de
définition de la RSE par les acteurs concernés, entreprises,
agences de notations et chercheurs, ont généré une
confusion dans la conceptualisation de cette notion. Déjean et
Gond (2004) font la différence entre les définitions
institutionnelles et celles académiques de la RSE. Nous nous proposons
donc de développer les définitions institutionnelles,
managériales et académiques de la RSE, en prenant chaque fois le
soin de ressortir leurs contributions respectives à la conceptualisation
de cette notion.
I - 1 - 2 - 1 - Vers une définition univoque de
la RSE : définitions institutionnelles et
managériales
La responsabilité sociétale fait l'objet d'une
attention accrue de la part de nombreuses entreprises ainsi que
d'organisations de nature très diverses : des ONG, des institutions
européennes et mondiales, mais aussi des associations religieuses, des
associations professionnelles et des réseaux d'entreprises.
Ainsi, La commission européenne (2001) a adopté
une définition qui ménage les deux aspects fondamentaux de la RSE
(contrainte et volontarisme) : « Être socialement
responsable signifie non seulement satisfaire pleinement aux obligations
juridiques applicables mais aller au-delà et investir davantage dans le
capital humain, l'environnement et les relations avec les parties prenantes,
cela suppose l'intégration volontaire par les entreprises de
préoccupations sociales et environnementales à leurs
activités commerciales et leurs relations avec les parties prenantes
». En effet, le livre vert (2001) de la Commission
Européenne, qui est devenu une référence dans les
organismes internationaux et qui est évoqué dans la
majorité des travaux sur la RSE, la définit
comme : « l'intégration volontaire des
préoccupations sociales et écologiques des entreprises à
leurs activités commerciales et leurs relations avec toutes leurs
parties prenantes internes et externes (actionnaires, personnels, clients,
fournisseurs et partenaires, collectivités humaines,...), et ce, afin de
satisfaire pleinement aux obligations juridiques applicables et investir dans
le capital humain et l'environnement ».
Pour la Business for Social Responsibility, la CSR
(Corporate Social Responsibility) se réfère
généralement au fait de relier les prises de décision en
entreprise à des valeurs éthiques, de se conformer aux
contraintes légales, de respect pour les personnes, la communauté
et le gouvernement. [...] la CSR est définie comme le fait que
l'entreprise se comporte de manière à satisfaire ou
dépasser les attentes éthiques, légales, commerciales et
publiques que la société manifeste envers les entreprises
(F. DEJEAN & J-P. GOND, 2003). A cette définition,
vient s'ajouter celle de la World Business Council on Sustainable
Development pour qui la CSR est l'engagement de l'entreprise à
contribuer à un développement économique durable, en
travaillant avec ses employés, leur famille, la communauté locale
et la société dans son ensemble pour améliorer la
qualité de vie.
La plupart des définitions accordent une place
centrale à la notion d'engagement de l'entreprise, et spécifient
que cet engagement doit aller au delà des obligations et des attentes
légales. Cependant, ces définitions divergent quant à leur
approche de la structure de la CSR, et les axes privilégiés par
les organismes ne sont pas toujours les mêmes. Ainsi une entreprise d'un
secteur donné définira la CSR en fonction des stakeholders
pertinents de son point de vue, alors que des institutions à
caractère plus international auront tendance à privilégier
les relations avec la communauté locale et les familles des
employés, renvoyant à des problèmes plus
spécifiques tels que le travail des enfants.
L'impression d'ensemble qui se dégage des ces
définitions est le caractère en partie contingent du contenu de
la CSR en fonction du niveau où se situe l'organisation (secteur /
niveau national ou supranational) et de ses problématiques propres. Nous
allons dans le sous-paragraphe suivant, donner les définitions
académiques de la RSE.
I - 1 - 2 - 2 - Rapprochement des définitions
théoriques et académiques de la RSE
Selon M. Friedman (1970), la
responsabilité sociale des entreprises est d'accroître ses
profits. La seule responsabilité des entreprises est envers ses
actionnaires. Cette proposition de Friedman repose sur les postulats de la
« main invisible de Adam Smith », car pour lui, seules les
forces du marché génèrent la richesse collective, ce qui
n'est pas totalement acceptable dans le contexte actuel. Par exemple, dans des
cas de fraudes comme Enron et bien d'autres, cette responsabilité envers
les actionnaires n'a pas été respectée. Autrement dit, la
RSE ne se limiterait pas à cela.
En effet, nombreux sont les auteurs qui s'opposent à
cette vision étroite de la responsabilité sociétale de
l'entreprise. Au contraire de la vision de Friedman, selon la théorie
des stakeholders, il existe un contrat implicite entre l'entreprise et la
société. Si ce contrat est rompu, l'entreprise perd sa
légitimité et ne peut bientôt plus fonctionner. En
conséquence, l'entreprise doit gérer ses relations avec ses
parties prenantes, i.e. avec tous ceux qui peuvent affecter ou peuvent
être affectés par les activités de l'entreprise.
Ainsi, selon Freeman (1984), l'entreprise est
responsable devant toutes ses parties prenantes.
Les définitions académiques du
concept de RSE ont ceci en particulier qu'elles fournissent un cadre d'analyse
général indépendant des objectifs propres à une
organisation donnée. C'est le cas, par exemple, de la définition
de Mc Williams et Siegel (2001) selon laquelle la RSE est
l'ensemble des actions visant le bien social au-delà des
intérêts de la firme et de ce qui est demandé par la loi.
Les divergences liées à la définition de la RSE renvoient
aux fondements et aux mobiles qui ont poussé à
l'intégration de la responsabilité sociale.
Selon le père du concept moderne de la RSE H.
Bowen (1953) : « La CSR renvoie à l'obligation pour
les hommes d'affaires d'effectuer les politiques, de prendre les
décisions et de suivre les lignes de conduite répondant aux
objectifs et aux valeurs qui sont considérées comme
désirables dans notre société ». Le caractère
obligatoire que souligne Bowen dans cette définition est propre à
un système assidu de contrôle du respect de la
réglementation. C'est le cas dans plusieurs pays d'Europe (France et
Grande Bretagne par exemple). Ramené au contexte subsaharien en
général, et camerounais en particulier, cette définition
trouve mal son application.
Mc Guire (1963) et Davis
(1973) soutenus plus tard par M. T. Jones (1980),
perçoivent la RSE comme la prise en compte par l'entreprise, de
problèmes qui vont au delà de ses obligations économiques,
techniques et légales et reconnaissance par celle-ci, de ses
responsabilités envers la société. Vu sous cet angle, la
RS débute là où s'arrête la loi. Que dira t-on des
entreprises qui ne se conforment qu'au stricte minimum requis par la loi, parce
que ne faisant face à aucune compétition sur le
marché ?
A. B. Carroll (1979) ne se contente pas
seulement de limiter les champs d'action possibles de l'entreprise responsable
car pour elle, « la CSR intègre l'ensemble des attentes
économiques, légales, éthiques et philanthropiques que
peut avoir la société à l'égard d'une entreprise
à un moment donné ». Suivant le même ordre
d'idées que Carroll, Wood (1991) souligne
que: « La signification de la responsabilité
sociétale ne peut être appréhendée qu'à
travers l'interaction de trois principes : la légitimité, la
responsabilité publique et la discrétion
managériale, ces principes résultant de la distinction
de trois niveaux d'analyse, institutionnel, organisationnel et individuel
». Les définitions proposées par Carroll et Wood vont plus
loin que les approches précédentes en spécifiant les
catégories d'analyse de la CSR et en systématisant les acquis des
recherches antérieures.
On constate une assez forte proximité entre les plus
anciennes définitions de la CSR et les approches managériales.
Ces définitions se contentent en général de mettre en
avant le caractère discrétionnaire de la CSR, en insistant sur le
fait qu'elle recouvre des dimensions qui dépassent les aspects purement
économiques ou légaux de l'activité de l'entreprise.
Mais au fait, qu'est ce que la responsabilité sociale
ou sociétale de l'entreprise ?
De toutes les définitions et
approches développées ci-dessus, nous pouvons définir la
responsabilité sociale de l'entreprise comme la prise en compte par
l'entreprise des variables extra économiques dans la réalisation
de ses objectifs à long et moyen terme. C'est un processus
d'amélioration, dans le cadre duquel, les organisations, les
entreprises, les pouvoirs publics et les collectivités locales
intègrent de manière volontaire, systématique et
cohérente des préoccupations d'ordre social, environnemental et
économique dans leur gestion au quotidien. En d'autres termes, une
entreprise socialement responsable est celle dont l'atteinte des objectifs
économiques est conjointe à l'intérêt collectif de
toutes les parties prenantes et dans le respect des contraintes légales
naturelles.
La responsabilité sociétale s'appuie ainsi sur
des principes directeurs et des outils (normes, standards et labels) qui
permettent, non seulement, de mesurer la réalité de ces pratiques
et leur valeur ajoutée, mais aussi d'en maximiser les impacts positifs
pour les entreprises, les collectivités et la société dans
son ensemble.
I - 1 - 3 - Principes théoriques de la
RSE : dépasser l'opposition entreprise - société
La notion de la responsabilité
sociale de l'entreprise est fondée sur l'idée que les entreprises
doivent assumer des responsabilités qui vont au-delà de leur
sphère d'activités directe. Du point de vue de l'entreprise, la
RSE se traduit par « l'intégration volontaire de
préoccupations sociales et environnementales à leurs
activités commerciales et leurs relations avec leurs parties
prenantes »1(*). La théorie de la RSE se veut une
réponse aux thèses défendues par plusieurs auteurs sur le
pouvoir disproportionné dont disposent les entreprises et leurs managers
dans nos sociétés modernes (Bearle et Means, 1932)
cités par Bowen (1953) et Mills (1956). En
effet, la RSE renvoie à une vision de l'entreprise dont la
finalité n'est pas d'enrichir les shareholders (actionnaires), mais de
concilier les intérêts opposés de tous les stakeholders
(parties prenantes). Une entreprise socialement responsable adopte ainsi
nécessairement une approche à long terme de ses objectifs, de sa
stratégie et de ses bénéfices.
Le principe théorique de la RSE postule par ailleurs
qu'un comportement socialement responsable n'est pas incompatible avec une
meilleure performance financière. Cette attitude permet de créer
un environnement institutionnel favorable à l'exercice des
activités économiques de l'entreprise et contribue à
l'acceptation volontaire des principes de RS. Notons aussi, qu'un comportement
responsable de l'entreprise se traduit par une plus grande stabilité
économique, sociale, et politique, et d'une diminution des critiques
faites par la société civile aux entreprises privées.
Plusieurs tendances lourdes confirment la portée de la
notion de RSE pour les entreprises. Le développement des filières
de commerce équitable atteste par exemple de la sensibilité des
citoyens-consommateurs à des facteurs non économiques mais
plutôt d'ordre sociétal (Jacquot et Attarça
2006). Dans une certaine mesure, le succès grandissant des
filières de produits biologiques relève de la même logique
: besoins de sécurité er de transparence entre autres. Le
développement des agences de notation sociale souligne également
la prise en compte du comportement sociétale de l'entreprise dans les
choix des actionnaires
La performance de l'entreprise n'est pas seulement
jugée selon des critères financiers ou économiques, mais
aussi selon des critères relatifs à son comportement
sociétal. Les relations avec l'ensemble de ses parties prenantes
deviennent alors une donnée objective dans l'appréciation de la
performance. Différentes initiatives publiques donnent à la RSE
un caractère stratégique pour les entreprises. A l'échelle
internationale, le programme Global Compact, lancé par les
Nations Unies en 2000 a pour objectif de promouvoir au sein des entreprises des
pratiques respectueuses de l'environnement et des droits de l'homme. En 2001,
la Commission européenne a publié un Livre vert visant
à promouvoir la RSE.
Ces initiatives visent à faire prendre conscience aux
dirigeants d'entreprises, de la présence d'acteurs autres que les
actionnaires (shareholders), pouvant affecter et être affectés par
les activités de l'entreprise. Il s'agit des stakeholders ou parties
prenantes.
I - 2 - LA RESPONSABILITE SOCIETALE DE L'ENTREPRISE :
UNE APPROCHE
PAR LES PARTIES
PRENANTES
C'est dans le sillage des approches managériales de la
Corporate Social Responsiveness (CSR) que le terme de stakeholders va se
développer, à partir de la fin des années 1970 et du
début des années 1980. Ces approches ont ceci d'original qu'elles
rapprochent et font cohabiter des groupes aux intérêts
contradictoires. A ce titre, on peut définir un stakeholders comme
« n'importe quel groupe dont le comportement collectif peut affecter de
manière directe le futur de l'organisation, mais qui n'est pas sous son
contrôle direct » (Emshoff et Freeman,
1978)2(*).
Le concept cosmopolite de stakeholders
constitue une deuxième occasion de synthèse théorique
majeure. Ce concept est doublement intéressant. Premièrement, il
bénéficie d'une large diffusion au sein des milieux
académiques. De plus, le concept de stakeholders apparaît
aujourd'hui comme le concept fédérateur pour mener à bien
une unification voire une refondation théorique du champ Business
and Society (Freeman, 1994). Deuxièmement, le
concept de stakeholders se distingue par son appropriation massive et
inédite dans le champ des pratiques managériales (A.
ACQUIER & F. AGGERI, 2008). Ainsi, le management des parties
prenantes occupe une place centrale dans la conceptualisation et la mise en
oeuvre de la RSE au sein des entreprises. Les stakeholders constituent alors un
outil stratégique de management, car la prise en compte de leurs
intérêts n'a d'importance que lorsqu'elle est associée aux
objectifs de l'entreprise.
Arguant du côté peu opérationnel du
concept de CSR, Carroll (1991) préconise d'utiliser la
notion de partie prenante pour mieux identifier les responsabilités
sociétales. Notons tout de même que les stakeholders ne sont pas
les mêmes pour toutes les entreprises et au cas où, par hasard,
elles le seraient, ils n'ont pas la même importance au sein de ces
entreprises.
Toutefois, l'approche des parties prenantes a
été acceptée et adoptée par de nombreux auteurs et
est d'ailleurs considérée comme élément de
cohésion quant aux acceptions divergentes de la RSE.
Pour représenter l'entreprise et ses parties
prenantes, le schéma que Freeman propose est le suivant :
Tableau 1.1 : Modélisation de l'approche des
stakeholders : The stakeholder view of the firm.
Entreprise
Communauté locale
Clients
Concurrents
Ecologistes
Associations commerciales
Employés
Medias
Gouvernement
Propriétaires
Défenseurs des consommateurs
Fournisseurs
Est considéré comme
stakeholder, tout individu ou groupe qui peut
affecter ou être
affecté par la réussite de l'entreprise.
Source : A. ACQUIER et F. AGGERI (2008), Inspirés
de Freeman (1984)
La question des parties prenantes pose la
question de leur recensement. F. Lépineux
(2003) propose ainsi de distinguer entre les parties prenantes sur la
base d'une classification en catégories d'acteurs : les parties
prenantes internes (actionnaires, salariés, syndicats), les partenaires
opérationnels (clients, fournisseurs avec, parmi ceux-ci, les
sous-traitants, les banques dans la position de prêteur mais aussi en
attente d'une stabilité et d'une solvabilité, les compagnies
d'assurance dans les termes d'une confrontation au risque dont la substance se
renouvelle profondément aujourd'hui), la communauté sociale
(pouvoirs publics, organisations spécialisées de type syndicat
professionnel, organisations non gouvernementales, société
civile).
Le tableau ci-dessous recense et reprend de manière
synthétique, l'énumération faite ci-dessus.
Tableau 1.2 : Tableau synthétique des
parties prenantes et leurs attentes ou intérêts
principaux
Parties Prenantes
|
Exemples de leurs objectifs,
intérêts
|
Équipe de direction /
Décideurs
|
Gouvernance,
Culture
d'entreprise,
ventes à l'
exportation,
risque juridique,
risque de
réputation,
stratégie (court
et moyen terme),
responsabilité
civile,
risque
de perte de compétence,
performance,
rémunération,
lien de
subordination
|
Propriétaires /
actionnaires
|
Profit, valeur de l'
action en bourse,
information,
stratégie (long et
moyen terme)
|
Clients
|
Qualité
et absence de défaut des produits/Coût et délai de
livraison des produits/qualité de service, relation de
confiance et
partenariat
|
État,
Mission
économique
|
Souveraineté,
sécurité
collective (
défense),
indépendance
énergétique,
sécurité
des
approvisionnements
(
énergie,
matières
premières),
exportations, respect
des principes du
droit (
sécurité
juridique), respect des règles (
comptabilité
publique,
loi),
monnaie,
impôts
|
Citoyens
des communautés locales
|
Information sur les
impacts
environnementaux et
sociaux (
emplois), taxes et
contributions financières,
risque juridique
|
Employés
|
Rémunération,
sécurité de
l'
emploi,
intérêt du
travail,
conditions de
travail,
hygiène
et sécurité au travail (
CHSCT)
|
Syndicats
|
Négociation d'accords,
rémunération,
conditions de
travail,
hygiène
et sécurité au travail (
CHSCT)
|
Fournisseurs
/ sous-traitants
|
Prix et volume d'achat,
continuité, retombées technologiques,
partenariat
|
Banques
|
Fiabilité des
systèmes de
paiement
|
Investisseurs
|
Informations sur la
solvabilité, la
liquidité,
|
Compagnie
d'assurance
|
Informations sur la
gestion des
risques et la
solvabilité, sur la
sécurité
informatique (
profil de
protection)
|
Source: 1. Post, Preston, Sachs (2002),
2. Freeman R. E. (1984),
« Strategic Management : A Stakeholder Approach »,
éd. Pitman.
Cependant l'équivocité de la notion de RSE
aboutit parfois à des situations paradoxales d'entreprises
autoproclamées responsables, se félicitant de respecter les
droits de l'homme, tout en interdisant les syndicats et toute forme
d'expression collective. Il est en effet difficile, vu l'étendue de la
notion de se prétendre socialement responsable ou labellisé RSE
par quelque organisme que ce soit et prétendre satisfaire
simultanément les attentes de chaque partie prenante.
De ce qui précède, on est enclin de penser que
les débats et divergences d'approche, de compréhension, de
contextualisation et de théorisation ne manquent pas. Il existe en
sciences de gestion, une multitude de théories permettant
d'appréhender les démarches et politiques RSE.
Différentes théories, parfois issues de
l'économie (régulation) ou de la biologie (évolutionnisme)
ont été mobilisées sur le domaine naissant du courant de
la RSE en gestion.
I - 3 - CONTRIBUTION DES THEORIES D'ORGANISATION A
L'ANCRAGE DES
PRATIQUES DE RESPONSABILITE SOCIALE AU SEIN DE
L'ENTREPRISE
La question principale est ici de
dégager le cadre théorique le plus adapté à une
analyse des mouvements autour de la responsabilité sociale de
l'entreprise. Nous allons développer tour à tour la
théorie néoclassique, la théorie de l'agence, la
théorie post-moderne, la théorie de la régulation, la
théorie néo - institutionnelle, la théorie
conventionnaliste, la théorie évolutionniste.
I - 3 - 1 - La théorie
néoclassique : une approche dépassée
Selon la conception classique, la responsabilité de
l'entreprise est exclusivement de nature économique. La fonction de
l'entreprise est de produire des profits réguliers et à haut
niveau, car l'essence de l'entreprise libre est de rechercher le profit de
toutes les manières qui soient cohérentes avec sa propre survie
en tant que système économique (Levitt, 1958,
cité par Lépineux, 2003). En d'autres
termes, les entreprises pérennes sont celles qui poursuivent leur seul
objectif de maximisation du profit à long terme. Vu sous cet angle, les
entreprises n'ont plus qu'à respecter le strict minimum de
sincérité et de loyauté, et rechercher le gain tangible et
pécuniaire.
Friedman (1962) partage le même point
de vue. Il est connu pour sa position radicale dans le débat sur la RSE
selon laquelle l'entreprise ne devrait pas fausser le libre jeu par des
interventions dans le domaine de la RSE. Il considère qu'« il
existe peu de courants aussi dangereux pour les fondements même de notre
société libre que l'acceptation, pour les dirigeants
d'entreprise, d'une responsabilité autre que celle de maximiser le
rendement de l'argent de leurs actionnaires ». Pour inscrire la prise
en compte des objectifs sociétaux dans les décisions des
entreprises, il faudrait démontrer qu'il y a une corrélation
positive entre performance financière et performance sociale.
En bref, la théorie néoclassique ne trouve pas
les pratiques de responsabilité sociétale nécessaires au
sein de l'entreprise, et ceci pour deux raisons principales : tout
d'abord, les actionnaires sont les seules parties prenantes auxquelles
l'entreprise doit rendre des comptes ; ensuite, l'objectif unique de
l'entreprise est de maximiser les profits. Or, il est possible que les parties
prenantes externes influent sur les performances des entreprises. Par exemple
en Europe, les banques inscrivent les pratiques de RSE parmi les conditions
pré requises au financement des projets de PME.
Comment prétendre servir les intérêts de
toutes ses parties prenantes si on ne se préoccupe que de la
maximisation du profit au sein de l'organisation ? D'autres
théories jugées plus réalistes, ont été
développées.
I - 3 - 2 - La théorie de l'agence :
existence d'un contrat social
La notion d'agence est définie par
Jensen et Mekling, (1976) comme un contrat par lequel une
personne appelée principal ou mandant,
délègue à une autre personne appelée agent
ou mandataire le pouvoir de prendre à sa place un certain
nombre de décisions. Au-delà du risque de conflit
d'intérêts qui existe entre les parties concernées
(intérêt du mandant et intérêt du mandataire),
l'information diffusée joue un rôle déterminant entre les
acteurs. La relation d'agence peut être élargie à
l'ensemble des parties prenantes de l'entreprise ; dans ce cas les
dirigeants sont des « agents » qui sont les seuls à
être en relation avec les parties prenantes (Hill et Jones,
1992). Vu sous cet angle, la RS repose sur les dirigeants qui sont en
relation contractuelle implicite ou explicite avec plusieurs catégories
d'acteurs : actionnaires, créanciers, salariés, clients,
fournisseurs, consommateurs, collectivités, entre autres. Ainsi pour
assurer la pérennité de l'entreprise, les dirigeants se doivent
de concilier les attentes divergentes de toutes ces parties prenantes de telle
sorte qu'aucune d'entre elles ne sente défavorisée.
Toutefois, cette théorie bien que constructiviste
repose sur la nécessité d'un système d'information
idéal, difficilement envisageable sur le plan pratique. Car dans cette
approche, les parties prenantes influencent les décisions
stratégiques des dirigeants et ceux-ci doivent leur rendre des comptes
sur la façon dont ils ont pris en compte leurs attentes (existence d'un
contrat social).
I - 3 - 3 - Critique de type post-moderne :
théorie néo-classique renouvelée
Encore appelée critique du grand discours de la
raison occidentale, la critique de type post-moderne est un
« flash back » à la théorie
néoclassique. M. T. Jones (1996) dénonce
l'idéologie de la RSE qui pour lui s'enracine dans celle de son
ancêtre le plus proche : le managérialisme (Le Goff,
1995). La croyance qu'une classe de managers créés par
le développement institutionnel, servirait de manière
bienveillante les intérêts de la société.
