Année universitaire 2011-2012
Université de Lyon
Université Lumière Lyon 2
Institut des Sciences et des Pratiques
d'Éducation et de Formation.
Département de Sciences de
l'éducation.
Impacts des échanges universitaires
internationaux sur les étudiants de
l'Université
Lumière Lyon 2 : cap sur le Brésil
Mémoire de Master2 Recherche
Sciences de l'éducation et de la
formation
Nom de l'étudiant : Directeur du mémoire
:
Pourhadi Thibault Professeur Jean-Claude
Régnier
N° d'étudiant : Séminaire
:
5112093 Apprentissages, Didactiques et
Interactions
Résumé
Cette recherche se propose de situer les effets des
échanges universitaires internationaux chez trois étudiantes de
l'Université Lumière Lyon 2 séjournant au Brésil
pour des durées de deux à six mois. Notre objectif est d'explorer
les liens qu'entretiennent les transformations socioculturelles des
étudiantes sur place avec leur niveau de compétence
interculturelle. Pour mener à bien ce travail, nous nous appuyons en
premier lieu sur de nombreux travaux issus de la littérature
scientifique pour clarifier le concept de transformations socioculturelles et
celui de compétence interculturelle. Ensuite, nous présentons
notre méthodologie. Initialement, nous avions prévu d'interroger
les participants avant leur départ pour le Brésil puis à
leur retour en France. Cependant, en raison des difficultés
rencontrées lors de la composition de l'échantillon, ce suivi n'a
pu être mis en place. En conséquence, les données sur
lesquelles repose notre étude sont rétrospectives. Pour les
recueillir, nous avons d'abord administré au retour de nos trois
étudiantes en France une série de dix questionnaires
présentés sous forme d'auto-évaluation avant de conduire
un entretien semi-dirigé avec chacune d'elles. Notre procédure de
recueil de données nous a ainsi fourni une large quantité
d'informations sur la base desquelles de multiples facteurs de transformations
et d'évolution ont pu être analysés à la
lumière de notre cadre théorique, puis recoupés. À
l'issue de notre étude, et par delà les limites de notre
méthodologie, nous constatons qu'en dépit de
caractéristiques uniques à chaque séjour tous ont
été un véritable agent de changement chez les
étudiantes. Il ressort également que la nature des
expériences vécues sur place a affecté positivement le
développement respectif de la compétence interculturelle chez
l'ensemble des participantes.
Mots clés : Transformations socioculturelles,
Compétence interculturelle, Études intégrées,
Échanges universitaires internationaux, Séjour d'étude
à l'étranger, Interculturalité
Abstract
The scientific literature shows that the sociocultural
transformations and intercultural competence of international students have
both been widely investigated the academia, but rarely linked together. The
present research explores this relationship in order to determine how the level
of sociocultural transformations experienced abroad influences the level of
intercultural competence in a group of three international students. The
subjects are French female students spending up to six months in Brazil. All of
them were asked to fill out a series of questionnaires upon return. The items
aimed at obtaining pertinent information in areas pertaining to sociocultural
transformations and intercultural competence, including communicative
competence, cultural distance, intercultural sensitivity, social capital,
acculturation orientations of host society, social support, academic adjustment
and acculturative stress. Most often, answers were rated on a 5-point
Likert-scale format. Then, based on the results, interviews were conducted to
further investigate students' experience abroad, elicit their changes and
pinpoint pivotal factors. It is expected that this study will shed greater
light on how key sociocultural components affect the construction of students'
intercultural competence.
Key words : Sociocultural transformations, Intercultural
competence, Study-abroad programs, International exchange programs,
Interculturality
Remerciements
Je remercie mon directeur de mémoire, M. Jean-Claude
Régnier, pour m'avoir offert l'opportunité de mener à bien
ce projet.
Je souhaite également remercier chaleureusement les
étudiantes qui ont accepté de participer à cette
étude pour la force de leur engagement.
Introduction
Aujourd'hui, les échanges universitaires
internationaux, ou programmes d'études intégrées, sont une
pratique largement répandue. D'ailleurs, depuis plusieurs années,
les partenariats internationaux entre universités sont en pleine
expansion et la pratique d'échange international dans ses diverses
modalités tend à prendre une place croissante comme
phénomène de société. À l'aide de quelques
chiffres, illustrons ceci à l'échelle mondiale, puis à
l'échelle nationale, et enfin à l'échelle locale.
· En 2009, on comptait 3 324 871 étudiants
internationaux dans le monde. Ce nombre a augmenté de 31,3% depuis 2005
(CampusFrance, 2011).
· En France, nous avons accueilli plus de 280 000
étudiants étrangers en 2010-2011 dont 77% étaient inscrits
à l'université. Ces étudiants étrangers
représentaient plus de 10% du total des étudiants et plus de 40%
du total des doctorants (CampusFrance, 2011).
En ce qui concerne la mobilité sortante, près de
75 000 étudiants français sont partis étudier à
l'étranger en 2010-2011 (CampusFrance, 2011).
Notons également que la mobilité sortante
(+7,7%) et la mobilité entrante (+5,1) sont toutes deux en progression
depuis 2005 (CampusFrance, 2011).
· À l'Université Lumière Lyon 2 en
particulier, en 2011-2012, nous comptabilisions 523 accords d'échanges
avec 337 établissements partenaires dans 63 pays. La mobilité
étudiante permettait au total à un millier d'étudiants
inscrits dans notre établissement de se rendre à
l'étranger pour leurs études (Europe, hors Europe et stage
inclus) (Université Lumière Lyon 2, 2012).
En 2012-2013, le nombre d'accords d'échanges,
d'établissements partenaires et de pays disponibles est en augmentation
par rapport à l'année précédente.
L'université comptabilise désormais 581 accords d'échanges
avec 340 établissements partenaires dans 64 pays. Ce sont plus de 680
étudiants inscrits à l'Université Lumière Lyon 2
(hors stages cette fois) qui auront l'opportunité de séjourner
à l'étranger dans le cadre de leurs études
(Université Lumière Lyon 2, 2012).
Soulignons que ces chiffres traduisent une augmentation de la
mobilité internationale des étudiants inscrits à
l'Université Lumière Lyon 2 de 25% sur les cinq dernières
années (Université Lumière Lyon 2, 2012).
D'autre part, notons qu'une étude de la Commission
Européenne définit la mobilité internationale
comme
l'un des indicateurs de la performance des politiques nationales en
matière de recherche
(European Commission, 2002), et remarquons que la plupart des
universités et des établissements d'enseignement supérieur
ont tendance à contextualiser la pratique de l'échange
international au niveau institutionnel en incluant dans leurs missions
d'éducation un aspect ayant trait à la coopération
internationale, comme un signe d'ouverture sur le monde. C'est notamment le cas
de l'Université Lumière Lyon 2. Afin de l'illustrer, citons pour
partie l'article premier des missions de notre établissement :
« L'université Lumière Lyon 2 a pour
missions la formation initiale, la formation continue, la recherche et la
diffusion des connaissances dans les domaines de formation suivants : Art
Lettres Langues, Sciences Humaines et Sociales, Droit Economie Gestion.
Hautement attachée à sa mission de service public, elle affirme
sa vocation professionnelle et sa contribution au développement
culturel, social et économique. Elle met en oeuvre des programmes
d'échanges au titre de la coopération internationale et assure
l'accueil et la formation des étudiants étrangers »
;
« dans le cadre de ses attributions et de la
concertation conduite avec ses partenaires de l'Université de Lyon et
les universités étrangères partenaires, elle arrête
le nombre et la nature des formations qu'elle dispense, organise les
enseignements et les sanctionne par des titres et des diplômes
» ;
« Elle a pour mission la promotion et le
développement des Sciences Humaines et Sociales dans tous les champs de
leur production et de leur diffusion, au niveau national et international
».
(Université Lumière Lyon 2, 2012).
Par conséquent, au vu de la popularité des
programmes d'études intégrées, il était presque un
devoir d'explorer leur pratique dans notre université et leurs effets
sur les étudiants qui y participent.
CADRE THEORIQUE
Dans cette partie, nous fournirons certains
éléments de contextualisation de notre étude. Puis, nous
éclaircirons les principaux concepts qui la sous-tendent avant de
définir notre problématique.
1. Contexte
Nous allons présenter ici la genèse de nos travaux
et situer notre étude au sein du monde de la recherche.
1.1. Origines des travaux
Ces travaux ont été initiés à
l'invitation de mon directeur de mémoire, M. Régnier, à me
pencher sur la thématique des échanges universitaires
internationaux, que j'ai immédiatement acceptée. Mon
intérêt à aborder cette thématique par le biais de
la recherche découle de ma propre expérience de la
mobilité internationale. En effet, j'ai effectué mon tout premier
séjour à l'étranger au cours de l'année scolaire
2009-2010, pendant mon année de Maîtrise que j'ai passée en
Australie. Ce fut là une expérience très enthousiasmante
au cours de laquelle j'eus le sentiment d'évoluer à grands pas,
de changer, que ce soit au niveau de ma personnalité ou de ma vision du
monde notamment. Par la suite, il s'est d'ailleurs avéré que ce
séjour a eu, et continu d'avoir, un impact considérable sur ma
vie en général. Par exemple, d'autres voyages à
l'étranger ont eu lieu depuis, et de nouveaux projets d'expatriation
sont en cours. Par conséquent, travailler sur les échanges
universitaires internationaux représente pour moi un moyen de porter un
regard critique sur les effets d'une telle pratique, de mettre en perspective
ma propre expérience, somme toute récente. Il s'agit
également de promouvoir le séjour d'étude à
l'étranger, tant en renseignant les candidats désireux de
s'engager dans une telle aventure qu'en fournissant des arguments aux
institutions qui les soutiennent.
1.2. Intérêts de la recherche
Comme le dit Russo (2006) « De nos jours, la
mobilité rencontre un fort consensus social. Portée par
l'idéologie ambiante, elle s'investit de significations positives qui
évoquent enrichissement personnel et ouverture socioculturelle. Au
niveau de l'enseignement supérieur, elle recouvre des pratiques qui ont
bénéficié d'une considération valorisante lors de
la dernière décennie. Les représentations qui lui sont
associées renvoient implicitement à des situations
potentiellement formatrices, en même temps qu'elles laissent
présumer des capacités individuelles chez ceux qui ont
décidé de faire cette expérience ».
Assurément, les modalités d'apprentissage par le biais du
séjour à l'étranger ont un
caractère autre de l'apprentissage institutionnalisé
(Murphy-Lejeune, 1993). Pour cet auteur, le séjour contextualise
l'apprentissage de la langue et de la culture d'accueil en tant que pratique
sociale, c'est-à-dire qu'il met en marche un nouveau processus de
socialisation et constitue une expérience totale qui marque
profondément l'individu, qui se retrouve soumis à plusieurs
rituels de passage (passage physique, social, symbolique). Aussi, afin de
répondre aux exigences de son nouvel environnement, l'étudiant en
échange est-il amené à mobiliser des ressources,
ressources qui sont rendues disponibles tant par les espaces de formation que
par des espaces hors formations (Acyoli-Régnier, 2005). Effectivement,
les dialogues, les relations sociales, les interactions font parties
intégrantes de la création de sens et sont vecteurs de savoir
(Jonassen, 1991), constituant pour partie ce que l'on nomme des apprentissages
buissonniers, soit des savoirs acquis en-dehors de l'institution (Certeau,
1993). Pour toutes ces raisons, on peut considérer l'échange
international universitaire comme un catalyseur, comme un processus
d'apprentissage plus vaste que le processus d'apprentissage classique
vécu dans le pays d'origine, entrainant en très peu de temps des
réactions intenses et permettant de vivre énormément
d'expériences. D'ailleurs, la décision de se rendre dans une
institution éducative particulière à un moment
précis de sa vie est porteur de sens pour l'individu au coeur de cette
démarche. En effet, sortir des frontières de son pays et
s'immerger dans une autre société fournit virtuellement de
nouvelles opportunités d'apprendre sur le tas vingt-quatre heures sur
vingt-quatre (Hopkins, 1999). De cette façon, l'individu est
amené à faire face à des situations qui remettent en cause
ce qui lui était familier, ainsi qu'à évoluer dans un
environnement aux caractéristiques différentes et à vivre
des expériences émotionnelles profondes. Le séjour
à l'étranger participe par là à transformer le
sujet à tous les niveaux, culturel, social ou psychologique. Pour cela,
l'individu en échange met en jeu des mécanismes cognitifs afin de
s'adapter aux différences culturelles auxquelles il est
confronté. Il s'agit certes d'acquérir des connaissances, mais
surtout de parvenir à créer consciemment une dynamique empreinte
de sens qui permette, de fil en aiguille, de faire passer les étudiants
et leurs hôtes d'un exotisme réciproque à une
familiarité réciproque (Vatter, 2003). C'est ce que l'on connait
sous le nom de compétence interculturelle.
En définitive, l'échange international
universitaire renvoie une image (trans)formatrice. Il représenterait une
fenêtre ouverte sur l'altérité, un processus de changement
et de diffusion culturel, susceptible de contribuer à ce que les
différents protagonistes portent un regard plus éclairé
sur le monde.
Toutefois, si un certain nombre d'études met en exergue
les bénéfices des programmes
d'études
intégrées et en dresse un bilan positif,
d'autres sont plus contrastées. En effet, certains chercheurs
font
notamment part de la tendance des étudiants internationaux et des
autochtones à ne pas se
mélanger (Ward, 2001 ; Kim, 1988), ce qui tend
à limiter l'ampleur des transformations culturelle, sociale et
psychologique chez les participants (Brown, 2009). De la même
manière, Ward (2001) indique que si beaucoup d'études incluent
comme hypothèse de départ des bénéfices en
matière de compétence interculturelle chez les étudiants
en mobilité internationale, peu parviennent à le démontrer
par la suite.
C'est pourquoi, au vu des résultat contradictoires sur
la question, nous allons tenter ici de situer les effets des échanges
universitaires internationaux chez des étudiants de l'Université
Lumière Lyon 2 séjournant au Brésil, et ce en
étudiant à la fois leurs transformations culturelle, sociale et
psychologique et leur compétence interculturelle.
2. Concepts clés
Dans cette partie, nous allons nous attacher à
définir les transformations socioculturelles et la compétence
interculturelle.
2.1. Les transformations socioculturelles
Dans ce chapitre, nous délimiterons et structurerons
le concept de transformations socioculturelles. Une fois l'étudiant
« à l'étranger », son quotidien est
inévitablement amené à changer, peu ou prou. Les rouages
de la société d'accueil ne sont pas ceux de la
société d'origine, de même que la clef pour les comprendre.
Cela donne donc lieu à un processus qui conduit l'étudiant
à évoluer, à changer culturellement, socialement,
psychologiquement. En référence à cela, certains auteurs
parlent d'adaptation socioculturelle et d'adaptation psychologique (Berry et
al. 2002), tandis que d'autres parlent d'ajustement psychosocial (Halamandaris
et Power, 1999). Quant à nous, par souci de simplicité, nous
prendrons le parti de réunir l'ensemble de ces dimensions sous la
dénomination de transformations socioculturelles, car nous les pensons
toutes trois intimement liées. Pour les expliciter, nous nous appuierons
notamment sur des travaux situés dans les champs de l'anthropologie
culturelle, de la psychologie interculturelle, de la sociolinguistique ou
encore de la psycho-sociologie.
À présent, penchons-nous rapidement sur
l'étymologie des termes employés. Les transformations
socioculturelles sont liées aux contraintes du milieu dans lequel
évolue l'individu, il pourrait donc s'agir d'adaptation ou d'ajustement.
Mais alors, pourquoi « transformations »? Transformer, du latin
transformare, signifie former au-delà, changer de forme,
devenir autre. Ce serait un processus qui conduirait une forme initiale
à être remodelée. Dans notre cas, cela
s'appliquerait aux étudiants qui, au cours de leur séjour
à l'étranger, dépasseraient un état premier de
penser, d'être dans le monde. Si nous avons pris le parti de penser que
les étudiants se transforment au contact de l'environnement plutôt
qu'ils ne s'y adaptent, c'est parce que l'adaptation fait pour nous écho
à un changement temporaire, dans le sens où il est limité
à la société d'accueil. En effet, le terme adaptation,
formé à partir de la racine « apte », du latin
aptus, renvoie à la notion d'être
spécialisé, propre à quelque chose en particulier. Par
conséquent, une fois l'individu sorti de l'environnement même qui
a entraîné l'adaptation, le changement disparaît, il n'est
plus à propos, d'où l'idée qu'il est limité, ou
temporaire. D'ailleurs, on s'adapte à une nouvelle chose puis on se
réadapte à l'ancienne, on ne peut se trouver sur les deux plans
à la fois. En revanche, en préférant parler de
transformations, nous pensons souligner un changement durable et non exclusif.
Ainsi, l'individu cesse d'épouser simplement les contours
suggérés au contact de son nouvel environnement. Il initie un
mouvement en lui-même et évolue par un jeu d'équilibres et
de déséquilibres, par aller-retours entre le familier
et l'incertain. De fait, en incorporant un peu de l'Autre en
lui-même, l'individu se transforme et devient un être nouveau, avec
des dispositions socioculturelles élargies et pérennes.
Entrons maintenant dans le détail des trois dimensions
dont nous avons fait mention. Définissonsles et précisons leurs
composantes ainsi que leurs indicateurs.
2.1.1. La dimension culturelle
Dans ce sous-chapitre, nous expliciterons la part de la
dimension culturelle dans les transformations socioculturelle. Historiquement,
il est impossible de nier la pluralité des populations et des influences
au sein de la plupart des sociétés, non plus que la
complexité et l'hétérogénéité de leur
tissu social. Elles ne sont pas un tout immobile, fermé, monolithique,
bien au contraire, elles sont « le produit de négociations
continuelles avec le monde extérieur, négociations à
travers lesquelles s'affirme un horizon, une identité qu'on ne peut que
définir que comme une création continue »
(Abdallah-Pretceille, 1996). En somme, les sociétés sont
métissées et, sous une apparente uniformité, elles sont
composées de sous-ensembles qui s'entrelacent et se conjuguent,
renvoyant à une réalité culturelle infiniment plus large,
entre l'immobilité de la reproduction et le dynamisme de la mutation
(Porcher, 1994). Ainsi, certains observent que « toute
société est liée à une culture d'ensemble qui la
caractérise et qui est elle-même le résultat de nombreuses
cultures, qui sont plus petites, plus sectorisées » (Porcher,
1995, p. 55). Pour étudier les impacts des programmes d'études
intégrées sur leurs participants, il nous faut donc clarifier la
notion de culture, et observer la façon dont cet objet évolue au
cours du séjour à l'étranger.
2.1.1.1. Composante : la culture
Dans une perspective anthropologique culturelle, la culture
est l'ensemble plus ou moins lié des significations acquises les plus
persistantes et les plus partagées que les membres d'un groupe, de par
leur affiliation à ce groupe, sont amenés à distribuer de
façon prévalente sur les stimuli provenant de leur environnement
et d'eux-même. Ceci induit, vis-à-vis de ces stimuli, des
attitudes, représentations et comportements communs valorisés
dont ils tendent à assurer la reproduction par des voies non
génétiques (Camilleri, 1985). Autrement dit, la culture est un
construit social qui oriente le déroulement de nos interactions, c'est
une carte grâce à laquelle on navigue et structure le monde autour
de soi, un infléchissement du « penser » et du « faire
». Finalement, nous sommes tous enracinés dans un terreau culturel
qui donne du sens à ce que l'ont fait ou ce que l'on ne fait pas,
à ce que l'on pense ou ne pense pas, ou encore à ce que l'on dit
ou non.
Pour compléter utilement notre approche, ajoutons que
Bourdieu (1979, p. 47) parle de la culture
comme de « la
capacité de faire des différences », autrement dit,
d'opérer des distinctions,
d'interpréter des variations socialement distinctives
à l'intérieur du système culturel et d'y entrevoir un
principe d'organisation interne à la culture. En d'autres termes, «
pour comprendre une société, et ses membres, il faut
être en mesure de repérer les systèmes de classement, de
percevoir leurs lois de fonctionnements, leurs régularités, leur
logique sociale » (Porcher, 1986, p. 12). De fait, comme nous l'avons
évoqué précédemment, nos sociétés
revêtent un aspect d'arlequin à travers les différentes
distinctions culturelles et sociales qui les constituent, de sorte qu'elles
sont à l'image de mosaïques dont les individus se font le reflet.
Par conséquent, ce qui caractérise un sujet, c'est la
multi-appartenance à des subcultures qui s'entrecroisent et participent
à le co-construire. Il nous faut alors rejeter l'équation
simpliste selon laquelle une culture équivaut à un pays, donc
à un peuple (Philipps, 2007). Il n'y a donc pas un Brésil ou une
France, une culture brésilienne ou une culture française, mais
d'innombrables points de vue et façons de faire dont les
étudiants seront ou non les témoins au gré de leurs
rencontres. C'est pourquoi nous préférerons parler non pas de
culture mais de « référentiel culturel », ce par quoi
nous entendons l'ensemble des significations issues des multiples
déclinaisons culturelles d'une société qui sous-tendent la
construction de la réalité chez un individu, avec l'ensemble des
valeurs, attitudes, comportements et représentations qui en
découlent. De cela, il ressort qu'une société ne saurait
se résumer à seul et unique référentiel.
Virtuellement, il se pourrait qu'il y en ait autant que de membres de la
société. Ainsi, le syntagme de « référentiel
culturel de la société d'accueil » renvoie aux inflexions
particulières dérivées de l'intégralité des
déclinaisons culturelles de la société d'accueil qui
orientent la manière dont ceux de ses membres qui interagissent avec
l'étudiant en échange structurent la réalité.
Pareillement, le syntagme de « référentiel culturel de la
société d'origine » (du sujet) fait référence
aux infléchissements singuliers qui découlent de l'ensemble des
subcultures qui composent cette société et qui influencent la
construction des significations sous-jacentes à la vision du monde de
ses membres. Ces précautions langagières visent à prendre
en compte la diversité culturelle et sociale des sociétés
auxquelles nous faisons référence ainsi qu'à nous
prémunir contre toute généralisation. Dans le même
ordre d'idées, lorsque nous associons à des expressions telles
que « l'Autre », « autrui », «
l'altérité », « la différence culturelle »
ou « la société d'accueil » des verbes comme «
rencontrer », « faire face » ou encore « confronter »,
nous ne sous-entendons pas qu'il s'agit là d'entités avec
lesquelles le sujet interagit directement. Nous désignons plutôt
l'ensemble des acteurs sociaux évoluant dans le même environnement
que le sujet et porteurs de symboliques et de significations différentes
tant les uns des autres que de celles du sujet, dont ils sont à la fois
les dépositaires et les co-constructeurs. Ainsi, pour finir, le mot
« autochtone » ou le syntagme « membres de la
société d'accueil » sont-ils pour nous une incarnation
générique de la différence culturelle qu'il ne faut pas
réduire à un ou des individus porteurs d'une symbolique ou d'un
ensemble de significations
particulier (un référentiel culturel), mais qui
englobe toutes les variations culturelles et sociales de la
société d'accueil.
2.1.1.2. Les indicateurs
En pratique, comment ces transformations culturelles se
traduisent-elles? Comment pouvons-nous les observer? Présentons ici les
indicateurs avec lesquels nous tenterons de repérer des changements
« culturels » chez les étudiants. Parmi les indicateurs
disponibles, nous porterons plus particulièrement notre attention sur
l'acquisition des compétences de communication, la distance culturelle,
ainsi que sur la sensibilité interculturelle.
Les compétences de communication
Le niveau d'aisance dans la pratique de la (ou les) langue(s)
de la société d'accueil ainsi que la connaissance des
règles de communication en usage (par exemple la gestuelle, le regard ou
encore la proxémie, soit la distance physique qui s'établit lors
des interactions entre les individus) forment ce que nous avons appelé
les compétences de communication. Elles sont de nature à
permettre au sujet de se rapprocher d'autres groupes socioculturels (Byram et
al., 1997). Plus généralement, l'acquisition d'une langue
étrangère est souvent l'un des objectifs prioritaires des
étudiants qui séjournent à l'étranger. La
maîtrise de la langue constitue donc une fin et un moyen pour les
programmes d'échange universitaire. Un degré minimum de
compétence communicationnelle est ainsi nécessaire pour
rencontrer des gens ou comprendre ce qui a lieu autour se soi par exemple. En
revanche, ne pas être en mesure d'échanger avec les autres
représente une barrière à l'intégration et peut
être facteur de stress, voire de mal-être. Cependant, s'il est
important pouvoir s'exprimer dans un langage compréhensible et de
connaître les normes sociales, cela n'est pas suffisant. Encore fautil
être capable de mettre cela en oeuvre quand la situation l'exige, sans
quoi l'individu ne pourra pas fonctionner efficacement dans son nouvel
environnement. C'est cet esprit d'à propos que nous pouvons appeler le
« feeling » (Bennett, 1993). Clairement, la maîtrise
d'une langue ou d'une norme sociale décontextualisée, sans la
conscience du terreau culturel dans lequel elle s'enracine, ne saurait se
révéler satisfaisante. Bennett (1993) utilise d'ailleurs le
syntagme « fluent fool » pour qualifier un individu qui,
tout en ayant une bonne connaissance de la langue et des règles de
conduite, ne se conforme pas aux normes communicationnelles de la
société d'accueil car il ne parvient pas à utiliser ses
savoirs de façon adéquate. Inversement, il utilise le syntagme
« cultural intelligence » pour faire référence
au respect et à l'usage approprié des règles de
communication. Ainsi, la communication se trouve être le vecteur d'une
dimension symbolique essentielle, significative culturellement. Comme le dit
Hall (1959, p. 186), « La culture est de la communication et la
communication est de la culture ». Par ailleurs, notons
qu'une langue n'est fondamentalement pas qu'un simple assemblage de mots. La
pensée s'enracine dans la langue, cette dernière est donc
porteuse de structures mentales particulières. La langue
catégorise le réel, en association avec les mots qui la composent
elle transmet tout une gamme de sous-entendus, d'implicite. Le langage est donc
un prisme qui oriente la perception de la réalité, en plus
d'être un outil pratique d'interaction. De ce fait, basculer «
intelligemment » ou « culturellement » d'une langue à une
autre implique de savoir se saisir de tout ce que le langage évoque
tacitement, de tout ce qui va de soi mais qui, pour un non-natif, un «
étranger », est susceptible de se dérober à lui.
Pour conclure, il ressort que l'acquisition d'une
compétence de communication fonctionnelle et d'un certain
feeling soit de nature à faciliter l'ensemble des
transformations socioculturelles.
La distance culturelle
Investiguons maintenant la notion de distance culturelle.
C'est l'écart que perçoit l'individu entre son
référentiel culturel et celui (ou ceux) qui compose la
société d'accueil telle qu'il se l'imagine. À partir de la
somme de ses représentations, l'individu opère une comparaison
des différences et similarités entre les sociétés.
Finalement, plus la perception des différences, au détriment des
similarités, est aiguë, plus la distance culturelle du sujet est
élevée.
Notons que les représentations de l'Autre sont
construites tout au long de la vie, souvent à notre insu, à
mesure que nous intégrons les infléchissements des groupes
culturels et sociaux qui s'entrecroisent dans notre environnement. C'est
pourquoi il n'est pas facile de s'en distancier, bien que ces
représentations soient du domaine des préjugés, des
stéréotypes, de l'imaginaire. « Les
stéréotypes sont des images que l'on a de son propre groupe
national (autostéréotypes) ou des autres groupes nationaux
(hétérostéréotypes) » (Pugibet, 1986, p.
60). Ils correspondent à une représentation partielle de la
réalité, sont simplificateurs et réducteurs (Porcher,
1995). Dans une certaine mesure, les
hétérostéréotypes révèlent la
façon dont un groupe ou une société se voit, se pense en
rêvant l'Autre (Pageaux, in Vatter, 2003) qui, de ce fait, devient une
sorte de miroir qui renvoie notre image. Finalement, les
stéréotypes mettent à jour certaines
ambiguïtés dans les représentations culturelles et sociales
dont l'individu est porteur vis-à-vis d'autres groupes
(AciolyRégnier et al., 2005). Ce n'est qu'ensuite, une fois à
l'étranger, que le sujet pourra s'engager dans un processus de
destruction d'images ou de représentations collectives de la
société d'accueil (Vatter, 2003). Ajoutons simplement que cet
indicateur ne nous renseigne nullement sur la façon dont l'individu est
susceptible de se situer dans la société d'accueil, sur la
manière dont il vit la distance culturelle. Il s'agit simplement ici de
dresser les contours d'une cartographie des préconceptions des
sujets.
La sensibilité interculturelle
En nous basant sur les travaux de Bennett (1986, 1993), nous
considérons la sensibilité interculturelle comme la
faculté d'accepter l'existence de points de vue multiples, de traits
culturels variés, et de les reconnaître comme valables, autant que
son propre point de vue ou ses propres traits culturels. Cette faculté
se traduit au niveau cognitif, affectif et comportemental. Elle est
nécessaire pour comprendre qu'il n'y a pas qu'une seule et unique
façon de faire les choses, la sienne, mais que d'autres approches d'un
même problème existent et sont viables. Cette faculté
dénote un intérêt pour l'Autre et un respect de ses
habitudes culturelles quelles qu'elles soient. Elle permet la
compréhension et l'acceptation des valeurs locales, l'abandon de sa
propre façon de faire au profit des usages locaux quand la situation
l'exige, le bon déroulement des interactions avec les membres de la
société d'accueil, ou, en bref, une réponse
appropriée aux exigences du quotidien. C'est un indicateur qui permet
d'évaluer comment l'individu gère pratiquement la distance
culturelle.
2.1.2. La dimension sociale
Dans ce sous-chapitre, nous passerons en revue les
différents attributs de la dimension sociale des transformations
socioculturelles. La relation aux autres, par le biais de l'élaboration
et de la gestion d'un réseau social, puis à travers la
fréquence et la qualité de la communication interpersonnelle,
joue un rôle clef dans le processus de transformations socioculturelles.
En effet, la façon dont le sujet est amené à se situer au
sein de la société d'accueil a des répercussions sur les
dimensions culturelles et psychologiques des transformations socioculturelles,
en terme de bien-être par exemple, ou de degré et de
rapidité de compréhension des référentiels
culturels. Ainsi, la nature de la socialisation de l'étudiant
reflète-t-elle chez lui l'état d'avancement de la gestion du
conflit entre son référentiel et ceux en vigueur dans la
société d'accueil. Nous allons donc traiter ici des orientations
que peut prendre ce processus interne de négociation
inter-référentiels, des différentes manières de se
situer dans une nouvelle société.
2.1.2.1. Composante : le phénomène
d'acculturation
Comme nous l'avons vu précédemment, le milieu
social influe largement sur la conduite de l'individu. Quand il transite entre
deux sociétés, ce dernier perd donc tout ou partie des
repères qu'il avait construit dans sa société d'origine et
doit en faire émerger de nouveaux au contact de l'environnement de la
société d'accueil. Redfield, Linton et Herskovits (1936) ont
défini l'acculturation comme l'ensemble des phénomènes qui
résultent d'un contact continu et direct entre des groupes d'individus
de cultures différentes et qui entraînent des changements dans les
modèles
culturels initiaux d'au moins l'un des deux groupes. Selon
Berry et al. (1989), les variations dans le processus d'acculturation sont
liées à trois facteurs majeurs : la volonté, la
mobilité et la durée. Ainsi, les choses sont-elles
différentes selon qu'il s'agisse d'un étudiant en échange,
d'un réfugié politique ou d'un migrant permanent par exemple. En
fonction de ses rapports avec les groupes culturels et sociaux qui composent la
société d'accueil, l'individu développe des
stratégies d'acculturation. Elles reflètent la manière
dont se négocie le maintien du référentiel culturel
originel dans la société d'accueil ainsi que la propension de
l'individu à aller vers les autochtones.
TABLEAU 1 : stratégies d'acculturation
(adapté de Berry, 2000)
|
Doit-on valoriser la sauvegarde de son
référentiel culturel originel?
|
|
oui
|
non
|
Doit-on valoriser le contact avec la
société d'accueil?
|
oui
|
intégration
|
assimilation
|
|
Séparation / ségrégation
|
marginalisation
|
|
Détaillons ces quatre principales stratégies
d'acculturation. Tout d'abord, lorsque l'individu souhaite renier son
référentiel culturel et recherche activement le contact avec
d'autres groupes afin d'adopter le (ou les) leur(s), on parle d'assimilation.
Ensuite, quand l'individu désire conserver son référentiel
culturel tout en ayant des rapports avec d'autres groupes dans le but de
partager une symbolique d'ensemble et de faire partie intégrante d'une
même société, il s'agit d'intégration. Puis, lorsque
l'individu veut préserver son référentiel culturel intact
et évite le contact avec d'autres groupes, on est dans le cas de figure
de la séparation. En revanche, si c'est la société (i.e.
les groupes dominants) qui impose la séparation, on parle alors de
ségrégation. Finalement, dès lors qu'il existe peu de
possibilité ou d'intérêt pour l'individu à maintenir
son référentiel culturel originel et à entretenir des
relations avec d'autres groupes, on parle de marginalisation. Dans ces trois
derniers cas (séparation, ségrégation et marginalisation)
l'individu est en situation d'exclusion, volontaire ou forcée, par
rapport à la société d'accueil.
Notons bien également que la ségrégation
et l'intégration dépendent toutes deux de l'orientation
d'acculturation de la société d'accueil et sont, à ce
titre, indépendantes du migrant. En effet, à son arrivée
dans la société d'accueil ce dernier devra assumer un nouveau
statut social qui lui sera appliqué indépendamment de sa
volonté, celui de représentant de son pays d'origine avec les
attentes et les stéréotypes qui peuvent y être liés
(Byram et al., 1997).
2.1.2.2. Les indicateurs
Comment donc entreprendre d'évaluer l'insertion des
étudiants dans leur société d'accueil? De quels
moyens
disposons-nous? Pour ce faire, il nous faut sonder l'étendue et la
nature du capital social des
sujets, et mettre au jour l'orientation d'acculturation de la
société qui les reçoit.
Le capital social
Le capital social d'un individu, c'est l'ensemble de ses
relations, c'est-à-dire des personnes et des institutions qu'il
connaît et dont il est connu (Abdallah-Pretceille et Porcher, 1996).
C'est justement en partie au travers des relations sociales que tissent les
étudiants qu'il est possible de déterminer leur orientation par
rapport à la société d'accueil. La fréquence avec
laquelle ils s'engagent dans des rapports humains et le sens qu'ils leurs
donnent sont autant de moyens pour eux de se situer au sein du monde qui les
entoure. En effet, la nature et l'étendue du capital social du sujet
vont avoir une influence directe sur son degré d'immersion dans
l'altérité en quelque sorte. Elles vont conditionner :
· Sa capacité à pénétrer la
dimension symbolique d'ensemble qui lie la société d'accueil.
· Sa propension à opérer des distinctions
dans cette société.
· Son accession à une palette plus ou moins large de
significations dérivées des divers référentiels
culturels des membre de la société d'accueil avec lesquels il est
en contact.
Créer du lien social, élargir son
réseau, en diversifier la nature sont donc autant de démarches
à effectuer pour atteindre le coeur d'une société, non pas
comme simple observateur mais comme acteur social, et avoir un
aperçu in situ des pratiques et représentations qui y
ont cours. En somme, l'enjeu consiste à passer d'un capital social
uni-culturel (entendu ici comme étant constitué principalement de
représentants de la société d'origine) à un capital
social pluri-culturel (soit comme constitué indistinctement de membres
de la société d'origine et de la société
d'accueil), ou bien à ajouter une nouvelle dimension à un capital
déjà pluri-culturel selon les cas. Ajoutons que si créer
et maintenir du lien social facilite les transformations culturelles, cela joue
également un rôle sur les transformations d'ordre psychologique.
Church (1982) a démontré qu'entretenir des rapports sociaux
étroits avec d'autres individus (autochtones, compatriotes ou
étrangers) favorise le dépassement du choc culturel. Par
ailleurs, certains chercheurs ont observé que la fréquence et la
nature des interactions entre les membres de la société d'accueil
et les étudiants étrangers jouent un rôle de premier plan
dans la capacité de ces derniers à atteindre leurs objectifs
académiques (Poyrazli et al., 2002).
L'orientation d'acculturation de la société
d'accueil
La manière dont une société dans son
ensemble se positionne par rapport aux ressortissants d'autres
sociétés constitue un facteur critique influençant
largement le séjour de ces derniers. Comme nous l'avons vu, dès
son arrivée dans son nouvel environnement, l'individu doit entreprendre
de s'acculturer, c'est-à-dire de se situer par rapport aux divers
groupes culturels et sociaux qui le compose. Pour se transformer efficacement,
il faut que l'individu crée du lien social avec des autochtones, tant
pour assurer une certaine stabilité émotionnelle que pour
accéder au mieux à la symbolique d'ensemble la
société d'accueil. Parallèlement, il se voit contraint
d'assumer un nouveau statut social, une certaine image, en tant que
représentant de sa société d'origine. Cette image
découle de la part d'ethnocentrisme qui sous-tend les
référentiels culturels des autochtones. Par conséquent,
s'il est rejeté par ses hôtes, s'il est victime de racisme,
l'individu se voit barrer l'accès à des pans culturels entiers,
en plus de se sentir bafoué dans sa dignité et de voir son
équilibre émotionnel mis en péril. En effet, selon
certains chercheurs, être victime de préjugés et de
discriminations a un impact considérable sur le bien-être (Fenton,
1989 ; Halpern, 1993). Par ailleurs, d'autres considèrent le racisme
comme le problème le plus grave auquel peuvent être
confrontés les migrants (Fernando, 1993).
2.1.3. La dimension psychologique
Nous traiterons ici de la part de la dimension psychologique
dans les transformations socioculturelles. La psychologie interculturelle a
montré qu'il existe des rapports étroits entre le contexte
culturel et le développement comportemental de l'individu. Par ailleurs,
une définition de type psychologique de la culture la renvoie à
la manière apprise de résoudre les problèmes (Kroeber et
Kluckhon, 1952). Ainsi, si l'on s'intéresse aux séjours
d'étude à l'étranger, on peut être amené
à se demander ce qu'il se passe quand un individu qui s'est
développé dans un contexte culturel et social bien particulier
entreprend de s'insérer dans une société aux
référentiels culturels et à la structure sociale
différents. C'est de ce processus de transformation psychologique dont
nous allons parler ici. Les décalages entre le référentiel
culturel de l'individu, dérivé de sa société
d'origine, et ceux en vigueur dans la société d'accueil peuvent
conduire à l'émergence de conflits internes chez lui. Selon le
degré d'intensité et de permanence de ces conflits,
différents noms leurs ont été attribués dans la
littérature scientifique. Nous généraliserons cela sous
l'appellation de choc culturel. Notons cependant qu'en dépit du terme de
« choc » employé ici, cette inadéquation ne se traduit
pas nécessairement par un bouleversement profond et total des
repères de l'individu, et ne reflète pas non plus des
expériences uniquement négatives de la confrontation à
l'altérité.
2.1.3.1. Composante : le choc culturel
Un choc culturel se manifeste donc quand un individu est
« déraciné », quand il entre dans une
société dont l'organisation sociale et les
référentiels culturels sont sensiblement différents de ce
qu'il connait, l'amenant ainsi à perdre ses repères culturels,
symboliques, sociaux, les plus familiers. C'est une situation dans laquelle le
sujet est extérieur au consensus en vigueur sur la
réalité, aux significations partagées par ses hôtes.
En effet, nous structurons la réalité au cours d'un processus par
lequel nous tentons de faire correspondre notre conceptualisation interne du
monde aux stimuli externes que nous recevons de notre environnement (Zapf,
1991). Lorsque cette relation est positivement établie, nous sommes
à même de donner du sens aux situations, aux
événements. En revanche, si nous ne pouvons pas établir de
corrélation entre notre conceptualisation interne et les stimuli
externes, c'est le choc culturel. Pratiquement, dans un nouvel environnement,
le sujet fait face à des demandes auxquelles il doit répondre
(les stimuli externes). Par conséquent, selon l'intensité du
décalage entre le référentiel du sujet
dérivé de la société d'origine (son modèle
de conceptualisation interne) et ceux de la société d'accueil, le
processus d'ajustement pour arriver à un nouvel équilibre entre
les référentiels culturels (établir une
corrélation) est plus ou moins long.
La représentation classique de la résorption du
choc culturel en fonction du temps est celle de la courbe en U, initialement
développée par Lysgaard (1955). À sa suite, Oberg (1960)
décrit quatre stades d'ajustement psychologique à la
différence culturelle : la lune de miel, la crise, la
récupération et l'adaptation. En résumé, au
départ, rien ou presque ne trouble l'individu et l'aura de
nouveauté qui enveloppe la société d'accueil est
relativement stimulante. Ensuite, des problèmes plus sérieux font
surface à mesure que l'individu réalise la distance entre son
référentiel culturel et ceux de ses hôtes. Finalement, au
terme d'efforts d'adaptation continus, l'individu atteint une situation
d'équilibre psychologique plus pérenne et s'accoutume à la
symbolique locale. Par la suite, certains auteurs ont adapté la courbe
en U en une courbe en W afin d'inclure le stade du retour dans la
société d'origine. Pendant la période de
réajustement qui s'en suit, l'individu est tiraillé par un
processus de désintégration-réintégration qui le
pousse à rompre l'équilibre auquel il était parvenu dans
la société d'accueil afin de recouvrer celui qui lui permettra de
se familiariser à nouveau à la société d'origine.
Néanmoins, ces conceptualisations présentent certaines limites.
Tout d'abord, il y a peu de preuves empiriques suggérant que la
trajectoire des individus se conforme effectivement à celles que
prescrivent les modèles de la courbe en U et en W (Berry, 1997).
Ensuite, la temporalité de ces modèles, c'est-à-dire la
survenue des phases et leur durée, n'a pas non plus été
systématiquement vérifiée (ibid.). À ce sujet,
Church (1982) a conclu que les soubassements de la courbe en U-W sont fragiles,
que les études utilisant cette théorie sont peu concluantes, et
que les résultats obtenus font l'objet d'une
généralisation excessive.
TABLEAU 2 : autre exemples de modèles de courbe en
U
Auteurs
|
Stade 1
|
Stade 2
|
Stade 3
|
Stade 4
|
Adler (1975)
|
Contact
|
Désintégration
|
Réintégration
|
Autonomie
|
Kohls (1979)
|
Euphorie initiale
|
Hostilité
|
Ajustement progressif
|
Adaptation
|
Berry (1997)
|
Lune de miel
|
Conflit
|
Crise identitaire
|
Adaptation
|
|
Pour notre part, nous nous préférons nous
concentrer sur la nature des obstacles rencontrés et des
expériences vécues par les sujets au cours du déroulement
de leur séjour afin de comprendre leur processus de résorption du
choc culturel. Sous-tendant notre démarche est le principe selon lequel
l'individu doit établir et maintenir une relation stable avec son
environnement afin de fonctionner efficacement. Pour ce faire, nous partons
donc du postulat que l'homme a une propension naturelle à se
transformer, ce qu'il fait continuellement et plus ou moins consciemment
à mesure qu'il est confronté à des obstacles dans son
environnement. Insistons là sur le fait que les transformations sont le
produit d'une co-construction entre ce dernier et le sujet. Finalement, ce
processus de dépassement d'obstacles successifs entraine des cycles de
réorganisations internes (cognitives, affectives, motrices) relativement
pérennes qui tendent vers une complexification et un
élargissement des dispositions du sujet (Kim, 1988). De cette
manière, nous nous positionnons en faveur d'une approche plus positive
du choc culturel. L'incertitude inhérente à ce dernier n'est
ainsi pas forcément un facteur de stress mais, potentiellement, de
développement personnel (Milstein, 2005). Par ailleurs, le choc culturel
et les transformations qu'il initie offrent une occasion de retour sur soi. En
effet, tant que l'individu interagit avec ceux dont il partage les
significations, il est fort probable qu'il ne soit pas conscient de ces
dernières, tel un animal suspendu dans des toiles invisibles (voir
Geertz, 1973). En tant normal, il n'est donc pas enclin à questionner
ses pratiques et représentations, à prendre de la distance par
rapport à son référentiel culturel. C'est justement ce
qu'est susceptible de provoquer le choc culturel. Il est vecteur d'une
dimension culturelle analytique. En conséquence, notre système
interne d'action et de perception (notre référentiel culturel) ne
peut se révéler à nous que quand nous sommes contraints de
nous en écarter (Kim, 1988). De ce fait, le choc culturel
représente bien une véritable opportunité d'apprentissage.
Nous questionnerons donc les étudiants sur certaines situations qui font
partie intégrante de toute expérience à l'étranger
et face auxquelles ils se voient contraints de produire une réponse,
telles que l'obtention d'un logement, la réussite scolaire, la
communication avec les autochtones, etc. Ensuite, nous pourrons
sélectionner celles des expériences qui nous semblent
significatives pour explorer comment elles ont été
gérées. Cette focalisation sur la survenue et la gestion des
événements permet, selon nous, de prendre en compte le fort
degré de variabilité des transformations psychologiques d'un
individu à l'autre et de
nous dégager de toute contrainte temporelle.
2.1.3.2. Les indicateurs
La littérature scientifique nous offre pléthore
d'indicateurs pour évaluer les transformations psychologiques et la
résorption du choc culturel. Nous en retenons ici quatre qui nous
semblent des plus pertinents pour notre étude. Nous allons donc nous
intéresser au soutien social, au concept d'auto-efficacité,
à l'enjeu de la réussite académique ou professionnelle, et
pour finir au stress d'acculturation.
Le soutien social
Le soutien social est la somme de la communication verbale et
non-verbale entre les émetteurs et les destinataires qui a pour but de
réduire l'incertitude de la situation, de soi et de l'Autre, afin
d'accroître la perception d'un contrôle sur les expériences
vécues (Albrecht et Adelman, 1987). Son intensité est fonction de
la fréquence de communication, du contenu échangé et du
degré de symétrie de la relation entre les membres tel qu'il est
perçu par les différents partis (Ray, 1991). Enfin, le soutien
social sert plus particulièrement à minimiser le stress et
à dépasser le choc culturel (Ward et Kennedy, 1993).
Assurément, émigrer implique bien souvent de laisser famille et
amis derrière soi ce qui, dans une certaine mesure, est susceptible de
fragiliser davantage chez le sujet un équilibre émotionnel
déjà potentiellement mis à mal par son
déracinement. Ainsi, le rôle du soutien social est-il
accentué en contexte interculturel, tant en raison des perturbations que
la migration cause dans le capital social pré-existant du sujet que de
la difficulté de créer du lien social dans la
société d'accueil (Copeland et Norell, 2002). Par ailleurs, la
recherche atteste du fait que c'est souvent en période de stress et de
bouleversement que l'individu prend conscience de l'importance du soutien
social et le désire particulièrement (Burleson, 2003).
Le soutien social englobe indistinctement les relations
disponibles sur place, à proximité de l'individu, et les
relations à distance, comme celles entretenues avec les proches
restés dans le pays d'origine par exemple. Par contre, il est possible
de distinguer le soutien social selon qu'il émane de personnes
appartenant à une même société d'origine ou non.
Selon Church (1982), les relations entretenues avec les compatriotes ou les
autres étudiants internationaux sont bénéfiques en ce
qu'elles sont susceptibles de fournir un sentiment d'appartenance à
l'individu, un soutien face à la différence, et un espace de
discussion concernant les stratégies à établir pour y
faire face. Les relations établies avec les autochtones, quant à
elles, permettent au sujet de s'ancrer dans la réalité culturelle
et sociale du pays d'accueil, de prendre conscience de toutes ses bigarrures,
et d'accéder à ce qui en fait l'essence, en plus de participer
pareillement au soutien émotionnel. Toutefois, comme
on pourrait s'y attendre, il apparaît que des relations
maintenues à la fois avec des représentants de la
société d'origine et de la société d'accueil
laissent présager les retombées les plus positives pour
l'individu (Berry et al., 1989).
L'auto-efficacité
Le concept d'auto-efficacité a été
forgé par Bandura (1977) dans le cadre de sa théorie sociale
cognitive. Selon lui, le sentiment d'auto-efficacité prend forme
à travers la croyance qu'a l'individu en sa capacité à
mener à bien une tâche. Cette définition a pour corolaire
que plus le sentiment d'auto-efficacité est grand, plus les jalons
fixés par l'individu dans la poursuite de ses objectifs sont
élevés, ainsi que l'envergure des moyens déployés
pour les atteindre. Autrement dit, le sentiment d'efficacité personnelle
influence à la fois la motivation de l'individu, son mode de penser, et
sa propension à l'action, son comportement. Comme l'expose Bandura
lui-même, « si les gens ne croient pas qu'ils peuvent obtenir
les résultats qu'ils désirent grâce à leurs actes,
ils ont bien peu de raisons d'agir ou de persévérer face aux
difficultés » (Carré, in Bandura, 2003, p. IV). Bandura
prétend ainsi que l'individu tend à éviter les situations
qu'il perçoit comme menaçantes, tandis qu'il a tendance à
s'investir dans les activités qu'il se sent apte à accomplir.
Généralement parlant, un fort sentiment d'auto-efficacité
favorise donc l'engagement de l'individu dans la société
d'accueil, et participe aussi à minimiser la part de ses
expériences délétères (Bandura, 1989). Schwarzer
(1992), quant à lui, nous dit de l'auto-efficacité qu'elle a
trait à la capacité à répondre efficacement
à un large éventail de situation stressantes, et qu'elle est le
reflet d'un sentiment positif de confiance en soi qui favorise par ailleurs la
planification d'objectifs, l'engagement, la persévérance et le
dépassement de l'échec. On peut donc envisager
l'auto-efficacité comme l'impression qu'a l'individu d'être aux
commandes de sa vie, comme la conviction qu'il est lui-même le moteur de
ses choix et que ses actions et ses décisions sont au centre de sa
réussite.
La recherche a d'ailleurs démontré que le
sentiment d'auto-efficacité joue un rôle notoire dans la
résorption du choc culturel chez les étudiants qui
séjournent à l'étranger. Certains travaux (voir Fan et
Mak, 1998) ont mis en exergue une causalité positive entre
l'auto-efficacité et les transformations socioculturelles, par le biais
de la gestion du stress par exemple (Zheng et Berry, 1991) ou la
réussite académique (Mak et Tran, 2001).
La réussite académique et professionnelle
Participer à un échange universitaire
international est une expérience humaine inestimable, dans
laquelle
la découverte de l'Autre est un élément de premier plan.
Toutefois, il ne faut pas oublier
que l'étudiant en échange a
également pour objectif de réussir son parcours scolaire pour ne
pas être
pénalisé dans l'obtention de son diplôme.
De fait, comme ceux de ses pairs qui restent dans l'université
d'origine, il doit passer des examens, voire effectuer des stages, et valider
ainsi son ou ses semestres. Cependant, les systèmes éducatifs et
professionnels en vigueur dans le pays d'accueil et dans le pays d'origine sont
susceptibles d'être dissemblables. En effet, ancrés dans des
sociétés aux inflexions différentes, le monde du travail
et le modèle universitaire peuvent varier complètement. Par
conséquent, l'étudiant doit fournir des efforts certains pour
s'insérer et fonctionner de manière efficace professionnellement
ou académiquement. Des difficultés à satisfaire à
cette exigence peuvent avoir des répercussions au niveau psychologique
et émotionnel et contribuer à former une expérience
négative du séjour à l'étranger (Ward et al.,
2001). Remarquons que les éventuelles difficultés des
étudiants sont moins le reflet d'aptitudes insuffisantes aux
études ou à la vie active que d'un ensemble de facteurs relatifs
à la nature des expériences sociales et culturelles vécues
à l'arrivée en milieu académique ou professionnel.
Quoiqu'il en soit, la réussite académique et professionnelle
entraîne chez le sujet une meilleure estime de soi et une plus grande
confiance en ses capacités, impactant ainsi sur le sentiment
d'autoefficacité que nous avons présenté auparavant (Mak
et Tran, 2001 ; Bandura, 2007). La performance en milieu scolaire et
professionnel semble donc bien entretenir une relation positive avec les
transformations socioculturelles.
Le stress d'acculturation
Comme nous l'avons déjà évoqué,
le choc culturel que peut ressentir l'individu provient d'une asymétrie
entre la société d'origine et la société d'accueil
en terme d'organisation respective des référentiels culturels et
sociaux et des significations qu'ils véhiculent. Le processus de
négociation interne nécessaire afin de rééquilibrer
ces configurations asymétriques est susceptible de se
révéler éprouvant pour le sujet. Les effets secondaires
délétères liés à ce processus sont ce que
l'on appelle le stress d'acculturation. En effet, la plupart des
définitions du choc culturel que nous appliquons, nous, au stress
d'acculturation, corroborent cette analyse (Oberg, 1960 ; Kohls, 1979 ; Martin
et Nakayama, 2001). Dans cette perspective, le stress d'acculturation prend la
forme d'un désarroi causé par une perte de repères, par le
manque de signaux familiers renvoyés par le monde alentour et les
rapports sociaux. C'est un malaise dont les « symptômes » sont
la dépression, le mal du pays, l'anxiété ou encore le
stress. Certains facteurs contribuent à aggraver cela, tels que
l'échec scolaire, le manque de lien social ou l'absence de
compétences communicationnelles adéquates (ibid.). Par ailleurs,
l'étudiant international est soumis à un stress
élevé dû à la pression mise sur ses épaules
par la société d'accueil dans le but de le faire se conformer
rapidement aux normes appropriées. En outre, en raison de l'absence dans
cette dernière de celles des structures sociales familières qui,
dans
la société d'origine, assuraient la
transmission du concept de soi (estime de soi, confiance en soi), le
référentiel culturel de l'étudiant peut être
amené à se désagréger (Pederson, 1991). Pour
conclure, le stress d'acculturation remet en cause le bien-être social,
physique, psychologique de l'individu et, à ce titre, participe
pleinement au processus de transformations socioculturelles.
2.1.4. Autres facteurs de variabilité des
transformations socioculturelles
Hormis ceux que nous avons mentionné, il y a d'autres
facteurs plus généraux qui sont susceptibles de faire varier le
degré de l'ensemble des transformations socioculturelles des
étudiants, tels que la durée de séjour dans le pays
d'accueil ou l'exposition interculturelle antérieure. Nous allons donc
nous y intéresser.
2.1.4.1. La durée de séjour
Il semble évident que la durée de séjour
joue un rôle crucial, susceptible d'affecter les transformations
socioculturelles dans toute leur ampleur. Au plus la présence de
l'étudiant dans la société d'accueil est longue :
· Au plus il a d'opportunités de
s'imprégner de la symbolique d'ensemble qui lie la société
; d'observer, de reproduire, d'intégrer les significations
partagées localement, y compris la langue, les attitudes, les
comportements et pratiques divers.
· Au plus son réseau social est susceptible de
s'étendre, de se diversifier, de se renforcer ; la somme de ses
interactions de croître et les bénéfices qui en
découlent de s'accumuler.
· Au plus la marge de manoeuvre pour gérer le
choc culturel est large. La nouveauté s'estompant graduellement au
profit du familier, l'incertitude se réduit, les situations et les
évènements se répètent. Fort de son
expérience, l'individu peut fonctionner plus efficacement (Adler,
1975).
Cependant, il faut bien reconnaître que l'impact de la
durée de séjour sur les transformations socioculturelles n'est
pas systématique. Il est d'ailleurs impossible au demeurant de
déterminer une durée optimale de séjour, tant chaque
expérience est différente et si nombreux sont les facteurs
à entrer en jeu dans le processus de transformations
socioculturelles.
2.1.4.2. L'exposition interculturelle
antérieure
Le séjour à l'étranger en
général, vaste ensemble dont l'échange universitaire
international fait
partie, constitue l'archétype de
l'expérience interculturelle, c'est une voie privilégiée
pour rencontrer
l'Autre, découvrir de nouveaux horizons et se
transformer. Pourtant, on ne doit pas confondre
interculturel avec international. Il n'est pas
nécessaire de séjourner hors des frontières de son pays
pour bénéficier d'une expérience interculturelle : ce
n'est qu'un moyen parmi d'autres d'ouverture à la différence.
À vrai dire, l'interculturel c'est de l'interpersonnel, la communication
en est un ingrédient capital. Nous savons que nos sociétés
ne sont pas monolithiques, que le tissu social est
hétérogène et que de multiples origines culturelles
s'entrecroisent. Autrement dit, chaque culture d'ensemble se décompose
en une myriade de subcultures. C'est bien là, précisément
dans la richesse de ce vivier subculturel, que peuvent se trouver les
opportunités d'exposition interculturelle au sens large. Puisque la
diversité est en tout le monde, autochtone, étranger ou voisin de
palier, toute rencontre peut être (trans)formatrice. En effet, interagir,
échanger, avec des personnes d'horizons culturels et sociaux divers ;
participer à des évènements trouvant leurs ancrages
à l'extérieur des groupes avec lesquels on partage un large
ensemble de significations communes ; apprendre une langue
étrangère, lire des livres, regarder des films d'auteurs et
réalisateurs issus d'autres sociétés ; se
préoccuper de questions politiques ou sociales extra-territoriales et
bien d'autres choses encore sont autant de modalités d'exposition
interculturelle. Au sujet des médias, certains chercheurs
considèrent qu'ils offriraient une ouverture sur certaines dimensions
constitutives de leur société et qu'ils fourniraient des points
de repères au regard desquels les « étrangers »
pourraient auto-réguler leurs comportements et attitudes, adoucissant
ainsi la transition entre les sociétés (Kim, 2001). L'enjeu de
l'exposition interculturelle est bien de se défaire (autant que faire se
peut) des oeillères qui nous ont immanquablement été
collées tout au long du processus de socialisation, de s'affranchir le
plus possible de l'ethnocentrisme sous-jacent à notre vision du monde.
C'est pourquoi l'exposition interculturelle antérieure contribue
à préparer l'individu à la mobilité, elle lui donne
un aperçu de la différence culturelle. Bien entendu, toute
confrontation à l'altérité n'est pas significative de
fait. Par exemple, « De nombreuses études ont
démontré que les échanges ne réduisent pas
systématiquement les stéréotypes et les
préjugés » (Abdallah-Pretceille 1999). Les rencontres
interculturelles peuvent être un agent d'infléchissement de
l'ethnocentrisme, tout comme elle peuvent ne pas l'être. Notons
malgré tout que certaines études ont établi une
corrélation positive entre exposition interculturelle, réduction
du stress et gestion du choc culturel à l'étranger (Mapp et al.
2007).
2.2. La compétence interculturelle
Dans ce chapitre, nous éclaircirons le concept de
compétence interculturelle (CIC). Les premières recherches sur la
CIC datent de plus de cinquante ans. Initialement, si ces travaux ne
fédéraient qu'un petit nombre d'acteurs, ils associent
aujourd'hui l'ensemble de la société, du gouvernement aux
entreprises en passant par les universités. En effet, au cours des
dernières décennies, l'essor de
ce que nous nommerons ici indistinctement la mondialisation,
l'internationalisation ou la globalisation a consacré l'échange
interculturel, ou tout du moins international, comme fait social total, au sens
de M. Mauss. Par conséquent, il n'est guère étonnant que
de nombreux champs disciplinaires se soient proposés d'étudier la
CIC et qu'il existe, a fortiori, maints approches conceptuelles et
outils d'évaluation aux terminologies et objectifs pluriels. Pourtant,
cette accumulation de modèles théoriques et d'instruments de
mesure n'a pas su venir à bout de la nature fugace d'un concept qui,
aujourd'hui encore, échappe à tout consensus. En dépit de
l'ampleur du spectre de recherche et des débats autour de la CIC, nous
allons tenter d'y voir un peu plus clair. Pour commencer, nous nous pencherons
sur les difficultés relatives au syntagme même de CIC. Puis, nous
présenterons deux approches conceptuelles sur lesquelles nous nous
baserons ensuite pour étayer notre approche.
2.2.1. Ambiguïté du syntagme
Si le syntagme de compétence interculturelle semble
relativement transparent à première vue, il est en
réalité particulièrement flou. En effet, de nombreux
auteurs l'ont étudié à l'écart les uns des autres
(Frederiksen et al. 2000), lui conférant tour à tour soit une
nuance particulière, soit une dénomination nouvelle. De fait, il
existe aujourd'hui des dizaines d'expressions utilisées en lieu et place
du syntagme de CIC, ainsi que des centaines de définitions
différentes dans la littérature scientifique (Deardoff, 2004). On
pourrait ainsi parler de « charabia » interculturel (cf Dervin,
2009). D'ailleurs, cette confusion amène certains à dire que la
CIC serait en fait un cliché à la mode dont personne ne saisirait
bien le sens (Simensen, 2003). À titre d'exemple, voici quelques
appellations alternatives à celle de CIC.
TABLEAU 3 : autres dénominations de la CIC
(adapté de Fantini, 2006, in Understanding and assessing intercultural
competence, Sinicrope, Norris et Watanabe, 2007)
Communication transculturelle
|
Communication interculturelle
|
Communication internationale
|
Efficacité communicationnelle inter-groupe
|
Compétence culturelle
|
Compétence de communication
|
Compétence internationale
|
Compétence métaphorique
|
Compétence mondiale
|
Sensibilité interculturelle
|
Sensibilité culturelle
|
Ethnorelativité
|
Multiculturalisme
|
Biculturalisme
|
Plurilinguisme
|
Adaptation interculturelle
|
Coopération interculturelle
|
Interaction interculturelle
|
Conscience interculturelle
|
Intelligence concurrentielle mondiale
|
|
1. Savoir-être
Démontrer une capacité
d'ouverture
à l'Autre et de
réflexion sur les cultures
Compétence
Interculturelle
La persistance de cet état de fait pourrait venir de ce
que le concept de CIC s'articule autour de deux notions complexes : la culture
et la compétence. D 'ailleurs, en s'appuyant notamment sur le concept de
« Culturespeak » (Hannerz, 2001) qui dénote
l'utilisation systématique et non critique du concept de culture, Dervin
(2009) considère que ne nombreuses définitions de la CIC reposent
sur des prémices erronées. Il énonce certains
problèmes que pose le concept :
· Tout d'abord, il pointe la propension des chercheurs
à parler des cultures comme d'entités vivantes, douées
d'une conscience propre, avec lesquelles on pourrait interagir directement,
alors que l'étudiant en échange ne rencontre jamais qu'un nombre
limité de membres d'une société d'accueil aux multiples
facettes.
· Ensuite, il souligne le fait que c'est bien souvent
une vision catégorisante, normative qui sous-tend la définition
de culture. On parle sans finesse de la culture d'origine et de la culture
d'accueil, comme si elles étaient deux blocs inertes et homogènes
et qu'il n'y avait pas de place pour la distinction, les subcultures d'une
part, et le mouvement, le métissage d'autre part.
· Puis, il note l'absence répétée
d'interlocuteur dans la définition de la CIC, l'amenant à ne
reposer que sur le sujet, l'utilisateur de la compétence. De fait,
l'influence de l'Autre et du contexte dans la situation d'interaction est
négligée, alors que la co-construction de cette situation est un
élément essentiel.
· Il remarque également que la compétence
est souvent conceptualisée comme un construit statique et monolithique.
Soit on est compétent, soit on ne l'est pas. Il faudrait donc distinguer
des niveaux d'habileté.
· Il constate enfin que la compétence n'est pas
forcément infaillible. De fait, dans un contexte donné, on peut
être compétent un jour mais pas le lendemain.
Par ailleurs, lorsque l'on réutilise un concept aussi
populaire dans le champ scientifique que celui de CIC, il est nécessaire
de prendre en considération son bagage quelque sorte, soit les
inflexions que les chercheurs précédents lui ont données.
C'est pourquoi, et bien que nous ne puissions possiblement être
exhaustifs, nous allons maintenant présenter deux modèles
théoriques de référence qui ont eu une large influence
dans un certain nombre de champs disciplinaires.
2.2.2. Exemples de conceptualisation
Si les premières approches conceptuelles se
contentaient de penser la CIC (ou termes apparentés,
voir supra)
comme une liste d'aptitudes ou de qualités classées de
façon plus ou moins organisée au
détriment de l'élaboration d'un cadre
théorique clair, les modèles plus récents ont su combler
cette lacune et sont bien plus élaborés. En ce qui nous concerne,
face à la multitude des possibilités qui s'offrent à nous,
nous prendrons appui sur deux modèles largement reconnus dans le champ
scientifique, l'un européen et l'autre américain, pour
établir les fondements sur lesquels reposera la CIC dans la
présente étude. Dans un premier temps, nous allons donc
présenter les travaux de Byram (1997) sur la compétence
interculturelle avant de nous intéresser aux recherches de Bennett
(1993) sur la sensibilité interculturelle.
2.2.2.1. Byram et le modèle multidimensionnel de
compétence interculturelle Byram (1997) propose un modèle de CIC
articulé autour de cinq axes majeurs :
· Les savoir-être (attitudes, relativising self and
valuing others) :
Ils recouvrent la capacité à relativiser la
primauté de ses valeurs, à adopter une posture intellectuelle
ouverte à l'altérité, c'est-à-dire savoir faire
abstraction tant de sa défiance envers les autres cultures que de ses
certitudes et croyances envers sa culture d'origine.
· Les savoirs sociaux (knowledge, of self and others, and
of interaction between individuals and society) :
Ils incluent des connaissances théoriques sur la
société d'accueil. Cela comprend notamment les processus sociaux,
ou les règles de fonctionnement et les pratiques. Ces savoirs visent
à connaître ce qui est l'usage dans la société
d'accueil et, de par cette connaissance des éléments
significatifs entrant en jeu dans la relation interculturelle, aident le sujet
à adopter un comportement approprié lors des interactions
sociales.
· Les savoir-comprendre (skills, of interpreting and
relating) :
Ces savoirs fonctionnels distinguent la capacité
à traduire, analyser et mettre en relation les éléments de
la culture d'accueil avec ceux de la culture d'origine. D'une part, cela
implique d'être à même d'aborder l'Autre sous un angle
adéquat afin le comprendre. Ensuite, il s'agit de faire le pont entre
les cultures, de chercher des universaux.
· Les savoir-apprendre-et-faire (skills, of discovery and
interactions) :
Il s'agit là de développer et manier de
nouveaux savoirs fonctionnels qui s'appuient sur les savoirs
préexistants et permettant d'interagir dans les deux cultures, de
compléter sa « boîte à outils »
communicationnelle. Cela comprend par exemple ce qui relève des modes
communication verbaux et non-verbaux ou du champ des compétences
linguistiques.
· Savoir s'engager (critical cultural awareness) :
Ce dernier savoir correspond à l'aptitude du sujet
à se positionner en retrait vis-à-vis des
cultures et à porter un regard critique sur ces
dernières, à les interroger. Il s'agit d'abord d'expliciter les
valeurs et autres attributs des cultures, d'en prendre conscience, puis de les
mettre en perspective. Cela doit permettre l'engagement, c'est-à-dire la
négociation d'un compromis entre les cultures. In fine, il
s'agit de déplacer l'accord de référence à l'une
des deux normes culturelles afin construire une nouvelle norme acceptable entre
les cultures, soit interculturelle.
5. Savoir s'engager
Déplacer l'accord d'une référence
à l'une des
deux normes culturelles pour construire un
nouvel objet interculturel
|
|
4. Savoir-apprendre-et-faire
Enrichir sa boîte à
outils
communicationnelle
2. Savoirs sociaux
Appréhender les normes de comportements lors des
rapports sociaux
3. Savoir-comprendre
Faire le pont entre les cultures, chercher les
universaux
FIGURE 1 : modèle multidimensionnel de CIC
(adapté de Byram,1997)
Pour Byram, la CIC a moins pour objectif de s'approprier
l'intégralité des attributs de la culture cible pour jongler
ensuite entre deux référentiels culturels que d'accéder
à un espace au-delà de chacune des cultures pour favoriser
l'émergence d'une identité qui les transcende. Pour cet auteur,
c'est là que s'opère la distinction entre le bi-culturel et
l'inter-culturel. Être biculturel (ou triculturel, etc...) c'est se
condamner à n'occuper qu'un espace à la fois, ou, de façon
imagée, à être semblable à une pièce de
monnaie ou un dé, ne pouvant dévoiler qu'une seule face à
chaque lancer. En revanche, être interculturel, c'est avoir don
d'ubiquité et évoluer dans des sphères aux multiples
configurations. Un pied dans la culture source, un autre dans la culture cible,
mais à distance des deux, dans un espace interstitiel qui s'appuie sur
elles tout en les dépassant (Byram, 2003). Dans cette optique,
l'individu devient ce que Byram appelle le « locuteur interculturel
», celui qui a une latitude d'action dans plusieurs espaces de
communication (Audras et Chanier, 2007), celui qui communique avec les
représentants de la société d'accueil dans leur propre
langue et négocie l'équilibre entre les
référentiels culturels, s'incarnant ainsi en «
médiateur interculturel ».
