5.6- Contraintes et limites liées à la
gestion des ressources en eau
Les contraintes et les limites liées à la gestion
des ressources en eau dans la commune de Boukombé sont de plusieurs
ordres.
5.6.1- Contraintes liées à la gestion des
ressources en eau 5.6.1.1- Contraintes liées au climat et à l'eau
de pluie
La saisonnalité du climat pose le problème de la
répartition des ressources en eau dans le temps :
- surabondance en saison des pluies avec des inondations qui
détruisent les cultures, les maisons, les routes ~etc.,
- pénurie en saison sèche avec de longs parcours
et attroupement autour des points d'eau résiduels,
- les toitures des habitations sont pour la plupart en paille et
non en tôle ; l'eau de pluies ne peut donc pas être recueillie
correctement et ne peut être propre avec la paille,
- l'érosion hydrique entretenue par les fortes pentes et
la destruction des végétaux au profit des champs constitue des
contraintes pertinentes dans la commune de Boukombé,
- la profondeur trop grande des nappes d'eau souterraines, le
problème de pendage des couches aquifères. Comme exemple une
bonne couche de nappe aquifère a été repérée
dans un village de Manta à l'Est, le forage a été
à sec pour la simple raison que cette couche est inclinée vers
l'Ouest et son eau est accumulée vers cette extrémité dans
un autre village.
- les cours d'eau connaissent un écoulement
régulier en saison humide avec l'alimentation des nappes souterraines
qui peuvent couler par des sources de résurgence. Par contre, en
période sèche, tous les cours d'eau s'assèchent en
laissant dans leur lit quelques mares et marigots.
5.6.1.2- Contraintes liées aux ressources en eau
de surface et souterraine
Elles sont multiples et diverses :
- la distance à parcourir pour atteindre les points
d'eau est un problème majeur pour les populations de
Boukombé. Cette situation est due à deux
phénomènes majeurs : la dispersion des habitations et la
répartition naturellement aléatoire des nappes d'eau souterraine
et des cours d'eau. Le tableau XXXI ci-dessous montre la répartition des
distances par types de ressource en eau.
Tableau XXXI : Distances pour
l'accessibilité des ressources en eau
Ressource en eau
|
Proche (0 à 100 m)
|
Loin (100 à 500 m)
|
Trop loin (plus 500 m)
|
AEV
|
100%
|
0%
|
0%
|
Pompe-forage
|
67%
|
18%
|
16%
|
Puits moderne
|
55%
|
35%
|
11%
|
Puits traditionnel
|
84%
|
11%
|
5%
|
Retenue d'eau
|
56%
|
44%
|
0%
|
Cours d'eau
|
59%
|
37%
|
4%
|
Source
|
64%
|
29%
|
7%
|
Marigot
|
57%
|
35%
|
8%
|
Mare
|
67%
|
22%
|
11%
|
|
Source : Résultat d'enquête, 2003
Mis à part les pompes, les puits modernes et les mares
qui sont à distance d'accessibilité 16% et 11% trop loin (plus de
500 m), le reste des ressources d'approvisionnement en eau est à
distance d'accessibilité proche de 0 à 100 m et loin de 100
à 500 m.
- les voies d'accès surtout celles qui mènent
vers les cours et plans d'eau sont souvent couvertes d'herbe et jonchées
de cailloux et de trou. Le tableau XXXII cidessous montre la répartition
des états des voies d'accès par types de ressource en eau.
Tableau XXXII : Répartition des
états de voies d'accès aux ressources en eau.
Ressources en eau
|
Bonnes
|
Passables
|
Mauvaises
|
AEV
|
100%
|
0%
|
0%
|
Pompe-forage
|
62%
|
33%
|
4%
|
Puits moderne
|
48%
|
38%
|
14%
|
Puits traditionnel
|
58%
|
18%
|
24%
|
Barrage
|
36%
|
57%
|
7%
|
Cours d'eau
|
24%
|
49%
|
27%
|
Source
|
26%
|
48%
|
26%
|
Marigot
|
18%
|
63%
|
20%
|
Mare
|
24%
|
65%
|
12%
|
|
Source : Résultat d'enquête, 2003
Il en résulte du tableau XXXII que seul l'adduction
d'eau villageoise a une bonne accessibilité en matière de voie
d'accès ensuite viennent les pompes-forages et puits traditionnels.