Au niveau managérial, l'action ne peut se concevoir
qu'à l'intérieur de frontières dont les limites sont
tracées par la rationalité économique dominante. Pour
reprendre les analyses de Foucault : le discours sur la
CSR contribue à renforcer l'hégémonie idéologique
dans laquelle les arrangements institutionnels contemporains sont
décrits comme servant l'intérêt général alors
qu'ils ne servent en fait que les intérêts d'une
minorité. Cette vision de la RSE, bien que développée
sous d'autres cieux, trouve une application profonde dans le contexte
camerounais actuel. Par exemple, les dirigeants d'entreprise n'ont pas compris
que le recrutement des autochtones (démarche RSE) au sein des
entreprises ne veut pas dire recruter uniquement les autochtones de
manière à défavoriser les immigrés. Une telle
analyse du sujet amène à opter pour la conclusion de DELALIEUX :
empiriquement et théoriquement la seule voie plausible pour la RSE
est de proposer une force de pression externe exerçant des contre
pressions incitant et obligeant les entreprises à agir de manière
socialement plus responsable.
Cependant, une telle conclusion renverrait la RSE à sa
case de départ à savoir la dimension volontariste
(déjà dépassée) de la RSE. Cette approche fait
ressortir le besoin pressant de régulation qui permettrait de trouver un
point d'équilibra entre l'entreprise et l'ensemble de ses parties
prenantes.
I - 3 - 4 - Approche régulationniste : un
espoir de conciliation d'intérêts divergents
Issue des sciences économiques, le cadre
théorique de la régulation a cependant été
utilisé en sciences de gestion notamment pour analyser la
contextualisation de la démarche qualité au sein d'une entreprise
industrielle (Rousseau, 1997). Cette approche reprend en
grande partie les analyses de la critique post-moderne de la RSE. Elle
dénonce la supériorité des acteurs institutionnels de
l'économie dans le domaine de la réglementation et de la
législation environnementale et sociale ainsi que sa capacité
d'imposer par des jeux institutionnels, des règles du jeu n'incluant pas
forcément l'intérêt de leurs parties prenantes dans son
sens le plus large.
L'instrumentation de la RSE au sein des sciences de gestion
peut alors s'interpréter comme la réponse à cette remise
en cause, le rôle de la RSE étant de définir ou de
circonscrire la « marge de tolérance à l'intérieur de
laquelle les valeurs théoriques d'un système social peuvent
varier sans que son existence soit mise en danger » (Habermas,
1982). Les normes sociales et environnementales se retrouvent alors
par le truchement de la concurrence, réduites à de simples
variables d'ajustement des manoeuvres stratégiques des entreprises.
En bref, la RSE telle que développée par les
postulats de la théorie régulationniste, intègre les
dimensions sociales et économiques dans la recherche d'un point
d'équilibre en ce qui concerne les attentes des parties prenantes.
I - 3 - 5 - Approche néo-institutionnelle :
la quête de la légitimité
Dans le prolongement des travaux de Di Maggio, Powell
(1983), Oliver (1991), Meyer & Rowan
(1977), la théorie néo-institutionnelle subordonne la
compréhension des organisations à l'étude des relations
entre organisations et à l'influence de leur environnement social. La
légitimité naît au sein d'un environnement qui impose des
exigences sociales et culturelles, incitant les entreprises à jouer un
rôle déterminé et à maximiser certaines apparences
externes (Capron, 2003). L'entreprise doit apprendre à
paraitre selon les critères convenus et ressembler à une
organisation rationnelle (M. C. Suchman, 1995)3(*). Suchman M.
C. défini la légitimité
comme : « l'impression partagée que les actions
de l'organisation sont désirables, convenables ou appropriées par
rapport au système socialement construit de normes, de valeurs ou de
croyances sociales ».
L'approche néo-institutionnelle s'intéresse
à l'influence du contexte institutionnel sur l'adoption de pratiques
institutionnelles, que cette adoption soit contrainte ou choisie. Les
entreprises adoptent les structures que les institutions exigent d'elles afin
d'accroître leur légitimité institutionnelle et leur
pouvoir. La multiplication de départements de développement
durable ou RSE au sein des entreprises semble répondre en partie
à cette logique de quête de légitimité. Mais cette
théorie rencontre une difficulté majeure, liée au risque
de décalage existant entre adoption formelle au sein d'un organigramme
et pratique réelle qui peuvent parfois diverger dans le temps et de
manière notoire.
I - 3 - 6 - La théorie Conventionnaliste :
l'ancrage de la RSE dans les pratiques
quotidiennes
de l'entreprise
Selon E. PERSAIS (2007)4(*) la
responsabilité sociétale de l'entreprise relève avant tout
d'une convention entre acteurs. L'approche conventionnelle, décrite plus
comme un mouvement d'idées qu'une théorie unifiée
(Rojot, 2003) définit la nécessité de
l'existence de conventions entre les acteurs d'une organisation commune afin de
permettre l'action collective. Ces conventions ont pour principal
inconvénient qu'elles reposent sur des fondements théoriques (en
particulier philosophiques) et non sur des principes pratiques. La
théorie des conventions se propose d'aller au delà des aspects
légaux et volontaires de la RSE pour concevoir la RSE comme un
phénomène naturel.
En effet, E. Persais (2007) souligne que la
théorie des conventions relève en partie de l'implicite :
la vie en société n'est et ne peut être totalement
régulée (i.e. régie par des lois, des règlements ou
des contrats).... Un certain nombre de règles implicites opèrent
souvent sans que nous nous en apercevions, voire même que nous en ayons,
à un moment ou à un autre, discuté les fondements.
Ces règles qui relèvent du savoir-vivre, contribuent à une
amélioration de la vie en société. On retrouve des
exemples pratiques assez mitigés de cette théorie dans le
contexte camerounais (le sponsoring par MTN du championnat camerounais de
football ; la mise à la disposition du grand public d'un puits
d'eau potable par Sic Cacao ; les forages des Brasseries et de Guinness et
bien d'autres oeuvres caritatives), mitigés par ce que à cheval
entre la stratégie de rentabilité à long terme de
l'entreprise et son savoir-vivre.
En bref, le modèle conventionnaliste de la RSE est
susceptible de concerner deux aspects de la gestion de l'entreprise : la
mise en oeuvre de la RSE au quotidien et la perception qu'ont les parties
prenantes du comportement sociétal de l'entreprise.
I - 3 - 7 - La théorie Evolutionniste : les
routines organisationnelles face à la RSE
Les idées de la théorie évolutionniste en
sciences de la nature ont été reprises et appliquées en
sciences de gestion. L'approche orthodoxe (néo classique) ne
réussissant pas à appréhender de manière
satisfaisante l'évolution du progrès et de la technique au sein
des firmes, qu'elle décrit comme un processus continu et régulier
alors que des travaux empiriques illustrent son caractère discontinu et
par grappes. Nelson et Winter (Ibert, 2002) décident
alors de reconstruire une théorie en se basant sur la
rationalité limitée de Simon et la théorie de
l'innovation. Le niveau d'analyse qui va être
privilégié est celui des routines
organisationnelles (semblables aux conventions) qui vont
déterminer le comportement de la firme en fonction de variables externes
multiples (conditions de marché principalement) à travers le
processus de recherche d'innovations et de sélection de l'environnement.
Sans rentrer dans les subtilités de la théorie
évolutionniste en distinguant les contributions de Darwin, Lamarck et
Spencer la performance organisationnelle est déterminée par la
capacité des organisations à détenir les routines
organisationnelles requises pour passer la sélection imposée par
l'environnement (Heilbrunn, 2004).
Appliqué à la RSE, si l'exigence de
labellisation sociale, comportements socialement responsables des entreprises
de la part des consommateurs, des pouvoirs publics (de l'environnement en
général) venait à s'intensifier, seules les organisations
ayant développé les routines organisationnelles
nécessaires survivraient et passeraient le cap de la sélection
imposée par l'environnement.
Section II : CONTEXTUALISATION DU CONCEPT DE
RESPONSABILITE
SOCIALE DE
L'ENTREPRISE : DOMAINES D'APPLICATION
ET
INSTRUMENTS DE MISE EN OEUVRE
Deux modèles sont universellement
reconnus comme modèles de référence en matière de
RSE. Il s'agit du modèle américain ou anglo-saxon qualifié
de modèle normatif et du modèle européen encore
appelé approche légale de la RSE. Dans le contexte de
mondialisation actuel qui prône le libéralisme économique,
grand est le besoin d'opérer un accommodement entre ces deux
modèles antagonistes. Dans le sous-paragraphe suivant, nous allons
concilier ces modèles afin d'arrimer la recherche sur la RSE aux
exigences de la mondialisation.
II - 1 - Les différences d'acception entre
l'Europe et les États-Unis : rapprochement
du modèle normatif au modèle
légal de la responsabilité sociale de l'entreprise
Bien que le concept de développement durable ait une
influence particulière sur la RSE telle qu'elle est pratiquée en
Europe, l'acception américaine de cette notion n'y est pas totalement
hermétique. Pour Capron (2003), les pratiques des
entreprises tant européennes qu'américaines mettent en
évidence l'intérêt croissant accordé à cette
question afin de s'aligner sur les objectifs du développement durable.
L'auteur signale, cependant, des différences entre l'approche
anglo-saxonne qui vise plutôt la correction des effets des
activités économiques et l'approche européenne qui est
généralement plus sensible à l'anticipation et à la
prévention des risques.
Sur un autre plan et comme le soulignent Capron et
Quairel-Lanoizelée (2007), dans la conception
états-unienne du concept de RSE, l'individu est au centre de tout. Il y
a lieu de rappeler que l'ouvrage fondateur écrit par H. Bowen (1953)
était intitulé « La responsabilité
sociale des hommes d'affaires », renvoyant ainsi au sens du devoir et
à la morale individuelle des hommes d'affaires et non à celle des
entreprises (F. Acquier et J-P. Gond, 2005). Une explication
d'ordre culturel pourrait être avancée ici puisque la logique
individuelle est beaucoup plus prégnante aux États-Unis que dans
les pays européens. La régulation se passe sans les
autorités publiques dont l'intervention est perçue comme limitant
les libertés individuelles. Dans cette perspective, il serait difficile
d'imposer aux entreprises un comportement responsable via des textes et
législations.
Eu Europe, par contre, la RSE est beaucoup plus permissive
à l'influence de l'État et des autorités publiques. Le
livre vert de l'Union Européenne sur la RSE en est l'illustration la
plus significative. Ainsi, c'est la définition donnée à la
RSE dans ce document qui est la plus communément reprise par de nombreux
auteurs européens. Le livre vert de l'Union Européenne est
censé constituer un outil permettant d'inciter les entreprises à
adhérer à la RSE et d'orienter leurs démarches
(CCE, 2001). Le document accorde une place de choix aux
relations avec les employés et à leurs conditions de travail. On
peut également donner l'exemple de la loi NRE en France
(2002) qui encadre la publication des rapports de RSE. Cette loi
va dans la continuité de la loi de modernisation sociale de
1977 prônant la réalisation d'un bilan social pour les
entreprises dont l'effectif est d'au moins 300 salariés
(Igalens, 2004).
Ainsi, nous pouvons dire que la RSE pourrait être
approchée sous deux angles : le courant «orthodoxe »
anglo-saxon, et le courant plutôt « social »
européen. La conception américaine de la RSE aux origines
éthiques et religieuses diffère de celle européenne qui,
de par sa référence au développement durable, acquiert une
posture plus tournée vers la politique et est de ce fait plus
institutionnalisée. Ces divergences ont un facteur explicatif
commun : la culture (libéralisme économique aux États
Unis et politique interventionniste en Europe).
II - 2 - Champ d'application des activités extra
économiques des entreprises
Les domaines d'application de la RSE sont multiples, mais par
rapport à l'entreprise qui là réalise, on peut regrouper
les activités de RSE en interne et en externe. Nous allons d'abord
présenter les types ou niveau de RSE avant d'aborder les domaines de la
RSE proprement dits.
II - 2 - 1 - Les niveaux de responsabilité
sociale de l'entreprise : vers une classification
des
activités responsables
D'une manière générale, il est
accepté que la notion de RSE intègre globalement les deux
critères normatifs suivants :
· Les firmes doivent honorer des obligations à
l'égard d'une pluralité de groupes sociaux ;
· Les firmes doivent savoir réagir aux demandes
sociales qui émanent de leur environnement.
Dans les deux cas, il s'agit de qualifier des actions de
l'entreprise qui traduisent une forme d'engagement de celle-ci envers ses
parties prenantes, et cela au-delà de ses obligations purement
légales ou économiques.
La responsabilité sociale des entreprises a
été abordée sous plusieurs dimensions et par plusieurs
auteurs. Il convient tout de même de noter que ces dimensions de RSE
présentent des similitudes et des complémentarités fortes
d'un auteur à l'autre.
Dans une étude sur la pratique de la RSE,
Johnson et Scholes (2000) identifient quatre types de
positions responsables :
- Les entreprises qui considèrent que leur seule
responsabilité est de garantir l'intérêt à court
terme des actionnaires. Pour cette catégorie d'organisations, seul
l'État est garant de l'encadrement juridique de la politique sociale de
l'entreprise ;
- Les entreprises dont les dirigeants pensent qu'une position
intelligente avec les autres parties prenantes sert à long terme les
intérêts des actionnaires ;
- Les entreprises qui intègrent dans les buts et les
stratégies, de façon explicite, les intérêts et les
attentes des parties prenantes. Elles dépassent souvent les obligations
légales. Pour les dirigeants de ces entreprises, la performance va
au-delà des considérations financières ;
- Enfin, les entreprises qui ont pour ambition de transformer
la société. Les considérations financières y sont
reléguées au second plan et sont plutôt perçues
comme une contrainte et non comme un objectif.
Cette approche bien qu'intéressante, ne nous permet
pas de ranger une entreprise dans l'un ou l'autre niveau de RSE de façon
explicite. A. B. Carroll rend cette classification plausible en
définissant
A. B. CARROLL (1979) souligne que les
activités de RSE englobent quatre grandes catégories
d'obligations : économiques (être profitable, fabriquer des
produits respectant des normes de qualité et de sécurité),
légales (respecter les lois et les réglementations),
éthiques (agir conformément à des principes moraux
partagés au sein de la société), philanthropiques (agir
avec bienfaisance et charité). La définition d'A. B.
Carroll, considérée comme fondatrice des approches
théoriques de la RSE, a été affinée par
WOOD (1991) qui précise trois niveaux de
responsabilité pour l'entreprise.
En effet selon Wood (1991),
la responsabilité sociétale de l'entreprise présente trois
niveaux. D'une part, la responsabilité de l'entreprise en tant
qu'institution sociale : l'entreprise dispose d'une
légitimité accordée par la société, elle
doit utiliser son pouvoir économique qui découle de cette
légitimité, dans un sens favorable aux attentes de la
société, au risque de perdre ce pouvoir. D'autre part, la
responsabilité en termes de conséquences (outcomes) de ses
activités : ce sont les conséquences au niveau de ses
parties prenantes primaires (acteurs concernés directement et
profondément par les décisions de l'entreprise) ou de ses parties
prenants secondaires (acteurs concernés indirectement par les
décisions de l'entreprise). Enfin, la responsabilité
individuelle et morale des dirigeants et des managers : ceux-ci
doivent utiliser leur pouvoir discrétionnaire au service de la
responsabilité sociétale de l'entreprise (dans le choix des
stratégies de l'entreprise et dans les moyens de mettre en oeuvre ces
stratégies).
L'approche de Wood est complémentaire à celle de
Carroll. Chacune des formes de RSE proposées par Carroll
(économique, légale, éthique et discrétionnaire)
peut être déclinée selon les trois niveaux définis
par Wood.
Capron et Quairel-Lanoizelée
(2000) proposent de distinguer deux catégories de comportements
ou de logiques stratégiques en matière de RSE5(*). D'une part, les
stratégies substantielles : l'entreprise modifie
réellement ses objectifs, adapte ses méthodes de travail et son
organisation de manière à répondre aux valeurs de la
société et à la demande sociale. L'intégration
entre les préoccupations sociales de l'entreprise et ses choix
stratégiques économiques est forte6(*). Elle peut découler d'une attitude proactive
d'anticipation des demandes sociales ou d'une attitude réactive
d'adaptation face à une pression sociale. D'autre part, les
stratégies symboliques : l'entreprise s'approprie
opportunément la notion de RSE mais sans les fondements de cette
approche. Ce type de stratégie est centré sur l'image et sur la
réputation. Cela passe par la politique de communication
institutionnelle de l'entreprise, sa politique de communication commerciale ou
encore les stratégies de discours de leurs dirigeants envers les parties
prenantes. Leur objet est alors moins de prendre en compte certains enjeux
sociétaux que de servir de support à une politique de
communication externe ou de motivation du personnel.
Les niveaux de RSE tels que décrits par Capron et
Quairel-Lanoizelée peuvent être qualifiés de
génériques parce qu'elles englobent toutes les dimensions
proposées par les auteurs précédents. Toutes les approches
de la RSE proposées ci-dessus ont ceci de commun qu'elles
débouchent toutes sur les deux grandes orientations de la RSE à
savoir les dimensions obligatoires et volontaires de la RSE.
II - 2 - 2 - Mise en oeuvre de la RSE : un
problème pluri dimensionnel
La Responsabilité Sociale de l'Entreprise peut
être mise en oeuvre de plusieurs façons et ce dans plusieurs
domaines. En ce qui concerne les pratiques de RSE proprement dites, la
littérature distingue l'approche sociétale française de
l'approche d'inspiration anglo-saxonne. Dans l'une ou l'autre approche de la
RSE, les domaines d'application de la RSE ont deux grandes orientations ou
dimensions à savoir : la responsabilité sociale interne et
la responsabilité sociétale externe.
Bien qu'ils ne constituent pas les destinataires de
référence, les parties prenantes internes sont les acteurs
dominants du discours managérial (devant les actionnaires et les
clients). Depuis une quinzaine d'année, le personnel est davantage
présenté comme un partenaire, c'est d'ailleurs la raison pour
laquelle on lui attribue une place notoire dans les études portant sur
la performance partenariale des entreprises de l'ère contemporaine.
L'intégration des membres de l'entreprise a fortement
progressé à la fin des années 1990 (M.
Attarça & T. Jacquot, 2006). En effet, ces
évolutions confirment l'importance accordée à l'Homme au
sein de l'organisation. Par exemple dans les grandes entreprises et dans
certaines PME, on emploi désormais des termes plus valorisant, comme les
notions d'Equipe et de Collaborateurs, pour substituer les
notions de Personnel, employés ou de Salariés.
Ainsi, le « collaborateur » ne
représente plus un simple potentiel à gérer, mais est
plutôt perçu comme un acteur interne à former, bâtir,
édifier et animer. En bref, la responsabilité sociale en interne
a trait à plusieurs composantes de la GRH, notamment les conditions de
travail, la politique de rémunération, le dialogue social dans
l'entreprise, le climat social dans l'entreprise, la gestion des emplois et des
compétences, le temps de travail, l'intégration des
catégories fragiles, le principe de non discrimination selon
l'âge, le sexe, voire l'appartenance tribale.
En externe, la responsabilité sociale a trait aux
dimensions sociétales et environnementales. Les parties prenantes
externes prennent également une importance grandissante dans le discours
managérial. La progression significative des références
aux partenaires économiques puis à la population et à la
préoccupation environnementale illustre la volonté par les
dirigeants d'entreprise, d'affirmer une légitimité sociale. Elle
manifeste également la volonté de démontrer
l'étendue du champ de la réflexion stratégique (la RSE
s'inscrit dans une perspective de développement durable). Enfin, cette
présence met en évidence la volonté de valoriser les
acteurs dans le but de rechercher leur confiance, leur adhésion et
d'orienter leurs comportements à l'égard de l'entreprise.
Ainsi la mise en de la RSE en externe, peut
caractériser une dépendance ou bien une volonté d'associer
certains acteurs à la réflexion stratégique. Deux grandes
composantes auxquelles on peut associer les décisions
stratégiques de l'entreprise vis-à-vis des parties prenantes
externes sont la société civile et l'environnement. La
responsabilité environnementale s'inscrivant dans la volonté de
préserver l'environnement naturel (le souci du maintien des
écosystèmes) voire de participer activement à
l'écologie (lutte contre la pollution par exemple).
En bref, les domaines de la RSE en externe concernent
essentiellement la consultation et la prise en compte des attentes des parties
prenantes externes (État, société civile, banques et
autres compagnies), la prise en compte de l'impact écologique des
produits et services fabriqués et commercialisés, la limitation
de la consommation d'énergie et des matières premières, la
lutte contre la pollution, le recyclage des fournitures et des produits
usés, la réduction des rejets et émissions dans l'eau, la
contribution à la protection de la biodiversité et des
écosystèmes, application du principe de précaution en
matière de recherche scientifique et technologique.
Les domaines d'application de la RSE en interne et en
externe, et selon le modèle (anglo-saxon et français) sont
résumés en annexe. Il convient toutefois de noter que la maitrise
des différents domaines vers lesquels les dirigeants d'entreprise
peuvent orienter leurs démarches RSE n'est pas un acquis, encore faut-il
qu'ils sachent comment instrumenter la RSE et avec quelle efficacité.
II - 3 - Les instruments au service de la
responsabilité sociale de l'entreprise
A la question « comment
instrumenter la RSE ? », on trouvera difficilement une
réponse immédiate qui soit acceptée de tous. Car les
contextes de mise en oeuvre de RSE sont différents malgré la
conjoncture actuelle de mondialisation (déphasage persistant entre les
conceptions européenne et anglo-saxonne de la RSE). Les instruments dont
dispose l'entreprise dans sa politique de responsabilité sociale, ont
été regroupés en cinq catégories par Capron
et Quairel (2004) et dans un rapport de la CNUCED7(*). Par
instruments de la RSE il faut entendre l'ensemble des dispositifs que
mettent en oeuvre les différents acteurs (internes ou externes à
l'entreprise) pour peser sur les décisions. Ces dispositifs sont
présentés sommairement dans le tableau suivant :
Tableau 1.3 : Les Instruments de la
Responsabilité Sociale de l'Entreprise
Dispositif
|
Utilité
|
Exemple
|
Mise en oeuvre
|
Assister le manager à la mise en oeuvre des
stratégies RSE au sein de l'entreprise. Autoévaluation et
évaluation croisée avec d'autres PP.
|
- Système de management de qualité (ISO 9001 et
9004),
- Système de management environnemental (ISO 14004),
- Système de management de la sécurité
(OHSAS 180001),
- Guide méthodologique (AA 1000-SD 21000).
|
Prévention
|
Construire la crédibilité des
représentations de l'entreprise et donner confiance aux parties
prenantes.
|
- Codes de conduite
- Certification sociale (SA 8000)
- Labellisation
|
Communication
|
Communiquer sur l'impact social de son activité et sur
la performance environnementale.
|
- Reporting social
- Rapport de DD
- Rapport Annuel
- Bilan Sociétal / Bilan Social
|
Contrôle
|
Contrôler l'application des critères sociaux
internationalement reconnus.
|
- Normes de performance (SA 8000)
- Normes de certification (AA 1000)
- Normes de gouvernance (OCDE)
- Tableaux de bord
|
Évaluation
|
Aider au diagnostic des performances sociétales.
|
- Bilan sociétal
- Notation sociétale
- Indice social danois
- SME key
|
Source : CAPRON et QUAIREL (2004) et le
CNUCED
Le tableau ci-dessus comprend au total cinq (05)
catégories de dispositifs auxquels les entreprises peuvent recourir dans
leurs démarches responsables. De manière sommaire, ces
dispositifs sont universellement applicables, mais pris dans les
détails, chaque société s'inscrit dans un exemple bien
précis. Le tableau ci-dessus aurait donc été construit sur
la base de l'exemplarité8(*), ce qui ferait de toutes ses rubriques (dispositif,
utilité et exemples), et particulièrement celles sur
l'utilité et les exemples des rubriques non
exhaustives et sujettes à des critiques. Par exemple, les instruments
d'évaluation, telles que définies, restent un mythe dans le
contexte camerounais. Ce qui nous amène à poser la question
suivante : évalue t-on la RSE au Cameroun ?