L'ethnocentrisme engendre l'asymétrie entre les
référentiels culturels. Ainsi, si chacun interprète les
stimuli qu'il reçoit en fonction de ses propres codes, les situations
interculturelles sont susceptibles d'introduire de l'incertitude dans les
schémas standards de communication. En revanche, le médiateur
interculturel, lui, est capable de dissiper toute confusion car il sait
décoder correctement les messages émanant des
représentants des différentes cultures. Il peut porter un regard
lucide sur son référentiel culturel originel, sur ses
préconceptions, tout comme il peut comprendre l'Autre dans son
altérité essentielle, c'est-à-dire envisager le point de
vue de l'Autre à la lumière même de l'ethnocentrisme propre
à ce dernier ; autrement dit voir à travers les yeux de
l'étranger.
Le modèle de Byram présente l'avantage
précieux d'expliciter un ensemble de variables qui interagissent et
entrent en jeu dans la construction de la CIC. Cette décomposition donne
corps à un concept fugace, le rend plus tangible. En revanche, il a
l'inconvénient de se présenter comme un modèle statique en
ne distinguant aucun niveau d'habileté, comme si l'on était soit
compétent, soit incompétent, sans autre alternative. Par
ailleurs, il érige les cultures en blocs homogènes et immobiles
avec lesquels l'individu pourrait interagir directement, révélant
par là une approche quelque peu normative du concept de culture (Dervin,
2009).
2.2.2.2. Bennett et le modèle de
développement de la sensibilité interculturelle
Le modèle conçu par Bennett (1993) se propose
de hiérarchiser et expliquer les postures et les réactions des
individus face à la différence culturelle. Rappelons que l'auteur
parle, lui, de sensibilité et non pas de compétence
interculturelle. Ce modèle repose sur un continuum divisé en six
stades dont la succession reflète un degré accru d'ouverture
à l'altérité. Les stades sont indicatifs d'un type de
rapport à l'Autre et s'expriment par des attitudes et des comportements
caractéristiques. Chaque stade représente donc une façon
différente de voir, de structurer le monde régie par des
obstacles qui la limitent. De fait, lorsque l'individu passe d'une structure ou
configuration de la réalité à une autre, les nouveaux
paramétrages génèrent une nouvelle série
d'obstacles qui orientent les comportements et les attitudes. Pour
opérer avec succès leur transition vers un stade plus
avancé, les individus doivent résoudre les problèmes
inhérents au stade dans lequel ils se situent déjà.
Généralement parlant, les trois premiers stades
du continuum sont dits ethnocentriques, c'est-à-dire que l'individu ne
peut penser le réel qu'à travers le prisme de sa propre culture,
qu'il est au centre d'un monde qui gravite autour de ses préconceptions.
En effet, les croyances et les comportements initiaux intégrés au
cours du processus d'enculturation, lui-même lié au processus de
socialisation, ne font pas l'objet d'une remise en question. Les choses sont
« comme ça » et pas autrement (Bennett, 1993). Selon
Abdallah-Pretceille (1986, p. 81), l'ethnocentrisme c'est « la
difficulté voire l'incapacité, pour un groupe ou un individu,
d'effectuer une décentration par rapport à son groupe
culturel de référence ». En
définitive, cet immobilisme contribue à l'érection de
barrières entre « nous » et « eux » (ce qui peut
passer par les stéréotypes et les préjugés par
exemple) dans la mesure où l'Autre ne concorde pas avec ce que l'on
conçoit comme les normes culturelles classiques. À l'inverse, les
trois derniers stades sont dits ethnorelatifs, c'est-à-dire que
l'individu met sa propre culture en perspective, qu'il accepte que sa vision du
monde, avec les attitudes, les comportements, les valeurs qui la constituent
n'en soit qu'une parmi tant d'autres tout à fait viables. Pour
résumer, au fil des stades, l'individu progresse d'une conscience, d'une
perspective, monoculturelle à une vision du monde plus
élaborée, subtile et aiguisée, lui permettant de
reconnaître et gérer la différence et, ainsi,
d'élargir graduellement ses capacités d'action et de
communication en contexte interculturel (Hammer et al., 2003). Comme le dit
Bennett (1986), « La clef du développement de la
sensibilité et des aptitudes nécessaires à la
communication interculturelle réside d'abord dans la vision que chacun
entretient face aux différences culturelles ». Remarquons que
si la dynamique du continuum est généralement tenue pour
unidirectionnelle, occasionnellement, il est possible que l'individu
régresse à un stade antérieur. Passons maintenant en revue
les six étapes constitutives du continuum :
· Le déni de la différence culturelle.
Pour l'individu, il n'existe qu'une seule culture légitime, la sienne.
Il est complètement désintéressé par la
différence culturelle et l'ignore en érigeant des
barrières psychologiques ou physiques pour se maintenir à
l'écart de l'Autre. À ce stade, l'individu a tendance à
penser qu'il agit de façon naturelle et qu'il ne saurait en être
autrement. Il ne se sent pas menacé par la différence culturelle
car il la nie. Concrètement, cela pourrait se traduire au niveau des
comportements par la fréquentation exclusive de compatriotes ou encore
l'assimilation des traits culturels d'une société à ceux
de ses voisines.
· La défense face à la différence
culturelle. La seule culture valable est toujours celle de l'individu, la plus
évoluée, porteuse non plus de l'unique mais de la meilleure
façon de faire. L'individu réagit face à la menace que
représentent les autres cultures en les dénigrant tout en
affichant la sienne comme supérieur. Concrètement, cela peut
passer par les préjugés et les stéréotypes au
travers desquels sont attribués à des individus isolés des
caractéristiques indésirables censées refléter les
attributs de tout un groupe (ou vice-versa). Manifestation alternative du stade
de défense, l'individu peut être sujet à un contrecoup. Il
ne prend pas de recul par rapport à l'expérience positive de la
culture d'accueil, intègre les stéréotypes négatifs
de cette dernière à l'encontre de sa culture d'origine, et la
déprécie aveuglément. Dans les deux cas, l'individu
à ce stade se comporte de façon manichéenne envers
à la différence culturelle, soit en la diabolisant soit en
l'exaltant. C'est une évolution par rapport au stade du déni car
ici l'individu perçoit la différence culturelle de façon
assez forte pour
qu'elle soit menaçante, alors qu'il l'ignorait
précédemment.
· La minimisation de la différence culturelle.
L'individu reconnaît l'existence d'autres cultures mais à un
degré superficiel. Il considère que les traits de sa culture sont
universels et les généralise aux autres cultures sans
distinction, comme si l'humanité toute entière partageait un
creuset de valeurs élémentaires. L'altérité ne
constitue plus une menace car elle est banalisée, voilant ainsi toute
différence profonde. Selon Bennett, un individu à ce stade
pourrait par exemple se figurer que tous les peuples aimeraient vivre en
démocratie, ou que dans chaque culture les hommes sont
considérés comme les enfants de Dieu.
· L'acceptation de la différence culturelle.
Comme au stade précédent, l'individu reconnaît l'existence
d'autres cultures, mais cette fois il ne cherche pas à en
atténuer les spécificités. Il respecte la
légitimité des valeurs, comportements et attitudes d'autrui et
admet que sa propre culture fait partie d'un ensemble de cultures
également valables. Il s'agit ici d'une posture neutre face à la
différence culturelle. En revanche, si l'individu est prêt
à accepter, ou tolérer, l'altérité dans ce qu'elle
a de plus essentiel, cela ne sous-entend pas pour autant qu'il va
l'apprécier purement et simplement. Il ne s'agit pas d'une tentation
relativiste politiquement correcte, ni de condescendance. L'individu peut
émettre un jugement négatif à l'égard de la
différence, mais dans une perspective critique, et non plus
ethnocentrique. C'est d'ailleurs bien là l'enjeu de ce stade : la
relativité des valeurs. Le cheminement conduisant l'individu à
considérer que la nature et la hiérarchie des valeurs sont
contingentes au contexte culturel exige de lui qu'il souscrive à une
certaine éthique (Perry, 1970, in Hammer et al., 2003). Pour illustrer
cela, citons également Tardy (1983) « Comprendre l'autre dans
son altérité essentielle ne signifie pas en admettre
nécessairement les principes et Ies fondements. Encore moins
s'identifier à l'autre par une sorte de mimétisme culturel :
toute morale a ses parodies et ses dérives d'inauthenticité. La
compréhension n'exclut pas la contestation, davantage: elle en est la
condition de possibilité. Bref, l'éthique de la différence
n'est pas celle du caméléon ». Notons qu'à ce
stade l'individu n'adapte normalement pas ses comportements afin de
correspondre aux normes de la société d'accueil.
Généralement, il ne s'approprie pas non plus un grand nombre des
comportements caractéristiques des représentants de cette
dernière. Pour finir, l'esprit de l'individu reste ouvert sans qu'il
puisse pourtant appréhender les cultures dans toute leur
complexité.
· L'adaptation à la différence culturelle.
L'individu acquiert une latitude d'action dans deux espaces de communication
séparés. Il peut s'extraire temporairement de sa culture
d'origine pour se fondre dans celle de la société d'accueil.
Contrairement aux stades précédents qui se faisaient le reflet de
postures intellectuelles, la transition du stade de l'acceptation à
celui de
l'adaptation ne traduit plus une évolution
limitée au domaine affectif. En effet, l'individu est ici capable
d'opérer un ajustement fonctionnel aux normes de la
société d'accueil tout comme il peut intégrer les usages
qui y ont cours et les comportements de ses représentants. En somme, non
seulement l'individu est-il capable de voir le monde à travers les yeux
de l'Autre, mais il peut aussi communiquer efficacement lors des interactions
en manifestant des comportements et attitudes appropriés aux normes
culturelles en vigueur dans la société d'accueil. C'est ce que
Bennett appelle l'empathie. Par ailleurs, il différencie bien
l'adaptation de l'assimilation. Pour cet auteur, ce stade n'est pas synonyme
d'abandon de la culture d'origine au profit de celle de la
société d'accueil, il ne s'agit pas de les substituer. C'est un
mouvement de va-et-vient d'un répertoire culturel à l'autre.
Pratiquement, l'individu est spontanément capable d'appréhender
un comportement dans sa logique culturelle, de décoder les normes et
valeurs qui le sous-tendent, et d'agir ainsi que le requiert la situation
interculturelle.
· L'intégration de la différence
culturelle. Il n'est possible de parvenir à ce stade qu'après un
contact prolongé avec l'altérité. C'est d'ailleurs une
inflexion courante chez les expatriés de longue durée, les
globe-trotters ou les autochtones issus de subcultures minoritaires par exemple
(Hammer et al., 2003). Ce stade implique un processus de reconstruction
cognitive au cours duquel l'individu intègre les éléments
des diverses cultures sans pour autant s'identifier à aucune d'elles. En
d'autres termes, l'individu développe une vision kaléidoscopique
du monde, en marge de sa culture originelle et de celle de la
société d'accueil. On pourrait rapprocher cela de la description
que fait Adler (1977) de la personne multiculturelle : « ce n'est pas
simplement la personne sensible à plusieurs cultures différentes.
C'est plutôt la personne qui est constamment en train de devenir une
partie de et qui se sent en même temps en dehors d'un contexte culturel
donné ». Dune part, l'individu est amené à
réinterpréter son identité culturelle, et d'autre part sa
vision kaléidoscopique est susceptible de le placer en position
d'intermédiaire culturel. Bennett précise que la transition du
stade de l'adaptation à l'intégration ne traduit pas un meilleur
fonctionnement en situation interculturelle. Il indique en outre qu'il n'est
pas forcément préférable de s'affranchir de tout
enracinement culturel. Si tout le monde devenait marginal, de quoi serait-on en
marge au juste? (Bennett, 1993). Pour résumer, le véritable enjeu
de ce stade réside dans la gestion de ce que Bennett appelle la
marginalité culturelle. C'est-à-dire le fait de ne plus
s'identifier durablement à une norme culturelle. Selon cet auteur, la
marginalité culturelle peut prendre deux formes. Dans la
première, l'individu se sent aliéné puisqu'il ne se
reconnaît dans aucune culture. Ainsi, il peut être enclin à
se dévaloriser ou faire l'objet de jugements
négatifs tant de la part des représentants de sa
culture d'origine que des membres de la culture d'accueil. Il est comme pris
dans un feu croisé en quelque sorte. Inversement, la deuxième
forme de marginalité est dite « constructive », le flottement
entre les cultures fait partie intégrante de l'identité du sujet.
Il se perçoit comme intrinsèquement interculturel et navigue au
gré des situations, adaptant aisément ses comportement et ses
perspectives, sans qu'il n'en résulte aucun conflit interne, aucun
dommage identitaire collatéral.
1. Déni et retrait
2. Défense et dénigrement
3. Minimisation et universalité
4. Acceptation et relativisme
5. Adaptation et alternance
6. Intégration et reconstruction
|
Figure 2 : modèle de développement de la
sensibilité interculturelle (adapté de Bennett, 1993)
À l'encontre du modèle de Byram, l'avantage de
ce modèle est de présenter une vision évolutive de l'objet
qu'il se propose de décrire. En revanche, il fournit peu d'informations
sur la nature des obstacles à surmonter afin d'évoluer d'un stade
à l'autre, ainsi que sur la manière de le faire. Ajoutons qu'ici
encore c'est une conception quelque peu normative, au sens de Dervin (2009),
qui sous-tend le concept de culture.
2.2.3. Notre approche
Dans ce sous-chapitre, nous allons d'abord faire une
synthèse des modèles de Byram et de Bennett. Puis, nous tenterons
de donner une définition de la compétence interculturelle avant
de relativiser tout cela.
2.2.3.1. Synthèse des modèles
Chacun des deux modèles que nous venons de passer en
revue présente des avantages dans l'approche conceptuelle de son objet.
Mentionnons justement que Hammer et al. (2003) ont tenté de
démêler l'écheveau que représente le concept de CIC
au sens large en distinguant la sensibilité interculturelle de la
compétence interculturelle. Selon eux, la sensibilité
interculturelle se limiterait à l'aptitude à discriminer et
éprouver la différence culturelle, tandis que la
compétence
interculturelle recouvrirait, elle, la faculté de
penser et agir de façon interculturellement appropriée.
Néanmoins, si l'on s'en tient aux modèles
présentés, il n'est pas possible d'opérer une
démarcation aussi claire. D'une part, la sensibilité
interculturelle telle qu'envisagée par Bennett se traduit elle aussi par
des comportements, des représentations et des attitudes permettant au
sujet d'interagir en contexte interculturel, et d'autre part la
compétence interculturelle telle que décrite par Byram englobe
également l'adoption d'une perspective ethnorelative. Ainsi, tout en
présentant des traits uniques, ces deux modèles se recoupent
à plusieurs égards. C'est en raison de cette
complémentarité que nous avons choisi de les combiner afin
d'appréhender la CIC. Notre approche nous conduit donc à
distinguer trois paliers d'apprentissage interculturel :
1) Décentration et ethnorelativité.
2) Appropriation de savoirs et efficacité.
3) Dépassement des référentiels culturels
et hybridité.
Notons bien qu'il ne s'agit pas ici de présenter un
modèle de CIC en tant que tel, mais plus modestement de creuser des
sillons susceptibles d'être approfondis ultérieurement. Cette
précaution prise, explicitons la teneur de chacun des trois paliers tels
que nous les envisageons actuellement. Tout d'abord, décentration et
ethnorelativité.
· Pour nous, ce qui est au coeur de la CIC c'est bien
la décentration. Se décentrer c'est relativiser ses valeurs,
interroger ses préconceptions, remettre en question son
référentiel culturel en somme. L'enjeu de la décentration
consisterait à opérer une sorte d'épochê, de
dépouillement par rapport à son référentiel
culturel. En situation interculturelle, il s'agit avant toute chose de ne pas
basculer dans l'anxiété face à la perte de ses
repères, voire à la remise en cause de son
référentiel culturel. Au contraire, faire preuve de
décentration c'est accepter l'incertitude, l'ambiguïté
inhérente à la différence culturelle, et être
prêt à rentrer dans un processus de transformation graduelle
initié par la rencontre et la fréquentation d'autrui sans
occulter ni céder aux conflits internes que cela engendre. L'adoption
d'une telle perspective aiderait le sujet à mieux saisir l'Autre dans
son altérité essentielle, à faire preuve
d'ethnorelativité ou entrevoir que la vision du monde d'autrui ou
l'organisation sociale d'une société donnée
présente une alternative cohérente et viable à ce que l'on
connaît et concevait jusque là comme allant de soi. La
décentration est donc la pierre angulaire de la CIC en ce qu'elle
représente la première marche vers la reconstruction cognitive,
affective, comportementale du sujet au contact de son environnement. Notons que
ce premier palier n'exclut pas les situations communication mais qu'elles n'en
sont pas l'objet premier.
Par delà cette délimitation globale, on pourrait
distinguer plusieurs niveaux d'habileté dans ce premier palier afin
d'introduire une certaine dynamique et de ne pas bâtir des
catégories
factices discriminant des individus dits «
compétents » et d'autres qui ne le seraient pas du tout. Par
exemple, il serait possible d'opérer un nivellement en fonction de la
propension des individus à suspendre leur jugement et à accepter
l'Autre, c'est-à-dire selon la fréquence à laquelle ils
adoptent une posture de décentration et d'ethnorelativité face
à la différence culturelle. On pourrait également inclure
un élément ayant trait à l'écueil du relativisme
culturel, consistant à considérer que tout se vaut (Reboul, 1989,
1991), à mi-chemin entre l'ethnocentrisme et
l'ethnorelativité.
Intéressons-nous maintenant au second palier,
appropriation de savoirs et efficacité.
· C'est suite au processus de décentration que
peut avoir lieu l'appropriation active par le sujet de ceux des
éléments caractéristiques de l'altérité qui
lui permettent de communiquer avec les autochtones ou d'appréhender la
société d'accueil dans toute sa complexité. C'est ce qui
lui permet de développer de nouveaux comportements, attitudes ou
représentations adéquats dans son nouvel environnement. L'enjeu
de ce deuxième palier réside dans la nature des situations
d'interaction. Il s'agit de s'adapter plus ou moins consciemment à la
situation et à l'Autre, de s'imprégner de ce qui pour autrui fait
sens (l'échelle des valeurs, etc.) afin de comprendre la symbolique
d'ensemble qui lie société. On retrouverait là les
savoirs-sociaux, les savoirs-comprendre ou les savoirs apprendre-et-faire du
modèle de Byram par exemple. Finalement, suite à notre premier
palier qui, comme le diraient Hammer et al. (2003), reflète plus
particulièrement l'aptitude des sujets à éprouver et
discriminer la différence culturelle, il est ici question de s'engager
de manière fonctionnelle dans une dynamique empreinte de sens.
Remarquons que des apprentissages dans le second palier peuvent avoir lieu
avant que le processus de décentration ne soit pleinement achevé.
Néanmoins, reconnaitre et estimer la différence culturelle
à sa juste valeur constitue un prérequis sans lequel il ne
saurait y avoir ni progrès possible pour l'individu au plan humain, ni
relations pérennes entre les êtres. En effet, une véritable
efficacité en situation interculturelle requiert motivation et respect
envers l'Autre. Par conséquent, posséder des connaissances ou des
savoirs quelconques mais considérer autrui comme inférieur ne
peut conduire au développement de la compétence
interculturelle.
Ici encore, il serait envisageable de distinguer
différents niveaux d'habileté en fonction de l'aptitude des
sujets à communiquer ou à adopter un comportement
approprié (respecter les usages locaux, etc.) par exemple.
Abordons à présent le troisième palier,
dépassement des référentiels culturels et
hybridité.
· Après avoir suffisamment côtoyé
l'Autre et s'être familiarisé à de nouvelles façons
de faire, d'être, de voir le monde, etc. aptes à le voir
fonctionner efficacement hors de sa société
d'origine, le sujet peut développer la capacité
à articuler consciemment, à mettre en relation, les traits issus
de son propre référentiel culturel et les traits culturels issus
des référentiels de l'ensemble des personnes avec lesquelles il a
été en contact direct et prolongé. Puisque le sujet
dispose de la faculté d'évoluer dans plusieurs espaces de
communication ; de voir le monde à travers les yeux de l'Autre dans une
certaine mesure, il ne s'agit plus seulement de pouvoir évoluer avec
succès dans l'une ou l'autre société mais de transcender
les référentiels culturels. L'enjeu ici est de développer
une vision du monde hybride qui, plus que de reconnaître et estimer
l'altérité, l'englobe.
Là également, nous pourrions distinguer
plusieurs niveaux d'habileté, notamment en incluant un
élément de marginalité culturelle au sens de Bennett
(1993).
Ainsi, palier après palier, ce continuum traduit de la
part des individus une prise de position sans cesse plus engagée en
faveur de la différence culturelle, ou une plus grande propension
à l'exploiter, comme s'il s'agissait progressivement d'une
appréhension, d'une compréhension, et enfin d'une appropriation
de cette dernière.
Toutefois, reconnaissons que cette approche est très
incomplète et pèche plus particulièrement par l'absence
d'indicateurs clairs, de comportements, attitudes et représentations
observables, identifiables sur le terrain. Néanmoins, ce
découpage nous permet de prendre position par rapport à la
question de la nature spécifique ou générale de la CIC
(Bartel-Radic, 2009). Autrement dit, suite à un séjour au
Brésil, le sujet est-il à même de transférer ses
apprentissages interculturels lors d'un passage en Chine par exemple?
L'apprentissage interculturel fait-il du sujet un spécialiste de
l'interculturel, avec une connaissance pointue d'une société
précise, ou bien un généraliste capable de s'adapter
continuellement à des environnements différents? Pour nous, les
dispositions du premier palier de la CIC, la décentration et
l'ethnorelativité, sont d'ordre générique. Elles peuvent
donc être réinvesties et développées au cours de
n'importe quelle situation. Nous ne disons pas qu'elles puissent être
captées pleinement à l'issue de la première confrontation
à l'altérité, ni qu'un individu ne pourrait jamais plus
éprouver de réactions ethnocentriques après avoir atteint
un forte propension à se décentrer, mais nous pensons que c'est
une disposition que l'on développe graduellement, sans la re-commencer
tout à fait à chaque nouvelle expérience. En revanche, le
second palier exige, lui, un apprentissage chaque fois renouvelé du tout
au tout car spécifique à l'environnement, aux individus
rencontrés. Quant au dernier palier, il prend appui sur les
expériences successives du sujet et échappe ainsi à la
dualité entre généralité et
spécificité.
2.2.3.2. Définition du concept
Maintenant que nous avons éclairci quelque peu la
nature de la CIC, il est temps d'en proposer un essai de définition.
Livrons-nous d'abord à une analyse sémantique du syntagme de
compétence interculturelle. D'une manière assez évidente,
l'interculturel renvoie à un objet qui est entre, ou parmi, les
cultures, soit pour nous les significations. Qu'en est-il alors de la
compétence? Force est de constater que sa définition varie selon
les champs disciplinaires. Pour certains, la notion de compétence a
été largement galvaudée dans la littérature
scientifique faute de prise en compte rigoureuse de sa diversité
sémantique et conceptuelle (Deardorff, 2006). Appuyons-nous sur G. Le
Boterf (1995, 1997), pour qui la compétence se pare de plusieurs
attributs. Tout d'abord, elle dérive de l'articulation ou, selon ses
propres termes, de la mobilisation ou l'activation, de plusieurs savoirs.
Ensuite, elle est opérationnelle dans un contexte donné, elle
s'ancre dans une situation. Pour finir, elle permet l'action. Il s'agit d'agir,
dans une démarche de résolution de problème ou de
communication par exemple. Cela complète valablement une autre
définition selon laquelle la compétence en science de
l'éducation doit être envisagée comme un savoir en usage
(Malglaive, 1990). Les implications de cette définition sont les
suivantes :
· La compétence est une notion dynamique. Elle se
construit.
· Elle est dépendante du contexte : de l'acteur
lui-même, de l'environnement. Ainsi, si les savoirs constitutifs de la
compétence ne sont pas adéquatement mobilisés puis
synchronisés, on ne peut pas agir de façon optimale. On peut donc
être compétent dans une situation donnée à un moment
donné mais plus quelque temps après dans la même situation.
Comme le formule Tardy (1983) « Je dois essayer de comprendre l'autre,
en tant qu'il est un autre, dans sa différence centrale, dans ce qui
à mes yeux en fait un étranger. Effort inouï de
décentration culturelle, si inouï que toute lassitude
passagère ne saurait être taxée de faute contre
l'humanité. On ne peut exiger que 1'on se mette à la place de
l'autre vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Le travail de l'enculturation
mérite, lui aussi, son repos hebdomadaire ».
· Puisque la compétence est tributaire de
l'acquisition préalable d'un corps de savoirs d'une part, et de leur
mobilisation d'autre part, nous sommes amenés à dire qu'elle
n'est pas uniforme. On peut la décomposer en niveaux d'habileté,
selon le degré d'acquisition puis de mobilisation des savoirs
atteints.
En tenant compte de tout ce que nous avons dit depuis le
début de ce chapitre, nous proposons la
définition suivante de
la CIC : la compétence interculturelle est un construit formé
d'une
combinaison de savoirs, attitudes et comportements qui, une fois
mobilisés lors d'une situation
singulière d'interaction, permettent au sujet
d'exploiter avec plus ou moins de succès (en vue de comprendre et/ou
communiquer) les significations diffuses qui émanent des stimuli
(discours, comportements, attitudes...) renvoyés par les protagonistes
de l'interaction.
2.2.3.3. Pondération
Malgré tout, ni notre synthèse sur la nature de
la CIC ni notre essai de définition ne sauraient se suffire à
eux-mêmes. La CIC telle que nous l'avons présentée est un
objet complexe et difficile à acquérir. Il convient donc de
procéder avec circonspection. De fait, il semble exceptionnel de jamais
pouvoir atteindre un véritable cosmopolitisme, c'est-à-dire de
parvenir à « s'enraciner dans la profondeur de plusieurs
mémoires, de multiples particularités, de revendiquer d'autres
appartenances en plus de la sienne » (Bruckner, 1992). La CIC englobe
en effet un vaste champ d'action aux multiples dimensions et, en dépit
de tout modèle (modèles qui ne sont par ailleurs jamais que des
représentations simplifiées de conduites humaines complexes), son
acquisition n'est jamais parachevée. En effet, dans une
société donnée, lors de ses interactions, le sujet n'a pas
affaire au « tout » de la culture d'autrui (Vatter, 2003), comme s'il
s'agissait d'un rayonnage dans lequel on pourrait piocher à sa guise. Il
est seulement possible de s'appuyer sur une connaissance partielle et
ponctuelle de tout référentiel culturel, de toute
société. L'élément clef, ce sont les acteurs par le
biais desquels cette connaissance est transmise, c'est-à-dire les
personnes avec lesquelles le sujet interagit et les situations auxquelles il
fait face, et qui font office de relai dans son apprentissage interculturel.
Ainsi, aucune expérience interculturelle n'est reproductible car elle
repose sur une intersubjectivité dont les conditions ne peuvent jamais
être identiques. On peut parler d'une double singularité
sujet/situation. Chaque séjour à l'étranger est donc
unique. Il en résulte une certaine connaissance graduée
d'éléments significatifs différente pour chaque individu
(ibid.). Par ailleurs, selon Tardy (1983) « il faut admettre enfin,
quoi que cela puisse coûter à notre orgueil, que la tâche
que je viens de décrire, au delà d'un certain seuil, devient
impossible. L'altérité culturelle, dans ce qu'elle a d'essentiel,
dans ce qui fait qu'elle est vraiment étrangère, est un objet
inaccessible. On peut tourner autour, se familiariser avec sa
périphérie. progresser un peu dans une fissure étroite.
Mais au-delà, il reste une sorte d'opacité constitutive des
rapports entre les êtres, qu'il est vain de vouloir nier, sauf par
arrogance. D'où cette phrase un peu sentencieuse, qui est, pour moi et
pour l'instant, le dernier mot de la question : l'éthique de la
différence, ce n'est pas chercher à comprendre totalement toutes
les altérités, c'est admettre qu'elles existent et être
capable d'en supporter l'existence, même incomprise, parce
qu'incomprise ». La CIC est donc un apprentissage à vie qui,
pour nous, aura rempli ses objectifs s'il contribue à faire passer les
gens d'un exotisme réciproque à une familiarité
réciproque (Vatter, 2003). Plus qu'un simple outil pratique
destiné à
évoluer dans un contexte donné, il s'agit
là d'un puissant outil social qui participe à la lutte contre
l'intolérance, la xénophobie et l'ethnocentrisme, tant chez soi
qu'à l'étranger (Fantini, 2000, 2001). Pour conclure, observons
à présent un détail qui a son importance : la perspective
civilisationnelle sous-jacente au concept de CIC. On ne peut faire
l'économie de remarquer que l'étude de cette dernière dans
le monde scientifique est largement, sinon exclusivement, européano- et
américanocentrée. Il est donc nécessaire de
reconnaître cette limite, qui peut même prendre l'allure d'un
paradoxe. Il semble en effet curieux que la recherche sur un concept qui plaide
pour l'ethnorelativité et la décentration soit subordonnée
à une aire civilisationnelle particulière : l'Occident.
Faisons-en notre profit et tâchons de nous montrer circonspects.
3. Problématique
Au vu de l'ensemble des éléments ci-dessus, il
semble bien que les transformations socioculturelles de l'étudiant et
l'accroissement de son degré de CIC soient des enjeux majeurs lors d'un
séjour à l'étranger. Pour nous, ces concepts
représentent deux volets indissociables qui concourent à la
réussite, ou à l'échec, du séjour. En
conséquence, l'impulsion que nous envisageons de donner à notre
travail nous pousse à les considérer ensemble. Notre angle
d'approche en vue d'étudier l'impact des échanges universitaires
internationaux sur leurs participants est donc le suivant : comment peut-on
envisager les liens entre les transformations socioculturelles et le
développement de la compétence interculturelle chez les
étudiants à l'issue de leur séjour au Brésil?
METHODOLOGIE DE RECHERCHE
Dans cette partie, nous présenterons d'abord les
sujets qui ont participé à cette étude. Ensuite, nous
commenterons l'ensemble de notre processus de recueil de données, et
enfin nous aborderons notre grille d'analyse.
1. Présentation de la population de
recherche
Pour constituer l'échantillon de notre étude,
nous avons contacté plus d'une trentaine d'étudiants de
l'Université Lumière Lyon 2 ayant séjourné au
Brésil dans le cadre des études intégrées, ainsi
qu'une dizaine d'étudiants brésiliens ayant étudié
à l'Université Lumière Lyon 2. Sur l'ensemble des
personnes contactées, huit ont donné une réponse. Parmi
elles, quatre ont accepté de se porter volontaires. Finalement, seules
trois étudiantes françaises seront allées jusqu'au bout de
cette démarche. Afin de respecter leur anonymat et la
confidentialité des données recueillies, nous prénommerons
ces étudiantes P, C et M.
· P est une étudiante de Master 1 en psychologie.
Elle a effectué un séjour d'un peu moins de deux mois à
Caxias do Sul, au sud du Brésil, dans le cadre d'un stage au sein d'une
école publique. C'est une personne qui a voyagé, et dont la
famille a des origines anglaises, ce qui l'a conduit à grandir dans un
contexte international, si ce n'est interculturel. Précédemment
à son expérience au Brésil, P a notamment effectué
un séjour d'étude d'un an en Italie au cours de sa Licence.
· C est également étudiante de Master 1 en
psychologie. Elle a elle aussi effectué un séjour de moins de
deux mois au Brésil, mais au nord, à Recife. Elle a du effectuer
deux stages, l'un dans une structure s'occupant d'enfants autistes, l'autre
dans une association visant au développement personnel et identitaire
d'enfants des favelas. Pareillement, C a beaucoup voyagé. Elle a
notamment effectué un séjour d'étude d'une durée de
six mois au Canada en 2008 dans le cadre de ses études universitaires,
ainsi qu'un séjour de longue durée à la Réunion,
entre 2009 et 2011, là encore dans un cadre académique.
· M, quant à elle, est en troisième
année de Licence en sciences de l'éducation. Elle a passé
tout son cinquième semestre à Caxias do Sul, au sud du
Brésil. Contrairement à P et C, il s'agissait là de son
premier « grand » voyage, bien qu'elle ait déjà
effectué des sorties scolaires, l'une de deux semaines en Espagne et
l'autre d'une semaine en Angleterre, au cours du collège et du
lycée. Notons qu'elle a également eu l'opportunité sur
place de travailler dans une école de langue.
2. Instrumentation
Dans un premier temps, nous traiterons ici de la
procédure que nous avons suivie dans notre recueil de données.
Puis, nous présenterons l'intégralité des questionnaires
de notre recherche. Pour finir, nous aborderons la construction des grilles
d'entretien.
2.1. Procédure
Pour recueillir les données nécessaires
à la réalisation de cette étude, nous avons
travaillé à partir de questionnaires et d'entretiens
semi-dirigés auprès de trois étudiantes de
l'Université Lumière Lyon 2 ayant séjourné au
Brésil au cours de l'année scolaire 2011-2012. Nous avons
interrogé les étudiantes après leur séjour,
à leur retour en France. Ce sont les questionnaires qui ont
été administrés en premier aux sujets.
Au total, nous en avons fait usage de dix au cours de ce
travail, et chaque sujet s'est vu présenté l'ensemble des
questionnaires en une seule fois. L'intégralité d'entre eux se
présente sous forme d'auto-évaluation : confronté à
une série d'items, le participant doit se positionner vis-à-vis
de chacun d'eux sur une échelle généralement comprise
entre 1 et 5. Le temps nécessaire estimé afin de remplir le
Questionnaire général est d'une douzaine de minutes, et d'une
minute en moyenne pour chacun des neuf autres questionnaires. Concernant les
résultats, le comptage se fait en fonction des réponses du
candidat comme suit. Par exemple, s'il indique que l'item x lui
correspond à un degré de 1/5, nous comptabilisons un point, et
ainsi de suite. En revanche, il se peut que les items soient inscrits sous un
régime de comptage inversé. Par exemple, si le candidat indique
que l'item y lui correspond à un degré de 1/5, nous
comptabilisons cette fois cinq points. Ensuite, le score réel du
candidat est ramené au score maximal possible puis multiplié par
cent. Par exemple, pour les items x et y : [6/10 x 100 =
60/100 ]. Pour chaque questionnaire, plus le score total est proche de 100,
meilleures sont les aptitudes du sujet dans les domaines
évalués.
Ensuite ont eu lieu les entretiens. Chaque sujet a
bénéficié d'un seul entretien. Nous les avons conduits sur
deux journées consécutives, à la bibliothèque
universitaire Chevreul, dans une salle réservée à cet
effet. Le premier entretien s'est déroulé le jeudi 3 mai, entre
10 heures et midi, avec P. Les deux autres se sont déroulés le
vendredi 4 mai, de 10 heures à 11 heures avec C, puis de 11 heures
à midi avec M. Initialement, nous avions convenu d'un créneau
d'une durée d'une heure pour chacun des entretiens. Cependant, pour le
premier d'entre eux, la salle ayant été réservée
pour deux heures et P étant seule à être interviewée
ce jour là, nous avons eu le loisir de poursuivre notre discussion plus
longuement que prévu. Finalement, nos entretiens auront duré 89
minutes avec P, 50 minutes avec C et 46 minutes avec M.
Ajoutons que, initialement, il était prévu
d'organiser la collecte de données en deux phases
distinctes : avant le départ des étudiants pour
le Brésil, puis à leur retour en France, afin de pouvoir fixer
avec davantage de rigueur les jalons d'une éventuelle évolution.
Cependant, en raison des difficultés rencontrées lors de la
composition de l'échantillon, nous avons été contraints de
réviser notre procédure et d'abandonner la première phase
de collecte de données.
2.2. Présentation des questionnaires
Nous allons présenter ici l'ensemble des questionnaires
avec lesquels nous avons travaillé.
2.2.1. Le Questionnaire général
Comme son nom l'indique, ce questionnaire
élaboré par nos soins vise à récupérer des
données élémentaires en relation avec le séjour
à l'étranger, notamment afin de le contextualiser et de s'en
faire une première impression. En outre, ce questionnaire nous a
particulièrement été utile pour orienter
spécifiquement le déroulement des entretiens en fonction des
réponses fournies par chacun des sujets.
2.2.2. L'Échelle de communication
interculturelle
Pour créer ce questionnaire, nous nous sommes
appuyés sur l'Intercultural Sensitivity Scale (ISS)
développée par Chen et Starosta (2000). Notre Échelle de
communication interculturelle comporte 20 items évalués de 1
à 5. Il s'agit principalement de mesurer la capacité des sujets
à communiquer efficacement avec l'Autre. Remarquons que le comptage des
items 1 et 4 d'une part, puis 8 à 20 d'autre part, est
inversé.
2.2.3. L'Échelle de distance culturelle
Pour créer ce questionnaire, nous nous sommes
inspirés de la Cultural Distance Scale (CDS) développée
par Babiker et al. (1980). Notre Échelle de distance culturelle comprend
20 items évalués de 0 à 5. Il s'agit de recueillir le
degré perçu de différence entre la société
d'origine et la société d'accueil chez les sujets. Notons que le
comptage de l'ensemble des items est inversé.
2.2.4. L'Échelle de sensibilité
interculturelle
Pour créer ce questionnaire, nous nous sommes
basés sur la Socio-Cultural Adaptation Scale (SCAS)
développée par Ward et Kennedy (1999). Nous avons
également utilisé la traduction française de la SCAS
disponible dans l'étude de Ait Ghezala-Rossier (2003). Notre
Échelle de sensibilité interculturelle se compose de 26 items
évalués de 1 à 5. Elle se destine à mesurer le
degré d'ajustement des sujets à la vie quotidienne dans la
société d'accueil ainsi que leur ouverture à
l'altérité. Notons là encore que le
comptage de la totalité des items est inversé.
2.2.5. L'Échelle de soutien social
Pour créer ce questionnaire, nous nous sommes
appuyés sur la Multidimensional Scale of Perceived Social Support
(MSPSS) développée par Zimet et al. (1988). Notre Échelle
de soutien social est constituée de 18 items évalués de 1
à 5. Il s'agit de mesurer le soutien social dont estiment avoir
bénéficié les sujets au cours de leur séjour
à l'étranger.
2.2.6. L'Échelle d'efficacité
interculturelle
Pour créer ce questionnaire, nous nous sommes
basés sur la General Self-Efficacy Scale (GSES) développée
par Schwarzer et Jerusalem (1995) ainsi que sur sa traduction française
(Dumont, Schwarzer et Jerusalem, 2000). Nous avons aussi utilisé la
Cross-Cultural Social-Efficacy Scale for Students (CCSESS)
développée par Fan et Mak (1998). Notre Échelle
d'efficacité interculturelle se compose de 19 items
évalués de 1 à 5. Il s'agit notamment de mesurer le
sentiment d'auto-efficacité des sujets et leur posture vis-à-vis
de différentes situations d'interaction sociale lors du séjour
à l'étranger. Ajoutons que le comptage des items 2, 3, 4, 5, 7, 8
et 11 est inversé.
2.2.7. L'Échelle d'adaptation
académique
Pour créer ce questionnaire, nous nous sommes
inspirés du Student Adjustment to College Questionnaire (SACQ)
développé par Baker et Siryk (1989), ainsi que de la Student
Academic Stress Scale (SASS) développée par Busari (2011). Notre
Échelle d'adaptation académique est composée de 26 items
et se destine à évaluer la façon dont se positionnent les
sujets par rapport aux études et à la vie à
l'université en général pendant leur séjour
à l'étranger. Les items sont évalués sur une
échelle de 1 à 5. Notons que le comptage des items 3, 4, 6, 7, 9,
19, 21, 22, 23, 24, 25 et 26 est inversé.
2.2.8. L'Échelle de stress d'acculturation
Pour créer ce questionnaire, nous nous sommes
basés sur l'Acculturative Stress Scale for International Students
(ASSIS) développée par Sandhu et Asrabadi (1994). Notre
Échelle de stress d'acculturation se compose de 14 items
évalués de 1 à 5. Il s'agit de mesurer le bien-être
psychologique des sujets. Ajoutons que le comptage de
l'intégralité de cette échelle est inversé.
2.2.9. L'Échelle de bien-être
Pour créer ce questionnaire, nous nous sommes
appuyés sur le Bio-Psycho-Social Health Index (BPSHI)
développé par Tonks et Paranjpe (1999). Notre Échelle de
bien-être comprend 20 items évalués de 1 à 5. Elle
vise principalement à mesurer si l'équilibre affectif, social ou
physique des sujets a été mis en péril lors du
séjour à l'étranger. Remarquons que le comptage des items
1, 2, 3, 8, 10, 11, 15, 16, 17, 18, 19 et 20 est inversé.
2.2.10. Le Brief COPE
Originellement développé par Carver et al.
(1989), nous nous sommes également appuyés sur la traduction
française de ce questionnaire (Muller et Spitz, 2003) afin de l'adapter
à notre étude. Tel que nous l'avons remodelé, le Brief
COPE se compose de 12 items évalués sur une échelle de 1
à 5. Il vise à jauger la façon dont réagissent les
sujets lors d'une situation stressante ou délicate. Notons que le
comptage des items 1, 4, 9 et 12 est inversé.
2.3. Présentation de la grille d'entretien
Nos grilles d'entretien ont été
élaborées afin d'expliciter les points qui présentaient le
plus d'intérêt à la lecture des réponses des
participants à l'ensemble des questionnaires d'une part, et de permettre
aux sujets de nous livrer un maximum de leurs impressions d'autre part. Dans
cette optique, conduire des entretiens semi-dirigés présentait
justement l'avantage de fournir aux participants une opportunité de
parler plus librement de leur séjour. Ainsi, il leur était
occasionnellement possible de s'engager dans des digressions ou de soulever
d'eux-mêmes certains points qui leurs tenaient à coeur. Ces
passages sous forme de récits de vie pendant lesquels les sujets parlent
de manière spontanée sont particulièrement importants car
ils permettent, de façon privilégiée, de déceler
certains éléments sous-jacents à leur construction
identitaire et personnelle, ou à leur regard sur le séjour
à l'étranger par exemple, qui, autrement, n'auraient pas pu
être mis en lumière. Par ailleurs, l'expérience du
séjour à l'étranger étant intense, cela leur offre
un espace de réflexivité, un moyen de mettre leur
expérience en perspective et de faire un bilan de leur vécu sur
place.
3. Grille de lecture
Dans ce chapitre, après avoir successivement
abordé la façon dont nous ferons sens de l'analyse des
résultats relatifs aux transformations socioculturelles puis à la
compétence interculturelle des sujets, nous mettrons notre travail en
perspective.
3.1. Transformations socioculturelles
C'est à la lumière de notre conceptualisation
que se présente notre grille d'analyse et notre perspective sur les
données recueillies. Pour l'analyse des résultats, nous avons
d'abord passé en revue les données associées à
l'ensemble des indicateurs des trois dimensions des transformations
socioculturelles. Pour l'interprétation des résultats, nous avons
ensuite mis ces données en parallèle avec chacune des composantes
des transformations socioculturelles, en fonction de leur dimension
d'appartenance.
3.2. Compétence interculturelle
En revanche, concernant la compétence interculturelle,
si nous avons développé une esquisse conceptuelle, nous ne
disposons pas de modèle d'analyse dans cette étude. De ce fait,
pour l'analyse des résultats, nous avons procédé
empiriquement, à partir des données recueillies sur le terrain.
Après une étude des informations issues des questionnaires et des
entretiens, nous avons pu distinguer un certain nombre de thèmes nous
fournissant des indices afin de situer les sujets au sein de notre
conceptualisation de la CIC. Les thèmes qui ont émergé
sont les suivants :
· Sens du séjour à l'étranger.
· Ressenti sur le séjour.
· Tensions éprouvées.
· Évolution personnelle.
· Projets d'avenir.
Par la suite, pour l'interprétation des
résultats, nous avons donc rapporté ces données à
notre ébauche de modèle théorique afin de situer les
sujets par rapport aux trois paliers de la compétence interculturelle
telle que nous l'avons envisagée, à savoir : décentration
et ethnorelativité, appropriation de savoirs et efficacité,
dépassement des référentiels culturels et
hybridité.
3.3. Pondération
Notre travail repose sur les informations que nous ont
communiquées les sujets, par auto-
évaluations et entretiens,
de façon rétrospective. Par conséquent, il est tout
à fait plausible qu'il se
glisse dans les données recueillies un certain nombre
d'inexactitudes, d'oublis, d'exagérations, de confusions, etc., et ce
soit fortuitement, soit à dessein. Tout cela est inhérent
à la nature même de notre procédure de recherche. De fait,
si, par éthique, il ne nous est pas permis de remettre en question
l'authenticité de la parole des sujets, de douter de leur
sincérité, il est néanmoins indispensable que nous
puissions adopter une posture critique et ne pas prendre pour argent comptant
leur discours, aveuglément, simplement parce qu'il est le leur. Ainsi,
il est parfois nécessaire de lire entre les lignes ou, lors de l'analyse
d'un entretien, de s'intéresser aussi bien à la forme qu'au fond
du discours par exemple.
ANALYSE DES RESULTATS
Dans cette partie, nous analysons les réponses de P, C et
M à nos questionnaires et entretiens.
1. Le cas de P
Premièrement, nous allons contextualiser le
séjour de P au Brésil et essayer d'en déceler les origines
ainsi que les motivations qui l'ont porté. Deuxièmement, nous
passerons en revue les données relatives aux indicateurs des
transformations socioculturelles. Dernièrement, nous examinerons les
réponses de P associées aux différents thèmes en
lien avec la CIC.
1.1. Contexte
P est une étudiante en Master 1 de psychologie qui a
séjourné à Caxias do Sul pour une durée
inférieure à deux mois afin de satisfaire aux exigences d'un
stage qu'elle a effectué dans une école publique. Il apparait que
le séjour de P au Brésil n'était pas anticipé.
Initialement, elle projetait de se rendre au Brésil durant
l'été 2012 afin de rendre visite à son ami,
brésilien, et de découvrir un pays auquel elle portait de
l'intérêt mais qu'elle ne connaissait pas. Cependant, au
début de l'année scolaire, l'occasion pour P d'effectuer son
stage de Master 1 au Brésil se présenta, et elle la saisit :
« je sais pas c'est juste venu là, c'est venu
là vraiment sur un plateau j'avais rien demandé,
je comptais y aller cet été en fait du coup
j'y vais pas et en fait c'était genre « waow » c'est
juste venu là quoi » ;
« Donc j'ai tout de suite sauté sur l'occasion
évidemment ».
Concernant ses motivations, il semble que plusieurs raisons
l'aient conduites à se lancer dans cette aventure. Pour une part, cette
opportunité de stage à l'étranger revêtait l'aspect
d'une expérience professionnelle valorisante :
« ça me donnait l'occasion d'avoir une
expérience professionnelle là-bas si tu veux [...] enfin pour moi
l'argument était professionnel ».
Ensuite, cela lui permettait de retrouver son ami :
« moi à l'époque en fait mon copain
était brésilien et j'étais jamais allée au
Brésil ».
Et finalement, il lui était ainsi possible de
découvrir ce pays par elle-même, c'est-à-dire sans la
présence permanente de son ami qui habitait loin de Caxias...
« moi honnêtement j'avais vraiment envie de faire
un truc toute seule » ;
« après tu vois pour moi j'étais pas du
tout dans la même région de lui et c'était ce que
je
voulais en fait, parce que ce qui comptait pour moi comme je t'ai dit
c'était avoir mon
expérience du Brésil donc je me disais aussi
bin voilà je veux pas me retrouver comment dire, je veux pas voir le
Brésil à travers ses yeux je veux me faire ma propre idée
donc c'était un truc bien pour moi »
...ou encore sous un angle différent de celui du tourisme
:
« connaître le pays différemment que par
les vacances tu vois ».
1.2. Transformations socioculturelles
Nous allons présenter les résultats de P dans les
dimensions culturelle, sociale et psychologique des transformations
socioculturelles.
1.2.1. Dimension culturelle
Il s'agit ici d'examiner les données se rapportant aux
trois indicateurs de la composante culturelle que sont les compétences
de communication, la distance culturelle et la sensibilité
interculturelle.
1.2.1.1. Compétences de communication
P obtient le score de 81/100 à l'Échelle de
communication interculturelle. Par exemple, elle s'estime capable de surmonter
les difficultés inhérentes aux situations de communication entre
individus issus de sociétés aux inflexions culturelles
différentes :
- item 7 « Si besoin est j'arrive à prendre en compte
la différence culturelle quand je communique » : 4/5 ;
- item 16 « Je n'accepte pas qu'une personne d'une autre
culture remette ma propre culture en cause » : 2/5 ;
- item 19 « Je trouve difficile de parvenir à une
compréhension mutuelle avec une personne d'une autre culture » :
2/5.
En outre, elle estime pouvoir créer du lien social
facilement sur place :
- item 8 « Je trouve que les gens du coin ne
m'intègrent pas assez » : 2/5 ;
- item 9 « Je trouve qu'il n'est pas facile de devenir ami
avec une personne d'une autre culture » : 2/5 ;
- item 10 « Je trouve difficile de me dévoiler
à une personne d'une autre culture » : 1/5.
De plus, elle semble disposer des ressources adéquates
afin de communiquer efficacement avec les gens :
- item 12 « Je suis angoissé quand je communique avec
une personne d'une autre culture » : 1/5 ;
- item 13 « Je me vexe facilement quand je communique avec
une personne d'une autre culture » : 1/5 ;
- item 14 « Je me décourage si les gens avec qui je
parle ne me comprennent pas » : 2/5 ;
- item 15 « Je me sens inférieur quand je communique
avec une personne d'une autre culture » : 1/5.
Par ailleurs, elle estime qu'entre le début et la fin
de son séjour, son niveau de portugais a évolué de 2/5
à 3/5, soit d'un niveau pré-intermédiaire à un
niveau intermédiaire (Questionnaire général, item 12
« Quel était votre niveau de portugais? »). Comme elle le
déclare lors de notre entretien, elle est passée de « je
parlais pas forcément bien le portugais quand même, je le parlais
un petit peu avant quand même, j'avais des bases, mais enfin j'ai appris
un peu sur le tas là-bas » à « je parlais
assez bien portugais ».
1.2.1.2. Distance culturelle
P obtient le score de 42/100 à l'Échelle de
distance culturelle. Par exemple, certains domaines de la vie sur place lui
semblaient très différents de leur équivalent en France
:
- item 6 « La place de le religion, du sacré, de la
spiritualité » : 4/5 ;
- item 9 « La mentalité ou la façon de voir
les choses » : 4/5 ;
- item 10 « La vie en famille » : 4/5 ;
- item 11 « la façon de se comporter, de rencontrer
les gens » : 4/5 ;
- item 13 « La façon de se déplacer » :
5/5 ;
- item 17 « L'environnement, la faune, la flore, les
paysages » : 4/5 ;
- item 18 « La façon de consommer, d'acheter » :
4/5 ;
- item 19 « Les habitudes, la routine, la vie quotidienne
» : 4/5.
Elle indique d'ailleurs que ses représentations ont
beaucoup changé suite à son séjour (Questionnaire
général, item 14 « Entre votre arrivée et votre
départ, diriez-vous que vos représentations du Brésil ont
beaucoup changé? » : oui).
Abordons justement les représentations du Brésil
chez P. Nous passerons d'abord en revue son appréhension
générale de la société brésilienne, sa
vision de la campagne ensuite, puis sa perception de l'insécurité
et son regard sur la spiritualité, avant d'examiner sa vision des liens
d'amitié et son ressenti des mentalités.
Premièrement, de la société
brésilienne en général, elle nous dit d'abord :
« c'est vraiment un autre monde » ;
« tu as beaucoup de spécificités locales
en fait enfin c'est vraiment un pays énorme en fait
donc c'est difficile de dire « c'est comme ça
» enfin tu vas à un endroit et tu as ta petite
réalité locale ».
Ensuite, elle parle d'un Brésil du sud et d'un
Brésil du nord dans lesquels les origines des populations tendent
à différer, dans une certaine mesure :
« j'étais dans le Rio Grande do Sul, Caxias,
c'est la région tout au sud, la dernière région du
Brésil avant, t'as l'Argentine en bas, sur le côté je crois
c'est le Paraguay enfin je sais plus, y a l'Uruguay d'un côté le
Paraguay de l'autre, et en gros c'est une région assez unique au
Brésil, parce que ils ont une culture en commun justement avec ces pays
là, c'est une culture donc les gauchos » ;
« il y a une immigration allemande, italienne et
polonaise dans la région très forte et du coup la plupart sont
descendants d'Européens, bon après maintenant t'as un brassage
comme partout dans le Brésil, y a aussi des origines de partout comme
ailleurs dans le Brésil » ;
« le Brésil du nord c'est différent
pour eux tu vois, et puis ouais d'un côté c'est très
différent tu vois [...] ouais le Nordeste du Brésil c'est autre
chose quoi, y a beaucoup plus l'africanité tu vois, il y a une influence
africaine ».
Puis, généralement parlant, elle estime que le
passé du Brésil, le poids de la colonisation, semble lester la
société encore aujourd'hui :
« c'est un pays ex-colonisé [...] y a quand
même ça qui reste honnêtement ça pèse encore
» ; « dans la façon dont est construite cette
société y a encore beaucoup ce, tu sens encore un
peu beaucoup de subir tu vois [...] y ont quand même
une façon de subir les choses » ;
« si tu veux si je me base d'un point de vue comment
dire rapports de pays tu vois, enfin genre toute une logique qui leur a
été un peu transmise tu vois où « on », enfin,
la France et les pays européens étaient synonymes de
modernité tu vois de civilisation tu vois c'est un peu ça qui
leur a été transmis, et c'est encore un peu ça
qu'eux-même cultivent aujourd'hui parce que ça leur a
été transmis comme ça je pense et c'est encore
présent » ;
« les erreurs que les pays qui se sont
industrialisés dans le passé par exemple en Europe ont fait bin y
font les mêmes tu vois parce qu'y suivent le même chemin
» ;
« l'influence de la culture [...] occidentale en
général [...] tu vois ils vivent d'une façon dont nous on
vit, parce que pour eux c'est un modèle de modernité tu vois
c'est un modèle de civilisation ».
Par ailleurs, elle insiste sur les écarts sociaux de la
société brésilienne :
« c'est un continent différent, bon alors moi
déjà je suis allée au Brésil en me disant «
ça va
être pas trop différent » tu vois, parce que
comme je connaissais déjà plein de Brésiliens
ouais je m'étais dit « c'est très moderne
» j'avais en tête que il y avait de la pauvreté mais je
m'étais dit que j'allais pas être trop choquée »
;
« c'est une fois là-bas que j'ai vu les choses et
que j'ai dit « waow » » ;
« là-bas en fait c'est que tu sens qu'y sont en
plein développement » ;
« tu es dans un pays qui certes n'est pas très
organisé encore, qui est immense et dur à coordonner et qui est
pas forcément partout développé pareil enfin y a encore
beaucoup de manque, en même temps y sont en effervescence et tu sens
cette effervescence là-bas sur place, y a des endroits
déjà où tu vois pas limite la différence avec ici,
c'est pas la pauvreté partout au contraire, c'est plus que ça va
être réparti différemment, tu peux voir une maison riche
à côté d'une favela, mais ouais les écarts de
confort de vie sont énormes » ;
« y a tellement de disparité là-bas, y a
tellement d'extrêmes ».
Deuxièmement, concernant les zones rurales, il ressort que
l'arrière pays est très différent de la campagne
française :
« quand tu sors t'es tout de suite dans la campagne
[...] c'est que tu as donc l'interio ils appellent ça, donc
l'intérieur, l'arrière pays quoi, avec une
végétation différente hein parce que c'est tropical, et
euh, c'est pas que tropical, mais euh c'est différent d'ici de toute
façon, et, comment dire, t'as ces petits villages tout de suite quand tu
sors en fait, quand tu sors tu commences à être dans des villes
beaucoup plus petites et plus tu t'enfonces [...] ça fait un peu Far
West tu vois, Far West version brésilienne quoi et c'était hyper
désorientant » ;
« c'est vraiment la campagne, en même temps
c'est une ville, ils sont auto-suffisants, ils sont fiers d'être
là, les jeunes ils veulent être là, c'est pas comme ici
quoi, voilà ils sont très attachés à leur ville,
ils ont des modes de fonctionnement encore très ruraux quoi, enfin pour
moi en tout cas tu vois, par exemple ils avaient de la viande et ils
étaient en train de préparer la viande dans une petite cabane
à côté de la maison, ils étaient en train de la
faire sécher sur un fil de fer enfin tu vois, il y a des chiens errants
partout tu vois y a des petits trucs comme ça que j'avais jamais
vraiment vu en fait enfin comment dire t'as un ressenti de la ville
complètement différent quoi, j'avais jamais vu ça, alors
que je connais la campagne en France, ouais non c'était à faire
franchement ».
Troisièmement, à propos de
l'insécurité, il semble que climat au Brésil soit
différent de celui en France :
« on a vraiment ressenti une insécurité
[...] t'as aussi un truc à te dire : la personne elle peut être
armée, y ont un gros problème là-bas avec la drogue en
fait » ;
« tu vas pas rentrer à pied quoi, ouais, y
prennent toujours la voiture. Après c'est peut-être culturel, mais
bon j'ai senti que c'était plus un truc de sécurité tu
vois, de toujours, surtout le
soir, surtout le soir » ;
« dès que la nuit est tombée en fait, tu
vas penser tout de suite différemment » ;
« n'importe quel restaurant ou n'importe où
où tu es tu demandes d'appeler un taxi ils le font quoi tu vois, parce
que s'ils te voient tout seul ou y voient que t'as pas de voiture enfin c'est
pas un souci quoi t'appelles. C'est normal en fait c'est normal là-bas.
Et ouais, ça déjà c'est un truc y faut s'y habituer
quoi » ;
« ça m'est arrivé de rentrer à
pied quand j'avais besoin vraiment mais la plupart du temps les gens chez qui
j'étais me ramenaient tu vois, ils te ramènent, ils te laissent
pas tout seul » ;
« tu compares ça à ta vie d'ici tu te
sens un peu étouffée en fait parce que t'es
protégée, y a une protection que ici on a pas tu vois, des
réflexes de sécurité, et c'est juste leur mode de vie en
fait, c'est normal pour eux, mais pour moi du coup c'était un peu
bizarre tu vois ».
Quatrièmement, au niveau de la spiritualité, il
semble là encore que les choses divergent entre la
société brésilienne et la
société française, tant au niveau de la foi en
général...
« ce que j'ai trouvé là-bas en fait
c'est que c'est tellement courant d'être croyant, enfin en quelque chose
hein, quoi que ce soit, ils font beaucoup de mélange hein, c'est
très courant que les gens soient catholiques et qu'en même temps y
pratiquent le Candomblé et qu'y pratiquent un autre truc tu vois
» ;
« y a une espèce d'hyper tolérance
» ;
« là-bas y sont tous croyants, y croient tous en
Dieu, là-bas comment dire l'existence de Dieu est quasiment pas remise
en cause par personne en fait » ;
« Là-bas les athées les gens y se
moquent d'eux tu vois parce que c'est tellement évident que Dieu existe
tu vois ce que je veux dire et ça peut être n'importe quoi hein,
c'est pas forcément le Dieu de la Bible par exemple, le Candomblé
est très présent [...] les gens y peuvent croire tout et
n'importe quoi mais y ont quand même une notion de
spiritualité » ;
« c'est limite tu crois pas en Dieu t'es pas normal
tu vois. Donc y a ça mais du coup ça laisse place aussi à
beaucoup de confusion parce que tu crois tout et n'importe quoi, tu
mélanges tout. »
...que du christianisme en particulier :
« je pense que ça doit être très
compliqué en fait d'être chrétien là-bas »
;
« Là-bas tu as des églises
écoute tu as même pas envie de rentrer dedans tu vois enfin
honnêtement, rien qu'à voir l'affiche, rien qu'à voir,
c'est un magasin quoi presque tu sais c'est limite un magasin de foi
» ;
« t'as des doctrines un peu bizarres qui circulent tu
vois enfin des trucs qui sont pas du tout
bibliques, genre qu'y vont acheter leur terrain au ciel enfin
des trucs complètement aberrants » ;
« y [les églises évangéliques] te
vendent des miracles quoi tu vois t'as tout une doctrine de la guérison,
une doctrine de la prospérité aussi qui est très
présente là-bas » ;
« mentalité de propagande ou marché tu
vois, de commerce » ;
« phénomène d'église-secte
» ;
« on leur vend un Jésus un peu
refaçonné quoi ».
Cinquièmement, par rapport aux liens d'amitié,
des différences semblent également se faire sentir : «
j'ai pu remarquer tu vois c'est que les personnes elles passent tellement
de temps au travail, tellement de temps avec leur famille, en fait quelque part
tes amis ça devient tes collègues tu vois, en fait c'est
très normal que tes amis soient tes collègues » ;
« la valeur de la famille est très importante,
donc les gens, bin par exemple, la fille chez qui je vivais, c'est pas habituel
ce qu'y font eux tu vois, parce que normalement les gens vivent chez la famille
normalement, donc c'est très rare » ;
« la famille y a un peu cette notion tu vois de pas
chercher les personnes tu vois enfin y ont la famille donc y s'auto-suffisent
entre eux ».
Dernièrement, P nous dit sur les mentalités aux
Brésil que les gens sont gais et que l'atmosphère est stimulante
:
« Les gens t'accueillent, y a pas de soucis, et les gens
ouais y sont super accueillants » ; « la façon de
vivre les choses de voir les choses tu vois cet optimisme » ;
« y ont une mentalité de fou quoi y ont une joie
de vivre, y sont toujours contents, toujours optimistes » ;
« y a cette effervescence et que tu as envie d'en
faire partie en fait, y a un côté très enthousiasmant
là-bas, c'est que tu as l'impression que tu vas construire quelque
chose, qu'il y a quelque chose qui est en train de se construire et que tu vas
construire avec eux ».
1.2.1.3. Sensibilité interculturelle
P obtient le score de 71,5/100 à l'Échelle de
sensibilité interculturelle. Par exemple, elle déclare bien
comprendre sa société d'accueil :
- item 20 « Comprendre la société dans
laquelle vous vivez » : 2/5 ;
- item 21 « S'adapter aux règles de bienséance
locales » : 2/5 ;
- item 22 « Comprendre les différences culturelles
observées ou ressenties » : 2/5 ; - item 23 « Comprendre les
valeurs locales » : 2/5 ;
- item 24 « Vous intégrer à la culture locale
» : 1/5.
Qui plus est, elle estime être à même de
communiquer avec succès avec les gens : - item l « Vous faire
comprendre » : 2/5 ;
- item 2 « Comprendre le portugais » : 2/5.
1.2.2. Dimension sociale
Nous allons traiter des informations relatives au
phénomène d'acculturation, notamment par le biais du capital
social de P, ainsi que de l'orientation d'acculturation de sa
société d'accueil.
1.2.2.1. Capital social
P dit qu'il lui a été facile d'établir
des contacts sur place (Questionnaire général, item 2 « Au
Brésil, était-il facile de créer du lien avec d'autres
personnes? » : 5/5). En outre, elle estime s'être sentie bien
intégrée dans son environnement (Questionnaire
général, item 7 « Rétrospectivement, comment vous
sentiez-vous inséré dans la vie brésilienne à
l'issue de votre séjour? » : 4/5).
Par ailleurs, elle estime avoir communiqué sur une base
régulière avec plus ou moins cinq personnes au début de
son séjour, puis avec plus ou moins dix personnes à la fin de son
séjour (Questionnaire général, item 6 « Dans la vie
de tous les jours, parmi vos relations, avec combien de personnes
dialoguiez-vous? »). À ce sujet elle se dit satisfaite de la
façon dont elle a communiqué avec les autres (Questionnaire
général, item 5 « Au quotidien, comment pensez-vous avoir
communiqué avec les autres? » : 5/5). De plus, concernant la nature
de son réseau social, elle nous dit que ses interlocuteurs
privilégiés étaient majoritairement des Brésiliens,
suivis par des compatriotes au Brésil (Questionnaire
général, item 8 « De quelle nationalité
étaient vos interlocuteurs privilégiés? »).
Pendant son séjour, P a toujours vécu chez des
Brésiliens. Elle a été successivement
hébergée dans la famille de son référent de stage
pendant quelques semaines, puis dans une colocation avec trois jeunes
Brésiliens pour le restant du séjour.
De sa famille d'accueil, P ne nous dit que peu de choses au cours
de l'entretien, si ce n'est qu'elle se sentait quelque peu
étouffée chez eux :
« y vivaient un peu excentrés, y faisaient
toujours en voiture, y avait pas de transport pour aller là-bas, du coup
j'étais vachement dépendante d'eux tu vois, donc tu compares
ça à ta vie d'ici tu te sens un peu étouffé en fait
parce que t'es protégé, y a une protection que ici on a pas tu
vois, des réflexes de sécurité, et c'est juste leur mode
de vie en fait, c'est normal pour eux, mais pour moi du coup c'était un
peu bizarre tu vois ».
Ensuite, sa colocation semble avoir été
mitigée. D'un côté, elle déclare...
« c'était mieux quelque part parce que,
d'être là je veux dire, là où j'étais, parce
que j'avais plus ma vie »
...mais d'un autre côté elle nous dit...
« Alors si je devais refaire quelque chose je
clarifierais mon séjour chez cette fille [...] parce que du coup elle
m'a pas fait payer de loyer alors que je dormais là quoi je dormais dans
le salon mais en même temps elle m'a donné un statut
d'invité mais c'était très ambigu du coup pour moi parce
que je savais pas trop ce qu'elle attendait de moi » ;
« je clarifierais mon statut ouais pour que ce soit
moins ambigu »
...et ajoute :
« elle avait pas de place chez elle vraiment mais j'ai
dormi dans son salon donc bon c'était un peu improvisé mais en
même temps y me restait quoi, y me restait un mois tu vois »
;
« je me suis dit bon bin c'est bon, je tiens le coup
tu vois, c'est un mois dans un salon à survivre, bon y avait quand
même des désavantages que, c'est pas le fait de pas avoir
d'intimité ».
De plus, il semble qu'elle voyait peu ses colocataires...
« cette fille avec qui je vivais je la voyais
quasiment jamais en fait, je la voyais que le soir ou les weekends des fois
parce que elle avait un emploi du temps de malade [...] elle avait des horaires
de fou et ses colocs c'était pareil, donc on se voyait qu'en coup de
vent [...] c'est pas du tout la même vie étudiante qu'ici
»
...et qu'il y ait eu, épisodiquement, quelques tensions
:
« ma coloc, les filles avec qui je vivais tu vois enfin
j'ai pas mal discuté avec elles des fois c'était un peu le clash
enfin ouais on a été au clash des fois et bon.... ».
Généralement parlant, P nous explique avoir
principalement connu ses relations par l'intermédiaire de son stage d'un
côté, et de l'université de l'autre :
« je suis arrivée, aux relations
internationales si tu veux, y avait un peu des étudiants qui attendaient
aussi si tu veux donc j'ai déjà rencontré quelques
étudiants là, j'avais un gars en Erasmus que j'avais
contacté avant d'y aller donc quand je suis arrivée aussi
après je l'ai vu puis après c'était mon stage, j'ai
rencontré beaucoup de gens en stage » ;
« tu vois les gens que je rencontre, je travaille avec
eux, souvent c'était des collègues en fait, par le biais des
collègues » ;
« surtout par le travail, ou par la fac mais en fait
le truc c'est que la plupart, tu vois nous on fait cette distinction
étudiant / travailleur ici, mais là-bas elle y est pas
forcément, les étudiants y sont aussi travailleurs en fait, et
ouais j'ai rencontré des gens un peu comme ça
par mes entretiens aussi du coup ».