- l'assèchement ou le tarissement précoce de
l'eau des cours et plan d'eau est aussi un problème préoccupant
les populations de Boukombé. Le tableau ci-dessous illustre ces
préoccupations par type de ressources en eau dans la commune de
Boukombé.
Tableau XXXIII : Caractères des ressources
en eau selon le type
|
Ne tarit pas / ne s'assèche pas du tout
|
Tarit / s'assèche par endroit
|
S'assèche entièrement
|
AEV
|
100%
|
|
0%
|
|
0%
|
|
Pompe-forage
|
|
100%
|
|
0%
|
|
0%
|
Puits moderne
|
|
67%
|
|
32%
|
|
2%
|
Puits traditionnel
|
|
34%
|
|
58%
|
|
8%
|
Barrage
|
|
28%
|
|
22%
|
|
50%
|
Cours d'eau
|
|
5%
|
|
41%
|
|
54%
|
Source
|
|
47%
|
|
26%
|
|
26%
|
Marigot
|
|
50%
|
|
20%
|
|
30%
|
Mare
|
|
84%
|
|
16%
|
|
0%
|
|
Source : Résultat d'enquête, 2003
Il ressort de l'analyse du tableau XXXIII que l'adduction
d'eau villageoise (AEV), les pompes, les puits modernes et les mares ne
tarissent pas ou résistent à l'assèchement. Quant aux
cours d'eau, les retenues d'eau appelées barrages et les puits
traditionnels s'assèchent en
majorité rapidement à la fin des pluies. Certains
des marigots et sources résistent dans les zones oü ils sont mieux
aménagés.
5.6.1.3- Contraintes liées à la
topographie et à la géologie
La morphologie du territoire de la commune de
Boukombé décrite plus haut constitue une contrainte
naturelle à la disponibilité des ressources en eau. En effet le
relief accidenté et incliné ne donne aucune chance à l'eau
de stagner et de s'infiltrer même s'il pleut abondamment. Il en
résulte une forte érosion ; le vidage par écoulement des
cours d'eau vers le sud-est et leur assèchement précoce juste
après les pluies.
- La morphologie particulière de certaines zones de la
commune rend difficile l'acheminement de l'eau à la maison (zone
moutonnée : kounawhongou, koutagou,
kounayingou et flanc de montagne : Koussoukouangou centre,
Kouwéntakouangou).
- les formations géologiques de la commune de
Boukombé sont caractérisées par des roches
métamorphiques, des schistes et des quartzites. Ces roches dures se
décomposent peu et ne favorisent pas l'infiltration.
- la nature des roches rend difficile le creusement des puits
(surtout traditionnels qui se fait sans utilisation de machines). Ceux qui sont
facilement faits dans les altérites voient leurs parois
s'ébouler en saison de pluie, faute de buses ou leur fond
asséché en saison sèche.
5.6.1.4- Contraintes technologiques et
sociales
Dans la société traditionnelle
otammari comme en Afrique, chercher de l'eau à la source, au
marigot, mare ou autre point d'eau est toujours l'une des nombreuses
tâches réservées aux femmes.
- L'approvisionnement traditionnelle de l'eau consiste à
(aller au marigot ou à la source) recueillir de l'eau avec un canari
(Didou en Ditammari).
- En saison pluvieuse, les points d'eau se multiplient. Mais
dès l'installation de la saison sèche, commence la pénurie
d'eau avec attroupements autour des points d'eau qui ont encore de l'eau; et
quand la pluie tarde à venir plusieurs tarissent et les femmes sont
obligées de parcourir de grandes distances pour chercher une eau parfois
de mauvaise qualité.