La maitrise des domaines d'application et des instruments
nécessaires à la mise en oeuvre d'une politique de
responsabilité sociale au sein de l'entreprise, engendre pour ses
dirigeants, le besoin de connaitre les enjeux, les risques et les avantages
inhérents à la pratique de responsabilité sociale au sein
de l'entreprise dans le contexte actuel de mondialisation. C'est ce qui fera
l'objet du prochain chapitre.
Chapitre II
LA RESPONSABILITE SOCIALE DE L'ENTREPRISE :
UNE EXIGENCE CONCRETE INCONTOURNABLE ET UN
BESOIN CROISSANT D'HARMONISATION
DES
PRINCIPES
INTERNATIONAUX.
Pour les défenseurs de la RSE, la demande sociale est
désormais pour les grandes entreprises comme pour les PME, telle
qu'elles ne peuvent se couper de cette nouvelle exigence de RSE qui influe
directement sur leur vente et leur rentabilité à moyen et long
terme. La demande d'un nombre de consommateurs solvables avec la montée
en puissance de l'achat éthique ou de consommation durable, impose peu
à peu une transparence et une traçabilité des actions
menées (C. Jolly, 2006). Les dirigeants de l'entreprise
doivent par conséquent démontrer une performance à long
terme y compris sur le terrain social et environnemental. Cet engagement permet
de mesurer l'adaptabilité de son modèle qui ne peut se limiter
uniquement à des considérations purement financières et
économiques dans une logique trop simpliste de maximisation du profit
à court terme. Dans une économie fortement globalisée et
concurrentielle, la capacité de l'entreprise à intégrer
des données relatives à son environnement devient la clef de sa
stratégie voire de sa survie.
La multiplication des expériences concrètes de
RSE notamment en Europe mais également dans le monde indique
désormais qu'il s'agit, plus d'un mouvement de fond irréversible,
que d'un effet de mode passager aux seuls relents médiatiques
(T. Berns & P-F. Docquir, 2007). Il existe un consensus
sur une approche large de la responsabilité sociale. En effet, la
déclaration adoptée en Juin 2008 à Genève par la
Conférence internationale du travail sur la justice sociale
pour une mondialisation équitable retient aussi une approche large de la
responsabilité sociale. Elle souligne en particulier que la violation
des droits sociaux ne peut être utilisée comme avantage
comparatif. Les Nations-Unies, proposent aussi une approche holistique pour la
responsabilité des entreprises en matière de droits de l'homme
(V. Spidla, 2008). Cette approche a très naturellement
reçu le soutien des vingt-sept États Membres de l'Union
européenne, puisque cette approche large est aussi l'approche
européenne. Les pratiques de RSE ont en effet besoin de politiques qui
favorisent leur développement. Il s'agit de politiques adaptées
au contexte économique et social, fondées sur la confiance. Dans
les pays à faible gouvernance, seules des politiques ambitieuses de mise
sur pied de procédures de contrôle entraîneront un cercle
économique vertueux.
La mondialisation de l'économie est si avancée
aujourd'hui que la réussite de chaque ensemble régional est
liée à la réussite de tous les autres. Par ailleurs, le
poids croissant des entreprises des pays émergents montre bien que la
Responsabilité Sociale des Entreprises ne peut plus être un sujet
limité aux seuls pays développés. Il est donc absolument
nécessaire que les pays émergents ne restent pas en dehors de ce
mouvement qui conduit à une harmonisation des pratiques internationales
de RSE. Harmonisation dont l'application est rendue plus aisée par la
prise en compte des lois des institutions internationales en matière de
RSE et de développement durable.
Dans nous présentons dans un premier temps les enjeux
de la RSE, les risques liés à la RSE en tant que composante du
management d'entreprise et les avantages potentiels d'une telle
responsabilité de l'entreprise dans un contexte de mondialisation. Dans
un deuxième temps, nous allons présenter les différentes
institutions internationales qui jouent un rôle substantiel dans la mise
en oeuvre et le développement d'actions RSE au sein des entreprises.
Section I : POLITIQUE DE RESPONSABILITE SOCIALE
DES ENTREPRISES :
ENJEUX, RISQUES ET AVANTAGES DANS
UN CONTEXTE DE
MONDIALISATION
Reprenant le point de vue partagé par
T. Levitt (1958) et M. Friedman (1962), on est enclin de se
demander pourquoi une entreprise dont l'objectif principal est de maximiser ses
profits, engagerait des dépenses supplémentaires pour mettre en
oeuvre une politique RSE.
En effet, la mise en oeuvre d'une politique de
responsabilité au sein de l'entreprise comporte des enjeux
déterminants pour celle-ci, surtout dans le contexte actuel de
mondialisation. Ces enjeux constituent une source majeure de motivation des
dirigeants à s'engager dans des activités socialement
responsables.
I - 1 - Inscription des démarches RSE dans la
politique générales de l'entreprise : les
enjeux de la mise en
oeuvre de la RSE
Les enjeux de la RSE pour l`entreprise sont multiples et
relatives au milieu dans lequel elle opère, à son domaine
d'activité et aux attentes de ses différentes parties prenantes
entre autres. Dans leurs pratiques de RSE, les dirigeants d'entreprises sont
généralement en phase avec le respect et la protection de
l'environnement, le développement durable et la bonne santé de
l'entreprise.
Selon J. IGALENS (2005) « l'enjeu
premier est de pouvoir bien aligner l'ensemble des dimensions et donc ne pas
les traiter de façon séparée. Il faut aussi se situer dans
un contexte sectoriel. Car il ne faut pas que la RSE devienne un moyen de
fausser la concurrence ». C'est-à-dire qu'il ne faut pas
qu'une entreprise très en avance sur ces aspects sociaux et
environnementaux soit pénalisée parce que ses concurrents n'en
feraient pas autant. Prenons l'exemple de Nike qui, après des
difficultés, est allé très loin dans la transparence. Les
conditions de travail de certains de ses sous-traitants n'étaient pas
conformes aux principes de sa Charte et cela apparaissait dans un rapport
d'audit. Un consommateur a attaqué Nike pour publicité
mensongère et a obtenu le bénéfice d'une transaction
financière avantageuse. Du coup, Nike ne veut plus aller aussi loin dans
la transparence. Aujourd'hui la responsabilité sociale est devenue un
vaste sujet, très complexe, qui sollicite beaucoup de précautions
de la part des entreprises. Une stratégie de RSE doit être
mûrement réfléchie en amont comme le préconise
à juste titre le MEDEF9(*), mais aussi dotée des capacités requises
en prévision de l'entrée en vigueur de la nouvelle norme ISO
2600010(*).
Comme nous l'avons énoncé ci-dessus, les enjeux
de mise en oeuvre de la RSE sont multiples et variés, les plus connus
sont les enjeux managériaux, économiques, sociétaux et
environnementaux. Locket et coll., (2006) distinguent aussi
les enjeux théoriques et les enjeux idéologiques. P.
Crifo et J-P Ponssard (2008) quant à eux, examinent les enjeux
que prend la RSE sur quelques leviers classiques : décisions
stratégiques, décisions opérationnelles, communication.
Nous allons tour à tour examiner les décisions
ou enjeux stratégiques, les enjeux ou décisions
opérationnelles, les enjeux managériaux et les enjeux
économiques et sociétaux et leurs implications dans les pratiques
de RSE.
I - 1 - 1 - Préserver les intérêts
à moyen et long terme de l'entreprise : les enjeux
stratégiques
Le problème qui se pose ici est celui de la
détermination de la stratégie à adopter vis-à-vis
des exigences de responsabilité sociale. Cette stratégie peut se
développer au niveau de la communication d'informations à
caractère sociétal et l'entreprise pourra alors s'appuyer sur des
outils existant à cet effet (les médias, internet, ou le
reporting social). Il est notoire que les perspectives de croissance de
marché jouent un rôle prépondérant pour justifier
les choix d'investissement (P. Crifo et J-P. Ponssard,
2008)11(*). Il
est clair que la RSE s'inscrit tout naturellement dans un tel schéma :
par exemple les questions relatives à l'énergie renouvelable,
à l'obésité et à la nutrition ouvrent de nouveaux
marchés et précipitent le déclin d'autres marchés.
Ainsi, l'innovation, perçue ici comme
la capacité à anticiper les besoins futurs du marché,
offre des opportunités de croissance en termes de revenus et d'emplois
pour les firmes et les pays. C'est le cas, certes inversé, de quelques
firmes de l'industrie automobile. En effet, le constructeur automobile Krysler
envisage fermer une de ses branches en France. Le fait d'annoncer la nouvelle
quelques mois à l'avance permet non seulement à l'entreprise de
revoir ses stratégies en terme de coût (performance
économique), mais aussi, de préparer psychologiquement ses
employés afin d'éviter les effets néfastes d'un
licenciement soudain (aspect sociétal).
Après les enjeux stratégiques qui concernent les
intérêts de long et moyen terme de l'entreprise dans ses pratiques
de RSE, viennent les enjeux opérationnels, qui sont d'un horizon plus
rapproché et par conséquent, concernent les décisions
tactiques et courantes prises par les dirigeants.
I - 1 - 2 - Responsabilité sociale et profit
à cour terme : Les enjeux opérationnels
Selon M. Kramer et M. E. Porter
(2006) c'est à ce niveau que se font les arbitrages en
matière de conditions de travail, de sécurité, de
sous-traitance... Ces arbitrages sont pris par le management
intermédiaire : responsables d'unités, responsables logistique,
directeurs d'usine, .... On peut penser que c'est à ce
niveau qu'est ressentie de manière la plus forte la contradiction entre
la RSE et le profit à court terme, profit mesuré et
analysé dans toutes ses dimensions par les multiples outils du
contrôle de gestion. C'est aussi à ce niveau que les objectifs
opérationnels se retrouvent le plus directement dans les critères
d'évaluation servant de base à l'établissement des parts
variables de rémunération.
Les procédures et outils auxquels les entreprises
peuvent avoir recours pour infléchir les décisions
correspondantes sont encore peu analysés. Epstein et Cornelius
(2003) proposent de s'appuyer sur des sustainable balanced
scorecards12(*)
permettant d'inscrire les nouveaux enjeux dans les outils modernes de
contrôle de gestion tels que les tableaux de bord. Une autre
démarche consiste à recourir à
l'exemplarité. L'exemplarité fait appel à la
motivation intrinsèque des managers, satisfaction personnelle
associée au fait de mettre en oeuvre des actes cohérents avec son
propre système de valeur. On a, à cet effet, pu montrer que le
fait d'être identifié par la collectivité pouvait favoriser
l'engagement personnel.
En bref, la mise en oeuvre de la RSE engendre des
coûts élevés à court terme, c'est-à-dire
sur le plan opérationnel, mais constitue une source d'avantage
concurrentiel sur le plan stratégique. Toutefois, les
enjeux peuvent être
analysés par rapport aux attentes et
intérêts des
parties prenantes
de l'entreprise.
I - 1 - 3 - Arbitrage entre critères
économiques et extra économiques : les enjeux
managériaux
Les enjeux managériaux de la RSE expriment les valeurs
et le comportement des dirigeants concernant le style de management et l'esprit
d'entreprise. Ils traduisent la perception que les managers se font de la RSE
et sont fondés sur les motivations individuelles de ces derniers
plutôt que sur des réflexions de groupe.
La tâche du manager n'est donc pas simple, car il doit
piloter l'entreprise dans l'intérêt de toutes les parties
prenantes. Cela suppose aussi d'arbitrer entre des critères
économiques et d'autres critères qui ne sont pas toujours en
« coalition » et qui ne sont généralement pas
pris en compte dans les modèles traditionnels de management (croissance
et profits par exemple). Le secteur de la construction en est un exemple
récurrent. En effet, comment concilier les politiques de GRH actuelles
des grands constructeurs automobile (contraction du personnel) à celles
de protection de la couche atmosphérique (fabrication des
véhicules à faible émission de CO2).
L'enjeu de la mise en oeuvre de la RSE apparait donc assez
compliqué et complexe au niveau des dirigeants pris individuellement. En
effet, comment rechercher des profits en menant des activités extra
économiques dans un marché intérieur sans
frontières ?
I - 1 - 4 - Mariage RSE - rentabilité :
les enjeux économiques
Les enjeux économiques de la RSE
concernent essentiellement le lien (positif ou négatif) qui existerait
entre performance sociétale et performance financière. Le
débat sur l'existence d'un lien entre la performance financière
et la performance sociétale a été le sujet de très
nombreuses recherches théoriques et empiriques. Pourtant, l'existence de
lien entre RSE et rentabilité n'a jamais été formellement
établie, encore moins le sens de la relation. La question de l'impact
financier de la CSR peut se décliner au plan managérial à
travers l'étude des croyances des managers concernant cet impact, et au
plan théorique à travers les recherches empiriques cherchant
à évaluer le niveau et la nature de cet impact.
Il semble que l'existence d'un lien positif entre la
performance sociétale et la performance financière n'est pas
remise en question par les praticiens, le problème étant celui de
l'échéance ou de la date à laquelle la rentabilité
commence à se matérialiser. A cet effet, F. DEJEAN
& J-P. GOND ont collecté en 2003, les avis de quelques
organismes internationaux et de quelques gérants de fons
éthiques, sur le lien entre RSE et performance économique (voir
tableau ci-dessous). Il en résulte que les actions socialement
responsables constituent un enjeu économique important pour
l'entreprise.
Tableau 2.1 : Relation entre CSR et performance
économique
Organismes
|
Citations
|
CSR Europe
|
« Pourquoi la CSR ? Les récompenses sont
énormes. Il a été démontré que la CSR est
une stratégie qui fonctionne. » Un encadré liste ensuite
l'ensemble des bénéfices que la CSR est susceptible de procurer :
performance financière accrue, des coûts de gestion
réduits, un renforcement de la valeur de l'entreprise et de sa
réputation, etc..
|
Business for Social Responsibility
|
Le document disponible sur le site Internet de l'organisme et
intitulé « Introduction à la CSR » commence par
détailler l'ensemble des impacts positifs susceptibles d'être
générés par la CSR, au premier rang desquels figure
l'idée d'un renforcement de la performance financière. A l'appui
de chacun des impacts, un grand nombre d'études empiriques montrant
l'existence d'un impact positif de la CSR sont citées.
|
Gérants de fonds éthique A
|
« une société qui est bien avec ses
salariés, avec son actionnariat, avec ses clients, ses fournisseurs et
puis avec tous les gens qui travaillent avec elle, doit normalement assurer des
bases solides pour croître durablement et avoir des performances
financières élevées ».
|
Gérants de fonds éthique B
|
« Je pense qu'une société qui gère
de manière intelligente des problèmes sociaux et environnementaux
est une société dans la quelle il y a une dynamique beaucoup plus
forte, où les gens sont plus productifs, et cela a une influence
énorme sur la rentabilité des sociétés. Pour le
social c'est une évidence, une société qui est bien
gérée sur le plan social ne peut pas faire autrement que d'avoir
des bonnes performances, enfin on va dire des performances économiques
au moins supérieures à ses concurrentes mal gérées,
ça ne veut pas dire que ce sera extraordinaire mais ça sera
supérieur, ça c'est tout à fait évident. ».
|
Gérants de fonds éthique C
|
« c'est un jugement sur des sociétés qui
allonge leur durée de visibilité, c'est-à-dire qu'on pense
que ce sont des sociétés qui se projettent non pas sur les
résultats financiers des six mois prochains mais qui se projettent
à long terme. Et comme nous on est des investisseurs très
fondamentaux, comme ce qui nous intéresse c'est d'investir dans des
sociétés qui ont des fondamentaux très solides, on pense
que ça nous donne une vision plus complète de la
société »
|
Source : Inspiré des travaux de Frederique Dejean
et Gond Jean-Pascal (2003).
Au-delà des avantages économiques potentiels
que les dirigeants reconnaissent à la RSE on assiste à un
renforcement d'un ensemble de pressions qui contraignent ces derniers et
convergent pour leur faire adopter un comportement socialement responsable. Ces
transformations de l'univers des entreprises confèrent à la
gestion stratégique de l'entreprise, des dimensions sociétales.
C'est ce qui fera l'objet du sous-paragraphe suivant.
I - 1 - 4 - 2 - L'entreprise face aux pressions des
parties prenantes externes : les enjeux
sociétaux de la RSE
Les entreprises ont vu émerger et se
démultiplier les pressions visant à leur faire prendre conscience
de nouveaux enjeux sociétaux. Ces pressions varient quant à leur
forme et à leur nature, elles renvoient à différentes
catégories d'acteurs parmi lesquels on peut compter
· Les mouvements anti-mondialisation, qui, en se
focalisant sur les graves excès de quelques grandes firmes
multinationales contribuent à une plus forte prise de conscience des
enjeux liés à la responsabilité sociétale
(N. Klein, [39]) ;
· Une partie des grandes ONG, qui ont
contribué à faire passer la stratégie de l'entreprise
d'une orientation réactive à une orientation proactive de la
RSE ;
· Des consommateurs, qui, en plus du rôle
joué par les ONG, se préoccupent d'avantage des conditions de
fabrication des produits
Autrement dit, la RSE permettrait à l'entreprise
d'adresser les besoins de la société civile (des PP externes en
générale) avant que ceux-ci ne s'imposent à eux.
Les enjeux de la RSE, principale source de motivation des
dirigeants à s'engager dans la responsabilité sociale de
l'entreprise leur permettent d'éviter ou de gérer au mieux, les
risques latents liés à la RSE. En effet, l'environnement des
entreprises a considérablement changé depuis une quinzaine
d'années. Confrontées à de nouveaux risques de plus en
plus lourds dans un contexte imprévisible, les systèmes actuels
de protection semblent montrer quelques faiblesses. L'émergence de la
responsabilité sociale, comme une nouvelle préoccupation des
entreprises depuis quelques années, a multiplié ces risques.
I - 2 - La responsabilité sociale : un mal
nécessaire pour les managers.
Face à la prise de conscience
croissante de la responsabilité sociale, les entreprises ont
adopté des politiques environnementales et sociales différentes
afin de gérer les risques inhérents à leur contexte
économique, social et environnemental et de défendre leur
réputation et leur image auprès des parties prenantes. Ainsi, le
nombre d'acteurs grandit et les logiques sociales se diversifient. L'entreprise
est tenue d'élargir son champ d'action et d'instaurer ou de renforcer
ses relations de confiance avec ses différentes parties prenantes.
L'entreprise d'aujourd'hui évolue dans un environnement
complexe et fluctuant dans des proportions souvent difficiles à
prévoir. Les décideurs ont de plus en plus de mal à
appréhender et à mesurer l'interdépendance des
différents facteurs : sociaux, politiques, économiques,
juridiques et environnementaux. Ainsi, l'entreprise se trouve face à des
risques éventuels qui peuvent affecter les diverses composantes de
l'organisation.
Il faut noter que l'importance de ces risques peut être
évaluée de façon extrêmement variée. Cette
variété est relative au temps, à l'espace, aux
circonstances, aux acteurs et même au degré de
médiatisation de l'événement considéré.
Ainsi, Barthélemy (2000) définit le risque comme
une situation dont l'occurrence est incertaine et dont la réalisation
affecte les objectifs de l'entreprise qui le subit. Avant de pouvoir traiter et
maîtriser ses risques, l'entreprise doit les identifier. Les typologies
proposées pour la classification des risques encourus par les
entreprises sont fondées sur deux grandeurs : la fréquence
et la gravité (S. D. AYADI, 2007). C'est ainsi qu'on
fait la distinction entre les risques majeurs et les risques mineurs. Les
risques majeurs étant ceux liés aux phénomènes
naturels et aux activités humaines.
En faisant le recoupement entre la fréquence et la
gravité, Barthélemy (2000) distingue : Les
risques de fréquence dont la fréquence d'occurrence est
très élevée, mais de gravité relativement faible ;
Les risques de gravité qui au contraire auront une
gravité forte mais une probabilité d'occurrence faible ; Les
risques négligeables dont la fréquence et la gravité
sont faibles ; Les risques inacceptables de fréquence et de
gravité élevées ; Et enfin les risques de
gravité et de fréquence moyennes13(*).
Nous allons adopter une classification différente qui
met l'accent sur la nature des risques plutôt que leur fréquence
ou leur gravité. Nous faisons ainsi la distinction entre trois types de
risques : les risques économiques, les risques sociaux et les
risques environnementaux.
I - 2 - 1 - Les risques économiques : la
résurgence du débat sur le lien probable entre
performance sociale et
performance économique
Ce type de risque est
généralement rattaché à la fluctuation du
marché, l'évolution des réglementations et/ou de la
concurrence entre autres. Ces risques sont généralement plus
faciles à identifier puisqu'ils ont un effet immédiat sur les
résultats et la performance économique de l'entreprise. Mais il
n'est pas évident pour autant d'identifier les risques
économiques liés à la responsabilité sociale de
l'entreprise.
La relation entre la RSE et la performance économique a
été largement étudiée. Cette relation est complexe.
Une corrélation positive dans les deux sens signifie que, d'une part, le
bien être d'une organisation garantie une bonne performance sociale et,
d'autre part, une bonne performance sociale génère une meilleure
performance économique. Certains chercheurs ont trouvé que la
relation pourrait être positive ou nulle. Mais certaines études
supposent qu'il existe une corrélation négative entre la
performance sociale et la performance économique. Selon Friedman
(1962), les investisseurs trouvent que la performance sociale de
l'entreprise (PSE) est au détriment de la performance économique
(qui est la seule activité légitime de l'organisation), la
corrélation entre performance économique et sociale est alors
négative.
Cette diversité des résultats théoriques
nous amène à considérer plusieurs types de risques
économiques qui découlent de la responsabilité de
l'entreprise envers ses parties prenantes économiques (actionnaires,
investisseurs, prêteur etc.). La nature des risques dépend alors
de l'intérêt que l'entreprise porte à sa
responsabilité envers la société.
Ainsi, selon S. D. AYADI (2007) une
entreprise qui porte un faible intérêt au sujet de le RSE court
des risques économiques liés à la perte de
marché ; la baisse des ventes ; le boycott ; L'engagement d'actions
en justice induisant le payement de pénalités et bien
d'autres.
Cependant, nous pensons qu'une entreprise fortement
engagée court également des risques économiques
liés à l'augmentation des coûts de production ;
l'accroissement des prix. Ce qui engendre la diminution des dividendes ; la
diminution des salaires ; la perte de compétitivité par rapport
aux concurrents ; des investissements supplémentaires liés
à des engagements en matière environnementale et sociale etc.
I - 2 - 2 - Les risques sociaux : la GRH comme
source de risque pour l'entreprise
L'homme est la ressource la plus riche de l'entreprise, mais
la moins favorisée dans les stratégies de réduction des
coûts, surtout dans le contexte actuel de crise financière
internationale marqué par les suppressions d'emplois. La gestion des
ressources humaines est donc une source de risques majeurs pour l'entreprise.
Les situations de risque social sont nombreuses. Ils sont volontaires ou
involontaires et rattachés essentiellement aux défaillances des
politiques de recrutement, aux mauvaises conditions de travail, au non-respect
de la réglementation, aux sabotages, aux erreurs, aux
incompétences etc. Les conséquences de ce type de risques
pourraient être graves pour l'entreprise. Toute tension sociale
(référendum et autres regroupements) pourra affecter la
productivité de l'entreprise.