Par ailleurs, si son réseau social au Brésil
était principalement constitué de Brésiliens, elle indique
que les relations avec ses compatriotes rencontrés sur place ont
été significatives :
« j'avais cinq six Français quand même
dans mon réseau, donc je les voyais assez souvent, sinon c'était
que des Brésiliens, j'avais pas d'autre étudiants internationaux,
c'était que des Français et des Brésiliens, donc soit
étudiants soit pas quoi, la majorité était pas
étudiant d'ailleurs » ;
« en fait ce qu'il y a de marrant c'est que sur place
après j'ai beaucoup aimé être en contact avec des
Français tu vois, je connaissais des Erasmus comme j'étais pas
loin de la fac j'étais en contact avec la fac tu sais, donc je les
voyais assez souvent en fait [...] j'ai aussi eu ce côté un peu
même en même pas deux mois - c'était deux mois quand
même, le côté Erasmus de connaître des Français
sur place et ça m'a beaucoup aidée aussi tu vois ».
En outre, notons qu'elle dit avoir gardé contact avec des
Brésiliens depuis son retour en France : « Ouais avec quelques
personnes ouais [...]surtout brésiliens ».
Concernant ses relations avec son ami et leur influence pendant
son séjour, P nous confie : « oui je pense c'est obligé
que ça a joué un rôle » ;
« forcément ça a influencé sur ma
vision du Brésil de toute façon ».
Elle ajoute, semble-t-il, que cette relation fut un facteur de
tension :
« après c'est juste par rapport à mon
copain tu vois je mettrais peut-être moins la pression tu vois puisque du
coup c'est vrai j'ai peut-être mis un peu de pression quoi par rapport au
contexte » ;
« je m'étais peut-être pas rendue compte
que c'était vraiment loin en fait. Au Brésil t'as pas
forcément des moyens de transport faciles et ça coûte cher
l'avion donc du coup c'est vrai que je me reposais peut-être beaucoup sur
lui par moments, en même temps y pouvait pas m'aider concrètement
parce que il était loin donc y a peut-être eu une frustration
à ce niveau là ».
Pour conclure, P estime ne pas avoir eu beaucoup de temps ni de
loisir sur place pour se créer un plus large réseau social :
« j'avais un rythme de vie assez intense »
;
« sur place j'avais pas trop de loisir » ;
« vraiment je bossais quoi, j'avais vraiment pas le
temps ».
1.2.2.2. L'orientation d'acculturation de la
société d'accueil
Au sein de la société dans laquelle elle
évoluait, P nous dit ne pas avoir subi de rejet : « Non [...]
j'ai pas trop eu de réactions comme ça ».
Elle évoque également une atmosphère
positive...
« y ont une joie de vivre, y sont toujours contents,
toujours optimistes » ;
« la façon de vivre, de voir les choses, tu vois
cet optimisme »
...et parle même de discrimination positive à son
égard :
« Les gens t'accueillent, y a pas de soucis, et les gens
ouais y sont super accueillants et y vont pas te discriminer, c'est presque de
la discrimination positive en fait » ;
« Même dans le sud alors que le sud y sont tous
descendants d'Européens quasiment et justement ils s'en vantent, c'est
quelque chose dont ils sont contents et même eux parce qu'ils sont
brésiliens mine de rien et dès que tu dis que t'es
française y sont trop contents tu vois, ils veulent parler avec toi si y
parlent français, enfin y vont limite y vont s'identifier plus à
toi » ;
« y a peut-être un complexe
d'infériorité de fait que t'es européen t'es
français notamment, voilà tu viens de ce pays du savoir, des
Lumières nanana, et du coup je pense que certaines personnes elles se
sentent d'office peut-être intimidées par toi ou des trucs comme
ça, ouais ».
1.2.3. Dimension psychologique
Nous recueillons ici les données associées au choc
culturel par le biais des indicateurs suivants : le soutien social,
l'auto-efficacité, la réussite académique et
professionnelle et le stress d'acculturation.
1.2.3.1. Soutien social
P obtient le score de 84,4/100 à l'Échelle de
soutien social. Par exemple, elle déclare avoir
bénéficié d'un excellent soutien social lors de son
séjour...
- item 4 « Je peux parler de mes problèmes à
quelqu'un » : 5/5 ;
- item 5 « Il y a quelqu'un auprès de moi pour me
réconforter qu'en j'en ressens le besoin » : 4/5 ;
- item 6 « Je reçois tout le soutien moral dont j'ai
besoin » : 4/5 ;
- item 18 « Il y a quelqu'un avec qui je peux partager mes
joies et mes peines » : 4/5 ...et ce tant de la part de sa famille...
- item 2 « Je suis satisfait de mes contacts avec ma famille
» : 5/5 ;
- item 3 « Mes relations avec ma famille sont importantes
pour moi » : 5/5
...que de ses amis en France...
- item 9 « Je suis satisfaite de mes contacts avec mes amis
restés en France » : 5/5 ;
- item 10 « Mes relations avec mes amis restés en
France sont importantes pour moi » : 5/5 ...ou du côté
brésilien :
- item 11 « Je peux compter sur mes nouveaux amis au
Brésil » : 5/5 ;
- item 12 « Je suis satisfait de mes contacts avec mes
nouveaux amis au Brésil » : 5/5 ;
- item 13 « Mes relations avec mes nouveaux amis au
Brésil sont importantes pour moi » : 5/5.
1.2.3.2. Auto-efficacité
P obtient le score de 75,7/100 à l'Échelle
d'efficacité interculturelle. Par exemple, elle déclare pouvoir
gérer les situations stressantes, inattendue ou délicates :
- item 6 « Si je suis dans le pétrin je peux penser
à une solution » : 4/5 ;
- item 17 « En général, je peux faire face
à quoi que ce soit » : 4/5.
De plus, elle semble présenter toutes les dispositions
nécessaires pour évoluer avec succès dans son
environnement :
- item 1 « Je me sens à l'aise lors des
activités sociales » : 4/5 ;
- item 2 « C'est difficile pour moi de me faire des amis
» : 1/5 ;
- item 3 « Je trouve difficile de tenir une conversation
avec la plupart des gens » : 2/5 ; - item 4 « Je suis
généralement discret et effacé en société
» : 2/5 ;
- item 13 « Je me sens à l'aise quand je parle avec
les gens du coin » : 4/5 ;
- item 16 « J'essaie de devenir ami avec les gens du coin
» : 4/5 ;
- item 18 « Si j'aperçois une personne que je
voudrais rencontrer je vais vers elle au lieu d'attendre qu'elle vienne vers
moi » : 4/5.
1.2.3.3. Réussite académique et
professionnelle
P n'a pas rempli le questionnaire intitulé Échelle
d'adaptation académique, car elle n'étudiait pas à
l'université sur place. De son travail, P nous dit simplement...
« ça se passait bien » ;
« En gros j'étais dans une école
publique là-bas et j'avais pas forcément un rôle
de
psychologue tu vois dans la structure [...] fallait que je fasse un stage
plein temps quoi,
donc moi j'étais en stage en observation dans les
classes, j'ai fait aussi en gros j'étais quoi, y avait un groupe de
soutien en fait pour les élèves en difficulté, un cours
d'alphabétisation, un cours de progression y appellent ça, c'est
une prof en fait qui est dédiée à ça et qui sous
forme de jeu aussi, des jeux pédagogiques ou n'importe, donc apporte un
enseignement mais qui est différent de celui que tu trouves dans la
classe en fait »
...et ajoute :
« mais en même temps toi aussi t'es en train
d'apprendre tu vois, t'as un peu une position comme ça qui te permet de
pivoter enfin donc c'est, non c'était bien ».
Par ailleurs, si l'on s'en réfère au
Questionnaire général, elle se déclare globalement
satisfaite de son stage (item 15 a) « Globalement, combien êtes-vous
satisfait de votre séjour dans votre structure de stage au
Brésil? » : 4/5.
1.2.3.4. Stress d'acculturation
Premièrement, P obtient le score de 78,5/100 à
l'Échelle de stress d'acculturation. Par exemple, elle dit ne pas avoir
eu le mal du pays :
- item 1 « J'ai le mal du pays : je ne me sens pas chez moi
et mes compatriotes me manquent » : 2/5.
En revanche, si elle nous dit ne pas avoir subi de
discriminations sur place...
- item 2 « Je me sens discriminé ou pas sur un pied
d'égalité avec les gens du coin » : 1/5 ; - item 3 «
Les autres se moquent de ma culture et de mes valeurs » : 1/5
...elle affirme en revanche avoir été
confrontée à des préjugés et à des
stéréotypes :
- item 14 « Je suis victime de préjugés et de
stéréotypes » : 4/5.
Interrogée à ce sujet en entretien, il ressort que
cela lui a été très pénible...
« le truc que moi j'ai trouvé le plus dur en fait
c'est le regard qu'y ont en fait sur les Européens et sur les
Français notamment ».
...et explique :
« Les gens t'accueillent, y a pas de soucis, et les gens
ouais y sont super accueillants et y vont pas te discriminer, c'est presque de
la discrimination positive en fait tu vois » ;
« je pense pas que ça t'empêches
d'être authentique avec les gens mais n'empêche que tu as ton
arrière plan qui reste tu vois ce que je veux dire » ;
« c'est un pays ex-colonisé et nous on
était colonisateur en fait, enfin la France, les Français
étaient colonisateurs, même si je l'étais pas
personnellement (rire), mais y a quand même ça qui reste
honnêtement ça pèse encore et tu le vois dans leur
représentation des
gens, dès que tu dis que t'es française
[...] ils ont des représentations du genre, ils ont des clichés
du genre, ouais on se lave pas tous les jours et honnêtement ils le
pensent sérieusement quand ils te posent la question c'est pas qu'ils
rigolent ils te posent vraiment la question donc ça c'est assez intense,
après ils ont des trucs du genre on mange à table avec cinq
couverts tous les jours ou genre des trucs tu vois l'entrée, le nana, le
dessert enfin tu vois ils ont ce truc tu vois de vraiment on est chic on est
élégant [...] Y ont les stéréotypes tu vois que
tout ce qui est français c'est de la bonne qualité tu vois, y
vont se ruiner à acheter des produits de marque genre Loréal ou
Lancôme ou j'en sais rien des trucs que nous-même on achète
même pas, parce ce qu'on veut chercher moins cher tu vois, mais pour eux
c'est français donc c'est bien et y vont dépenser l'argent pour
l'acheter, parce que c'est de la qualité tu vois. Et y pensent que nous
on fait pareil, y pensent que y vont acheter quatorze parfums [...]. Pour eux,
c'est une marque de richesse tu vois, une marque de je sais pas,
d'élégance ou quoi d'avoir un parfum surtout français et
d'en avoir plusieurs quoi, et pour moi c'est des trucs mais pff quand j'ai vu
ça j'ai halluciné quoi parce que pour moi c'est tellement des
trucs futiles en fait honnêtement bon ça c'est mon
éducation [...] la France et les pays européens étaient
synonymes de modernité tu vois de civilisation [...] et ça pour
moi c'était le plus dur à vivre en fait » ;
« je véhicule ça, en venant ici je
véhicule le passé, je véhicule le statut international de
mon pays d'origine, et c'est présent aussi quand même dans tes
rapports avec les gens tu vois [...] en gros quelque part que tu viens d'un
pays qui est plus civilisé donc qu'il y a plus d'éducation, qu'il
y a plus de, c'est pas vrai tu vois ce que je veux dire mais c'est quand
même ce qui t'es renvoyé tu vois » ;
« Même dans le sud alors que le sud y sont tous
descendants d'Européens quasiment et justement ils s'en vantent, c'est
quelque chose dont ils sont contents [...] limite y vont s'identifier plus
à toi et te dire « ouais ici c'est pas comme le reste du
Brésil, on est plus évolué » enfin des trucs comme
ça et enfin moi je trouve ça insupportable en fait parce que
quelque part c'est tout le truc de se dire « bin ouais j'ai pas choisi
où je suis née et en même temps j'ai pas choisi moi ce
rapport de force avec les gens, j'ai pas choisi d'être dans le pays qui
était colonisateur » tu vois ce que je veux dire, donc si je vais
quelque part j'ai pas envie d'avoir cette position d'ex-colonisateur tu vois
mais en même temps tu l'as malgré toi en fait parce que c'est
d'où tu viens quoi » ;
« c'est pas que je voulais pas être
française tu vois ce que je veux dire, c'est pas que j'avais honte
d'être française ou quoi, mais j'en avais marre qu'y me voient
comme ça en fait ».
Par ailleurs, elle nous confie s'être sentie sous pression
au Brésil :
- item 8 « Je me sens sous pression » : 4/5.
Là-dessus, elle donne deux explications. D'abord, il
apparait que c'était son premier séjour hors de l'Europe :
« c'était mon premier voyage hors de l'Europe
donc c'était quand même un gros pas » ;
« les premiers jours [...] c'était un peu intense
[...] j'avais jamais été là-bas et d'y être c'est
une autre chose tu vois ».
Ensuite, en dépit de la courte durée de son
séjour, elle dit ne pas s'être départie d'une vision
à plus long terme de la vie au Brésil, ce qui l'a stressée
semble-t-il :
« j'avais la pression de me dire, c'est moi-même
qui me la suis mise mais de me dire « ok, est-ce que je me vois habiter
là-bas? » » ;
« sur une perspective à long terme je me suis
posée la question honnêtement « est-ce que je me vois
vraiment vivre là toute ma vie quoi? » » ;
« donc c'est toute la question aussi de bin
voilà, si tu vas là-bas et que tu te marries avec quelqu'un
là-bas et que tu fais ta vie là-bas, est-ce que tu peux revenir
en France tu vois? Donc [...] c'est un questionnement aussi, un cheminement de
bon qu'est-ce que tu veux pour ta vie plus tard, et ça ça a
beaucoup influencé sur mon adaptation là-bas en fait [...]
c'était toujours dans le fond quoi, en arrière plan et je pense
que du coup bin ça a peut-être mis un peu de pression tu vois, une
certaine pression ».
En définitive, cette confrontation à l'image
qu'elle véhiculait et cette pression sur ses épaules ont conduit
P à ressentir un certain déséquilibre émotionnel.
Ainsi, elle déclare, avoir préféré sa vie à
Lyon (Questionnaire général, item 16 « Globalement, en terme
de qualité de vie, de bien-être et satisfaction, que
placeriez-vous en tête? » : Lyon). À ce propos, elle
précise ne pas s'être sentie appartenir sa société
d'accueil :
« Je pensais que ça serait plus facile d'y
vivre tu vois peut-être et en fait en y allant je me suis rendue compte
quand même que bon bin bien sûr tu peux y vivre c'est pas
infaisable mais c'est quand même un gros choix tu vois c'est un choix
qu'y faut pas prendre à la légère parce que bin c'est loin
déjà géographiquement, ça coûte cher pour y
aller, et aussi bin tu te déracines quand même tu vois parce que
tu vois comme je t'ai dit j'étais là-bas je m'y suis sentie bien
mais en même temps - bon en même temps je suis restée deux
mois, mais j'ai pas sentie appartenir en fait » ;
« ma vie ici comme je t'ai dit elle est plus facile
quoi clairement tu vois je sais qu'ici les choses sont plus faciles donc d'un
côté je préfère ma vie ici pour ça bin aussi
parce que j'ai ma famille et mes amis en France ».
Elle insiste d'ailleurs sur la notion du déracinement :
« moi enfin comme t'as pu voir dans mon parcours
identitaire dans le fond moi je me sens quand même bien française
tu vois, parce qu'il faut te sentir appartenir quelque part, t'as besoin de
sentir que t'appartiens quelque part, même si tu veux habiter n'importe
où, même si t'aimes pas où t'habites, tu n'aimes pas
d'où tu es, j'en sais rien, enfin t'as besoin de savoir d'où tu
viens quoi et pour moi je peux dire tout ce que je veux sur la France mais
n'empêche que j'ai vécu là, toute ma vie quasiment, et
c'est vrai que mes origines ne sont pas là, enfin bref, tout n'est pas
là, mais en même temps c'est un peu ma base quoi » ;
« je me suis rendue compte aussi en allant là-bas
que quoi qu'il arrive je voudrais pouvoir revenir en France ».
In fine, elle confie être attirée par le
Brésil mais rebutée par la part d'isolement inhérente aux
séjours prolongés :
« j'ai un attrait pour là-bas mais [...] c'est
une chose d'aller y vivre quelques années en électron libre et
d'y aller et t'insérer dans la société quoi vraiment genre
en intégrant une famille là-bas en fait concrètement donc
je pense c'est ça quelque part bin ça fait peur quoi
concrètement de se dire voilà [...] « tu vas te couper quoi
» [...] c'est un pays que j'ai beaucoup apprécié, en
même temps [...] tu te déracines encore plus tu vois,
déjà moi je me sens un peu déracinée à la
base enfin j'ai du trouver mes racines moi-même tu vois, maintenant que
je les ai tu vois j'ai pas envie de me dire « ok je lâche tout
» tu vois c'est ouais c'est un saut dans le vide quoi c'est un saut dans
le vide et c'est faisable [...] après voilà est-ce que
émotionnelement, affectivement, justement tu auras assez de soutien
enfin tu vois c'est toutes ces questions là aussi de penser un peu
à ta sauvegarde à toi je pense c'est des pensées de
préservation en fait » ;
« c'est ce qui m'a fait ressentir ça quand
j'étais dans le sud je me suis rendue compte à quel point, quoi
que tu puisses dire, au bout d'un moment t'as besoin de t'identifier à
quelque chose du passé quoi, à quelque chose qui fait que t'es
toi en fait et pour moi ça a été hyper important
».
Qui plus est, il apparait que le dénuement global de la
population brésilienne, y compris la pauvreté
de la classe moyenne, ait contribué à accentuer cet
état de déséquilibre émotionnel :
« y a tellement de disparité là-bas, y
a tellement d'extrêmes, que pour être je sais pas moi classe
moyenne en France y faut vraiment être riche quoi, faut être
aisé tu vois pour avoir accès à une bonne éducation
y faut avoir de l'argent aussi » ;
« c'est vrai que tu peux avoir accès aux choses
[...] surtout si t'as les moyens, c'est surtout
une question d'argent, et tu
comprends aussi notamment la mentalité des gens, tu vois les
gens parlent beaucoup d'argent, de s'enrichir, cette
notion un peu américaine, de l'ascension sociale, de se créer
soi-même nanana [...] en France [...] on a accès à tout tu
sais [...] et eux la plupart des gens ont, là les gens dont je te parle
ce sont des gens de classe émergente surtout, classe moyenne
émergente, donc c'est pas des gens hyper riches mais c'est pas des gens
pauvres non plus, pas des milieux populaires ou des favelas non plus, donc
c'est quand même des gens qui vivent bien mais qui luttent quoi enfin tu
sens qu'y a quand même que c'est pas aussi facile tu vois, je me suis
sentie très privilégiée en fait. En France, et dans plein
de pays d'Europe, tu as accès à tout facilement tu vois, on peut
se plaindre de tout ce qu'on veut [...] n'empêche que la vie elle est
quand même facile quoi » ;
« en même temps le fait est que j'ai
passé que deux mois là-bas tu vois et tout ce truc là de
ce que les gens te renvoient tout ce que je te disais avant je pense qu'y y
aurait un certain temps d'adaptation et que en plus je pense que tu dois faire
le sacrifice de plein de choses en plus. Comment dire, c'est dur à
expliquer en fait chais pas j'ai ressenti en fait par exemple je me suis dit
« si je vais vivre là-bas à long terme » genre imagine
tu as des enfants là-bas tu vois, je me suis posée cette question
je me suis dit « est-ce que t'accepterais que tes enfants vivent comme des
Brésiliens en fait? » tu vois concrètement et en fait moi
c'est encore aujourd'hui une question qui est difficile parce que je me dis
quelque part que j'aurais envie que mes enfants y aient ce que moi j'ai eu et
là-bas dans certains endroits - pas partout, mais pour pouvoir avoir une
ascension sociale, pour avoir une très bonne condition de vie y faut
être aisé comme je t'ai dit donc c'est pas la majorité des
gens. Y a quand même beaucoup de gens puis y a beaucoup de gens qui
s'enrichissent aussi donc y a quand même une classe émergente donc
tu peux quand même bien vivre là-bas mais voilà je sais pas
comment dire mais je pense qu'il y a quand même, c'est peut-être un
héritage de la colonisation hein c'est peut-être un truc de groupe
de se dire « on est supérieur » quelque part tu sais, y a
peut-être de ça hein, mais j'avais le sentiment par exemple de
enfin comme une sorte de peur ouais j'ai pas envie que mes enfants y
grandissent là-bas tu vois j'ai pas envie que si j'ai des enfants un
jour qu'y aillent dans une école brésilienne tu vois enfin, c'est
peut-être parce que je connais pas assez bien aussi j'y ai pas
vécu assez longtemps mais [...] j'ai pas du tout cette peur dans un
autre pays européen, si je vais dans un autre pays d'Europe tu vois
c'est pas loin et voilà je connais assez bien les cultures, j'ai quand
même bien voyagé en Europe, voilà je sais que y a quand
même un niveau de vie et un niveau d'éducation qui se vaut dans la
plupart des pays en tout cas. Tu vas là-bas y faut se battre en fait tu
vois, pour avoir le meilleur y faut que tu te battes si t'es classe
émergente si t'es classe moyenne et j'ai pas eu cette habitude de me
battre [...] tu vois c'est pas pareil si
t'y vas en tant qu'expat deux-trois ans, [...] t'as un
cadre de vie assez protégé. Tu vas vivre là-bas en tant
que personne qui s'intègre là-bas c'est différent
déjà, et comme moi j'avais déjà cette perspective
là, j'avais déjà cette idée là dans ma
tête, j'y suis pas juste allée en disant « voilà
chouette un petit voyage allons au Brésil » en fait tu vois [...]
ça m'a quand même fait voir que c'est un choix énorme quoi,
c'est pas un choix que tu fais juste voilà parce que t'es amoureux de
quelqu'un et que tu vas le suivre tu vois, pour moi enfin tu peux le faire
ça à la limite mais pour moi c'est inconscient ».
Pareillement pour l'insécurité, dans une moindre
mesure :
« j'ai eu tout de suite conscience de ce fait
voilà je peux pas sortir la nuit quand je sors la nuit je fais attention
de toujours prendre des rues éclairées voilà je sors
jamais dans des rues un peu obscures même si c'est plus rapide mais en
même temps t'as toujours cette pensée quand c'est la nuit «
ok tu rentres le plus vite possible chez toi » quand t'es tout seul t'as
pas de voiture tu rentres chez toi sinon tu prends un taxi » ;
« Donc si tu veux c'est pas des choses à quoi
je pense ici, tu vois je me promène dans la rue à trois heures du
mat c'est pas un soucis - bon je le fais pas souvent mais ça m'arrive,
et làbas, même, dès que la nuit est tombée en fait,
tu vas penser tout de suite différemment » ;
« Et ouais, ça déjà c'est un
truc y faut s'y habituer quoi parce que pff ici j'appelle jamais de taxi quoi,
ça me viendrait jamais à l'idée d'appeler un taxi tu vois,
je sais même pas comment on fait même ».
Pour finir, remarquons que l'approche de la
spiritualité dans la société brésilienne a elle
aussi participé au déséquilibre émotionnel de P
:
« Euh ouais alors les églises, parlons-en (rire).
C'était assez surprenant ça aussi parce que j'ai jamais vu
ça » ;
« y te vendent des miracles quoi tu vois t'as tout une
doctrine de la guérison, une doctrine de la prospérité qui
est très présente » ;
« Concrètement y vont leur promettre des trucs
genre donne tout ton argent, Dieu te le rendra, enfin ces théories
là quoi et des personnes du coup qui sont très sincères on
leur parle de Jésus et on leur vend un Jésus un peu
refaçonné » ;
« j'ai été choquée, j'ai
été choquée ouais, j'ai été choquée
parce que comment dire bin c'est d'autant plus dur d'être authentique je
pense parce que du coup t'es assimilé à quelque chose que t'es
pas forcément tu vois et je pense que ça doit être
très compliqué en fait d'être chrétien
là-bas » ;
« en temps que chrétien, que protestant
évangélique, c'est choquant parce tu te dis toi- même
comment t'es crédible après tu vois » ;
« je comprends la mauvaise réputation des
églises évangéliques là-bas » ;
« ça m'a un peu rendu triste parce que je me suis
dit « c'est très dommage en fait » que ce soit utilisé
comme ça ».
Toutefois, elle en tempère le rôle :
« après moi j'ai cette conception que Dieu
gère les choses tu vois Dieu est au-dessus de tout donc y voit
même dans ces endroits là » ;
« c'est pas quelque chose qui me soucie moi
personnellement parce que c'est pas dans mon contrôle ».
En somme, tout ceci a concouru au fait que P reconnaisse avoir
subi un choc culturel au Brésil (Questionnaire général,
item 17 « Rétrospectivement, pensez-vous avoir vécu un choc
culturel pendant votre séjour au Brésil? » : oui), bien
qu'elle s'estime globalement satisfaite de son séjour (Questionnaire
général, item 15 b) « Globalement, combien êtes-vous
satisfait de votre séjour au Brésil? » : 5/5).
Deuxièmement, P obtient le score de 70/100 à
l'Échelle de bien-être. Par exemple, elle semble se satisfaire de
la façon dont s'est déroulé son séjour :
- item 7 « Êtes-vous content de la tournure qu'a pris
votre vie ici? » : 4/5 ;
- item 19 « Avez-vous déjà souhaité
être de retour chez vous en France? » 2/5 ; - item 10 «
Êtes-vous plus souvent déprimé que joyeux? » : 1/5.
Il apparait également qu'elle se soit sentie à
l'aise dans son environnement :
- item 2 « Vous sentez-vous exclu socialement? » : 1/5
;
- item 3 « Vous sentez-vous seul et faiblement
entouré? » : 2/5 ;
- item 9 « Vous entez-vous à l'aise dans votre
environnement? » : 4/5.
De plus, elle semble ne pas avoir connu de difficultés
d'ordre relationnel :
- item 8 « Les gens vous ennuient-ils ou vous irritent-ils?
» : 2/5 ;
- item 13 « Participez-vous régulièrement
à des activités de groupe? : 4/5 ;
- item 16 « Préférez-vous rester seul? »
: 1/5.
Par ailleurs, elle déclare s'être toujours sentie
très bien au Brésil (Questionnaire général, item 1
« Durant votre séjour au Brésil, comment vous sentiez-vous?
» : 5/5). À ce propos, il semble que certains
éléments l'aient aidée à faire de ce séjour
une expérience positive et à en diminuer les aspects
délétères. Elle mentionne d'abord une discussion avec une
enseignante à l'Université Lumière Lyon 2 :
« Mme X elle nous a préparé quand
même pour le voyage, elle nous a un petit peu parlé
avant, le truc c'est que moi elle m'avait dit « ah
toi où tu vas ça craint pas du tout c'est une région riche
blablabla » enfin elle connait plutôt le nord et elle a bien
briefé les filles et moi j'étais là donc j'ai
écouté ce qu'elle a dit. Tout ce qu'elle a dit pour les filles
qui en plus allaient dans la favela bin écoute moi ça m'a servi
pour là où j'étais quoi [...] c'est une chose d'y
être tu vois. C'est une chose qu'on te raconte quelque chose mais c'est
une chose de le vivre et d'être toute seule ».
Puis, elle nous fait part des conseils qu'elle a pu recevoir sur
place :
« je pense qu'y faut se comporter en sachant
écouter les conseils des personnes sur place tu vois et moi heureusement
j'ai la personne avec qui je vivais qui m'a donné beaucoup de conseils
au début je t'ai dit j'étais pas mal protégée parce
que je vivais avec la famille, quand je me suis retrouvée toute seule
elle m'a quand même briefée tu vois, elle m'a donné
certains conseils, parfois quand je faisais des trucs elle me disait « ah
mais là j'étais inquiète et tout tu devrais pas faire
ça » enfin tu vois donc j'ai quand même suivi ses conseils
parce que voilà c'est une jeune, elle vit là depuis toujours,
c'est quelqu'un qui a
voyagé donc elle connait le monde aussi tu vois
donc elle sait de quoi elle parle je pense donc j'ai écouté ce
qu'elle m'a dit tu vois mais non ça va, y a peut-être des moments
où je me sentais un peu seule c'est normal t'es loin de chez toi mais
après j'ai pas trop eu de moments vraiment ça allait pas du tout
je voulais rentrer quoi non ».
Finalement, elle avance son expérience antérieure
du séjour à l'étranger :
« ça m'a forcément aidée parce
que c'était mon premier gros, enfin j'ai vécu un an là-bas
[en Italie] c'était mon premier séjour à l'étranger
de longue durée quoi en tant qu'étudiante et ouais j'ai
vécu là-bas des trucs que j'avais jamais vécu avant tu
vois notamment dans la coloc, la coloc avec des personnes de différentes
cultures enfin ouais j'ai vécu des choses là-bas que j'avais pas
connu ici donc déjà là-bas ça m'a augmenté
ma flexibilité (rire) et je pense que ouais c'était
nécessaire d'avoir ça même avant d'y aller quoi je pense
que d'aller d'office au Brésil ça aurait peut-être
été intense ouais parce que comme je t'ai dit maintenant je fais
vraiment une séparation entre l'Europe et le reste enfin avant je voyais
pas vraiment l'Europe comme un tout tu vois j'avais du mal à voir
ça comme une entité et maintenant en fait je le vois vraiment
comme ça parce que je pense que y a quand même quoi qu'on dise -
ça dépend de quel pays peut-être mais, y a quand même
une certaine similarité tu vois une certaine bon en plus on est proche
géographiquement avec ces pays là et je pense que quand tu
quittes cette zone, c'est un peu ta zone du monde tu vois, quand tu quittes
cette zone t'es dans un autre schéma, dans un autre ouais t'es dans
totalement autre chose tu vois ta zone de référence elle est plus
là donc y faut le prendre en considération et
je pense que souvent les personnes voyagent un peu trop
à la légère en fait tu vois genre recherche d'exotisme en
fait tu vois ».
Dernièrement, P obtient le score de 71,6/100 au Brief
COPE. Ses réponses laissent transparaître qu'elle réagit
aux situations stressantes, délicates ou imprévues avec
flegme...
- item 1 « Faire quelque chose pour moins y penser » :
4/5 ;
- item 8 « Rechercher les aspects positifs dans ce qu'il
m'arrive, voir le bon côté des choses » : 4/5 ;
- item 10 « Prendre les choses avec humour » : 5/5 ;
- item 11 « Prier, méditer, faire de la relaxation
» : 4/5
...et qu'elle n'hésite pas à chercher aide et
conseil auprès de son entourage le cas échéant : - item 3
« Recevoir l'aide et le conseil d'autres personnes » : 4/5 ;
- item 7 « Rechercher le soutien et la compréhension
de quelqu'un » : 4/5.
1.3. Compétence interculturelle
À l'aide des données dont nous disposons, nous
allons tenter de présenter des éléments qui seraient
susceptibles de nous renseigner sur le degré de compétence
interculturelle de P.
1.3.1. Sens du séjour à
l'étranger
Pour P, il semble que le mot le plus caractéristique
pour qualifier son séjour soit « suite » (Questionnaire
général, item 10 « Choisissez un mot qui serait le plus
caractéristique pour situer votre séjour au Brésil au
regard de votre vie en général » : suite). Lors de notre
entretien, elle déclare :
« ouais c'était vraiment une super
expérience, pour moi c'était genre dans la continuité tu
vois enfin genre t'as ta vie comme ça, t'as des projets qui viennent,
des opportunités et tout et pour moi c'était là quoi
» ;
« pour moi les choses ça vient les unes
après les autres en fait (rire), super la phrase, ouais je sais pas
quand je regarde ma vie je vois une progression tu vois je vois comment j'ai
évolué sur certaines choses je vois le sens enfin tu vois les
choses comment elles font sens aussi et là en fait voilà
ça faisait sens quoi, notamment par rapport à ma relation et par
rapport à ma formation aussi, par rapport à mon rapport au monde
tu vois aussi je pense parce que j'avais jamais quitté l'Europe en fait
avant donc c'était mon premier voyage hors de l'Europe donc
c'était quand même un gros pas ».
1.3.2. Ressenti sur le séjour
P se dit frustrée par sa durée de séjour
:
« Le truc aussi c'est que c'était tellement
court comme temps que j'étais enfin limite c'était le contraire
tu vois, j'avais envie que ça dure plus longtemps parce que je voyais
que les autres Erasmus allaient rester plus longtemps et c'est limite hyper
frustrant de devoir rentrer tu vois parce que enfin après deux mois tu
t'intègres tu vois, après deux mois t'as trouvé tes
marques t'as ta routine un peu pour autant que t'en ai une et ouais j'ai
trouvé ça assez frustrant de devoir rentrer finalement parce que
deux mois ça passe mais à une vitesse vraiment ouais c'est
court ».
Toutefois, elle estime avoir bénéficié de
cette expérience :
« deux mois j'ai vraiment, j'ai découvert
plein de choses par rapport au Brésil quoi tu vois, de
l'intérieur du Brésil quoi, et par rapport à une seule
région bien sûr parce que c'est très très
divers » ;
« ça permet de réfléchir, de
prendre de la distance déjà, parce que tu vis des trucs de
l'intérieur tu vois ».
En outre, elle estime avoir fait le nécessaire pour
rencontrer des gens et s'intégrer :
« j'ai essayé de m'intégrer là-bas
» ;
« j'ai pas de mal à m'adapter aux endroits
où je vais en fait, je pense que c'est un avantage que j'ai, un atout,
c'est que je m'y fais tu vois quoi et j'ai pas de mal à me
dépouiller de ma culture, mes valeurs c'est peut-être autre chose
ouais mes modes de vie tu vois du moins mes coutumes c'est pas quelque chose
à quoi je suis vraiment attachée tu vois donc je peux m'y
adapter, du moins pour un court terme ».
Cependant, P admet que :
« je m'y suis sentie bien mais en même temps - bon
en même temps je suis restée deux mois, mais j'ai pas senti
appartenir » ;
« je pensais que ça serait plus facile d'y
vivre ».
1.3.3. Tensions éprouvées
Rappelons simplement qu'au cours de son séjour
Brésil P a éprouvé certaines tensions au contact de son
environnement du fait de la conjugaison de plusieurs de facteurs, ainsi que
nous l'avons abordé avec le stress d'acculturation.
1.3.4. Évolution personnelle
Au cours de son séjour, P estime avoir beaucoup
changé (Questionnaire général, item 9 « Avez-vous eu
le sentiment d'avoir changé à l'issue de votre séjour au
Brésil? » : 4/5). Interrogée là-dessus elle
déclare :
« je sais que j'ai changé, ça au moins
c'est sûr, après en quoi pour moi je le lie pas forcément
à l'expérience du Brésil en tout, je le délimite
pas à mon séjour, je le délimite plus à ma relation
en fait avec mon copain, plus à l'expérience de l'interculturel
comme ça de mes relations multiculturelles multiples. Mais euh ouais
c'est plus ça et puis bon les rencontres en fait ouais si c'est quelque
chose qui m'a changé ce serait les rencontres sur place, les personnes
que j'ai rencontrées ».
En outre, elle estime que son degré d'exposition
internationale est passé de 3/5 au début de son séjour
à 4/5 à l'issue de son séjour, soit d'intermédiaire
à élevé (Questionnaire général, item I
« Comment évalueriez-vous votre exposition internationale (le
degré auquel vous êtes confronté à la vie au sens
large au-delà de nos frontières)? ») tandis que son
degré de conscience interculturelle s'est, lui, maintenu à 4/5
(Questionnaire général, item II « Comment
évalueriez-vous votre conscience interculturelle (le niveau auquel vous
êtes préoccupé par, ou impliqué dans, des affaires
extraterritoriales)? »).
1.3.5. Projets d'avenir
P nous confie que ce séjour aura des
répercussions sur son avenir (Questionnaire général, item
11 « Pensez-vous que cette expérience va influencer votre vie
future? » : oui) et qu'il lui a donné le goût du
Brésil en quelque sorte :
« c'est vraiment un pays qui m'a
énormément plu et je voudrais vraiment y retourner quoi
même y habiter voire ».
2. Le cas de C
Tout d'abord, nous débuterons par une brève
contextualisation du séjour de C au Brésil en remontant jusqu'aux
origines de ce projet et en éclairant les motivations qui le
sous-tendent. Nous examinerons ensuite les réponses de C liées
aux indicateurs des transformations socioculturelles. Enfin, nous
étudierons ses réponses relatives aux thèmes
associés à la CIC.
2.1. Contexte
C est donc étudiante en Master 1 de psychologie. Elle a
séjourné pour une durée de moins de deux mois à
Recife, au nord du Brésil, dans le cadre d'un stage. Finalement, sur
place, ce n'est pas un mais deux stages qu'elle aura effectués : l'un
dans une structure s'occupant d'enfants atteints d'autisme, et l'autre dans une
association participant au développement personnel et identitaire
d'enfants des favelas. Il apparait que le séjour de C au Brésil
ait été le fruit d'un concours de circonstances. Avant de
s'inscrire à l'université pour l'année scolaire 2011-2012,
elle caressait déjà l'idée de partir au Brésil.
Cependant, ce projet était en concurrence avec l'ambition de poursuivre
un Master en psychologie. Finalement, freinée en partie par la
barrière de la langue, C abandonna son projet de voyage au
Brésil. Comme elle le dit elle-même, la raison prit le dessus, et
elle choisit finalement de s'inscrire en Master de psychologie. Ce n'est
qu'ensuite, en début d'année scolaire, qu'elle entendit parler en
classe de la possibilité d'effectuer son stage de Master 1 au
Brésil. Ce fut donc là l'opportunité de concilier ses deux
aspirations.
À propos de ses motivations, C déclare avoir pour
passion tout ce qui est africain, éprouver une attirance très
forte pour l'Afrique, continent où elle a d'ailleurs
séjourné en 2010 :
« moi ma passion c'est tout ce qu'est africain, je sais
pas pourquoi, depuis vraiment longtemps » ;
« au Brésil, [...] j'y suis allée toujours
dans cette envie de découvrir l'Afrique autre part c'est toujours pareil
moi c'est toujours l'Afrique qui me motive ».
De là découle également son
intérêt pour les sociétés métissées,
comme la Réunion où elle a vécu plus de deux ans, et comme
le Brésil. C'est d'ailleurs pour ces raisons là qu'elle a choisi
de partir dans le nord du Brésil, où les influences africaines
sont plus prégnantes nous dit-elle :
« l'africanité donc c'est vrai que dans le nord
c'est beaucoup plus présent, beaucoup plus
affirmé qu'à Rio Grande do Sul où c'est
beaucoup plus européen ».
En outre, elle a réalisé sur place une
étude sur les pratiques afro-brésiliennes et leur rôle dans
la construction de l'identité des jeunes des favelas. Il s'agissait donc
pour elle, d'une certaine manière, de retrouver l'Afrique sous un angle
différent :
« mais en tout cas j'ai une attirance très forte
pour l'Afrique et puis toutes ces sociétés
métissées c'est vraiment ma passion »
;
« je sais pas, j'avais une attirance très forte
pour le Brésil depuis très longtemps » ;
« quand j'ai fini mon cursus à la Réunion,
ça m'a renforcé ce désir d'aller voir cette terre
où il y a du métissage aussi où l'Afrique elle est
là mais d'une autre manière ».
2.2. Transformations socioculturelles
Nous présenterons dans cette partie les résultats
de C dans les dimensions culturelle, sociale et psychologique des
transformations socioculturelles.
2.2.1. Dimension culturelle
Nous nous arrêtons ici sur les informations
associées à la composante de la culture. Pour ce faire, nous
allons nous appuyer sur les indicateurs suivants : les compétences de
communication, la distance culturelle et la sensibilité
interculturelle.
2.2.1.1. Compétences de communication
C obtient un score de 81/100 à l'Échelle de
communication interculturelle. Par exemple, elle s'estime capable de surmonter
les difficultés inhérentes aux situations de communication entre
individus issus de sociétés aux infléchissements culturels
différents :
- item 7 « Si besoin est j'arrive à prendre en compte
la différence culturelle quand je communique » : 5/5 ;
- item 19 « Je trouve difficile de parvenir à une
compréhension mutuelle avec une personne d'une autre culture » :
2/5.
Pareillement, elle estime ne pas éprouver de
difficultés à créer du lien social au Brésil : -
item 8 « Je trouve que les gens du coin ne m'intègrent pas assez
» : 2/5 ;
- item 9 « Je trouve qu'il n'est pas facile de devenir ami
avec une personne d'une autre culture » : 1/5 ;
- item 10 « Je trouve difficile de me dévoiler
à une personne d'une autre culture » : 1/5.
De plus, elle semble disposer de ressources adéquates
afin d'interagir efficacement avec les autres :
- item 11 « Je me sens
découragé quand les gens du coin ne sont pas de mon avis » :
2/5 ;
- item 12 « Je suis angoissé quand je communique
avec une personne d'une autre culture » :
1/5 ;
- item 13 « Je me vexe facilement quand je communique avec
une personne d'une autre culture » : 1/5.
Par ailleurs, elle estime qu'entre le début et la fin
de son séjour son niveau de portugais a évolué de 1/5
à 4/5, soit d'un niveau débutant à un niveau avancé
(Questionnaire général, item 12 « Quel était votre
niveau de portugais? »). À ce propos, lors de l'entretien, elle
déclare que cette évolution s'est faite naturellement :
« je sais pas qu'est-ce qui s'est passé dans
ma tête mais [...] c'est venu naturellement, je sais pas comment
ça se fait, j'avais l'impression que j'avais le portugais en moi, c'est
venu tout simplement ».
2.2.1.2. Distance culturelle
C obtient un score de 38/100 à l'Échelle de
distance culturelle. Néanmoins, ce questionnaire n'est que peu pertinent
ici. En effet, C revient d'un séjour de pratiquement trois ans à
la Réunion, qu'elle a tendance à décrire comme son cadre
de référence :
« je sais que la Réunion c'est ma terre hein,
c'est là ou je veux finir et là où je veux revenir
».
Or, pour répondre à ce questionnaire, elle s'est
placée dans une perspective de comparaison de la société
brésilienne avec la France métropolitaine. Oralement, elle nous
avait d'ailleurs indiqué qu'elle aurait répondu « pas du
tout différent » à l'ensemble des items si elle avait
comparé le Brésil et la Réunion. En conséquence,
son score aurait considérablement varié.
Quoiqu'il en soit, en entretien, C déclare bel et bien
trouver de très fortes similarités entre les
sociétés réunionaise et brésilienne...
« le Brésil, la Réunion c'est des
sociétés un peu, un peu soeurs quoi au niveau du
métissage, au niveau de l'histoire aussi » ;
« c'est des sociétés complètement
soeurs »
...et dit avoir partiellement retrouvé la Réunion
au travers du Brésil :
« c'est vrai que ma vie à la Réunion a
fait que ouais c'est vrai que le Brésil était une sorte de
retrouvailles » ;
« plein de choses qui sont pareilles avec la
Réunion, y a la végétation, la nourriture, une certaine
manière de vivre, une manière de voir la vie aussi, et c'est vrai
que ça m'a, ouais un petit retour chez moi après la nostalgie
ça faisait depuis six mois que j'étais partie de la
Réunion ça faisait un bien fou ».
Concernant les représentations du Brésil chez C,
elle n'imaginait apparemment pas que sa région d'accueil serait si
moderne :
« je m'attendais pas aussi à voir autant de
buildings de truc comme ça je pensais que ça allait être un
peu plus, [...] préservé, préservé de tout
ça ».
De plus, si elle nous dit avoir anticipé la
pauvreté, le degré d'écarts sociaux parait l'avoir
décontenancée :
« je m'attendais pas par contre à tant de
différences sociales alors que je le savais, je savais que
économiquement le Brésil s'est développé
très vite, qu'il y avait des écarts sociaux énormes mais
j'ai été choquée quand même, j'ai été
choquée [...] dans le sens où je m'attendais pas à ce que
les gens cohabitent comme ça ».
En écho à cela, il semble pour C que, par nature en
quelque sorte, le « vrai » Brésil soit le Brésil des
favelas :
« dans la favela là c'était la
rencontre avec la société brésilienne pour moi parce que
c'est vrai c'est dans ces sociétés là ou dans ces peuples
là qui ont beaucoup soufferts que je pense s'inscrivent plus toutes les
racines brésiliennes, tout ce qu'ils ont gardé de l'esclavage
aussi je pense c'est clair ».
Finalement, il semble que sa perception du Brésil se
soit modifiée suite à son séjour (Questionnaire
général, item 14 « Entre votre arrivée et votre
départ, diriez-vous que vos représentations du Brésil ont
beaucoup changé? » oui).
2.2.1.3 Sensibilité interculturelle
C obtient un score de 70,1/100 à l'Échelle de
sensibilité interculturelle. Par exemple, elle estime avoir
été capable de faire face aux exigences du quotidien...
- item 16 « Utiliser les transports publics et vous
déplacer » : 2/5 ;
- item 17 « Faire les course » : 2/5 ;
- item 18 « Vous repérer » : 2/5 ;
- item 19 « Participer à des activités de
groupe » : 2/5
...ainsi qu'avoir su se saisir des éléments
constitutifs de la société brésilienne :
- item 20 « Comprendre la société dans
laquelle vous vivez » : 2/5 ;
- item 22 « Comprendre les différences culturelles
observées ou ressenties » : 2/5 ;
- item 23 « Comprendre les valeurs locales » : 2/5 ;
- item 24 « Vous intégrer à la culture locale » : 2/5 ;
- item 25 « Comprendre la façon dont les autochtones voient le
monde » : 2/5.
2.2.2. Dimension sociale
Nous examinons maintenant les données liées au
phénomène d'acculturation, plus particulièrement
par
l'intermédiaire du capital social, ainsi que celles relatives à
l'orientation d'acculturation de la
société d'accueil de C.
2.2.2.1. Capital social
Il apparait que C se soit bien intégrée à sa
société d'accueil :
« dans cet environnement qui en plus est hyper
chaleureux où les gens ouvrent leur porte complètement, ouvrent
leurs bras » ;
« j'ai eu une espèce de fusion avec le peuple
brésilien » ;
Questionnaire général, item 7 «
Rétrospectivement, comment vous sentiez-vous inséré dans
la vie brésilienne à l'issue de votre séjour? » :
4/5.
De façon générale, elle nous dit toujours
parvenir à s'intégrer à l'étranger :
« à chaque fois je suis là «
qu'est-ce que c'est trop bien ce truc là, qu'est-ce que je suis chez moi
» et j'arrive tout de suite à tisser des liens avec les gens
».
Par ailleurs, elle estime avoir profité au maximum des
opportunités de communication qui se sont présentées
à elle (Questionnaire général, item 5 « Au quotidien,
comment pensez-vous avoir communiqué avec les autres? » : 5/5).
À ce propos, elle déclare avoir toujours communiqué sur
une base régulière avec plus de dix personnes (Questionnaire
général, item 6 « Dans la vie de tous les jours, parmi vos
relations, avec combien de personnes dialoguiez-vous? »). Elle nous dit
également que la majorité de ses interlocuteurs étaient
brésiliens (Questionnaire général, item 8 « De quelle
nationalité étaient vos interlocuteurs privilégiés?
»).
De plus, C semble avoir été capable de se
créer un réseau social très facilement :
Questionnaire général, item 2 « Au
Brésil, était-il facile de créer du lien avec d'autres
personnes? » : 5/5 ;
« quand on est arrivé on a été
super bien accueilli y avait tout qui était prévu, y avait des
gens qui venaient nous chercher à l'aéroport et tout donc c'est
vrai qu'au niveau des liens on a tout de suite été cocooné
» ;
« ça a été comme ça tout
le long, j'ai rencontré que des gens que je devais rencontrer tout le
temps et des gens qui m'ont donné tellement d'énergie qui m'ont
tellement aidée qui m'ont tellement soutenue ».
Durant son séjour, C a été
hébergée par un couple de Brésiliens. Si elle assure avoir
été bien reçue, elle ajoute qu'elle ne s'est pas sentie
tout à fait à l'aise chez ses hôtes :
« c'était mitigé hein. Ma colocation [...]
c'était un peu ambivalent » ;
« ça s'est bien passé mais je peux pas
dire que je me sentais chez moi quand je rentrais à l'appart »
;
« j'ai été très très bien
reçue, ça je le retire pas, mais c'est juste que un mois et demi
c'est
long avec des gens qu'on choisit pas » ;
« je m'entendais pas du tout avec cet homme là,
enfin c'est pas que je m'entendais pas du tout parce que je l'aime bien il est
sympa mais je me retrouvais pas du tout en lui quoi » ;
« je me suis pas sentie un rapport très fort avec
cet homme là » ;
« ma relation avec elle était assez ambiguë
en fait parce que en même temps on s'entendait
bien, en même temps on avait l'impression qu'elle elle
instaurait un peu de rivalité » ; « j'avais le
sentiment qu'elle elle était un peu jalouse de moi ».
Remarquons aussi que C ne s'est pas rendue à Recife
toute seule. En effet, elle était accompagnée d'une camarade de
sa classe que nous appellerons ici Véronique, avec qui elle a
effectué ses stages. Là-dessus, il semble que les relations entre
les deux jeunes femmes étaient tendues :
« je suis partie avec une fille qui n'avait aucune
expérience de voyage » ;
« ça m'a gêné parce qu'en plus
cette fille honnêtement enfin, allez je le dis elle l'écoutera
jamais, mais ça s'est vraiment pas bien passé elle avait vraiment
un complexe d'identité puis justement c'est ce que je te disais elle
avait de grosses choses à régler en voyageant et moi ça
m'a bousillé mon énergie » ;
« elle m'a gaspillé mon énergie puis
elle son voyage s'est très mal passé et j'avais tellement peur
d'être assimilée à elle parce que elle renvoyait des choses
très négatives aux gens et c'est vrai que ça m'a
bousillé mon énergie » ;
« c'est que cette fille elle était
complètement dans une dynamique de d'arraché, elle était
arrachée à sa terre hein, elle le vivait super mal et elle
voulait pas en parler et elle partageait rien » ;
« je la supportais plus dans les stages » ;
« Rien de négatif, à part mes relations
avec Véronique qui n'étaient vraiment pas positives pour l'une
comme pour l'autre ».
Par rapport à ses lieux de stages, C nous fait part
d'un excellent volet relationnel. Concernant la clinique privée, si elle
ne s'y est pas inscrite au plan personnel et professionnel, elle assure avoir
pu bénéficier de très bons contacts humains :
« je me suis sentie hyper bien intégrée
parce que c'était une équipe très soudée ils
étaient dix-huit psys et hyper avenants, c'était des gens avec
qui je me suis sentie tout de suite en confiance, avec l'équipe y avait
pas de problème [...] mais le problème c'était vraiment
personnel c'est que j'accrochais pas avec leur manière de travailler,
avec leur manière de voir le patient [...] et je me suis pas inscrite du
coup dans le lieu de stage comme j'aurais pu le faire ».
Toutefois, il apparait que c'est au contact de la favela que C
ait pu tisser les toiles les plus
significatives de son réseau social :
« l'autre [stage] par contre je me suis
complètement retrouvée » ;
« et puis là c'est pareil on a été
accueilli à bras ouverts dans les équipes et je me suis sentie
faire partie de cette assoc aussi » ;
« c'était une révélation hein
c'était comme ça que je voulais travailler et ça a
fonctionné » ; « j'avais l'impression qu'il y avait
des choses très fortes qui se créaient avec les enfants
» ; « je me suis vraiment trouvée et autant ce que
j'ai fait je pense a servi autant tout ce que les gens m'ont renvoyé m'a
énormément servi » ;
« dans la favela là c'était la rencontre
avec la société brésilienne » ;
« il fallait que je rencontre des gens qui faisaient
de la percu, des gens qui faisaient de la capoeira, des gens qui faisaient
chefs de culte du Candomblé, des jeunes aussi beaucoup [...] je me suis
retrouvée complètement dans ce milieu, complètement, je me
suis sentie accueillie et initiée en fait » ;
« c'était des gens que je côtoyais aussi
par les cérémonies, ou pour plein d'autres choses
donc c'est vrai que ouais, puis on se retrouve, c'est un
petit milieu hein donc c'est vrai que
finalement les contacts se font très vite parce que
c'est un petit milieu quoi et parce que
aussi je restais toujours dans le même favela donc les
gens se connaissent quoi ». Généralement parlant, C
nous dit ne pas avoir eu beaucoup de temps libre ni de loisir durant son
séjour, en raison de la charge de travail que représentaient son
double stage et sa recherche. Cela dit, il semble que cela ne l'ait pas
affectée outre mesure :
« j'avais pas de temps libre (rire). C'était
vraiment ça, j'avais vraiment pas de temps libre on passait d'une
structure de stage à l'autre et et le seul peu de temps pour moi que
j'avais [..] c'était pour mon étude » ;
« j'ai pas eu de, mes potes étaient en lien avec
mon sujet d'étude, je me suis pas fait d'amis en dehors, j'avais pas le
temps vraiment » ;
« mais en même temps j'ai pas eu le sentiment
d'être privée de vie privée parce que je me suis
retrouvée complètement dans ce milieu, complètement, je me
suis sentie accueillie et initiée en fait ».
2.2.2.2. L'orientation d'acculturation de la
société d'accueil
Lorsqu'elle parle de la société qui l'a accueillie,
C décrit un environnement propice à l'épanouissement,
ouvert sur l'Autre :
« dans cet environnement qui en plus est hyper
chaleureux où les gens ouvrent leur porte complètement, ouvrent
leurs bras » ;
« les gens étaient très
prévenants » ;
« les gens m'ont aidée et m'ont ouvert les
portes » ;
« je me suis sentie intégrée tout de suite
ça c'est sûr » ;
« j'ai l'impression qu'on m'a donné tellement
d'énergie » ;
« des gens qui m'ont donné tellement
d'énergie qui m'ont tellement aidée ».
Elle semble d'ailleurs avoir été bien reçue
à plusieurs reprises :
« je me suis sentie hyper bien intégrée
parce que c'était une équipe très soudée ils
étaient dix-huit psys et hyper avenants, c'était des gens avec
qui je me suis sentie tout de suite en confiance » ;
« et puis là c'est pareil on a été
accueilli à bras ouverts dans les équipes et je me suis sentie
faire partie de cette assoc aussi » ;
« quand on est arrivé on a été
super bien accueilli y avait tout qui était prévu, y avait des
gens qui venaient nous chercher à l'aéroport et tout donc c'est
vrai qu'au niveau des liens on a tout de suite été cocooné
».
Elle ajoute même...
« j'ai été très soutenue et par
des gens dont j'avais l'impression que je les connaissais déjà en
fait donc c'était hyper impressionnant comme sensation parce que ouais
je me suis sentie soutenue par des gens qui profondément me respectaient
et me connaissaient [...] vraiment j'ai rencontré que des gens
bienveillants »
...et déclare que le Brésil lui a renvoyé
une impression d'hospitalité sans précédent :
« au Brésil ça a été,
j'avais tout le temps je me sentais super liée avec les gens et les gens
me ramenaient dans leur famille et tout enfin j'ai pas le sentiment de retour
sur une terre mais de retour avec un peuple en fait et c'était hyper
fort enfin [...] c'est la première fois que je ressens ça autant
de retrouvailles ».
2.2.3. Dimension psychologique
Nous nous intéressons là aux données
relatives au choc culturel, que nous allons examiner par l'intermédiaire
des quatre indicateurs que sont le soutien social, l'auto-efficacité, la
réussite académique et professionnelle et le stress
d'acculturation.
2.2.3.1. Soutien social
C obtient le score de 78,8/100 à l'Échelle de
soutien social. Généralement parlant, elle estime avoir
bénéficié d'un excellent soutien au cours de son
séjour...
- item 4 « Je peux parler de mes problèmes à
quelqu'un » : 4/5 ;
- item 5 « Il y a quelqu'un auprès de moi pour me
réconforter quand j'en ressens le besoin » : 4/5 ;
- item 6 « Je reçois tout le soutien moral dont j'ai
besoin » : 4/5 ;
- item 18 « Il y a quelqu'un avec qui je peux partager mes
joies et mes peines » : 4/5 ...et ce plus particulièrement du
côté brésilien :
- item 11 « Je peux compter sur mes nouveaux amis au
Brésil » : 4/5 ;
- item 12 « Je suis satisfait de mes contacts avec mes
nouveaux amis au Brésil » : 5/5 ;
- item 13 « Mes relations avec mes nouveaux amis au
Brésil sont importantes pour moi » : 5/5
« Non je me sentais pas isolée et je me sentais
non pas isolée du coup sur mon quotidien là-
bas parce que les gens étaient très
prévenants » ;
« j'ai rencontré [...] des gens qui m'ont
donné tellement d'énergie qui m'ont tellement aidée qui
m'ont tellement soutenue dans une période de ma vie où ça
allait pas ».
En revanche, du côté français, il semble
qu'elle ait été moins épaulée :
- item 8 « Je peux compter sur mes amis restés en
France » : 3/5 ;
- item 9 « Je suis satisfait de mes contacts avec mes amis
restés en France » : 2/5 ;
« après soutenue par mon côté
français, c'est-à-dire par Véronique, zéro [...]
Mais après par le côté français plus ou moins parce
que ici les gens comprennent pas pourquoi je voyage ».
Par ailleurs, il apparait que l'aspect spirituel ait
joué un grand rôle dans le soutien moral reçu par C :
-
item 16 « Au Brésil j'ai des contacts avec des associations et/ou
des lieux de culte » : 5/5 ;
- item 17 « Au Brésil, le contact avec des
associations et/ou des lieux de culte est important
pour moi » : 5/5 ;
« ouais vraiment parce que parce que j'ai vécu
des choses dures et que j'en avais pas parlé, que j'ai commencé
à m'ouvrir là-bas, à recevoir des choses que j'ai aussi
rencontré quelqu'un qui après on y croit on y croit pas, a
consulté les Cauris tu sais, c'est un genre de coquillage, et ça
ça fait partie d'une tradition afro-brésilienne qui m'a
révélée plein de choses sur ma vie, je sais pas comment
c'est possible mais il a connu toute ma vie, il a connu enfin après mon
futur on y croit on y croit pas mais y m'a dit beaucoup de choses, on a
parlé pendant quatre heures, de ma vie, de ce que je suis, de ce que
j'étais, de mes épreuves et de ce que j'ai vécu, et j'ai
fait comme une psychothérapie en accélérée quoi
vraiment ça m'a ouais, je pense que j'ai traité beaucoup de
choses là-bas. Donc ouais j'ai été très soutenue et
par des gens dont j'avais l'impression que je les connaissais
déjà en fait donc c'était hyper impressionnant comme
sensation parce que ouais je me suis sentie
soutenue par des gens qui profondément me
respectaient et me connaissaient en fait ».
2.2.3.2. Auto-efficacité
C obtient un score de 88,4/100 à l'Échelle
d'efficacité interculturelle. Par exemple, elle indique pouvoir
gérer aisément les aléas inhérents à
l'expérience du séjour à l'étranger :
- item 6 « Si je suis dans le pétrin je peux penser
à une solution » : 5/5 ;
- item 17 « En général, je peux faire face
à quoi que ce soit » : 4/5 ;
- item 19 « Face à une situation inattendue j'ai
assez de ressources pour m'en sortir » : 5/5.
En outre, elle semble disposer de suffisamment de ressources afin
de naviguer sans encombre dans un nouvel environnement :
- item 1 « Je me sens à l'aise lors des
activités sociales » : 5/5 ;
- item 2 « C'est difficile pour moi de me faire des amis
» : 1/5 ;
- item 3 « Je trouve difficile de tenir une conversation
avec la plupart des gens » : 1/5.
Qui plus est, il apparait qu'elle soit tout à fait capable
de satisfaire aux demandes relationnelles du quotidien :
- item 14 « J'ai des sujets de conversation en commun avec
les gens du coin » : 5/5 ; - item 15 « J'apprécie les
mêmes activités que la plupart des gens du coin » : 4/5 ;
- item 16 « J'essaie de devenir ami avec les gens du coin
» : 5/5.
2.2.3.3. Réussite académique et
professionnelle
P n'a pas rempli le questionnaire intitulé Échelle
d'adaptation académique, car elle n'étudiait pas à
l'université sur place. En revanche, de ses stages elle dit :
« Bin y avait deux choses très différentes
en fait, on était dans deux structures ». Concernant la
perception de son travail sur son premier lieu de stage, elle déclare
:
« donc y en avait une qui était
psychanalytique et qui s'occupait des enfants autistes, donc là on
était vraiment dans une démarche clinique très
psychanalytique et c'est vrai que pour moi c'était un petit peu
difficile parce que je suis pas du tout psychanalyste, mais alors vraiment pas
et euh ça s'empire au fil des ans et euh je comprenais absolument pas
leur démarche [...] mais le problème c'était vraiment
personnel c'est que j'accrochais pas avec leur manière de travailler,
avec leur manière de voir le patient, et c'est vrai que ça a
été un problème parce que euh je comprenais pas leur
méthode et je me suis pas inscrite du coup dans le lieu de stage comme
j'aurais pu le faire [...] c'est vrai que je me suis pas investie comme
j'aurais pu et puis bon c'est vrai que ça m'a encore renvoyé
à ma problématique de
je suis pas psychanalyste en France ou ailleurs c'est vrai
que c'est pas évident d'être psychologue et de rejeter la
psychanalyse [...] je me sentais pas investie du fait juste du cadre
méthodologique [...] j'avais l'impression que je servais à
rien ».
En revanche, de sa seconde structure elle nous dit :
« et l'autre [stage] par contre je me suis
complètement retrouvée heu un centre de psychologie
transpersonnelle mais surtout sociale dans les favelas dans une favela de
Recife le Coque et puis en fait là c'était une association donc
c'était que des bénévoles et puis donc nous on participait
à des groupes enfin c'est pas des groupes thérapeutiques du coup
c'est des groupes holistiques qui visaient au développement personnel et
identitaire des enfants donc par petites tranches d'âge donc là
c'est vrai qu'on avait pas trop une place de psy hein moi je dirais plus comme
une place d'éducateur puis vraiment une place de bénévole
[..] je me suis sentie faire partie de cette assoc aussi [...]
complètement, c'était vraiment c'était une
révélation hein c'était comme ça que je voulais
travailler et ça a fonctionné [...] en tout cas je me suis
vraiment trouvée et autant ce que j'ai fait je pense a servi autant tout
ce que les gens m'ont renvoyé m'a énormément servi
».
Confirmant cela, C se déclare globalement satisfaite de
sa première structure de stage à un degré de 2/5 et de sa
seconde structure de stage à un degré de 4/5 (Questionnaire
général, item 15 a) « Globalement, combien êtes-vous
satisfait de votre séjour dans votre structure de stage au
Brésil? »).
2.2.3.4. Stress d'acculturation
Premièrement, C obtient le score de 75,7/100 à
l'Échelle de stress d'acculturation. Par exemple, elle apparait ne pas
souffrir du mal du pays :
- item 1 « J'ai le mal du pays : je ne me sens pas chez moi
et mes compatriotes me manquent » : 2/5.
Toutefois, elle confie s'être sentie sous pression sur
place en raison d'un rythme de travail soutenu, entre ses stages et sa
recherche :
- item 8 « Je me sens sous pression ici » : 4/5 ;
« enfin c'était tout une dynamique qui a fait
que finalement on a fait deux stages au lieu d'un, et aussi que du coup on
avait notre recherche à faire en plus donc le séjour a
été complètement surréel, on s'est
dépêché » ;
« j'avais pas de temps libre » ;
« j'avais pas le temps vraiment ».
Ensuite, elle dit ne pas se considérer victime de
discriminations, de préjugés ou de stéréotypes :
- item 2 « Je me sens discriminé ou pas sur un pied
d'égalité avec les gens du coin » : 2/5 ; - item 3 «
Les autres se moquent de ma culture et de mes valeurs » : 2/5 ;
- item 14 « Je suis victime de préjugés et de
stéréotypes » : 1/5.
En revanche, lors de notre entretien, elle nous a confié
avoir été sujette à de nombreuses remarques d'hommes et
parle là du stéréotype de la femme blonde, exotique :
« au Brésil j'ai fini par le ressentir et
ça c'est quelque chose que je supporte pas. Tu vois, comment les hommes
t'abordent et puis ouais tu représentes quelque chose quand même
en temps que la blonde » ;
« au Brésil je l'ai ressenti aussi [...] et
ça ça me fatigue » ;
« vraiment, j'ai même pensé une fois
à me teindre les cheveux mais j'ai pas eu envie d'enlever ma couleur
naturelle parce que pour une question de stéréotypes ça
m'énerve mais c'est vrai que c'était présent au
Brésil ».
Par ailleurs, C estime ne pas avoir vécu de choc
culturel lors de son séjour (Questionnaire général, item
17 « Rétrospectivement, pensez-vous avoir vécu un choc
culturel pendant votre séjour au Brésil? » : non),
partiellement en raison des similarités entre les sociétés
réunionaise et brésilienne, comme nous l'avons déjà
indiqué. Malgré ce, son séjour au Brésil semble
avoir accentué une certaine perte de repères sur le plan de
l'enracinement culturel et identitaire. En effet, C nous dit :
« je me sens toujours en marge de mon propre pays
» ;
« je me sens pas d'ici [la métropole] et
ça a été évident à partir du moment
où j'ai voyagé » ;
« quand je rentre je refais toujours un rejet total de
la France » ;
« quand je suis revenue ici ça a
été tout une démarche de me réapproprier la
métropole qui pourtant est mon lieu d'origine » ;
« toute ma vie, quand je reviens, c'est là que
j'ai mon choc culturel c'est là que je me dis «
ma culture elle m'appartient pas » et je me sens mieux
chez les autres que chez moi ». Ensuite elle ajoute :
« je me sens pas inscrite dans ce pays pour son
peuple en fait. Et c'est exacerbé surtout depuis que je suis revenue de
la Réunion c'est vraiment les gens m'énervent quoi, la
mentalité m'énerve et je pense qu'en plus c'est pas du tout
objectif hein, c'est vraiment parce que je sais qu'il y a des gens super et que
j'en rencontre aussi mais je me sens pas bien ici » ;
« quand je voyage c'est que je supporte pas d'être
assimilée à une Française alors que c'est ce que je
renvoie en fait » ;
« j'assume pas du tout mon côté
français j'ai vraiment un rejet de mon identité je sais pas
pourquoi, c'est pas que j'ai honte d'être française c'est que je
me sens profondément pas française et en fait du coup quand je
voyage je suis assimilée à la France et qu'en fait je le porte
pas et c'est hyper lourd pour moi » ;
« c'est pas la culture française parce que
j'aime beaucoup mon pays, j'aime beaucoup sa diversité, j'aime beaucoup
tout ce qu'il peut offrir de différent que ce soit dans le peuple ou
juste les paysages ou la bouffe ou chaque région a une culture
énorme mais c'est vrai que je supporte pas le peuple français
ça me fatigue son rejet de la différence, ça me fatigue
son manque de communication, sa peur de l'Autre » ;
« pour moi c'est ça, enfin la France c'est une
vieille dame qui a peur de l'Autre en fait ». Puis elle
précise :
« je viens d'un milieu très riche et très
fermé et que je rejette tout le temps ça et que en voyageant je
me rapproche toujours des gens qui ont rien parce que je trouve ça
fabuleux d'avoir rien et de donner tout et parce que je ressens ça je
sens que et pourtant c'est pas comme si j'avais été
élevée sans rien c'est que au contraire je me retrouve dans ce
don comme ça et c'est vraiment ce que je suis profondément et
c'est vrai que c'est un paradoxe complet dans mon identité quoi
» ;
« un retour à je sais pas quoi, et
complètement contradictoire avec mes origines ».
Ainsi, de cette assise identitaire conflictuelle, des tensions
semblent avoir émergé pendant son séjour au Brésil.