- En milieu otammari en général et
à Boukombé en particulier, un point d'eau (mare ou marigot) qui
abrite un "fétiche" ou qui est consacré aux rites coutumiers est
interdit d'y accéder pour un quelconque usage domestique. C'est le cas
de Taworiminta18, mare sacrée dans laquelle les
jeunes filles ou garçons en cérémonie de dikuntri
ou difëni19 se baignent à une étape
donnée de la cérémonie pour être béni(e)s et
purifié(e)s.
- Il n'est pas rare d'entendre dire à l'endroit de
certains marigots, mares et sources qui ne tarissent pas, que ces points d'eau
n'aiment pas "de récipient métallique", "de canari neuf" ou "d'y
aller faire la lessive".
- Une femme en menstrues ne doit pas aller chercher de l'eau au
marigot, à la mare ou à la source sous prétexte qu'elle
perturberait les dieux de ces points d'eau.
5.6.2- Les maladies liées à l'eau
à Boukombé
On distingue deux catégories de maladies à savoir
les maladies dues à l'eau consommée et les maladies dues à
la cohabitation de l'eau avec les habitations.
18 Taworiminta est une mare que
possède chaque territoire d'un peuple de même dialectes et faisant
en commun les cérémonies. Ce n'est pas une seule mare commune
à tout le peuple Otammari.
19 dikuntri et difëni sont des
cérémonies consacrées aux jeunes filles (pour
dikuntri) et jeunes garçons (pour difëni) et qui sert
de classification en classes d'âges ou de générations en
pays Otammari.
5.6.2.1- Les maladies dues à l'eau
consommée
Il s'agit des affections gastro-intestinales et
diarrhées dues aux microbes pathogènes introduits dans l'eau par
manque d'hygiène. Le tableau XXXIV récapitule les cas de maladies
hydriques dues à l'eau consommée dans la commune de
Boukombé.
Tableau XXXIV : Nombre de cas de maladies
hydriques dues à l'eau consommée à Boukombé en
2001
Maladies
|
Nombre de cas en 2001
|
Diarrhée (Choléra, autres diarrhées)
|
1
|
181
|
Autres affections gastro-intestinales (Parasitose intestinale,
dysenterie, bilharziose)
|
1
|
627
|
Total
|
2
|
808
|
|
Source : MSP /SNIGS, Cotonou 2003
5.6.2.2- Les maladies dues à la cohabitation de
l'eau avec les habitations
Il s'agit du paludisme et des affections oculaires dus aux
piqûres des insectes vivant dans les endroits humides (cours d'eau,
marigots, mare, bas-fond). Le tableau 35 récapitule les cas de maladies
hydriques dues à la cohabitation de l'eau avec les habitations.
Tableau XXXV : Nombre de cas de maladies
hydriques dues à la cohabitation de l'eau
avec les habitations à Boukombé en
2001
Maladies
|
Nombre de cas en 2001
|
Paludisme
|
5
|
588
|
Affection oculaires (Conjonctivite, onchocercose, autres
affections oculaires)
|
|
242
|
Total
|
5
|
830
|
|
Source : MSP /SNIGS, Cotonou 2003
Ces différentes catégories de maladies ont
été citées par les populations de la commune de
Boukombé. Le tableau 36 récapitule la fréquence de
réponses des populations rurales par maladie.
Tableau XXXVI : Etude fréquentielle des
maladies à Boukombé
Maladies
|
Pourcentages de réponses
|
Diarrhée
|
26%
|
Maux de ventre
|
38%
|
Maux d'yeux
|
14%
|
Bilharziose
|
14%
|
Ver de guinée
|
9%
|
|
Source : Résultats d'enquête 2003
Le tableau XXXVI montre que les populations rurales de
Boukombé distinguent la diarrhée, la bilharziose mais regroupent
les affections gastro-intestinales sous l'appellation "maux de ventre" et les
affections oculaires "maux d'yeux". Le paludisme n'est pas évoqué
par la population parce qu'elle ne perçoit pas la relation de cette
maladie à l'eau. L'ulcère de burili (ver de guinée) est
évoqué rarement et est souvent rapporté au
passé.
|