Ainsi, la responsabilité sociale envers les
employés et les organismes sociaux (syndicats, ONG) signifie que
l'entreprise devra faire face aux risques suivants : baisse de
productivité ; perte de personnel ; absence de motivation ; opposition
aux pouvoirs publics ; augmentation des accidents, des grèves, des
sabotages ; augmentation de l'attention des groupes de pressions tels que les
syndicats.
I - 2 - 3 - Tenir compte des évènements
imprévisibles : Les risques environnementaux
Les risques environnementaux sont généralement
liés aux périls naturels (tels que les incendies, tremblement de
terres, inondations, humidité, sécheresse etc.) que l'entreprise
pourrait supporter. Ce genre de risques ne dépend pas directement de
l'action de l'homme. Mais face au développement du domaine de la RS,
l'entreprise doit tenir compte également des risques d'atteinte à
l'environnement. Par exemple, après le dernier tremblement de terre qui
a récemment eu lieu en Chine, on s'est rendu compte que plusieurs
bâtiments (commerciaux ou non) avaient été construits sans
tenir compte des normes sismiques. Tout est donc à refaire, ce qui
n'aurait pas été le cas si la dimension environnementale de la
RSE y avait été respectée et appliquée.
Vu sous un autre angle, l'opinion publique et les
consommateurs sont de plus en plus soucieux de favoriser les entreprises qui
élaborent leurs produits selon des procédés respectueux de
l'environnement. Les partenaires financiers (banques et autres
établissements de crédit) ont également tendance à
favoriser les entreprises qui ont une politique appropriée de gestion
des risques environnementaux.
Les entreprises courent alors des risques liés à
: l'atteinte à la réputation ; l'atteinte à
l'environnement ; l'impact négatif des activités sur
l'environnement écologique (émission de déchets et
effluents etc.) ; la mauvaise utilisation des ressources naturelles (eau, sol,
énergie etc.) ; au non-respect de la réglementation.
Afin de réduire l'effet de ces risques et
améliorer leur image, les entreprises développent de
manière croissante le dialogue avec les acteurs susceptibles de
générer ces risques. Ce dialogue est favorisé à
travers la publication d'informations sociétales justifiant l'engagement
de la société envers sa responsabilité sociale. L'approche
RSE peut permettre de mettre en oeuvre, entre autres, de nouvelles
régulations et une meilleure
gouvernance
d'entreprise, que l'entreprise soit grande, moyenne ou petite, dans les
pays dits
développés, comme dans les
pays en
développement. Les critères sur lesquels se fonde toute
pratique de RSE sont de quatre types et fortement corrélés
à ceux du développement durable.
I - 3 - L'irruption de la RSE dans le gouvernement
d'entreprise : les critères
de
gouvernance
La RSE se fonde sur quatre types de critères qui sont
directement liés à ceux du développement
durable à savoir les critères
environnementaux,
les critères
sociaux, les critères
économiques et
désormais, les critères de
gouvernance.
En effet, le
développement
durable s'appuie sur les trois piliers que sont l'
environnement, le
social, et l'
économique. Ces
trois piliers sont coiffés par la
gouvernance
d'entreprise qui peut intégrer parallèlement et de
manière indirecte, des principes éthiques ou de
déontologie des
affaires. Nous nous proposons de ne développer que les critères
de gouvernance, les trois premiers ayant déjà été
examinés dans les paragraphes précédents.
Les aspects de la gouvernance en matière de RSE peuvent
être regroupés dans les rubriques suivantes : entreprise et
Partie prenante, perception de l'environnement, gouvernance d'entreprise,
veille sociétale, risque et vulnérabilité. Du point de vue
de la gouvernance, la RSE se traduit ou devrait se traduire de
différentes manières :
- La définition d'une éthique, formalisée
dans une charte ;
- La mise en place de programmes de gestion des
risques ;
- Une surveillance accrue des principes de
sécurité ;
- Une veille, notamment sociétale ;
- Des projets de gestion des connaissances en support à
l'innovation qui impliquent également plusieurs types d'agents
économiques : les acteurs publics territoriaux de l'enseignement et de
la recherche (pôles de compétence) ;
- Des programmes d'assurance qualité, avec la mise en
oeuvre de nouvelles normes ;
- Une communication interne et externe.
Bien que pertinents, ces critères ne trouvent pas tous
leur application au sein de l'entreprise subsaharienne. En effet, s'il est vrai
qu'on retrouve des programmes de gestion des risques, d'assurance
qualité ou de communication interne et externe au sein de certaines
entreprises camerounaises, tel n'est pas le cas pour les chartes, normes et
autres veilles sociétales qui ne sont propres qu'aux économies
occidentales. Ce qui circonscrit en quelque sorte, la zone
d'applicabilité des critères de gouvernance dans leur
ensemble.
Nous venons de présenter les enjeux, les risques et la
typologie des critères, notamment les critères de gouvernance,
inhérents à la RSE. La mise en oeuvre des politiques de
Responsabilité Sociétale au sein de l'entreprise prend de plus en
plus d'importance. Outre le libéralisme économique, plusieurs
autres facteurs sont explicatifs de cette importance.
I - 4 - L'Importance croissante de la RSE dans un
contexte de mondialisation
Plusieurs facteurs sont responsables de l'importance accrue
accordée à la responsabilité sociale au sein des pratiques
managériales des entreprises :
· La mondialisation suscite, en matière de RSE, de
plus en plus de préoccupations, notamment aux chapitres des pratiques de
gestion des ressources humaines, de la protection de l'environnement, de la
santé et de la sécurité ;
· Des gouvernements et des organismes
intergouvernementaux, comme les Nations Unies, l'Organisation de
coopération et de développement économiques et
l'Organisation internationale du Travail, ont élaboré des pactes,
des déclarations, des lignes directrices, des principes et d'autres
instruments qui exposent les grandes lignes des normes sociales de conduite
acceptable ;
· Les progrès de la technologie des
communications, comme Internet, les téléphones cellulaires et les
assistants numériques, facilitent la surveillance des activités
commerciales et la diffusion de l'information à leur sujet. Par
l'entremise de leurs sites Web, les organisations non gouvernementales attirent
maintenant régulièrement l'attention, sur les pratiques
commerciales qu'elles jugent problématiques ;
· Les consommateurs et les investisseurs sont de plus en
plus intéressés à appuyer des pratiques commerciales
responsables. Ils exigent plus d'information sur la manière dont les
entreprises réagissent aux possibilités et aux risques qui sont
liés aux enjeux sociaux et environnementaux ;
· Les nombreux manquements graves et notoires à
l'éthique d'entreprise ont accru la méfiance du public envers les
compagnies et ont mis en évidence la nécessité
d'améliorer, au sein de celles-ci, la gouvernance, la transparence, la
reddition de comptes et les normes déontologiques ;
· Dans de nombreux pays, les citoyens disent clairement
que les entreprises doivent respecter les normes de diligence sociale et
environnementale, peu importe où elles exercent leurs
activités ;
· On est de plus en plus conscient de la capacité
limitée des initiatives législatives et réglementaires
gouvernementales à s'attaquer efficacement à tous les enjeux
englobés dans la responsabilité sociale des entreprises ;
· Les entreprises saisissent que l'adoption d'une
approche efficace en matière de RSE peut diminuer les risques de
perturbation de leurs activités, offrir de nouveaux
débouchés et améliorer la réputation de
l'entreprise et de ses marques ;
· Par-dessus tout, l'engagement sociétal engendre
la responsabilité économique de l'entreprise en jouant un
rôle important dans la réduction des coûts de production.
Cette responsabilité économique consiste par exemple à
produire des biens et des services fiables, tout en fournissant des emplois, en
générant des richesses pour les actionnaires et en utilisant des
technologies peu polluantes de sorte que les prix des biens et services
reflètent les vrais coûts de production et qu'il n'y ait pas
d'externalités produites.
L'importance croissante de la RSE, telle que
développées ci-dessus, illustre et explique l'engagement
volontaire croissant des entreprises dans la mise en oeuvre des actions
socialement responsables. Toutefois, même s'il affiche à
première vue une attitude volontariste, cet engagement est aussi
dû à la présence d'organismes internationaux et d'agences
de notations internationales. En effet, les lois et prescriptions
internationales en matière de RSE, influencent de manière notoire
les attitudes des dirigeants d'entreprises, à l'égard des
pratiques de responsabilité sociale.
Nous allons donc présenter ces organismes et
dégager leurs prescriptions en matière de RSE.
Section II : L'IMPLICATION DES INSTANCES
INTERNATIONALES ET DES
ORGANISATIONS NON
GOUVERNEMENTALES DANS LES
PRATIQUES DE RESPONSABILITE SOCIALE
DES ENTREPRISES
La responsabilité sociale des entreprises (RSE) est
désormais au coeur des initiatives de nombreuses instances
internationales comme les Nations Unies (initiative Global Compact
lancée en juillet 2000), l'Organisation Internationale du Travail
(déclaration sur les pratiques sociales dans les multinationales) ou
encore l'Union Européenne (Livre Vert consacré à la RSE en
juillet 2001). Leur éruption dans le domaine de la RSE date des
années 1960 aux États Unis.
De manière générale, en matière
d'intervention publique, les initiatives se distinguent selon qu'elles sont
contraignantes (réglementations nationales) ou non (à
l'initiative d'organisations internationales et/ou au niveau sectoriel). Les
organisations internationales ont été pionnières dans la
promotion de la RSE, particulièrement en ce qui concerne les Nations
Unies (sommets de Rio en 1992, Kyoto en 1997, Johannesburg en 2002 ; principes
pour le contrôle des pratiques anticoncurrentielles en 1980 ; Global
compact en 1999) et l'Europe (livre vert de la commission européenne en
2001), mais aussi l'OCDE (principes directeurs de 1976, révisés
en 2000), le BIT (déclaration tripartite de 1977, amendée en
1998) et la GRI/CERES (1997).
Étant donné que nous ne pouvons
prétendre examiner les organismes internationaux de manière
exhaustive, nous allons présenter quelques uns, dont les contributions
dans le domaine de la RSE sont notoires.
II - 1 - Contribution des Nations Unies à l'ancrage
de la RSE dans les activités de
l'entreprise
A travers le Programme des Nations Unies pour l'Environnement
(PNUE), les Nations Unies ont initié le
Global
reporting initiative et le
pacte mondial
(Global compact).
· Le GRI (Global Reporting
Initiative) : cette initiative a été initiée
en
1997 par le
Programme
des Nations unies pour l'environnement (PNUE) et de la Coalition for
Environmentally Responsible Économies (CERES). L'objectif est
d'élaborer des lignes directrices et une standardisation de normes pour
la rédaction de rapports environnementaux et sociaux.
· Le Global Compact ou
Pacte mondial :
lancé en janvier 2000 lors du
Forum
économique mondial par
Kofi Annan. Le pacte
mondial est un code de conduite qui comprend 10 principes que les entreprises
doivent s'engager à respecter. Sans les énumérer, deux de
ces principes concernent les droits de l'homme, quatre les normes de travail,
trois l'environnement et le dernier la lutte contre la corruption.
La contribution des Nations Unies à l'ancrage de
la RSE au sein des activités de l'entreprise est notoire. A travers
leurs initiaves (GRI), les Nations Unies proposent un référentiel
d'
indicateurs qui permet de
mesurer l'avancement des programmes de
développement
durable des entreprises. Reste à savoir s'il est appliqué
pour le cas typique des entreprises camerounaises.
II - 2 - La sensibilisation des entreprises : le
rôle de la
Banque mondiale
Le Banque Mondiale ou BM : la BM a également
publié des recommandations, et propose un cours pour sensibiliser les
entreprises en vue de leur permettre de mettre en oeuvre le concept de RSE. Ce
cours a déjà été donné à 12 000
personnes partout dans le
monde. La Banque
mondiale se présente ainsi comme un formateur des dirigeants sur le
sujet de la responsabilité sociale des entreprises.
Compte tenu des statistiques exposées ci-dessus, le
résultat n'est pas encore satisfaisant. Car, si le cours en question n'a
été dispensé qu'à 12 000 personnes dans le
monde sur une population totale allant à plus de six milliards, la
proportion (12 000 / 6 000 000 000) est peu signifiante et
l'échantillon très peu représentatif de la population
mondiale. Sans remettre en cause l'initiative de BM de sensibiliser les
dirigeants d'entreprise sur la RSE, on est enclin de dire que, compte tenu des
données quantitatives ci-dessus, beaucoup reste à faire en
matière de sensibilisation.
II - 3 - Conception moderne de la RSE : la position de
la l'Union Européenne
La
Commission
européenne défend une politique volontariste dans le domaine
de la RSE ou CSR (Corporate Social Responsibility) via sa Direction
générale entreprise depuis son premier livre vert en 2001, suivi
d'une communication en 2002 renouvelée en 2006. L'approche interactive
entre toutes les parties prenantes est promue avec l'insistance de la pratique
de la RSE comme acte volontaire.
Les PME sont désormais également
impliquées et deviennent des acteurs à part entière compte
tenu de leur omniprésence dans le tissu économique. Un
programme
spécifique leur est dédié, ce qui est d'ailleurs en
phase avec la proposition de Sandrine Berger-Douce. d'envisager la RSE en
milieu PME comme un élément de la rentabilité.
Enfin, la Commission Européenne a contribué
énormément à la modernisation du concept de
responsabilité sociale de l'entreprise. En effet, elle propose une
définition qui souligne l'importance pour les dirigeants d'entreprises,
d'envisager leurs activités extra économiques au delà des
aspects légaux.
II - 4 - La définition des normes internationales du
travail : implication de
l'Organisation Internationale du
Travail dans la RSE
La Conférence
internationale du Travail, qui réunit une fois par an les mandants de
l'Organisation Internationale du Travail (OIT) (représentants
gouvernementaux, représentants travailleurs et représentants
employeurs), oriente les travaux de l'Organisation. Elle adopte
également de nouvelles normes internationales du travail ainsi que le
programme et le budget de l'Organisation. Entre deux sessions de la
Conférence, c'est le Conseil d'administration, composé de 28
membres gouvernementaux, de 14 membres employeurs et de 14 membres
travailleurs, qui oriente les activités de l'OIT.
Il existe actuellement 188 conventions et 199 recommandations,
dont certaines remontent à la création de l'OIT en 1919. Le
Conseil d'administration du Bureau International du Travail (BIT) a
qualifié de fondamentales huit conventions qui traitent de questions
considérées comme des principes et des droits fondamentaux au
travail : liberté
syndicale et reconnaissance
effective du droit de négociation collective ; élimination
de toute forme de
travail forcé
ou obligatoire ; abolition effective du
travail des
enfants ; élimination de la
discrimination en
matière d'emploi et de profession.
A vu de ce qui précède, on peut dire que la
contribution de l'Organisation Internationale du Travail (OIT) se situe
essentiellement en interne, notamment les employés ou collaborateurs
(parties prenantes internes). Autrement dit, l'intervention de l'OIT dans le
domaine de la RSE relève uniquement du social, ce qui n'est pas
satisfaisant pour l'acception moderne du concept de RSE. Il faut donc aussi
envisager la RSE en externe.
A cet effet, plusieurs autres organisations proposent
d'examiner la RSE en externe :
- Le World Wide Fund for Nature (WWF)
- L'Organisation de Coopération et de
Développement Économiques (OCDE)
- L'Observatoire sur la Responsabilité Sociale des
Entreprises (ORSE)
- Loi sur les Nouvelles Régulations Économiques
(Loi NRE)
- Le Mouvement des Entreprises de France (MEDEF)
- L'Organisation Internationale de Normalisation (ISO)
Étant donné que nous ne pouvons pas examiner
toutes ces organisations dans les détails, nous allons nous focaliser
sur celle qui regroupe en moyenne, les caractéristiques des autres
organisations : il s'agit de l'Organisation Internationale de
Normalisation (ISO).
II - 5 - Établir un consensus sur les domaines de la
RSE : l'Organisation Internationale
de Normalisation ISO (International
Standardization Organization)
L'ISO est le plus grand producteur et éditeur mondial
de Normes internationales. L'ISO est un réseau
d'instituts nationaux de normalisation de 159 pays, selon le principe
d'un membre par pays, dont le Secrétariat central, situé à
Genève, Suisse, assure la coordination d'ensemble.
L'ISO est une organisation non
gouvernementale qui jette un pont entre le secteur public et
le secteur privé. Bon nombre de ses instituts membres font en effet
partie de la structure gouvernementale de leur pays ou sont mandatés par
leur gouvernement, et d'autres organismes membres sont issus exclusivement du
secteur privé et ont été établis par des
partenariats d'associations industrielles au niveau national.
L'ISO permet ainsi d'établir un consensus sur des
solutions répondant aux exigences du monde économique et aux
besoins plus généraux de la société. L'une des
nombreuses normes ISO, applicable au strict domaine de la RSE est la norme ISO
26000.
La norme ISO 26000 est une
norme ISO en cours
d'élaboration. Elle portera sur la
responsabilité
sociétale des organisations. Elle devrait être publiée
en
2010, le processus de
normalisation prenant du retard. Ce projet de normalisation est ambitieux, la
« communauté internationale » n'ayant toujours pas
réussi à se prononcer par consensus sur le sujet. Cette
démarche historique doit donc aboutir fin 2010 à la publication
d'un guide, autrement dit, il s'agit de la première norme internationale
de lignes directrices sur la responsabilité sociétale. L'ISO se
propose donc d'y répondre par des lignes directrices nommées ISO
26000, afin d'avoir un document de référence sur lequel les
organisations pourront s'appuyer pour démarrer la mise en place d'une
démarche socialement responsable.
En plus des organisations, plusieurs sommets ont
contribué à ancrer les pratiques de RSE au sein des
activités d'entreprises. C'est le cas par exemple du Sommet de
Rio de Janeiro instigué par les Nations Unies et tenu du 03 au
14 Juin 1992, qui a été marqué par l'adoption d'un texte
fondateur de 27 principes, intitulé
« Déclaration de Rio sur l'environnement et le
développement » qui précise que les être
humains sont au centre des préoccupations relatives au
développement durable. On peut aussi citer le cas du Protocole
de Kyoto. Celui-ci va plus loin, car il propose un calendrier de
réduction des émissions des 6 gaz à effet de serre qui
sont considérés comme la cause principale du
réchauffement
climatique des cinquante dernières années. Il comporte des
engagements absolus de réduction des émissions pour 38 pays
industrialisés, avec une réduction globale de 5,2 % des
émissions de
dioxyde de
carbone d'ici
2012 par rapport aux
émissions de
1990.
Cette première partie sur la nécessité et
la mise en oeuvre de le RSE nous a permis d'appréhender les contours
inhérents à la pratique de responsabilité sociale de
l'entreprise. En effet, après avoir développé les
domaines, les instruments, les enjeux, les risques et les avantages
inhérents à la RSE, nous avons exposé quelques instances
internationales exerçant une influence notable sur les pratiques de RSE
par les entreprises.
Nous nous sommes inspirés du contenu de cette
première partie pour formuler et développer la deuxième
partie intitulée : Spécificités et logiques
de la Responsabilité Sociale des Entreprises dans les Entreprises au
Cameroun.
DEUXIÈME PARTIE :
SPÉCIFICITÉS ET LOGIQUES DE LA
RESPONSABILITÉ SOCIALE DES ENTREPRISES AU CAMEROUN
La première partie de notre mémoire a
passé en revue, l'essentiel de la littérature au sujet de la
responsabilité sociale de l'entreprise. Les deux chapitres qui ont
constitué cette partie ont apporté des éclaircissements
théoriques sur la thématique de la responsabilité sociale
de l'entreprise. Nous y avons présenté sa genèse, son
évolution, une définition consensuelle, son approche par les
parties prenantes, ses domaines d'application, ses instruments de mise en
oeuvre et de contrôle, ses domaines d'application, ses enjeux et risques,
et ses avantages dans un contexte de mondialisation. Nous y avons
également développé l'implication et le rôle des
instances internationales dans l'ancrage des démarches socialement
responsables au sein des pratiques et activités quotidiennes des
entreprises.
La seconde partie de notre mémoire est essentiellement
centrée sur l'étude empirique que nous avons menée en deux
étapes auprès de trente-deux (32) entreprises de la place, dont
quatre sous forme d'études de cas et vingt-huit sous forme de
questionnaires. Cette partie retrace le cheminement que nous avons suivi tout
au cours de notre recherche, depuis la constitution de notre échantillon
jusqu'à l'aboutissement aux résultats. Elle est également
subdivisée en deux chapitres : l'un décrit
entièrement la démarche adoptée lors de la collecte, de
l'analyse et de l'interprétation des résultats (chapitre 3).
L'autre représente le cadre factuel de notre recherche en ce sens qu'il
développe et interprète le contenu des différents
entretiens que nous avons menés (chapitre 4). Il s'en suit une
conclusion générale dans laquelle nous revenons sur les
difficultés rencontrées lors de notre recherche en
général et lors de la collecte des données en
particulier.
Chapitre III
DEMARCHE ADOPTEE : CONCOURS CONJOINT
DES MÉTHODES QUALITATIVES ET QUANTITATIVES
Le présent travail de recherche vise principalement
à déterminer les réalités des pratiques de RSE par
les entreprises camerounaises. Pour atteindre cet objectif, nous avons
mené une étude exploratoire sur plusieurs entreprises du secteur
industriel. Le présent chapitre présente et justifie la
démarche méthodologique qui nous a permis d'aboutir aux
résultats que nous présenterons au prochain chapitre (sections
1), et effectue une présentation de l'échantillon d'entreprises
du secteur industriel retenu (section 2). Le choix de ce secteur relevant du
fait que les entreprises qui y opèrent sont concernées aussi bien
par les problèmes sociaux qu'environnementaux.
Section I : PRESENTATION ET JUSTIFICATION DE
L'APPROCHE
METHODOLOGIQUE
Nous nous proposons, avant de présenter et justifier la
démarche méthodologique que nous avons adoptée, de faire
un briefing de l'ensemble des documents que nous avons parcourus et qui nous
ont inspiré tout au cours de notre travail.
En effet, au bout de nos multiples lectures, nous avons
constaté que, malgré les contextes de mondialisation et de
libéralisme économique actuels, les pratiques de RSE restent
dominées par deux grands penchants. D'un coté, nous avons des
entreprises qui pratiquent des activités de RSE par ce qu'elles sont
régies par des lois : on dit alors que la RSE a une dimension
légale qu'on a attribué à l'origine aux entreprises
européennes. De l'autre, nous avons des entreprises qui mènent
leurs activités de manière volontaire soit par culture, soit par
citoyenneté : on dit alors que la RSE a une dimension normative
qu'on attribue aux entreprises américaines. Nous avons aussi
constaté que, de toutes les catégories de RS proposées par
différents auteurs, celles proposées par A.B. CARROLL en 1979
sont les plus génériques et englobent toutes les autres. Il
s'agit des responsabilités discrétionnaires, éthiques,
légales et économiques. En outre, nous avons constaté que
la RSE pouvait être appliquée aussi bien en interne (politique des
ressources humaines) qu'en externe (ensemble de toutes les parties prenantes et
l'environnement dans son ensemble).
Ainsi, après avoir constaté un certain nombre
d'actions contradictoires aux exigences de responsabilité
sociétale, pour le cas typique des entreprises étudiées,
nous nous sommes fixés pour objectif principal, de caractériser
la responsabilité sociale des entreprises au Cameroun. Cet objectif
repose sur le fait qu'une entreprise qui se veut socialement responsable doit
pouvoir intégrer dans ses comportements et ses politiques, de
manière délibérée, le progrès
économique et social dans le respect et la préservation de
l'environnement.