C explique s'être :
« je sais pas pourquoi je me suis identifiée
plus à ceux qui se contentent du peu et c'est vrai que je me suis un peu
détachée de ce côté occidental et ça a
joué sur ma deuxième structure de stage qui était
privée, qui accueillait les gens et qui se permettait de faire des
choses pas de la manière que j'aurais aimé en fait »
;
« c'était une structure privée très
très chère donc donc le public était plus ou moins enfin
bien occidental ».
De même, en faisant référence à ses
hôtes, elle affirme :
« vu qu'ils étaient très riches [...] y
connaissaient rien du Candomblé [...] toute les pratiques afros c'est
vade retro satanas » ;
« la personne qui m'a accueillie elle était dans
un immeuble avec piscine, salle de sport et tout » ;
« eux ils sont très très riches quoi donc
c'est des bagnoles et enfin c'était pas le Brésil que je
côtoyais après » ;
« je me suis pas retrouvée dans ce groupe quoi,
c'était pas le côté du Brésil qui me faisait
écho ».
Par ailleurs, elle indique également :
« je dormais aussi dans la favela et c'est vrai que je
me sentais plus à l'aise quand je dormais dans la favela alors que quand
j'entrais dans cet immeuble tout aseptisé ».
En conséquence, elle nous dit :
« ça a été mon choc quoi du
Brésil de voir des gens dans la misère qui cohabitaient [...] y a
pas de rapports en fait entre les très riches et les très pauvres
et ça c'est un truc qui m'a choquée » ;
« le retour en métropole [...]
j'appréhendais beaucoup ».
En définitive, ce déséquilibre, cette
incertitude, semble l'avoir conduit vers une soupape spirituelle : «
le Candomblé [...] c'est une philosophie de la vie qui m'a vraiment
touchée et j'ai développé ma spiritualité vraiment
à fond là-bas » ;
« le Brésil arrivait à point
nommé dans ma vie parce que j'étais pas bien du tout et [...] je
me suis retrouvée aussi spirituellement, ça fait des
années que je lâchais cette partie là de ma vie que je
savais pas trop où j'en étais » ;
« c'était aussi la rencontre avec tout ce
côté spirituel [...] qui porte vraiment quelque chose de
très fort dans la culture brésilienne » ;
« je me suis inscrite complètement dans le
Candomblé » ;
« c'est la première fois que je rencontre ma
spiritualité enfin c'est pas la première fois que je la rencontre
mais c'est vrai que ça m'a permis de retrouver une spiritualité
que j'avais perdu complètement » ;
« alors que je m'attendais pas du tout à
ça c'est là que je me suis retrouvée en plein dans ma
spiritualité dans ce que je croyais j'ai remis en question beaucoup de
choses et c'est vrai que ça m'a beaucoup fait avancer et puis je crois
que j'ai rencontré aussi les bonnes personnes au bon moment »
;
« ce voyage là je me suis retrouvée,
c'était différent, parce que je pense que je m'étais
perdue, je m'étais perdue en rentrant ici [en métropole] [...] et
là je me suis retrouvée. Et ça m'a fait du bien [...] je
me sens sur la bonne route [...] j'ai l'impression de m'être
retrouvée et d'être repartie dans une dynamique que j'avais perdu
en fait ».
Pour finir, d'une manière générale, C se
dit satisfaite de son séjour au Brésil (Questionnaire
général, item 15 b) « Globalement, combien êtes-vous
satisfait de votre séjour au Brésil? » : 4/5) et
déclare également avoir préféré sa vie
à Recife par rapport à sa vie à Lyon, en métropole
(Questionnaire général, item 16 « Globalement, en terme de
qualité de vie, de bien-être et satisfaction, que
placeriez-vous en tête? » : Brésil). Elle
affirme même :
« moi je suis hyper heureuse de ce que j'ai
vécu, ça faisait longtemps que j'avais pas eu ce sentiment
d'être au bon endroit au bon moment et ouais et puis j'ai eu une
espèce de fusion avec le peuple brésilien ».
Deuxièmement, C obtient le score de 87/100 à
l'Échelle de bien-être. Par exemple, elle semble s'être
sentie à l'aise dans son environnement :
- item 2 « Vous sentez-vous exclu, discriminé ou
rejeté? » : 1/5 ;
- item 3 « Vous sentez-vous seul et faiblement
entouré? » : 1/5 ;
- item 9 « Vous sentez-vous à l'aise dans votre
environnement » : 4/5 ;
- item 12 « Vous sentez-vous capable d'aborder les gens /
aller vers les autres? » : 4/5 ; - item 13 « Participez-vous
régulièrement à des activités de groupe? » :
5/5.
Pareillement, il apparait qu'elle ait su conserver un bon moral
:
- item 7 « Êtes-vous content de la tournure
qu'à pris votre vie ici? » : 5/5 ;
- item 8 « Êtes-vous plus souvent
déprimé que joyeux? » : 1/5.
D'ailleurs, le premier item du Questionnaire
général corrobore ces observations (« Durant votre
séjour au Brésil, comment vous sentiez-vous? » : 5/5).
Dernièrement, C obtient le score de 73,3/100 au Brief
COPE. Ses réponses laissent transparaitre qu'elle n'hésite pas
à chercher aide et conseil auprès de son entourage lorsqu'elle
est confrontée à des situations délicates, stressantes ou
imprévues...
- item 3 « Recevoir l'aide et le conseil d'autres personnes
» : 5/5 ;
- item 6 « Exprimer mes sentiments négatifs » :
4/5 ;
- item 7 « Rechercher la compréhension et le soutien
de quelqu'un » : 5/5
...et qu'elle ne se laisse pas dépasser par les
évènements :
- item 2 « Prendre les choses en main pour essayer de
résoudre la situation » : 4/5 ; - item 4 « Renoncer à
essayer de résoudre la situation » : 2/5.
2.3. Compétence interculturelle
À l'aide des données dont nous disposons, nous
allons tenter de présenter des éléments qui seraient
susceptibles de nous renseigner sur le degré de compétence
interculturelle de C.
2.3.1. Sens du séjour à
l'étranger
Pour C, il semble que le mot le plus caractéristique
pour qualifier son séjour soit « retrouvailles »
(Questionnaire général, item 10 « Choisissez un mot qui
serait le plus caractéristique pour situer votre séjour au
Brésil au regard de votre vie en général » :
retrouvailles).
Interrogée là-dessus en entretien, elle explique
avoir retrouvé une terre d'une part...
« j'ai l'impression que c'était une petite
part de chez moi quoi, et aussi justement c'est ce que je te disais plein de
choses qui sont pareilles avec la Réunion [...] un petit retour chez moi
après la nostalgie ça faisait depuis six mois que j'étais
partie de la Réunion ça faisait un bien fou quoi pour plein de
trucs quoi » ;
« c'est des sociétés complètement
soeurs quoi et euh c'est vrai que ma vie à la Réunion a fait que
ouais c'est vrai que le Brésil était une sorte de retrouvailles
» ;
« je me suis retrouvée complètement dans
ce milieu » ;
« moi j'étais particulièrement
attirée par le nord parce que mon étude, d'une part je faisais un
stage et d'autre part ma recherche sur place était sur
l'africanité donc c'est vrai que dans le nord c'est beaucoup plus
présent, [...] donc c'est vrai que moi ça me faisait
particulièrement écho »
...puis s'être retrouvée elle-même d'autre
part :
« là ce voyage là je me suis
retrouvée [...] je me suis perdue en rentrant chez moi, parce que c'est
pas chez moi, et là je me suis retrouvée. Et ça m'a fait
du bien » ;
« ça m'a permis de retrouver une
spiritualité que j'avais perdu complètement ».
2.3.2. Ressenti sur le séjour
Il apparait que ce séjour soit survenu fort
opportunément dans la vie de C :
« je crois que j'ai rencontré aussi les bonnes
personnes au bon moment » ;
« ça faisait longtemps que j'avais pas eu ce
sentiment d'être au bon endroit au bon moment » « le
Brésil arrivait à point nommé dans ma vie parce que
j'étais pas bien du tout et quand je suis revenue je me suis
retrouvée quoi, j'ai rencontré les bonnes personnes au bon moment
j'avais l'impression d'avoir retrouvé des gens que je connaissais depuis
toujours je me suis retrouvée aussi spirituellement » ;
« je me suis retrouvée en plein dans ma
spiritualité dans ce que je croyais j'ai remis en question beaucoup de
choses et c'est vrai que ça m'a beaucoup fait avancer et puis je crois
que j'ai rencontré aussi les bonnes personnes au bon moment
».
Elle nous dit même avoir eu le sentiment qu'il ne pouvait
pas en être autrement...
« j'avais vraiment le sentiment de me trouver au bon
endroit au bon moment parce que
j'avais l'impression que tout ce qui m'arrivait
c'était écrit en fait » ;
« j'ai eu un sentiment de déjà vu comme si
j'avais déjà été là dans ma vie
c'était obligé où je devais être là dans ma
vie je sais pas et en tout cas je me suis vraiment trouvée
»
...ainsi qu'un sentiment de déjà vu :
« j'ai vraiment le sentiment d'avoir retrouvé
des gens que je connaissais depuis très longtemps et ces personnes
là m'ont renvoyée le même retour, de me dire « j'ai
l'impression que je te connais depuis très très longtemps »
» ;
« c'est la première fois que je ressens
ça autant de retrouvailles quoi comme si je le connaissais depuis des
années [...] c'est vrai que cette notion de rencontre au Brésil a
été super forte parce que tous les gens que je rencontrais
c'était ça une impression de déjà vu quoi
».
En outre, il semble que les voyages soient un
élément clef dans la vie de C...
« c'est mon truc de toute manière, moi tout mon
cursus, toute ma vie c'est ça, voyager c'est ma passion, c'est ce qui me
fait vivre aussi parce que quand je voyage je me sens bien » ;
« Il faut que je voyage toute seule, j'ai besoin de
me retrouver toute seule dans un cadre autre que mon cadre de naissance quoi et
puis c'est comme ça que je me construis honnêtement hein, moi mon
identité elle est construite comme ça » ;
« quand je voyage c'est une quête identitaire
justement parce que comme je m'inscris pas ici je veux savoir où je
m'inscris ailleurs et pourquoi en fait » ;
« enfin de toute manière mon cursus
professionnel, universitaire, c'est l'interculturel donc c'est vrai que c'est
des choses qui me renvoient à des choses très profondes
» ;
« c'est vraiment ce qui me nourrit en fait de
découvrir la culture de l'Autre que ce soit ici où ailleurs c'est
mon cursus, c'est mon identité, c'est qui je suis et c'est vrai
qu'à chaque fois que j'arrive dans un endroit différent c'est
comme si j'absorbais la culture en fait je suis un peu une éponge
»
...et elle ajoute :
« dans chaque voyage on change, d'une
déjà parce qu'on se comprend, parce que l'appréhension de
l'Autre nous permet de relativiser certaines choses aussi, parce que beaucoup
aussi quand je voyage je rencontre énormément de gens qui
m'apportent énormément de choses donc c'est clair qu'à
chaque voyage je reviens changée » ;
« j'ai encore envie de profiter de cette soif de
découvrir, de toutes ces opportunités d'être libre pour
voyager ».
Néanmoins, elle se déclare frustrée de ne
pas avoir pu mener à bien sa première année de Master
à la suite de son séjour :
« c'est comme si [...] il fallait que je revienne
pour compléter quelque chose vraiment et aussi parce que bin là
j'ai abandonné mon Master du coup parce que j'ai pas réussi en
rentrant à faire tout ce que je devais faire donc j'ai pas
concrétisé mon étude que j'avais fait là-bas et
ça me reste en travers de la gorge parce ce que j'ai l'impression qu'on
m'a donné tellement d'énergie, j'ai rencontré tellement de
choses que ça m'embête, ça m'embête de pas avoir, et
du coup là c'est comme s'il fallait que je retourne au Brésil
vraiment ».
2.3.3. Tensions éprouvées
Rappelons simplement que C parait reposer sur une assise
identitaire conflictuelle, de laquelle semblent avoir résulté des
tensions avec son environnement au cours du séjour au Brésil,
ainsi que nous l'avons déjà dit précédemment en
traitant du stress d'acculturation.
2.3.4. Évolution personnelle
Tant avant qu'après son séjour, C déclare
avoir toujours eu un degré d'exposition internationale maximal et un
degré de conscience interculturelle maximal (Questionnaire
général, item I « Comment évalueriez-vous votre
exposition internationale (le degré auquel vous êtes
confronté à la vie au sens large au-delà de nos
frontières)? » : 5/5 ; Questionnaire général, item II
« Comment évalueriez-vous votre conscience interculturelle (le
niveau auquel vous êtes préoccupé par, ou impliqué
dans, des affaires extraterritoriales)? » : 5/5).
Elle lie cela à plusieurs facteurs, à savoir son
environnement familial d'une part...
« mes parents quand même nous ont fait beaucoup
voyager quand on était petit » ; « donc cette
découverte de l'Ailleurs je l'avais déjà depuis
très très petite »
...et ses précédents séjours d'étude
à l'étranger d'autre part :
« j'ai de la bouteille » ;
« c'est à ce voyage là que je dis que je
me suis rendue compte que ça y est j'avais de l'expérience
» ;
« ce voyage là où je me suis dit «
ouais finalement ça y est, j'ai des bagages quoi, j'ai voyagé
» » ;
« je pense que ouais c'est clair que mes
expériences antérieures m'ont beaucoup aidée »
;
« c'est vrai que ouais concrètement mes
expériences d'avant m'ont beaucoup servie ». Cependant, C
estime avoir évolué sur un plan personnel grâce à
son expérience au Brésil (Questionnaire général,
item 9 « Avez-vous eu le sentiment d'avoir changé à l'issue
de votre séjour au Brésil? » : 4/5). Interrogée
à ce sujet lors de notre entretien, elle dit :
« Je me sens pas changée, je me sens sur la
bonne route, et c'est ça qui est différent en fait,
c'est que j'ai l'impression de m'être
retrouvée et d'être repartie dans une dynamique que j'avais perdue
en fait. Mais oui dans une certaine mesure c'est un changement aussi je
pense ».
2.3.5. Projets d'avenir
C déclare que cette expérience aura des
répercussions sur son avenir (Questionnaire général, item
11 « Pensez-vous que cette expérience va influencer votre vie
future? » : oui). Elle nous dit notamment envisager ses études sous
un jour nouveau :
« j'ai une proposition de doctorat là-bas, et j'y
pense vraiment » ;
« j'ai l'impression que c'est comme si le
Brésil m'avait mis sur la voie alors que c'était pas du tout mon
plan, moi je viens d'une famille qu'est pas très intellectuelle, qui est
pas enfin le doctorat c'est plafond de verre pour moi quoi déjà
finir le Master c'est magnifique je me suis jamais projetée dans une
thèse, je me suis toujours dit « c'est trop loin, être prof
c'est pas possible » » ;
« en fait pour tout te dire c'était ma
quatrième proposition de doctorat dans toute ma vie y a quatre profs qui
m'ont proposé de me prendre en thèse et je sais que c'est faire
la fine bouche mais déjà une proposition de doctorat c'est
énorme, quelqu'un qui te propose de te prendre en thèse je suis
consciente mais c'est tellement mon plafond de verre, c'est tellement ce qui
m'angoisse que j'ai toujours refusé mais après le Brésil
je me suis dit « faut peut-être arrêter de faire la fine
bouche quoi, faut peut-être y aller » ».
En outre, elle affirme son désir de se rendre à
nouveau au Brésil :
« Au départ je m'étais dit « le
Brésil ça va être une partie de ma vie » mais en
partant vraiment j'avais le sentiment que j'avais pas achevé quelque
chose et qu'y faut que je reparte là-bas [...] j'ai senti que
c'était une évidence de toute manière que j'allais revenir
au Brésil » ;
« c'est comme si là ce que j'avais vécu
c'était qu'une mise en bouche et qu'il fallait que je revienne [...]
professionnellement et spirituellement ».
3. Le cas de M
Pour commencer, nous allons situer le séjour de M et
tenter d'en déceler les origines ainsi que les motivations
sous-jacentes. Par la suite nous examinerons celles de ses réponses qui
se rapportent aux indicateurs des transformations socioculturelles. Finalement,
nous passerons en revue les réponses de M associées aux cinq
thèmes en relation avec la CIC.
3.1. Contexte
M est une étudiante en troisième année de
Licence en sciences de l'éducation Elle a passé six mois à
Caxias do Sul dans le cadre de ses études, au cours du cinquième
semestre de la Licence. Sur place, elle suivait donc des cours et s'est
également vue offerte l'opportunité, via la direction des
ressources internationales locale, de donner des cours de français
à un public adulte dans une école de langue. Il ressort que son
séjour au Brésil était assez inattendu. M nous explique
que l'Amérique Latine, et plus particulièrement l'Argentine
où elle rêvait de se rendre, exercent sur elle un fort attrait
depuis longtemps :
« l'Amérique Latine m'a toujours toujours
inspirée j'avais vraiment envie d'y aller et de, mais plus
l'Argentine » ;
« depuis euh peut-être que j'ai dix ans, j'ai le
rêve d'aller en Argentine ».
Or, si étudier à l'étranger
l'intéressait, les partenariats internationaux de l'Université
Lumière Lyon 2 concernant les sciences de l'éducation ne lui
permettaient pas de se rendre en Argentine. Elle avait donc renoncé
à tout projet d'études intégrées à
l'étranger :
« voilà j'avais ce rêve là et avec
ma Licence c'était pas possible, y avait pas de partenariat
en Argentine donc j'avais même pas rendu le dossier
donc j'étais un peu déçue ».
Cependant, à la suite d'une intervention lors d'un
cours début 2011, M apprit qu'il lui était possible de se rendre
au Brésil afin de poursuivre une partie de ses études. Bien
qu'elle n'avait jamais envisagé de se rendre au Brésil
jusqu'à lors, cette opportunité fut l'élément
déclencheur de son séjour, par le biais duquel elle conservait
toujours en ligne de mire ses rêves d'Argentine :
« c'est vrai que j'avais même pas pensé
à aller au Brésil » ;
« alors je me suis dit « bin vas-y fonce »
en plus comme ça si je suis à côté de l'Argentine
comme ça je pourrais aussi y aller, en Argentine. Et voilà, c'est
pour ça que je suis allée au Brésil » ;
« du coup comme mon rêve c'était d'aller en
Argentine j'ai été faire vingt jours en Argentine ».
3.2. Transformations socioculturelles
Nous allons présenter ici les résultats de M dans
les dimensions culturelle, sociale et psychologique des transformations
socioculturelles.
3.2.1 Dimension culturelle
Nous nous intéressons ici aux données relatives
aux trois indicateurs de la composante culturelle telle que nous l'avons
définie dans notre étude, à savoir les compétences
de communication, la distance culturelle et la sensibilité
interculturelle.
3.2.1.1. Compétences de communication
M obtient un score de 88/100 à l'Échelle de
communication interculturelle. Par exemple, elle trouve très simple de
nouer des liens avec les autochtones :
- item 8 « Je trouve que les gens du coin ne
m'intègrent pas assez » : 1/5 ;
- item 9 « Je trouve qu'il n'est pas facile de devenir ami
avec une personne d'une autre culture » : 1/5.
De même, il semble aisé pour elle d'établir
des situations de communication avec des gens issus de sociétés
aux inflexions culturelles différentes :
- items 12 « Je suis angoissé quand je communique
avec une personne d'une autre culture » : 1/5 ;
- item 13 « Je me vexe facilement quand je communique avec
une personne d'une autre culture » : 1/5 ;
- item 14 « Je me décourage si les gens avec qui je
parle ne me comprennent pas » : 2/5 ;
- item 20 « Quand les gens du coin parlent, j'ai du mal
à me joindre à la conversation » : 1/5. Par ailleurs, elle
trouve facile de parvenir à une compréhension mutuelle avec les
personnes issues de sociétés aux infléchissements
culturels différents :
- item 19 « Je trouve difficile de parvenir à une
compréhension mutuelle avec une personne d'une autre culture » :
2/5.
De plus, au début de son séjour, M estimait
avoir un niveau en portugais de 1/5, soit un niveau débutant. À
l'issue de son séjour, elle estimait cette fois son niveau entre 4/5 et
5/5, soit un niveau avancé ou expert (Questionnaire
général, item 12 « Quel était votre niveau de
portugais? »). À ce propos, au cours de notre entretien, elle
affirme avoir acquis un bon niveau de portugais à l'issue de son
séjour :
« quand je suis partie du Brésil, j'ai mon
meilleur copain de là-bas qui m'a dit qu'y
comprenait quatre-vingt-dix-huit-pour-cent de tout ce que je
disais ».
3.2.1.2. Distance culturelle
M obtient un score de 45,2/100 à l' Échelle de
distance culturelle. Par exemple, certains aspects de la réalité
locale au Brésil lui paraissent aux antipodes de sa vie en France...
- item 1 « Le climat, la météo » : 4/5
;
- item 4 « L'enseignement supérieur, la vie à
l'université » : 5/5 ;
- item 9 « La mentalité, la façon de voir les
choses » : 4/5 ;
- item 17 « L'environnement, la faune, la flore, les
paysages » : 4/5
...tandis que d'autres facettes de la vie brésilienne lui
apparaissent beaucoup plus familières : - item 19 « Les habitudes,
la routine, la vie quotidienne » : 2/5 ;
- item 8 « Les loisirs, les distractions » : 3/5.
Concernant les représentations du Brésil chez M,
elle nous confie :
« déjà, si tu penses au Brésil,
c'est sûr tu veux du soleil » ;
« j'imaginais les plages ».
Elle imaginait aussi un rythme de vie différent...
« je pensais aussi à des trucs cons mais euh
différentes heures de repas, des trucs comme ça qui en fait non
pas du tout » ;
« j'aurais aimé manger à quatorze heures,
même comme en Espagne tu vois et puis avoir un autre rythme de vie
» ;
« j'espérais ça aussi tu vois et non ils
mangent à midi, vingt heures, c'est un peu le même rythme que nous
finalement et c'est vrai que j'avais une espérance là-dessus
»
...ainsi qu'une population plus métissée, avec
moins d'influences européennes...
« d'un autre côté c'est vachement
européen, enfin je veux dire, physiquement, les personnes ressemblent
vachement à des personnes européennes, euh vu que y a beaucoup de
descendants italiens et allemands on entendait quand même des gens parler
italien ou allemand tu vois, alors que bin tu t'y attends pas au Brésil
» ;
« c'était une ville qui qui, qui faisait
Brésil mais qui aussi qui, où y avait aussi quand même
quelque chose d'européen » ;
« à Rio j'ai eu plus un choc visuel
déjà de la ville, et culturel aussi, enfin en voyant les gens, en
parlant aux gens, c'était quand même complètement
différent de Caxias do Sul, et Salvador encore plus [...] ces villes
là qui me semblaient, moi, différentes, parce que Caxias c'est
quand même vachement européen »
...et davantage de pauvreté :
« je pensais peut-être voir plus de
pauvreté surtout à Caxias en fait, après quand je suis
allée dans les autres villes c'est vrai que là j'ai eu ma dose
mais euh ouais je pensais peutêtre voir plus de pauvreté
».
Généralement parlant, elle estime que ses
représentations du Brésil n'ont pas beaucoup changé
(Questionnaire général, item 14 « Entre votre arrivée
et votre départ, diriez-vous que vos représentations du
Brésil ont beaucoup changé? » : non).
3.2.1.3. Sensibilité interculturelle
M obtient un score de 86,9/100 à l'Échelle de
sensibilité interculturelle. Par exemple, elle estime n'avoir aucune
difficulté à se faire comprendre...
- item 1 « Vous faire comprendre » : 2/5
...ou à comprendre les autres :
- item 2 « Comprendre le portugais, l'accent local » :
1/5.
De même elle se dit capable de gérer les
activités quotidiennes sur place :
- item 17 « Faire les courses » : 1/5 ;
- item 18 « Vous repérer, demander votre chemin
» : 1/5 ;
- item 19 « Participer à des activités de
groupe » : 1/5.
En outre, elle estime avoir une bonne appréhension de la
réalité locale en terme de mentalités et d'usages :
- item 21 « S'adapter aux règles de bienséance
locales » 2/5 ;
- item 22 « Comprendre les différences culturelles
observées ou ressenties » : 2/5 ; - item 23 « Comprendre les
valeurs locales » : 2/5 ;
- item 24 « Vous intégrer à la culture locale
» : 2/5 ;
- item 25 « Comprendre la façon dont les autochtones
voient le monde » : 2/5.
3.2.2. Dimension sociale
Nous allons aborder ici les informations concernant le
phénomène d'acculturation, notamment par le biais du capital
social de M, ainsi que les données relatives à l'orientation
d'acculturation de sa société d'accueil.
3.2.2.1. Capital social
M nous dit qu'il lui a été facile de
créer du lien social au Brésil (Questionnaire
général, item 2 « Au Brésil, était-il facile
de créer du lien avec d'autres personnes? » : 5/5) ainsi que
s'être sentie bien insérée socialement sur place
(Questionnaire général, item 7 « Rétrospectivement,
comment vous sentiez-vous inséré dans la vie brésilienne
à l'issue de votre séjour? » : 4/5). En outre, elle pense
avoir beaucoup communiqué avec les autres pendant son séjour
(Questionnaire général, item 5 « Au quotidien, comment
pensez-vous avoir communiqué avec les autres? » : 4/5). Par
ailleurs, elle estime avoir communiqué sur une base
régulière avec plus ou moins cinq personnes au début de
son séjour, puis avec plus de dix personnes à la fin de son
séjour (Questionnaire général, item 6 « Dans la vie
de tous les jours, parmi vos relations, avec combien de personnes
dialoguiez-vous? »).
À ce sujet, elle nous dit que ses interlocuteurs
privilégiés étaient majoritairement des Brésiliens
et des étudiants internationaux (Questionnaire général,
item 8 « De quelle nationalité étaient vos interlocuteurs
privilégiés? »).
Durant son séjour au Brésil, M a d'abord
été accueillie au sein d'une famille brésilienne pendant
les trois premières semaines, puis a ensuite vécu en colocation
avec cinq autres étudiants internationaux, dont un Espagnol, une
Italienne, deux Mexicains et un Français.
Au sujet de son séjour chez la famille brésilienne
qui l'a hébergée provisoirement, M nous dit qu'elle a
été très bien reçue et s'estime heureuse d'avoir pu
bénéficier de cette opportunité :
« j'ai eu la chance d'être dans cette famille
brésilienne » ;
« tout de suite elle m'a vraiment vraiment super bien
accueillie » ;
« ça m'a aidé à me sentir bien
parce que je me suis sentie quand même chez moi assez facilement dans
cette famille ».
En revanche, à propos de son expérience de la
colocation, M se montre plus réservée :
« la colocation a commencé on était une
grande famille, tous un grand échange, premier et grand échange
dans un autre pays tatati tatata on se retrouve tous étudiants on se dit
en fait c'est bon on va devenir friends tu sais des meilleurs amis toute la vie
mais non (rire). On est différent, on vient de cultures
différentes [...] on avait pas les mêmes attentes » ;
« tu vois que euh, que t'as pas d'intimité,
jamais, et euh, et je pense que ça a été du coup le
problème de notre coloc parce que on se retrouvait jamais tout seul tu
vois » ;
« y avait des embrouilles entre nous [...] donc c'est
vrai qu'y avait des moments où t'en avais marre » ;
« vivre à six, en coloc à six, franchement
c'était vraiment vraiment, y avait des moments c'était
dégoutant [...] vraiment c'était chiant quand même
».
Qui plus est, elle nous dit que si le contexte pluriculturel de
la colocation était enrichissant, il avait
tendance à confiner entre eux des étudiants
étrangers, ce qu'elle envisageait comme une barrière à une
plus large intégration dans la société brésilienne
:
« c'est vrai que ça a été super
enrichissant [...] mais d'un autre côté ça nous enfermait
aussi dans cette euh, dans le fait qu'on est étranger qu'on reste entre
étrangers [...] et y en a beaucoup qui ont fait ça [...] mais
dès qu'on leur proposait de faire quelque chose dans un autre endroit
avec d'autres Brésiliens bin c'était carrément plus dur tu
vois et c'est vrai que après je l'ai dit à tout le monde,
à ceux qui arrivaient tout ça, fais attention quand tu fais un
échange de pas rester qu'entre étrangers c'est con quoi
».
Concernant l'université, M explique que ce lieu n'a pas
été un vecteur privilégié de rencontres, notamment
en raison du fait qu'elle n'ait pas eu l'opportunité de suivre
l'ensemble des cours au sein d'une seule et même promotion :
« je changeais à chaque heure de cours [de groupe
de personnes], donc plus dur aussi pour se créer de vraies relations
durables ».
Néanmoins, M nous dit être parvenue à
tisser un solide réseau d'amis sur place, brésiliens notamment,
mais pas seulement. Par exemple elle nous dit avoir noué des liens
très forts avec son colocataire français :
« je me suis vraiment rapprochée de mon coloc
français » ;
« dès que j'ai rencontré mon coloc
français, que j'ai vraiment appris à découvrir, et bin
ça a été mon meilleur ami et on est devenu
inséparable ».
C'est d'ailleurs par ce biais là que M a pu rencontrer
des Brésiliens avec lesquels elle s'est par la
suite sentie de très fortes affinités, et qui ont
constitué son principal groupe d'amis :
« en fait ça a commencé parce que mon
coloc a eu des amis de par sa fac [...] donc y s'est fait ces amis là,
on a commencé à bien sympathiser avec eux, et euh, et ensuite,
[...] j'ai rencontré euh un gars qui avait fait un échange en
Europe [...] et ce gars là il était danseur de hip-hop et il
avait tout un groupe avec lui donc on s'est rencontré [...] et c'est
devenu mes, mes amis, vraiment, super bon feeling, donc du coup après
voilà je restais tout le temps avec eux, j'étais plus chez moi
j'étais tout le temps dans la rue avec eux et je disais donc à
mon coloc de venir, ou d'autres personnes tu vois d'essayer que tout le monde
en profite que j'avais cette relation là ».
Le lieu de travail de M lui a également permis de
fréquenter des Brésiliens et de lier connaissance avec eux :
« ma directrice était génialissime
[...] elle nous emmenait des fois elle nous prenait moi et je bossais avec
l'Italienne et la Mexicaine et on allait se balader en, on avait fait un
circuit de tous les vignobles du coin [...] elle nous emmenait visiter des
villes une fois de temps en
temps » ;
« c'était génialissime, parce que t'es
avec des gens qui ont envie d'apprendre c'est des adultes [...] et les gens y
étaient, j'apprenais le portugais aussi, et j'apprenais plein plein de
choses car j'essayais de m'intéresser à ce que eux ils faisaient,
comme ça ils pouvaient me parler de leur travail, de leur métier,
comme ça j'ai appris plein de trucs que je pensais pas que, qu'y y avait
des différences ».
Finalement, M nous dit avoir volontiers entrepris de
créer du lien social au Brésil afin de s'insérer avec
succès dans son environnement :
« j'en avais envie je pense. Je pense que si t'as
peur tout de suite et que si tu te renfermes dans ta peur tu vas pas aller vers
les gens et c'est vrai que tu vas être tout seul et que tu es malheureux
du coup. Mais moi j'en avais envie » ;
« j'ai quand même fait des efforts pour
m'intégrer, j'avais des amis brésiliens ».
3.2.2.2. L'orientation d'acculturation de la
société d'accueil
Pour décrire son environnement, M parle d'une
société ouverte sur l'Autre et avide de rencontre :
« une curiosité, comme moi j'étais
curieuse en allant dans ce pays là, eux ils avaient la même
curiosité en retour » ;
« quand tu croisais des gens dans la rue, ça
faisait trois semaines que tu les avais pas vus, toi tu te rappelais plus d'eux
et eux ils arrivent « ah salut tu vas bien? » c'est vrai que tu te
dis qu'en France on est un peu fermé » ;
« elle est naturelle, c'est vraiment de la
curiosité enfin je sais pas, tu sais quand ils te posent une question
ils ont envie d'avoir la réponse car ils s'intéressent à
la personne qui est en face d'eux, pas parce qu'ils s'intéressent
à elle pour qu'ils puissent en obtenir quelque chose tu vois
».
Il semble également qu'elle ait
bénéficié d'une certaine hospitalité :
« et puis j'ai eu la chance d'être dans cette
famille brésilienne pendant deux semaines [...] en fait c'est la fille
du secrétariat que je connaissais pas du tout qui m'a dit « viens
j'ai une chambre d'amis chez moi et je savais pas du tout mais elle habitait
chez ses parents et je suis restée deux semaines et demi, trois
semaines. Sa mère [...] me présentait comme sa fille adoptive,
après deux semaines tu vois donc ça aussi ça m'a
aidé à me sentir bien parce que je me suis sentie quand
même chez moi assez facilement dans cette famille, avec cette mère
surtout qui, elle me connaissait pas [...] tout de suite elle m'a vraiment
super bien accueillie ».
Cependant, elle ajoute :
« mais euh, et les gens, ouais bin les gens du nord
plus parce que les gens de Caxias ils sont quand même les gens les plus
fermés du Brésil donc même s'ils sont plus ouverts que les
Français ils restent spéciaux ».
3.2.3. Dimension psychologique
Nous allons recueillir ici des données en lien avec le
choc culturel. Pour cela nous allons examiner chez M les informations relatives
aux indicateurs suivants : le soutien social, l'auto-efficacité, la
réussite académique et professionnelle et le stress
d'acculturation.
3.2.3.1. Soutien social
M obtient un score de 75,5/100 à l'Échelle de
soutien social. Il ressort de ce questionnaire qu'elle semble avoir
été très soutenue au cours de son séjour au
Brésil :
- item 4 « Je peux parler de mes problèmes à
quelqu'un » : 5/5 ;
- item 5 « Il y a quelqu'un auprès de moi pour me
réconforter quand j'en ressens le besoin » : 5/5 ;
- item 6 « Je reçois tout le soutien moral dont j'ai
besoin » : 5/5 ;
- item 18 « Il y a quelqu'un avec qui je peux partager mes
joies et mes peines » : 5/5.
De plus, elle déclare que l'ensemble de ses relations
était important à ses yeux durant son séjour, et se dit
pleinement satisfaite de la façon dont elles ont chacune joué
leur rôle de soutien moral :
- items 3 « Mes relations avec ma famille sont importantes
pour moi » : 4/5 ;
- item 1 « Ma famille fait de son mieux pour m 'aider »
: 5/5 ;
- item 2 « Je suis satisfait de mes contacts avec ma famille
» : 5/5 ;
- items 10 « Mes relations avec mes amis restés en
France sont importantes pour moi » : 4/5 ; - item 8 « Je peux compter
sur mes amis restés en France » : 5/5 ;
- item 9 « Je suis satisfait de mes contacts avec mes amis
restés en France » : 4/5 ;
- item 13 « Mes relations avec mes nouveaux amis au
Brésil sont importantes pour moi » : 4/5 - item 12 « Je suis
satisfait de mes contacts avec mes nouveaux amis au Brésil » :
5/5.
Par ailleurs, au cours de l'entretien, elle nous confirme avoir
été soutenue plus particulièrement par
sa mère...
« j'ai été soutenue par ma mère,
bien sûr, bin elle était, on s'envoyait des mails, toutes les
deux-trois semaines on se parlait sur Skype »
...par l'une de ses relations restée en France...
« il continuait à m'écrire tous les jours
[...] le fait qu'on continue à se parler [...] je pense
que ça m'a pas mal aidée aussi »
...ainsi que par son colocataire français au Brésil
:
« ça a été mon meilleur ami et on
est devenu inséparable en fait, on s'est toujours soutenu l'un l'autre
».
3.2.3.2. Auto-efficacité
M obtient un score de 92,6/100 à l'Échelle
d'efficacité interculturelle. Par exemple, elle considère
être à même de se sortir sans encombre de situations
imprévues, stressantes ou délicates :
- item 6 « Si je suis dans le pétrin, je peux penser
à une solution » : 5/5 ;
- item 17 « En général, je peux faire face
à quoi que ce soit » : 4/5 ;
- item 19 « Face à une situation inattendue, j'ai
assez de ressources pour m'en sortir » : 5/5. Par ailleurs, elle apparait
capable d'évoluer aisément dans son environnement :
- item 1 « Je me sens à l'aise lors des
activités sociales » : 4/5 ;
- item 4 « Je suis généralement discret et
effacé en société » : 2/5 ;
- item 13 « Je me sens à l'aise quand je parle avec
les gens du coin » : 5/5 ;
- item 14 « J'ai des sujets de conversation en commun avec
les gens du coin » : 5/5 ; - item 2 « C'est difficile pour moi de me
faire des amis » : 1/5.
Qui plus est, il semble que le séjour de M au
Brésil l'ait rendue plus autonome et ait augmenté son
degré de confiance en soi :
« je n'ai plus peur d'aller toute seule du coup
même une journée quelque part » ; « c'est vrai
que ça m'a donné un peu cette spontanéité là
» ;
« je pense que le Brésil j'y ai
été pour découvrir, pour le découvrir, mais qu'au
final ça m'a fait découvrir moi-même aussi, cette partie de
moi qui me donne envie de voir autre chose » ;
« là-bas j'étais carrément plus
ouverte que ici » ;
« j'étais fière de moi, j'étais
fière de me dire tu peux apprendre une langue aussi rapidement
».
3.2.3.3. Réussite académique et
professionnelle
M obtient un score de 73/100 à l'Échelle
d'adaptation académique. Par exemple, elle affirme avoir assimilé
parfaitement le fonctionnement du système académique local :
- item 12 « Je m'intègre bien à
l'université » : 5/5 ;
- item 15 « Je m'adapte bien à la vie
étudiante » : 4/5 ;
- item 20 « Je comprends ce que l'on attend de moi en cours
» : 5/5.
De plus, elle semble avoir très bien réussi ses
études :
- item 6 « Je trouve les études difficiles » :
1/5 ;
- item 7 « Je n'ai pas de bons résultats aux examens
» : 1/5 ;
- item 8 « Je suis satisfait de mes résultats
à l'université » : 5/5.
En revanche, elle déclare ne pas s'être inscrite
dans ses études durant son séjour au Brésil : - item 1
« J'apprécie les études » : 1/5 ;
- item 10 « Je suis satisfait des cours que j'ai choisi
» : 2/5 ;
- item 16 « J'ai plusieurs amis dans ma ou mes classes
» : 2/5 ;
« totalement déçue de la fac »
;
« j'ai eu des dix sur dix, je suis française,
je parle pas très bien le portugais, euh je euh, je révisais pas,
je vois pas comment je peux avoir dix sur dix, c'était pour moi
surnoté honnêtement. Et je m'ennuyais en cours » ;
« j'ai trouvé que les cours étaient
faciles et que j'avais pas appris grand chose » ; « de toute
façon j'y avais pas été pour ça ».
En outre, si l'on se réfère au Questionnaire
général, M déclare qu'elle déconseille de venir
étudier au Brésil dans son université d'accueil (item 3
« Aujourd'hui, conseilleriez-vous à un autre étudiant de
venir étudier au Brésil dans votre université? » :
non).
3.2.3.4. Stress d'acculturation
Premièrement, elle obtient le score de 98,5/100 à
l'Échelle de stress d'acculturation. Elle affirme ne jamais s'être
sentie discriminée au Brésil :
- item 2 « Je me sens discriminé » : 1/5 ;
- item 3 « Les autres se moquent de ma culture et de mes
valeurs » : 1/5 ;
- item 14 « Je suis victime de préjugés et de
stéréotypes » : 1/5.
Pareillement, elle dit s'être sentie tout à fait
à l'aise sur place tout au long du séjour : - item 1 « J'ai
le mal du pays » : 1/5 ;
- item 5 « Participer aux activités sociales
m'intimide » : 1/5 ;
- item 8 « Je me sens sous pression ici » : 1/5.
Lors de notre entretien, elle nous confie d'ailleurs ne jamais
avoir été inquiète pour sa sécurité sur
place :
« Caxias c'était une ville riche justement comme
je t'ai dit, assez européenne, où t'avais pas du tout à
avoir peur quoi enfin moi vraiment je m'y sentais plus en
sécurité qu'à Lyon » ;
« j'ai pas eu cette peur du danger ».
Qui plus est, M ne semble pas non plus avoir été
dépaysée outre mesure lors de son séjour :
« J'aurais aimé arriver au Brésil, rester
une semaine et dire « mais je suis où, waow », ouais j'aurais
aimé que ça me retourne » ;
« j'avais l'impression que j'avais la même vie en
fait, que j'avais exactement pareil, que y avait pas vraiment de changement
».
En outre, elle a le sentiment de ne pas avoir vécu de
choc culturel au Brésil (Questionnaire général, item 17
« Rétrospectivement, pensez-vous avoir vécu un choc culturel
pendant votre séjour au Brésil? » : non).
Cependant, M déclare avoir préféré
sa vie à Lyon à sa vie à Caxias (Questionnaire
général, item 16 « Globalement, en terme de qualité
de vie, de bien-être et de satisfaction, que placeriez-vous en
tête? » : Lyon). Questionnée là-dessus en entretien,
elle lie cela avec son vécu de la colocation ainsi qu'au fait d'avoir eu
un réseau social moins étoffé qu'en France :
« Et bin je pense ma vie à Lyon aussi pour le
côté confort du terme, parce que vivre à six, en coloc
à six, franchement c'était vraiment vraiment, y avait des moments
c'était dégoutant [...] t'as beau dire ce que tu veux, « je
vais dans un pays je m'en fous », c'est vrai que si tu peux avoir les
conditions, tant mieux. Pourquoi ma vie à Lyon aussi, parce que
socialement je pense que j'étais plus épanouie à Lyon
qu'au Brésil quand même parce que j'ai plus d'amis ici au final,
forcément ».
Néanmoins, rappelons que la réalité locale
à Caxias ne semblait pas correspondre à sa vision d'un
Brésil ensoleillé, exotique et dynamique, telle que
nous l'avons explicitée précédemment :
« les gens de Caxias ils sont quand même les gens
les plus fermés du Brésil donc même s'ils sont plus ouverts
que les Français ils restent spéciaux » ;
« Caxias c'est quand même vachement
européen » ;
« physiquement, les personnes ressemblent vachement
à des personnes européennes » ; «
c'était l'hiver donc y pleuvait, tous les jours tous les jours
» ;
« j'aurais eu plus le choix j'aurais peut-être
choisi une autre ville » ;
« une ville où je, je suis sûre qu'y a plus
de d'activité tu vois, plus grande quoi » ;
« j'ai l'impression que y avait pas assez de monde en
fait, j'aurais eu besoin de plus de monde et plus d'activité tu vois
» ;
« c'était surtout la ville en elle-même
en fait, la ville n'était pas très active, c'était une
petite ville, de quatre-cent-mille habitants, et peut-être le fait que
quand j'y étais c'était aussi l'hiver donc il pleuvait aussi
beaucoup, euh, c'est la ville, elle est pas agréable pour un
échange, mais même pour une vie étudiante en
elle-même tu vois je pense qu'il vaut mieux
aller faire un échange à Rio ou à
Salvador parce que déjà si tu penses au Brésil c'est
sûr tu veux du soleil, c'est vrai, donc t'en auras plus là-bas
qu'à Caxias et t'auras plus de choses à faire, t'auras la plage
aussi que j'avais pas ouais ».
Deuxièmement, M obtient un score de 84/100 à
l'Échelle de bien-être. À titre d'exemple, il
apparaît qu'elle se soit sentie à l'aise tout au long de son
séjour :
- item 2 « Vous sentez-vous rejeté? » : 1/5 ;
- item 3 « Vous sentez-vous faiblement entouré?
» : 1/5 ;
- item 9 « Vous sentez-vous à l'aise dans votre
environnement? » : 5/5 ;
- item 10 « Vous sentez-vous plus souvent
déprimé que joyeux? » : 1/5 ;
- item 16 « Préférez-vous rester seul? »
: 1/5 ;
- item 19 « Avez-vous déjà souhaité
être de retour chez vous en France? » : 1/5.
Au cours de notre entretien elle admet avoir eu une
période difficile au début de son séjour, à
l'occasion de son anniversaire...
« le jour de mon anniversaire, je crois que c'est la
seule fois où j'ai pleuré [...] je suis arrivée au
Brésil le sept juillet et mon anniversaire c'était le huit
août, donc tu vois un mois t'as pas le temps de te faire des amis, les
cours ont attaqué début août, t'as pas le temps de te faire
de copains, rien, j'avais mes colocs je les connaissais ça devait faire
une ou deux semaines [...] pour mon anniversaire [...] mes vingt ans en plus je
voulais marquer le truc, sauf que je connaissais personne et que j'avais
personne de motivé pour bouger avec moi donc ouais j'ai eu un bon coup
de déprime »
...mais nous assure ne jamais plus avoir éprouvé ce
genre de sentiment à nouveau au cours de son séjour :
« Mais sinon non je me suis jamais sentie vraiment mal,
enfin déprimée tu vois, triste ». Cependant, elle nous
confie qu'elle aurait aimé avoir davantage d'amies sur place et que cela
lui a quelque peu manqué :
« Mes amis ne m'ont pas manqué mais le fait
d'avoir moins d'amis qu'avant, d'avoir juste ce petit groupe que [...] au final
et je sais pas, j'ai jamais eu beaucoup de copines moi, et par contre j'en ai
toujours eu une quand même tu vois, il me fallait toujours une fille pour
raconter mes trucs de fille et j'en avais pas au Brésil et je pense que
ça m'a manqué un peu aussi ».
Malgré cela, M dit s'être globalement sentie
très bien durant son séjour au Brésil
(Questionnaire
général, item 1 « Durant votre
séjour au Brésil, comment vous sentiez-vous? » : 5/5) et
s'estime
satisfaite de son expérience (Questionnaire
général, item 15 b) « Globalement, combien êtes-vous
satisfait de votre séjour au Brésil en général?
» : 4/5).
Dernièrement, M obtient un score de 70/100 au Brief COPE.
Ses réponses suggèrent qu'elle est encline à gérer
les situations stressantes, délicates ou imprévues avec
flegme...
- item 5 « Apprendre à vivre avec » : 4/5 ;
- item 8 « Voir le bon côté des choses » :
4/5 ;
- item 10 « Prendre les choses avec humour » : 4/5
...ainsi qu'à ne pas se laisser dépasser par les
évènements : - item 2 « Prendre les choses en main » :
4/5 ;
- item 4 « Renoncer à essayer de résoudre la
situation » : 2/5.
3.3. Compétence interculturelle
À l'aide des données dont nous disposons, nous
allons tenter de présenter des éléments qui seraient
susceptibles de nous renseigner sur le degré de compétence
interculturelle de M.
3.3.1. Sens du séjour à
l'étranger
Si l'on se réfère au Questionnaire
général, M déclare que le mot le plus
caractéristique afin de qualifier son séjour est «
découverte » (item 10, « Choisissez un mot qui serait le plus
caractéristique pour situer votre séjour au Brésil au
regard de votre vie en général » : découverte).
Interrogée à ce sujet lors de notre entretien, elle nous confie
être initialement partie au Brésil en quête de
différence, au sens large :
« pourquoi découverte, parce que j'étais
partie pour ça à la base, c'était pour découvrir
une autre culture, un autre pays, d'autres personnes, découvrir autre
chose, de tout nouveau ».
3.3.2. Ressenti sur le séjour
Pour M, il apparaît que la réalité ait
été quelque peu différente de ses attentes :
« je suis pas sûre au final que c'est ce qui s'est
passé, si, bien sûr, j'ai découvert autre chose, mais
c'était peut-être pas le plus important du coup ».
Alors, en définitive, qu'est-ce qui était le plus
important? M déclare...
« Ça a été ouais le voyage, les
rencontres »
...et ajoute :
« je pense que le Brésil j'y ai
été pour découvrir, pour le découvrir, mais qu'au
final ça m'a
fait découvrir moi-même aussi, cette partie de
moi qui me donne envie de voir autre chose ». Toutefois, elle se dit
frustrée de ne pas avoir séjourné au Brésil plus
longtemps :
« ça m'a frustrée, franchement je suis
frustrée d'avoir fait que six mois maintenant » ;
« c'est vrai que si je devais refaire cet échange
déjà je referais plus long, je ferais un échange d'un an
minimum ».
D'ailleurs, si elle considère bel et bien avoir
vécu une expérience très positive au Brésil, elle
ne s'en satisfait pas pour autant et parait être animée d'une
véritable soif d'Ailleurs :
« c'était une belle expérience »
;
« C'était une excellente expérience mais
je peux en vivre des mieux, pour moi je reste sur un sentiment
d'inachevé, il m'en faudrait encore » ;
« pour moi c'est un début maintenant quoi, c'est
autre chose qui commence mais qui va être plus grand » ;
« j'aurais envie de bouger plus que, qu'avant quoi
».
Elle nous dit également avoir volontiers entrepris de
créer du lien social au Brésil afin de s'insérer avec
succès dans on environnement :
« j'en avais envie je pense. Je pense que si t'as
peur tout de suite et que si tu te renfermes dans ta peur tu vas pas aller vers
les gens et c'est vrai que tu vas être tout seul et que tu es malheureux
du coup. Mais moi j'en avais envie » ;
« j'ai quand même fait des efforts pour
m'intégrer, j'avais des amis brésiliens ».
3.3.3. Tensions éprouvées
Afin de déceler les tensions dont M a fait
l'expérience, intéressons-nous à la façon dont elle
décrit son environnement local.
Elle oppose le Brésil des régions au nord de Caxias
au Brésil du sud :
« les gens du nord plus parce que les gens de Caxias ils
sont quand même les gens les plus fermés du Brésil
».
D'un côté, en effet, elle fait allusion à un
Brésil exotique et dépaysant, plus agréable :
« quand tu vas a Rio ou à Salvador bin tu
retrouves plus quoi, ce truc européen je trouve » ; «
je pense qu'il vaut mieux aller faire un échange à Rio ou
à Salvador parce que déjà si tu penses au Brésil
c'est sûr tu veux du soleil, c'est vrai, donc t'en auras plus
là-bas qu'à Caxias et t'auras plus de choses à faire,
t'auras la plage ».
D'un autre côté, en revanche, elle mentionne un
Brésil aux influences européennes...
« c'est vachement européen, enfin je veux dire,
physiquement, les personnes ressemblent vachement à des personnes
européennes, [...] alors que bin tu t'y attends pas au Brésil
»
...qui ne s'est pas révélé
dépaysant...
« J'aurais aimé arriver au Brésil, rester
une semaine et dire « mais je suis où, waow », ouais j'aurais
aimé que ça me retourne » ;
« j'avais l'impression que j'avais la même vie en
fait, que j'avais exactement pareil, que y avait pas vraiment de changement
» ;
« c'est un peu le même rythme que nous finalement
et c'est vrai que j'avais une espérance làdessus »
...et l'ayant même vraisemblablement un peu
déçue :
« c'est la ville, elle est pas agréable pour un
échange » ;
« c'est vrai que j'aurais eu plus le choix j'aurais
peut-être choisi une autre ville ».
3.3.4. Évolution personnelle
Il semble que ce séjour ait contribué à
affiner le regard de P sur le monde et à développer sa
capacité à prendre en compte l'Autre :
« Parce que c'est vrai que quand t'es là-bas
tu te dis « ouais c'est différent » mais en même temps
c'est pareil que toi mais d'un autre point de vue, non mais je pense que y a
plein de trucs à prendre en compte » ;
« t'as plusieurs pays en un pays en fait ».
Par ailleurs, elle estime que son degré d'exposition
internationale est passé de 2/5 au début de son séjour
à 4/5 à l'issue de son séjour, soit de faible à
élevé (Questionnaire général, item I « Comment
évalueriez-vous votre exposition internationale (le degré auquel
vous êtes confronté à la vie au sens large au-delà
de nos frontières)? »). Elle affirme aussi que son degré de
conscience interculturelle est passé de 1/5 à 3/5 entre le
début et la fin de son séjour au Brésil, soit d'un niveau
minimal à un niveau intermédiaire (Questionnaire
général, item II « Comment évalueriez-vous votre
conscience interculturelle (le niveau auquel vous êtes
préoccupé par, ou impliqué dans, des affaires
extraterritoriales)? »).
De plus, alors qu'avant de partir M se disait plutôt
timorée et semblait entretenir quelques craintes à l'égard
de l'aventure ou des voyages en général...
« j'avais donc le choix entre six mois et un an et je
t'avoue que j'étais morte de trouille [...] donc bin moi je me suis dit
je vais faire six mois déjà » ;
« Ouais, je savais pas du tout comment ça
allait se passer, est-ce que j'allais arriver à m'intégrer, etc.
je partais toute seule alors que le seul voyage que j'avais fait avant
c'était scolaire ou deux semaines en Angleterre enfin tu vois, et donc
là, ouais ouais ça me faisait peur quand même
»
...il apparait que son séjour au Brésil lui ait,
pour ainsi dire, fait pousser des ailes, ait participé à lui
donner davantage d'assurance, de confiance en soi...
« [...] en Argentine et pour y aller on faisait tout
au dernier moment, on disait bin aujourd'hui tu vas faire quoi on se levait et
on allait marcher dans la ville on se disait « bin tiens je viens de voir
sur la carte que y a un musée par là », on y passe et
voilà. Et c'est comme ça que j'ai visité l'Argentine
» ;
« Pour moi maintenant après le voyage c'est
que ça m'a donné une envie [...] j'ai toujours eu envie de
voyager, c'est pour ça que j'ai fait ce premier voyage mais là
ça m'a donné plus que l'envie [...] là je suis en train de
me renseigner pour un Master, un Master qui propose deux fois six mois
d'échange à l'étranger et qui t'ouvre des portes pour
devenir experte en relations, en associations internationales donc tu vois je
suis en train moi-même de changer mes idées de projet de vie pour
voyager plus et pour découvrir »
...ainsi qu'à lui ouvrir l'esprit et à aiguiser sa
curiosité :
« Ouais je pense, parce que là-bas j'étais
carrément plus ouverte que ici bin là du coup oui, je voulais
tout connaître, j'étais super curieuse, moi je posais des milliers
de questions » ;
« je posais des questions, j'essayais toujours de
m'intégrer, toujours de discuter, ouais, non, je pense que
j'étais assez curieuse là-bas ».
Toutefois, généralement parlant, M pense n'avoir
que moyennement changé durant son séjour (Questionnaire
général, item 9 « Avez-vous eu le sentiment d'avoir
changé à l'issue de votre séjour au Brésil? »
: 3/5). Par ailleurs, elle exprime des difficultés à prendre du
recul par rapport à ce qu'elle a vécu :
« c'est pas encore assez clair » ;
« je sais pas si je change vraiment vraiment, si j'ai
vraiment changé ».
3.3.5. Projets d'avenir
M nous confie que cette expérience l'a amenée
à reconsidérer ses perspectives futures...
« je voulais être éducatrice, enfin je
veux toujours, être éducatrice PJJ et c'est vraiment un job qui me
fascine et qui me passionne et ça fait des années que je veux
faire ça et j'ai pas envie de me dévier de cette voie là.
Mais j'ai envie de me dire « tiens, si je peux en profiter pour faire un
Master et voyager un peu dans l'Europe » puis après si ce Master
m'ouvre des voies sur un job qui peut être intéressant, qui me
permet de voyager, pourquoi pas et après je reviendrais à
l'éduc tu vois, je suis en train de, ouais, mon plan de vie, alors qu'il
était assez rectiligne tu vois (rire), il est en train de tout changer,
et tant mieux! Je suis contente tu vois, ça me fait de nouveaux projets
tout ça, c'est sympa » ;
Questionnaire général, item 11 « Pensez-vous
que cette expérience va influencer votre vie future? » : oui
...et elle se déclare prête à retourner au
Brésil dès que possible :
« Oui oui je vais y retourner je pense, je vais
essayer de me faire toute l'Amérique Latine » ; «
j'espère avoir de l'argent d'ici trois ou quatre ans pour voyager et je
me dis que j'irais au Brésil ».
INTERPRETATION DES RESULTATS ET DISCUSSION
Dans cette partie, nous tenterons de donner du sens à
notre précédente analyse. Nous nous attacherons donc, tour
à tour pour chacune des participantes, à expliciter leurs
transformations socioculturelles puis à les situer dans notre esquisse
de conceptualisation de la CIC, avant d'essayer de mettre à jour les
relations entre ces deux objets. Pour finir, nous répondrons à
notre problématique et exposerons les limites de cette étude.
1. Le cas de P
Dans ce premier chapitre, nous commenterons d'abord les
données relatives aux transformations socioculturelles et à la
compétence interculturelle de P avant d'essayer de les mettre en
relation.
1.1. Transformations socioculturelles
Il s'agira là d'expliciter la façon dont P s'est
vue transformée aux plans culturel, social et psychologique durant son
séjour au Brésil.
1.1.1. Dimension culturelle - Composante : la
culture
S'interroger sur la portée du séjour de P en
relation à la dimension culturelle des transformations socioculturelles
revient à se poser la question suivante : quels infléchissements
cette expérience semble-t-elle avoir donné à ce qui fait
sens pour elle? Quelle évolution de ses attitudes, comportements et
représentations pouvons-nous déceler?
Premièrement, concernant les représentations de
P, ce séjour aura contribué à lui donner une image plus
finement ciselée du Brésil, dont elle n'envisageait pas les
écarts sociaux ou les caractéristiques régionales avec
autant de contrastes.
Deuxièmement, au plan communicationnel, bien
évidemment, ses habiletés linguistiques se sont accrues.
Dernièrement, au niveau des attitudes et des
comportements, les transformations sont plus difficiles à expliciter.
Certes, sur place, son environnement l'a conduit à modifier ses
habitudes, plus particulièrement en matière de
sécurité. Par exemple, elle a su adopter les comportements
appropriés comme appeler un taxi afin de rentrer le soir.
Néanmoins il s'agit plus là d'une adaptation d'ordre temporaire
que d'une véritable transformation. Au regard des données dont
nous disposons, nous ne pouvons donc fournir davantage
d'éléments.
1.1.2. Dimension sociale - Composante : le
phénomène d'acculturation
Nous allons commenter ici la stratégie d'acculturation
mise en oeuvre par P en vue de se situer au sein de son nouvel environnement au
Brésil.
Nous pensons que P s'est inscrite dans un processus
d'intégration au sens de Berry (2000), c'est-àdire qu'au cours de
son séjour elle a eu tendance à valoriser les contacts avec les
autochtones, à s'ouvrir à la différence culturelle pour
s'insérer dans sa société d'accueil, tout en gardant une
cohérence vis-à-vis de ses racines, de ce qui la constituait
intrinsèquement jusque là au niveau culturel et identitaire. En
effet, son réseau social sur place s'est élargi au cours de son
séjour et incluait à la fois une majorité de
Brésiliens et un solide groupe de compatriotes. D'autre part, son
environnement a contribué cela en se montrant ouvert et accueillant tout
en lui renvoyant certaines évocations pesantes de l'Occident.
1.1.3. Dimension psychologique - Composante : le choc
culturel
Dans ce sous-sous-chapitre, nous commenterons la façon
dont P a géré son choc culturel au Brésil,
c'est-à-dire la façon dont elle a fait face aux
ambiguïtés et aux incertitudes qui lui ont été
renvoyées lors des interactions avec son environnement tout au long du
séjour.
Par l'intermédiaire de son expérience, P a
notamment été amenée à repenser son rapport au
monde. En effet, confrontée à la réalité locale,
elle a véritablement pu mettre perspective sa vie en France et prendre
conscience de certaines disparités, en terme de confort matériel
ou de politique publique d'éducation par exemple. Il apparait aussi que
ce séjour ait contribué à ce qu'elle se découvre
ellemême. Ainsi, elle s'est rendue compte que ses attaches relationnelles
et ses racines revêtent une grande importance.
1.2. Compétence interculturelle
À l'aide des données précédemment
recueillies, nous tenterons ici de capturer le degré de CIC de P en
relation à notre esquisse conceptuelle.
Nous pensons que la place de P dans notre ébauche de
modèle théorique est au second palier, appropriation de savoirs
et efficacité. En effet, elle affiche toutes les caractéristiques
laissant à penser qu'elle ait une certaine propension à la
décentration et à l'ethnorelativité. D'une part, elle a
été amenée à relativiser sa vision du monde
à la française au regard de l'ensemble de ses découvertes
au Brésil. D'autre part, elle semble être ouverte à l'Autre
et accepter la différence culturelle, bien qu'elle l'interroge parfois,
mais dans une perspective critique, et non ethnocentrique. Pour toutes ces
raisons, nous la pensons suffisamment avancée au sein du premier stade
de notre essai de conceptualisation (décentration et
ethnorelativité) pour pouvoir évoluer dans le second
stade. D'ailleurs, au vu de ses bons résultats aux
différents questionnaires et de sa facilité à communiquer
avec les autochtones ainsi qu'à évoluer dans son environnement de
façon générale, il nous semble évident qu'elle ait
nécessairement acquis un corps de savoirs lui permettant de s'adapter
à diverses situations. Cependant, reconnaissons que nous n'avons
guère d'éléments concrets pour étayer cette
affirmation. Pour finir, nous n'estimons pas que P ait atteint le dernier
palier (dépassement des référentiels culturels et
hybridité) car, en dépit de cette efficacité
supposée, elle ne parait pas encore avoir une assez bonne
appréhension de la société brésilienne, ni se
reconnaitre en elle au point d'en extraire des fragments culturels qu'elle
intégrerait à sa propre vision du monde.
1.3. Synthèse
Finalement, comment les transformations socioculturelles de P
ont-elles influencé le développement de sa compétence
interculturelle?
Il nous apparait que l'évolution des
représentations de P, l'hétérogénéité
de son réseau social et les ambiguïtés auxquelles l'a
confronté son choc culturel ont toutes trois contribué à
développer la faculté de décentration dont elle a su faire
preuve durant son séjour au Brésil.
2. Le cas de C
Dans ce deuxième chapitre, nous interpréterons
les données relatives aux transformations socioculturelles et à
la compétence interculturelle de C, puis nous tenterons de faire le lien
entre elles.
2.1. Transformations socioculturelles
Nous commenterons d'abord les transformations vécues par C
aux niveaux culturel, social et psychologique pendant son séjour au
Brésil.
2.1.1. Dimension culturelle - Composante : la
culture
Nous nous demanderons ici quels ont été les
infléchissements de C au niveau de ce qui fait sens chez elle suite
à son séjour au Brésil.
En ce qui concerne les représentations de C, son
séjour aura participé à renforcer son attirance pour
l'africanité ainsi qu'à accentuer cette volonté de
rapprochement aux plans culturel et identitaire avec une certaine idée
de l'Afrique, comme nous l'indiquent ses affinités avec la favela et le
Candomblé. Aux niveaux des comportements et des attitudes, cette
expérience a fait évoluer considérablement sa perspective
sur la spiritualité et son rapport au mysticisme par exemple, en lui
permettant de se joindre à des pratiques et rites
afro-brésiliens.
De plus, là encore, le séjour au Brésil de C
lui a permis d'aiguiser ses facultés linguistiques.
2.1.2. Dimension sociale - Composante : le
phénomène d'acculturation
Nous allons aborder ici la stratégie d'acculturation mise
en oeuvre par C en vue de se positionner vis-à-vis de sa
société d'accueil.
Il paraitrait que C se soit engagée dans un processus
d'assimilation (Berry, 2000) au cours de son séjour. En effet, elle se
positionne en porte-à-faux de ses origines culturelles et identitaires
tout en s'identifiant de manière prononcée au Brésil des
favelas, avec l'arrière plan culturel et identitaire dont il est
porteur. Pratiquement, d'une part elle apparait avoir eu une
révélation ou une fusion, pour reprendre ses propres termes, avec
ce Brésil empreint d'africanité, et d'autre part elle s'est
éloignée durant son séjour tant de sa compatriote
Véronique que de sa famille d'accueil plus proche, semblet-il, du «
modèle » occidental.
2.1.3. Dimension psychologique - Composante : le choc
culturel
Nous allons à présent commenter la manière
dont C a réagi aux ambiguïtés auxquelles son
expérience du Brésil l'a confrontée.
Il semble que le séjour de C ait accentué chez
elle une distanciation préexistante vis-à-vis de la France
métropolitaine et des valeurs qu'elle véhicule. De ce fait, elle
s'est détournée de tout ce qui, au Brésil, lui rappelait
sa terre natale, et s'est engagée activement dans des pratiques telles
que le Candomblé.
2.2. Compétence interculturelle
Dans ce sous-chapitre, nous tenterons d'évaluer le
degré de compétence interculturelle de C dans notre essai de
conceptualisation.
Il apparaitrait que C se trouve au troisième stade de
notre esquisse conceptuelle, dépassement des référentiels
culturels et hybridité. En effet, Il nous semble qu'elle soit dans une
situation de marginalité culturelle, dans un rapport conflictuel entre
le dépassement de son référentiel culturel initial ayant
émergé au cours du processus d'endoculturation, et
l'hybridité issue de la confrontation aux référentiels
culturels de la société brésilienne certes, mais plus
largement des sociétés réunionaise, canadienne, etc. Cette
marginalité n'est donc à pas lier exclusivement avec son
expérience à Recife mais à replacer dans le contexte de
l'ensemble de ses voyages et plus globalement de sa vie.
2.3. Synthèse
Pour conclure, il s'agit là de déterminer la
manière dont les transformations socioculturelles de C au cours de son
séjour ont influencé le développement de sa
compétence interculturelle.
Il nous semble que l'inscription de C dans le
Candomblé, ses relations étroites avec des autochtones à
l'arrière plan afro-brésilien et sa distanciation par rapport
à son pays d'origine ont toutes trois participé à
exacerber son sentiment de marginalité culturelle à l'issue de
son séjour au Brésil.
3. Le cas de M
Dans ce troisième chapitre, nous commenterons les
données relatives aux transformations socioculturelles et à la
compétence interculturelle de M puis nous essayerons de les mettre en
parallèle.
3.1. Transformations socioculturelles
Nous préciserons ici les transformations de M aux plans
culturel, social et psychologique au cours de son séjour au
Brésil.
3.1.1. Dimension culturelle - Composante : la
culture
Dans ce sous-sous-chapitre, nous tenterons d'expliciter les
inflexions de M en termes de comportements, attitudes et représentations
afin de refléter une évolution de ce qui, chez elle, fait
sens.
Au niveau des représentations, il semble, dans une
certaine mesure, que M entretienne désormais une vision moins romantique
du voyage en général et qu'elle envisage l'Autre de façon
moins exotique.
En terme de comportements et d'attitudes, il apparait qu'elle
soit aujourd'hui plus encline à se lancer dans des projets d'aventure,
de voyage ou de visite et qu'elle entretienne moins d'appréhension
à cet égard.
Notons bien sûr que ce séjour lui aura
également permis d'affûter ses compétences
linguistiques.
3.1.2. Dimension sociale - Composante : le
phénomène d'acculturation
Nous nous intéressons maintenant à la
stratégie d'acculturation développée par M afin de se
positionner par rapport à sa société d'accueil.
Sur place, c'est une stratégie d'intégration
(Berry, 2000) que M a mis en oeuvre, d'une part en essayant de s'investir
activement dans ses relations avec les autochtones, et d'autre part en
conservant un contact avec ses proches du côté français. La
nature de son réseau social se fait d'ailleurs le reflet de cette
stratégie, en incluant à la fois des Brésiliens, des
compatriotes et d'autres étudiants internationaux.
3.1.3. Dimension psychologique - Composante : le choc
culturel
Nous interpréterons ici la façon dont M a fait face
aux ambiguïtés qui ont émergé au fil des interactions
avec son environnement au Brésil.
Le contact avec son environnement lui a apparemment
communiqué un certain optimisme ainsi
qu'une plus forte assurance et confiance en soi, et a finalement
participé à développer son goût d'Ailleurs.
3.2. Compétence interculturelle
Dans ce sous-chapitre, nous tenterons d'évaluer le
degré de CIC de M en la situant dans notre ébauche de
modèle théorique.
Nous la positionnons au second palier de notre esquisse
conceptuelle, appropriation de savoirs et efficacité. Elle dispose en
effet de tous les éléments caractéristiques d'une
perspective ethnorelative, comme le respect de la différence ou
l'ouverture à l'Autre. Elle semble donc se situer à un niveau
suffisamment avancé dans le premier palier (décentration et
ethnorelativité) afin d'être en mesure d'évoluer au sein du
second palier. En effet, compte tenu de ses bons résultats à
l'ensemble des différents questionnaires et de son aisance à
nouer des liens sur place et à évoluer de façon
générale dans son environnement pendant toute la durée de
son séjour, il apparait indispensable qu'elle ait acquis un corps de
savoirs lui donnant les moyens de répondre avec succès à
une large gamme de situations. Cependant, nous ne disposons pas
d'éléments concrets pour développer cela. Quant au
troisième palier (dépassement des référentiels
culturels et hybridité), il ne semble pas qu'elle ait suffisamment de
recul sur son expérience afin de se situer dans une perspective de
dépassement des référentiels culturels tant
brésiliens que français.
3.3. Synthèse
Pour finir, intéressons-nous à la manière
dont les transformations socioculturelles de M au Brésil ont
influencé le développement de sa compétence
interculturelle.
Il nous semble que le bon déroulement du séjour
de M, ainsi que la nature positive de ses relations avec les autochtones, aient
participé au développement chez elle d'une vision ethnorelative
du monde.
4. Discussion
Dans ce chapitre, nous tenterons d'abord de répondre
à notre problématique avant de nous intéresser aux limites
de cette recherche.
Tout d'abord, il apparait qu'aucun séjour à
l'étranger n'est similaire, car c'est bel et bien l'ensemble des
situations d'interaction qui donne sa force à une telle
expérience. En effet, le participant n'est jamais confronté au
« tout » de la culture d'autrui (Vatter, 2006), c'est-à-dire
que ne lui est dévoilé que ce qu'il peut bien entrevoir par
l'intermédiaire des personnes et des institutions avec lesquelles il
communique à un instant t. D'autre part, le participant
lui-même constitue une variable dans le déroulement du
séjour à l'étranger. Chaque situation étant
singulière, les attitudes, comportements et représentations du
sujet sont susceptibles d'en orienter le déroulement d'une
manière ou d'une autre. Cette double singularité confère
au séjour à l'étranger un caractère non
reproductible, il est donc difficile d'en prédire le résultat.
Toutefois, à l'issue de cette étude, il semble que toutes les
participantes aient éprouvé un certain degré de
transformations socioculturelles au cours de leur séjour au
Brésil, et ces dernières, dans leur ensemble, paraissent avoir eu
un impact positif sur le degré respectif de développement de la
CIC des sujets.
Sommes-nous alors en mesure de répondre
adéquatement à notre problématique? Nous nous interrogions
sur le caractère des relations entre transformations socioculturelles
à l'étranger et évolution de la compétence
interculturelle des individus. Il apparaitrait effectivement que la nature des
expériences vécues par P, C et M au Brésil entretienne
bien des liens étroits avec l'évolution de leur CIC, attendu
qu'elles dressent toutes trois un bilan positif de leur séjour et
qu'elles se situent chacune dans une perspective d'ouverture à
l'altérité. Néanmoins, force est de reconnaitre que nous
ne pouvons répondre que partiellement à notre
problématique, faute d'éléments suffisants. Nous estil en
effet possible de parler de « transformations » et d' «
évolution » alors même que nous ne pouvons nous
prévaloir que d'une vision rétrospective de l'expérience
de nos sujets? Il est vrai que nous n'avons pas été en mesure de
recueillir des informations sur le degré de CIC des participantes avant
leur séjour au Brésil, non plus que sur l'état de leurs
dispositions culturelles, sociales et psychologiques à la veille de leur
mobilité.
Finalement, si nos travaux nous permettent d'avancer certains
arguments en faveur de retombées positives des programmes de
mobilité internationale au Brésil sur les participants à
la lumière des informations dont nous disposons, leurs objectifs ne sont
que partiellement remplis car nous ne pouvons que deviner les liens entre
transformations socioculturelles et développement de la CIC. Ce constat
nous montre le chemin à suivre : afin d'établir rigoureusement
ces liens, il est impératif de mettre en place un suivi des participants
à l'échange universitaire international, de
l'avant-mobilité jusqu'à l'après-mobilité.
Poursuivons dans les limites de cette étude. Situer
finement le niveau de CIC des sujets demeure l'un des problèmes
fondamentaux de toute recherche sur l'interculturalité. De ce fait,
employer des outils de mesure rigoureux de la CIC, en relation à un
modèle théorique solide, est sans nul doute une gageure pour le
chercheur. Ainsi, notre esquisse conceptuelle n'était-elle pas assez
structurée et manquait-elle d'indicateurs de terrain.
De même, rappelons certaines limites relatives à
notre procédure de recueil de données. En effet, les
questionnaires ont été administrés sous forme
d'auto-évaluation, avec tous les biais que cela comporte. Nous n'avons
d'ailleurs pu travailler qu'à partir des données issues de nos
questionnaires et entretiens qui, s'ils ont bien pour but de faire un tour
d'horizon aussi vaste que possible de l'expérience à
l'étranger, ne sauraient prétendre à
l'exhaustivité. Il est donc probable que nous soyons passés
à côté de certains éléments d'une part, et
que les sujets aient gardé une certaine réserve d'autre part. En
outre, inviter ces derniers à porter un regard rétrospectif sur
une expérience intense et prolongée les conduit
irrémédiablement à arquer leur regard leur vécu.
Soulignons néanmoins la force de leur investissement
dans notre étude, plus particulièrement lors des entretiens. Il
nous semble que chacune des participantes se soient livrées
véritablement. Cela nous apparait d'autant plus vrai pour P et C qui ont
été interrogées très peu de temps après leur
retour en France. Leur entretien a vraiment été vecteur d'une
dimension analytique, d'un espace de réflexivité qui leur a
permis de faire le point sur leur expérience. De plus, possiblement en
raison de leur expérience antérieure du séjour
d'étude à l'étranger, le degré de prise de
conscience de leur vécu au Brésil, leur faculté de mise en
perspective, s'est révélée particulièrement
aiguisée.
Pour finir, et dans l'optique de constituer un plus large
corps de données sur les impacts de la mobilité internationale au
Brésil chez les participants inscrits à l'Université
Lumière Lyon 2, ajoutons qu'il serait profitable de systématiser
la participation des étudiants en échange à de telles
études. Par ailleurs, cela évincerait le biais inhérent au
volontariat suivant lequel les étudiants qui considèrent leur
expérience du séjour à l'étranger comme globalement
positive et valorisante sont plus enclins à accepter de
témoigner.
Conclusion
Notre étude s'est intéressée aux impacts
de la mobilité internationale chez les étudiants
séjournant au Brésil. Pour la contextualiser, nous sommes partis
de l'accroissement de la mobilité internationale des étudiants de
l'Université Lumière Lyon 2 au cours de cinq dernières
années, et de l'état contradictoire de la recherche sur les
effets d'une telle pratique. Nous avons donc été amenés
à mettre en exergue un certain nombre de facteurs clés dans
l'expérience des étudiants en mobilité afin de mieux
discerner les changements auxquels ces derniers sont susceptibles de s'exposer
au cours de leur séjour. C'est ainsi que nous avons entrepris de
délimiter tour à tour les concepts de transformations
socioculturelles et de compétence interculturelle (CIC) en nous appuyant
sur de nombreux travaux préalables. Concernant les transformations
socioculturelles, nous les avons envisagées en premier lieu comme un
ensemble de changements durables chez l'individu subdivisés en trois
dimensions, culturelle, sociale et psychologique. Ensuite, chacune de ces
dimensions s'est vue associée à une composante (la culture,
l'acculturation et le choc culturel respectivement) à laquelle de
multiples indicateurs ont finalement été reliés (les
compétences de communication, la distance culturelle, la
sensibilité interculturelle ; le capital social, l'orientation
d'acculturation de la société d'accueil ; le soutien social,
l'auto-efficacité, la réussite académique et
professionnelle, et le stress d'acculturation). Pour compléter cela,
nous avons également mentionné le rôle de deux autres
variables dans le processus de transformations socioculturelles, à
savoir la durée de séjour et l'exposition interculturelle
antérieure. Au niveau de la CIC, nous avons d'abord
détaillé le modèle de compétence interculturelle de
Byram (1997) et le modèle de développement de la
sensibilité interculturelle de Bennett (1993) sur lesquels nous nous
sommes ensuite basés pour faire émerger notre approche de la CIC
qui, rappelons-le, relève davantage de l'ébauche que du
véritable modèle. Enfin, nous avons procédé
à un essai de définition du concept de CIC en nous appuyant
notamment sur les travaux de Dervin (2009) et de Le Boterf (1995, 1997). Les
transformations socioculturelles et le développement de la CIC
s'imposant tous deux comme les enjeux majeurs d'une mobilité
internationale réussie, nous avons été conduits à
nous interroger sur la nature de leurs liens au regard du séjour
à l'étranger en général. Ainsi, l'ensemble de ce
travail nous a fourni une assise suffisamment large grâce à
laquelle nous avons pu exploiter une importante quantité de
données relatives à l'expérience de l'échange
universitaire international. Pour recueillir ces données, nous avons
utilisé à la fois des questionnaires et des entretiens
semi-dirigés. Sur les dix questionnaires employés au cours de
cette étude, neuf sont des questionnaires préexistants que nous
avons simplement adaptés à notre objet. Initialement prévu
en deux phases, avant le départ des étudiants pour le
Brésil puis à leur retour en France, le recueil de données
n'a finalement pu avoir
lieu qu'à l'issue du séjour des participants en
raison de difficultés relatives à la composition de
l'échantillon. En effet, nous n'avons pu réunir que trois
volontaires pour prendre part à nos travaux. Il s'agit de trois
étudiantes ayant séjourné au Brésil pour des
durées comprises entre deux et six mois, deux d'entre elles dans le
cadre d'un stage de Master 1 et une dernière pour son cinquième
semestre de Licence. Parmi elles, deux ont séjourné à
Caxias do Sul, au sud du Brésil, et une à Recife, au nord du
pays. Dans un premier temps, notre analyse laisse transparaître que le
séjour au Brésil s'est révélé transformateur
pour l'ensemble des participantes, bien que nous ne puissions déterminer
de manière rigoureuse quelle a été l'ampleur des
changements chez elles, en raison du mode rétrospectif de notre recueil
de données. Ensuite, il semble que les transformations socioculturelles
vécues sur place entretiennent bien un lien positif avec
l'évolution du degré de CIC des étudiantes, bien que
là encore nous ne soyons pas en mesure de situer finement ces
dernières sur notre modèle de CIC, en raison de son état
de gestation. Toutefois, malgré les limites de cette étude dans
la réponse à sa problématique, force est de constater
l'impact positif de la mobilité internationale au Brésil sur les
trois étudiantes interrogées. En effet, nous constatons qu'en
dépit de la situation géographique, de la durée du
séjour, de l'expérience du voyage ou encore des motivations des
participantes, cette expérience fut pour elles un véritable pas
en avant. La somme de leurs expériences sur place les a conduites
tantôt à s'ouvrir davantage sur le monde et la différence,
tantôt à gagner en assurance et en confiance en soi, tantôt
à mieux se connaître et avoir davantage conscience de soi. Elles
nous parlent toutes trois d'une expérience bénéfique au
plan personnel et humain, qui leur a ouvert de nouvelles perspectives d'avenir,
et surtout au coeur de laquelle la rencontre occupe une place
privilégiée. Finalement, les programmes d'échanges
universitaires internationaux entre l'Université Lumière Lyon 2
et le Brésil semblent jouer pleinement leur rôle d'ouverture
à l'altérité, de sensibilisation à la
différence culturelle, en plus de fournir aux candidats à
l'échange un puissant levier de développement de leurs ressources
personnelles.
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Index Auteurs
Abdallah-Pretceille, 12, 18, 26, 31 Acioly-Régnier, 15
Adelman, 22 Adler, 21, 25, 34
Albrecht, 22 Asrabadi, 45 Audras, 30 Babiker, 44 Baker, 45
Bandura, 23, 24 Bartel-Radic, 37
Bennett, 14, 16, 29, 31, 32, 33, 34, 35, 36, 37 Berry, 11, 17,
20, 21, 23, 109, 111, 113 Bourdieu, 13
Brown, 10
Bruckner, 39 Burleson, 22
Byram, 14, 17, 29, 30, 31, 35, 36, 37 Camilleri, 12
Carré, 23
Carver, 45
Certeau, 9
Chanier, 30 Chen, 44
Church, 18, 20, 22
Copeland, 22 Norell, 22
Deardoff, 38 Dervin, 27, 28, 31
Fan, 23
Fantini, 27, 40 Fenton, 19
Fernando, 19 Frederiksen, 27 Geertz, 21
Halamandaris, 11
Hall, 15
Halpern, 19
Hammer, 32, 33, 34, 35
Herskovits, 16 Hopkins, 9 Jonassen, 9 Kim, 9, 21, 26 Kohls, 21,
24 Kroeber, 19 Le Boterf, 38 Linton, 16 Lysgaard, 20 Mak, 23, 24 Malglaive, 38
Mapp, 26
Milstein, 21 Murphy-Lejeune, 8 Norris, 27
Oberg, 20, 24 Pederson, 25
Porcher, 12, 13, 15, 18 Power, 11
Poyrazli, 18 Pugibet, 15 Reboul, 36 Redfield, 16 Ruben, 37
Russo, 8
Sandhu, 45 Schwarzer, 23, 45 Searle, 44 Simensen, 27 Sinicrope,
27 Siryk, 45
Starosta, 44 Tardy, 33, 38, 39
Tran, 23, 24
Vatter, 9, 15, 39, 40, 115 Ward, 9, 10, 22, 24, 44 Watanabe,
27
Zapf, 20
Zheng, 23
Zimet, 44
Index Mots clés
Compétence interculturelle, 3, 26, 27, 28, 29, 30, 31, 35,
36, 37, 38, 39, 40, 41, 47, 49, 72, 91, 108, 109, 114, 115 Échanges
universitaires internationaux, 3, 6, 8, 10, 41, 117
Études intégrées, 6, 7, 9, 12, 42, 91,
115
Séjour d'étude à l'étranger, 8, 10,
116
Transformations socioculturelles, 3, 11, 15, 16, 19, 23, 24, 25,
41, 47, 49, 50, 72, 73, 91, 92, 108, 110, 111, 112, 113, 114, 115
Index Graphiques
Figure 1 modèle multidimensionnel de CIC
(adapté de Byram,1997) 30
Figure 2 modèle de développement de la
sensibilité interculturelle (adapté de Bennett, 1993) 35
Index Tableaux
Tableau 1 - stratégies d'acculturation (adapté
de Berry, 2000) 17
Tableau 2 - autre exemples de modèles de courbe en U
21
Tableau 3 - autres dénominations de la CIC
(adapté de Fantini, 2006, in Understanding and assessing intercultural
competence, Sinicrope, Norris et Watanabe, 2007) 27
Annexe 1 : questionnaires et résultats de P, C
et M
Questionnaire général
QUESTIONNAIRE GENERAL (10-12 min)
Rappel : Les informations collectées
seront gardées confidentielles.
PARTIE A : Renseignements Généraux
Nom :
Prénom :
Année de naissance :
Sexe : M F
Domaine ou filière :
PARTIE B : Votre Séjour d'Etude Au
Brésil
Quel(s) semestre(s) avez-vous passé au
Brésil? vous pouvez sélectionner plusieurs
réponses S3 S4 S5 S6 S7
S8 S9 S10
Stage (précisez la durée) :
Au cours du Doctorat (précisez la durée) :
Durée totale du séjour (en mois) :
Université d'accueil :
Durant la période de votre séjour au
Brésil, êtes-vous rentré(e) en France (vacances ou autres)
?
OUI NON
PARTIE C : Autres Expériences à
l'Etranger
Si vous avez déjà séjourné
à l'étranger Avant ET / OU Pendant votre échange au
Brésil, remplissez le tableau suivant* :
|
SEJOUR 1
|
SEJOUR 2
|
SEJOUR 3
|
SEJOUR 4
|
SEJOUR 5
|
Cadre du séjour** :
|
|
|
|
|
|
Année du séjour :
|
|
|
|
|
|
Durée du séjour :
|
|
|
|
|
|
Pays visité :
|
|
|
|
|
|
Bilan plutôt positif (+) OU
Bilan plutôt négatif (-)
|
|
|
|
|
|
AVANT
ou
PENDANT le Brésil
|
|
|
|
|
|
* si plus de 5 séjours à l'étranger
effectués, renseignez en priorité :
(A) ceux non touristiques
(B) ceux de plus de 15 jours
**cadres :
· Touristique / Privé Ex : vacances,
séjour sportif, cours de langue, au pair, working holiday, ....
· Professionnel / Humanitaire Ex : travail
salarié, bénévolat, engagement associatif, ....
· Scolaire / Universitaire Ex : échange
scolaire, études universitaires, stage universitaire ....
· AUTRE (précisez) :
PARTIE D : Exposition internationale
I) Comment évalueriez-vous votre exposition
internationale (le degré auquel vous êtes confronté(e)
à la vie au sens large au-delà de nos frontières) sur une
échelle de 1 à 5?
1 2 3 4 5
(minimale) (intermédiaire) (maximale)
AVANT votre séjour au Brésil : PENDANT votre
séjour au Brésil :
II) Comment évalueriez-vous votre conscience
interculturelle (le niveau auquel vous êtes préoccupé(e)
par, ou impliqué(e) dans, des affaires extraterritoriales) sur une
échelle de 1 à 5?
1 2 3 4 5
(minimale) (intermédiaire) (maximale)
AVANT votre séjour au Brésil : PENDANT votre
séjour au Brésil :
III) Quelles sont vos sources privilégiées
d'exposition internationale / prise de conscience interculturelle?
Sélectionnez 3 réponses au maximum et
classez-les de 1 à 3
(a) TV (b) Internet (c) Journaux (d) Radio (e) Livres
(f) Famille (g) Amis (h) Études/scolarité (i)
Activité professionnelle
(j) Engagement associatif ou militant
(k) AUTRES (précisez) :
AVANT votre séjour au Brésil : 1) 2) 3)
PENDANT votre séjour au Brésil : 1) 2) 3)
PARTIE E : vous au Brésil
* 1er mois
1) Durant votre séjour au Brésil, comment
vous sentiez-vous ?
1 2 3 4 5
(Mal) (Intermédiaire) (Très bien)
AU DEBUT*:
À LA FIN :
2) Au Brésil, par rapport à vos
interactions sociales, était-il est facile de créer des liens
avec d'autres personnes ou pas?
1 2 3 4 5
(difficile) (intermédiaire) (facile)
AU DEBUT*:
À LA FIN :
3) Aujourd'hui, conseilleriez-vous à un autre
étudiant de venir étudier au Brésil dans votre
université ?
OUI NON
4a) Pendant vos études au Brésil,
avez-vous vécu : vous pouvez cocher plusieurs
réponses
En famille En colocation Chez l'habitant
En chambre universitaire En appartement seul AUTRE
(précisez) :
4b) Si en colocation, était-ce avec une ou des
personnes d'origines : vous pouvez cocher plusieurs
réponses
Brésiliennes Françaises
Étrangères
5) Au quotidien, au-dedans et au-dehors de
l'université au Brésil, comment pensez-vous avoir
communiqué avec les autres?
1 2 3 4 5
(le moins possible) (moyennement) (le plus possible)
AU DEBUT*:
À LA FIN :
6) Dans la vie de tous les jours, parmi vos relations,
dialoguiez-vous principalement avec :
(a) = 2 personnes (b) = 5 personnes (c) = 10 personnes (d) +
10
personnes
AU DEBUT*:
À LA FIN :
7) Rétrospectivement, comment vous sentiez-vous
inséré(e) dans la vie brésilienne à l'issue de
votre séjour?
1 2 3 4 5
(pas du tout) (moyennement) (complètement)
Réponse :
8) Vos interlocuteurs privilégiés
étaient-ils : choisissez 3 réponses au maximum et
classez-les de 1 à 3
(a) Des étudiants brésiliens
(b) Des Brésiliens non étudiants
(c) Des étudiant internationaux non brésiliens
(d) Des compatriotes français au Brésil comme
vous
(e) Votre famille et/ou vos amis en France
(f) AUTRE (précisez) :
AU DEBUT* : 1) 2) 3)
À LA FIN : 1) 2) 3)
|
|
9) Avez-vous eu le sentiment d'avoir changé
à l'issue de votre séjour au Brésil?
1 2 3 4 5
(pas du tout) (dans une certaine mesure) (complètement)
Réponse :
10) Choisissez 1 mot qui serait le plus
caractéristique pour qualifier votre expérience :
(surlignez-le)
Découverte
|
Changement
|
Rupture
|
Faire une parenthèse
|
Nouveauté
|
Être déconnecté
|
Explorer
|
Continuité
|
Suite
|
|
AUTRE (précisez) :
|
|
11) Pensez-vous que cette expérience va
influencer d'une quelconque manière votre vie future?
OUI NON
12) Quel était votre niveau de
portugais?
1 2 3 4 5
(débutant) (intermédiaire) (avancé)
(expert)
À votre arrivée :
À l'issue du séjour :
|
|
13) Écrivez UN MAXIMUM de 6 mots ou expressions
qui sont représentatifs, selon vous, du Brésil ou de la culture
brésilienne :
1)
2)
3)
4)
5)
6)
14) Entre votre arrivée et votre départ,
diriez-vous que vos représentations du Brésil ont beaucoup
changé?
OUI NON
15)
Globalement, combien êtes-vous satisfait(e) de
votre séjour au Brésil?
1 2 3 4 5
(pas du tout) (moyennement) (tout à fait)
À l'université : En général :
|
|
|
16) Globalement, en terme de qualité de vie, de
bien-être et satisfaction, que placeriez-vous en tête?
Votre vie à LYON Votre vie au BRESIL
17) Rétrospectivement, pensez-vous avoir
vécu un choc culturel pendant votre séjour au
Brésil?
OUI NON
Échelle de communication
interculturelle
Ce questionnaire s'intéresse à la communication
interculturelle.
Dans la colonne orangée du tableau ci-dessous,
attribuez aux propositions un score de 0 à 5 selon qu'elles s'appliquent
à vous ou non.
NE SAIS PAS
|
PAS DU TOUT D'ACCORD
|
PLUTOT PAS D'ACCORD
|
MOYENNEMENT D'ACCORD
|
PLUTOT D'ACCORD
|
TOTALLEMENT D'ACCORD
|
0
|
1
|
2
|
3
|
4
|
5
|
1
|
Je donne souvent mon avis sur la façon dont se comportent
les gens du coin
|
|
2
|
Lors de nos interactions, je montre souvent à mes
interlocuteurs que je les comprends au travers de signaux verbaux ou
non-verbaux (hochement de tête, sourire, gestuelle...)
|
|
3
|
Lors de nos interactions, je peux dire quand j'ai vexé une
personne d'une autre culture
|
|
4
|
J'ai du mal à cerner les intentions des gens du coin lors
de nos interactions
|
|
5
|
Je questionne mes habitudes
|
|
6
|
Je suis conscient(e) de l'image que je véhicule avec moi
à l'étranger (en tant que Français(e))
|
|
7
|
Si besoin est, j'arrive à prendre en compte la
différence culturelle quand je communique
|
|
8
|
Je trouve que les gens du coin ne m'intègrent pas assez
|
|
9
|
Je trouve qu'il n'est pas facile de devenir ami avec une personne
d'une autre culture
|
|
10
|
Je trouve difficile de me dévoiler à une personne
d'une autre culture
|
|
11
|
Je me sens découragé(e) quand les gens du coin ne
sont pas de mon avis
|
|
12
|
Je suis angoissé(e) quand je communique avec une personne
d'une autre culture
|
|
13
|
Je me vexe facilement quand je communique avec une personne d'une
autre culture
|
|
14
|
Je me décourage si les gens avec qui je parle ne me
comprennent pas
|
|
15
|
Je me sens inférieur(e) quand je communique avec une
personne d'une autre culture
|
|
16
|
Je n'accepte pas qu'une personne d'une autre culture remette ma
propre culture en cause
|
|
17
|
La façon de faire des gens du coin est franchement
bizarre
|
|
18
|
J'ai des difficultés à savoir ce que les gens du
coin ont derrière la tête quand on parle
|
|
19
|
Je trouve difficile de parvenir à une compréhension
mutuelle avec une personne d'une autre culture
|
|
20
|
Quand des gens du coin parlent, j'ai du mal à me joindre
à la conversation
|
|
Échelle de distance culturelle
Ce questionnaire s'intéresse aux différences
entre la France et le Brésil.
Dans la colonne orangée du tableau ci-dessous,
attribuez aux items un score de 0 à 5 selon la perception que vous avez
des différences entre ces deux pays.
NE SAIS PAS
|
PAS DU TOUT DIFFERENT
|
UN PEU DIFFERENT
|
ASSEZ DIFFERENT
|
TRES DIFFERENT
|
TOTALLEMENT DIFFERENT
|
0
|
1
|
2
|
3
|
4
|
5
|
1
|
Le climat et la météo
|
|
2
|
Les vêtements, la façon de s'habiller
|
|
3
|
La langue
|
|
4
|
L'enseignement supérieur, la vie à
l'université
|
|
5
|
La nourriture, la cuisine
|
|
6
|
La place de la religion, du sacré ou de la
spiritualité
|
|
7
|
Le niveau de vie, le confort
|
|
8
|
Les loisirs, passe-temps et distractions
|
|
9
|
La mentalité ou la façon de voir les choses
|
|
10
|
La vie en famille
|
|
11
|
La communication / la façon de parler / de se comporter /
de rencontrer les gens
|
|
12
|
Les traditions et coutumes
|
|
13
|
La façon de se déplacer
|
|
14
|
Les habitations / l'architecture / l'organisation des villes et
villages
|
|
15
|
Les formes d'arts et d'expressions (musique, peinture....)
|
|
16
|
l'organisation de la société / le système
politique et social
|
|
17
|
L'environnement / la faune, la flore / les paysages
|
|
18
|
La façon de consommer et d'acheter
|
|
19
|
Les habitudes, la routine, la vie quotidienne
|
|
20
|
Les traditions, rituels, cérémonies,
évènements et fêtes locales ou nationales
|
|
Échelle de sensibilité
interculturelle
Ce questionnaire s'intéresse à votre vie
quotidienne au Brésil.
Dans la colonne orangée du tableau ci-dessous,
attribuez aux propositions un score de 1 à 5 selon le niveau de
difficulté approprié.
AUCUNE DIFFICULTE
|
DIFFICULTE FAIBLE
|
DIFFICULTE MOYENNE
|
DIFFICULTE ELEVEE
|
DIFFICULTE EXTREME
|
1
|
2
|
3
|
4
|
5
|
1
|
Vous faire comprendre
|
|
2
|
Comprendre le portugais / l'accent local
|
|
3
|
Comprendre les plaisanteries et l'humour propres aux gens du
coin
|
|
4
|
Bien vous entendre avec les membres du sexe opposé
|
|
5
|
Parler de vous-même avec d'autres personnes
|
|
6
|
Vivre loin des vos proches
|
|
7
|
Bien vous entendre avec vos colocataires (si approprié -
sinon ne pas répondre)
|
|
8
|
Vous habituer à la cuisine locale / trouver la nourriture
que vous aimez
|
|
9
|
Vous habituer au rythme de vie
|
|
10
|
Vous habituer au climat
|
|
11
|
Vous sentir bien chez vous (dans votre logement)
|
|
12
|
Gérer les relations avec des personnes en position
d'autorité ou de responsabilité (professeurs, administration,
doyen )
|
|
13
|
Gérer une situation dans laquelle vous êtes
confronté(e) à quelqu'un qui est désagréable,
fâché(e) ou agressif(ve)
|
|
14
|
Gérer le fait que des gens vous fixent du regard
|
|
15
|
Gérer une situation dans laquelle vous n'êtes pas
satisfait(e) des services qui vous ont été proposés
|
|
16
|
Utiliser les transports publics et vous déplacer
|
|
17
|
Faire les courses / du shopping / aller au marché / au
fast-food...
|
|
18
|
Vous repérer, demander votre chemin
|
|
19
|
Participer à des activités de groupe
|
|
20
|
Comprendre la société dans laquelle vous vivez
(système politique, organisation sociale ...)
|
|
21
|
S'adapter aux règles de bienséance locales
|
|
22
|
Comprendre les différences culturelles observées ou
ressenties
|
|
23
|
Comprendre les valeurs locales / propres à la culture
brésilienne
|
|
24
|
Vous intégrer à la culture locale
|
|
25
|
Comprendre la façon dont les autochtones voient le
monde
|
|
26
|
Être capable de considérer les deux versants d'une
question culturelle (le vôtre + celui des gens du coin)
|
|
Échelle de soutien social
Ce questionnaire s'intéresse au soutien dont vous avez
pu bénéficier lors de votre séjour au
Brésil.
Dans la colonne orangée du tableau ci-dessous,
attribuez aux propositions un score de 1 à 5 selon qu'elles vous
correspondent ou non.
PAS DU TOUT D'ACCORD
|
PLUTOT PAS D'ACCORD
|
MOYENNEMENT D'ACCORD
|
PLUTOT D'ACCORD
|
TOUT A FAIT D'ACCORD
|
1
|
2
|
3
|
4
|
5
|
1
|
Ma famille fait de son mieux pour m'aider
|
|
2
|
Je suis satisfait(e) de mes contacts avec ma famille
|
|
3
|
Mes relations avec ma famille sont importantes pour moi
|
|
4
|
Je peux parler de mes problèmes à quelqu'un
|
|
5
|
Il y a quelqu'un auprès de moi pour me réconforter
quand j'en ressens le besoin
|
|
6
|
Je reçois tout le soutien moral dont j'ai besoin
|
|
7
|
Il y a quelqu'un de prêt à m'aider pour prendre des
décisions
|
|
8
|
Je peux compter sur mes amis restés en France
|
|
9
|
Je suis satisfait(e) de mes contacts avec mes amis restés
en France
|
|
10
|
Mes relations avec mes amis restés en France sont
importantes pour moi
|
|
11
|
Je peux compter sur mes nouveaux amis au Brésil
|
|
12
|
Je suis satisfait(e) de mes contacts avec mes nouveaux amis au
Brésil
|
|
13
|
Mes relations avec mes nouveaux amis au Brésil sont
importantes pour moi
|
|
14
|
La direction des ressources internationales et l'administration
de l'université en France sont à mon écoute
|
|
15
|
La direction des ressources internationales et l'administration
de l'université au Brésil sont à mon écoute
|
|
16
|
Au Brésil, j'ai des contacts avec des associations et/ou
des lieux de culte
|
|
17
|
Au Brésil, le contact avec des associations et/ou des
lieux de culte est important pour moi
|
|
18
|
Il y a quelqu'un avec qui je peux partager mes joies et mes
peines
|
|
Échelle d'efficacité
interculturelle
Ce questionnaire s'intéresse à diverses
dimensions de votre séjour au Brésil.
Dans la colonne orangée du tableau ci-dessous,
attribuez aux propositions un score de 1 à 5 selon qu'elles s'appliquent
à vous ou non.
PAS DU TOUT VRAI
|
UN PEU VRAI
|
MOYENNEMENT VRAI
|
SOUVENT VRAI
|
TOUT A FAIT VRAI
|
1
|
2
|
3
|
4
|
5
|
1
|
Je me sens à l'aise lors des activités sociales
|
|
2
|
C'est difficile pour moi de me faire des amis
|
|
3
|
Je trouve difficile de tenir une conversation avec la plupart des
gens
|
|
4
|
Je suis généralement discret(ète) et
effacé(e) en société
|
|
5
|
J'ai du mal à obtenir un renseignement quand j'en ai
besoin
|
|
6
|
Si je suis dans le pétrin, je peux penser à une
solution
|
|
7
|
J'ai du mal à participer aux débats en classe
|
|
8
|
J'ai du mal à m'adresser au personnel de
l'université
|
|
9
|
J'ai confiance en moi quand je parle avec mes professeurs
|
|
10
|
Je suis sûr(e) de moi quand je pose une question en
classe
|
|
11
|
C'est dur pour moi d'être en désaccord avec
quelqu'un
|
|
12
|
J'ai confiance en mes compétences en portugais
|
|
13
|
Je me sens à l'aise quand je parle avec les gens du
coin
|
|
14
|
J'ai des sujets de conversation en commun avec les gens du
coin
|
|
15
|
J'apprécie les mêmes activités que la plupart
des gens du coin
|
|
16
|
J'essaie de devenir ami avec les gens du coin
|
|
17
|
En général, je peux faire face à quoi que ce
soit
|
|
18
|
Si j'aperçois une personne que je voudrais rencontrer, je
vais vers elle au lieu d'attendre qu'elle vienne vers moi
|
|
19
|
Face à une situation inattendue, j'ai assez de ressource
pour m'en sortir
|
|
Échelle d'adaptation
académique
Ce questionnaire s'intéresse aux études et
à la vie universitaire lors de votre séjour au
Brésil.
Dans la colonne orangée du tableau ci-dessous,
attribuez un score de 1 à 5 à chaque proposition en fonction de
la façon dont vous avez vécu les choses.
PAS DU TOUT VRAI
|
UN PEU VRAI
|
MOYENNEMENT VRAI
|
PLUTOT VRAI
|
TOUT A FAIT VRAI
|
1
|
2
|
3
|
4
|
5
|
1
|
J'apprécie les études et le travail
universitaire
|
|
2
|
Je me tiens à jour de mon travail universitaire
|
|
3
|
Je ne travaille pas autant que je le devrais
|
|
4
|
Je ne suis pas motivé(e) pour étudier
|
|
5
|
Je vais toujours en cours
|
|
6
|
Je trouve les études et le travail universitaire
difficiles
|
|
7
|
Je n'ai pas de bons résultats aux examens
|
|
8
|
Je suis satisfait(e) de mes résultats à
l'université
|
|
9
|
Je ne réussis pas très bien à
l'université compte tenu de tous mes efforts et de mon travail
|
|
10
|
Je suis satisfait(e) des cours que j'ai choisis
|
|
11
|
Je suis satisfait(e) des enseignants et chargés de
cours
|
|
12
|
Je m'intègre bien à l'université
|
|
13
|
Je participe à des activités extra-scolaires
à l'université
|
|
14
|
Je suis satisfait(e) des activités extrascolaires
proposées à l'université
|
|
15
|
Je m'adapte bien à la vie étudiante
|
|
16
|
J'ai plusieurs amis dans ma ou mes classe(s)
|
|
17
|
Je suis satisfait(e) de ma vie sociale à
l'université
|
|
18
|
Je suis content(e) de ma décision de suivre des cours
à cette université
|
|
19
|
J'ai du mal à gérer le stress engendré par
mes études
|
|
20
|
Je comprends ce que l'on attend de moi en cours
|
|
21
|
Je me sens dépassé(e) par les exigences
scolaires
|
|
22
|
Je me fais trop de soucis pour mes notes et les examens
|
|
23
|
Je trouve que certains livres sont trop durs à
comprendre
|
|
24
|
Je trouve que certains professeurs sont trop durs à
comprendre
|
|
25
|
On nous demande trop de travail dans certains cours
|
|
26
|
Ça ne colle pas entre certains professeurs et moi
|
|
Échelle de stress d'acculturation
Ce questionnaire s'intéresse à certains aspects
du processus d'acclimatation que vous avez traversé pendant votre
séjour au Brésil. Il peut s'agir ici de premières
impressions mais aussi de sentiments plus durables. Dans la colonne
orangée du tableau ci-dessous, attribuez aux propositions un score de 1
à 5 en fonction de votre ressenti d'alors.
PAS DU TOUT D'ACCORD
|
PLUTOT PAS D'ACCORD
|
MOYENNEMENT D'ACCORD
|
PLUTOT D'ACCORD
|
TOTALLEMENT D'ACCORD
|
1
|
2
|
3
|
4
|
5
|
1
|
J'ai le mal du pays : je ne me sens pas chez moi et mes
compatriotes me manquent
|
|
2
|
Je me sens discriminé(e) ou pas sur un pied
d'égalité avec les gens du coin
|
|
3
|
Les autres se moquent de ma culture et de mes valeurs
|
|
4
|
Je me sens nerveux(se) quand je prends la parole en portugais
|
|
5
|
Participer aux activités sociales m'intimide
|
|
6
|
En général, je me fais discret(ète) car je
suis étranger(ère)
|
|
7
|
Je me sens coupable d'avoir laissé ma famille et mes amis
derrière moi
|
|
8
|
Je me sens sous pression ici
|
|
9
|
Les autres affichent du mépris ou de l'indifférence
envers moi (non verbalement)
|
|
10
|
Les autres affichent du mépris ou de l'indifférence
envers moi (verbalement)
|
|
11
|
Les autres affichent du mépris ou de l'indifférence
envers moi (en s'en prenant à ma personne physique)
|
|
12
|
Ça me touche quand les autres ne comprennent pas ma
façon de voir les choses
|
|
13
|
Je trouve que les gens ne vont pas assez vers moi
|
|
14
|
Je suis victime de préjugés et de
stéréotypes
|
|
Échelle de bien-être
Ce questionnaire s'intéresse à certains aspects
de votre vie sociale au Brésil.
Dans la colonne orangée du tableau ci-dessous,
attribuez aux propositions un score de 1 à 5 selon qu'elles vous
correspondent ou non.
PAS DU TOUT
|
UN PEU
|
MOYENNEMENT
|
BEAUCOUP
|
TOUT A FAIT
|
1
|
2
|
3
|
4
|
5
|
1
|
Votre hygiène de vie a-t-elle changée?
(+/- manger +/- dormir +/- d'énergie +/-
fatigué(e))
|
|
2
|
Vous sentez vous exclu(e) socialement, discriminé(e) ou
rejeté(e)?
|
|
3
|
Vous sentez-vous seul(e) et faiblement entouré(e)?
|
|
4
|
Si l'occasion se présente, allez-vous vers les gens du
coin / les étudiants brésiliens?
|
|
5
|
Si l'occasion se présente, allez-vous vers des
compatriotes?
|
|
6
|
Si l'occasion se présente, allez-vous vers d'autres
étudiants internationaux / des gens d'une autre nationalité?
|
|
7
|
Êtes-vous content(e) de la tournure qu'a prise votre vie
ici?
|
|
8
|
Les gens vous ennuient-ils ou vous irritent -ils?
|
|
9
|
Vous sentez-vous à l'aise dans votre environnement?
|
|
10
|
Êtes vous plus souvent déprimé(e) que
joyeux(se)?
|
|
11
|
Est-il difficile de parler avec de nouvelles personnes / de se
faire de nouveaux amis?
|
|
12
|
Vous sentez-vous capable d'aborder les gens / d'aller vers les
autres?
|
|
13
|
Participez-vous régulièrement à des
activités de groupe?
|
|
14
|
Êtes-vous membre d'un club ou d'une association locale?
|
|
15
|
Êtes-vous souvent malade?
|
|
16
|
Préférez-vous rester seul(e)?
|
|
17
|
Avez-vous tendance à être d'un tempérament
plus solitaire qu'en France?
|
|
18
|
Trouvez-vous les activités sociales auxquelles vous
participez au Brésil différentes de celles que vous feriez en
France?
|
|
19
|
Avez-vous déjà souhaité être de retour
chez vous, en France?
|
|
20
|
Avez-vous tendance à avoir moins confiance en vous qu'en
France?
|
|
Brief COPE
Pour ce questionnaire, nous vous demandons de penser aux
situations difficiles ou stressantes que vous avez pu vivre au Brésil.
Il y a beaucoup de manière de faire face au stress. Il s'agit ici
d'indiquer ce que vous avez fait ou avez ressenti habituellement lors d'un
événement stressant.
Pour chaque proposition, donnez un score de 1 à 5
selon que vous avez eu tendance ou non à réagir de cette
façon.
JAMAIS
|
RAREMENT
|
PARFOIS
|
SOUVENT
|
TOUJOURS
|
1
|
2
|
3
|
4
|
5
|
1
|
Faire quelque chose pour moins y penser (travailler, aller au
cinéma, sortir etc...)
|
|
2
|
Prendre les choses en main pour essayer d'améliorer la
situation
|
|
3
|
Recevoir l'aide et le conseil d'autres personnes
|
|
4
|
Renoncer à essayer de résoudre la situation
|
|
5
|
Apprendre à vivre avec
|
|
6
|
Exprimer mes sentiments négatifs
|
|
7
|
Rechercher le soutien et la compréhension de quelqu'un
|
|
8
|
Rechercher les aspects positifs dans ce qu'il m'arrive, voir le
bon côté des choses
|
|
9
|
Me critiquer, me reprocher les choses qui m'arrivent
|
|
10
|
Prendre les choses avec humour
|
|
11
|
Prier, méditer, faire de la relaxation
|
|
12
|
Me dire que ce n'est pas réel, refuser de croire que
ça m'arrive
|
|
Résultats de M, C et P au questionnaire
général
Qu
|
P
|
C
|
M
|
I
|
Avt 3 Pdt 3
|
Avt 5 Pdt 5
|
Avt 2 Pdt 4
|
II
|
Avt 4 Pdt 4
|
Avt 5 Pdt 5
|
Avt 1 Pdt 3
|
III
|
Avt F-G-H Pdt F-G-H
|
Avt H-I-G Pdt H-I-G
|
Avt A/B-C-H Pdt G-A-C
|
1
|
Db 4 Fin 5
|
Db 4 Fin 5
|
Db 3 Fin 5
|
2
|
Db 5 Fin 5
|
Db 3 Fin 5
|
Db 3 Fin 5
|
3
|
Oui
|
Oui
|
Oui
|
4
|
Fam - Col Hab - Brsl
|
Hab Brsl
|
Fam - Col Frç - Etrg
|
5
|
Db 5 Fin 5
|
Db 3 Fin 5
|
Db 2 Fin 4
|
6
|
Db B Fin C
|
Db D Fin D
|
Db B Fin D
|
7
|
4
|
4
|
4
|
8
|
Db B-A-E Fin B-D-C
|
Db C-D-A Fin B-A-D
|
Db A-D-C Fin B-C-A
|
9
|
4
|
4
|
3
|
10
|
Suite
|
Retrouvailles
|
Découverte
|
11
|
Oui
|
Oui
|
Oui
|
12
|
Db 2 Fin 3
|
Db 1 Fin 4
|
Db 1 Fin 4-5
|
13
|
Consommation Fête Famille Sédentarité Chaleur Soutien
|
Communauté Énergie Joie de
vivre spiritualité Violence Différences
|
Nossa Meu Deus com saudades oi!! Tudo bem? Fica com
deus bah
|
14
|
Oui
|
Oui
|
Non
|
15
|
Stg 4 Gnrl 5
|
Stg 2 - 4 Gnrl 4
|
Univ 3 Gnrl 4
|
16
|
Lyon
|
Brésil
|
Lyon
|
17
|
Oui
|
Oui
|
Non
|
Résultats de M, C et P à l'Échelle
de communication interculturelle
Qu
|
P
|
C
|
M
|
1
|
4
|
2
|
2
|
2
|
5
|
5
|
5
|
3
|
4
|
3
|
5
|
4
|
1
|
2
|
2
|
5
|
3
|
4
|
4
|
6
|
4
|
5
|
3
|
7
|
4
|
5
|
3
|
8
|
2
|
2
|
1
|
9
|
2
|
1
|
1
|
10
|
1
|
1
|
2
|
11
|
2
|
2
|
1
|
12
|
1
|
1
|
1
|
13
|
1
|
1
|
1
|
14
|
2
|
3
|
2
|
15
|
1
|
3
|
1
|
16
|
2
|
4
|
2
|
17
|
2
|
1
|
1
|
18
|
3
|
3
|
2
|
19
|
2
|
2
|
2
|
20
|
3
|
3
|
1
|
TTL
|
81/100
|
81/100
|
88/100
|
SCR
|
81/100
|
81/100
|
88/100
|
Résultats de M, C et P à l'Échelle
de distance culturelle
Qu
|
P
|
C
|
M
|
1
|
3
|
5
|
4
|
2
|
4
|
4
|
3
|
3
|
3
|
5
|
4
|
4
|
4
|
4
|
5
|
5
|
4
|
4
|
4
|
6
|
4
|
5
|
5
|
7
|
3
|
3
|
4
|
8
|
3
|
3
|
3
|
9
|
4
|
5
|
4
|
10
|
4
|
4
|
3
|
11
|
4
|
5
|
4
|
12
|
4
|
5
|
4
|
13
|
5
|
3
|
4
|
14
|
5
|
3
|
4
|
15
|
3
|
4
|
3
|
16
|
3
|
3
|
0
|
17
|
4
|
3
|
4
|
18
|
4
|
4
|
4
|
19
|
4
|
5
|
2
|
20
|
4
|
5
|
3
|
TTL
|
42/100
|
38/100
|
43/95
|
SCR
|
42/100
|
38/100
|
45,2/100
|
Résultats de M, C et P à l'Échelle
de sensibilité interculturelle
Qu
|
P
|
C
|
M
|
1
|
2
|
3
|
2
|
2
|
2
|
2
|
1
|
3
|
3
|
2
|
2
|
4
|
3
|
3
|
1
|
5
|
2
|
2
|
1
|
6
|
3
|
3
|
1
|
7
|
4
|
3
|
3
|
8
|
2
|
3
|
1
|
9
|
2
|
3
|
1
|
10
|
2
|
1
|
1
|
11
|
3
|
3
|
2
|
12
|
1
|
3
|
1
|
13
|
3
|
4
|
1
|
14
|
2
|
2
|
2
|
15
|
2
|
4
|
2
|
16
|
4
|
2
|
3
|
17
|
3
|
2
|
1
|
18
|
2
|
2
|
1
|
19
|
3
|
2
|
1
|
20
|
2
|
2
|
4
|
21
|
2
|
3
|
2
|
22
|
2
|
2
|
2
|
23
|
2
|
2
|
2
|
24
|
1
|
2
|
2
|
25
|
3
|
2
|
2
|
26
|
3
|
2
|
1
|
TTL
|
93/130
|
92/130
|
113/130
|
SCR
|
71,5/100
|
70,7/100
|
86,9/100
|
Résultats de M, C et P à l'Échelle
de soutien social
Qu
|
P
|
C
|
M
|
1
|
3
|
5
|
5
|
2
|
5
|
4
|
5
|
3
|
5
|
3
|
4
|
4
|
5
|
4
|
5
|
5
|
4
|
4
|
5
|
6
|
4
|
4
|
5
|
7
|
2
|
3
|
3
|
8
|
3
|
3
|
5
|
9
|
5
|
2
|
4
|
10
|
5
|
4
|
4
|
11
|
5
|
4
|
3
|
12
|
5
|
5
|
5
|
13
|
4
|
5
|
4
|
14
|
4
|
3
|
2
|
15
|
4
|
2
|
2
|
16
|
4
|
5
|
1
|
17
|
4
|
5
|
1
|
18
|
4
|
4
|
5
|
TTL
|
76/90
|
71/90
|
68/90
|
SCR
|
84,4/100
|
78,8/100
|
75,5/100
|
Résultats de M, C et P à l'Échelle
d'efficacité interculturelle
Qu
|
P
|
C
|
M
|
1
|
4
|
5
|
4
|
2
|
1
|
1
|
1
|
3
|
2
|
1
|
1
|
4
|
2
|
1
|
2
|
5
|
3
|
1
|
1
|
6
|
4
|
5
|
5
|
7
|
2
|
2
|
1
|
8
|
1
|
1
|
1
|
9
|
4
|
3
|
4
|
10
|
4
|
2
|
4
|
11
|
1
|
1
|
1
|
12
|
3
|
4
|
5
|
13
|
4
|
3
|
5
|
14
|
2
|
5
|
5
|
15
|
2
|
4
|
4
|
16
|
4
|
5
|
5
|
17
|
4
|
4
|
4
|
18
|
4
|
5
|
4
|
19
|
3
|
5
|
5
|
TTL
|
72/95
|
84/95
|
88/95
|
SCR
|
75,7/100
|
88,4/100
|
92,6/100
|
Résultats de M, C et P à l'Échelle
d'adaptation académique
Qu
|
P
|
C
|
M
|
1
|
-
|
-
|
2
|
2
|
-
|
-
|
1
|
3
|
-
|
-
|
5
|
4
|
-
|
-
|
2
|
5
|
-
|
-
|
3
|
6
|
-
|
-
|
1
|
7
|
-
|
-
|
1
|
8
|
-
|
-
|
5
|
9
|
-
|
-
|
1
|
10
|
-
|
-
|
2
|
11
|
-
|
-
|
3
|
12
|
-
|
-
|
5
|
13
|
-
|
-
|
1
|
14
|
-
|
-
|
1
|
15
|
-
|
-
|
4
|
16
|
-
|
-
|
2
|
17
|
-
|
-
|
3
|
18
|
-
|
-
|
3
|
19
|
-
|
-
|
1
|
20
|
-
|
-
|
5
|
21
|
-
|
-
|
1
|
22
|
-
|
-
|
1
|
23
|
-
|
-
|
2
|
24
|
-
|
-
|
1
|
25
|
-
|
-
|
1
|
26
|
-
|
-
|
1
|
TTL
|
-
|
-
|
95/130
|
SCR
|
-
|
-
|
73/100
|
Résultats de M, C et P à l'Échelle
de stress d'acculturation
Qu
|
P
|
C
|
M
|
1
|
2
|
2
|
1
|
2
|
1
|
2
|
1
|
3
|
1
|
2
|
1
|
4
|
1
|
3
|
1
|
5
|
2
|
2
|
1
|
6
|
3
|
3
|
1
|
7
|
3
|
4
|
2
|
8
|
4
|
4
|
1
|
9
|
1
|
1
|
1
|
10
|
1
|
1
|
1
|
11
|
1
|
1
|
1
|
12
|
3
|
4
|
1
|
13
|
2
|
1
|
1
|
14
|
4
|
1
|
1
|
TTL
|
55/70
|
53/70
|
69/70
|
SCR
|
78,5
|
75,7/100
|
98,5
|
Résultats de M, C et P à l'Échelle
de bien-être
Qu
|
P
|
C
|
M
|
1
|
3
|
2
|
2
|
2
|
1
|
1
|
1
|
3
|
2
|
1
|
1
|
4
|
3
|
4
|
5
|
5
|
3
|
2
|
3
|
6
|
3
|
3
|
3
|
7
|
4
|
5
|
3
|
8
|
2
|
2
|
1
|
9
|
4
|
4
|
5
|
10
|
1
|
1
|
1
|
11
|
4
|
1
|
2
|
12
|
3
|
4
|
5
|
13
|
4
|
5
|
3
|
14
|
2
|
5
|
1
|
15
|
1
|
1
|
1
|
16
|
1
|
1
|
1
|
17
|
4
|
1
|
1
|
18
|
4
|
3
|
2
|
19
|
2
|
1
|
1
|
20
|
3
|
2
|
2
|
TTL
|
70/100
|
87/100
|
84/100
|
SCR
|
70/100
|
87/100
|
84/100
|
Résultats de M, C et P au Brief COPE
Qu
|
P
|
C
|
M
|
1
|
4
|
2
|
3
|
2
|
2
|
4
|
4
|
3
|
4
|
5
|
5
|
4
|
2
|
2
|
2
|
5
|
3
|
3
|
4
|
6
|
2
|
4
|
2
|
7
|
4
|
5
|
3
|
8
|
4
|
5
|
4
|
9
|
1
|
5
|
3
|
10
|
5
|
3
|
4
|
11
|
4
|
3
|
1
|
12
|
2
|
3
|
1
|
13
|
Oui
|
Oui
|
Oui
|
TTL
|
43/60
|
44/60
|
42/60
|
SCR
|
71,6/100
|
73,3/100
|
70/100
|
Résultats totaux de M, C et P par
questionnaire
|
P
|
C
|
M
|
Échelle
de communication interculturelle
|
0.810
|
0.810
|
0.880
|
Échelle de distance culturelle
|
0.420
|
0.380
|
0.452
|
Échelle
de sensibilité interculturelle
|
0.715
|
0.707
|
0.869
|
Échelle de soutien social
|
0.844
|
0.788
|
0.755
|
Échelle
d'efficacité interculturelle
|
0.757
|
0.884
|
0.926
|
Échelle d'adaptation académique
|
-
|
-
|
0.730
|
Échelle de stress d'acculturation
|
0.785
|
0.757
|
0.985
|
Échelle de bien- être
|
0.700
|
0.870
|
0.840
|
Brief COPE
|
0.716
|
0.733
|
0.700
|
TOTAL
|
5.747 / 8
|
5.929 / 8
|
7.137 / 9
|
SCORE
|
71,8 / 100
|
74,1 / 100
|
79,3 / 100
|
Annexe 2 : questionnaires originaux
Intercultural Sensitivity Scale (ISS)
Auteur(s) : Chen et Starosta (2000)
Échelle : (1) Strongly Disagree
(2) Disagree
(3) Uncertain
(4) Agree
(5) Strongly agree
1 I enjoy interacting with people from different cultures
2 I think people from other cultures are narrow-minded
3 I am pretty sure of myself in interacting with people from
different cultures
4 I find it very hard to talk in front of people from different
cultures
5 I always know what to say when interacting with people from
different cultures
6 I can be as sociable as I want to be when interacting with
people from different cultures
7 I don't like to be with people from different cultures
8 I respect the values of people from different cultures
9 I get upset easily when interacting with people from different
cultures
10 I feel confident when interacting with people from different
cultures
11 I tend to wait before forming an impression of
culturally-distinct counterparts
12 I often get discouraged when I am with people from different
cultures
13 I am open-minded to people from different cultures
14 I am very observant when interacting with people from
different cultures
15 I often feel useless when interacting with people from
different cultures
16 I respect the ways people from different cultures behave
17 I try to obtain as much information as I can when interacting
with people from different
cultures
18 I would not accept the opinions of people from different
cultures
19 I am sensitive to my culturally-distinct counterpart's subtle
meanings during our interaction
20 I think my culture is better than other cultures
21 I often give positive responses to my culturally different
counterpart during our interaction
22 I avoid those situations where I will have to deal with
culturally-distinct persons
23 I often show my culturally-distinct counterpart my
understanding through verbal or
nonverbal cues
24 I have a feeling of enjoyment towards differences between my
culturally-distinct
counterpart and me
Cultural Distance Scale (CDS)
Auteur(s) : Babiker, Cox et Miller (1980)
Échelle : (0) No difference compared to your home
country
(1) Slight difference
(2) Moderate difference
(3) Great difference
(4) Extreme difference
1 Climate/weather
2 Physical environment (such as the neighborhood, the density of
population)
3 Transportation tool or style
4 Food (the cooking and eating style)
5 Clothing
6 The types of leisure activities/games and recreational
activities
7 Pace of life
8 Material comfort (standard of living)
9 Language
10 Communication style (such as directness or indirectness)
11 General education level for most people
12 Education style (such as class interaction, teacher's
expectation)/kind of school
13 Religion/praying
14 Family structure (such as the general size of family,
generations living together)
15 The usual age of getting married
16 The values of family/family life
17 Forming friendship
Socio-Cultural Adaptation Scale (SCAS) - version
1
Auteur(s) : Ward et Kennedy (1999) Échelle : (1) No
Difficulty
(2) Slight Difficulty
(3) Moderate Difficulty
(4) Great Difficulty
(5) Extreme Difficulty
1 Making friends
2 Using the transport system
3 Making yourself understood
4 Getting used to the pace of life
5 Going shopping
6 Going to social events/gatherings/functions
7 Worshipping in your usual way
8 Talking about yourself with others
9 Understanding jokes and humor
10 Dealing with someone who is unpleasant/cross/aggressive
11 Getting used to the local food/finding food you enjoy
12 Following rules and regulations
13 Dealing with people in authority
14 Dealing with the bureaucracy
15 Making yourself understood
16 Adapting to local accommodation
17 Communicating with people of a different ethnic group
18 Relating to members of the opposite sex
19 Dealing with unsatisfactory service
20 Finding your way around
21 Dealing with the climate
22 Dealing with people staring at you
23 Going to coffee shops/ food stalls/restaurants/fast food
outlets
24 Understanding the local accent/ language
25 Living away from family members overseas/independently from
your parents
26 Adapting to local etiquette
27 Getting used to the population density
28 Relating to older people
29 Dealing with people of higher status
30 Understanding what is required of you at university
31 Coping with academic work
32 Dealing with foreign staff at the university
33 Expressing your ideas in class
34 Living with your host family
35 Accepting/understanding the local political system
36 Understanding the locals' world view
37 Taking a local perspective on the culture
38 Understanding the local value system
39 Seeing things from the locals' point of view
40 Understanding cultural differences
41 Being able to see two sides of an intercultural issue
Socio-Cultural Adaptation Scale (SCAS) - version
2
Auteur(s) : Ward et Kennedy (1999)
Échelle : (1) No Difficulty
(2) Slight Difficulty
(3) Moderate Difficulty
(4) Great Difficulty
(5) Extreme Difficulty
1 Making friends
2 Finding food that you enjoy
3 Following rules and regulations
4 Dealing with people in authority
5 Taking a _____ (host country) perspective on the culture
6 Using the transport system
7 Dealing with bureaucracy
8 Understanding the (host country) value system
9 Making yourself understood
10 Seeing things from a 's (host national's) point of view
11 Going shopping
12 Dealing with someone who is unpleasant
13 Understanding jokes and humor
14 Accommodation
15 Going to social gatherings
16 Dealing with people staring at you
17 Communicating with people of a different ethnic group
18 Understanding ethnic or cultural differences
19 Dealing with unsatisfactory service
20 Worshipping
21 Relating to members of the opposite sex
22 Finding your way around.
23 Understanding the (host country's) political system
24 Talking about yourself with others
25 Dealing with the climate
26 Understanding the host country's) world view
27 Family relationships
28 The pace of life
29 Being able to see two sides of an inter-cultural issue
Socio-Cultural Adaptation Scale (SCAS) -
traduction
Auteur(s) : Ait Ghezala-Rossier (2003)
Échelle : (1) Pas de difficulté
(2) Difficulté légère
(3) Difficulté modérée
(4) Grosse difficulté
(5) Difficulté extrême
1 Se faire des amis
2 Utiliser les transports publics
3 Se faire comprendre
4 S'habituer au rythme de vie
5 Faire du shopping
6 Se rendre à des manifestations sociales / rassemblements
/ réunions
7 Prier comme d'habitude
8 Parler de soi-même avec d'autres personnes
9 Comprendre les plaisanteries et l'humour
10 Gérer une situation dans laquelle vous êtes
confronté(e) à quelqu'un qui est désagréable/
fâché(e) / agressif (ve)
11 S'habituer à la nourriture locale / trouver la
nourriture que vous aimez
12 Suivre les règles et les règlements
13 Gérer les relations avec les personnes responsables
14 Gérer les situations dans lesquelles vous êtes
confronté(e) à la bureaucratie
15 Savoir se faire comprendre
16 S'adapter aux logements locaux
17 Communiquer avec des personnes provenant d'un groupe ethnique
différent
18 S'entendre avec les membres du sexe opposé
19 Gérer une situation dans laquelle vous n'êtes pas
satisfait(e) des services qui vous ont été
proposés
20 Trouver son chemin
21 Gérer les différences climatiques
22 Gérer le fait que des personnes vous fixent du
regard
23 Allez dans un café / au marché / au restaurant /
au fast-food
24 Comprendre l'accent / la langue locale
25 Vivre loin des membres de sa famille /indépendant de
ses parents
26 S'adapter aux règles de bienséance locales
27 S'habituer à la densité de la population
28 S'entendre avec des personnes âgées
29 Gérer une situation impliquant des personnes de haut
statut social
30 Comprendre ce qu'on attend de vous à
l'Université
31 Gérer le travail académique
32 Gérer les relations avec les professeurs
étrangers
33 Exprimez ses idées en classe
34 Vivre avec les gens avec ou chez qui vous logez
35 Accepter / comprendre le système politique local
36 Comprendre la perception du monde des gens du coin
37 Adopter la culture locale
38 Comprendre les valeurs locales
39 Voir les choses du même point de vue que les gens du
coin
40 Comprendre les différences culturelles
41 Etre capable de considérer les deux versants d'une
question culturelle
Multidimensional Scale of Perceived Social Support
(MSPSS)
Auteur(s) : Zimet, Dahlem, Zimet et Farley (1988)
Échelle : (1) Very Strongly Disagree
(2) Strongly Disagree
(3) Mildly Disagree
(4) Neutral
(5) Mildly Agree
(6) Strongly Agree
(7) Very Strongly Agree
1 There is a special person who is around when I am in need
2 There is a special person with whom I can share my joys and
sorrows
3 My family really tries to help me
4 I get the emotional help and support I need from my family
5 I have a special person who is a real source of comfort to
me
6 My friends really try to help me
7 I can count on my friends when things go wrong
8 I can talk about my problems with my family
9 I have friends with whom I can share my joys and sorrows
10 There is a special person in my life who cares about my
feelings
11 My family is willing to help me make decisions
12 I can talk about my problems with my friends
General Self-Efficacy Scale (GSES)
Auteur(s) : Schwarzer et Jerusalem (1995)
Échelle : (1) Not true at all
(2) Hardly true
(3) Moderately true
(4) Exactly true
1 I can always manage to solve difficult problems if I try hard
enough
2 If someone opposes me, I can find the means and ways to get
what I want
3 It is easy for me to stick to my aims and accomplish my
goals
4 I am confident that I could deal efficiently with unexpected
events
5 Thanks to my resourcefulness, I know how to handle unforeseen
situations
6 I can solve most problems if I invest the necessary effort
7 I can remain calm when facing difficulties because I can rely
on my coping abilities
8 When I am confronted with a problem, I can usually find several
solutions
9 If I am in trouble, I can usually think of a solution
10 I can usually handle whatever comes my way
Auto-efficacité
Généralisée
Auteur(s) : Dumont, Schwarzer et Jerusalem (2000)
Échelle : (1) Pas du tout vrai
(2) À peine vrai
(3) Moyennement vrai
(4) Totalement vrai
1 Je peux toujours arriver à résoudre mes
difficultés si j'essaie assez fort
2 Si quelqu'un s'oppose à moi, je peux trouver une
façon pour obtenir ce que je veux
3 C'est facile pour moi de maintenir mon attention sur mes
objectifs et accomplir mes buts
4 J'ai confiance que je peux faire face efficacement aux
évènements inattendus
5 Grâce à ma débrouillardise, je sais comment
faire face aux situations imprévues
6 Je peux résoudre la plupart de mes problèmes si
j'investis les efforts nécessaires
7 Je peux rester calme lorsque je suis confronté à
des difficultés car je peux me fier à mes
habiletés pour faire face aux problèmes
8 Lorsque je suis confronté à un problème,
je peux habituellement trouver plusieurs solutions
9 Si je suis « coincé », je peux habituellement
penser à ce que je pourrais faire
10 Peu importe ce qui m'arrive, je suis capable d'y faire face
généralement
Cross-Cultural Social-Efficacy Scale for Students
(CCSESS)
Auteur(s) : Fan et Mak (1998)
Échelle : (1) Strongly Agree ? (4) Neither ? (7)
Strongly Disagree
1 I do not handle myself well in social gatherings
2 It is difficult for me to make new friends
3 I have difficulties making new friends at university
4 I find it difficult to hold a conversation with most people
5 I have difficulties participating in class discussions
6 I am usually quiet and passive in social situations
7 I have difficulties getting a data when I want one
8 I have difficulties talking to university staff
9 It is difficult for me to express a different opinion
10 I feel confident asking a lecturer a question
11 I feel confident talking to my lecturers
12 I feel confident in asking questions in class
13 I am confident of my language skills
14 I feel comfortable requesting information
15 I have common interests with local people
16 I have common topics for conversation with local people
17 I enjoy activities that most local people enjoy
18 When I'm trying to become friends with someone who seems
uninterested at first, I don't
give up easily
19 If I see someone I would like to meet, I go to that person
instead of waiting for him or her to
come to me
20 I feel confident in joining a student organization
Student Adjustment to College Questionnaire
(SACQ)
Auteur(s) : Baker et Siryk (1989)
Échelle : (1) apply close to me ? (9) doesnt apply to
me at all
1 Fits in well with college environment
2 Feels tense or nervous
3 Keeps up-to-date with academic work
4 Is meeting people and making friends
5 Is definite about reasons for being in college
6 Finds academic work difficult
7 Feels blue and moody
8 Is very involved with college social activities
9 Is adjusting well to college
10 Does not function well during exams
11 Feels tired a lot lately
12 Being independent has not been easy
13 Is satisfied with academic performance
14 Has informal contact with professors
15 Is pleased with decision to go to college
16 Is pleased about decision to attend this college
17 Does not work as hard as he or she should
18 Has several close social ties
19 Has well-defined academic goals
20 Is not able to control emotions well lately
21 Does not feel smart enough for course work
22 Is lonesome for home
23 Considers college degree important
24 Appetite is good
25 Does not use study time efficiently
26 Enjoys living in a dormitory
27 Enjoys writing papers for courses
28 Has a lot of headaches
29 Is not motivated to study
30 Is satisfied with extracurricular activities
31 Has thought about seeking psychological help recently
32 Doubts value of college degree
33 Gets along well with roommates
34 Would prefer to be at another college
35 Gained or lost a lot of weight lately
36 Is satisfied with variety of courses
37 Has adequate social skills
38 Gets angry too easily lately
39 Has trouble concentrating when studying
40 Is not sleeping well
41 Does not do well academically, considering effort
42 Has difficulty feeling at ease with others at college
43 Is satisfied with quality of courses
44 Attends classes regularly
45 Sometimes thinking gets muddled too easily
46 Is satisfied with social participation
47 Expects to finish bachelor's degree
48 Does not mix well with opposite sex
49 Worries a lot about college expenses
50 Enjoys academic work
51 Feels lonely a lot
52 Has trouble getting started on homework
(?)
54 Is satisfied with program of courses
55 Feels in good health
56 Feels different from others in undesirable ways
57 Would rather be home
58 Most interests are not related to course work
59 Is thinking about transferring to another college
60 Thinks a lot about dropping out of college permanently
61 Is thinking about taking time off from college
62 Is satisfied with professors
63 Has good friends to talk about problems with
64 Has trouble coping with college stress
65 Is satisfied with social life
66 Is satisfied with academic situation
(?)
Student Academic Stress Scale (SASS)
Auteur(s) : Busari (2011)
Échelle : (1) None of the Time
(2) A Little of the Time
(3) Some of the Time
(4) Most of the Time
(5) All of the Time
1 My work built up so much that I feel like crying
2 I feel emotional
3 My emotions stop me from studying
4 I yelled at family or friends
5 I feel emotionally drained by academic institution
6 I feel I was lazy when it came to academic work
7 I procrastinated on assignments
8 I am been distracted in class
9 I am unable to study as required
10 I have trouble concentrating in class
11 I try to avoid class if possible
12 I use alcohol or drugs to enable me study well
13 I have trouble remembering my notes
14 I couldn't breathe
15 I have difficulty eating
16 My hands are sweaty
17 I have had a lot of trouble sleeping
18 I have headaches
19 I feel overwhelmed by the demands of study
20 I feel worried about coping with my studies
21 There is so much going on that I can't think straight
22 I miss too many of my lectures
23 I don't enough time in studying
24 I am not really sure am interested in reading
25 At times am unable to express myself in words
26 I am afraid to speak or discuss in the lecture room
27 I feel academic programme is too cumbersome for me
28 I can't keep my mind on my studies
29 I have trouble studying effectively
30 A times I don't feel like studying
31 I feel am too slow in reading compared to others
32 I worried too much about marks to obtain in my examination
33 I feel am getting low marks
34 I would like to stop going to school
35 I have no stable place to study
36 I don't really like my course of study
37 I feel some textbooks are too hard for me to understand
38 I feel some lecturers are too hard for me to understand
39 I feel so much restless while receiving lectures
40 There are not enough good books in the library
41 Too much work is required in some courses
42 I feel am not getting along with some lecturers
43 I feel some lecturers lack interest in their students
44 Some courses are too dull and boring
45 Some lecturers are not friendly to students
46 I feel lecturers are not considerate of students' feelings
47 Some lecturers give unfair tests to students
48 I feel I have poor memory
49 I have trouble making up my mind about my academic work
50 I am too forgetful and easily discouraged about academic
work
Acculturative Stress Scale for International Students
(ASSIS)
Auteur(s) : Sandhu et Asrabadi (1994)
Échelle : (1) Strongly Disagree
(2)
(3) Not Sure
(4)
(5) Strongly Agree
1 Homesickness bothers me
2 I feel uncomfortable to adjust to new foods
3 I am treated differently in social situations
4 Others are sarcastic toward my cultural values
5 I feel nervous to communicate in English
6 I feel sad living in unfamiliar surroundings
7 I fear for my personal safety because of my different cultural
background
8 I feel intimidated to participate in social activities
9 Others are biased toward me
10 I feel guilty to leave my family and friends behind
11 Many opportunities are denied to me
12 I feel angry that my people are considered inferior here
13 Multiple pressures are placed upon me after migration
14 I feel angry that I receive unequal treatment
15 People show hatred toward me non-verbally
16 It hurts when people don't understand my cultural values
17 I am denied what I deserve
18 I frequently relocate for fear of others
19 I feel low because of my cultural background
20 Others don't appreciate my cultural values
21 I miss the people and country of my origin
22 I feel uncomfortable to adjust to new cultural values
23 I feel that my people are discriminated against
24 People show hatred toward me through actions
25 I feel that my status in this society is low due to my
cultural background
26 I am treated differently because of my race
27 I feel insecure here
28 I don't feel a sense of belonging here (community)
29 I am treated differently because of my colour
30 I feel sad to consider my people's problems
31 I generally keep a low profile due to fear
32 I feel some people don't associate with me because of my
ethnicity
33 People show hatred toward me verbally
34 I feel guilty that I am living a different lifestyle here
35 I feel sad leaving my relatives behind
36 I worry about my future for not being able to decide whether
to stay here, or go back
Bio-Psycho-Social Health Index (BPSHI)
Auteur(s) : Tonks et Paranjpe (1999)
Échelle : (1) Never
(2) Sometimes
(3) Always
1 Do you enjoy exercising?
2 Do you exercise regularly (2 times a week or more?)
3 Do you eat meals at regular times each day?
4 Are you concerned about eating only healthy foods?
5 Do you have trouble eating (too little or too much?)
6 Do you have problems getting to sleep?
7 Do you feel too tired to get up?
8 Do you feel tired throughout the day?
9 Do you think that you have plenty of energy to go about your
daily tasks?