Cependant, les entreprises confondent très souvent ces
trois notions qui en fait sont les piliers du DD (économique, social et
environnemental). Cette confusion proviendrait de la difficulté
éprouvée, aussi bien par les chercheurs que par les praticiens,
à assumer les paradoxes générés par le management
responsable. Que dire par exemple, d'une entreprise qui met ses ouvriers ou
employés en chômage technique et se livre paradoxalement à
des activités de mécénat et de philanthropie ?
La démarche méthodologique que nous avons
adoptée a donc pour objet, de découvrir la réalité
de la responsabilité sociale au sein des entreprises et d'en ressortir
les spécificités pour le cas typique des entreprises
étudiées. Mais avant, nous présentons d'abord le canevas
de notre recherche.
I - 1 - Méthode d'investigation et justification du
choix de la méthode
Un travail de recherche, quelque soit le domaine, doit
pouvoir répondre à trois questions fondamentales :
Quoi ? Pourquoi ? Et comment ? Dans le cadre notre recherche,
nous avons déjà apporté une réponse à la
première question, car il s'agit des pratiques de responsabilité
sociale des entreprises camerounaises. S'agissant du
« pourquoi », l'étude qualitative est la mieux
indiquée pour apporter des éléments de réponse. A
cet effet, nous avons ciblé les entreprises du secteur industriel comme
champ d'investigation.
I - 1 - 1 - La recherche qualitative :
Comprendre les comportements des entreprises
camerounaises en
matière de responsabilité sociale
En général, la recherche en sciences de gestion
est marquée principalement par deux grandes approches : une
approche positiviste qui prône les méthodes quantitatives et une
approche constructiviste qui repose sur les méthodes qualitatives. Le
choix de l'une ou l'autre méthode n'est pas le fruit du hasard, il est
fonction des objectifs poursuivis par le chercheur. La méthode
quantitative sera plus appropriée lorsque l'objectif de la recherche
sera de quantifier et représenter les résultats obtenus. Par
contre, on fera appel à la méthode qualitative lorsque le but de
la recherche sera de comprendre un phénomène que l'on se sera
proposé d'étudier.
I - 1 - 2 - Vers un éclaircissement contextuel
du choix de la méthode
Ainsi, pour comprendre les comportements des entreprises
camerounaises en matière des RSE, nous avons opté pour la
méthode qualitative. D'autres raisons sou tendent le fait que nous ayons
opté pour ce type de recherche :
· La Responsabilité Sociale de l'Entreprise est
une thématique récente qui n'a pas encore fait l'objet de
nombreuses publications dans le contexte camerounais. Notre souci est donc plus
de comprendre et décrire ce phénomène que de le
représenter ou le quantifier.
· Notre étude étant exploratoire, nous nous
sommes arrimés aux cinq postulats d'utilisation des recherches
exploratoires proposés par l'ESOMAR (European Society for Opinion
and Marketing Research) pour qui une étude qualitative est
menée :
- Pour déterminer les causes d'un comportement qu'on ne
peut exprimer soit par méconnaissance, soit par refus de reconnaitre ces
causes ;
- En prélude à une étude quantitative
pour déterminer les questions à poser ;
- Pour explorer le milieu qu'on se propose
d'étudier ;
- Pour obtenir une meilleure perspective là où
d'autres méthodes traditionnelles d'enquête ont
échoué ;
- Pour favoriser la créativité.
Toutes ces propositions, même la seconde, sont
applicables à notre cas. En effet, dans le but de proposer des
résultats généralisables au Cameroun, nous avons en plus
des entretiens menées auprès de quatre entreprises,
administré des questionnaires dans vingt-huit autres entreprises.
D'où la nécessité de faire la distinction entre recherche
qualitative (constructiviste) et recherche quantitative (positiviste).
Tableau 3.1 : Études qualitatives et
quantitatives
Éléments de comparaison
|
Étude qualitative
Contextualisation
|
Étude quantitative
Généralisation
|
Objectifs
|
Comprendre en termes de qualité les raisons et les
motivations sous-jacentes
|
Quantifier les données et généraliser les
résultats à partir de l'échantillon de la population
concernée
|
Échantillon
|
Petit nombre de cas non représentatif
|
Grand nombre de cas représentatifs
|
Collecte de données
|
Non structurée
|
Structurée
|
Analyse de données
|
Non statistique
|
Statistiques
|
Résultats
|
Élaborer un début de compréhension
|
Recommander une ligne d'action définitive
|
Source : adapté de
Naresh et al. (2004)
L'ensemble des informations que nous voulons ainsi obtenir
nécessite des méthodes précises que nous décrirons
après avoir déterminé et présenté les
entreprises qui répondent au mieux aux exigences de notre thème
sur les pratiques de responsabilités sociales dans leur ensemble.
I-2- Champ d'investigation : le secteur industriel
camerounais
Il est important de rappeler que notre recherche vise
principalement à découvrir la réalité des pratiques
de responsabilité sociale au sein des entreprises situées au
Cameroun. Nous mettons un accent particulier sur les entreprises industrielles
parce qu'elles répondent au mieux aux trois piliers fondamentaux de la
RSE à savoir : l'aspect social (sponsoring, mécénat,
dons), l'aspect économique (recherche du gain pécuniaire), et
l'aspect environnemental (lutte contre la pollution).
En ce qui concerne le nombre de cas étudiés, les
quatre entreprises qui ont constituées le volet constructiviste de notre
recherche, satisfont pleinement le critère de saturation
théorique. Dans le but de confirmer ou d'infirmer les résultats
de nos différents entretiens en vue de les généraliser,
nous avons en plus des quatre entreprises qui ont fait l'objet d'une recherche
qualitative, administré des questionnaires dans vingt-huit autres
entreprises du même secteur. Nous présenterons principalement les
entreprises qui ont fait l'objet d'une étude de cas, après avoir
présenté les stratégies de collecte et d'analyse des
données.
I-3- Collecte et analyse des données
Le but de notre travail étant d'identifier et de
caractériser les pratiques de responsabilité sociale des
entreprises camerounaises, nous avons opté pour une étude
exploratoire. Nous avons choisi de mener une recherche exploratoire parce que
le problème des pratiques de RSE au Cameroun est un problème flou
qu'il est nécessaire de clarifier et de comprendre en profondeur.
Notre recherche a démarré par un examen profond
de la littérature sur la RSE et d'autres domaines qui lui sont
parallèles tels que le Développement Durable, l'Investissement
Responsable, l'Éthique et la Citoyenneté d'entreprise, la
Business and Society, et bien d'autres. Nous nous sommes donc
familiarisés à la RSE à travers les développements
antérieurs sur le sujet, tels que ceux de H. Bowen, J-P. Gond, A.B.
Carroll, Mc Guire, F. William, E. Persais et bien d'autres auteurs
célèbres, sans oublier la Commission Européenne dont la
contribution sur le sujet s'est enrichie en 2001 avec la publication du
Livre Vert.
Nous avons ensuite administré un questionnaire
à vingt-huit entreprises du même secteur afin de vérifier
la pertinence des informations recueillies lors des entretiens.
En bref, la collecte des données s'est faite par
exploration pure et simple ; en ce qui concerne la technique de collecte
des données, nous avons procédé par entretien et par
questionnaire. Les données recueillies ont premièrement
été analysées par la technique de l'analyse du contenu
pour les entretiens et par analyse des contingences pour les questionnaires.
I - 3 - 1 - L'étude de cas : vers une
vision aussi complète que possible du problème.
En effet, pour avoir une vision aussi complète que
possible du phénomène, on cherche à obtenir des
précisions en vue de reformuler le problème. Cette situation
intervient notamment lorsqu'une enquête exploratoire sous forme
d'entretien approfondi auprès des experts est nécessaire. Elle
répond ainsi à plusieurs situations parmi lesquelles ont peut
citer : le souci de mieux reformuler le problème et entreprendre
ensuite une investigation plus précise ; le souhait
d'éliminer certaines éventualités ou certains aspects du
problème qui ont déjà été
vérifiés ; le souci d'élaborer un questionnaire ou un
guide d'entretien intégrant toutes les situations possibles et le code
linguistique en vigueur dans le contexte étudié.
Selon Evrard, Pras, et Roux
(1998), cités par Lépineux (1992),
L'étude de cas est « particulièrement
recommandée lorsqu'on aborde des champs nouveaux, complexes, où
les développements théoriques sont faibles et où la prise
en compte du contexte est déterminante pour l'élaboration d'un
processus de compréhension ». La littérature au
sujet de la RSE étant très pauvre au Cameroun, il nous a fallu
rencontrer les responsables de certaines entreprises de la place, de recueillir
les données primaires qui nous ont permises de mieux nous renseigner sur
la nature du phénomène que nous étudions. Ainsi, la
stratégie d'étude de cas que nous avons adoptée, s'adapte
non seulement à une démarche qualitative, mais nous a aussi
permis de mettre en relief les spécificités des pratiques de RSE
au Cameroun.
Dans l'ensemble de ces situations, des entretiens en
profondeur auprès des experts, ont été
nécessaires, dans le but de déterminer les aspects critiques du
sujet.
I - 3 - 2 - La technique de collecte des
données : l'entretien
Dans le cadre d'une recherche qualitative, il existe
principalement trois méthodes de collecte des données :
l'observation la réunion et l'entretien. Le choix et l'application de
l'une de ces trois méthodes n'est pas le fruit du hasard, il
dépend en effet des objectifs poursuivis par le chercheur et de la
nature de la population à étudier entre autres.
En effet, en ce qui concerne la population de notre
étude, elle est essentiellement constituée d'entreprises
industrielles qu'il serait difficile, sinon impossible d'interroger par
réunion. De plus, une simple observation du phénomène,
qu'elle soit participante ou non, ne nous aurait pas permis d'étudier le
phénomène en profondeur. Afin de recueillir des données
originales et spécifiques à chaque entreprise, nous avons
opté pour la méthode de collecte de données par entretien.
Une raison fondamentale est que les entretiens sont classiquement
utilisés dans les études exploratoires et parfois même,
à certaines études explicatives.
De plus, pour (Frisch, 1999) cité par (Jolibert et
Jourdan, 2006), « L'entretien est aussi plus adapté
lorsque l'étude porte sur le relevé de pratiques
individuelles : mettre à jour des logiques d'appropriation, des
processus, des mécanismes de décision ou bien encore, identifier
les phénomènes de compréhension ».
L'entretien étant une technique d'extraction de l'information
auprès des sujets (les entreprises industrielles dans notre cas), elle
répond au mieux à notre objectif qui est d'identifier et de
caractériser les pratiques de RSE des entreprises de la place.
Il existe plusieurs types d'entretiens : l'entretien en
profondeur (ou non directif), l'entretien centré (ou semi directif),
l'entretien directif (ou questionnaire ouvert). Dans un entretien non directif,
le degré de liberté du répondant est très
élevé, ce qui pourrait l'amener à sortir du sujet pour
donner des avis personnels qui ne seront nécessairement plus en phase
avec les pratiques réelles de l'entreprise. Pour cette raison, nous
avons écarté l'entretien en profondeur. A l'opposé de
l'entretien en profondeur, on retrouve l'entretien directif qui est
constitué d'un ensemble de questions ouvertes et fermées, ce qui
oriente le répondant dans ses réponses et par conséquent
restreint le cadre d'analyse.
Par contre, l'entretien semi directif laisse au
répondant, un degré de liberté assez élevé
réduisant ainsi le risque non seulement d'introduire des biais dans les
données (entretien non directif), mais aussi, d'éviter les
conséquences d'un entretien directif. C'est la raison pour laquelle nous
avons opté pour l'entretien semi directif comme type d'entretien.
I - 3 - 2 - 1 - Souplesse et flexibilité dans
la collecte des données : l'entretien semi directif
L'entretien semi directif ou entretien centré est
mené à l'aide d'un guide d'entretien. Cet entretien se
caractérise par la souplesse dans la conduite de la conversation et par
la présence d'un guide d'entretien, véritable support et fil
conducteur de l'échange. Son utilisation est la garantie que la
totalité des thèmes de l'entretien seront abordés de
façon identique avec tous les répondants. Le rôle de
l'enquêteur consiste alors à approfondir chaque
élément important du discours de l'interlocuteur, en s'appuyant
sur le guide qui fournit un cadre général du déroulement
de l'entretien, une expression ordonnées des sujets à aborder et
une suggestion des techniques de relance et / ou d'approfondissement à
utiliser.
L'entretien centré a pour principal atout le guide
d'entretien qui introduit un cadre structuré, accroit la
compréhension des informations et confère à la collecte un
caractère systématique. L'échange reste ainsi proche d'une
conversation non-programmée.
Nous retraçons d'abord l'élaboration du guide
d'entretien avant de développer le processus de collecte des
informations telle qu'il s'est réellement déroulé.
I - 3 - 2 - 2 - L'élaboration du guide
d'entretien : Vers une appréhension des méandres
du problème posé
Le guide d'entretien est un document qui
précise à l'enquêteur, en plus de la consigne initiale
(identique à celle d'un entretien en profondeur), que l'ensemble des
facettes du thème à étudier doivent être
abordées avec détail au cours de l'entretien.
Le guide d'entretien que nous avons élaboré est
structuré en thèmes. Les titres de ces thèmes ont
été formulés en phase avec les besoins en informations qui
nous permettrons d'atteindre nos objectifs. De ce fait, après avoir
opéré un bref détour sur la notion de RSE et sur les
objectifs poursuivis par notre étude, l'essentiel de l'entretien a
porté sur les six thèmes suivants :
- La responsabilité sociale de
l'entreprise : afin d'amener le répondant à
définir la RSE, l'identifier au sein de son organisation et tester ses
connaissances des instances impliquées dans la RSE ;
- Engagement sociétal de
l'entreprise : afin d'identifier les politiques de RSE de
l'entreprise, ses démarches et les domaines couverts par ses
actions ;
- Place de la RSE et implication dans la
stratégie d'entreprise : afin de déterminer la
place tant interne qu'externe qu'occupe la RSE dans le management
d'entreprise ;
- Évaluation des conséquences des
activités de RSE : afin de déceler l'incidence et
les avantages inhérents à la mise en oeuvre d'une politique
responsable au sein l'entreprise ;
- Difficultés rencontrées lors de la
mise en oeuvre de la RSE : afin de discerner les types de
difficultés rencontrées par l'entreprise camerounaise dans la
mise en oeuvre d'une politique de RSE ;
- Identification de l'entreprise.
Le guide d'entretien ayant été
élaboré, nous avons procédé à la collecte
des données proprement dite. C'est ce qui fera l'objet du
sous-paragraphe suivant.
I - 3 - 3 - La collecte des données proprement
dite : le déroulement des entretiens
En général, toute collecte de données se
fait sur la base d'un certain nombre de critères. En ce qui nous
concernent, les critères sur lesquels nous avons fondé la
collecte de nos données ont été résumés en
deux modèles : un premier modèle qui n'est autre que le
modèle des stakeholders proposé par M. Friedman en 1984,
et un second modèle que nous avons nous-mêmes conçus, et
qui reflète les différentes dimensions de la RSE. Ces
modèles sont les suivants :
Tableau 3.2 : Modélisation de l'approche des
Stakeholders
Entreprise
Communauté locale
Clients
Concurrents
Ecologistes
Associations commerciales
Employés
Medias
Gouvernement
Propriétaires
Défenseurs des consommateurs
Fournisseurs
Est considéré comme stakeholder, tout individu ou
groupe qui peut affecter ou être affecté par la réussite de
l'entreprise.
|
Source : A. ACQUIER et F. AGGERI (2008), Inspirés
de Freeman (1984)
Tableau 3.3: Essai de modélisation des
activités de RSE au Cameroun
Réglementaire
Responsabilité Sociale de l'Entreprise
Volontaire
Mixte
Chaque entretien a commencé par une description
succincte de notre thème. Nous commencions donc par une
définition très brève de ce l'on entend par
responsabilité sociale, puis nous exposions les objectifs visés
par notre travail de manière concise, et expliquions enfin le but
visé par la recherche. Nous nous sommes rendu compte que cette phase
était primordiale, car la plupart des répondants ne sachant pas
ce qu'est la RSE, prétendaient même ne pas là pratiquer.
Mais une fois qu'ils avaient été édifiés sur ce
concept, leurs commentaires sur le sujet devenaient aussi nombreux que riches
en contenu.
En effet, lors du déroulement de la plupart des
entretiens, les différents thèmes du guide d'entretien n'ont pas
été abordés dans l'ordre. Car, dans leurs argumentations,
les interviewés donnaient des réponses aux thèmes à
venir. Ce qui ne nous a pas empêchés, dans certains cas, de
revenir sur les points qu'ils avaient déjà évoqués
à leur insu, afin de s'assurer de la qualité et de la
fiabilité des réponses fournies. Lors de la collecte des
données, le facteur temps a joué un rôle très
important.
A cet effet, JOLIBERT et JOURDAN (2006)
soulignent que la durée d'un entretien semi directif est d'au moins
trente (30) minutes et ne saurait excéder une heure trente minutes
(1h30mn). Nos entretiens ont pour la plupart, excédé les
quarante-cinq (45) minutes. Ce qui rend nos entretiens valides, du point de vue
de JOLIBERT et JOURDAN. A cet effet, nous avons résumé la
durée de chacun de nos entretiens dans le tableau
ci-après :
Tableau 3.4 : Déroulement des
entretiens
Sociétés
|
Secteur d'activités
|
Nombre d'entretiens
|
Responsables rencontrés
|
Dates des entretiens
|
Durée de l'entretien
|
S.A.B.C
|
Agro
Alimentaire
|
3
|
Adjoint au DRH
|
13 / 04 / 09
|
51 min
|
22 / 04 / 09
|
89 min
|
Centre médical
|
22 / 04 / 09
|
85 min
|
ALUCAM
|
Métallurgie
|
3
|
DAF Adjoint
|
15 / 04 / 09
|
90 min
|
RH et Formation
|
15 / 04 / 09
|
87 min
|
DAF Adjoint
|
20 / 04 / 09
|
89 min
|
NESTLE
|
Agro Alimentaire
|
2
|
Conducteur des travaux
|
02 / 05 / 09
|
72 min
|
Conducteur des travaux
|
15 / 05 / 09
|
62 min
|
TOTAL
|
Hydrocarbures
|
1
|
Adjoint au DRH
|
06 / 05 / 09
|
86 min
|
Totaux (nombre et durée)
|
9
|
-------------------------
|
----------
|
711 min
|
Durée Moyenne des entretiens
|
|
Le tableau ci-dessus nous donne une durée moyenne des
entretiens de 79 minutes soit, une heure dix-neuf minutes (01 heure 19
minutes). Ce qui est nettement supérieur à 45 minutes et
inférieur à 1h30mn. Ce qui nous permet de conclure que, du point
de vue de Jolibert et Jourdain, nos entretiens sont valides.
Dans le but de vérifier la crédibilité
des informations recueillies, nous avons chaque fois pris la peine, avant de
quitter les sites qui nous avaient accueillis, de vérifier la
crédibilité de ces informations en reprenant partiellement ou
totalement les thèmes du guide d'entretien avec un employé
rencontré au hasard. Bien qu'informelle, cette façon de
procéder permet de rendre plus fiables, les résultats de la
recherche, l'objectif étant de minimiser voire d'annuler les biais dans
la recherche et d'inférer ces résultats sur une population plus
large. Nous nous sommes rendu compte qu'à chaque fois, les
argumentations des nouveaux interviewés étaient en phase avec
ceux fournis par leurs prédécesseurs. Ce qui fut d'ailleurs
très rassurant.
Une fois les données collectées, il ne nous
reste plus qu'à les analyser afin d'en tirer les conclusions
nécessaires quant aux réalités de la RSE dans les
entreprises industrielles camerounaises. Pour ce faire, plusieurs
méthodes d'analyse des données ont été
utilisées, afin d'affiner les résultats de la meilleure des
façons possibles.
I - 3 - 4 - L'analyse des données :
concours conjoint des méthodes qualitatives et
quantitatives
L'objectif de notre étude étant non seulement
de décrire les comportements RSE des entreprises camerounaises, mais
aussi de les classer par types, il s'est avéré nécessaire
de recourir à la méthode traditionnelle propre aux recherches
qualitatives exploratoires : il s'agit de l'analyse du
contenu. Mais pour atteindre notre second objectif (ressortir la
spécificité des entreprises camerounaises en matière de
RSE et généraliser les résultats), nous avons dû
recourir aux méthodes quantitatives (analyse uni variée et
tableaux de contingence). Lors de l'analyse des
données, nous avons d'abord procédé par analyse du contenu
des entretiens avant de passer à l'analyse quantitative des
questionnaires.
I - 3 - 4 - 1 - La description des données
recueillies par l'analyse factorielle du contenu
Il existe plusieurs techniques d'analyse des données
qualitatives qui reposent toutes sur le savoir-faire du chercheur, qui
découle à la fois de sa formation, de son expérience, mais
aussi de son intuition (I. Desbordes, 1998) cité par
(Jolibert et Jourdan, 2006, p 49). Les deux techniques les
plus employées sont le résumé et l'analyse du contenu.
Le résumé est la forme d'analyse la plus simple
en matière d'études qualitatives. Il s'agit pour le chercheur,
à partir d'un matériel d'étude souvent très
volumineux, de produire une synthèse comprenant les principaux
enseignements de l'étude, tout en ressortant la richesse et les nuances
des entretiens jugés plus significatifs.
L'analyse du contenu que nous avons jugée
adéquate pour notre étude a été définie par
WEBER (1985) comme « une procédure de
réduction de données qui consiste à classifier dans un
nombre restreint de catégories, un grand nombre de mots et
d'expressions », cité par (Jolibert et Jourdan,
2006). Ainsi, il s'agira pour nous de déceler des mots
clés et des concepts importants, afin de quantifier leur
fréquence d'occurrence, l'objectif étant d'aboutir à une
description du contenu des données qui réponde à trois
caractéristiques primordiales : l'objectivité,
l'exhaustivité ou la systématisation et la quantification.
En effet, l'objectivité est obtenue
en faisant analyser les mêmes données par plusieurs chercheurs, ou
en analysant plusieurs fois les mêmes données (ce que nous avons
fait), afin d'éviter l'introduction de biais. La description est
systématique ou exhaustive dans la
mesure où tous les mots prononcés par les interviewés sont
pris en compte. Il est essentiel que la totalité des mots
utilisés par le répondant, pendant toute la durée de
l'entretien, soit prise en considération. Cette nécessité
vise à répondre aux exigences de rigueur et d'impartialité
et que le chercheur ne procède pas à un choix arbitraire des
informations les plus évidentes, parce que en relation avec le sujet de
l'étude. Enfin, elle est quantitative puisqu'on va
compter les fréquences d'apparition des thèmes ou des mots. Les
informations une fois classées, le chercheur procède à la
détermination des fréquences d'apparition des différentes
catégories. Toutefois, la généralisation des
résultats obtenus ne peut avoir lieu que si le nombre de personnes
interrogées est assez élevé.
Dans le cadre de notre étude, nous avons
premièrement procédé par analyse du contenu dans le but de
quantifier les résultats obtenus (fréquence d'apparition des
informations) au terme de nos différents entretiens. Mais, compte tenu
du nombre de cas étudiés (04) et de l'objectif visé par
notre recherche (généralisation des résultats), cette
méthode, certes nécessaire et quasi incontournable pour ce type
d'étude, s'est avérée insuffisante pour nous permettre de
restituer des résultats généralisables. Pour ce faire,
nous avons administré un questionnaire à vingt-huit autres
entreprises également issues du secteur industriel.
I - 3 - 4 - 2 - Le questionnaire : constitution
de l'échantillon, méthode de recueil et
d'analyse des
données et opérationnalisation de la RSE.