10 Do you suffer from bad headaches?
11 Do you suffer from pain in any part of the body?
12 Do you socialise with people of your own race if given the
opportunity?
13 Do you feel shy when meeting new people?
14 Do you feel excluded from social activities?
15 Do you feel alone?
16 Do you feel it is important to maintain your cultural
identity?
17 Do you feel happy with the way your life is?
18 Do you ever wish that you could change your appearance?
19 Personality?
20 Race?
21 Do people irritate you and annoy you?
22 Do you get uncomfortable in unfamiliar places?
23 Do you feel depressed more often than not?
24 Do you find it difficult to talk to new people?
25 Do you discuss this feeling with someone of your own
race/ethnicity?
26 If you were to choose a best friend would it be someone of
your own race?
27 Do you go out with friends on a regular basis to the
cinema?
28 To nightclubs or bars?
29 To religious meetings?
30 To other gatherings? e.g.,
31 Do you participate in any team sports or activities on a
regular basis?
32 Do you get colds/flu on a regular basis?
33 Do you prefer your own company?
34 Do you feel that you are excluded on the basis of race
alone?
35 Do you discuss this feeling with someone in order to help
you?
36 (If so, what is their relationship to you?)
37 Do you find social activities in Canada different from those
you would be participating in at
home?
38 Do you ever wish that you were back in your home country?
Brief COPE
Auteur(s) : Carver, Scheier et Weintraub (1989)
Échelle : (1) I haven't been doing this at all
(2) I've been doing this a little bit
(3) I've been doing this a medium amount
(4) I've been doing this a lot
1 I've been turning to work or other activities to take my mind
off things
2 I've been concentrating my efforts on doing something about the
situation I'm in
3 I've been saying to myself "this isn't real"
4 I've been using alcohol or other drugs to make myself feel
better
5 I've been getting emotional support from others
6 I've been giving up trying to deal with it
7 I've been taking action to try to make the situation better
8 I've been refusing to believe that it has happened
9 I've been saying things to let my unpleasant feelings escape
10 I've been getting help and advice from other people
11 I've been using alcohol or other drugs to help me get through
it
12 I've been trying to see it in a different light, to make it
seem more positive
13 I've been criticizing myself
14 I've been trying to come up with a strategy about what to
do
15 I've been getting comfort and understanding from someone
16 I've been giving up the attempt to cope
17 I've been looking for something good in what is happening
18 I've been making jokes about it
19 I've been doing something to think about it less, such as
going to movies, watching TV,
reading, daydreaming, sleeping, or shopping
20 I've been accepting the reality of the fact that it has
happened
21 I've been expressing my negative feelings
22 I've been trying to find comfort in my religion or spiritual
beliefs
23 I've been trying to get advice or help from other people about
what to do
24 I've been learning to live with it
25 I've been thinking hard about what steps to take
26 I've been blaming myself for things that happened
27 I've been praying or meditating
28 I've been making fun of the situation
Brief COPE - traduction
Auteur(s) : Muller et Spitz (2003)
Échelle : (1) Pas du tout
(2) Un petit peu
(3) Beaucoup
(4) Tout à fait
1 Je me tourne vers le travail ou d'autres activités pour
me changer les idées
2 Je détermine une ligne d'action et je la suis
3 Je me dis que ce n'est pas réel
4 Je consomme de l'alcool ou d'autres substances pour me sentir
mieux
5 Je recherche un soutien émotionnel de la part des
autres
6 Je renonce à essayer de résoudre la situation
7 J'essaie de trouver du réconfort dans ma religion ou
dans des croyances spirituelles
8 J'accepte la réalité de ma nouvelle situation
9 J'évacue mes sentiments déplaisants en en
parlant
10 Je recherche l'aide et le conseil d'autres personnes
11 J'essaie de voir la situation sous un jour plus positif
12 Je me critique
13 J'essaie d'élaborer une stratégie à
propos de ce qu'il y a à faire
14 Je recherche le soutien et la compréhension de
quelqu'un
15 J'abandonne l'espoir de faire face
16 Je prends la situation avec humour
17 Je fais quelque chose pour moins y penser (comme aller au
cinéma, regarder la TV, lire,
rêver tout éveillé, dormir ou faire les
magasins)
18 J'exprime mes sentiments négatifs
19 J'essaie d'avoir des conseils ou de l'aide d'autres personnes
à propos de ce qu'il faut faire
20 Je concentre mes efforts pour résoudre la situation
21 Je refuse de croire que ça m'arrive
22 Je consomme de l'alcool ou d'autres substances pour m'aider
à traverser la situation
23 J'apprends à vivre dans ma nouvelle situation
24 Je planifie les étapes à suivre
25 Je me reproche les choses qui m'arrivent
26 Je recherche les aspects positifs dans ce qu'il m'arrive
27 Je prie ou médite
28 Je m'amuse de la situation
Annexe 3 : retranscription des entretiens
Entretien avec P (89 minutes)
Tibo
Alors pour commencer je voudrais savoir comment tu en es
arrivée à partir au Brésil, comment ça s'est
passé?
P
Euh, alors moi, comme je t'ai dit, je suis pas de Lyon
à la base mais je suis revenue vivre à Lyon en fait cette
année en septembre là pour le Master en fait, le Master 1, euh,
bon j'ai mes parents dans la région aussi, euh, après ce qui
s'est passé tout simplement c'est qu'on était en cours quoi, Mme
X, donc la femme de M. Y euh, nous a proposé des stages au Brésil
quoi, d'office. Enfin le premier jour de cours avec elle limite tu vois genre
« bon bin voilà je suis brésilienne donc si vous voulez des
stages pas de soucis » et moi à l'époque en fait mon copain
était brésilien et j'étais jamais allée au
Brésil donc ça faisait deux occasions en une tu vois, parce que
bon évidemment je voulais aller au Brésil et de l'autre
côté euh ça me donnait l'occasion d'avoir une
expérience professionnelle làbas si tu veux, enfin,
professionnelle, juste en stage, de connaître le pays différemment
que par les vacances tu vois. Donc j'ai tout de suite sauté sur
l'occasion évidemment et, enfin pour moi l'argument était
professionnel tu vois ce que je veux dire, euh donc voilà,
c'était mes motivations.
Tibo
Ok. Donc ce désir t'es venu cette année ou tu y
pensais déjà avant?
P
Ouais ouais ça fait déjà un moment ouais.
Ça fait, je connais beaucoup de Brésiliens, bin j'ai
rencontré beaucoup de Brésiliens en Italie en fait, quand j'y ai
vécu l'année dernière, et puis ça fait un certain
temps que je connaissais déjà des Brésiliens ici en France
aussi donc ouais.
Tibo
Et finalement qu'est-ce qui t'as décidé à
partir, quand tu t'es dit « ça y est j'y vais »? Rapidement?
T'as pris un peu de temps pour réfléchir?
P
Mmh non en fait j'ai pas trop réfléchi. Enfin,
donc quand Mme X nous a présenté [les stages au
Brésil]
du coup je suis allée la voir tout de suite à la fin du cours et
je lui ai dit enfin « voilà je suis
intéressée » donc ça c'était
en septembre, et en gros, déjà je pense en novembre, ça
s'est fait assez vite, y a peut-être eu un mois de battement, je me
souviens plus exactement des dates, y a eu un mois de battement où on
savait pas trop qu'est-ce qui se passait tu vois. Parce que ce qu'y s'est
passé c'est qu'elle elle nous a proposé tout de suite d'office tu
vois le jour même donc C elle-même a dit « voilà moi
aussi ça m'intéresse et tout » donc on pouvait aller si tu
veux ensemble au même endroit, faire un projet. Enfin moi
honnêtement j'avais vraiment envie de faire un truc toute seule, parce
que euh, en fait ce qu'il y a de marrant c'est que sur place après j'ai
beaucoup aimé être en contact avec des Français tu vois, je
connaissais des Erasmus comme j'étais pas loin de la fac j'étais
en contact avec la fac tu sais, donc je les voyais assez souvent en fait, je
suis allée à une fête Erasmus avec eux enfin tu vois j'ai
aussi eu ce côté un peu même en même pas deux mois -
c'était deux mois quand même, le côté Erasmus de
connaître des Français sur place et ça m'a beaucoup
aidé aussi tu vois de - mais ça je pourrai en parler après
peut-être aussi, mais à la base c'était plus ça en
fait tu vois, c'est pas que je l'aimais pas [C] c'est juste que j'avais envie
de faire mon truc toute seule tu vois. Donc je pense que j'y ai fait un peu
comprendre et elle Mme X, d'office comme elle est de Recife elle proposait
Recife tu vois parce qu'elle connait des gens là-bas et tout sauf que
moi ça me disait pas trop en fait d'aller dans la structure qu'elle
proposait tu vois parce que - dont C te parlera demain, euh notamment pour tout
l'aspect spirituel en fait du stage tout ça, c'est pas une
hostilité ou quoi par exemple moi je vais à l'église, je
vais dans une église évangélique, une église
baptiste, et c'est quelque chose de très important dans ma vie tu vois,
ma foi, et là j'allais me retrouver dans un endroit avec des personnes,
t'en a qui faisaient des transes, tu vois qui, enfin une autre
spiritualité en fait, et je me suis dit « ouais non c'est pas on
truc » tu vois, en gros. Mais j'allais pas le dire à Mme X
ça tu vois enfin honnêtement tu peux pas dire ça, donc
j'étais prête à lui dire si tu veux « bin
écoutez... » je m'étais un peu résignée si tu
veux parce que bon si je refuse son stage c'est mort quoi et donc
j'étais un peu résignée et j'arrive le mardi
d'après et d'office j'ai rien eu le temps de dire elle me sort « ah
bin écoute, j'ai pensé à toi cette semaine et j'ai
trouvé un stage parfait pour toi ». J'ai rien eu le temps de dire,
et elle m'a parlé du sud où je suis allée donc et
là elle m'a dit - qu'est-ce qu'elle m'a dit déjà, oui bon
voilà « en gros comme tu es intéressée par tout ce
qui est problématique de transmission, d'immigrés, les Italiens
en plus, voilà tu connais bien l'Italie tout ça, y a cette
région donc dans le sud du Brésil qui, où tu peux, la
plupart des personnes dans une des villes, dans une région en fait mais
dans une ville où tu vas, sont des descendants d'Italiens notamment donc
tu peux faire une étude avec eux enfin donc bref en gros un truc comme
ça donc j'étais là super j'étais enthousiaste,
enfin j'ai rien demandé enfin tu vois elle me l'a présenté
sur un plateau quoi et de là, donc ça ça devait être
quoi, fin octobre un truc comme ça, donc bin après de là
jusqu'à février on a, petit à petit on a organisé
quoi mais ça s'est décidé dès ce moment là
en fait, dès
qu'elle m'a dit « c'est bon j'ai trouvé un truc pour
toi » et que bon enfin voilà.
Tibo
D'accord. Et ça a été facile de discuter
avec les gens là-bas, enfin le processus administratif, etc.?
P
Au Brésil ou ici?
Tibo
Entre les deux si tu veux, la convention et tout ça.
P
Bin en fait si tu veux (rire), le stage ça s'est fait
un peu à l'arrache en fait parce que du coup elle connaissait quelqu'un
dans l'université, le vice-président de l'université
là-bas, mais pour mon stage le stage officiellement si tu veux il est
avec la fac sauf que bon, comme je suis en psycho, j'ai pas fait un stage
à la fac tu vois donc après, en fait eux sont venus en France
à un moment donné donc j'ai pu discuter avec la femme du gars et
en fait elle elle est maîtresse donc j'ai pu faire un stage dans son
école mais ça ça s'est un peu organisé en biais tu
vois c'était pas genre, voilà trouver le stage tu vois, alors que
pour les autres filles, les deux autres filles qui sont parties à
Recife, elles avaient déjà des structures avant de partir tu vois
et bin en fait j'avais voulu aller à Recife au début dans une
structure YMCA et en fait au début Mme X m'avait dit « non c'est
pas bien d'y aller en Master 1 parce que t'y vas pas longtemps, t'y vas que un
mois et demi/ deux mois, ça vaut la peine d'y aller au moins trois mois
tu vois, au moins, voilà, du coup elle m'avait dit non pour ça
mais j'y serais bien allée sinon tu vois, je serais bien allée
à Recife, c'était pas une question d'endroit ou quoi,
voilà, c'était juste...
Tibo
Je comprends bien effectivement. Et du coup est-ce que tu peux me
parler de ta structure, ce que tu faisais, tes collègues, tes
élèves, le cadre un petit peu, qu'est-ce que c'était en
fait?
P
En gros j'étais dans une école publique
là-bas et j'avais pas forcément un rôle de psychologue
tu
vois dans la structure, y avait une psychologue qui venait une fois
toutes les deux semaines mais on
s'est jamais croisé, on s'est
croisé vers la fin, et puis même de toute façon ça
aurait été compliqué de
travailler avec elle tu vois parce qu'elle faisait des
entretiens avec les parents, avec les enfants, et apparemment c'était un
truc, enfin, comme elle était pas là souvent de toute
façon ça aurait été dur de faire que ça de
toute façon quoi, fallait que je fasse un stage plein temps quoi, donc
moi j'étais en stage en observation dans les classes, j'ai fait aussi en
gros j'étais quoi, y avait un groupe de soutien en fait pour les
élèves en difficulté, un cours d'alphabétisation,
un cours de progression y appellent ça, c'est une prof en fait qui est
dédiée à ça et qui sous forme de jeu aussi, des
jeux pédagogiques ou n'importe, donc apporte un enseignement mais qui
est différent de celui que tu trouves dans la classe en fait. Euh, il y
a une psychopédagogue dans l'école une fois par semaine qui vient
donc je passais tous les jeudis avec elle et là c'est plus un travail tu
vois qu'elle fait par rapport à l'autoestime des enfants enfin
voilà.
Tibo
Je vois. Et ça se passait bien les relations avec ces gens
là, tes collègues, les élèves, le courant passait
bien?
P
Ouais, non non ça passait bien, y a juste des fois tu
sais avec les enfants c'était un peu compliqué au début
parce que par exemple si je parlais pas forcément bien le portugais
quand même, je le parlais un petit peu avant quand même, j'avais
des bases, mais enfin j'ai appris un peu sur le tas là-bas tu vois, donc
ouais au début t'es un peu dans une position ambiguë parce que
c'est dur de te faire respecter peut-être comme adulte parce que y voient
que, surtout que c'est des enfants en général, comme ils viennent
d'un milieu assez défavorisé qui n'avaient jamais vu
d'étrangers si tu veux des fois donc t'es un peu l'extraterrestre, et en
plus tu parles pas forcément bien leur langue, donc au début
j'avais un peu cette position bancale mais en même temps c'était
un atout aussi ça permettait tu vois de, surtout dans des cas de
difficulté d'apprentissage, enfin des enfants qui avaient des
problèmes d'apprentissage ou quoi, bin d'être t'es le professeur,
enfin l'éducateur plutôt, mais en même temps toi aussi t'es
en train d'apprendre tu vois, t'as un peu une position comme ça qui te
permet de pivoter enfin donc c'est, non c'était bien.
Tibo
Du coup c'était une chance d'avoir ces enfants, ne
serait-ce que pour la langue, pour la culture, ça a du t'aider non?
P
Ouais bin m'aider...bin après ouais c'était
enrichissant quoi c'est sûr de voir le système, et puis j'ai pu
aller dans d'autres écoles aussi après parce qu'en connaissant
les profs là-bas parce qu'elles travaillent jamais dans une seule
école en fait, ça marche par demi-journée, euh enfin en
gros ouais j'ai pu visiter d'autres écoles, j'ai même pu visiter
une école privée aussi, j'ai pas été en stage
là-bas mais je l'ai visitée quoi et c'est un contexte totalement
différent déjà, ouais tu vois beaucoup de la culture d'un
pays par l'École aussi quoi tu vois, l'éducation, non
honnêtement deux mois j'ai vraiment, j'ai découvert plein de
choses par rapport au Brésil quoi tu vois, de l'intérieur du
Brésil quoi, et par rapport à une seule région bien
sûr parce que c'est très très divers.
Tibo
Justement, est-ce que tu peux me parler un peu de ta
région, parce que moi je connais pas très bien le Brésil
tu vois parce qu'il y a plein de régions très différentes,
au niveau enfin climat, n'importe quoi, tout, t'étais où toi
exactement?
P
Ouais, alors moi j'étais dans le Rio Grande do Sul,
Caxias, c'est la région tout au sud, la dernière région du
Brésil avant, t'as l'Argentine en bas, sur le côté je crois
c'est le Paraguay enfin je sais plus, y a l'Uruguay d'un côté le
Paraguay de l'autre, et en gros c'est une région assez unique au
Brésil, parce que ils ont une culture en commun justement avec ces pays
là, c'est une culture donc les gauchos, donc c'est un peu les cowboys
latins tu vois, ils ont le lasso, le cheval et tout ça quoi.
Tibo
Oui, le lasso avec les boules accrochées c'est
ça?
P
Je sais pas ça. En fait j'en ai jamais vu en vrai, j'ai
eu l'occasion d'aller dans un centre de tradition mais j'ai pas vu les trucs de
lasso. Je sais pas, mais c'est possible ouais. Après y ont une boisson
tu sais y bois le chimarin [retranscription phonétique], le maté
qu'ils boivent en Argentine tout ça quoi. Ils ont des traditions
communes avec ces pays là, ils ont, je pense que certaines personnes
s'identifient même plus à ces gens là tu vois que aux
Brésiliens, et notamment les descendants d'Européens, parce qu'il
y a une immigration allemande, italienne et polonaise dans la région
très forte et du coup la plupart sont descendants d'Européens,
bon après maintenant t'as un brassage comme partout dans le
Brésil, y a aussi des origines de partout comme ailleurs dans le
Brésil mais
t'as quand même un certain attachement encore, un petit
peu encore, dans les jeunes générations beaucoup moins, mais les
personnes âgées encore d'aujourd'hui tu vois y revendiquent quand
même bien, tu vois y sont pas, enfin y ont un attachement au
Brésil mais bon, généralement parlant hein, je
généralise là, mais le Brésil du nord c'est
différent pour eux tu vois, et puis ouais d'un côté c'est
très différent tu vois parce que j'ai pas pu aller du coup
à Bahia, Recife tout ça parce que c'est vraiment très loin
mais ouais le Nordeste du Brésil c'est autre chose quoi, y a beaucoup
plus l'africanité tu vois, il y a une influence africaine, j'ai pu
aller, je suis allée à São Paulo et à Rio aussi, et
bin là aussi c'est différent tu vois, bon je dirais qu'il y a
plus de points communs avec São Paulo parce que c'est une ville assez
moderne puis je suis pas restée longtemps mais euh enfin tu as beaucoup
de spécificités locales en fait enfin c'est vraiment un pays
énorme en fait donc c'est difficile de dire « c'est comme ça
» enfin tu vas à un endroit et tu as ta petite
réalité locale mais bien sûr t'as des choses qui se
retrouvent et t'as une grosse influence de la culture américaine aussi,
nord-américaine, et euh les personnes ont quand même dans leur
majorité le sentiment d'être brésiliens mais voilà,
un espèce de patriotisme commun, donc ouais.
Tibo
Et toi justement ta réalité locale, c'était
comment là où tu vivais?
P
Euh ouais alors c'était une grande ville,
c'était une ville assez récente, qui a cent trente ans,
c'était une ville assez grande quand même, c'est une ville en
pleine expansion en plus, très industrielle, la capitale de la
région c'est Porto Alegre, qui est déjà beaucoup plus
grande donc c'est pas aussi grand que la capitale de l'état mais
c'était quand même une ville - comment je peux comparer avec la
France, par exemple c'est plus petit que Lyon mais c'est plus grand qu'Avignon
par exemple, c'est plus grand que Montpellier aussi, enfin c'était quand
même une grande ville quoi mais ce qui est intéressant c'est que
c'est une ville enfin c'est un peu comme Montpellier tu vois, quand tu sors
t'es tout de suite dans la campagne en fait. Et c'est ça qui est assez
impressionnant aussi, c'est que tu as donc l'interio ils appellent ça,
donc l'intérieur, l'arrière pays quoi, avec une
végétation différente hein parce que c'est tropical, et
euh, c'est pas que tropical, mais euh c'est différent d'ici de toute
façon, et, comment dire, t'as ces petits villages tout de suite quand tu
sors en fait, quand tu sors tu commences à être dans des villes
beaucoup plus petites et plus tu t'enfonces, je suis allée une fois
dormir dans un village, enfin c'est plutôt une petite ville, et c'est une
ville rurale si tu veux, ça fait un peu Far West tu vois, Far West
version brésilienne quoi et c'était hyper désorientant.
Tibo
Tu sens vraiment donc une différence entre ces deux
mondes?
P
Ah ouais t'es perdu, en fait je suis montée dans, enfin
il y a le point le plus haut de la ville, bon elle m'a fait monter le point le
plus haut de la ville pour que je puisse tout voir et tout, et tu vois des
forêts de pins, c'est un pin typique de la région, et tu as des
forêts forêts à perte de vue de pins, et tu vois pas la
prochaine ville quoi, t'as juste la ville là et les pins à vue
d'oeil, et c'est dingue quoi t'es vraiment isolée, et cette fille elle
va à la fac tous les jours tu vois donc elle se tape quatre heures de
bus par jour tu vois, deux heures pour y aller deux heures pour le retour, et
c'est des routes de terre à certains moments, donc y a même pas
des vraies routes tu vois c'est vraiment la campagne, en même temps c'est
une ville, ils sont auto-suffisants, ils sont fiers d'être là, les
jeunes ils veulent être là, c'est pas comme ici quoi, voilà
ils sont très attachés à leur ville, ils ont des modes de
fonctionnement encore très ruraux quoi, enfin pour moi en tout cas tu
vois, par exemple ils avaient de la viande et ils étaient en train de
préparer la viande dans une petite cabane à côté de
la maison, ils étaient en train de la faire sécher sur un fil de
fer enfin tu vois, il y a des chiens errants partout tu vois y a des petits
trucs comme ça que j'avais jamais vraiment vu en fait enfin comment dire
t'as un ressenti de la ville complètement différent quoi, j'avais
jamais vu ça, alors que je connais la campagne en France, ouais non
c'était à faire franchement.
Tibo
D'accord. Et quand tu t'es retrouvée au Brésil donc
qu'est-ce qui s'est passé, où est-ce que t'as logé, qui
t'as accueilli, comment se sont passés les premiers instants disons?
P
Ouais, en fait du coup c'est mon référent de
stage, en fait j'avais plusieurs référents de stage, j'avais donc
le référent c'était le président et après
c'est ma coordinatrice qui était pédagogue en fait à la
fac, une prof, parce que j'avais un cours à la fac avec elle pour genre
analyse de stage un peu tu vois donc j'étais logée chez lui au
début, les huit premiers jours et après j'ai trouvé mon
logement toute seule en fait parce que eux ils avaient pas vraiment de place
donc il y avait pas moyen de me loger tout le long et j'avais logé chez
une étudiante que j'avais connu par le biais d'une copine à moi
qui est brésilienne justement, qui vivait en France, elle est en
Angleterre maintenant, elle c'était une ancienne coloc à elle et
voilà, je lui ai demandé si elle connaissait des gens, elle a dit
« oui je connais cette fille », elle l'a contactée et en fait
elle avait pas de place chez elle vraiment mais j'ai
dormi dans son salon donc bon c'était un peu
improvisé mais en même temps y me restait quoi, y me restait un
mois tu vois donc, et puis certains weekends, en général le
weekend j'étais quand même là, parce que je faisais mes
entretiens le weekend, mais y a quand même un weekend où j'ai pu
voyager, et le dernier weekend j'étais pas là ; j'étais
partie quoi donc en fait bon ça faisait un mois et je me suis dit bon
bin c'est bon, je tiens le coup tu vois, c'est un mois dans un salon à
survivre, bon y avait quand même des désavantages que, c'est pas
le fait de pas avoir d'intimité c'est le fait que voilà je
faisais mon mémoire, que du coup j'avais pas forcément le
silence, je pouvais pas me poser dans un endroit pour travailler tu vois donc
ça c'est vrai que ça m'a peut-être un peu
pénalisé pour travailler, mais après en fait
c'était mieux quelque part parce que, d'être là je veux
dire, là où j'étais, parce que j'avais plus ma vie. Parce
que ce qui se passait dans la famille d'avant c'est que y vivaient un peu
excentrés, y faisaient toujours en voiture, y avait pas de transport
pour aller là-bas, du coup j'étais vachement dépendante
d'eux tu vois, donc tu compares ça à ta vie d'ici tu te sens un
peu étouffée en fait parce que t'es protégée, y a
une protection que ici on a pas tu vois, des réflexes de
sécurité, et c'est juste leur mode de vie en fait, c'est normal
pour eux, mais pour moi du coup c'était un peu bizarre tu vois.
Tibo
Qu'est-ce que tu veux dire par « protégée
»?
P
Bin, comment dire, tu vas pas rentrer à pied quoi,
ouais, y prennent toujours la voiture. Après c'est peut-être
culturel, mais bon j'ai senti que c'était plus un truc de
sécurité tu vois, de toujours, surtout le soir, surtout le soir.
Le soir pour te dire, y a un soir en fait avec une Française on
était allé se balader comme ça parce qu'on cherchait un
bar assez connu apparemment, un truc sympa, et on s'est perdu. On avait une
carte et tout, on s'est retrouvé dans des, à côté du
centre ville vraiment la place centrale et tout, on s'est retrouvé dans
des quartiers écoute, c'était huit heures du soir mais glauque
quoi, y avait personne dans les rues, alors que c'est habité hein c'est
des maisons voilà, personne dans les rues, une petite voiture qui passe
de temps en temps mais vraiment le truc vraiment glauque, du coup on est
arrivé à une espèce de station d'essence avec un Pizza Hut
et c'était trop bizarre j'ai jamais senti ça, on a vraiment
ressenti une insécurité tu vois, de se dire « ok on peut pas
aller marcher plus loin et revenir sur nos pas, on peut pas revenir sur nos
pas, on va pas continuer plus loin ça a l'air dangereux », tu vois
des personnes un peu louches qui trainent enfin, en France honnêtement
ça me pose aucun souci, mais là-bas, y savent que t'es
étranger quand même, tu le vois, en plus on parlait
français entre nous, t'as aussi un truc à te dire : la personne
elle peut être
armée, y ont un gros problème là-bas avec
la drogue en fait, avec les drogués qui agressent les gens dans la rue
pour avoir de l'argent, qui ont besoin de drogue en fait, donc il y a pas mal
de cas de gens qui se font tuer dans la rue par des personnes en manque quoi.
Donc si tu veux c'est pas des choses à quoi je pense ici, tu vois je me
promène dans la rue à trois heures du mat c'est pas un souci -
bon je le fais pas souvent mais ça m'arrive, et là-bas,
même, dès que la nuit est tombée en fait, tu vas penser
tout de suite différemment, tu vas te dire, ça m'est
arrivé de rentrer à pied quand j'avais besoin vraiment mais la
plupart du temps les gens chez qui j'étais me ramenaient tu vois, ils te
ramènent, ils te laissent pas tout seul et donc je finis juste avec
cette fille là, en fait on s'est dit « bin c'est bon on prend la
pizza là et après on appelle un taxi » et n'importe quel
restaurant ou n'importe où où tu es tu demandes d'appeler un taxi
ils le font quoi tu vois, parce que s'ils te voient tout seul ou y voient que
t'as pas de voiture enfin c'est pas un souci quoi t'appelles. C'est normal en
fait c'est normal là-bas. Et ouais, ça déjà c'est
un truc y faut s'y habituer quoi parce que pff ici j'appelle jamais de taxi
quoi, ça me viendrait jamais à l'idée d'appeler un taxi tu
vois, je sais même pas comment on fait même.
Tibo
Oui c'est vrai, c'est souvent à l'étranger qu'on
appelle les taxis alors qu'en France on le fait pas, c'est assez amusant
d'ailleurs. Et dis moi, comment tu t'y est pris pour créer des liens,
pour rencontrer des gens, nouer des relations?
P
Bin en fait je connaissais déjà des gens avant
parce que bon j'avais le contact de cette fille, après bon j'avais mon
coordinateur déjà que je connaissais, que j'avais
rencontré ici aussi donc enfin je suis arrivée, aux relations
internationales si tu veux, y avait un peu des étudiants qui attendaient
aussi si tu veux donc j'ai déjà rencontré quelques
étudiants là, j'avais un gars en Erasmus que j'avais
contacté avant d'y aller donc quand je suis arrivée aussi
après je l'ai vu puis après c'était mon stage, j'ai
rencontré beaucoup de gens en stage, j'ai rencontré quoi, ouais,
c'était, je sais pas où j'ai rencontré le plus de gens,
mais en fait j'avais déjà des personnes clés un peu
dès le début euh ouais, ça s'est fait tout seul
après quoi. Ça m'a quand même bien mis une semaine à
commencer mes entretiens par exemple parce que j'ai bien mis une ou deux
semaines à faire bien mes contacts aussi, tu vois les gens que je
rencontre, je travaille avec eux, souvent c'était des collègues
en fait, par le biais des collègues qui connaissaient des gens ou quoi
je me retrouvais dans une famille et ça a mis un peu de temps à
faire les contacts surtout que les gens ne sont pas libres en semaine donc
c'est que les weekends donc les weekends c'était que ça quoi.
Tibo
Et donc c'était facile de t'intégrer finalement
quoi?
P
Ouais, j'ai pas trouvé ça compliqué,
après pour moi ce qui était plus difficile c'était le mode
de vie tu vois, parce qu'y ont un mode de vie, par exemple la fille chez qui je
vivais bon elle avait deux colocs, elle travaillait à des horaires pas
possibles alors elle bin souvent tu sais la plupart des gens travaillent si ils
vont dans une école, attends, les facs publiques sont gratuites
quasiment mais si tu n'as pas été pris dans la fac publique tu
paies, c'est très cher la fac, la plupart des gens travaillent en fait
pendant la journée et vont à la fac le soir très tard et
du coup ils vont avoir une journée de travail normale et ils vont aller
à la fac de sept à dix-onze heures du soir tu vois et
après s'il suffit qu'y est un soir où tu veux faire une
activité, je sais pas moi, de la danse ou quoi, en gros tu te retrouves
avec la semaine vraiment blindée quoi donc cette fille avec qui je
vivais je la voyais quasiment jamais en fait, je la voyais que le soir ou les
weekends des fois parce que elle avait un emploi du temps de malade quoi, je
veux dire même moi qui travaillais beaucoup je trouve, je travaillais
moins qu'elle quoi je veux dire elle avait des horaires de fou et ses colocs
c'était pareil, donc on se voyait qu'en coup de vent tu vois et
ça j'ai trouvé ça très bizarre au début
parce que c'est pas du tout la même vie étudiante qu'ici. Moi
ça me posait pas trop problème parce que je travaillais la
journée en stage, mais je sais que y a une étudiante Erasmus par
exemple pour elle c'était dur tu vois, parce qu'elle est arrivée
et la journée elle avait rien à faire, parce que les cours
étaient le soir, et elle comme elle avait pas de travail elle se
retrouvait les premiers jours à se dire « bon bin qu'estce que je
fais quoi? ». Donc c'est un rythme de vie différent, la valeur de
la famille est très importante, donc les gens, bin par exemple, la fille
chez qui je vivais, c'est pas habituel ce qu'y font eux tu vois, parce que
normalement les gens vivent chez la famille normalement, donc c'est très
rare.
Tibo
Famille élargie tu veux dire?
P
Non juste les parents mais ils vont rester chez les parents,
c'est très rare d'aller en coloc comme ça, d'ailleurs quand je le
disais aux personnes que je rencontrais c'était « ah bon elle vie
en coloc mais c'est bizarre », c'est vraiment pas habituel, après
tu peux le comprendre aussi parce qu'avec ce rythme de vie là t'as pas
trop le temps de prendre soin de toi enfin tu vois, si y faut que tu fasses
le
ménage dans l'appart t'as vraiment pas le temps de le
faire, elle avait, après la famille ouais, c'est vrai y ont tendance
à habiter, pas tout le monde hein, pas tout le monde, pas toutes les
personnes que j'ai vu, mais moins avec la famille proche donc parents
frères et soeurs mais tu as aussi des liens avec les tantes, cousins tu
vois. C'est, c'est important tu vois, moi ce que j'ai pu remarquer tu vois
c'est que les personnes elles passent tellement de temps au travail, tellement
de temps avec leur famille, en fait quelque part tes amis ça devient tes
collègues tu vois, en fait c'est très normal que tes amis soient
tes collègues, sauf si par exemple tu es chrétien et tu vas
à l'église, là tu connais d'autres gens, enfin si tu fais
une activité sportive ou tu vois, mais en général ce que
j'ai pu observer les personnes ont leur famille et leurs collègues et
c'est ça quoi et si y font une fête y vont inviter les
collègues tu vois et moi j'ai trouvé ça très
bizarre personnellement parce que pour moi dans l'éducation que j'ai eu
tes collègues c'est tes collègues enfin c'est genre ton travail,
tu laisses ça de côté et ton temps libre c'est avec tes
amis tu vois, d'autres personnes. Et ça au début j'ai
trouvé ça très bizarre et aussi très ambigu en fait
parce que tu coup tu peux pas, enfin pour moi d'après mes valeurs, tu
peux pas être ami avec quelqu'un avec qui tu as des enjeux financiers,
enfin des enjeux comme ça tu vois de travail, mais pour eux c'est normal
voilà.
Tibo
Ok. Et donc en parlant, en lisant tes réponses aux
questionnaires, on voit que tout de suite au Brésil tu t'es sentie bien
dès le début, est-ce qu'il y a quelque chose de particulier? Un
état d'esprit peutêtre je sais pas?
P
Ouais bin en fait déjà comme c'est un continent
différent, bon alors moi déjà je suis allée au
Brésil en me disant « ça va être pas trop
différent » tu vois, parce que comme je connaissais
déjà plein de Brésiliens ouais je m'étais dit
« c'est très moderne » j'avais en tête que il y avait de
la pauvreté mais je m'étais dit que j'allais pas être trop
choquée tu vois et aussi bon je pense tu vois que j'avais la pression de
me dire, c'est moi-même qui me la suis mise mais de me dire « ok,
est-ce que je me vois habiter là-bas? » tu vois et du coup en
arrivant c'est vrai que peut-être les deux premiers jours, parce que
ouais les premiers jours j'étais chez mon copain, c'était ouais
c'était un peu intense parce que je suis débarquée
là et j'avais l'impression d'être dans un documentaire sur
l'Amérique Latine tu vois honnêtement hein, j'avais jamais
été là-bas et d'y être c'est une autre chose tu
vois, c'est même pas le fait de la langue ou quoi tu vois parce que j'ai
déjà connu tu vois, j'ai déjà été au
Portugal aussi avant, c'est pas que la langue, c'est l'environnement quoi, les
mesures de sécurité comme je te parlais, les maisons elles ont
toutes le grillage devant enfin, juste la façon de vivre quoi et au
début
ça m'a quand même fait un petit choc ouais le
premier jour ouais ouais. Bon après je m'y suis fait vite hein j'ai pas
eu trop de mal à m'adapter, après c'est juste que sur une
perspective à long terme je me suis posée la question
honnêtement « est-ce que je me vois vraiment vivre là toute
ma vie quoi? » et ouais j'ai pas forcément encore de réponse
à cette question enfin je pense qu'y faudrait y retourner plus longtemps
tu vois pour mieux connaître, après moi enfin comme t'as pu voir
dans mon parcours identitaire dans le fond moi je me sens quand même bien
française tu vois, parce qu'il faut te sentir appartenir quelque part,
t'as besoin de sentir que t'appartiens quelque part, même si tu veux
habiter n'importe où, même si t'aimes pas où t'habites, tu
n'aimes pas d'où tu es, j'en sais rien, enfin t'as besoin de savoir
d'où tu viens quoi et pour moi je peux dire tout ce que je veux sur la
France mais n'empêche que j'ai vécu là, toute ma vie
quasiment, et c'est vrai que mes origines ne sont pas là, enfin bref,
tout n'est pas là, mais en même temps c'est un peu ma base quoi,
et je me suis rendue compte aussi en allant là-bas que quoi qu'il arrive
je voudrais pouvoir revenir en France tu vois, je me vois pas forcément
rester ici toute ma vie, mais en même temps je veux pouvoir revenir, donc
c'est toute la question aussi de bin voilà, si tu vas là-bas et
que tu te marries avec quelqu'un làbas et que tu fais ta vie
là-bas, est-ce que tu peux revenir en France tu vois? Donc il y a toute,
tu vois c'est un questionnement aussi, un cheminement de bon qu'est-ce que tu
veux pour ta vie plus tard, et ça ça a beaucoup influencé
sur mon adaptation là-bas en fait. Bon après j'ai fait
abstraction tu vois de projets futurs ou quoi parce que cette expérience
là je la vis tu vois mais c'était toujours dans le fond quoi, en
arrière plan et je pense que du coup bin ça a peut-être mis
un peu de pression tu vois, une certaine pression, mais en même temps
elle a été bien gérée parce que bin ça s'est
bien passé quoi.
Tibo
Je vois. Pendant que tu étais là-bas, est-ce que
ton image de la France elle a un petit peu changé, est-ce que tu as
remarqué des choses que tu remarquais peut-être pas avant, est-ce
que tu as pu te distancier et regarder en arrière et te dire « ah
oui tiens c'est différent » par rapport à ce que « nous
», Français disons, on fait et eux comment ils s'organisent
peut-être je sais pas?
P
Euh oui bin oui c'est très différent en fait,
mais le truc que moi j'ai trouvé le plus dur en fait c'est le regard
qu'y ont en fait sur les Européens et sur les Français notamment
parce que bon y a pas à dire, c'est un pays ex-colonisé et nous
on était colonisateur en fait, enfin la France, les Français
étaient colonisateurs, même si je l'étais pas
personnellement (rire), mais y a quand même ça qui reste
honnêtement ça pèse encore et tu le vois dans leur
représentation des gens, dès que tu dis que t'es
française « ouah trop chic » tu vois enfin
bon ils ont des représentations du genre, ils ont des clichés du
genre, ouais on se lave pas tous les jours et honnêtement ils le pensent
sérieusement quand ils te posent la question c'est pas qu'ils rigolent
ils te posent vraiment la question donc ça c'est assez intense,
après ils ont des trucs du genre on mange à table avec cinq
couverts tous les jours ou genre des trucs tu vois l'entrée, le nana, le
dessert enfin tu vois ils ont ce truc tu vois de vraiment on est chics on est
élégant tu vois ils ont vraiment les stéréotypes
comme ça sur la France qui sont tellement pas vrais pour la plupart des
Français aujourd'hui, c'était peut-être vrai dans le
passé et ça l'est peut-être encore pour une petite
minorité de gens. Y ont les stéréotypes tu vois que tout
ce qui est français c'est de la bonne qualité tu vois, y vont se
ruiner à acheter des produits de marque genre Loréal ou
Lancôme ou j'en sais rien des trucs que nous-même on achète
même pas, parce ce qu'on veut chercher moins cher tu vois, mais pour eux
c'est français donc c'est bien et y vont dépenser l'argent pour
l'acheter, parce que c'est de la qualité tu vois. Et y pensent que nous
on fait pareil, y pensent que y vont acheter quatorze parfums, y vont alors le
parfum c'est un truc, le parfum français a une telle réputation y
vont acheter je sais pas combien de parfums alors que nous on va en acheter un
tu vois et ce sera genre notre parfum tu vois quoi on va pas en acheter
quarante. Pour eux, c'est une marque de richesse tu vois, une marque de je sais
pas, d'élégance ou quoi d'avoir un parfum surtout français
et d'en avoir plusieurs quoi, et pour moi c'est des trucs mais pff quand j'ai
vu ça j'ai halluciné quoi parce que pour moi c'est tellement des
trucs futiles en fait honnêtement bon ça c'est mon
éducation enfin voilà mais en même temps j'arrive pas
à comprendre, enfin je peux le comprendre si tu veux mais si tu veux si
je me base d'un point de vue comment dire rapports de pays tu vois, enfin genre
toute une logique qui leur a été un peu transmise tu vois
où « on », enfin, la France et les pays européens
étaient synonymes de modernité tu vois de civilisation tu vois
c'est un peu ça qui leur a été transmis, et c'est encore
un peu ça qu'eux-même cultivent aujourd'hui parce que ça
leur a été transmis comme ça je pense et c'est encore
présent et ça pour moi c'était le plus dur à vivre
en fait.
Tibo
Ça revenait donc souvent au fur et à mesure des
gens que tu rencontrais?
P
Bin ça revient ouais dès que tu rencontres
quelqu'un c'est clair. Même dans le sud alors que le sud y sont tous
descendants d'Européens quasiment et justement ils s'en vantent, c'est
quelque chose dont ils sont contents et même eux parce qu'ils sont
brésiliens mine de rien et dès que tu dis que t'es
française y sont trop contents tu vois, ils veulent parler avec toi si y
parlent français, enfin y vont
limite y vont s'identifier plus à toi et te dire «
ouais ici c'est pas comme le reste du Brésil, on est plus
évolué » enfin des trucs comme ça et enfin moi je
trouve ça insupportable en fait parce que quelque part c'est tout le
truc de se dire « bin ouais j'ai pas choisi où je suis née
et en même temps j'ai pas choisi moi ce rapport de force avec les gens,
j'ai pas choisi d'être dans le pays qui était colonisateur »
tu vois ce que je veux dire, donc si je vais quelque part j'ai pas envie
d'avoir cette position d'ex-colonisateur tu vois mais en même temps tu
l'as malgré toi en fait parce que c'est d'où tu viens quoi.
Tibo
Et tu penses que ça a altéré ton rapport
avec les gens d'un certain côté?
P
Pas « altérer », ça a pas
altéré les choses, enfin je pense pas que ça
t'empêches d'être authentique avec les gens mais n'empêche
que tu as ton arrière plan qui reste tu vois ce que je veux dire. Les
gens t'accueillent, y a pas de soucis, et les gens ouais y sont super
accueillants et y vont pas te discriminer, c'est presque de la discrimination
positive en fait tu vois, c'est presque de ouais, enfin, en fait c'est pas que
je voulais pas être française tu vois ce que je veux dire, c'est
pas que j'avais honte d'être française ou quoi, mais j'en avais
marre qu'y me voient comme ça en fait, j'avais envie de leur dire «
mais allez en France » tu vois, y en a qui sont allés en France et
y sont pas comme ça tu vois, c'est pas tout le monde qui est comme
ça, mais j'avais envie de leur dire « allez y quoi » enfin en
même temps c'est un peu ingrat de dire ça car ils ont pas
forcément tous les moyens d'y aller, mais tu vois rien que le fait avec
l'euro aussi, que moi j'arrive avec l'euro j'ai tout moitié prix quoi,
si je travaille là au Brésil je gagnerais la moitié de ce
que je peux gagner ici, enfin des trucs comme ça de me dire, bin ouais
c'est vrai que avec la géopolitique je suis en position de force et je
véhicule ça, en venant ici je véhicule le passé, je
véhicule le statut international de mon pays d'origine, et c'est
présent aussi quand même dans tes rapports avec les gens tu vois,
les gens vont toujours te dire « oh oui, l'éducation là-bas
c'est tellement bien » en gros quelque part que tu viens d'un pays qui est
plus civilisé donc qu'il y a plus d'éducation, qu'il y a plus de,
c'est pas vrai tu vois ce que je veux dire mais c'est quand même ce qui
t'es renvoyé tu vois et en même temps c'est vrai qu'y a tellement
de, comment dire, y a tellement de disparité là-bas, y a
tellement d'extrêmes, que pour être je sais pas moi classe moyenne
en France y faut vraiment être riche quoi, faut être aisé tu
vois pour avoir accès à une bonne éducation y faut avoir
de l'argent aussi et les livres là-bas coûtent chers parce que
c'est pas une normalité là-bas d'acheter des livres tu vois,
enfin ici en France c'est quand même assez courant d'avoir une
bibliothèque chez toi, c'est pas tout le monde mais c'est
courant, là-bas enfin c'est la télé quoi,
la télé la télé, les livres c'est un luxe quoi tu
vois et ouais voilà moi je viens d'une famille où les livres
c'est hyper important c'est pas qu'on est intellectuel ou quoi mais les livres
pour nous c'est important quoi et ça voilà je me suis dit «
si j'habite au Brésil, est-ce que je pourrais me payer des livres quoi?
» voilà, est-ce que je pourrais aussi importer des livres dans les
langues que je veux lire, français, italien, anglais, etc., parce que
ça coûte cher aussi ça d'importer les livres, tu vois y a
tout ce truc de l'accès à la culture, l'accès à
l'éducation qui est quand même pas le même. Tu vois c'est
pas que les gens y sont bêtes, c'est que y ont pas le même
accès en fait, ici on est quand même privilégié par
rapport à ça, je veux dire on a des réductions,
déjà les monuments sont entretenus, c'est organisé on a
des offices du tourisme, on a enfin tu vois l'accès à la culture
est privilégié tu vois, nous en tant qu'étudiants on a des
réductions en plus c'est favorisé pour la jeunesse.
Tibo
Et ça tu t'en est aperçue, tu l'as
conscientisé quand tu étais là-bas ou tu t'étais
déjà fait la réflexion avant?
P
Je l'ai un peu vu là-bas, avant non je disais pas
ça parce que j'avais pas vu comment c'était donc avant j'avais
pas conscience de comment ça allait être vraiment tu vois et c'est
une fois là-bas que j'ai vu les choses et que j'ai dit « waow
» mais c'est vrai que, c'est vrai que tu peux avoir accès aux
choses tu peux si tu veux et si tu as les moyens tu vois, surtout si t'as les
moyens, c'est surtout une question d'argent, et tu comprends aussi notamment la
mentalité des gens, tu vois les gens parlent beaucoup d'argent, de
s'enrichir, cette notion un peu américaine, de l'ascension sociale, de
se créer soi-même nanana, et ici enfin en France ça fait,
ça fait pas bourgeois mais tu parles pas d'argent comme ça, au
contraire, les gens essaient de montrer qu'ils sont le plus humble possible tu
vois par exemple, c'est peut-être limite « bobo » ça
aussi mais bon y a pas tellement cette mentalité de parler d'argent tu
vois ici, en même temps c'est parce qu'on a accès à tout tu
sais, on a pas besoin de parler d'argent vraiment tu vois, et eux la plupart
des gens ont, là les gens dont je te parle ce sont des gens de classe
émergente surtout, classe moyenne émergente, donc c'est pas des
gens hyper riches mais c'est pas des gens pauvres non plus, pas des milieux
populaires ou des favelas non plus, donc c'est quand même des gens qui
vivent bien mais qui luttent quoi enfin tu sens qu'y a quand même que
c'est pas aussi facile tu vois, je me suis sentie très
privilégiée en fait. En France, et dans plein de pays d'Europe,
tu as accès à tout facilement tu vois, on peut se plaindre de
tout ce qu'on veut, de l'administration enfin tout ce que tu veux
n'empêche que la vie elle est quand même facile quoi.
Tu as réussi à t'y faire quand même
là-bas? Il y a quelque chose qui t'as manqué peut-être ou
je sais pas?
P
Bin à part ce côté ouais culture tu vois
parce que bon notamment dans les villes assez récentes parce que du coup
c'est vrai qu'y a pas de patrimoine tu vois, bon tu vas à Rio c'est
différent hein, Rio c'est une ville beaucoup plus ancienne, donc il y a
ce côté culture, tu sens qu'il y a une richesse culturelle
là-bas qui est différente. Dans une ville récente c'est
vrai que c'est un petit peu normal peut-être que tu sentes moins, faut
dire qu'en France partout où tu vas y a de l'histoire tu vois ce que je
veux dire. Ce qui est intéressant là-bas en fait c'est que tu
sens qu'y sont en plein développement et eux-même y ont en
conscience en fait, parce qu'y vont te dire « ouais en Europe y a la
crise, nous on est la cinquième puissance économique on grandit
» y ont conscience qu'y se passe des choses tu sais et en même temps
c'est assez frustrant d'un autre côté parce que tu te dis «
c'est vrai voilà en Europe c'est un peu la misère en même
temps toi personnellement t'y es pour rien » donc là encore t'as
l'impression de porter un fait, un passé, et tout une situation
où toi t'as rien à voir dedans, c'est juste la situation des
choses, donc tu es dans un pays qui certes n'est pas très
organisé encore, qui est immense et dur à coordonner et qui est
pas forcément partout développé pareil enfin y a encore
beaucoup de manque, en même temps y sont en effervescence et tu sens
cette effervescence là-bas sur place, y a des endroits
déjà où tu vois pas limite la différence avec ici,
c'est pas la pauvreté partout au contraire, c'est plus que ça va
être réparti différemment, tu peux voir une maison riche
à côté d'une favela, mais ouais les écarts de
confort de vie sont énormes mais ce qui est très frustrant c'est
que tu sens qu'y a cette effervescence et que tu as envie d'en faire partie en
fait, y a un côté très enthousiasmant là-bas, c'est
que tu as l'impression que tu vas construire quelque chose, qu'il y a quelque
chose qui est en train de se construire et que tu vas construire avec eux et
que quelque part ici en Europe c'est pas qu'y a plus rien qui va se faire tu
vois mais c'est comme si c'est essoufflé, c'est comme si tu vas
là l'Histoire a été faite, tu es héritier d'une
Histoire qui a déjà été faite et que voilà
maintenant on a les conséquences de ce qui a déjà
été fait et on est obligé de se dépêtrer avec
toutes les conséquences alors que là-bas tu as l'impression que
ça commence en fait tu vois et c'est très bizarre comme sentiment
et c'est un peu caricaturé hein je pense pas que c'est exactement comme
ça, mais ouais c'est un peu ça que tu ressens. Et en même
temps c'est assez comment dire tu as peur pour eux. Moi je sais que je voyais
certains trucs là-bas et je me disais « mais mince mais pourquoi y
font ça quoi » enfin y font exactement bin par exemple l'influence
de la culture américaine ou occidentale en général
même pas que américaine, tu vois ils vivent d'une façon
dont
nous on vit, parce que pour eux c'est un modèle de
modernité tu vois c'est un modèle de civilisation en fait et moi
j'ai envie de leur dire parfois « mais pourquoi vous faites ça
quoi, faites pas les mêmes erreurs que nous » du style de pas
développer les transports en commun au lieu de la voiture personnelle,
le modèle américain par excellence, le pétrole quoi tu
vois les erreurs que les pays qui se sont industrialisés dans le
passé par exemple en Europe ont fait bin y font les mêmes tu vois
parce qu'y suivent le même chemin, et eux y ont quand même
l'avantage d'avoir la canne à sucre, d'avoir du terrain enfin bref, mais
y a un moment donné où y vont avoir les même
problèmes qu'on a ici de gestion de l'espace dans les villes, de
voilà qu'est-ce qu'on fait avec les voitures, les énergies
renouvelables, ça va aussi se poser ces question là.
Tibo
D'accord. Et tu t'es assez identifiée à cette
culture, à cette façon de voir le monde peut-être, tu t'es
sentie vraiment incorporée là-dedans, envie de participer
peut-être?
P
Ouais moi j'ai pas de mal à m'adapter aux endroits
où je vais en fait, je pense que c'est un avantage que j'ai, un atout,
c'est que je m'y fais tu vois quoi et j'ai pas de mal à me
dépouiller de ma culture, mes valeurs c'est peut-être autre chose
ouais mes modes de vie tu vois du moins mes coutumes c'est pas quelque chose
à quoi je suis vraiment attachée tu vois donc je peux m'y
adapter, du moins pour un court terme. Après, voilà, le long
terme c'est une autre question mais à court terme ouais je peux. Donc
voilà ça permet de réfléchir, de prendre de la
distance déjà, parce que tu vis des trucs de l'intérieur
tu vois.
Tibo
On parlait de préjugés, non de
stéréotypes pardon, positifs, est-ce qu'il y a eu des
stéréotypes négatifs à ton encontre par exemple?
Est-ce que c'est arrivé?
P
Non pas de ça. Non du coup bon je pense un truc
négatif ça peut être que justement y a peut-être un
complexe d'infériorité de fait que t'es européen t'es
français notamment, voilà tu viens de ce pays du savoir, des
Lumières nanana, et du coup je pense que certaines personnes elles se
sentent d'office peut-être intimidées par toi ou des trucs comme
ça, ouais.
Ça t'as pas perturbé plus que ça disons, y a
pas eu de réactions frontales où on t'a fait comprendre que...
P
Ah non, ça non, mais je pense que c'est lié
aussi à la l'usage de la langue, vu que je parlais assez bien portugais
enfin, ça aussi je pense que ça aide, que si par exemple tu
galères à comprendre, si tu parles très fort avec l'accent
français tu vois ce que je veux dire, je pense que bon si tu critiques
tout, ça dépend de l'attitude aussi je pense. Non comme j'ai
essayé de m'intégrer là-bas j'ai pas trop eu de
réactions comme ça, enfin je m'en souviens pas du tout.
Tibo
Très bien très bien. Et du coup qu'est-ce que tu
faisais comme activité sociale? Parle-moi de tes loisirs, ce que tu
faisais en dehors du boulot, comment ça marchait?
P
Euh en dehors du travail, bin du coup je rencontrais des
personnes, du coup ça m'arrivait des fois de rencontrer quelques
connaissances que j'avais, euh je connaissais pas trop les cafés ou les
bars et de toute façon il y avait pas trop cette culture du café
sur la terrasse tu vois où on va se poser, mais ouais ça m'est
arrivé d'aller boire un coup avec quelques personnes et c'est vrai que
c'est pas très courant là-bas en fait, c'est pas un truc qu'y
font entre jeunes par exemple, tu vas plus aller chez les gens en fait. Bin
ouais je suis allée une fois à une soirée chez des
argentins pour danser c'était sympa, je crois que c'est la seule fois
où je suis sortie en fait parce qu'après à part ça
vraiment je bossais quoi, j'avais vraiment pas le temps. Y a juste bin un
weekend quoi je suis allée à, un weekend je suis rentrée
chez mon copain....
Tibo
(Bruit), hop, le temps de retourner la cassette...
P
Ouais un weekend je suis retournée là-bas et le
dernier weekend où j'ai pu aller à Rio mais à part
ça sur place j'avais pas trop de loisir. J'ai failli aller avec ma coloc
à, elle faisait des cours de danse et de l'escalade alors j'ai failli y
aller mais j'étais tellement crevée en fait que je crois que
c'est le fait de la langue aussi tu sais comme je parlais portugais
vingt-quatre sur vingt-quatre je me sentais
tellement fatiguée au début, le rythme de que
j'avais, je dormais pas forcément bien du coup avec le canapé,
oui parce qu'il y avait une des colocs qui rentrait à minuit du travail
bon elle me réveillait pas, mais j'étais toujours
réveillée par celle qui se levait à six heures du mat,
donc je dormais pas trop (rire), voilà donc ouais j'avais un rythme de
vie assez intense.
Tibo
D'accord. Et tu parlais d'église tout à l'heure, et
est-ce que t'as fréquenté les églises là-bas?
P
Alors ouais en fait j'ai rencontré une dame qui allait
à une église baptiste là-bas donc j'ai pu y aller une fois
j'ai pas pu y aller beaucoup parce que bin je travaillais tu vois. Euh ouais
alors les églises, parlons-en (rire). C'était assez surprenant
ça aussi parce que j'ai jamais vu ça et je pense que c'est
très proche de ce qu'il y a aux États-Unis en fait. Parce que par
exemple en France c'est pas du tout comme ça. La situation des
églises évangéliques en France, y a plein de
dénominations mais tu n'as pas de mentalité de propagande ou
marché tu vois, de commerce un peu tu vois. Et ce que j'ai trouvé
là-bas en fait c'est que c'est tellement courant d'être croyant,
enfin en quelque chose hein, quoi que ce soit, ils font beaucoup de
mélange hein, c'est très courant que les gens soient catholiques
et qu'en même temps y pratiquent le Candomblé et qu'y pratiquent
un autre truc tu vois. Et dans les églises évangéliques,
je sais pas d'où ça vient, alors mon hypothèse c'est que
c'est l'influence des États-Unis, mais dans de nombreuses
églises, pas toutes, mais c'est vrai que je comprends la mauvaise
réputation des églises évangéliques là-bas
parce que (rire) tu vas dans la rue tu vois des églises
évangéliques tu vois c'est des grands boulevards un peu à
l'américaine tu en vois partout et alors c'est des trucs l'affiche la
plus grande possible, y te vendent des miracles quoi tu vois t'as tout une
doctrine de la guérison, une doctrine de la prospérité
aussi qui est très présente làbas et qui est pas
présente en France, j'ai jamais vu ça en France, et si c'est
présent c'est vraiment une minorité d'églises et c'est pas
visible quoi mais là-bas j'ai été choquée, j'ai
été choquée ouais, j'ai été choquée
parce que comment dire bin c'est d'autant plus dur d'être authentique je
pense parce que du coup t'es assimilé à quelque chose que t'es
pas forcément tu vois et je pense que ça doit être
très compliqué en fait d'être chrétien
là-bas, je pense même plus compliqué qu'ici, parce que ici
y a pas ce côté, enfin moi je l'ai jamais vu, donc je pense que tu
n'as pas à remettre en question l'authenticité et la
sincérité des gens, enfin moi j'ai jamais vu ici le
phénomène d'église-secte tu vois, y a des sectes, mais
dans les églises évangéliques que je connais j'ai jamais
vu ça. Là-bas tu as des églises écoute tu as
même pas envie de rentrer dedans tu vois enfin honnêtement, rien
qu'à voir l'affiche, rien qu'à voir, c'est un magasin quoi
presque tu sais c'est limite un magasin de foi quoi,
enfin je sais pas comment l'exprimer mais j'ai
été choquée par ça quoi. Et en parlant avec des
gens ce qui est très intéressant, quand je parlais avec des gens
et qu'y te demandent « alors toi tu crois quoi » parce que
là-bas y sont tous croyants, y croient tous en Dieu, là-bas
comment dire l'existence de Dieu est quasiment pas remise en cause par personne
en fait ce qui par exemple en France n'est pas le cas. Là-bas les
athées les gens y se moquent d'eux tu vois parce que c'est tellement
évident que Dieu existe tu vois ce que je veux dire et ça peut
être n'importe quoi hein, c'est pas forcément le Dieu de la Bible
par exemple, le Candomblé est très présent, bin C t'en
parleras demain, les gens y peuvent croire tout et n'importe quoi mais y ont
quand même une notion de spiritualité donc tu leur dis « je
crois en Dieu » c'est pas une grosse nouvelle tu vois c'est pas choquant
alors que si tu dis ça à quelqu'un en France déjà y
peut penser que t'es un peu bizarre tu vois ou que t'es pas intelligent enfin
bref tu peux avoir des réactions comme ça en France là-bas
non, c'est limite tu crois pas en Dieu t'es pas normal tu vois. Donc y a
ça mais du coup ça laisse place aussi à beaucoup de
confusion parce que tu crois tout et n'importe quoi, tu mélanges
tout.
Tibo
C'est intéressant parce que toi du coup étant
croyante ou pratiquante je sais pas, est-ce que c'était la même
foi? T'es-tu ou ne t'es-tu pas assimilée à ça? Comment tu
voyais la chose avec tes yeux à toi?
P
Bin du coup c'était marrant comme je te disais parce
que quand je rencontrais des gens dans une église et qu'y me demandaient
« et toi qu'est-ce que tu fais » et je leur disais « je suis
évangélique », mais quand tu dis que t'es
évangélique à un Brésilien, qui ne l'est pas
d'office, alors deux réactions : soit y va penser que t'es dans une
secte, complètement illuminé, soit tu lui précises quelle
église tu vas et là y va te dire « ah ouais d'accord ok je
vois eux c'est des églises sérieuses ». Mais moi je l'ai
vécu comment, euh bin, ça m'a un peu rendu triste parce que je me
suis dit « c'est très dommage en fait » que ce soit
utilisé comme ça, après moi j'ai cette conception que Dieu
gère les choses tu vois, Dieu est au-dessus de tout donc y voit
même dans ces endroits là, enfin, voilà mais ouais et
ça m'a rendu triste pour ça parce que je me suis dit qu'il y a
beaucoup de personnes ici et c'est vrai que j'entends beaucoup d'histoires de
personnes qui sont escroquées quoi. Concrètement y vont leur
promettre des trucs genre donne tout ton argent, Dieu te le rendra, enfin ces
théories là quoi et des personnes du coup qui sont très
sincères on leur parle de Jésus et on leur vend un Jésus
un peu refaçonné quoi à la façon qu'on veut quoi et
eux du coup y croient, y vont vendre tout ce qu'y ont, donner tout leur argent
et t'as des personnes qui se retrouvent à la rue comme ça quoi,
t'as beaucoup de personnes aussi, enfin t'as des doctrines un peu bizarres qui
circulent tu vois enfin des trucs qui
sont pas du tout bibliques, genre qu'y vont acheter leur
terrain au ciel enfin des trucs complètement aberrants et en temps que
chrétien, que protestant évangélique, c'est choquant parce
tu te dis toimême comment t'es crédible après tu vois, mais
n'empêche que comme je t'ai dis c'est pas quelque chose qui me soucie moi
personnellement parce que c'est pas dans mon contrôle tu vois, et j'ai pu
discuter avec des gens notamment, enfin c'était assez random
mais c'était un gars à l'arrêt de bus qui a
commencé à me parler de Dieu et comme ça et puis il
commence à me dire qu'il a été dans des églises
justement qui recherchaient à prendre son argent machin et j'ai
discuté avec lui et il était content juste de parler avec
quelqu'un, je pense qu'il devait avoir un passé alcoolique mais euh il
était sobre à ce moment là mais c'était
intéressant de parler avec quelqu'un tu vois je sais pas s'il
adhère à une église ou quoi en tout cas y devait croire,
il avait du avoir de mauvaises expériences, mais tu vois qu'il est quand
même ouvert à la discussion et puis les gens en fait là bas
- pas tout le monde mais, y a une espèce d'hyper tolérance en
fait une espèce de, par contre je sais pas, ça c'est un truc
intéressant, je sais pas comment y géreraient, je sais pas
l'état de l'islam là-bas tu vois, je sais pas si y a des
mosquées, je sais pas s'il y a beaucoup de populations arabes,
maghrébines, y a pas beaucoup de musulmans tu vois, je sais même
pas si y a des mosquées, mais c'est vrai que ça par exemple, j'ai
déjà parlé de ça avec certaines personnes, et tu
vois y imaginent pas du tout qu'en France maintenant enfin c'est normal tu vois
d'entendre parler arabe, tu vois on a grandi dans une France qui est
très différente de celle qu'ont connu les gens il y a quelques
années, enfin, y a un mélange culturel tu vois, pour moi c'est
normal tu vois que la France elle est comme ça, je l'ai toujours connu
comme ça, mais pour eux, de penser que y a des arabes en France, de
penser qu'y a des musulmans en France c'est un truc complètement
aberrant, et y vont te demander « ah ouais c'est quoi la religion
majoritaire en France? » tu vois des trucs comme ça et y vont
penser que tu leur dit « catholique » tu vois et moi c'est vrai je
leur dit « bin traditionnellement c'est vrai que y a beaucoup de
catholiques encore, mais n'empêche que désolée, la
majorité des gens y sont pas catholiques aujourd'hui » et y
hallucinent quand tu leur dis ça parce que ils sont tolérants
mais y sont tolérants de ce qu'y connaissent tu vois donc c'est normal
c'est humain mais c'est vraiment un autre monde quoi.
Tibo
Ok. De quoi voulais-je te parler déjà? Ah oui,
tout à l'heure tu parlais de tes relations, alors était-ce
plutôt avec des étudiants internationaux, des compatriotes, des
Brésiliens, ton réseau social comment était-il
constitué finalement?
P
Bin j'avais cinq six Français quand même dans mon
réseau, donc je les voyais assez souvent, sinon c'était que des
Brésiliens, j'avais pas d'autres étudiants internationaux,
c'était que des Français et des Brésiliens, donc soit
étudiants soit pas quoi, la majorité était pas
étudiant d'ailleurs.
Tibo
Et tu les as rencontrés comment ces gens là du
coup, les Français comment tu les as connus?
P
Alors surtout par le travail, ou par la fac mais en fait le
truc c'est que la plupart, tu vois nous on fait cette distinction
étudiant / travailleur ici, mais là-bas elle y est pas
forcément, les étudiants y sont aussi travailleurs en fait, et
ouais j'ai rencontré des gens un peu comme ça par mes entretiens
aussi du coup. Et juste pour revenir sur l'église là, donc je
suis allée à une église baptiste je t'ai dit, et là
par contre pas de soucis tu vois, enfin là c'était très
similaire à ce que je connais en France y a pas de soucis mais le
contexte en soi m'a choqué quand même.
Tibo
Ok. Est-ce que sur un versant émotionnel, etc., tu t'es
sentie soutenue ou tu as manqué de quelqu'un à qui te confier je
sais pas, est-ce que t'étais un petit peu perdue parfois?
P
Bin y a des moments quand même où je me suis dit,
bon Mme X elle nous a préparé quand même pour le voyage,
elle nous a un petit peu parlé avant, le truc c'est que moi elle m'avait
dit « ah toi où tu vas ça craint pas du tout c'est une
région riche blablabla » enfin elle connait plutôt le nord et
elle a bien briefé les filles et moi j'étais là donc j'ai
écouté ce qu'elle a dit. Tout ce qu'elle a dit pour les filles
qui en plus allaient dans la favela bin écoute moi ça m'a servi
pour là où j'étais quoi, enfin honnêtement les
même règles de sécurité elles valaient aussi dans le
sud quoi dans une ville riche, parce que c'est ville riche mais en même
temps y ont eu beaucoup de problèmes compliqués avec la drogue
avec les favelas tout ça mais j'aurais voulu, et d'après ce que
j'ai constaté avec certains étudiants internationaux, ça
pourrait être pas mal, quand tu changes de continent comme ça,
d'avoir peut-être une préparation plus intensive en fait aux
différences culturelles tu vois genre communication, contact avec la
culture machin, parce que c'est une chose d'y être tu vois. C'est une
chose qu'on te raconte quelque chose mais c'est une chose de le vivre et
d'être toute seule et j'ai vu certains étudiants la façon
dont y vivaient bin honnêtement y en a certains y prenaient pas
forcément les précautions qu'y fallait tu vois
et je me suis dit « si jamais y leur arrive un truc... » tu vois le
truc c'est que y faut pas être parano mais en même temps t'es pas
dans ton pays enfin c'est pas l'Europe tu vois quoi et c'est pas la même
criminalité, les personnes peuvent facilement être armées
comme je t'ai dit enfin c'est pas les même règles. Donc ça
change les choses et je pense qu'y faut se comporter en sachant écouter
les conseils des personnes sur place tu vois et moi heureusement j'ai la
personne avec qui je vivais qui m'a donné beaucoup de conseils au
début je t'ai dit j'étais pas mal protégée parce
que je vivais avec la famille, quand je me suis retrouvée toute seule
elle m'a quand même briefé tu vois, elle m'a donné certains
conseils, parfois quand je faisais des trucs elle me disait « ah mais
là j'étais inquiète et tout tu devrais pas faire ça
» enfin tu vois donc j'ai quand même suivi ses conseils parce que
voilà c'est une jeune, elle vit là depuis toujours, c'est
quelqu'un qui a voyagé donc elle connait le monde aussi tu vois donc
elle sait de quoi elle parle je pense donc j'ai écouté ce qu'elle
m'a dit tu vois mais non ça va, y a peut-être des moments
où je me sentais un peu seule c'est normal t'es loin de chez toi mais
après j'ai pas trop eu de moments vraiment ça allait pas du tout
je voulais rentrer quoi non. Le truc aussi c'est que c'était tellement
court comme temps que j'étais enfin limite c'était le contraire
tu vois, j'avais envie que ça dure plus longtemps parce que je voyais
que les autres Erasmus allaient rester plus longtemps et c'est limite hyper
frustrant de devoir rentrer tu vois parce que enfin après deux mois tu
t'intègres tu vois, après deux mois t'as trouvé tes
marques t'as ta routine un peu pour autant que t'en ai une et ouais j'ai
trouvé ça assez frustrant de devoir entrer finalement parce que
deux mois ça passe mais à une vitesse vraiment ouais c'est court.
Non j'ai pas eu de moment vraiment...
Tibo
Est-ce que t'as connu des galères, ce qu'on appelle des
galères?
P
(Pause) genre des gros problèmes non, après
ouais y a des moments où j'ai un peu galéré quand
même au début genre comprendre du coup me repérer dans la
ville (rire) tout ça comment tu prends le bus enfin ouais retirer de
l'argent dans les banques juste avoir des points de repère tu vois,
genre où est le super marché le plus près parce que du
coup j'ai eu tout de suite conscience de ce fait voilà je peux pas
sortir la nuit quand je sors la nuit je fais attention de toujours prendre des
rues éclairées voilà je sors jamais dans des rues un peu
obscures même si c'est plus rapide mais en même temps t'as toujours
cette pensée quand c'est la nuit « ok tu rentres le plus vite
possible chez toi » quand t'es tout seul t'as pas de voiture tu rentres
chez toi sinon tu prends un taxi mais bon le taxi ça fait un peu cher
à la longue (rire) donc ouais y a juste peut-être ce
côté où tu te sentais un peu étouffé quoi
mais
c'était pas une galère non j'ai pas eu trop de
galères je crois pas je me souviens pas.
Tibo
Très bien. Et dans le questionnaire, quand je t'ai
demandé de placer ton séjour par rapport à ta vie en
général, t'avais répondu « suite ». Est-ce que
tu peux m'expliquer cela, pourquoi tu as écrit « suite » pour
parler du sens de ton séjour par rapport à ta vie en
général?
P
Euh bin parce que pour moi les choses ça vient les unes
après les autres en fait (rire), super la phrase, ouais je sais pas
quand je regarde ma vie je vois une progression tu vois je vois comment j'ai
évolué sur certaines choses je vois le sens enfin tu vois les
choses comment elles font sens aussi et là en fait voilà
ça faisait sens quoi, notamment par rapport à ma relation et par
rapport à ma formation aussi, par rapport à mon rapport au monde
tu vois aussi je pense parce que j'avais jamais quitté l'Europe en fait
avant donc c'était mon premier voyage hors de l'Europe donc
c'était quand même un gros pas et puis je sais pas c'est juste
venu là, c'est venu là vraiment sur un plateau j'avais rien
demandé, je comptais y aller cet été en fait du coup j'y
vais pas et en fait c'était genre « waow » c'est juste venu
là quoi même si maintenant j'ai beaucoup de boulot avec les
entretiens à traduire et tout ça quoi mais ouais c'était
vraiment une super expérience, pour moi c'était genre dans la
continuité tu vois enfin genre t'as ta vie comme ça, t'as des
projets qui viennent, des opportunités et tout et pour moi
c'était là quoi.
Tibo
C'est une très bonne réponse. C'est ce que t'as
ressenti donc c'est le principal finalement. Et justement donc, le
Brésil avant et après, est-ce que ton image elle a changé,
est-ce que la vision des gens du pays de la culture en général
s'est transformée?
P
Mmh je pense qu'avant sans connaître du coup sans
connaître concrètement je pensais que ça serait plus facile
d'y vivre tu vois peut-être et en fait en y allant je me suis rendue
compte quand même que bon bin bien sûr tu peux y vivre c'est pas
infaisable mais c'est quand même un gros choix tu vois c'est un choix
qu'y faut pas prendre à la légère parce que bin c'est loin
déjà géographiquement, ça coûte cher pour y
aller, et aussi bin tu te déracines quand même tu vois parce que
tu vois comme je t'ai dit j'étais là-bas je m'y suis sentie bien
mais en même temps - bon en même temps je suis restée deux
mois, mais j'ai pas senti appartenir en fait tu vois enfin je peux, je peux tu
vois dire
« ouha je me suis trop identifiée là-bas je
me vois trop habiter là-bas » ça peut être vrai mais
en même temps le fait est que j'ai passé que deux mois
là-bas tu vois et tout ce truc là de ce que les gens te renvoient
tout ce que je te disais avant je pense qu'y y aurait un certain temps
d'adaptation et que en plus je pense que tu dois faire le sacrifice de plein de
choses en plus. Comment dire, c'est dur à expliquer en fait chais pas
j'ai ressenti en fait pas exemple je me suis dit « si je vais vivre
là-bas à long terme » genre imagine tu as des enfants
là-bas tu vois, je me suis posée cette question je me suis dit
« est-ce que t'accepterais que tes enfants vivent comme des
Brésiliens en fait? » tu vois concrètement et en fait moi
c'est encore aujourd'hui une question qui est difficile parce que je me dis
quelque part que j'aurais envie que mes enfants y aient ce que moi j'ai eu et
là-bas dans certains endroits - pas partout, mais pour pouvoir avoir une
ascension sociale, pour avoir une très bonne condition de vie y faut
être aisé comme je t'ai dit donc c'est pas la majorité des
gens. Y a quand même beaucoup de gens puis y a beaucoup de gens qui
s'enrichissent aussi donc y a quand même une classe émergente donc
tu peux quand même bien vivre là-bas mais voilà je sais pas
comment dire mais je pense qu'il y a quand même, c'est peut-être un
héritage de la colonisation hein c'est peut-être un truc de groupe
de se dire « on est supérieur » quelque part tu sais, y a
peut-être de ça hein, mais j'avais le sentiment par exemple de
enfin comme une sorte de peur ouais j'ai pas envie que mes enfants y
grandissent là-bas tu vois j'ai pas envie que si j'ai des enfants un
jour qu'y aillent dans une école brésilienne tu vois enfin, c'est
peut-être parce que je connais pas assez bien aussi j'y ai pas
vécu assez longtemps mais j'avais un peu cette espèce de, tu
vois, j'ai pas du tout cette peur dans un autre pays européen, si je
vais dans un autre pays d'Europe tu vois c'est pas loin et voilà je
connais assez bien les cultures, j'ai quand même bien voyagé en
Europe, voilà je sais que y a quand même un niveau de vie et un
niveau d'éducation qui se vaut dans la plupart des pays en tout cas. Tu
vas là-bas y faut se battre en fait tu vois, pour avoir le meilleur y
faut que tu te battes si t'es classe émergente si t'es classe moyenne et
j'ai pas eu cette habitude de me battre bin par exemple mon copain c'est
différent, voilà il a grandi dans un contexte où ouais
enfin y ont connu un moment donné un moment difficile
financièrement enfin tu vois y ont pas toujours eu tout ce dont y
avaient besoin et du coup tu comprends ce besoin de comment dire cette
aspiration à plus tu vois à donner plus à tes enfants. Moi
c'est pas que je veux donner plus à mes enfants tu vois je veux juste
qu'y aient que ce que j'ai eu tu vois pas moins quoi et de coup de me dire
« bin ouais si je vais vivre làbas... » tu vois c'est pas
pareil si t'y vas en tant qu'expat deux-trois ans, t'y vas en tant qu'expat
deuxtrois ans tu te dis « ouais c'est bien » au moins les enfants y
ont une expérience de l'étranger mais en général y
vont dans un lycée français ou une école française
enfin tu vois ce que je veux dire, t'as un cadre de vie assez
protégé. Tu vas vivre là-bas en tant que personne qui
s'intègre là-bas c'est différent déjà, et
comme moi j'avais déjà cette perspective là, j'avais
déjà cette idée là dans ma tête,
j'y suis pas juste allée en disant « voilà
chouette un petit voyage allons au Brésil » en fait tu vois donc
d'ailleurs j'ai jamais fait ça avec mes voyages mais ça m'a quand
même fait voir que c'est un choix énorme quoi, c'est pas un choix
que tu fais juste voilà parce que t'es amoureux de quelqu'un et que tu
vas le suivre tu vois, pour moi enfin tu peux le faire ça à la
limite mais pour moi c'est inconscient.
Tibo
Ouais. T'as le droit de pas répondre à cette
question mais comme t'y as fait référence plusieurs fois est-ce
que le fait d'avoir ton copain au Brésil dans ton expérience
c'est quelque chose qui a compté ou qui a influencé, qui a eu un
sens? T'es pas obligée de répondre parce que c'est un autre
domaine.
P
Euh si ça a influencé mon expérience au
Brésil?
Tibo
Voilà est-ce que la façon dont t'as
appréhendé les choses, ton état d'esprit peut-être,
dont t'as ressenti, je sais pas?
P
Bin alors du coup oui je pense c'est obligé que
ça a joué un rôle hein après tu vois pour moi
j'étais pas du tout dans la même région de lui et
c'était ce que je voulais en fait, parce que ce qui comptait pour moi
comme je t'ai dit c'était avoir mon expérience du Brésil
donc je me disais aussi bin voilà je veux pas me retrouver comment dire,
je veux pas voir le Brésil à travers ses yeux je veux me faire ma
propre idée donc c'était un truc bien pour moi mais en même
temps je m'étais peut-être pas rendue compte que c'était
vraiment loin en fait. Au brésil t'as pas forcément des moyens de
transport faciles et ça coûte cher l'avion donc du coup c'est vrai
que je me reposais peut-être beaucoup sur lui par moments, en même
temps y pouvait pas m'aider concrètement parce que il était loin
donc y a peut-être eu une frustration à ce niveau là mais
en même temps c'était réel enfin c'est ça la
réalité du pays donc en même temps ça m'a fait
découvrir le Brésil tel qu'il est vraiment tu vois et j'ai pu
aussi découvrir un Brésil différent de ce dont lui il
parle, de ce que lui il vit aussi parce que c'est pas la même
région j'ai pu vraiment avoir mon expérience du Brésil
quoi et c'est vraiment ce que je voulais. Ouais euh après oui bin
forcément ça a influencé sur ma vision du Brésil de
toute façon, bon c'est vrai que lui y m'en parlait déjà
beaucoup avant, si je rencontrais quelque chose qui me faisait penser à
lui ou tu vois enfin je faisais toujours des rapprochements mais ouais non.
Après du
coup - tu vas connaître toute ma vie (rire) mais on est
plus ensemble en fait là donc en ce moment je me pose plus
forcément ces questions là que j'avais posé avant.
Après pour autant c'est vraiment un pays qui m'a
énormément plu et je voudrais vraiment y retourner quoi
même y habiter voire tu vois.
Tibo
Du coup justement en parlant de ça, quand je t'ai
demandé ce que tu placerais en tête entre ta vie au Brésil
et ta vie à Lyon 2 t'as répondu Lyon 2. Est-ce que tu peux
développer un petit peu dans tout ce contexte là?
P
Attends répète la question?
Tibo
Dans le questionnaire que je t'ai donné, que
placeriez-vous en tête : votre vie au Brésil ou à Lyon 2,
en France donc...
P
Ah oui!
Tibo
On sent que t'as ces deux trucs qui te tiraillent un petit peu et
t'as du mal à, enfin c'est normal hein, à vraiment choisir parce
qu'il y a une lucidité d'un côté, un attrait de
l'autre...
P
Ouais bin le truc c'est que ma vie ici comme je t'ai dit elle
est plus facile quoi clairement tu vois je sais qu'ici les choses sont plus
faciles donc d'un côté je préfère ma vie ici pour
ça bin aussi parce que j'ai ma famille et mes amis en France, pas
forcément à Lyon mais en France, après euh comment dire
ouais c'est vrai que j'ai un attrait pour là-bas ouais et je pense
même indépendamment de mon copain du coup et c'est toute la
question de l'engagement à laquelle tu touches là, parce que
comme je t'ai dit tout à l'heure enfin c'est une chose d'aller y vivre
quelques années en électron libre et d'y aller et
t'insérer dans la société quoi vraiment genre en
intégrant une famille là-bas en fait concrètement donc je
pense c'est ça quelque part bin ça fait peur quoi
concrètement de se dire voilà tu vas à je sais pas combien
de kilomètres de ton pays, de ta famille, voilà mes parents y
peuvent
pas forcément voyager non plus tu vois donc, donc de se
dire « tu vas te couper quoi » tu vois, y a cette notion de se dire
« si la personne ne compte pas venir vivre ici un peu » donc c'est
toi ok super mais enfin je dis pas non tu vois parce que bin c'est un pays que
j'ai beaucoup apprécié, en même temps ouais je trouve
ça inconscient quoi de te dire « voilà je pars pour la vie
» tu vois et c'est tellement, c'est tellement, tu te déracines
encore plus tu vois, déjà moi je me sens un peu
déracinée à la base enfin j'ai du trouver mes racines
moi-même tu vois, maintenant que je les ai tu vois j'ai pas envie de me
dire « ok je lâche tout » tu vois c'est ouais c'est un saut
dans le vide quoi c'est un saut dans le vide et c'est faisable et
concrètement c'est faisable mais complètement irréalisable
concrètement c'est pas difficile tu prends un avion et tu vas
là-bas tu vois ce que je veux dire après voilà est-ce que
émotionnelement, affectivement, justement tu auras assez de soutien
enfin tu vois c'est toutes ces questions là aussi de penser un peu
à ta sauvegarde à toi je pense c'est des pensées de
préservation en fait et tu vois moi je me dis j'ai beaucoup aimé
sa famille [à mon copain] tu vois je me suis très bien sentie
là-bas c'est pas le souci c'est juste de me dire « ok ça
c'est son monde à lui » tu vois c'est pas mon monde donc ça
peut devenir mon monde à moi mais j'ai besoin de retrouver quelque chose
d'avant aussi tu vois et c'est pour ça moi par exemple si je vais vivre
là-bas à long terme j'aurais besoin d'avoir des amis tu vois
en-dehors de mon travail d'avoir des personnes comme ici qui ne sont pas
liées à mon travail des personnes notamment avec qui je peux
avoir des discussions tu vois je sais pas moi sur des sujets qui
m'intéressent, des personnes avec qui j'ai des affinités quoi pas
juste des personnes qui sont là parce qu'elles sont là parce que
la famille y a un peu cette notion tu vois de pas chercher les personnes tu
vois enfin y ont la famille donc y s'autosuffisent entre eux et dans ta famille
c'est pas des gens que t'as choisi donc c'est pas forcément des gens
comme nous qu'on a rencontré bon voilà on va se voir des amis en
fonction de nos affinités, un peu trop des fois c'est vrai que des fois
on est intolérant et on déprécie la famille à ce
point là mais euh au travail c'est pareil, au travail c'est pas des gens
que tu choisis et moi voilà je pense que si j'étais là-bas
j'aurais besoin de ça, j'aurais besoin de me dire « ok j'ai des
personnes avec qui je suis parce que j'ai envie d'être avec elles »
tu vois pas parce que c'est ma famille ou que c'est mes collègues et
aussi j'aurais besoin de connaître des expats et donc ça je pense
que c'est ce qui m'a fait ressentir ça quand j'étais dans le sud
je me suis rendue compte à quel point, quoi que tu puisses dire, au bout
d'un moment t'as besoin de t'identifier à quelque chose du passé
quoi, à quelque chose qui fait que t'es toi en fait et pour moi
ça a été hyper important et c'était pareil en
Italie d'ailleurs j'avais besoin des fois de parler français avec des
gens qui parlaient français j'en connaissais pas beaucoup en Italie et
au Brésil j'en connaissais plus du coup et c'est ce qui est très
marrant là non plus c'est pas des personnes que j'ai choisi tu vois
c'est des personnes qui se sont trouvées là comme moi et avec
lesquelles j'avais pas forcément d'affinités en fait mais on
était dans la même circonstance et là tu
t'aides donc c'est un peu ce cercle aussi comme la famille,
comme le travail, mais ouais je sais pas si c'est parce qu'on est beaucoup plus
individualiste qu'eux mais pour moi y a toujours cette notion de pouvoir
choisir quoi, tes fréquentations, ce que tu fais, pas subir les choses,
et dans la façon dont est construite cette société y a
encore beaucoup ce, tu sens encore un peu beaucoup de subir tu vois, de
là, de là enfin y ont une mentalité de fou quoi y ont une
joie de vivre, y sont toujours contents, toujours optimistes, enfin tu apprends
énormément aussi de ça de leur façon de vivre tu
vois, c'est vrai que nous ici à côté on est hyper
blasé on est toujours en train de se plaindre enfin c'est clair hein
alors qu'on a, qu'on a tout, mais y ont quand même une façon de
subir les choses tu vois avec joie, avec joie c'est pas un souci mais y a quand
même des choses qui me rebellaient en fait là-bas j'avais envie de
dire aux gens des fois « mais comment vous supportez ça, comment
c'est possible que vous viviez comme ça » tu vois et ouais...
Tibo
D'accord. Et je ne t'ai pas encore demandé mais est-ce
que toutes tes expériences comme l'Italie par exemple, tout ton
passé de voyages, d'expériences à l'étranger donc,
ça t'as servi pour te préparer au niveau mental je sais pas, tes
analyses, as-tu pu réinvestir des choses ou est-ce que tu t'es sentie
peut-être à l'aise grâce à ça je sais pas?
P
Ouais ah ouais ça m'a forcément aidé
parce que c'était mon premier gros, enfin j'ai vécu un an
làbas [en Italie] c'était mon premier séjour à
l'étranger de longue durée quoi en tant qu'étudiante et
ouais j'ai vécu là-bas des trucs que j'avais jamais vécu
avant tu vois notamment dans la coloc, la coloc avec des personnes de
différentes cultures enfin ouais j'ai vécu des choses
là-bas que j'avais pas connu ici donc déjà là-bas
ça m'a augmenté ma flexibilité (rire) et je pense que
ouais c'était nécessaire d'avoir ça même avant d'y
aller quoi je pense que d'aller d'office au Brésil ça aurait
peutêtre été intense ouais parce que comme je t'ai dit
maintenant je fais vraiment une séparation entre l'Europe et le reste
enfin avant je voyais pas vraiment l'Europe comme un tout tu vois j'avais du
mal à voir ça comme une entité et maintenant en fait je le
vois vraiment comme ça parce que je pense que y a quand même quoi
qu'on dise - ça dépend de quel pays peut-être mais, y a
quand même une certaine similarité tu vois une certaine bon en
plus on est proche géographiquement avec ces pays là et je pense
que quand tu quittes cette zone, c'est un peu ta zone du monde tu vois, quand
tu quittes cette zone t'es dans un autre schéma, dans un autre ouais
t'es dans totalement autre chose tu vois ta zone de référence
elle est plus là donc y faut le prendre en considération et je
pense que souvent les personnes voyagent un peu trop à la
légère en fait tu vois genre recherche d'exotisme en fait tu
vois.
Je vois bien. Et qu'est-ce que tu dirais que ça t'as
apporté cette expérience au Brésil, est-ce que tu te sens
différente aujourd'hui? C'est dur de mettre des mots dessus surtout
à chaud parce que c'est assez récent mais disons dans quel
domaine tu penserais que t'as évolué voilà je sais pas, si
t'arrives, c'est pas facile.
P
Euh ouais bin je sais que j'ai changé, ça au
moins c'est sûr, après en quoi pour moi je le lie pas
forcément à l'expérience du Brésil en tout, je le
délimite pas à mon séjour, je le délimite plus
à ma relation en fait avec mon copain, plus à l'expérience
de l'interculturel comme ça de mes relations multiculturelles multiples.
Mais euh ouais c'est plus ça et puis bon les rencontres en fait ouais si
c'est quelque chose qui m'a changé ce serait les rencontres sur place,
les personnes que j'ai rencontré, ma coloc, les filles avec qui je
vivais tu vois enfin j'ai pas mal discuté avec elles des fois
c'était un peu le clash enfin ouais on a été au
clash des fois et bon....
Tibo
Sur des choses, des façons de voir les choses ou sur le
quotidien?
P
Non sur des trucs de la maison parce que bon c'était
pas très clair des fois ce qu'elle attendait de moi mais ouais et puis
enfin ouais c'était juste ouais des fois des façons de voir la
vie aussi hein des fois elle m'a bien cassé certaines visions que
j'avais certaines choses tu vois enfin ouais bin ça revient un peu
à ce que je disais avant tu vois cette vision de nous ici c'est vrai
qu'on a jamais manqué de rien donc on voit les choses
différemment on voit pas notre confort matériel comme quelque
chose d'hyper important d'office on va être assez tu vois genre «
ouais je vais aller faire de l'humanitaire, je vais aller aider les gens
pauvres » tu vois des trucs du genre et elle me disait « bin oui mais
méprise pas les gens qui veulent leur confort parce que quelque part si
tu aides ces gens là c'est aussi pour qu'ils aient un confort quelque
part, si tu les aides c'est pour ça, pas pour qu'ils aillent moins bien
donc ne va pas mépriser des gens qui se contentent d'être dans
leur confort » tu vois parce que quelque part c'est ce à quoi on
aspire tous enfin c'est pas notre but dans la vie tu vois mais c'est normal de
vouloir ça quoi en fait et puis c'est hypocrite en fait de nier
ça tu vois et c'est juste qu'elle avait une façon de parler assez
cash tu vois je pense qu'elle m'a un peu ouvert les yeux sur certains
trucs tu vois, que je pensais en fait avant en tant qu'Européenne et
confrontée là-bas bin ouais voilà tu
réfléchis quoi.
Et tu penses que ça va influencer ta vie à venir ou
disons comment tu vas vivre à présent?
P
Ouais bin ouais je pense ouais.
Tibo
D'accord. Alors finalement ouais bin voilà on a quasiment
fini et puis ça va être l'heure hein...
P
Il est quelle heure en fait?
Tibo
Il est moins vingt.
P D'accord.
Tibo
Oui ça a duré un peu plus longtemps que
prévu (rire)
P
Non mais c'est bon (rire) en fait j'ai juste un rendez-vous avec
C à cinq heures et demi mais c'est bon y a le temps là c'est
juste à côté.
Tibo
Ok. Et pour finir si c'était à refaire est-ce que
tu changerais quelque chose, est-ce que t'es contente de la façon dont
les choses se sont passées?
P
Alors si je devais refaire quelque chose je clarifierais mon
séjour chez cette fille genre je mettrais les choses plus au clair tu
vois genre voilà parce que du coup elle m'a pas fait payer de loyer
alors que je dormais là quoi je dormais dans le salon mais en même
temps elle m'a donné un statut d'invité mais c'était
très ambigu du coup pour moi parce que je savais pas trop ce qu'elle
attendait de
moi tu vois bon j'ai acheté ma bouffe j'ai
acheté et bon moi j'avais cette notion tu vois de bon bin j'ai toujours
envie de dire « bon on mange ensemble? » tu vois c'était pas
pour qu'elle fasse les choses à ma place c'était que j'avais
envie de partager avec elle parce qu'aussi mon vécu de la coloc en
Italie c'était comme ça tu vois (sonnerie de
téléphone) - pardon (C au téléphone, il est
l'heure).
Tibo
On va abréger t'en fais pas, désolé.
P
Mais y a pas de soucis c'est pas grave. Attends juste c'est
quoi que tu me demandais déjà? Ah ouais je clarifierais mon
statut ouais pour que ce soit moins ambigu et euh bin ouais un autre truc je
pense que par rapport au stage non après c'est juste par rapport
à mon copain tu vois je mettrais peut-être moins la pression tu
vois puisque du coup c'est vrai j'ai peut-être mis un peu de pression
quoi par rapport au contexte tout ça je pense que j'étais
moi-même en situation d'acculturation (rire) mais ouais non c'est tout
sinon non j'ai pas de regrets.
Tibo
C'est super. T'as gardé des contacts un peu avec des gens
de là-bas?
P
Ouais avec quelques personnes ouais.
Tibo
Des Brésiliens ou des expatriés?
P
Brésiliens surtout brésiliens.
Tibo
Et tu penses que ça va être à peu près
durable?
P
Ouais ouais.
C'est une bonne chose alors. Et dernier élément,
est-ce qu'il y a des éléments de la culture brésilienne
que toi t'aimerais incorporer pas dans ta culture mais oui ta façon
d'être, des éléments que t'aimerais transposer?
P
Ouais je pense bin justement la façon de vivre les
choses de voir les choses tu vois cet optimisme qu'on a pas mais après
c'est lié au contexte aussi donc je pense que ça va être
dur de l'avoir à tout prix, enfin tu vois je pense la vision des choses
elle est liée aussi tu vois à là où tu vis mais en
même temps voilà l'ayant vécu je pense que je peux essayer
de garder ça aussi.
Tibo
D'accord. Bin écoute merci beaucoup j'ai trouvé
ça très intéressant d'avoir pu discuter avec toi ///
Entretien avec C (50 minutes)
Tibo
Pour commencer, je voudrais savoir comment tu en es
arrivée à partir au Brésil, pourquoi le Brésil,
comment tout ça est arrivé quoi, comment ça s'est
goupillé en fait?
C
Bon en fait c'était une drôle de coïncidence
parce que justement j'avais fini mon Master l'année dernière donc
j'ai validé un Master bac +5 et je savais pas trop quoi faire, j'avais
deux ans d'avance, alors je me suis dit « soit je pars au Brésil
mais je parle pas portugais, ce qui me stresse, soit je reprends un Master de
psycho » parce qu'en plus mon autre diplôme n'était pas
très valorisé en France donc je me suis dit en faisant psycho ce
serait plus simple, enfin je suis partie sur cette branche et puis je suis
arrivée j'ai rencontré ma directrice de recherche de cette
année qui était brésilienne et qui a dit comme ça
en classe « ah bin ceux qui sont intéressés pour faire un
stage au Brésil, s'ils ont un projet cohérent, moi je peux les
envoyer et tout machin » donc je suis allée la voir en fin de
cours, elle m'a proposé, euh on a beaucoup parlé, en plus je
viens de la Réunion donc c'est vrai que le Brésil, la
Réunion c'est des sociétés un peu, un peu soeurs qui au
niveau du métissage, au niveau de l'histoire aussi, et puis et
voilà donc je lui ai dit que c'était marrant parce justement
cette année là je voulais aller au Brésil et puis donc
elle m'a proposé, de fil en aiguille ça s'est fait très
vite en fait, et puis donc justement c'est une bonne coïncidence parce que
bon c'était soit psycho soit Brésil et finalement c'est psycho et
Brésil donc c'était exactement ce que je voulais.
Tibo
Et quand est-ce que tu as pris la décision pour de bon de
dire « c'est bon j'y vais »?
C
En fait pour moi ça m'a paru tellement simple et
tellement une évidence c'est que quand je lui ai parlé je me suis
dit, j'avais pas l'impression que c'était concret, et puis quand la
semaine d'après elle m'a dit « bon c'est bon j'ai vu, est-ce que
ça te dit? » je me suis dit c'est vraiment concret quoi j'y vais
vraiment et puis j'ai réalisé à ce moment là mais
sur le coup je me suis dit « c'est pas possible, c'est une drôle de
coïncidence » je m'étais pas vraiment projetée et puis
finalement quand elle a commencé à me donner des projets concrets
là je me suis dit « mais ça y est quoi, on y va » et
puis ouais, enfin ouais je me suis pas trop freinée en fait j'avais un
peu d'économies de côté et puis c'est exactement ce que je
voulais faire je suis mon chemin en fait c'était, je savais pas trop
quoi choisir
et puis finalement c'est comme si ma route me mettait sur le
Brésil quoi alors je me suis dit « allez on y va c'est parti quoi
».
Tibo
Super. Justement, à propos de tes expériences
à l'étranger, tu as déjà voyagé au Canada,
à la Réunion pendant deux ans et demi, au Burkina Faso, etc.,
est-ce que t'as le sentiment que ces expériences à
l'étranger antérieures, est-ce que ça t'as servi?
C
Ah ouais vraiment, vraiment parce que je pense que, de plus
parce que je suis partie avec une fille qui n'avait aucune expérience de
voyage, et justement c'est ce voyage là où je me suis dit «
ouais finalement ça y est, j'ai des bagages quoi, j'ai voyagé
», c'est mon truc de toute manière, moi tout mon cursus, toute ma
vie c'est ça, voyager c'est ma passion, c'est ce qui me fait vivre aussi
parce que quand je voyage je me sens bien et je pense que ouais c'est clair que
mes expériences antérieures m'ont beaucoup aidé, surtout
au Canada parce que c'est vrai que le Burkina Faso, la Réunion, c'est
des endroits où on parle plus ou moins français donc euh, puis
j'ai une facilité pour les langues donc c'est venu tout seul ça
le créole, tout ça quoi, donc c'est vrai que le Canada
c'était immersion anglophone et là le Brésil
c'était immersion lusophone donc c'est vrai que je mets un peu en
parallèle ces deux expériences là et c'est vrai que ouais
concrètement mes expériences d'avant m'ont beaucoup servi.
Tibo
D'accord. D'ailleurs t'as fait des progrès assez
fantastiques en portugais non?
C
Ouais, ouais ouais, c'était impressionnant, je sais pas
qu'est-ce qui s'est passé dans ma tête mais en plus j'étais
hyper stressée avant de partir parce que j'avais pris des cours et je
m'en sortais pas du tout et puis c'est venu naturellement, je sais pas comment
ça se fait, j'avais l'impression que j'avais le portugais en moi quoi
(rire), c'est venu tout simplement ouais.
Tibo
Super. Est-ce que tu peux me parler un petit peu donc de ton
cadre, dans quelle ville t'étais, quelle région du
Brésil?
C
En fait du coup nous on est parti dans le nord du
Brésil, à Recife, dans le Nordeste, et puis, ouais, et puis en
fait du coup Mme X, notre tutrice, nous avait proposé deux
régions, donc c'était Rio Grande do Sul, ou Nordeste, avec
Recife, et c'est vrai que moi j'étais particulièrement
attirée par le nord parce que mon étude, d'une part je faisais un
stage et d'autre part ma recherche sur place était sur
l'africanité donc c'est vrai que dans le nord c'est beaucoup plus
présent, beaucoup plus affirmé qu'à Rio Grande do Sul
où c'est beaucoup plus européen, donc c'est vrai que moi
ça me faisait particulièrement écho, et puis donc
voilà, on est parti pour faire un stage et une étude enfin
finalement ça s'est révélé être deux stages
parce qu'on était deux du coup à partir et la deuxième a
pas compris qu'on devait se partager les stages donc elle m'a fait passer le
message comme quoi il fallait qu'on fasse les deux et puis finalement les gens
sur place se sont ajustés à nous, enfin c'était tout une
dynamique qui a fait que finalement on a fait deux stages au lieu d'un, et
aussi que du coup on avait notre recherche à faire en plus donc le
séjour a été complètement surréel, on s'est
dépêché et euh moi je suis hyper heureuse de ce que j'ai
vécu, ça faisait longtemps que j'avais pas eu ce sentiment
d'être au bon endroit au bon moment et ouais et puis j'ai eu une
espèce de fusion avec le peuple brésilien je sais pas, j'avais
une attirance très forte pour le Brésil depuis très
longtemps, depuis vraiment petite, mon père écoutait beaucoup de
musique brésilienne et puis enfin cette langue elle était
vraiment dans ma tête et enfin voilà on est parti, je me suis un
peu perdue du coup.
Tibo
Et du coup c'est intéressant parce que cet attrait pour le
Brésil c'est pas de cette année, ça remonte à avant
le fait que tu voulais y aller...
C
Ah oui complètement, parce que moi ma passion c'est
tout ce qu'est africain, je sais pas pourquoi, depuis vraiment longtemps, et un
retour à je sais pas quoi, et complètement contradictoire avec
mes origines parce que je suis d'origine russe, anglaise, enfin je sais pas,
mais en tout cas j'ai une attirance très forte pour l'Afrique et puis
toutes ces sociétés métissées c'est vraiment ma
passion, enfin de toute manière mon cursus professionnel, universitaire,
c'est l'interculturel donc c'est vrai que c'est des choses qui me renvoient
à des choses très profondes et le Brésil, c'est vrai que
mon père m'a beaucoup ouvert à la musique brésilienne
j'adore les percus, j'en fais beaucoup donc c'est vrai que, que le
Brésil c'est un peu un endroit privilégié pour ça
et donc oui ouais le Brésil ça a été présent
depuis très très longtemps et je peux pas trop expliquer
pourquoi, je sais que quand j'étais ado pendant deux-trois ans j'ai du
faire une fixette sur le Brésil mais énorme (rire), puis
ça m'est
passé, il y a eu la Martinique, la Réunion, et
beaucoup de choses qui sont passées, et bizarrement, quand j'ai fini mon
cursus à la Réunion, ça m'a renforcé ce
désir d'aller voir cette terre où il y a du métissage
aussi où l'Afrique elle est là mais d'une autre manière et
puis voilà, je suis arrivée à la fin de mon diplôme,
je sais que la Réunion c'est ma terre hein, c'est là ou je veux
finir et là où je veux revenir, mais j'ai encore envie de
profiter de cette soif de découvrir, de toutes ces opportunités
d'être libre pour voyager encore et du coup c'était ça
c'était bon ok je finis mes études je vais au Brésil ou je
continue mes études puis finalement les études ont pris le
dessus, la raison a pris le dessus mais le Brésil était dans le
fond quoi, il était en arrière plan c'est sûr.
Tibo
Et donc c'est pour ça que quand je t'avais demandé
quel sens avait ce voyage au Brésil t'as marqué que pour toi ce
voyage c'était des « retrouvailles »?
C
Ouais retrouvailles parce que j'ai vécu des choses
très difficiles cette année à Lyon déjà
parce que c'était le retour en métropole et que
j'appréhendais beaucoup, ça faisait déjà
près de trois ans que j'étais à la Réunion et que
déjà j'avais ce sentiment de retrouvailles à la
Réunion, d'avoir trouvé la terre où je devais être,
d'être retournée à quelque chose de très profond et
ouais c'est vrai que quand je suis revenue ici ça a été
tout une démarche de me réapproprier la métropole qui
pourtant est mon lieu d'origine et puis j'ai eu des histoires très
difficiles cette année et c'est vrai que le Brésil arrivait
à point nommé dans ma vie parce que j'étais pas bien du
tout et quand je suis revenue je me suis retrouvée quoi, j'ai
rencontré les bonnes personnes au bon moment j'avais l'impression
d'avoir retrouvé des gens que je connaissais depuis toujours je me suis
retrouvée aussi spirituellement, ça fait des années que je
lâchais cette partie là de ma vie que je savais pas trop où
j'en étais, j'ai fait des rencontres magnifiques là-bas, ma
recherche aussi c'était sur le Candomblé donc j'ai
été très amenée à rencontrer des gens qui
étaient...tu connais le Candomblé?
Tibo
Non, j'allais te demander après par rapport à tes
stages et recherches, j'aurais bien aimé savoir ce que tu faisais
précisément.
C
Ouais bin le Candomblé c'était ma recherche en
fait, c'est la religion afro-brésilienne, donc c'est
tous les rites
des afros descendants et tout ça et c'est très intéressant
c'est une philosophie de la vie
qui m'a vraiment touché et j'ai développé
ma spiritualité vraiment à fond là-bas et, et
retrouvailles aussi parce que j'ai l'impression que j'ai vu tellement de choses
à faire au Brésil, j'ai l'impression que c'était une
petite part de chez moi quoi, et aussi justement c'est ce que je te disais
plein de choses qui sont pareilles avec la Réunion, y a la
végétation, la nourriture, une certaine manière de vivre,
une manière de voir la vie aussi, et c'est vrai que ça m'a, ouais
un petit retour chez moi après la nostalgie ça faisait depuis six
mois que j'étais partie de la Réunion ça faisait un bien
fou quoi pour plein de trucs quoi.
Tibo
On le sent parce que quand je parle avec toi, quand je lis le
questionnaire, on dirait que tout de suite t'étais très à
l'aise au Brésil, que tu te sentais vraiment bien à tous les
niveaux, voilà c'est peut-être ce qui explique, le cadre, etc.?
C
Bin je pense aussi peut-être que aussi mon choc culturel
en fait c'était pas du tout à l'étranger, mon choc
culturel il est là parce que je reviens et c'est vraiment une
problématique très forte de vie c'est que c'est très
personnel c'est que euh toute ma vie, quand je reviens, c'est là que
j'ai mon choc culturel c'est là que je me dis « ma culture elle
m'appartient pas » et je me sens mieux chez les autres que chez moi et
c'est hyper fort en fait parce que à chaque fois que j'arrive dans un
pays j'ai pas ce moment où je me dis « ouh qu'est-ce que je fais
là et tout » à chaque fois je suis là «
qu'est-ce que c'est trop bien ce truc là, qu'est-ce que je suis chez moi
» et j'arrive tout de suite à tisser des liens avec les gens,
après mes destinations je les prends pas au hasard hein, c'est vrai bin
c'est vrai que j'ai toujours l'impression d'être à l'endroit
où je dois être quand je voyage et de pas l'être quand je
reviens et c'est vrai que, sauf pour le Canada qui a été une
grosse surprise parce qu'en fait j'avais postulé pour des
échanges en Espagne enfin tout dans le sud moi c'est toujours dans le
sud, et en fait j'ai pas du tout été prise et c'est une de mes
amies qui m'a laissé son voyage pour en faire un autre, et du coup le
Canada j'avais pas pensé en fait, j'avais pas élaboré et
finalement je me suis retrouvée pareil, là vraiment pour le coup
ça a été l'endroit où je devais être au bon
moment j'ai rencontré des personnes avec qui je suis encore en contact
après cinq ans et puis ça a été la
révélation de mon voyage aussi parce que quand je suis partie
là-bas en fait je suis partie avec une amie, et elle m'a
lâché sur place en fait donc j'ai commencé à voyager
toute seule j'avais pas le choix et à partir de ce moment là
j'ai, parce que quand je voyage je voyage toute seule et je pense que c'est
important de le préciser parce que c'est pas du tout la même
démarche parce que quand tu voyages toute seule t'es face à toi
même tu te poses beaucoup de questions sur ton identité, tu remets
beaucoup les choses en
question, ton cadre culturel aussi, et c'est vrai que suite
à cette étape là du Canada où je me suis
retrouvée toute seule j'ai eu, maintenant c'est comme une drogue quoi,
il faut que je voyage toute seule, j'ai besoin de me retrouver toute seule dans
un cadre autre que mon cadre de naissance quoi et puis c'est comme ça
que je me construis honnêtement hein, moi mon identité elle est
construite comme ça.
Tibo
Est-ce que justement là c'était un peu
différent parce que t'étais avec quelqu'un? Tu l'as senti?
Ça t'as, peut-être pas gênée, enfin je sais pas si
c'est le bon mot, mais....
C
Si, ça m'a gêné parce qu'en plus cette
fille honnêtement enfin, allez je le dis elle l'écoutera jamais,
mais ça s'est vraiment pas bien passé elle avait vraiment un
complexe d'identité puis justement c'est ce que je te disais elle avait
de grosses choses à régler en voyageant et moi ça m'a
bousillé mon énergie quoi parce que j'y allais déjà
j'étais pas bien avec moi-même et quand j'y suis allée
j'avais pas la force de m'occuper de quelqu'un d'autre qui avait son propre
choc culturel et elle m'a gaspillé mon énergie puis elle son
voyage s'est très mal passé et j'avais tellement peur
d'être assimilée à elle parce que elle renvoyait des choses
très négatives aux gens et c'est vrai que ça m'a
bousillé mon énergie mais je regrette pas parce que ça
faisait partie de la dynamique du voyage aussi certaines choses que je devais
traiter avec moi-même aussi pourquoi pas partager des choses et pas faire
tout le temps des voyages toute seule et ouais j'ai des choses à
partager, mais le problème c'est que cette fille elle était
complètement dans une dynamique de d'arraché, elle était
arrachée à sa terre hein, elle le vivait super mal et elle
voulait pas en parler et elle partageait rien et moi le truc c'est que j'avais
le sentiment d'être responsable d'elle et d'autant plus parce que je
savais qu'elle avait jamais voyagé et qu'elle voulait pas en parler,
elle faisait plein de bourdes qui me faisaient sentir qu'elle était pas
du tout débrouillarde et que c'était la première fois
qu'elle partait, et elle voulait pas partager ça au lieu de dire «
tu peux m'aider? » enfin non elle était pas du tout dans une
demande et du coup moi ça me rendait responsable d'elle.
Tibo
Je comprends tout à fait. On va parler d'images. Est-ce
que au Brésil t'as été, pas la victime mais oui, de
préjugés, de stéréotypes, positifs ou
négatifs hein. Est-ce que t'avais une image en tant qu'Européenne
ou que Française peut-être, et est-ce que tu l'as senti par
rapport aux gens, aux Brésiliens quand vous discutiez, en bien ou en
mal?
C
Ouais bin justement, ça a un lien avec elle parce que
moi j'assume pas du tout mon côté français j'ai vraiment un
rejet de mon identité je sais pas pourquoi, c'est pas que j'ai honte
d'être française c'est que je me sens profondément pas
française et en fait du coup quand je voyage je suis assimilée
à la France et qu'en fait je le porte pas et c'est hyper lourd pour moi,
et le truc c'est que d'autant plus que Véronique, cette fille avec qui
je voyageais, elle avait euh, elle renvoyait ce que je déteste en France
en fait elle s'ouvrait pas du tout, elle trouvait que tout ce que les gens
faisaient était bizarre et pour moi c'est ça, enfin la France
c'est une vieille dame qui a peur de l'Autre en fait et c'est vraiment ce
qu'elle me renvoyait et du coup dans cet environnement qui en plus est hyper
chaleureux où les gens ouvrent leur porte complètement, ouvrent
leurs bras, moi je me sentais mal, je me sentais mal d'être
assimilée à elle en fait elle représentait pour moi tout
ce que j'aime pas en France et c'est vrai que ça c'est assez difficile
pour moi quand je voyage c'est que je supporte pas d'être
assimilée à une Française alors que c'est ce que je
renvoie en fait et je sais pas je pense que j'ai vraiment un travail à
faire sur ça pour ma propre identité culturelle puis et puis
aussi ça c'est un truc que je porte énormément et surtout
parce que je voyage dans les pays du sud où le peuple est plus
métissé c'est que quand je suis blonde c'est H24 quoi c'est tout
le temps « ah la blonde nanana » et puis je représente
ça quoi la fille blonde un peu exotique c'est vrai que
particulièrement à la Réunion et en Afrique moi ça
me pesait et au Brésil j'ai fini par le ressentir et ça c'est
quelque chose que je supporte pas. Tu vois, comment les hommes t'abordent et
puis ouais tu représentes quelque chose quand même en temps que la
blonde quoi surtout dans les pays du sud où y en a pas tant que
ça, bon après c'est vrai que le Brésil c'est
différent parce que y a beaucoup de blondes, enfin y a pas beaucoup de
blondes mais c'est vrai qu'on représente quelque chose en tant que femme
blonde, et surtout quand je voyage c'est vrai que ça c'est un truc tout
bête que j'aime bien raconter mais j'avais rencontré une fille au
Canada qui voyageait tout seule et qui me disait « mais moi j'ai jamais
d'histoires avec des hommes et tout et qui essayent d'aller plus loin et tout
» mais moi je disais « mais moi tout le temps » mais cette fille
elle était hyper grande, très brune avec des cheveux super longs
et je pense que y a un type de fille que les hommes aiment plus attaquer quoi
et c'est vrai que ouais, et puis je suis petite et puis enfin bon bref y a
plein de trucs qui font que c'est vrai que physiquement j'attire pas
forcément les hommes bien intentionnés et au Brésil je
l'ai ressenti aussi mais c'était pas comme à la Réunion
parce qu'à la Réunion c'est une attaque constante quoi, c'est
« hé la blonde nanana » là au Brésil
c'était plus subtil mais c'était présent et ça
ça me fatigue, vraiment, j'ai même pensé une fois à
me teindre les cheveux mais j'ai pas eu envie d'enlever ma couleur naturelle
parce que pour une question de stéréotypes ça
m'énerve mais c'est vrai que c'était présent au
Brésil, je peux pas dire que ça y était pas.
D'accord. Est-ce que maintenant tu pourrais me parler un petit
peu de tes lieux de stages, de tes relations avec tes collègues, avec
tes « patients » ou « élèves » je ne sais pas
comment les qualifier et puis voilà, qu'est-ce que tu faisais
là-bas?
C
Bin y avait deux choses très différentes en
fait, on était dans deux structures donc y en avait une qui était
psychanalytique et qui s'occupait des enfants autistes, donc là on
était vraiment dans une démarche clinique très
psychanalytique et c'est vrai que pour moi c'était un petit peu
difficile parce que je suis pas du tout psychanalyste, mais alors vraiment pas
et euh ça s'empire au fil des ans et euh je comprenais absolument pas
leur démarche alors après je me suis sentie hyper bien
intégrée parce que c'était une équipe très
soudée ils étaient dix-huit psys et hyper avenants,
c'était des gens avec qui je me suis sentie tout de suite en confiance,
avec l'équipe y avait pas de problème mais le problème
c'était vraiment personnel c'est que j'accrochais pas avec leur
manière de travailler, avec leur manière de voir le patient, et
c'est vrai que ça a été un problème parce que euh
je comprenais pas leur méthode et je me suis pas inscrite du coup dans
le lieu de stage comme j'aurais pu le faire et puis surtout parce qu'on avait
pas assez de temps parce que par exemple on participait on partageait les
groupes thérapeutiques avec les psys et y nous demandaient d'aller
consulter avant, de voir les enfants leur dossier et tout on avait juste pas le
temps quoi donc c'est vrai que je me suis pas investie comme j'aurais pu et
puis bon c'est vrai que ça m'a encore renvoyé à ma
problématique de je suis pas psychanalyste en France ou ailleurs c'est
vrai que c'est pas évident d'être psychologue et de rejeter la
psychanalyse, et l'autre [stage] par contre je me suis complètement
retrouvée heu un centre de psychologie transpersonnelle mais surtout
sociale dans les favelas dans une favela de Recife le Coque et puis en fait
là c'était une association donc c'était que des
bénévoles et puis donc nous on participait à des groupes
enfin c'est pas des groupes thérapeutiques du coup c'est des groupes
holistiques qui visaient au développement personnel et identitaire des
enfants donc par petites tranches d'âge donc là c'est vrai qu'on
avait pas trop une place de psy hein moi je dirais plus comme une place
d'éducateur puis vraiment une place de bénévole et puis
là c'est pareil on a été accueilli à bras ouverts
dans les équipes et je me suis sentie faire partie de cette assoc aussi.
L'autre [stage] dans une moindre mesure puisque j'étais pas, je me
sentais pas investie du fait juste du cadre méthodologique en fait mais
de l'autre complètement, c'était vraiment c'était une
révélation hein c'était comme ça que je voulais
travailler et ça a fonctionné alors que dans l'autre stage
j'avais l'impression que je servais à rien autant dans l'autre j'avais
l'impression qu'il y avait des choses très fortes qui se créaient
avec les enfants et quand je suis arrivée dans cette structure
d'ailleurs j'ai eu un
sentiment de déjà vu comme si j'avais
déjà été là dans ma vie c'était
obligé où je devais être là dans ma vie je sais pas
et en tout cas je me suis vraiment trouvée et autant ce que j'ai fait je
pense a servi autant tout ce que les gens m'ont renvoyé m'a
énormément servi.
Tibo
Effectivement parce ça te donnait un rapport
privilégié avec la culture brésilienne d'un
côté avec les enfants, de l'autre côté avec la
représentation du handicap, enfin culturellement tu as du vraiment
apprendre beaucoup je suppose avec ces contacts?
C
Ouais ouais surtout dans la favela. Autant avec les enfants
autistes c'était une structure privée très très
chère donc donc le public était plus ou moins enfin bien
occidental et bien enfin je sais pas si tu connais le Brésil mais avec
les écarts de vie énormes donc ceux qui ont beaucoup d'argent
évidemment ils ne vivent pas comme les occidentaux puisque la culture
est pas la même mais c'est vrai que la société de
consommation est très présente mais autant dans la favela
là c'était la rencontre avec la société
brésilienne pour moi parce que c'est vrai c'est dans ces
sociétés là où dans ces peuples là qui ont
beaucoup souffert que je pense s'inscrivent plus toutes les racines
brésiliennes, tout ce qu'ils ont gardé de l'esclavage aussi je
pense c'est clair que et puis aussi c'était là où il y
avait mon sujet de recherche parce que le Candomblé c'est pas dans les
milieux riches à part à Bahia le Candomblé ça se
fait dans des milieux un peu plus afros donc plus pauvres évidemment
donc là c'était aussi la rencontre avec tout ce côté
spirituel qu'on ne connait pas du tout ici et qui porte vraiment quelque chose
de très fort dans la culture brésilienne y a une présence
très très forte de ce Candomblé et qui en plus est
intéressante parce que à Recife en tout cas cette religion est
complètement discriminée, complètement
stéréotypée, les gens la rejettent complètement
alors qu'en fait elle est présente dans tout les aspects de leur vie et
ça c'est très intéressant aussi mais bon c'est vrai
qu'après moi mon approche de la culture elle est très
différente parce que c'est vraiment ce qui me nourrit en fait de
découvrir la culture de l'Autre que ce soit ici où ailleurs c'est
mon cursus, c'est mon identité, c'est qui je suis et c'est vrai
qu'à chaque fois que j'arrive dans un endroit différent c'est
comme si j'absorbais la culture en fait je suis un peu une éponge, et
euh donc c'est vrai que j'avais déjà beaucoup lu sur le
Candomblé avant de partir parce que c'était mon sujet de
recherche donc j'avais déjà une appréhension de ce que
j'allais trouver et c'était flagrant quoi quand je suis arrivée
dans la favela que les gens m'ont ouvert leur porte enfin ouais.
Je vois. Et justement entre avant et après ton
séjour, est-ce que ton image du pays, de la culture elle a un petit peu
changé ou pas? Est-ce que ça a confirmé ou au contraire
infirmé ce que tu pensais de la réalité
brésilienne?
C
Ouais. Je pense que j'avais beaucoup assimilé le
Brésil à Rio et São Paulo et finalement je m'attendais pas
à voir ce que j'ai vu à Recife puis je m'attendais pas aussi
à voir autant de buildings de trucs comme ça je pensais que
ça allait être un peu plus, peut-être un peu plus j'arrive
pas à trouver le mot euh, préservé, préservé
de tout ça ouais et euh mais bon je m'attendais tout de même
à ça, je m'attendais parce que j'avais aussi une
appréhension de la société réunionaise je savais un
petit peu ce que les sociétés esclavagistes et le passé a
pu donner au niveau culturel, au niveau métissage, et c'est vrai qu'en
plus vraiment pour le coup j'en étais déjà
persuadée avant de partir et je encore plus en rentrant c'est que c'est
des sociétés complètement soeurs quoi et euh c'est vrai
que ma vie à la Réunion a fait que ouais c'est vrai que le
Brésil était une sorte de retrouvailles et je m'attendais
à ça, je m'attendais à ça mais je m'attendais pas
par contre à tant de différences sociales alors que je le savais,
je savais que économiquement le Brésil s'est
développé très vite, qu'il y avait des écarts
sociaux énormes mais j'ai été choquée quand
même, j'ai été choquée de voir comment, en fait
c'était pas la misère qui m'a choqué parce que une fois
qu'on a fait l'Afrique ou linde enfin ce genre de pays on est pas vraiment plus
choqué mais notre choc il est plus aussi douloureux je pense, enfin
c'est pas ça que je voulais, c'est pas que la misère me choque
plus c'est juste que j'ai passé le cap de me dire « houlala c'est
pas possible » mais euh dans le sens où je m'attendais pas à
ce que les gens cohabitent comme ça, j'ai vraiment été
choquée de à quel point les gens vivent vraiment, par exemple la
personne qui m'a accueilli elle était dans un immeuble avec piscine,
salle de sport et tout et au milieu d'une favela quoi je me dis « mais
comment c'est possible quoi que les gens arrivent à survivre, cohabiter
comme ça » avec autant de en France on pourra jamais faire
ça quoi et ça ça a été mon choc quoi du
Brésil de voir des gens dans la misère qui cohabitaient qui ont
aucune rancoeur y a pas de lutte des classes quoi, y a pas de vraie rancoeur
envers les personnes qui ont réussi et y a pas de pitié envers
les personnes qu'ont pas réussi, y a pas de rapports en fait entre les
très riches et les très pauvres et ça c'est un truc qui
m'a choqué.
Tibo
Et tu as pu t'y faire quand même au cours du
séjour?
Ouais mais je pense que comme d'habitude je sais pas pourquoi
je me suis identifiée plus à ceux qui se contentent du peu et
c'est vrai que je me suis un peu détachée de ce côté
occidental et ça a joué sur ma deuxième structure de stage
qui était privée, qui accueillait les gens et qui se permettait
de faire des choses pas de la manière que j'aurais aimé en fait
ouais et je pense que ouais c'est toujours ma problématique de toute
façon c'est que je pense que je viens d'un milieu très riche et
très fermé et que je rejette tout le temps ça et que en
voyageant je me rapproche toujours des gens qui ont rien parce que je trouve
ça fabuleux d'avoir rien et de donner tout et parce que je ressens
ça je sens que et pourtant c'est pas comme si j'avais été
élevée sans rien c'est que au contraire je me retrouve dans ce
don comme ça et c'est vraiment ce que je suis profondément et
c'est vrai que c'est un paradoxe complet dans mon identité quoi.
Tibo
Et justement ce fait d'avoir été
confrontée à plusieurs cultures, civilisations
différentes, est-ce que aujourd'hui ça te permet de porter un
regard différent sur la France, la culture française, voire
l'Europe entière, est-ce que du coup ton image, ta perception de ta
propre culture, est-ce que ça a changé, est-ce que ton
séjour au Brésil a altéré cela, ta façon de
voir, de te voir toi-même en Europe ou en France?
C
Ouais toujours quand je rentre je refais toujours un rejet total
de la France et c'est un problème, c'est vraiment un
problème...
Tibo
À quel niveau? C'est vrai c'est dur de préciser je
pense mais à quel niveau tu fais ce rejet là, qu'estce qui
te...
C
Bin c'est pas la culture française parce que j'aime
beaucoup mon pays, j'aime beaucoup sa diversité, j'aime beaucoup tout ce
qu'il peut offrir de différent que ce soit dans le peuple ou juste les
paysages ou la bouffe ou chaque région a une culture énorme mais
c'est vrai que je supporte pas le peuple français ça me fatigue
son rejet de la différence, ça me fatigue son manque de
communication, sa peur de l'Autre et c'est vrai qu'à chaque fois que je
voyage et que je vois à quel point je suis accueillie, à quel
point j'arrive à me sentir bien dans d'autres pays parce que on
m'accueille comme
ça je me dis « mon Dieu quelle honte on fait en
France » et je me sens toujours en marge de mon propre pays et ça
c'est très difficile quand je rentre parce que bin par exemple ça
c'est un exemple très fort, quand je suis rentrée j'avais pas le
coeur d'aller aux élections quoi, parce que j'avais raté la
campagne d'une et que je me sentais pas de voter pour quelqu'un que j'avais pas
suivi tout ça et puis de deux parce que vraiment c'était la
première semaine où je suis rentrée les élections
et bin je me sentais plus française quoi et bin là je vais
revoter pour le deuxième tour mais je trouve que c'est un exemple hyper
hyper fort parce que euh ouais parce que je me sens pas inscrite dans ce pays
pour son peuple en fait. Et c'est exacerbé surtout depuis que je suis
revenue de la Réunion c'est vraiment les gens m'énervent quoi, la
mentalité m'énerve et je pense qu'en plus c'est pas du tout
objectif hein, c'est vraiment parce que je sais qu'il y a des gens super et que
j'en rencontre aussi mais je me sens pas bien ici.
Tibo
Ok. Bon très bien, c'est quelque chose qu'on va survoler
parce que le retour dans la culture d'origine c'est très
intéressant et tout car ça fait partie de ce que t'as vécu
mais c'est moins dans mon sujet.
C
Ouais puis en plus la chose c'est que je me suis toujours
sentie différente ici avant de voyager bon c'est que mes parents quand
même nous ont fait beaucoup voyager quand on était petit, on a
fait la Grèce en bateau, on est allé au Portugal enfin plein de
voyages comme ça différents donc cette découverte de
l'Ailleurs je l'avais déjà depuis très très petite
enfin mes parents à dix-huit mois ils sont partis aux Baléares
quoi enfin c'est vrai que j'ai commencé à voyager très
très vite mais c'est vraiment je me suis toujours sentie
différente dans mon propre pays mais je savais pas de quelle
manière et quand je suis allée au Canada ça m'a paru comme
une évidence je me sentais pas d'ici mais c'est très
étrange comme sentiment parce que en même temps c'est ce que je
suis évidemment c'est la culture c'est inscrit en moi c'est mon
éducation et puis mes parents sont très français ma
mère est d'origine anglaise mais elle renie complètement ses
origines elle parle pas anglais elle s'en fout enfin pour elle elle est
française et c'est vrai que ouais moi je me sens pas d'ici et ça
a été évident à partir du moment où j'ai
voyagé.
Tibo
D'accord, d'où presque une certaine quête de «
spiritualité » comme tu as pu dire tout à l'heure?
Bin spiritualité non parce que c'est la première
fois que je rencontre ma spiritualité enfin c'est pas la première
fois que je la rencontre mais c'est vrai que ça m'a permis de retrouver
une spiritualité que j'avais perdu complètement mais ça
c'était au Brésil, parce que mais j'y suis pas allée dans
cet objectif c'était ça qui était très
intéressant c'est que j'y suis allée toujours dans cette envie de
découvrir l'Afrique autre part c'est toujours pareil moi c'est toujours
l'Afrique qui me motive, mais c'est vrai que bizarrement alors que je
m'attendais pas du tout à ça c'est là que je me suis
retrouvée en plein dans ma spiritualité dans ce que je croyais
j'ai remis en question beaucoup de choses et c'est vrai que ça m'a
beaucoup fait avancer et puis je crois que j'ai rencontré aussi les
bonnes personnes au bon moment mais après non, quand je voyage c'est
plus une quête identitaire honnêtement plus que spirituelle, c'est
une quête identitaire justement parce que comme je m'inscris pas ici je
veux savoir où je m'inscris ailleurs et pourquoi en fait.
Tibo
Et justement donc quand t'es arrivée au Brésil,
comment t'as fait pour rencontrer des gens, est-ce qu'il y avait des
stratégies, comment ça s'est passé pour se faire des amis,
nouer des liens?
C
Bin en fait c'est ça qui a été super
bizarre au Brésil et autant je crois vraiment, c'est un peu bizarre,
mais je crois vraiment aux vies antérieures et tout ça, mais j'ai
pas le sentiment de venir du Brésil vraiment pas mais j'ai vraiment le
sentiment d'avoir retrouvé des gens que je connaissais depuis
très longtemps et ces personnes là m'ont renvoyé le
même retour, de me dire « j'ai l'impression que je te connais depuis
très très longtemps » et en fait c'est ça c'est que,
je me suis éloignée de la question de départ,
c'était quoi déjà (rire)?
Tibo
Comment tu t'y es prise, comment ça s'est passé
pour rencontrer des gens, comment c'est arrivé?
C
Ouais ouais c'est ça. C'est que du coup quand on est
arrivé on a été super bien accueilli y avait tout qui
était prévu, y avait des gens qui venaient nous chercher à
l'aéroport et tout donc c'est vrai qu'au niveau des liens on a tout de
suite été cocooné c'est vrai que les gens nous
ont emmené à droite à gauche, nous ont dit « il faut
faire ça, ça il faut faire, il faut pas faire » c'est vrai
qu'à ce niveau là ça s'est fait ouais naturellement mais
moi j'ai vraiment l'impression que j'ai rencontré les personnes que
je devais rencontrer sur place alors par exemple un exemple
tout bête c'est qu'au début j'avais vraiment du mal par rapport
à ma recherche parce que pour s'introduire dans le milieu des religions
afros et tout ça c'est pas évident quand on est pas afro et qu'on
est pas de cette culture là parce qu'en plus les gens se cachent plus ou
moins parce que c'est dévalorisé donc c'est vrai que j'avais
beaucoup de mal puis en fait j'en ai parlé à une dame dans
l'assoc comme ça vite fait un dimanche et puis un semaine plus tard j'ai
un musicologue qui faisait le même sujet que moi qui m'a appelé
pour me dire « oui je suis au courant que t'as pas trop de contacts moi
j'en ai plein si tu veux on se rencontre » et en fait mon contact avait
fait le tour de cinq personnes, elle en fait avait filé mon contact
à quelqu'un qui connaissait qui connaissait qui connaissait et qui est
finalement arrivé dans les mains de ce type et en fait vraiment on est
devenu tout de suite ami ça a été hyper fort on s'est
vachement aidé et ça a été comme ça tout le
long, j'ai rencontré que des gens que je devais rencontrer tout le temps
et des gens qui m'ont donné tellement d'énergie qui m'ont
tellement aidé qui m'ont tellement soutenu dans une période de ma
vie où ça allait pas que j'avais vraiment le sentiment que rien
n'était au hasard au Brésil quoi et c'est vrai que j'avais eu ce
sentiment là très très fort au Canada aussi, que je
rencontrais tout le temps les bonnes personnes aux bons moments mais autant
là franchement au Brésil ça a été, j'avais
tout le temps je me sentais super liée avec les gens et les gens me
ramenaient dans leur famille et tout enfin j'ai pas le sentiment de retour sur
une terre mais de retour avec un peuple en fait et c'était hyper fort
enfin, j'ai rencontré un gars que je considère comme mon
père quoi enfin pas comme mon père, comme mon père mais
mon père d'adoption, pareil j'ai rencontré un homme avec qui
c'était très très fort enfin j'ai pas eu de relations avec
lui mais euh c'était très très fort c'est la
première fois que je ressens ça autant de retrouvailles quoi
comme si je le connaissais depuis des années et c'est lui en plus, moi
j'ai ce sentiment là et c'est lui qui m'a parlé de ça y
m'a dit « tu sais j'ai l'impression qu'on s'est retrouvé » y
m'a dit « j'ai l'impression que ça fait des années qu'on que
pour moi c'est évident que je te connais par coeur » et j'avais le
même sentiment et c'est vrai que cette notion de rencontre au
Brésil a été super forte parce que tous les gens que je
rencontrais c'était ça une impression de déjà vu
quoi.
Tibo
C'est assez fantastique.
C
Ouais ouais et c'est pour ça aussi que j'avais vraiment le
sentiment de me trouver au bon endroit au bon moment parce que j'avais
l'impression que tout ce qui m'arrivait c'était écrit en fait.
Tibo
Et dans le même domaine qu'est-ce que tu faisais dans ton
temps libre, quels étaient tes loisirs, tes activités avec les
gens, comment ça se passait un petit peu?
C
Bin j'avais pas de temps libre (rire). C'était vraiment
ça, j'avais vraiment pas de temps libre on passait d'une structure de
stage à l'autre et, et le seul peu de temps pour moi que j'avais mais
vraiment peu c'est-à-dire le soir de huit heures à minuit
c'était pour mon étude donc c'était d'aller trouver des
gens, de faire des entretiens, parce que mon étude c'était la
place des pratiques afrobrésiliennes dans la construction de
l'identité des jeunes des favelas et donc il fallait que je rencontre
des gens qui faisaient de la percu, des gens qui faisaient de la capoeira, des
gens qui faisaient chefs de culte du Candomblé, des jeunes aussi
beaucoup c'est vrai que tout mon temps libre ça passait là-dedans
mais en même temps j'ai pas eu le sentiment d'être privée de
vie privée parce que je me suis retrouvée complètement
dans ce milieu, complètement, je me suis sentie accueillie et
initiée en fait, c'était super bizarre parce que les gens me
parlaient et finalement quand je suis rentrée je me suis dit « en
fait je comprenais plein de trucs que quand je l'explique aux gens y
comprennent rien », des termes vraiment afros mais aussi je pense parce
que je connaissais bien l'Afrique et c'est vrai que quand avec cette
appréhension toute cette culture africaine, des racines, des rites,
parce que je le connais très bien, c'est vrai que les gens m'ont
peut-être senti initiée tout de suite parce que je l'étais
peut-être déjà un petit peu dans le fond. J'élabore
en parlant mais ouais c'était ça c'est que ouais je me suis
sentie intégrée tout de suite ça c'est sûr.
Tibo
Mais du coup toutes tes relations venaient de tes deux stages, de
ton travail, des gens que tu as rencontré de fil en aiguille comme
ça?
C
Ouais j'ai pas eu de, mes potes étaient en lien avec
mon sujet d'étude, je me suis pas fait d'amis en dehors, j'avais pas le
temps vraiment, et y a juste deux-trois petits moments où pff j'en avais
juste marre alors je boycottais un peu mon stage (rire), je disais que je
faisais mon étude et puis en fait je voulais juste prendre une heure
pour dormir parce que vraiment j'étais crevée et donc j'allais
à la plage pour dormir et c'est tout le temps sur la plage que je
rencontrais des gens, c'était incroyable, je rencontrais, une fois j'ai
passé, bon là j'avais pas boycotté, j'étais
vraiment au repos et j'avais pris du repos et j'étais partie sur la
plage et j'ai passé tout l'aprem avec un petit de huit ans qui m'a
raconté
toute sa vie c'était un petit de huit ans des favelas
donc déjà adulte quoi car ils ont pas d'enfance et il a
raconté toute sa vie et, et enfin voilà toutes les rencontres que
je faisais étaient soit très ponctuelles mais très fortes
soit, soit en rapport avec mon sujet d'étude mais c'était aussi
mes amis quoi enfin c'est vrai que les gens avec qui je parlais du Maracatou,
le Maracatou je sais pas si tu connais c'est un style de percussion, ou de la
capoeira ou du Candomblé c'était des gens que je côtoyais
aussi par les cérémonies, ou pour plein d'autres choses donc
c'est vrai que ouais, puis on se retrouve, c'est un petit milieu hein donc
c'est vrai que finalement les contacts se font très vite parce que c'est
un petit milieu quoi et parce que aussi je restais toujours dans le même
favela donc les gens se connaissent quoi.
Tibo
Et à propos de ta colocation, comment ça s'est
passé un petit peu?
C
Ah c'était mitigé hein. Ma colocation de la
personne qui me, après la personne qui m'accueillait c'était un
peu ambivalent parce que c'est vrai qu'en fait je m'entendais bien avec elle
mais j'avais le sentiment que elle elle était mariée...
Tibo
Il s'agit d'un Brésilien, d'une personne
brésilienne?