Le questionnaire est un outil indispensable au recueil de
différents types d'informations, notamment sur les comportements, les
attitudes et opinions, les connaissances et sur des données
sociodémographiques (âge, sexe, revenu, ...). C'est un ensemble de
questions qui peuvent des questions ouvertes, fermées ou les deux. En ce
qui concerne notre questionnaire, nous avons utilisé en grande partie
des questions fermées (dichotomiques et multiples) dans le but de
faciliter leur codification.
Nos questionnaires ont été administrés
à un ensemble de 28 entreprises, toutes du secteur industriel. Dans le
but de constituer un échantillon représentatif de la population
des entreprises industrielles, nous avons utilisé la méthode dite
probabiliste plus précisément le sondage
aléatoire stratifié. Pour ce faire, nous avons
utilisé deux variables de stratification ou critères de
constitution des groupes à savoir la situation
géographique et le secteur d'activité. La situation
géographique permet de répartir notre échantillon de
manière équitable sur les trois principales zones industrielles
des la ville de Douala : Douala-Bassa, Magzi-Bonaberi, Ndobo-Bojongo.
Questionnaire
En ce qui concerne le recueil des données, on
distingue deux modes d'administration de questionnaires auprès des
interviewés : il peut être auto-administré ou
présenté par un enquêteur. On peut les résumer dans
le schéma ci-après :
Enquêteur
Auto-administré
Face à face
Postal
Téléphone
Minitel
Comme le montre le schéma ci-dessus, nous avons
effectué nous-mêmes les entretiens et les questionnaires ont
été remplis suivant le mode d'administration « face
à face » pour nous assurer de la fiabilité des
réponses et expliquer le contenu des réponses non comprises par
l'enquêté ou l'interviewé.
Enfin, les données recueillies ont été
analysées grâce au logiciel de traitement de données
statistiques SPSS, à partir duquel nous avons
effectué deux analyses. Premièrement, l'analyse uni-variée
ou tri à plat afin de présenter question par question,
les solutions obtenues pour chacune des modalités de réponse.
Puis, nous avons, à travers l'analyse des tableaux de contingence
croisant les variables pertinentes du questionnaire, interprété
le coefficient de contingence qui en résulte.
Le RSE se manifeste aussi bien en interne qu'en externe. Au
plan interne, il s'agit de la responsabilité envers les PP internes
(employés et shareholders) ; en externe, il s'agit des PP externes
(la société civile, les clients, les fournisseurs, l'État,
les ONG ...).
Tableau 3.5 : Opérationnalisation du concept de
RSE
Concepts
|
Dimension
|
Indicateurs
|
Engagement social ou sociétal
|
La RS en interne
|
-Climat social en entreprise
-Parité Homme-femmes
-Équilibre régional
-Conditions de travail et de sécurité
-Hygiène et salubrité
-Processus de carrière
-Politiques de formation des employés
-Rémunération du personnel
-Affiliation du personnel à la CNPS
-Qualité des produits
|
La RS en externe
|
-Relations avec les fournisseurs
-Relations avec les clients
-Respect des délais et des normes de
fabrication
-Relations avec les autres tiers
-Activités philanthropiques (dons)
-Activités de sponsoring et de mécénat
-Reporting sociétal
|
Engagement environnemental
|
L'environnement
|
-Engagement dans le développement de
la communauté locale
-Lutte contre la pollution
-Activités de protection environnement
-Gestion des déchets et autres rejets
-Politiques de prévention et de gestion
des risques environnementaux
|
Responsabilité économique
|
Objectifs visés
|
-Impact sur la capacité de production
-Productivité des employés
-Horizon des retombées
-Maitrise des coûts de production
-Impact sur le chiffre d'affaires
-Rentabilité économique (profit)
|
Section II : PRÉSENTATION DES CAS
ÉTUDIÉS : LES ENTREPRISES DU
SECTEUR INDUSTRIEL
CAMEROUNAIS
Le Cameroun recèle d'importantes ressources naturelles
minières (pétrole, gaz naturel, bauxite, cobalt, nickel, fer) et
agricoles (banane, cacao, café, thé, huile de palme, coton,
bois). Cette diversité et la situation stratégique du pays qui
permet le désenclavement des économies du Tchad et de la
République Centrafricaine, lui ont permis à partir de 1995, et
à la faveur de la dévaluation du Franc CFA, de reprendre le
chemin de la croissance économique, à un rythme 3 à 4 %
l'an.
Avec une base agro-industrielle, une filière de
transformation de bois de plus en plus intégrée, et une industrie
de matériaux de construction (fer à béton, plastiques,
ciment, peintures) et de biens de consommation (plastiques, savons, produits de
beauté), le tissu industriel du Cameroun est le plus diversifié
d'Afrique Centrale. Les industries sont implantées essentiellement sur
la zone littorale : Douala, Limbé, Edéa. Les statistiques
industrielles font état d'environ 200 entreprises industrielles pour un
effectif de quelque 53 000 personnes. La plupart de ces entreprises travaillent
exclusivement pour le marché intérieur ; les exportations
manufacturières sont peu développées, et
représentent moins de 10% de l'ensemble des exportations.
Ainsi, les principaux acteurs du secteur industriel sont les
suivants : SABC, Sodecoton, Socusam, Camlait, Sic Cacaos/Chococam,
Cameroon Tea Estate, Socapalm, SCR Maya, Hevecam, CDC, Safacam Icrafon, Groupe
Batoula, Cameroon Packing Company, Scimpos, CCC, SOC, NOSA, CCO, CCIC,
Parfumerie Gandour, Vital Cosmetics, Tacicam, SEEF, Vicwood, Paul Khoury,
Patrice Bois, Pallisco, CIAC, CICB, FME Gaz, La Pasta, OK Plast, Groupe IBC,
Six International, Soticam, Wijma, Ecam Placage, Ingenierie Forestière,
Alpicam, Cimencam (qui renforce ses capacités de production pour faire
face à la croissance de la demande) et Alucam (qui envisage le
triplement de sa production à l'horizon 2012). A ces entreprises, on
peut ajouter entre autres, Cameroun Continu, BRIC, AUBAC, Littocol, SAFCA,
Bocam, Bocom, Samco papers ltd.
Ces entreprises ont constitué pour l'essentiel, notre
population de recherche. L'objectif initial était de toucher le maximum
parmi les entreprises sus citées. Objectif presque atteint dans la
mesure où nous avons pu toucher un nombre assez élevé
d'entreprises, dans des sous-secteurs d'activités différents.
II - 1 - Place du secteur industriel dans l'économie
camerounaise
Le secteur secondaire (industrie manufacturière et
production de pétrole brut) emploie 15% de la population active et sa
contribution au PIB est de l'ordre de 28% (dont 5,3% pour le pétrole),
soit environ 2 500 Milliards de FCFA (4,3 Mds EUR). Raison pour laquelle nous
avons intégré parmi les entreprises prospectées, la
société TOTAL.
Les agro-industries sont le groupe le plus
représentatif du secteur industriel avec plus de 40% de la valeur
ajoutée industrielle. Dominent dans cette branche, l'industrie
brassicole, de rhums, liqueurs et d'eau minérale, l'industrie
sucrière, l'industrie laitière, la confiserie et la
transformation de cacao, de café, de thé, de coton. On retrouve
également des huileries. Raison pour laquelle, nous avons tenu à
rencontrer les responsables de deux (02) entreprises du sous-secteur des
agro-industries, notamment la SABC et NESTLE.
II - 2 - Champ d'investigation et Présentation
des cas étudiés : les entreprises
industrielles de la
ville de Douala
L'intérêt particulier que nous portons aux
entreprises industrielles de la ville de Douala est double.
Premièrement, les entreprises industrielles de la ville de Douala sont
très fortement représentatives de la population des entreprises
industrielles au Cameroun. Ensuite, pour faire face aux contraintes techniques,
temporelles et financières, nous avons préféré nous
concentrer sur les entreprises qui nous sont les plus proches, en l'occurrence
les entreprises de la ville de Douala.
Le choix des entreprises industrielles, nous l'avons dit,
relève du fait qu'elles sont les seules à répondre
parfaitement aux piliers du développement durable, également
intégrés aux considérations managériales de la
RSE : le volet social, le volet environnemental, le volet
économique. Autrement dit, les entreprises industrielles sont
concernées aussi bien par la réalisation des oeuvres sociales
qu'environnementales, dans la recherche du profit, et ce quelque soit sa
dépendance (étrangère ou nationale).
Il est question pour nous, de présenter dans cette
section, les quatre entreprises qui ont fait l'objet de nos différents
entretiens, en exposant à chaque reprise, leur identité, leurs
activités, leur engagement responsable et si possible, leur perspective.
Nous présentons donc tour à tour, la SABC, ALLUCAM, TOTAL et
NESTLE.
II - 2 - 1 - La Société Anonyme des
Brasseries du Cameroun (SABC)
· Identité de la SABC
Les Brasseries du Cameroun, société agro
alimentaire spécialisée dans la fabrication et la distribution
des boissons hygiéniques, est le leader du secteur industriel au
Cameroun. Créée à Douala, le 03 février 1948, elle
devient filiale du groupe Castel en 1990. Avec une production
annuelle de 3 300 000 hectolitres de bière, soit 510 millions
de bouteilles, et de 1 350 000 hectolitres de boissons
gazeuses, soit 240 millions de bouteilles, Les Brasseries du Cameroun
sont le numéro 1 de l'industrie brassicole au Cameroun. Avec
70% du marché des bières, 85% de celui des
boissons gazeuses, 75% du marché de l'eau minérale
naturelle. Leur chiffre d'affaires hors taxes de 165
milliards de FCFA avec 360 actionnaires camerounais.
Un effectif de près de 2000 salariés et plus de
50 000 emplois indirects. Un parc de 220 camions pour la
distribution. 34 000 points de vente au détail14(*).
· Engagement responsable
Les Brasseries du Cameroun participent pleinement à la
formation et à l'épanouissement de la jeunesse camerounaise. En
effet, les Brasseries du Cameroun organisent chaque année, une
compétition de football pour jeunes connue sous le nom de
« Coupe Top ». La « Coupe Top » est une
compétition sportive qui rassemble pendant les vacances scolaires,
autour du football, les jeunes sportifs des Lycées, collèges et
même les jeunes qui ne fréquentent aucun établissement
scolaire, âgés de 12 à 14 ans, dans le but de créer
une saine émulation chez les jeunes sportifs, constituer une
pépinière pour l'École de Football des Brasseries du
Cameroun et promouvoir le football, sport roi au Cameroun. Chaque
année, la Coupe Top rassemble plus de 5 000
enfants des dix provinces du Cameroun. Chaque année, les Brasseries
du Cameroun recrutent une dizaine de jeunes talents, futurs
représentants du Cameroun sur la scène internationale en
matière de football.
Dans le domaine du sport, Créée le 12 mars 1989,
l'école de football brasseries du Cameroun poursuit
trois objectifs fondamentaux : Former gratuitement de jeunes joueurs en
leur inculquant dès leur bas âge, toutes les qualités
sportives, humaines et morales nécessaires à l'émergence
de leurs talents ; Favoriser l'intégration des jeunes footballeurs
dans les équipes civiles (ligue, 2e division,
1ère division, équipes professionnelles), et assurer
une véritable pépinière des différentes
sélections nationales ; Participer à l'amélioration
du niveau d'ensemble du football camerounais et à sa promotion. Depuis
la création, elle a formé près de 1
000 élèves dont 24 ont évolué au sein de
l'équipe nationale du Cameroun, les Lions Indomptables (Rigobert
Song Bahanag, Pierre Womelen, Ngom Kome, Samuel Eto'o, Gérémi
Ndjitap, Salomon Olembe).
Cependant, l'engagement des Brasseries du Cameroun ne se
limite pas qu'au seul domaine sportif : « Notre contribution
dans ce domaine est dirigée vers les établissements scolaires et
universitaires, les orphelinats, ainsi que les centres hospitaliers. Les
Brasseries du Cameroun accompagnent chaque année, plus de 1000
élèves et étudiants, par le biais de stages
d'imprégnation et académiques ; et surtout à travers
la mise à leur disposition du matériel
didactique. ».
Sur le plan culturel par exemple, pour les enfants
âgés de 8 à 12 ans, les Brasseries du Cameroun organisent
chaque année dans ses cinq agences une action éducative et
culturelle dénommée « Dessine-moi ton univers avec
D'jino Cocktail de Fruits». Cette action a pour objectifs de
former les jeunes aux techniques de dessin, déceler et canaliser
chez les tout petits les vocations en art plastique.
Dans le but de participer pleinement au développement
social et culturel des camerounais, Les Brasseries du Cameroun organisent
chaque année depuis l'année 2000, un grand concours national de
chant amateur dénommé « Concours National de la Chanson
Mutzig ». Ce concours a pour
objectifs de promouvoir les artistes camerounais amateurs évoluant dans
le domaine de la chanson, produire sur la scène internationale une star
de la musique chaque année, Il a produit depuis sa
création plusieurs artistes dont le plus célèbre, Longue
Longue et lauréat 2000, est l'auteur de l'album intitulé
« Ayo Africa »
La responsabilité sociale en interne chez SABC est
palpable. Il existe ici une direction des ressources humaines qui s'occupe de
façon individuelle de la gestion des hommes au sein de l'entreprise, de
la gestion des carrières, du suivi des employés et traite par
anticipation des problèmes de départ en retraite, par
l'affiliation à la CNPS des employés.
II - 2 - 2 - ALUCAM
· Identité du Groupe Alucam
Alucam est l'une des plus anciennes
entreprises du Bassin de la Sanaga-Maritime et l'une des plus importantes du
Cameroun. Elle exerce ses activités depuis 1954, date à laquelle
elle fut créée, à travers un partenariat entre la
société d'Aluminium Pechiney et le Gouvernement de la
République du Cameroun. Suite au rachat par des actionnaires successifs,
Alucam fait aujourd'hui partie du Groupe Mondial anglo-australien Rio Tinto.
· Ses Activités
Les principales activités d'Alucam reposent sur la
production et la transformation de l'aluminium. Ces activités sont
réalisées dans deux zones à savoir la zone industrielle
d'EDEA et la zone portuaire de Douala. La production annuelle de Alucam est
passée de 55 000 tonnes en 1957, à une capacité
nominale de 100 000 tonnes aujourd'hui, résultat palpable d'une
évolution en technologie de production et de l'extension de l'usine en
1981. Avec un chiffre d'affaires de 149 milliards de francs CFA, Alucam emploi
820 personnes et constitue à elle seule 7% de la production industrielle
au Cameroun, 5% des recettes d'exportation du Cameroun, 3% du PIB national et
contribue de manière directe et indirecte au budget de l'État
à hauteur de 53 milliards de francs CFA (Rapport
d'activités 2006).
· Engagement responsable
Alucam a toujours pris en compte ses parties
prenantes, notamment dans son environnement immédiat. Mais l'exigence
actuelle de gouvernance a amené l'entreprise à travailler
autrement à l'usine et à l'extérieur. Cette nouvelle
approche vise à être à l'écoute et à la prise
en compte des préoccupations prioritaires des populations, chaque fois
que celle-ci est possible.
Dans le souci croissant de sa responsabilité sociale,
Alucam s'est engagée dernièrement dans quatre axes prioritaires
que sont l'environnement, la santé/l'hygiène ;
l'éducation et le développement local. En effet, les
dépenses annuelles de gestion de l'environnement et de la
sécurité sont passées de 1 666 Millions de Francs CFA
en 2001 à 4 703 Millions de Francs CFA en 2006 traduisant la
volonté managériale d'Alucam de participer au
développement durable, de garantir la sécurité et de
maitriser la santé sur le site industriel.
En plus, Alucam suit rigoureusement toutes
ses sources d'émissions de gaz à effet de serre et de fluor qui
ont diminué considérablement depuis quelques années.
Son centre de stockage des Déchets Ultimes est le premier de ce
genre en Afrique Subsaharienne.
· Enjeux futurs
Les projets et ambitions futurs d'Alucam se
cristallisent dans un projet d'extension qui lui permettra de tripler la
capacité de production actuelle par la construction d'une
deuxième usine sur le site d'EDEA avec une technologie de pointe AP 37
et d'une centrale hydroélectrique d'environ 330 MW à Nachtigal.
Avec l'appui de son partenaire Rio Tinto, Alucam mène
en ce moment des négociations avec AES Sonel pour un nouveau contrat
d'énergie, l'actuel contrat se terminant en fin
2009. « La bonne santé actuelle du marché des
métaux en générl et celui de l'aluminium en particulier,
participe de manière significative, aux bons résultats financiers
du Groupe Alucam. Seulement, les années qui viennent
nous obligent à concrétiser les projets envisagés,
condition nécessaire pour la survie de notre unité
industrielle ».
II - 2 - 3 - Nestlé Cameroun
· Identité de Nestlé
Née de la fusion en 1983 entre CAMAD Nestlé et
SOPRAL, société dans laquelle Nestlé détient 49% du
capital, Nestlé Cameroun est à rayonnement sous régional
offrant une gamme de produits alimentaire diversifiés (lait, cubes...).
Bénéficiant ainsi de la popularité de ses produits,
Nestlé peut se réjouir d'être un acteur majeur dans le
tissu industriel Camerounais, notamment dans l'agroalimentaire où
Nestlé est reconnu comme leader mondial. Nestlé Cameroun compte
à ce jour 350 employés permanents et réalise un chiffre
d'affaires annuel d'environ 35milliards de FCFA.
· Son engagement responsable
Nestlé Cameroun n'a pas eu de mal à se
positionner aujourd'hui comme une entreprise responsable. « La
conviction de Nestlé est faite depuis toujours que le
développement à long terme vaut mieux que le profit à
court terme. Dans cette l'optique, la création de valeurs est notre
leitmotiv ». Ainsi, Nestlé oeuvre de manière
active dans l'éducation, l'hygiène et la santé. Il
participe ainsi à la croisade globale contre le paludisme en distribuant
des moustiquaires imprégnées aux segments de la population les
plus touchés par la maladie, les femmes enceintes et les enfants de
moins de cinq ans.
Nestlé prend en charge la scolarité et
l'alimentation des enfants déshérités : de NIDO (qui
sensibilise les mamans sur la bonne alimentation) à MILO (qui sponsorise
les activités dans les écoles) en passant par Nescafé (qui
offre un véritable tremplin aux artistes en herbe) ou encore MAGGI (qui
participe activement au développement, à la journée
internationale de la femme et sponsorise les projets des associations
féminines). « Nous sommes
également partenaire de la société Camerounaise de
pédiatrie via Nestlé Nutrition Institute
Africa. »
Sur le plan environnemental, Nestlé a pris un certain
nombre d'engagements en faveur de la protection de l'environnement, de la
santé et de la sécurité de son personnel, y compris les
tierces parties. Ceci est évidement visible au travers de sa politique
santé, sécurité et environnement. Dans cette
perspective, Nestlé a initié, puis implémenté
plusieurs projets dont le but est de réduire, au quotidien, son
empreinte carbone tout au long de ses activités. Il a aussi investi dans
le traitement des eaux usées afin d'en améliorer la
qualité avant leur rejet dans la nature.
Nestlé a ensuite investi dans le secteur de la lutte
contre les incendies, afin d'être prêt à répondre aux
situations d'urgence.
« Afin de maintenir puis
d'améliorer continuellement nos acquis à travers un
système intégré de gestion de la sécurité,
la santé et l'environnement, nous avons initié la démarche
de certification de notre usine par rapport aux standards internationaux OHSAS
18001 version 2007 et ISO 14001 version 2004 »
II - 2 - 4 - Total Cameroun
· Identité de Total Cameroun
Ayant commencé ses activités de production au
Cameroun en 1947, Total Cameroun comprend aujourd'hui en
réalité deux filiales Total Cameroun S.A et Total E&P
Cameroun. A la tète d'un réseau de distribution de 160 station
réparties sur toute l'étendue du territoire national, Total
Cameroun S.A distribue l'ensemble des produits pétroliers
nécessaires à la bonne marche de l'économie nationale.
Elle assure en outre l'assistance technique de la SONARA15(*) et compte environ 1700
employés. Total Cameroun est aujourd'hui le leader de la distribution
des produits pétroliers avec 45% de parts de marché. Quant
à Total E&P, il est opère les deux tiers de la population
pétrolière au Cameroun et contribue de façon majeure au
produit intérieur brut du pays; Cette filiale compte un réseau de
200 employés et un réseau de sous traitants d'environ 1500
personnes.
· Son engagement responsable
Le groupe Total entend assurer pleinement sa
responsabilité sociale notamment aux actions qu'il mène dans les
domaines de la santé, l'environnement, la sécurité,
l'éducation, le développement local.
Dans le domaine de la santé, Total peut s'illustrer
par la sensibilisation de son personnel, de leurs familles et des entreprises
partenaires au travers des semaines santé, campagnes d'information. Il
soutient en outre le projet de recherche de l'institut pasteur sur la
transmission du SIDA de la mère à l'enfant, pour ne citer que ces
actions.
Sur le plan environnemental Total agit dans le recyclage des
eaux usées au travers de son unité Ecolube (collecte et
traitement), s'occupe de la collecte et de l'incinération des
déchets industriels, de la réduction du torchage et de la
valorisation du gaz, Il participer aussi pleinement au travers de sa fondation
au projet de gestion communautaire des écosystèmes de mangroves.
En ce qui concerne la sécurité en interne et en externe, il
dispose d'un centre fonctionnel de perfectionnement à la conduite pour
les transporteurs de produits pétroliers avec près de 300
chauffeurs formés en fin 2008. Il sensibilise aussi les populations sur
les dangers des hydrocarbures par un déploiement d'une caravane de
sécurité dans les zones rurales.
En éducation, Total oeuvre pour un parrainage
d'élèves-ingénieurs. Il a en outre initié un
programme de sensibilisation des jeunes sur les dangers de la route. A cet
effet, 2500 élèves ont été formés en 2008
dans les écoles primaires le long de l'axe routier Douala-Bafoussam.
Cette opération a été baptisée
« opération princesse de la
route ».
Dans le cadre du développement local, Total brille par
son soutien aux manifestations culturelles et traditionnelles :
« Nous entretenons en outre un dialogue permanent avec les
différentes parties prenantes autour de nos sites industriels et avons
très souvent recours aux entreprises de sous-traitance
locale ». Total Cameroun entend ainsi assurer une performance
économique de ses activités par la maitrise et la
réduction de l'impact de leurs activités sur l'environnement
physique et humain, par la contribution au développement
économique et social du pays, par l'anticipation des besoins en
énergie.
Les développements effectués ci-dessus peuvent
être généralisés dans le tableau ci-dessous afin de
permettre une meilleure visualisation des pratiques de RSE dans les entreprises
étudiées.
Tableau 3.5 : Récapitulatif de
l'engagement responsable des entreprises prospectées
Entreprises
|
Domaines de RSE identifiés
|
Cadre des actions menées
|
Certifications identifiées
|
S.A.B.C
|
- Environnement
- Santé
- Éducation
- Sécurité
- Développement local - Culture et loisirs
|
- Protection de l'environnement
- Lutte contre SIDA, sensibilisation.
- Programmes d'enseignement, stages.
- Stabilité et sécurité de l'emploi, du
personnel,
des consommateurs, stages académiques.
- Construction écoles, hôpitaux.
- Sponsoring et mécénat, sport, musique...
|
|
Alucam
|
- Environnement
- Santé
- Éducation
- Sécurité
- Développement local
- Culture et loisirs
- Développement
durable
|
- Consommation d'énergie, traitement des
déchets, sensibilisation;
- Prise en cpte des préoccupations des populations
- Suivi rigoureux d'émission de gaz à effet de
serre
- Offres de stages de vacances
- Conditions, de travail, climat social.
- Sponsoring, mécénat...
|
|
Nestlé
|
- Environnement
- Santé
- Éducation
- Sécurité
- Développement local
- Culture et loisirs
|
- Traitement des eaux usées, réduction de
déchets
de carbone.
- Lutte contre le paludisme, sensibilisation
mamans.
- Scolarisation et alimentation des enfants
déshérités, stages.
- Sécurité du personnel, parties prenantes,
consommateur, processus de lutte contre les
incendies;
- Hygiène et salubrité
- Sport dans les écoles, participation à la
journée
de la femme, émissions télé...
|
ISO 14001 Version 2004
OHSAS 18001 Version 2007
|
Total Cameroun
|
- Environnement
- Santé
- Éducation
- Sécurité
- Développement local
- Culture et loisirs
|
- Recyclage huiles usées, incinération
déchets
industriels, réduction torchage et valorisation
gaz, gestion écosystèmes de mangroves,
développement énergie solaire.
- Sensibilisation personnel, leurs familles et
entreprises partenaires sur les maladies, prises en
charge, SIDA, dons dans hôpitaux...
- Protection personnel, création centre de
perfectionnement à la conduite des engins,
sensibilisation dangers hydrocarbures.
- Parrainage d'élèves-ingénieurs, stages
académiques, sensibilisation,
- Dialogue permanent, recours à la sous-traitance
- Sponsoring, mécénat, excursions,
|
|
Les activités de responsabilité sociale
identifiées dans le tableau ci-dessus sont celles de grandes
entreprises, notamment, des multinationales dont la prise en compte de
préoccupations extra économiques relève
généralement de l'initiative de leurs
sociétés-mères. Il s'agit notamment des entreprises dont
les préoccupations sociales sont au coeur des inquiétudes des
dirigeants.
Ce chapitre intitulé « démarche
adoptée », s'est intéressé au cheminement qui a
marqué l'exploration sur le terrain, le choix de la population
d'étude, le choix de l'échantillon, les stratégies et les
techniques de collecte des données, les techniques d'analyse et les
méthodes d'interprétation des résultats. La tache qui nous
incombe à présent est de découvrir dans un premier temps,
les principales sources d'inspiration des activités RSE
identifiées (volontarisme ou régulationnel), puis, dans un
deuxième temps, de concevoir et proposer une modèle de RSE pour
le cas typique des trente-deux (32) entreprises prospectées.
Chapitre IV
VERS UNE TYPOLOGIE DE LA RESPONSABILITE SOCIALE DES
ENTREPRISES AU CAMEROUN
Notre travail, avait pour objectif principal, de
découvrir la réalité de la RSE au Cameroun. Pour y
parvenir nous devions tour à tour caractériser la
responsabilité sociale des entreprises au Cameroun, en ressortir la
spécificité, pour enfin proposer un modèle de RSE au
Cameroun.
Pour y parvenir, nous avons dû combiner deux
méthodes d'analyse à savoir l'analyse factorielle du contenu que
nous avons employée dans le cadre des études de cas, et les
analyses uni-variée et bi-variée dont nous ferons usage dans ce
chapitre pour analyser les résultats obtenus à travers les
questionnaires. Toutefois, nous avons effectué une descente au
Ministère de l'Environnement et de la Protection de la Nature pour mieux
appréhender la dimension légale de la RSE.
Nous allons dans un premier temps, caractériser les
pratiques de RSE des quatre entreprises étudiées (section 1),
puis dans un deuxième temps, nous analyserons les informations
collectées par questionnaire afin de ressortir un modèle de RSE,
propre aux entreprises du secteur étudié (section 3).
Section I : CARACTÉRISATION DES PRATIQUES
DE RESPONSABILITÉ
SOCIALE DES QUATRE
ENTREPRISES ÉTUDIÉES
Comme nous l'avons mentionné
précédemment, les activités de RSE se déclinent en
deux dimensions : une dimension volontaire qui intègre tous les
membres de la société, et une dimension légale qui, pour
l'entreprise, représente un impératif ou une contrainte. Dans les
entreprises étudiées, les pratiques de RSE sont tantôt
purement volontaires, tantôt tachetées de pratiques
réglementaires.
I - 1 - La Responsabilité Sociale des
Entreprises prospectées : Une RSE mixte
Au terme de l'analyse du contenu de nos différents
entretiens, nous avons identifié au sein des entreprises qui ont fait
l'objet de notre étude, des pratiques revêtant à la fois
des aspects volontaristes et légaux que nous qualifions ici de
démarche mixte.
En effet, tel que nous l'avons appris à la
Délégation Régionale de l'Environnement et de la
protection de la nature, chaque année, la brigade régionale du
Littoral, chargée des inspections environnementales effectue chaque
année, une descente sur le terrain afin de contrôler le respect
des normes et procédures en matière de responsabilité
sociale et environnementale des entreprises de la place. Le rapport fait
état d'une nette amélioration chaque année. Tout porte doc
à croire qu'en l'absence de telles mesures de contrôle, il y
aurait un risque de retour à la case de départ. Ces actions
légales sont couplées à la dimension volontaire
indéniable des activités socialement responsables des entreprises
au Cameroun.
I - 1 - 1 - Le volontarisme : d'une RSE
réactive à une RSE proactive
En effet, nous avons constaté que les activités
de RSE volontairement pratiquées au sein des entreprises
étudiées, sont passées de la réaction à
l'action. Elle se traduit en interne par des activités de
prévention visant à répondre aux besoins
socio-économiques des pp internes. A titre d'exemple, ALUCAM et TOTAL
mettent sur pied un dispositif sanitaire et médico-social adapté
aux besoins éventuels des employés et cadres de leur structure.
Notamment par la sensibilisation de leur personnel et même des familles
de leurs employés, sur les pandémies telles que le VIH SIDA.
NESTLE s'est volontairement engagée dans la sécurité de
son personnel en mettant sur pied, une politique de lutte contre les incendies.
Le volontariat se traduit également en interne par des programmes de
formation tels que ceux initiés par TOTAL en envisageant la
création d'un centre de perfectionnement à la conduite des
engins.
En externe, dans le but de répondre aux attentes des
collectivités nationales et étrangères, ces entreprises
s'illustrent également à travers des investissements dans les
domaines de la santé, l'éducation et le développement
local. C'est le cas par exemple de la S.A.B.C qui s'engage depuis plus de
vingt ans dans la construction d'hôpitaux et d'écoles. A
contribution majeure dans le domaine de l'éducation est la
création d'une école de football qui a pour objectif de former
des talents tout en les resocialisant (pour les enfants abandonné) et en
contribuant à leur éducation.
NESTLE s'illustre également dans ce domaine à
travers sa très forte participation à des journées
internationales telles que la journée de la femme ou encore la
journée de l'enfant. En effet, NESTLE est fortement impliqué dans
la lutte contre le paludisme, dans la scolarisation et l'alimentation des
enfants déshérités à travers des émissions
télé, et surtout, dans le sponsoring des activités
sportives dans les établissements scolaires de la place.
Par-dessus tout, les quatre entreprises étudiées
parrainent les élèves-ingénieurs et autres
étudiants à travers des stages académiques qu'elles
organisent dans le but de faciliter l'insertion professionnelle des jeunes
camerounais.
C'est dire qu'en pratiquant une RSE proactive (anticipation
des risques liés à l'environnement externe), les entreprises sont
plus aptes à faire faire face aux risques sociaux (chômage), aux
accidents industriels ou écologiques, aux changements brutaux et
imprévisibles de la réglementation, aux risques juridiques et en
interne, aux grèves de leur personnel. Toutes ces actions rappelons le,
restent dans un cadre volontaire. Toutefois, les actions volontaires de
l'entreprise peuvent être guidées par deux mobiles : pour des
raisons économiques ou par déontologie (guidées par des
valeurs morales et éthiques uniquement). La troisième section de
ce chapitre aura pour objectif de qualifier les raisons pour lesquelles les
entreprises mènent volontairement des activités de RSE.
I - 1 - 2 - Le respect de la
réglementation : une RSE sous l'influence de l'État
Au sein des entreprises étudiées, nous avons
constaté que la RSE est pratiquée non seulement par respect de la
réglementation nationale, mais aussi par respect des normes et
règles internationales en la matière. Ceci se justifie par la
présence au Cameroun, d'entreprises certifiées par des organismes
internationaux. C'est le cas par exemple de Nestlé dont les
activités sont en phase avec les exigences des normes de
standardisations internationales, et qui est standardisé OHSAS 18001
version 2007 et ISO 14001 version 2004. En dehors des cas
étudiés, plusieurs autres entreprises situées au Cameroun
obéissent désormais aux normes et standards internationaux :
HYDRAC est certifié ISO 9001 version 2008, PLASTICAM
est certifié ISO 9001 version 1994, 2000 et 2005.
Sur le plan national, nombreuses sont les entreprises qui
adoptent une démarche RSE. Ceci est en phase avec la loi nationale
camerounaise, loi fondamentale du MINEP selon laquelle, « tout
producteur de déchets est responsable de ses déchets
jusqu'à leur élimination ». Autrement dit, la RSE
est principalement régie par des lois sur la protection de
l'environnement, notamment la Loi N° 96 / 12 du 05 Août
1996 portant Loi - Cadre relative à la gestion de
l'environnement. À cet effet, le MINEP a innové en
instituant le concept de « environnement
gris ». Ce concept, par rapport à celui
de « environnement vert », a ceci
de spécial qu'il intègre dans la protection de l'environnement,
toutes les parties prenantes (la société civile incluse).
Février 2008 Toutefois, les multinationales doivent également
faire face à des « exigences de contrat »
(Performance requirements) qui leur sont
imposées par le gouvernement (emploi d'un grand nombre de nationaux).
C'est dans cette perspective que Total Cameroun,
Nestlé et la SABC s'investissent d'avantage dans le traitement des
déchets de leur activités et la réduction au maximum de
leur production de carbone. D'autres entreprises, telles que la SCR Maya,
PROLEG, PLASTICAM, CHOCOCAM et bien d'autres, investissent dans le recyclage et
le retraitement des eaux, cartons et papiers avant de les rejeter dans la
nature. En effet, Total Cameroun investi de plus en plus dans le recyclage des
huiles usées, l'incinération des déchets industriels,
dans la réduction et la valorisation des gaz, dans la gestion
écosystèmes et des mangroves, et dans le développement
énergie solaire. À ALUCAM, le cadre réglementaire de la
RSE est marqué par un suivi rigoureux d'émission des gaz à
effet de serre.
I - 2 - Les pratiques de responsabilité sociale et
sociétale identifiées
Cette sous-section a pour but de présenter l'apport de
l'un des modèles théoriques qui nous ont servi de base de
collecte de données lors de nos différents entretiens. Il s'agit
de la modélisation de l'approche des stakeholders présenté
au chapitre 3 (Tableau 3.1). Cette vision de la RSE suppose la prise en compte
des parties prenantes internes et des parties prenantes externes.
Nous exposons tour à tour, la prise en compte des
parties prenantes internes et des parties prenantes externes au sein des
entreprises étudiées.
I - 2 - 1 - Prise en compte des parties prenantes
externes : vers une GRH plus efficace
L'homme est la ressource la plus riche de l'entreprise, mais
aussi la moins favorisée dans les stratégies de réduction
des coûts, surtout dans le contexte actuel de crise financière
internationale marquée par des suppressions accrues des emplois et des
postes à travers le monde. La gestion des ressources humaines se
présente donc comme une source de risque que les entreprises peuvent
désormais maitriser (même partiellement), à travers des
politiques de responsables qu'elles mettent en oeuvre en interne. De telles
politiques ont été identifiées dans les entreprises que
nous avons prospectées et ce, dans plusieurs domaines.
Dans le domaine de la santé, l'on note au sein de SABC,
ALUCAM, Nestlé et TOTAL, une sensibilisation des personnels et de leurs
familles sur les maladies présentant un intérêt particulier
(MST, SIDA ...) et une prise en charge des malades séropositifs. On note
aussi au sein de toutes ces entreprises, l'existence des assurances maladies
pour le personnel de l'entreprise et leurs familles ou encore des infirmeries
destinées au personnel. Il faut cependant préciser que le
degré d'implication et de couverture sanitaire n'est pas le même
pour toutes ces entreprises.
Les rémunérations au sein de ces entreprises
sont régulières et il y existe des pratiques
complémentaires comme des primes, des gratifications, des
trophées, des médailles entre autres prix offerts aux
employés lors des différents anniversaires de ces
sociétés.
Il faut aussi relever que dans toutes ces entreprises, les
employés ont droit à des réductions sur leurs achats
internes, et même, certaines bénéficient gratuitement des
produits de leur exploitation. C'est le cas de Nestlé où les
employés reçoivent souvent des packages de la part de
l'entreprise, et de Total Cameroun où les employés
reçoivent le plus souvent des bons de carburant.
Pour assurer l'épanouissement de son personnel, il
existe au sein de ces entreprises, des tournois de football organisés
entre employés et même ouverts à des rencontres avec des
tiers. On note à cet effet l'existence de centres de loisirs autonomes,
de salles de fêtes, terrains de football, basketball. Des
cérémonies d'arbre de noël à Total Cameroun et
même des excursions de courte durée (2 - 3 jours) pour les
employés et leurs familles (Total Cameroun).
En ce qui concerne le développement des ressources
humaines, il existe aujourd'hui au sein de chacune de ces entreprises un
service de ressources humaines qui est de plus en plus à l'écoute
du personnel employé et gère les problèmes de suivi de
carrières, octroie des stages de perfectionnement et de formation
à l'étranger à certains employés. Le cas de Total
Cameroun qui organise des perfectionnements à la conduite des engins.
Toutes ces entreprises, soucieuses de l'avenir et du bien être de leur
personnel, sont affiliées à la CNPS afin d'assurer à leur
personnel une retraite paisible.
Les actions menées en faveur du personnel
employé ne peuvent être énumérées sur une
liste exhaustive, car la GRH est dynamique et nécessite des nouvelles
techniques de conciliation du personnel au jour après jour.
I - 2 - 2 - La RSE comme outil de conciliation des
attentes divergentes des PP externes
Les actions de RSE en externe sont relatives
à la protection de l'environnement, aux actions envers la
communauté, à une meilleure prise en compte de l'individu. On
peut alors évoquer ici de manière concrète les campagnes
de lutte, de sensibilisation, sur les maladies sexuellement transmissibles
comme c'est le cas avec Nestlé, SABC, TOTAL, bien que chacun s'y
investisse à sa manière.
Toutes les quatre entreprises prospectées offrent aux
jeunes camerounais, la possibilité de financer leurs études
à travers de nombreux stages payants (stages académiques et
stages de vacances). Elles sont également toutes engagées dans
des activités de sponsoring et de mécénat des
activités des célébrations des journées nationales
internationales comme la Journée Internationales de la Femme, la
Journée Mondiale de Lutte contre le VIH SIDA, la Journée
Internationale de l'Environnement, la Fête du travail, la Fête de
l'Unité, la Fête de la Jeunesse entre autres. Chacune des
entreprises étudiées ont des secteurs prioritaires. C'est le cas
par exemple d'Alucam qui privilégie le dialogue avec la
communauté locale en apportant son soutien aux cérémonies
traditionnelles des populations d'EDEA.
Sur le plan académique, toutes ces entreprises sont
également impliquées. On peut alors citer ici les dons
d'ordinateurs octroyés par toutes ces entreprises dans des orphelinats,
dans les établissements d'enseignement secondaire, notamment. Par
exemple le Groupe Total soutien l'Institut Technologique d'Afrique centrale
(ISTAC) par le parrainage des élèves-ingénieurs. On peut
aussi énoncer le cas du projet de sensibilisation des enfants des
écoles primaires de certaines villes du Cameroun sur les dangers de la
route dans le cadre de l'opération dénommée
« princesse de la route ».
Dans le domaine de la gestion des produits, toutes ces
entreprises veillent, chacune à sa manière à la
satisfaction de sa clientèle. A Nestlé par exemple, les attentes
du consommateur sont prises en compte pour améliorer les produits qui
leur sont offerts et satisfaire leurs exigences : le consommateur y est au
centre de la politique de développement. A la SABC, il faut sans cesse
veiller sur la qualité des produits que offerts aux clients et s'assurer
que les retombées positives des activités profitent aussi
à la communauté. La mise à disposition de la
communauté, d'un forage et le traitement des déchets militent
alors dans ce sens. La SABC est aussi soucieuse de l'avenir de la nation et
c'est pourquoi elle offre des stages, des bourses d'étude, et même
des emplois à la jeunesse camerounaise.
En ce qui concerne la préservation de l'environnement,
toutes les entreprises étudiées (SABC, ALUCAM, Nestlé,
Total) prennent en compte l'impact écologique de leurs activités
et limitent au maximum la consommation de l'énergie et des
matières premières dans le processus de production. En effet,
elles ont toutes mis sur pied des processus de recyclage de leurs eaux
usées, un service de collecte et d'incinération de leurs
déchets industriels. Total s'investit en outre dans le
développement de l'énergie solaire (photovoltaïque), tandis
que Nestlé innove en mettant sur pied un processus de lutte contre les
incendies.
Les relations avec les fournisseurs et les sous-traitants sont
de plus en plus élaborées et des mécanismes de
communication adaptés à chaque catégorie de fournisseur
sont mis sur pied. Total sous-traite actuellement avec HYDRAC S.A qui s'occupe
du contrôle, des analyses et du traitement de certains de ses
déchets et investit dans des programmes de formations en conduite
défensive de leurs employés spécialisés dans la
conduite des engins industriels.
Dans leurs relations avec l'État, l'on peut noter des
relations particulièrement bonnes d'autant plus que l'État
Camerounais trouve dans ces entreprises des partenaires incontournables dans le
processus d'emploi de la main d'oeuvre nationale et ce dans le cadre des
« performance requirements ». En plus, ces
entreprises constituent pour l'État des vecteurs de l'économie
nationale et des sources de recettes considérables dans le paiement des
impôts, principale source de revenus de l'État.
Au bout de cette section, nous pouvons conclure que la RSE est
bel et bien une réalité au Cameroun. Elle y revêt une
dimension mixte, c'est-à-dire, une combinaison des dimensions
légales et volontaires. De plus, les entreprises mènent des
activités qui visent à satisfaire les attentes de toutes leurs
parties prenantes (internes comme externes).
Toutefois, ces activités telles que décrites, ne
sont propres qu'aux quatre entreprises qui ont fait l'objet d'entretiens
semi-directifs. L'objectif de ce travail étant de proposer un
modèle généralisable à l'ensemble des entreprises
situées Cameroun, notamment celles du secteur industriel Camerounais,
nous avons en outre administré un questionnaire auprès de
vingt-huit autres entreprises. Ceci a été fait dans le but de
confirmer ou d'infirmer les résultats obtenus sur les quatre entreprises
initialement prospectées.
Section II : MODÉLISATION DE LA
RESPONSABILITÉ SOCIALE DES
ENTREPRISES AU
CAMEROUN
Cette section a pour principal objectif, de
concevoir et proposer un modèle de responsabilité sociale des
entreprises au Cameroun. Pour ce faire, nous allons dans un premier temps
exposer les réalités de la RSE au Cameroun à travers
l'analyse des résultats fournies par le logiciel statistique d'analyse
des données : le logiciel SPSS. Puis, sur la base des
résultats d'analyse des données, nous allons aboutir à une
typologie de la responsabilité sociale des entreprises au Cameroun.
II - 1 - Essai d'identification des pratiques de
responsabilité sociale des entreprises au
Cameroun
Nous avons procédé à une analyse des
tendances moyennes des comportements RSE de 28 entreprises toutes issues du
secteur industriel. L'analyse consiste dans un premier temps, en un tri
à plat pour chaque item ayant fiat l'objet d'analyse parce que
jugé important pour une meilleure compréhension du
phénomène étudié. Par la suite, nous effectuons un
tri croisé afin de déterminer la dimension de RSE qu'on pourra
attribuer à l'ensemble des entreprises ayant constitué
l'échantillon. Le tri croisé qui donnera la plus grande valeur du
coefficient de contingence sera retenu.
II- 1 - 1 - Appréciation de la
responsabilité sociale pour le cas typique des entreprises
étudiées
Il est question ici de décrire les pratiques de
l'entreprise à l'égard de ses parties prenantes internes et
externes. En interne, nous nous limiterons uniquement aux employés, les
actionnaires étant principalement motivés par les profits. En
externe, nous aborderons uniquement les clients et les fournisseurs, la
prochaine sous-section étant réservée à
l'environnement.
II- 1 - 1 - 1 - Connaissance du concept de
Responsabilité Sociale de l'Entreprise
Il a été demandé aux responsables
rencontrés, après leur avoir défini le concept de
Responsabilité Sociale de l'Entreprise, s'ils avaient déjà
entendu parler de ce concept auparavant. Le tableau ci-dessous résume
les réponses des 28 cadres rencontrés.
En effet, il ressort du tableau ci-dessus que, des 28
responsables rencontrés, six (06) seulement (tous issus des
multinationales) avaient déjà entendu parler du concept de RSE.
Autrement dit, 78.6% des responsables rencontrés n'en avaient pas encore
entendu parler.
Ce qui tout au moins, surprenant car, un regard du tableau
ci-dessous nous fait comprendre que ces responsables reconnaissent quand
même qu'ils mènent leurs actions dans une perspective RSE. Ce qui
nous permet de tirer une première une première conclusion :
les entreprises camerounaises pratiquent la RSE à leur
insu.
Toutefois, une fois que le concept de RSE leur avait
été bien défini, 75.0% d'entre eux pensent que les enjeux
sociaux et environnementaux sont du domaine des managers. Ce qui, du point de
vue pratique, ne serait pas suffisant. Car les 25.0% des responsables retissant
aux activités de RSE représentent un danger important pour
l'environnement dont ils sont les principaux pollueurs.
II- 1 - 1 - 2 - Appréciation du climat social
qui prévaut au sein des entreprises
Le tableau ci-dessus nous montre que le climat social est
serein dans 75.0% des entreprises prospectées (soit 21 entreprises sur
28), et l'est moyennement à hauteur de 25.0%. Si ce tableau fait
état d'un résultat positif, il ne va pas sans dire que la
sérénité ne peut pas encore être
considérée comme un acquis dans nos entreprises, la marge de
25.0% représentant le nombre de tensions sociales que l'entreprise doit
continuer de manager.
II- 1 - 1 - 3 - Appréciation des
parités et disparités entre employés
Il s'agit pour nous à ce niveau, de vérifier si
la parité Homme-Femme, l'équilibre régional, et
l'équité des tranches d'âges sont respectés au sein
des entreprises prospectées.
En effet, le tableau ci-dessus montre que beaucoup reste
encore à faire en ce qui concerne la parité Homme-Femme dans nos
entreprises. En effet, la parité y est relative à hauteur de
71.4% (soit 20 entreprises sur 28) et inexistante à hauteur de 28.6%
(soit 8 entreprises sur 28). L'une des principales raisons avancées par
les dirigeants est que la plupart des travaux industriels ont grand besoin de
forces masculines.
Aussi, l'équilibre régional est à
déplorer au sein de nos entreprises. En effet, 60.7% des entreprises de
notre échantillon ne respectent pas du tout l'équilibre
régional dans leurs pratiques de recrutement. Résultat d'autant
plus ahurissant, que les responsables en question privilégient les
autochtones plutôt que les immigrants. Dans une telle perspective, que
deviennent les individus originaires de métropoles non industrielles
où la main-d'oeuvre n'a aucune valeur pécuniaire ?
Par contre, comme l'atteste le tableau ci-dessus, les
tranches d'âge sont équitablement réparties dans les
entreprises étudiées à hauteur de 35.7% (soit 10
entreprises sur les 28 prospectées) et relativement réparties
à hauteur de 42.9% (soit 12 entreprises sur 28). Ce qui, comparativement
aux deux premiers indicateurs de parité des emplois, n'est pas mal comme
résultat, même si le problème reste posé dans six
entreprises (21.4% de notre échantillon).
II- 1 - 1 - 4 - Qualification des conditions de
travail, d'hygiène et de sécurité
Nous dirons que les conditions de travail au sein des
entreprises prospectées sont admirables. En effet, elles sont bonnes
à hauteur de 57.1%, très bonnes à hauteur de 21.4% et
assez bonnes à hauteur de 21.4%. Ainsi, nous recommandons aux
entreprises au sein desquelles les conditions de travail sont assez bonnes (bas
de l'échelle), de fournir plus d'efforts afin d'améliorer les
conditions de travail de leurs employés.
Aussi, les conditions d'hygiène, telles que le montre
le tableau ci-dessous, sont pour l'essentiel bonnes (50.0%) et assez bonnes
(50.0%). Le caractère admirable de ce résultat devrait tout de
même interpeler les entreprises dont les conditions d'hygiène ne
sont qu'assez bonnes, à faire d'avantage.
Enfin, les conditions de sécurité telles que
décrites ci-dessous, présentent les meilleurs résultats,
comparativement aux deux premiers indicateurs, dans le mesure où les
entreprises y parviennent à toucher le sommet de l'échelle. En
effet, les conditions de sécurité sont très bonnes dans
28.6% des entreprises prospectées (soit, 8 entreprises sur 28), bonnes
dans 46.4% d'entre elles (13 entreprises sur 28) et assez bonnes dans 25.0%
d'entre elles (soit 7 sur 28).
II- 1 - 1 - 5 - Profil de Carrière et
rémunération du personnel
Le profil de carrière est constitué de
l'ensemble des échelons que peut gravir un employé dans une
entreprise, des postes inférieurs aux postes les plus
élevés en responsabilité, tout au long de sa
carrière. Il peut être dû à l'ancienneté ou
à la compétence. À la question de savoir si elles
poursuivent un profil de carrière, les entreprises interrogées
nous ont donné les résultats synthétisés dans le
tableau ci-dessous :
Il en ressort que 67.9% des entreprises prospectées
suivent désormais un profil de carrière. Ces entreprises
reconnaissent d'ailleurs qu'elles ont innové dans ce sens par rapport
aux années antérieures où les résultats auraient
été mitigés.
Nous avons également interrogé les responsables
rencontrés sur la justesse et la régularité des salaires
de leurs employés. Les résultats sont
généralisés dans les deux tableaux ci-dessous :
A cet effet, les rémunérations sont
jugées justes dans 78.6% des entreprises prospectées (soit 22
entreprises sur 28). Elles sont également régulières dans
64.3% d'entre elles (soit 18 entreprises sur 28).
Nous dirons que les résultats sur les
rémunérations sont les moins satisfaisants qui soient, car on
observe un taux de régularité plus faible que le taux de
justesse. Nous interpellons donc les entreprises concernées, à
rémunérer convenablement leurs employés et avec une
fréquence relativement constante, car par-dessus tout, le facteur
pécuniaire reste l'une des principales sources de motivation du
personnel.
II - 1 - 2 - Responsabilité sociale des
entreprises envers les tiers
Il s'agit ici d'apprécier la responsabilité
sociétale des entreprises envers les deux grands groupes de PP que sont
les clients et les fournisseurs.
II - 1 - 2 - 1 - Appréciation de la
responsabilité sociale envers les clients
Pour appréhender cet item, nous avons jugé
nécessaire d'interroger les entreprises sur la régularité
de leurs clients et le respect par elles, des normes de fabrication. Les
résultats sont présentés dans les tableaux
ci-dessous :
En effet, les clients ne sont réguliers et croissants
que dans 28.6% des entreprises touchées (soit 8 entreprises sur 28). Et
le sont moyennement dans 71.4% des entreprises touchées. Ce qui revient
à dire que beaucoup d'efforts restent à fournir dans ces
entreprises. Notamment en respectant d'avantage les normes de fabrication.
Le tableau-dessus montre que 35.7% des entreprises ne
respectent pas toujours les normes de fabrications. Ce qui pourrait, en partie,
expliquer le résultat mitigé de la régularité et de
la croissance des clients.
II - 1 - 2 - 2 - Appréciation de la
responsabilité sociale envers les fournisseurs
Pour ce faire, nous avons demandé aux entreprises
concernées, si elle respectent les délais des fournisseurs. Il en
résulte que :
Seulement 53.6% des entreprises prospectées respectent
toujours les délais des fournisseurs, ce qui n'est pas suffisant
lorsqu'on sait que les fournisseurs du secteur industriel sont d'autant plus
exigeants en termes d'échéances, que le montant des transactions
est élevé.
II- 1-3- Appréciation de la
responsabilité environnementale des entreprises prospectées
La responsabilité environnementale de l'entreprise est
la relation que l'entreprise entretien avec son environnement. Il s'agit en
d'autres termes de sa participation dans le développement de la
communauté, de la gestion qu'elle fait de ses déchets, eaux
usées, rejets, bruits et autres nuisances. A cet effet, les responsables
rencontrés ont été interrogés sur leurs engagements
dans le développement de la communauté, et sur la gestion
qu'elles font des déchets, eaux usées et autres nuisances
liées à leurs activités.
II - 1 - 3 - 1 - Implémentation des oeuvres
sociales et développement de la communauté
Le tableau ci-dessous fait état d'un
engagement à 100%, des entreprises prospectées, dans la
réalisation des oeuvres sociales. S'il est vrai que toutes ces
entreprises ne sont pas imprégnées de la même façon,
il convient tout de même d'encourager de telles initiatives.
Le tableau ci-dessous fait également état d'un
engagement à 100%, des entreprises, dans le développement de la
communauté locale. Reste plus qu'à apprécier l'engagement
des entreprises prospectées, dans la lutte contre la pollution.
II - 1 - 3 - 2 - Appréciation de la gestion
des déchets
Il s'agit d'apprécier le degré d'engagement de
la société dans la gestion ou le retraitement de ses nuisances
avant leur rejet dans la nature. Cette gestion est bonne lorsque les
répondants sont tout à fait d'accord ou d'accord, mitigée
lorsqu'ils sont un peu d'accord, et mauvaise lorsqu'ils ne sont pas d'accord.
En effet, 28.6% des responsables rencontrés sont tout
à fait d'accord sur le fait que l'entreprise assure une bonne gestion
des déchets et rejets (soit 8 entreprises sur 28) ; 50% des
responsables rencontrés sont d'accord sur ce point et 21.4% ne le sont
pas.
Autrement dit, la gestion des déchets
est bonne dans 78.6% (28.6% responsables tout à fait d'accord + 50.0%
responsables d'accord). Ce qui n'est pas déplorable comme
résultat. Mais il convient de rappeler qu'en matière de
pollution, les pourcentages, même les plus élevés, ne
représentent pas grand-chose s'il y a des entreprises qui continuent de
polluer. Autrement dit, il faudrait inciter les entreprises qui n'assurent pas
une bonne gestion de leurs déchets, de s'engager fortement à cet
effet.
II - 1 - 3 - 3 - Engagement des entreprises dans la
prévention et la gestion des risques
Environnementaux
Il s'agit ici de savoir si les entreprises ont prévu
dans leurs politiques multiples, une politique de prévention et de
gestion des risques.
En effet, le tableau ci-dessus fait état de 75.0%
entreprises engagées dans la prévention et la gestion des risques
environnementaux (soit 21 entreprises sur 28), contre 25.0% entreprises non
encore engagées.
La traduction managériale de ce résultat est
que, au Cameroun, 75% des entreprises industrielles sont engagées dans
une RSE proactive contre 25% engagées dans une
RSE réactive.
Reste plus qu'à ressortir les
spécificités et les logiques de la RSE au Cameroun, afin de
concevoir un modèle de responsabilité sociale, qui serait propre
aux entreprises camerounaises.
II - 3 - Spécificités et Logiques de la
RSE au Cameroun
Les développements qui vont suivre relèvent du
constat selon lequel, toutes les entreprises installées au Cameroun ne
sont pas toutes des entreprises camerounaises. Bon nombres d'entre elles sont
en effet des filiales ou des multinationales dont les activités
menées au Cameroun, sont le reflet de la culture des pays d'origine de
leurs sociétés-mères. C'est la raison pour laquelle, nous
avons voulu que notre échantillon soit constitué à la fois
d'entreprises camerounaises et de multinationales, comme le montre le tableau
ci-dessous :
En effet, notre échantillon est constitué de 28
entreprises dont 16 entreprises camerounaises et 12 multinationales. Il est
donc question d'évaluer l'incidence de la nature de la
propriété sur l'approche ou la dimension de la RSE
appliquée au sein des entreprises.
II - 3 - 1 - Test de l'influence de la nature de la
propriété sur l'approche de RSE
appliquée au Cameroun
Il s'agit en effet d'analyser la relation
qui existe entre la nature de la propriété de l'entreprise, et
l'approche RSE adoptée par cette entreprise. L'objectif étant
d'aboutir à une spécificité pour ce qui est des
entreprises camerounaises. Rappelons à cet effet que, par approche RSE,
on entend la dimension volontaire, légale ou mixte de la RSE.
L'analyse consiste à opérer un
tri-croisé qui s'apparente à une Analyse Factorielle des
Correspondances (AFC) sans toutefois l'être dans la mesure où,
dans ce cas précis, on ne croise pas un groupe de variables à un
autre, mais on croise plutôt :
· Une variable : La nature de la
propriéte
· À un groupe de variables : La
dimension légale, La dimension volontaire et La dimension mixte de la
RSE.
Compte tenu de la petite taille de notre
échantillon, nous retenons un seuil de risque á = 5%. Le
croisement a donné les résultats suivants :
Tableau récapitulatif
Le tableau récapitulatif ci-dessus fait état
d'aucune case manquante, notre échantillon y est valide à 100% et
à tous les niveaux. Nous allons tour à tour, présenter les
résultats entre la nature de la propriété et la dimension
réglementaire de la RSE, la nature de la propriété et la
dimension volontariste, et enfin la nature de la propriété et
l'approche mixte de la RSE.
II - 3 - 1 - 1 - Nature de la propriété et
Respect de la réglementation
À partir du tableau ci-dessus, on peut déduire les
interprétations suivantes :
- Parmi les 19 entreprises qui opté pour une
démarche réglementaire de la RSE, 73.7% sont des entreprises
camerounaises (soit 14 entreprises sur 19)
- Parmi les 9 entreprises qui n'on pas opté pour une
démarche réglementaire de la RSE, 77.8% sont des
multinationales
La valeur du coefficient de contingence, telle que
déterminée dans le tableau ci-dessous, est positive et proche de
0.5. De plus, le seuil asymptotique de signification y est
déterminé et d'une valeur de 0.010 largement inférieur au
seuil de signification á = 0.05. Donc, notre test est statistiquement
valide. Autrement dit, l'approche réglementaire est majoritairement
pratiquée par les entreprises camerounaises.
II - 3 - 1 - 2 - Nature de la propriété et
Approche Volontariste de la RSE
À partir du tableau de contingence
ci-dessus, on peut dire que :
- 77.8% des entreprises qui pratiquent volontairement la RSE
sont des multinationales (soit 7 entreprises sur 9) ;
- De manière analogue, les 73.7% des entreprises qui
n'optent pas pour une approche volontariste de la RSE sont des entreprises
camerounaises.
Ce résultat est également confirmé par un
seuil asymptotique de signification de 0.010, largement inférieur
à á = 0.05. Nous pouvons donc conclure sans risque de nous
tromper que la dimension volontariste de la RSE est beaucoup plus
employée par les multinationales.
II - 3 - 1 - 3 - Nature de la propriété et
Démarche RSE mixte
À partir du tableau ci-dessus, on
peut conclure que :
- Parmi les 28 entreprises qui constituées notre
échantillon, 20 entreprises adoptent une démarche mixte dans
leurs pratiques de responsabilité sociale. Les huit (0) autres ne
pratiquant la RSE que soit de manière uniquement volontaire, soit
uniquement parce qu'elle est régie par des lois.
- Parmi les 20 entreprises qui ont opté pour une
démarche RSE mixte, 75.0% sont des entreprises camerounaises, soit 15
entreprises sur 20 ;
- Parmi les 20 entreprises qui ont opté pour une
démarche RSE mixte, 25.0% sont des multinationales, soit 05 entreprises
sur 20 ;
Les résultats ci-dessus nous sont confirmés par
le tableau ci-dessous qui nous donne un coefficient de contingence de 0.496, et
un seuil asymptotique de signification de 0.003, largement au seuil de risque
á = 0.05.
On peut donc conclure que, au Cameroun, l'approche de la RSE
est principalement une approche mixte qui revêt à la fois les
aspects volontaristes et les aspects mixtes.
Toutefois, il existe un dernier volet de la RSE presque
toujours négligé :
II - 3 - 2 - Le Conventionnalisme : sortir de
l'ombre les pratiques quotidiennes de RSE
L'approche conventionnaliste tire son
origine du fait que toutes les activités de l'entreprise ne sauraient
être régies par des lois, des règlements ou des contrats.
Certaines activités des entreprises passent inaperçues, parce que
non susceptibles d'attirer l'attention, ou bien parce qu'elles sont
analysées dans un autre sens. En interne, le fait pour une entreprise
d'affilier ses employés à la CNPS ou en externe, de marquer la
date d'expiration des produits sur leurs emballages, constituent autant
d'activités RSE que les entreprises mènent et qui passent
généralement inaperçues.
En effet, le tableau ci-dessus fait état de 71.4%
entreprises qui ont affilié leurs employés à la CNPS. les
affiliations à la CNPS, généralement
considérées comme normales pour une entreprise, sont autant
d'activités qui relèvent du domaine du conventionnel.
Il en est de même pour les entreprises qui marquent les
dates d'expirations sur leurs produits et dont de tels actes passent souvent
inaperçues, comme le montre le tableau ci-dessus. Comme autres
activités de RSE qui relèvent du conventionnel, on peut citer les
réductions sur achats, les cérémonies d'arbres de
noël, les mentions par la Citabac ou les sociétés
brassicoles, du caractère nocif de leurs produits.
C'est dire que le modèle conventionnel est un
modèle à part entière qu'il faut désormais aborder
dans les préoccupations RSE de l'entreprise.
Les développements ci-dessus nous ont permis de
concevoir et de construire un modèle de RSE applicable au Cameroun.
II - 3 - 3 - Modèle de Responsabilité
Sociale des Entreprises au Cameroun
Le modèle ci-dessous constitue le schéma de
synthèse des résultats de notre recherche. Il nous permet
d'illustrer schématiquement, les pratiques de responsabilité
sociale des entreprises au Cameroun.
La lecture de ce modèle nous permet d'arriver à
la conclusion selon laquelle, les pratiques de responsabilité sociale
des entreprises sont à dominante mixtes, mais avec quelques exceptions
de volontarisme pur, propres aux entreprises filiales, et de dimensions
légales pures, propres aux entreprises camerounaises. En plus, ce
modèle a ceci de particulier qu'il reconnait en toute entreprise, une
dimension conventionnelle de la RSE omni présente qui relève de
l'implicite et qui rentre dans les pratiques quotidiennes des entreprises.
MODÈLE DE RESPONSABILITÉ SOCIALE
DES
ENTREPRISES AU CAMEROUN
APPROCHE MIXTE DE LA RSE
Légal seulement
Volontarisme seulement
Volontarisme Légal
Conventionnalisme
En sommes, le présent chapitre nous a permis de
découvrir les réalités de la responsabilité sociale
des entreprises au Cameroun. On a ainsi pu remarquer que toues les entreprises
situées au Cameroun pratiquent la responsabilité sociale,
même à leur insu (approche conventionnaliste de la RSE). Aussi les
activités de RSE au Cameroun revêtent un caractère mixte,
à la fois institutionnel et volontaire. Mais avec quelques exceptions
d'entreprises qui ne mènent leurs activités que dans une
perspective purement volontariste (les multinationales) tandis que d'autres ne
là mènent que parce que régie et régulée par
la loi (entreprises nationales). Parmi les entreprises qui ont optées
pour une démarche RSE mixte, 75 % sont des entreprises camerounaises et
25 % des multinationales. Ceci a d'ailleurs été attribué
au fait que les multinationales, conformément à la culture de
leurs sociétés-mères, pratiquent la RSE de manière
volontaire.
Ainsi, le présent travail de recherche nous a permis de
découvrir des faits allant au-delà de ceux que nous escomptions
découvrir. Nous ferons donc, en guise de conclusion
générale, un briefing de nos préoccupations et des
enseignements tirés au terme du présent travail de recherche.
CONCLUSION GÉNÉRALE
Cette recherche s'interrogeait au départ sur les
réalités des activités de responsabilité sociale
des entreprises au Cameroun. Elle a donné lieu à une analyse qui
a abouti à la caractérisation des activités de RSE au
Cameroun en quatre approches dont une principale et trois auxiliaires. Ce
résultat est le fruit du concours conjoint d'une méthode
qualitative (l'analyse factorielle du contenu) et d'une méthode
quantitative (tri à plat et tris croisés). La seconde
méthode venant confirmer les résultats de la première.
La thématique de ce travail est la
responsabilité sociale des entreprises au Cameroun. La
problématique que nous avons particulièrement traitée est
celle des réalités des activités extra économiques
des entreprises situées au Cameroun. Cette préoccupation nous a
amené à retenir comme objectif principal, la
caractérisation des pratiques de RSE au Cameroun.
Pour y parvenir, nous avons effectué une étude
exploratoire auprès de trente-deux (32) entreprises industrielles de la
place, après avoir obtenus un entretien à la
délégation régionale de l'environnement et de la
protection de la nature. Entretien au bout duquel nous avons constaté
à notre grande surprise, une forte implication du MINEF dans la lutte
contre la pollution. À l'issu de nos différentes analyses, on
abouti à des résultats propres au système
économique camerounais souvent qualifié d'économie
mixte.
En effet, on a abouti au résultat selon lequel, les
activités de responsabilité sociale des entreprises au Cameroun
présentent un caractère mixte c'est-à-dire, une
combinaison du volontariat et du légal. Ce résultat nous a permis
de concevoir et construire le modèle de la page 108, modèle que
nous proposons de généraliser à l'ensemble des entreprises
camerounaises du secteur industriel.
De plus nous nous sommes rendu compte que le
dénominateur commun à toutes les pratiques de
responsabilité sociale identifiées est la composante
économique. En effet, nombreuses sont les entreprises de la place, qui
pensent que la RSE est un outil stratégique qui assure la
compétitivité et la rentabilité de l'entreprise dans le
moyen et long terme. Mais il convient tout de même de rappeler que les
responsables rencontrés nous ont fait comprendre qu'ils rencontrent de
sérieuses difficultés tant en externe qu'en externe lors de la
mise en oeuvre de leurs démarches RSE.
En interne, on les difficultés sont relatives à
la mise en place d'une culture d'entreprise. En effet, dans certaines
entreprises, nombreux sont les employés qui refusent de s'arrimer aux
prescriptions établies par la direction. C'est ainsi qu'on peur
témoigner l'entrée en atelier de certains ouvriers, sans mesures
de sécurités, la raison avancées étant que les
vêtements et autres casquettes de protection empêchent
l'exécution rapide du travail. On assiste même dans certaines
entreprises de la place, au refus catégorique de la part de certains
employés de s'affilier à la CNPS. C'est dire qu'en interne, tout
réside dans la culture individuelle de chaque employé qu'il faut
concilier à la culture d'entreprise, car « la
responsabilité sociale de l'entreprise c'est aussi la somme des
responsabilités individuelles des personnes qui là
constitue ».
En externe, les difficultés sont principalement
relatives à l'absence de moyens techniques et financiers permettant soit
d'évacuer les déchets, soit de les traiter en vue de leur
recyclage. Mais, qu'elle soit appliquée en interne ou externe, la
responsabilité sociale de l'entreprise doit affronter de nouveaux
défis. Ces défis sont relatifs à :
· La règle implicite des
affaires qui veut que les
cadres dirigeants s'empêchent de s'impliquer dans une activité qui
pourrait réduire les profits ;
· Pour certains, telle ou telle des
parties prenantes
peut se trouver en position dominante et privilégier ses objectifs
propres.
Dans cette perspective, les résultats de la
présente recherche peuvent être élargis à un
échantillon plus grand et plus représentatif de la population des
entreprises industrielles situées au Cameroun. C'est dans cet ordre
d'idées que nous pourrons par la suite, envisager, comme c'est
déjà le cas sous d'autres cieux, une étude visant à
établir la relation entre RSE et performance.
Enfin, compte tenu du fait que la RSE est un
phénomène très peu connu, bien que largement
pratiqué, nous proposons aux responsables des programmes
académiques d'insérer la Responsabilité Sociale des
Entreprises parmi leurs différents programmes académiques afin de
favoriser une meilleure compréhension du problème. Aux dirigeants
d'entreprises, nous proposons de mettre sur pied, au sein de leurs structures,
des programmes de formation sociétale en vue d'inculquer la culture
d'entreprise à leurs différents employés qui semblent
jusqu'ici privilégier leurs cultures individuelles au détriment
de la culture d'entreprise.
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* 2 Freeman (1984) accorde la
paternité de la notion de stakeholder à une note interne du
Stanford Research Institute (SRI, organisme de recherche et de conseil) de
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* 4 Eric PERSAIS (2007), La
RSE est-elle une question de convention ? Lavoisier, Paris, p 79 -
95.
* 5Les auteurs font
référence pour cette typologie à A. Savage et A. J.
Cataldo : « a multicase investigation of environmental
legitimation in annual reports », research paper, 1993
* 6 Capron et
Quairel-Lanoizelée (2004) illustrent ce type d'intégration par
les politiques de développement d'éco-conception (pneus par
Michelin par exemple).
* 7 Conférence des
Nations Unies pour le Commerce et le Développement
* 8 L'exemplarité
consiste à partir des cas d'entreprises précis qui ont fait
preuve de succès en matière de rentabilité dans leurs
démarches RSE et d'inciter leur généralisation pour en
ressortir des modèles et des grilles applicables à toute
entreprise.
* 9 Mouvement des Entreprises de
France
* 10 La norme ISO 26000 est une
norme ISO en cours d'élaboration. Elle portera sur la
responsabilité sociétale des organisations et devrait être
publiée en 2010.
* 11 Patricia Crifo et
Jean-Pierre Ponssard (2008), RSE et/ou performance financière :
points de repères et pistes de recherche, Laboratoire
d'économétrie, Ecole Polytechnique.
* 12 Le Balanced Scorecard
(Kaplan et Norton, 1996) répond au double objectif de gérer les
demandes des différentes parties prenantes de l'entreprise et traduire
les stratégies en actions opérationnelles. La notion de
sustainable balanced scorecard est une extension `naturelle' du Balanced
Scorecard dans la mesure où ce concept reste ouvert à
l'intégration de toutes les perspectives ou parties prenantes
pertinentes, notamment la perspective environnementale et sociale. La
référence à la RSE (ou à la citoyenneté
d'entreprise) y est d'ailleurs explicite mais il faut attendre le début
des années 2000 pour qu'une attention plus importante lui soit
réellement consacrée (Zingales, O'Rourke et Hockerts, 2002).
* 13 Barthélemy B.
(2000), Gestion des risques, Ed les Organisations, p 15
* 14 Source : Notre
étude sur le terrain
* 15 Société
Nationale des Raffineries
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