C
Ouais ouais et déjà je m'entendais pas du tout
avec cet homme là, enfin c'est pas que je m'entendais pas du tout parce
que je l'aime bien il est sympa mais je me retrouvais pas du tout en lui quoi,
enfin c'est quelqu'un qui est très très très riche, qui
aime pas du tout les favelas, qui n'avait rien à voir avec mon sujet
d'étude, qui voulait pas que je parle des trucs afros dans la maison
parce que ça porte malheur, enfin bref voilà, j'étais un
peu la macumbella du truc, la macumbella c'est le terme
négatif associé aux personnes qui font du Candomblé et
c'est vrai que je me suis pas sentie un rapport très fort avec cet homme
là et j'avais le sentiment qu'elle elle était un peu jalouse de
moi en fait parce que plusieurs fois elle m'a fait des remarques en disant que
j'allumais les hommes enfin des trucs comme ça quoi donc j'avais
vraiment pas le sentiment, et puis j'étais vraiment pas du tout partie
dans cette optique là je, enfin bref du coup ma relation avec elle
était assez ambiguë en fait parce que en même temps on
s'entendait bien, en même temps on, on avait l'impression qu'elle elle
instaurait un peu de rivalité enfin donc bref ça s'est bien
passé mais je peux pas dire que je me
sentais chez moi quand je rentrais à l'appart enfin
bizarrement je dormais aussi dans la favela et c'est vrai que je me sentais
plus à l'aise quand je dormais dans la favela alors que quand j'entrais
dans cet immeuble tout aseptisé.
Tibo
T'as fait tout ton séjour dans cet immeuble?
C
J'ai été accueillie chez eux mais finalement
vers la fin je dormais tout le temps dans la favela parce que comme je faisais
tout le temps des cérémonies ça finissait tard et
ça craignait plus de sortir de la favela que de rester dedans en fait
donc je restais dans la favela la nuit.
Tibo
D'accord, je croyais que tu vivais avec Véronique.
C
Ah non non et heureusement parce que déjà je la
supportais plus dans les stages mais alors si on avait partagé notre vie
c'était pas possible, elle me puisait mon énergie vraiment, et
heureusement qu'on a pas cohabité mais après oui non
j'étais quand même très indépendante, j'ai
été très très bien reçue, ça je le
retire pas, mais c'est juste que un mois et demi c'est long avec des gens qu'on
choisit pas et c'est vrai que non ça s'est bien passé, je peux
pas dire ça, mais je me suis pas retrouvée dans ce groupe quoi,
c'était pas le côté du Brésil qui me faisait
écho. Mais c'était intéressant aussi de voir l'autre
[côté].
Tibo
Oui parce qu'il y a plusieurs Brésils.
C
C'est ça, et puis en plus vu qu'ils étaient
très riches ça me permettait aussi euh, leur environnement, y
connaissaient rien du Candomblé, y connaissaient rien de mon sujet
d'étude, toute les pratiques afros c'est vade retro satanas et
justement ça m'a apporté énormément pour travailler
sur ces stéréotypes hein, sur qu'est-ce qui fait qu'on rejette
l'afro, enfin la culture afro et tout ça donc c'est vrai que
c'était aussi très riche mais moi je me suis pas retrouvée
parce que justement ce que j'étais au Brésil c'était
vraiment inscrit dans ce milieu très tradi et ils n'étaient pas
comme ça et puis eux ils
sont très très riches quoi donc c'est des bagnoles
et enfin c'était pas le Brésil que je côtoyais après
en fait.
Tibo
Tout à fait. Et est-ce que t'as connu des galères,
enfin ce qu'on appelle des galères quand on roule sa bosse, est-ce que
t'as connu ça au Brésil?
C
Bin justement alors c'est c'est toujours parce que moi je suis
Miss galère, tout le temps la poisse, quand je voyage il m'arrive tout
le temps des trucs de fou mais de fou vraiment, genre des gars qui me
poursuivent ou des trucs comme ça, enfin vraiment à chaque fois
que je voyage j'ai des histoires de malade où je rencontre des gens trop
bizarres enfin bref et, et en fait c'est le seul voyage que j'ai fait dans ma
vie où y m'est rien arrivé. Et en plus quand je voyage je
m'attends toujours à avoir la poisse comme ça, tout le temps des
crasses et c'est vrai que les gens quand je rentre de voyage y attendent
toujours mes petites histoires, mes petites aventures qui m'arrivent de trucs
de merde, enfin pardon (rire), mais euh mais c'est ça non c'est vraiment
euh enfin y m'arrive la poisse et là au Brésil bizarrement y
m'est rien arrivé du tout et que des choses positives. Rien de
négatif, à part mes relations avec Véronique qui
n'étaient vraiment pas positives pour l'une comme pour l'autre, mais euh
après vraiment y m'est pas arrivé de poisse quoi. Ah si des trucs
enfin un peu futiles quoi genre je me trompe de bus et je fais quarante
kilomètres dans un sens et je me rends compte que je suis super loin de
la ville et qu'il est vingt-heures trente, enfin ce genre de truc en fait mais
c'est pas enfin je panique plus du tout en fait enfin mais ça c'est
pareil hein, c'est mon expérience de voyage qui fait que quoi qu'il
arrive le danger c'est les autres hein c'est pas soi-même quoi donc
après si on panique c'est vrai qu'on fait ressentir ça aux autres
enfin mais c'est vrai qu'en Afrique il m'arrivait tout le temps plein de trucs
enfin des trucs à la con quoi enfin du genre taximan qui veut plus
s'arrêter qui veut plus me laisser sortir du taxi enfin ce genre de trucs
qui peuvent être dangereux mais au Brésil jamais...jamais...si,
si, je mens. Il m'est arrivé un truc mais j'ai tout de suite
réagi et j'ai pas eu peur en fait c'est pour ça que c'est
à ce voyage là que je dis que je me suis rendue compte que
ça y est j'avais de l'expérience, parce que j'étais partie
en fait y avait c'était le dernier jour du carnaval parce que j'y suis
allée pendant le carnaval, et en fait le couple chez qui j'étais
était trop crevé mais moi je voulais pas rater une minute du
carnaval quoi c'est vrai que eux ils y sont tous les ans mais moi j'avais
vraiment envie de profiter et je suis partie au carnaval toute seule et je
savais que ça craignait parce qu'en plus c'était dans un coin de
la ville où ça craignait et donc j'ai fait attention à pas
m'habiller trop euh voilà, en plus c'est vrai que je suis blonde donc
à chaque fois je
passe pas inaperçue, et puis en fait y a un gars qu'est
venu hyper efféminé qui dit, qui arrive en m'abordant en me
disant « je suis homosexuel » et puis y me dit « oui je t'ai
remarqué, je te trouve très très belle j'aimerais bien que
tu fasses du mannequina et tout en fait je cherche des mannequins et nanana
» donc y commence à me parler j'y dit « ouais bin ça
m'intéresse pas moi je suis psy donc le mannequina c'est pas moi et puis
je pense pas être une bombe donc euh » et puis y me dit « mais
non ce serait bien qu'on fasse des essais photos nanana » et j'y dit
« bin non c'est pas trop mon truc merci et tout » et y m'a
collé collé collé et y m'a forcé à aller
chez lui et j'ai vraiment eu les bonnes réactions en fait, je l'ai pas
brusqué, je l'ai pas, j'ai essayé vraiment d'aller dans son sens
sans trop aller dans le sien justement (rire) et je m'en suis bien sortie quoi
mais c'était dangereux, je savais que c'était dangereux, puis en
plus y m'avait sorti des trucs genre « oui, je travaille que avec des
filles de Russie, d'Europe de l'est » enfin moi j'avais compris, j'avais
senti le truc en plein carnaval je vois pas pourquoi on va faire des photos
dans un appart enfin mais je pense que ce genre de truc à une fille
très naïve qui voyage pas qui prend pour un compliment qui dit
qu'il est vraiment homosexuel, elle pourrait aller dans le truc quoi, mais
ça ouais c'est parce que j'ai de la bouteille et que je sais ressentir
les gens maintenant aussi et que je sais aussi ne plus paniquer parce que si
j'avais paniqué il aurait pu prendre le dessus quoi. Là j'y ai
montré que ça m'intéressait pas point quoi.
Tibo
Et justement donc l'insécurité est-ce que tu l'as
ressentie un petit peu, est-ce que t'as ressenti, y a peut-être des
différences par rapport à la métropole ou peut-être
même à la Réunion je sais pas?
C
Oui ouais c'est clair qu'on peut pas dire que le Brésil
est pas dangereux, honnêtement c'est un pays dangereux et surtout parce
qu'on était dans les favelas donc c'est clair que voilà, mais en
même temps je me suis jamais sentie vraiment menacée contrairement
à en Afrique. En Afrique j'ai vécu vraiment des choses
très dures, parce que bin on est blanc et que du coup ça a pas du
tout la même valeur que au Brésil, et au Brésil j'ai rien
vécu de tout ça. Par contre c'est clair que je pense aussi que
peut-être que mon comportement fait que je suis peut-être moins
naïve donc les gens m'attaquent peut-être moins, je sais pas si les
agressions sont une affaire de ce qu'on renvoie à l'autre ou une affaire
de malchance, je sais pas.
Tibo
Je parlais du climat en général, est-ce qu'il y
avait pas une pression peut-être mais enfin je sais pas
quelque chose ou pas du tout?
C
Ouais quand même...
Tibo
Je connais pas du tout donc je pose des questions naïves tu
vois.
C
Oui mais pas du tout je comprends, mais ouais quand même
on peut pas dire comparé à ici, on se promène pas dans la
rue à vingt-trois heures trente toute seule, mais après je pense
que quoi qu'il arrive quand on voyage vaut mieux pas prendre de risques quoi.
Enfin on est pas dans son pays, en plus quand on parle pas la langue c'est pas
évident et je pense que ce climat d'insécurité il est
là quand on voyage quoi qu'il arrive. C'est sûr que quand on
voyage en Angleterre on voyage pas comme quand on voyage au Brésil par
exemple, mais quoi qu'il arrive, on est une cible parce qu'on a des têtes
d'étrangers et qu'on voit ça donc y faut faire attention.
Après moi je sais que ça c'est un truc qui est intéressant
par contre au Brésil c'est qu'y a une paranoïa énorme des
gens riches mais vraiment, des gens qui comprennent même pas mon travail
dans la favela, « qu'est-ce que tu vas faire là? », «
comment, tu dors dans la favela?! » et oui en effet, c'est clair que
c'était dangereux à l'intérieur de la favela mais pour
être franche moi je me baladais vers vingt-trois heures à
l'intérieur de la favela et j'ai jamais eu de problèmes, j'ai
jamais été agressée. Après je peux pas dire que
j'étais super à l'aise et que je me promenais en shorts et que
tout va bien mais euh voilà c'était pas non plus la grande peur
comme j'ai pu l'avoir en Afrique. Parce qu'en Afrique tu te promènes pas
la nuit.
Tibo
Et est-ce que t'as le sentiment, bon c'est dur de mettre des mots
dessus mais, d'avoir changé, suite à ton séjour au
Brésil, est-ce qu'il y a des choses en toi qui ont changé, et tu
le ressens peut-être?
C
Oui, dans chaque voyage on change, d'une déjà
parce qu'on se comprend, parce que l'appréhension de l'Autre nous permet
de relativiser certaines choses aussi, parce que beaucoup aussi quand je voyage
je rencontre énormément de gens qui m'apportent
énormément de choses donc c'est clair qu'à chaque voyage
je reviens changée mais là ce voyage là je me suis
retrouvée, c'était différent, parce que je pense que je
m'étais perdue, je m'étais perdue en rentrant ici, c'est
ça le pire, c'est que je
me suis perdue en rentrant chez moi, parce que c'est pas chez
moi, et là je me suis retrouvée. Et ça m'a fait du bien.
Je me sens pas changée, je me sens sur la bonne route, et c'est
ça qui est différent en fait, c'est que j'ai l'impression de
m'être retrouvée et d'être repartie dans une dynamique que
j'avais perdu en fait. Mais oui dans une certaine mesure c'est un changement
aussi je pense.
Tibo
Et justement donc pour l'avenir, est-ce que tu as l'impression
que ce séjour au Brésil influence déjà ou va
influencer un petit peu ta vie à venir?
C
Ouais complètement.
Tibo
Dans quel sens? Tu peux m'expliquer un peu?
C
Bin parce que j'ai une proposition de doctorat là-bas,
et que j'y pense vraiment. Au départ je m'étais dit « le
Brésil ça va être une partie de ma vie » mais en
partant vraiment j'avais le sentiment que j'avais pas achevé quelque
chose et qu'y faut que je reparte là-bas et euh il y a des gens qu'y
m'ont fait promettre que je reviendrai, c'était hyper fort parce que bon
je suis pas du style à promettre des choses mais j'étais
obligée, enfin c'est pas que j'étais obligée, c'est que
j'ai senti que c'était une évidence de toute manière que
j'allais revenir au Brésil, et en fait c'est que, comme je me suis
inscrite complètement dans le Candomblé, le système du
Candomblé fait qu'il y a des entités religieuses et que chaque
personne descend d'une divinité donc moi je sais quelle est ma
divinité, j'ai déjà consulté des gens pour savoir
et tout, et avant de partir mon chef de culte de qui je suis très
très proche m'a demandé de faire une prière et de
remercier pour ce que j'avais vécu, donc je suis allée dans un
temple alors que c'est pas du tout ma religion hein mais pour te dire comme je
me suis inscrite profondément dans ça et je lui ai demandé
de me mettre sur la route, de m'envoyer un signe, et le lendemain j'ai eu une
proposition de doctorat au Brésil.
Tibo
C'est fantastique.
C
Ouais, après alors on y croit du côté
spirituel ou pas mais en tout cas c'est comme si même si y a pas de
divinités, même si ça n'existe pas - ce dont je ne suis
plus du tout convaincue mais, j'ai l'impression que c'est comme si le
Brésil m'avait mis sur la voie alors que c'était pas du tout mon
plan, moi je viens d'une famille qu'est pas très intellectuelle, qui est
pas enfin le doctorat c'est plafond de verre pour moi quoi déjà
finir le Master c'est magnifique je me suis jamais projetée dans une
thèse, je me suis toujours dit « c'est trop loin, être prof
c'est pas possible ».
Tibo
Donc tu l'envisageais vraiment après le Brésil?
C
Ouais, et en fait pour tout te dire c'était ma
quatrième proposition de doctorat dans toute ma vie y a quatre profs qui
m'ont proposé de me prendre en thèse et je sais que c'est faire
la fine bouche mais déjà une proposition de doctorat c'est
énorme, quelqu'un qui te propose de te prendre en thèse je suis
consciente mais c'est tellement mon plafond de verre, c'est tellement ce qui
m'angoisse que j'ai toujours refusé mais après le Brésil
je me suis dit « faut peut-être arrêter de faire la fine
bouche quoi, faut peut-être y aller » et c'est comme si là ce
que j'avais vécu c'était qu'une mise en bouche et qu'il fallait
que je revienne pour compléter quelque chose vraiment et aussi parce que
bin là j'ai abandonné mon Master du coup parce que j'ai pas
réussi en rentrant à faire tout ce que je devais faire donc j'ai
pas concrétisé mon étude que j'avais fait là-bas et
ça me reste en travers de la gorge parce ce que j'ai l'impression qu'on
m'a donné tellement d'énergie, j'ai rencontré tellement de
choses que ça m'embête, ça m'embête de pas avoir, et
du coup là c'est comme s'il fallait que je retourne au Brésil
vraiment mais en même temps chaque pays que je fais j'ai l'impression
qu'il faut que j'y retourne en fait pour des raisons différentes : la
Canada pour les gens ; l'Afrique pour l'amour, parce que j'ai laissé
quelqu'un là-bas ; la Réunion parce que c'est ma terre et que je
sais que je vais finir làbas ; et le Brésil professionnellement
et spirituellement. Donc c'est plein d'aspects de ma vie en fait.
Tibo
Est-ce que tu t'es sentie soutenue pendant ton séjour,
enfin émotionnelement, soutien tu vois affectif?
C
Ouais vraiment parce que, parce que j'ai vécu des choses
dures et que j'en avais pas parlé, que j'ai
commencé à m'ouvrir là-bas, à
recevoir des choses que j'ai aussi rencontré quelqu'un qui après
on y croit on y croit pas, a consulté les Cauris tu sais, c'est un genre
de coquillage, et ça ça fait partie d'une tradition
afro-brésilienne qui m'a révélé plein de choses sur
ma vie, je sais pas comment c'est possible mais il a connu toute ma vie, il a
connu enfin après mon futur on y croit on y croit pas mais y m'a dit
beaucoup de choses, on a parlé pendant quatre heures, de ma vie, de ce
que je suis, de ce que j'étais, de mes épreuves et de ce que j'ai
vécu, et j'ai fait comme une psychothérapie en
accélérée quoi vraiment ça m'a ouais, je pense que
j'ai traité beaucoup de choses là-bas. Donc ouais j'ai
été très soutenue et par des gens dont j'avais
l'impression que je les connaissais déjà en fait donc
c'était hyper impressionnant comme sensation parce que ouais je me suis
sentie soutenue par des gens qui profondément me respectaient et me
connaissaient en fait alors que c'est vrai que quand on voyage on rencontre pas
forcément des gens bienveillants et que là pour le coup vraiment
j'ai rencontré que des gens bienveillants mais après c'est vrai
que euh soutenue par rapport à...
Tibo
Bin parler de tes soucis, de tes petites galères, est-ce
que tu te sentais isolée quoi simplement?
C
Non je me sentais pas isolée et je me sentais non pas
isolée du coup sur mon quotidien là-bas parce que les gens
étaient très prévenants, ils nous disaient beaucoup «
attention sortez pas là nanana » même peut-être trop
des fois et autant sur ça sur l'aspect concret de la vie quotidienne
autant sur mon étude aussi, les gens m'ont aidée mais m'ont
ouvert les portes y a un homme que j'ai rencontré que vraiment j'adore
qui m'a, qui a passé deux jours à m'emmener voir tous les gens
qu'y connaissait pour m'aider pour ma recherche, deux jours de sa vie, ce que
je trouve énorme, enfin j'imagine même pas que ça puisse
être possible en France, en plus que c'est un homme très
très occupé et ouais non vraiment soutenue pour tout quoi, pareil
pendant mon stage, dès qu'on avait une question y avait quelqu'un qui
était là pour répondre, après soutenue par mon
côté français, c'est-à-dire par Véronique,
zéro, par par le...il y a quelqu'un je sais pas? [la prochaine
volontaire pour l'entretien est arrivée].
Tibo
T'inquiète pas on a cinq minutes.
C
Mais après par le côté français plus
ou moins parce que ici les gens comprennent pas pourquoi je
voyage.
Tibo
D'accord, je vois. Et bien merci beaucoup, c'était
très intéressant de discuter avec toi ///
Entretien avec M (46 minutes)
Tibo
Pour commencer, est-ce que tu peux m'expliquer un petit peu
comment tu en est arrivée à partir au Brésil cette
année, pourquoi le Brésil, comment ça s'est en quelque
sorte goupillé tout ça.
M
D'accord, depuis euh peut-être que j'ai dix ans, j'ai le
rêve d'aller en Argentine. J'ai dû voir un reportage, je ne
pourrais plus dire d'où vient ce rêve, mais voilà j'avais
ce rêve là et avec ma Licence c'était pas possible, y avait
pas de partenariat en Argentine donc j'avais même pas rendu le dossier
donc j'étais un peu déçue tu vois et, on était plus
tard que le six janvier, et y a O. qui est venu dans ma salle qui a dit «
voilà, je sais que les dates pour les échanges, que la date
de fin où tu dois rendre les dossiers pour les échanges est
terminée mais si y en a qui veulent aller au Brésil voilà,
y a encore une possibilité », alors je me suis dit bin vas-y
fonce en plus comme ça si je suis à côté de
l'Argentine comme ça je pourrais aussi y aller, en Argentine. Et
voilà, c'est pour ça que je suis allée au
Brésil.
Tibo
Très bien, et donc tu as pris ta décision,
tardivement finalement?
M
Oui, bin oui oui je l'ai pris avant le six janvier bin et puis et
je suis partie en juillet donc en fait ouais ouais j'étais assez
speed dans tout c'était assez, plutôt la course, mais
bien du coup.
Tibo
Oui, donc c'est une volonté qui remontait, ça fait
un moment que tu voulais partir dans ce coin là du monde en fait.
M
Ouais vraiment l'Amérique Latine m'a toujours toujours
inspirée j'avais vraiment envie d'y aller et de, mais plus l'Argentine
car je parle espagnol et pas portugais donc c'est vrai que j'avais même
pas pensé à aller au Brésil en fait et mais je suis
très contente au final d'être allée au Brésil.
Bien sûr, je vois. Est-ce que tu peux me parler un petit
peu donc bin de la région, de la région où t'étais,
de ta ville, etc., un peu le cadre de ton séjour?
M
Ouais, alors j'étais dans le sud, au sud au sud, donc
Caxias do Sul, euh, c'est euh, quand je suis arrivée, c'était
l'hiver donc y pleuvait, tous les jours tous les jours, les gens y sont c'est
sûr qu'y sont, t'as un changement radical c'est sûr avec la culture
française et la culture brésilienne tu le vois, mais d'un autre
côté c'est vachement européen, enfin je veux dire,
physiquement, les personnes ressemblent vachement à des personnes
européennes, euh vu que y a beaucoup de descendants italiens et
allemands on entendait quand même des gens parler italien ou allemand tu
vois, alors que bin tu t'y attends pas au Brésil et puis euh,
c'était une ville assez riche, c'était la seule ville du
Brésil qui avait des conteneurs, tu sais pour faire les poubelles et
tout ça, donc c'est vrai que c'était une ville qui qui, qui
faisait Brésil mais qui aussi qui, où y avait aussi quand
même quelque chose d'européen par exemple, que quand tu vas a Rio
ou à Salvador bin tu retrouves plus quoi, ce truc européen je
trouve, donc c'est vrai que j'aurais eu plus le choix j'aurais peut-être
choisi une autre ville parce que cette ville elle était petite et euh,
dans le sud, donc pas facile non plus pour voyager dans tout le Brésil
parce que c'est un pays super grand tu vois, y vaut mieux être au milieu
comme ça tu fais tout quoi (rire) ; et euh, et voilà
ouais, c'est vrai que si je devais refaire cet échange
déjà je referais plus long, je ferais un échange d'un an
minimum...
Tibo
Oui, t'as le sentiment que six mois ça te...
M
Ouais, ouais ça m'a frustrée, franchement je suis
frustrée d'avoir fait que six mois maintenant...
Tibo D'accord.
M
Et euh, ouais, je le ferais plus long et dans une ville où
je, je suis sûre qu'y a plus de d'activité tu vois, plus grande
quoi.
Et à la base six mois c'était donc, c'était
imposé ou c'était un choix personnel?
M
Non, du tout, c'était j'avais donc le choix entre six
mois et un an et je t'avoue que j'étais morte de trouille donc donc j'ai
demandé à O. ce qu'il avait fait et y m'a dit « moi j'ai
fait six mois et ça m'a suffi amplement, je suis rentré y a des
gens qui me manquaient, j'étais content de rentrer », donc bin
moi je me suis dit je vais faire six mois déjà, et c'est vrai que
j'étais contente de rentrer mais j'aurais pu rentrer six mois plus tard
quoi.
Tibo
Je comprends. Oui, parce que c'est ton premier grand voyage c'est
ça non?
M
Ouais, je savais pas du tout comment ça allait se
passer, est-ce que j'allais arriver à m'intégrer, etc., je
partais toute seule alors que le seul voyage que j'avais fait avant
c'était scolaire ou deux semaines en Angleterre enfin tu vois, et donc
là, ouais ouais ça me faisait peur quand même et donc je me
suis dit je vais faire six mois, y [O.] m'a dit que lui six mois
ça avait vraiment été vraiment suffisant, qu'il aurait pas
aimé rester plus, je me suis dit je vais partir sur ça et
j'aurais su je serais partie plus, plus longtemps mais bon (rire).
Tibo
Bien sûr bien sûr. Et t'avais quelle image du
Brésil avant de partir justement, est-ce que ça a changé
entre temps, comment tu voyais les choses?
M
Comme je t'ai dit c'était tellement
précipité que ouais j'ai pas eu le temps de, ni, je l'ai pas pris
non plus, de me renseigner réellement et je me suis dit « tant
mieux ça va me faire la surprise » je vais pas arriver avec plein
de d'aprioris tu sais donc c'est vrai que je me suis pas spécialement
renseignée donc après j'avais un peu, les clichés si tu
veux, j'imaginais les plages, je pensais peut-être voir plus de
pauvreté surtout à Caxias en fait, après quand je suis
allée dans les autres villes c'est vrai que là j'ai eu ma dose
mais euh ouais je pensais peut-être voir plus de pauvreté et je
pensais aussi à des trucs cons mais euh différentes heures de
repas, des trucs comme ça qui en fait non pas du tout. Donc voilà
y a des petits trucs qui m'ont étonnée mais
D'accord. C'est vrai que t'as voyagé après dans le
Brésil, enfin que t'as profité de ton séjour pour voyager
au Brésil ainsi qu'à l'extérieur...
M
Ouais, j'étais bin du coup comme mon rêve
c'était d'aller en Argentine j'ai été faire vingt jours en
Argentine.
Tibo
D'accord, ça c'est intéressant. Et comment
ça s'est passé, t'es partie toute seule, comment tu t'y es
pris?
M
Pour aller en Argentine?
Tibo
En général, dans tous tes voyages.
M
Donc dans tous mes voyages au début on s'était
organisé avec tous mes colocs en fait pour faire un voyage, donc on
avait fait Foz do Iguaçu, Rio, Salvador, puis on était revenu
à Caxias et en fait euh si tu veux la colocation a commencé on
était une grande famille, tous un grand échange, premier et grand
échange dans un autre pays tatati tatata on se retrouve tous
étudiants on se dit en fait c'est bon on va devenir friends tu
sais des meilleurs amis toute la vie mais non (rire). On est
différent, on vient de cultures différentes donc euh le premier
voyage qu'on a fait c'est vrai qu'il a été un peu foireux au
final parce qu'on avait pas les mêmes attentes du voyage mais on s'est
séparé mais tu vois ça nous a juste montré ce qu'y
fallait pas qu'on fasse pour le prochain [voyage] et moi donc pendant
ce voyage je me suis vraiment rapprochée de mon coloc français et
c'est avec lui après que j'ai décidé d'aller en Argentine
et pour y aller on faisait tout au dernier moment, on disait bin aujourd'hui tu
vas faire quoi on se levait et on allait marcher dans la ville on se disait
« bin tiens je viens de voir sur la carte que y a un musée par
là », on y passe et voilà. Et c'est comme ça que
j'ai visité l'Argentine.
Très intéressant, est-ce que c'est un truc que
t'aurais fait en France, par exemple pour dire « tiens je pars »
comme ça, aussi vite, enfin voilà....
M
Non, non et je le regrette. Maintenant j'y pense quand je pars
à la gare maintenant je me dis bon allez je vais où maintenant et
je serais prête à prendre un billet c'est vrai que ça m'a
donné un peu cette spontanéité là.
Tibo
Mmh mmh, tu as l'impression d'avoir pris plus de, d'assurance
c'est ça?
M
Oui voilà c'est ça, je n'ai plus peur d'aller
toute seule du coup même une journée quelque part ça me
fait plus du tout peur donc ouais c'est vrai j'ai envie de, ouais bah, quand tu
dis à la gare j'ai envie d'aller prendre un billet c'est vrai que je
vais pas le faire toute seule parce que je me dis « c'est con même
d'aller à Genève une journée c'est chaud, autant que
j'emmène quelqu'un avec moi » mais euh mais ouais je c'est
ça j'aurais envie de bouger plus que, qu'avant quoi.
Tibo
Bien sûr. Et justement, ta coloc, est-ce que tu peux me
parler un petit peu de ta vie sur place, de ton lieu d'habitation, des gens
avec qui t'étais? Était-ce plutôt des Brésiliens,
des compatriotes, des étudiants internationaux? Comment ça se
passait un petit peu?
M
Et bin y avait deux Espagnols, non un Espagnol, une Italienne,
deux Mexicains dont un qui parlait portugais parfaitement, un autre
Français et moi. On était donc six peut-être dans un
70m2, entre 50 et 70m2, euh y avait deux chambres donc
trois filles d'un côté, trois garçons de l'autre, une
petite cuisine, deux salles de bain et un petit salon, donc tu vois que euh,
que t'as pas d'intimité, jamais, et euh, et je pense que ça a
été du coup le problème de notre coloc parce que on se
retrouvait jamais tout seul tu vois. Je crois que l'appartement a du être
fermé à clef quinze minutes dans les six mois parce que y avait
personne à ce moment là mais sinon y avait toujours quelqu'un et
c'est vrai que ça a été super enrichissant parce que j'ai
bouffé des trucs de tous les pays du coup mais d'un autre
côté ça nous enfermait aussi dans cette euh, dans le fait
qu'on est étranger qu'on reste entre étrangers et y
en a beaucoup qui ont fait ça, j'ai vu les deux
Colombiennes et les deux autres Mexicains qui étaient amis avec nous on
les voyait de temps en temps mais dès qu'on leur proposait de faire
quelque chose dans un autre endroit avec d'autres Brésiliens bin
c'était carrément plus dur tu vois et c'est vrai que après
je l'ai dit à tout le monde, à ceux qui arrivaient tout
ça, « fais attention quand tu fais un échange de pas rester
qu'entre étrangers c'est con quoi ».
Tibo
Ouais, et du coup est-ce que t'as mis des stratégies en
place pour t'intégrer, nouer des liens...
M
Ouais, en fait ça a commencé parce que mon coloc
a eu des amis de par sa fac parce que lui il était tout le temps dans
les mêmes groupes de personnes alors que moi je changeais à chaque
heure de cours, donc plus dur aussi pour se créer de vraies relations
durables tu vois, et donc y s'est fait ces amis là, on a commencé
à bien sympathiser avec eux, et euh, et ensuite, comment, comment
ça s'est passé, je sais plus exactement bref, je me j'ai
rencontré je pense que c'était ah! la journée de l'enfant
j'ai rencontré euh un gars qui avait fait un échange en Europe et
du coup qui voulait me rencontrer pour qu'on puisse discuter et
échanger, parler de notre expérience, et ce gars là il
était danseur de hip-hop et il avait tout un groupe avec lui donc on
s'est rencontré à l'occasion d'une de ses représentations,
et c'est devenu mes, mes amis, vraiment, super bon feeling, donc du
coup après voilà je restais tout le temps avec eux,
j'étais plus chez moi j'étais tout le temps dans la rue avec eux
et je disais donc à mon coloc de venir, ou d'autres personnes tu vois
d'essayer que tout le monde en profite que j'avais cette relation là et
euh voilà, je sais plus si c'était ça ta question de
départ (rire).
Tibo
Si, c'était tout à fait ça, tu as
très bien répondu, non mais c'est bien c'est intéressant,
parce que du coup tu pars sur autre chose, tu y reviens, donc c'est
intéressant parce que tu dis plein de choses et c'est vraiment, c'est
tout à fait ça tu as bien répondu. Et du coup, comment
ça s'est passé à l'université, puisqu'on parlait de
la fac est-ce que tu t'attendais à ça, est-ce que ça t'as
un petit peu déçu, ou...
M
Ouais, totalement déçue de la fac, vraiment
vraiment, tout ce que j'ai appris euh, enfin, je vais pas
dire que je savais
tout mais je l'avais toujours vu dans, peut-être pas dans tous les
aspects mais en
tout cas tout ce que j'ai vu je l'avais déjà
entendu ou vu quelque part euh, j'ai eu des dix sur dix, je
suis française, je parle pas très bien le
portugais, euh je euh, je révisais pas, je vois pas comment je peux
avoir dix sur dix, c'était pour moi surnoté honnêtement. Et
je m'ennuyais en cours, en fait les deux-trois premières semaines
ça a été cool au contraire j'adorais aller en cours parce
que ça me faisait travailler mon portugais tu vois je m'amusais à
prendre des notes après je rentrais chez moi parce qu'il pleuvait en
plus je me disais « bin tiens je vais recopier mes cours comme ça
je vais corriger mes fautes » tu vois je vais bosser mon portugais plus
que les cours en eux-même mais euh je pense que c'est juste pour
ça que j'allais en cours au final. J'avais une prof qui n'était
pas du tout intéressante qui demandait, qui avait séparé
la classe en groupes et on devait faire des exposés et en fait chaque
heure de cours c'était des exposés donc tu vois la prof elle sert
strictement à rien, elle était là mais c'est les
élèves qui font le cours au final. Et on avait après des
évaluations sur ces exposés là. Y avait juste un prof qui
était vraiment vraiment super intéressant et avec qui je
m'entendais bien, que j'ai recroisé dans un bar d'ailleurs,
c'était marrant (rire), et mais sinon j'ai trouvé que les cours
étaient faciles et que j'avais pas appris grand chose.
Tibo
Donc du coup c'était pas vraiment central dans ton
séjour finalement...
M
Non. Mais de toute façon j'y avais pas
été pour ça non plus donc c'est vrai que peut-être
que si je m'étais investie plus dans les cours j'aurais pu y trouver
plus d'intérêt mais c'est vrai que j'y avais pas non plus
été pour les cours donc y m'ont pas intéressée,
j'ai pas vraiment accroché donc je me suis dit et « bin tant mieux
» au final je vais me concentrer sur autre chose.
Tibo
Et sinon à propos de tes loisirs, qu'est-ce que vous
faisiez pendant votre temps libre, est-ce que, comment vous vous organisiez
finalement?
M
Alors en fait je bossais aussi dans une école, je
donnais des cours de français donc euh ma directrice était
génialissime enfin elle avait vingt-huit ans on aurait dit qu'elle en
avait quinze et elle était adorable et donc du coup elle nous emmenait
des fois elle nous prenait moi et je bossais avec l'Italienne et la Mexicaine
et on allait se balader en, on avait fait un circuit de tous les vignobles du
coin tu vois. On les avait fait, on avait goûté les vins tu vois,
des endroits elle nous emmenait visiter des villes une fois de temps en temps.
Et puis sinon je m'occupais pas mal avec les gars qui faisaient
du hip-hop du coup j'allais pas mal à des
représentations avec eux ce qui me faisait voir aussi d'autres trucs de
danse parce qu'ils n'étaient jamais tous seuls tu vois donc
c'était sympa ce à quoi j'occupais mon temps.
Tibo
Est-ce que il y avait une vie universitaire, une vie
étudiante par exemple avec des clubs, des associations, des choses qu'on
fait à l'extérieur, des visites tout simplement de la ville ou
des monuments, je sais pas...
M
Ouais bin les monuments en fait comme je suis arrivée
j'étais le première étrangère à arriver et
euh et ensuite y a eu une autre Française, la deuxième
c'était une autre Française, donc on s'est tout de suite
retrouvé, on nous a présenté d'ailleurs et comme les cours
n'avaient pas commencé, on connaissait personne on savait pas quoi faire
et y faisait super beau et bin on avait visité déjà tous
les monuments de Caxias en fait en une semaine j'ai du visiter les trois-quatre
musées qu'y avait, euh deux églises et puis bon on avait fait un
tour de la ville question de visiter les monuments, etc., parce qu'on
s'ennuyait aussi (rire), donc euh sinon y avait un cinéma à la
fac. Ah oui là-bas aussi la fac c'est exceptionnel.
Tibo
Ah bon, vas-y raconte-moi parce que je connais pas du tout du
tout.
M
Et bin la fac elle est euh t'as un zoo dans ta fac, t'as des
magasins de vêtements, de sous-vêtements, de nourriture, de jus
d'orange, de hamburgers, t'as des magasins de tout t'as tout ce que tu veux
dans cette fac, de locations DVD, etc., t'as un cinéma aussi et donc le
cinéma c'était pas mal parce que je crois tous les mardis
t'achetais une place t'en avais une gratuite donc avec la Mexicaine vu qu'on
aimait bien le ciné on allait se faire souvent des cinés
là-bas. Ouais c'était ça à peu près mes
activités. Un peu comme ici au final, c'est vrai que quand j'en parle
comme ça je me dis bin oui je vais au ciné avec mes copines, je
vais à des représentations de danse moins c'est un truc ouais
voilà.
Tibo
Tu t'es retrouvée à bosser dans une école
comme prof de français alors?
Et bin justement en fait je cherchais un travail, et j'ai
demandé aux Relations Internationales s'ils pouvaient me trouver quelque
chose et y m'ont dit bin vu que tu es en Pédagogie, ça s'appelait
comme ça là-bas, euh, tu je vais essayer de te trouver un stage
et y avait une école de français, euh une école de langue,
à côté de chez moi, et donc j'y avais été et
j'avais dit « bin voilà je suis française est-ce que
ça vous intéresse? », elle a dit « bin très
bien, moi j'ai monté cette école y a pas longtemps avec ma soeur
et si on dit en plus on a des étudiants, enfin des personnes qui parlent
la langue », des natifs c'est ça, « si on a des natifs
ça nous fera peut-être un bon coup de pub » aussi vu que moi
après je les ai orientées vers tous les autres étudiants
étrangers donc ma coloc italienne pour l'italien, ma coloc espagnole
pour l'espagnol enfin tu vois une autre Française pour l'anglais je les
ai orientées bin y m'ont repris et j'ai géré un classe de
cinq à sept adultes, en général ils étaient
sept.
Tibo
D'accord. Ça a du t'apprendre plein de choses
ça.
M
Oh c'était génialissime, parce que t'es avec des
gens qui ont envie d'apprendre c'est des adultes mais d'un autre
côté y en avait une qui avait par exemple, elle avait vingt-trois
ans je crois, j'étais la plus jeune c'était marrant (rire)
j'étais la prof mais la plus jeune, elle devait avoir vingt-trois ans,
elle était là parce que oui elle voulait apprendre le
français mais elle avait pas envie de travailler vraiment, tu vois le
genre de personne que je veux dire (rire), et c'était marrant parce que
je devais justement essayer de lui donner envie donc je m'amusais le soir tu
m'aurais vu, à une heure du matin en train de dessiner des nuages et des
soleils pour préparer la météo pour le lendemain,
c'était grave enrichissant et les gens y étaient, j'apprenais le
portugais aussi, et j'apprenais plein plein de choses car j'essayais de
m'intéresser à ce que eux ils faisaient, comme ça ils
pouvaient me parler de leur travail, de leur métier, comme ça
j'ai appris plein de trucs que je pensais pas que, qu'y y avait des
différences.
Tibo
D'ailleurs, la langue, tu as eu des progrès assez
fantastiques non? As-tu eu le sentiment que tu as bien...parce que tu parlais
un petit peu avant non?
Comme je parlais espagnol franchement ça aide.
Après je pense que quand je suis partie du Brésil, j'ai mon
meilleur copain de là-bas qui m'a dit qu'y comprenait
quatre-vingt-dix-huit-pour-cent de tout ce que je disais, je me suis dit c'est
pas mal quand même (rire). Mais je pense que les trois premiers mois,
non, le premier mois, c'est tellement spectaculaire - bin t'as fait un
échange aussi, t'as, t'as l'impression que tu t'apprends à parler
comme tu manges tu sais, t'es en train de manger et puis tu parles, c'est
exactement pareil, ça va trop vite, enfin moi j'ai été
choquée, j'étais fière de moi, j'étais fière
de me dire tu peux apprendre une langue aussi rapidement, mais bon je la parle
plus parfaitement et là je vois qu'elle est en train de partir et
ça ça me fait peur, donc je commence à regarder des films
en portugais, à parler à mes potes sur Skype et tout ça
pour pas le perdre, ça serait bête.
Tibo
D'accord. Est-ce que tu t'es sentie bien
intégrée tout de suite au Brésil, parce que apparemment tu
avais l'air bien dès le début non? Comment ça se fait
à ton avis que tu aies été bien intégrée,
à quoi ça tient tout ça finalement?
M
Ouais, comment ça se fait, parce que déjà
j'en avais envie je pense. Je pense que si t'as peur tout de suite et que si tu
te renfermes dans ta peur tu vas pas aller vers les gens et c'est vrai que tu
vas être tout seul et que tu es malheureux du coup. Mais moi j'en avais
envie et puis j'ai eu la chance d'être dans cette famille
brésilienne pendant deux semaines. Quand je suis arrivée, j'avais
pas de logement, donc la première nuit j'ai dormi à l'hôtel
comme les trois-quarts des étudiants étrangers hein, et
après je devais rejoindre une coloc d'étudiants étrangers.
Il s'est avéré qu'ils n'avaient plus de place, et en fait c'est
la fille du secrétariat que je connaissais pas du tout qui m'a dit
« viens j'ai une chambre d'amis chez moi » et je savais pas du tout
mais elle habitait chez ses parents et je suis restée deux semaines et
demi, trois semaines. J'étais vraiment dans une famille
brésilienne, sa mère préparait des tonnes de trucs
à manger, elle était prof de portugais, et en plus elle essayait
de m'apprendre le portugais et elle me présentait comme sa fille
adoptive, après deux semaines tu vois donc ça aussi ça m'a
aidé à me sentir bien parce que je me suis sentie quand
même chez moi assez facilement dans cette famille, avec cette mère
surtout qui, elle me connaissait pas, c'était la première fois
qu'elle accueillait une étudiante étrangère donc pour elle
aussi c'était nouveau mais tout de suite elle m'a vraiment vraiment
super bien accueillie.
Tibo
D'accord. Six mois c'est quand même long, est-ce que t'as
eu des hauts et des bas, est-ce que c'était toujours...
M
Ouais, bin le jour de mon anniversaire, je crois que c'est la
seule fois où j'ai pleuré dans toute la... J'ai fêté
mes vingt ans là-bas, si tu veux je suis arrivée au Brésil
le sept juillet et mon anniversaire c'était le huit août, donc tu
vois un mois t'as pas le temps de te faire des amis, les cours ont
attaqué début août, t'as pas le temps de te faire de
copains, rien, j'avais mes colocs je les connaissais ça devait faire une
ou deux semaines et moi je suis quelqu'un qui bouge, enfin pour mon
anniversaire c'est sûr que je vais boire minimum un verre dans un bar
avec mes copains enfin tu vois, mes vingt ans en plus je voulais marquer le
truc, sauf que je connaissais personne et que j'avais personne de motivé
pour bouger avec moi donc ouais j'ai eu un bon coup de déprime où
je me suis dit « c'est de la merde ce pays, je veux rentrer chez moi, je
veux retrouver mes copains, faire mon anniversaire avec mes copains »
(rire) mais ouais non non sinon ça va. Non, y a bien eu des petits coups
de déprime mais parce qu'on s'embrouillait un peu, enfin moi
particulièrement, j'ai eu une aventure on va dire avec mon coloc
espagnol, donc le truc à pas faire enfin tu vois, et donc après y
avait des embrouilles entre nous et vu qu'on vivait ensemble c'était pas
forcément le plus pratique donc c'est vrai qu'y avait des moments
où t'en avais marre mais c'était plus du à la situation
qu'au pays luimême tu vois. Mais sinon non je me suis jamais sentie
vraiment mal, enfin déprimée tu vois, triste.
Tibo
Est-ce que t'as été soutenue là-bas,
affectivement, émotionnelement, que ce soit par des gens, par les
ressources internationales, la DRI, je sais pas, ou es-ce que t'as eu
l'impression d'avoir manqué de soutien peut-être?
M
D'un point de vue administratif?
Tibo
Non non, d'un point de vue émotionnel, affectif.
M
D'un point de vue émotionnel ouais, j'ai été
soutenue par ma mère, bien sûr, bin elle était, on
s'envoyait des mails, toutes les deux-trois semaines on se
parlait sur Skype, quand je suis partie d'ici j'étais amoureuse d'un
gars, d'un Français, et en fait il continuait à m'écrire
tous les jours donc ça m'a fait quand même tu vois ça m'a
permis de pas, je pensais que ça allait faire une rupture tu vois avec
lui, qu'on allait plus se parler et que j'allais en souffrir mais le fait qu'on
continue à se parler, en tant qu'amis hein, tous les jours je pense que
ça m'a pas mal aidé aussi, et puis après sur place,
dès que j'ai rencontré, dès qu'on a fait ce voyage en
fait, dès que j'ai rencontré mon coloc français, que j'ai
vraiment appris à découvrir, et bin ça a été
mon meilleur ami et on est devenu inséparable en fait, on s'est toujours
soutenu l'un l'autre et comme on habitait ensemble, voilà.
Tibo
Ok, je vois. Est-ce que les mentalités sont
différentes, est-ce que tu t'es aperçue de différences
entre la mentalité française que tu connaissais et la
façon dont les gens voyaient les choses au Brésil?
M
(Pause). Ouais, oui, oui oui, c'est sûr qu'il y a des
mentalités différentes mais j'ai jamais réussi à
vraiment mettre des mots dessus.
Tibo
C'est très dur, je suis d'accord avec toi, c'est pas
facile du tout.
M
Parce que c'est vrai que quand t'es là-bas tu te dis
« ouais c'est différent » mais en même temps c'est
pareil que toi mais d'un autre point de vue, non mais je pense que y a plein de
trucs à prendre en compte mais je pourrais pas te dire qu'est-ce qui est
différent ouais. Je sais que c'est différent, je sais mais je
peux pas dire pourquoi.
Tibo
Bien entendu oui. Est-ce que tu as connu des «
galères », ce qu'on appelle des « galères »,
pendant ton séjour?
M
Non quasiment pas non, j'ai grave de la chance. À part
où j'ai fait une crise dans un avion tu sais, en
fait j'avais fait
une nuit blanche et on partait de Rio pour Salvador et je me suis endormie
direct
dans l'avion et je me suis réveillée mais j'avais pas
adapté mon corps à la pression tu vois et donc du
coup je me suis réveillée j'avais l'impression que
mes yeux allaient sortir de ma tête, je pleurais je pleurais, grosse
crise, pas cool, mais ça a été une des seules
galères que j'ai eu.
Tibo
D'accord, donc ça n'avait rien à voir avec ton
séjour finalement, ça aurait pu arriver en France.
M
Voilà, c'est ça, après mon coloc a eu des
problèmes de carte bancaire et tout ça mais moi tout s'est bien
passé.
Tibo
D'accord. Quand t'as répondu au questionnaire, quand je
t'ai demandé donc quel sens avait ton voyage dans ta vie, tu as
répondu le mot « découverte ». Est-ce que tu peux
m'expliquer un petit peu?
M
Oui ça a été très dur de choisir
un mot, et pourquoi découverte, parce que j'étais partie pour
ça à la base, c'était pour découvrir une autre
culture, un autre pays, d'autres personnes, découvrir autre chose, de
tout nouveau. Et je suis pas sûre au final que c'est ce qui s'est
passé, si, bien sûr, j'ai découvert autre chose, mais
c'était peut-être pas le plus important du coup mais en tout cas
c'est pour ça que j'étais partie. Donc c'est pour ça que
j'ai choisi ce mot.
Tibo
Et qu'est-ce qui est important alors pour toi, qu'est-ce qui a
fait que c'était spécial?
M
Pour moi maintenant après le voyage c'est que ça
m'a donné une envie, bin en fait ouais, j'ai toujours eu envie de
voyager, c'est pour ça que j'ai fait ce premier voyage mais là
ça m'a donné plus que l'envie, je sais pas trop comment dire,
c'est pas comme si je vais dire « maintenant ça y est je suis
passionnée par l'idée de voyager » comme ça juste
parce que j'ai fait six mois au Brésil, c'est pas ce que je veux dire,
c'est simplement que, là je suis en train de me renseigner pour un
Master, un Master qui propose deux fois six mois d'échange à
l'étranger et qui t'ouvre des portes pour devenir experte en relations,
en associations internationales donc tu vois je suis en train moi-même de
changer mes idées de projet de vie pour voyager plus et pour
découvrir donc peut-être que je pense
que le Brésil j'y ai été pour
découvrir, pour le découvrir, mais qu'au final ça m'a fait
découvrir moimême aussi, cette partie de moi qui me donne envie de
voir autre chose.
Tibo
Parce que du coup tu envisages l'avenir différemment?
M
Ouais, bin je voulais être éducatrice, enfin je
veux toujours, être éducatrice PJJ et c'est vraiment un job qui me
fascine et qui me passionne et ça fait des années que je veux
faire ça et j'ai pas envie de me dévier de cette voie là.
Mais j'ai envie de me dire « tiens, si je peux en profiter pour faire un
Master et voyager un peu dans l'Europe » puis après si ce Master
m'ouvre des voies sur un job qui peut être intéressant, qui me
permet de voyager, pourquoi pas et après je reviendrais à
l'éduc tu vois, je suis en train de, ouais, mon plan de vie, alors qu'il
était assez rectiligne tu vois (rire), il est en train de tout changer,
et tant mieux! Je suis contente tu vois, ça me fait de nouveaux projets
tout ça, c'est sympa.
Tibo
Excellent, on te sent vachement dynamique, c'est vachement
bien.
M
(Rire). Ouais, j'essaie d'avancer.
Tibo
Et du coup, dans le questionnaire par exemple, quand je
t'avais demandé ce que tu préfères entre ta vie au
Brésil et ta vie à Lyon, t'as mis en tête ta vie à
Lyon. Est-ce que tu peux expliquer pourquoi. Enfin, c'est pas, juste pour avoir
plus d'informations.
M
Et bin je pense ma vie à Lyon aussi pour le
côté confort du terme, parce que vivre à six, en coloc
à six, franchement c'était vraiment vraiment, y avait des moments
c'était dégoutant dégoutant dégoutant, les
Mexicains ils font tout frire donc ça sentait tout le temps la friture
et tout ça, donc je pense que ça ouais, vraiment c'était
chiant quand même, t'as beau dire ce que tu veux, « je vais dans un
pays je m'en fous », c'est vrai que si tu peux avoir les conditions, tant
mieux. Pourquoi ma vie à Lyon aussi, parce que socialement je pense que
j'étais plus épanouie à Lyon qu'au Brésil quand
même parce que j'ai plus d'amis ici au final,
forcément.
Tibo
Ils t'ont manqué là-bas [tes amis]?
M
Mes amis ne m'ont pas manquée mais le fait d'avoir
moins d'amis qu'avant, d'avoir juste ce petit groupe que j'avais
rencontré, avec qui j'ai réussi à créer des
affinités, mais différentes au final et je sais pas, j'ai jamais
eu beaucoup de copines moi, et par contre j'en ai toujours eu une quand
même tu vois, il me fallait toujours une fille pour raconter mes trucs de
fille et j'en avais pas au Brésil et je pense que ça m'a
manqué un peu aussi.
Tibo
D'accord. Et est-ce qu'au Brésil, en tant que
Française, qu'Européenne, est-ce que tu sentais que tu
véhiculais une image, des stéréotypes - négatifs ou
positifs hein, peu importe, mais est-ce que il y a avait une image de
l'Européenne, de la Française donc?
M
Oui, je pense, parce que vu les questions qu'on me posait, je
me doute qu'il y a des stéréotypes bien ancrés mais, mais
ils sont tellement ouverts aussi que j'ai trouvé qu'en Amérique
Latine en général, pas tous les pays mais là où
j'étais, les personnes sont quand même assez ouvertes et quand ils
te rencontrent et qu'ils voient que tu es étranger ils sont quand
même curieux de venir te parler. C'est un truc qu'on a pas ici je trouve,
enfin pas assez en tout cas. Et euh, c'était quoi ta question?
Tibo
Est-ce que tu sentais que tu véhiculais une image
malgré toi finalement?
M
Ouais, quand on venait vers moi, qu'on entendait que
j'étais française et qu'on me disait « voulez vous coucher
avec moi ce soir? » ou alors quand on me disait « excuse-moi mais tu
t'épiles? » ou « tu te laves combien de fois par semaine?
» tu vois qu'il y a des clichés qui sont vraiment vraiment
ancrés et que j'étais, ouais je pense que si, j'étais plus
ou moins une image parce que « ah regarde-la avec ses traits, ça se
voit bien que c'est une Française » je suis sûre que je leur
aurais dit que j'étais italienne ils m'auraient pris pour une Italienne
sur le coup mais bon.
Tibo
Mais ça n'empêchait pas, enfin disons ça ne
modifiait pas tes relations avec les gens du coup?
M
Non du tout, c'était une curiosité, ils
étaient oui, comme moi j'étais curieuse au final en allant dans
ce pays là, et là eux ils avaient la même curiosité
en retour.
Tibo
Et est-ce que du coup d'avoir séjourné
là-bas ça a modifié ta vision de la France, la culture
française, ou de tes habitudes, est-ce que tu t'es posée des
questions par rapport à ce que tu connaissais déjà?
M
Ça m'a modifié oui et non parce que je le savais
mais je m'en rendais pas compte, je savais que les Français en
général ont peut-être justement un peu plus de mal à
avoir cette curiosité envers une autre personne ou peut-être
qu'ils l'ont mais en tout cas ils ne l'expriment pas pas aussi facilement que
les Brésiliens par exemple, et donc je savais qu'on avait ça,
enfin ce problème entre guillemets hein, c'est un fait culturel, mais je
ne m'en rendais pas compte à ce point. Quand tu croisais des gens dans
la rue, ça faisait trois semaines que tu les avais pas vu, tu te
rappelais plus d'eux et eux ils arrivent « ah salut tu vas bien? »
c'est vrai que tu te dis qu'en France on est un peu fermé quoi.
Tibo
Et quand je t'avais demandé si tu conseillerais à
un autre étudiant d'aller étudier dans ta fac au Brésil,
t'as dit que tu ne le conseillerais pas. Est-ce que tu peux revenir un petit
peu dessus?
M
Justement, parce que cette fac certes était une fac
grandissime avec comme je te disais un zoo, plein de magasins, t'as plus
l'impression d'être dans une fac, euh, mais c'était surtout la
ville en elle-même en fait, la ville n'était pas très
active, c'était une petite ville, de quatre-cent-mille habitants, et
peutêtre le fait que quand j'y étais c'était aussi l'hiver
donc il pleuvait aussi beaucoup, euh, c'est la ville, elle est pas
agréable pour un échange, mais même pour une vie
étudiante en elle-même tu vois je pense qu'il vaut mieux aller
faire un échange à Rio ou à Salvador parce que
déjà si tu penses au Brésil c'est sûr tu veux du
soleil, c'est vrai, donc t'en auras plus là-bas qu'à Caxias et
t'auras plus de choses à faire, t'auras la plage aussi que j'avais pas
ouais, y avait quoi, trois-quatre bars sympas, une
boîte d'électro, pour te dire à peu
près tout ce qu'il y avait hein, un bar rock, après les autres
bars c'était voilà samba, etc., et voilà, ça
s'arrêtait presque là tu vois juste de vie étudiante,
après comme je t'ai dit t'avais trois ou quatre musées, t'avais
l'église sur la place, t'avais la cathédrale et une église
et ouais c'est une petite ville.
Tibo
Donc c'était moins vivant que prévu du coup
peut-être?
M
Ouais c'est ça j'ai l'impression que y avait pas assez
de monde en fait, j'aurais eu besoin de plus de monde et plus d'activité
tu vois, y avait un marché le samedi matin, mais voilà, alors que
moi j'aurais aimé faire tous les marchés tous les jours mais
bon.
Tibo
D'accord. Et on dirait que t'as pas vécu un choc quand
t'es arrivée là-bas. On se dit que c'est totalement
différent mais quand t'en parles c'est vrai que t'as pas
été dépaysée, enfin pas déracinée,
enfin je sais pas...
M
Ouais voilà c'est ça, mais moi aussi ça
me fait bizarre. J'ai cette sensation là aussi, c'est que ouais, j'avais
l'impression que j'avais la même vie en fait, que j'avais exactement
pareil, que y avait pas vraiment de changement, donc certes c'était un
contexte et devant les yeux c'était différent mais au final moi
j'ai quand même quasiment vécu pareil.
Tibo
Et tu l'expliques ça?
M
Alors je me suis remise en question, je me suis dit que c'est
peut-être moi aussi qui du coup j'ai voulu adopter mon mode de vie
français euh au Brésil et du coup pas m'intégrer
réellement à la culture je me suis dit ça, mais en fait je
crois pas.
Tibo
Oui, non, pas du tout, je pense que tu as raison de ne pas croire
que c'est ça.
Je ne crois pas que c'est ça parce que j'ai quand
même fait des efforts pour m'intégrer, j'avais des amis
brésiliens et que j'aurais vu si j'étais complètement en
décalage et non non je crois pas donc je sais pas pourquoi.
Tibo
C'est pas un élément obligatoire du séjour
à l'étranger du tout de toute façon.
M
Oui oui bien sûr c'est ça, mais je pense être
quelqu'un de sociable aussi donc c'est peut-être pour ça que j'ai
réussi à m'adapter assez vite, je sais pas.
Tibo
Du coup t'aurais aimé ressentir cette
différence?
M
Ouais, ouais j'aurais aimé. J'aurais aimé
arriver au Brésil, rester une semaine et dire « mais je suis
où, waow », ouais j'aurais aimé que ça me retourne,
ouais ça aurait peut-être pas été cool mais j'aurais
aimé, au moins je me serais dit que je suis partie pour quelque chose,
non pas que je pense que je suis partie pour rien.
Tibo
Et si on prenait les autres régions, comme l'Argentine, et
les autres régions du Brésil où t'as voyagé, est-ce
que t'as justement ressenti plus cette différence?
M
Ouais, c'est pour ça que j'ai dit aussi que je
conseille pas d'aller étudier dans ma fac c'est que déjà
juste à Rio j'ai eu plus un choc visuel déjà de la ville,
et culturel aussi, enfin en voyant les gens, en parlant aux gens,
c'était quand même complètement différent de Caxias
do Sul, et Salvador encore plus, et c'est pour ça que j'aurais
préféré étudier dans une de ces villes là
qui me semblaient, moi, différentes, parce que Caxias c'est quand
même vachement européen.
Tibo
Donc c'est un pays très différent selon les
endroits...
Ouais de partout, t'as plusieurs pays en un pays en fait.
Tibo
Je vois. Est-ce que par exemple il y a des éléments
de cette culture brésilienne que toi t'aimerais incorporer dans ta
façon de faire, dans ta façon de vivre?
M
Ah bin j'aimerais dire bonjour comme eux!
Tibo C'est-à-dire?
M
Bin tu sais ils se font une bise et ils se prennent, ils se
font l'embrassade carrément et bin j'aimerais qu'on se dise, que tous
les Français se disent bonjour comme eux, mais bon c'est pas possible
(rire). Non, j'aimerais gagner cette, cette curiosité qu'ils ont envers
les gens, mais moi j'ai toujours peur, je pense que c'est le problème de
tout Français, qu'elle soit malsaine du coup, qu'elle soit
considérée comme malsaine, et en fait non eux pas du tout elle
est naturelle, c'est vraiment de la curiosité enfin je sais pas, tu sais
quand ils te posent une question ils ont envie d'avoir la réponse car
ils s'intéressent à la personne qui est en face d'eux, pas parce
qu'ils s'intéressent à elle pour qu'ils puissent en obtenir
quelque chose tu vois. Et j'aimerais bien être plus comme ça. Et
je suis pas sûre que j'y arrive mais j'essaie en tout cas.
Tibo
D'accord. Est-ce que tu dirais que tu étais la
même en France qu'au Brésil? Est-ce qu'au niveau de ta
personnalité tu t'es trouvée autre, différente? Ta
façon d'aborder les choses quand tu es arrivée làbas
voilà, est-ce qu'il y a des choses que t'as fait que t'aurais pas fait
peut-être ici, etc.?
M
Ouais je pense, parce que là-bas j'étais
carrément plus ouverte que ici bin là du coup oui, je voulais
tout connaître, j'étais super curieuse, moi je posais des milliers
de questions.
Ça se ressent bien quand tu parles, que t'étais
proactive.
M
(Rire). Ouais ouais moi je posais des questions, j'essayais
toujours de m'intégrer, toujours de discuter, ouais, non, je pense que
j'étais assez curieuse là-bas, j'aimerais redevenir comme
ça mais en France.
Tibo
D'accord. Et si tu devais refaire cette expérience,
qu'est-ce que tu changerais, si tu voulais refaire quelque chose?
M
Bin la longueur, la ville, euh, (pause). Sinon je sais pas
(pause).
Tibo
C'est une bonne réponse, t'inquiète pas.
M
Oui oui, qu'est-ce que j'aurais changé, non j'ai (pause).
Je veux pas le changer, c'était une belle expérience (rire).
Tibo
Donc t'es contente de la tournure que ça a pris, t'as le
sentiment d'avoir profité comme tu voulais, hormis la longueur
peut-être?
M
Je pense que j'aurais peut-être plus pu profiter, je
sais pas exactement comment, mais je pense que oui ça aurait pu
être encore plus, mieux, ou des souvenirs encore plus incroyables, mais
ça s'est pas fait et puis c'est pas grave, enfin c'est la vie aussi, y a
des aléas que tu peux pas contrôler et que...
Tibo
C'est tout à fait vrai. Qu'est-ce qui t'as le plus plu
dans ton séjour, c'est le fait de voyager, de...?
Ça a été ouais le voyage, les rencontres,
en fait en gros les gens et les paysages parce que quand t'es à Foz do
Iguaçu t'as les chutes, tu te sens quand même minuscule, tu te
sens vraiment ridicule, ça te permet de penser aussi, donc c'est vrai
que t'as des paysages ouais qui sont tellement différents de ceux dont
t'es habitué que ça fait du bien à voir mais euh, et les
gens, ouais bin les gens du nord plus parce que les gens de Caxias ils sont
quand même les gens les plus fermés du Brésil donc
même s'ils sont plus ouverts que les Français ils restent
spéciaux.
Tibo
D'accord. Est-ce que le rythme de vie est différent?
M
Bin non justement moi j'espérais ça aussi tu vois
et non ils mangent à midi, vingt heures, c'est un peu le même
rythme que nous finalement et c'est vrai que j'avais une espérance
là-dessus.
Tibo
Parce que c'est plus occidentalisé que ce que tu pensais
c'est ça?
M
Ouais, j'aurais aimé manger à quatorze heures,
même comme en Espagne tu vois et puis avoir un autre rythme de vie mais
bon, j'ai gardé mon rythme c'est pas grave (rire).
Tibo
Est-ce que tu as le sentiment d'avoir bien changé quand
même grâce à cette expérience quand tu regardes comme
tu étais avant de partir et toi aujourd'hui, est-ce que tu te dis «
tiens j'ai changé sur tel point » et vraiment tu le vois ou c'est
pas encore assez clair peut-être?
M
Non c'est pas encore assez clair. Je pense qu'en plus
là vu que je suis rentrée j'ai eu plus de responsabilités
aussi qu'avant le Brésil donc je me demande à quoi est dû
mon changement professionnel, enfin mon orientation future, c'est dû
certes au Brésil mais c'est dû aussi à d'autres choses qui
me sont arrivées tu vois. Donc je sais pas si je change vraiment
vraiment, si j'ai vraiment changé.
C'est pour ça que c'est peut-être un peu tôt
pour le dire, c'est très dur de mettre des mots sur les choses qu'on
ressent, je suis entièrement d'accord. Et, t'as gardé des
contacts avec les gens là-bas?
M Oui.
Tibo
Tu penses que ça va durer? C'est important pour toi je
veux dire, ça a un sens?
M
Oui, ça a un sens. J'ai mon, dans cette bande, j'ai mon
ami, J. il s'appelait, qui le dernier jour où je suis partie m'a offert
un collier avec le symbole de l'infini en me disant notre amitié est
infinie, garde-le avec toi, moi je l'ai avec moi, et y s'était
acheté le même. C'est vrai qu'on se parle, on s'envoie quelques
mails de temps en temps - j'ai pas encore internet chez moi donc c'est un peu
galère, mais je sais que je, je suis lucide, je me doute que ce sera pas
mon ami de toute la vie mais j'espère avoir de l'argent d'ici trois ou
quatre ans pour voyager et je me dis que j'irais au Brésil et j'irais le
voir.
Tibo
Tu vas y retourner?
M
Oui oui je vais y retourner je pense, je vais essayer de me
faire toute l'Amérique Latine mais bon il faut que je gagne des sous
(rire). Et j'ai des amis brésiliens qui viennent justement pour la
danse, qui viennent en Allemagne cet été donc je vais aller en
Allemagne et je vais leur proposer de venir à Lyon, etc., donc j'essaie
de garder des contacts et de me dire que ça fait aussi des contacts pour
y retourner.
Tibo
Et quand t'es rentrée, est-ce que ça a
été dur de rentrer, est-ce qu'il y a eu un choc au retour
peutêtre, pour te réadapter disons?
M Non.
Tibo
Non, ça s'est fait naturellement?
M
Oui, en fait je devais courir parce que j'avais une semaine
pour trouver un appartement et m'inscrire à la fac donc trouver un
appart sur Lyon tu dois connaître la galère aussi, donc en fait
mon installation, et après et du coup j'ai trouvé mon appart, je
me suis inscrit, les cours commençaient, je devais trouver un job, donc
j'avais tellement de trucs à faire, j'étais tellement
stressée par tout entre les aller-retours Clermont - Lyon vu que mes
parents habitent à Clermont et que je devais voir ma famille aussi,
etc., que j'ai pas eu trop le temps de me réhabituer. Et c'est
après quand la routine a commencé que là je me suis sentie
un peu « ouais bin tiens là ça y est t'es revenue, c'est
fini, tchao » et, mais comme il y avait tous mes amis à
côté de moi que ça s'est bien passé car même
mes amis brésiliens ils étaient virtuellement plus ou moins
à côté de moi quand même. Donc non je pense que
ça s'est bien passé.
Tibo
Est-ce qu'il y a des choses au Brésil qui t'ont surprise
ou énervée au premier abord, qui t'ont marquée disons et
dont tu pourrais te souvenir là comme ça?
M
Les choses qui m'ont marquée c'est cette image de
clochards qui dorment les uns à côté des autres le long
d'une rue, ça c'est une image qui est restée gravée. Les
chutes c'est resté gravé aussi, c'est des photos ouais, pour moi
c'est des images comme ça, la police quand je vois les trente jeunes qui
sont contre le mur avec la police derrière eux ça ça
m'avait marqué aussi parce que plus violent quand même.
Tibo
Oui, souvent on voit le Brésil avec la violence et les
écarts sociaux, l'insécurité, tu l'as ressenti aussi
ça par exemple pendant ton séjour?
En fait ce qui est étrange, mais vraiment très
étrange, c'est qu'à Caxias c'était une ville riche
justement comme je t'ai dit, assez européenne, où t'avais pas du
tout à avoir peur quoi enfin moi vraiment je m'y sentais plus en
sécurité qu'à Lyon quoi et pourtant eux ils étaient
tous paranoïaques. Enfin « paranoïaques » c'est
exagéré mais ils voyaient quelqu'un dans la rue, il était
vingt-trois heures, et bin hop ils fermaient toutes les portes de la voiture
pour être sûrs que personne vienne faire du car jacking.
Ils grillent tout le temps les feux la nuit, etc. Donc c'est vrai que tu te dis
« il doit y avoir du danger pour qu'eux ils aient peur comme ça
» mais comme moi je l'ai pas vu je l'ai pas ressenti vraiment. Pourtant
j'ai des amis qui habitaient dans une favela qui m'a dit qu'il revenait du
super marché et qu'il avait retrouvé un mec mort dans sa rue,
donc oui il y a des trucs mais comme je l'ai pas vraiment vu, que j'ai juste
entendu des histoires qui me semblent plus enjolivées que bin ouais j'ai
pas eu cette peur du danger quoi. Et comme je me suis même pas fait
agressée rien, genre mon coloc français qui s'est fait voler son
portefeuille c'est une agression même si elle est minime c'est une
agression bin moi non rien du tout donc c'est vrai que j'ai pas peur (rire).
Tibo
Est-ce qu'il y a des facettes de la vie qui t'échappent un
petit peu, qu'aujourd'hui tu ne comprends pas encore?
M
Comment ça?
Tibo
Bin dans les façons de faire par exemple où
aujourd'hui tu te dis quand t'y repenses « tiens pourquoi il fait
ça comme ça? ».
M
Non je pense pas parce que chaque fois que j'avais une
question je la posais, je me gênais pas donc c'est vrai que si je leur
demandais « pourquoi tu grilles le feu? » par exemple ils me
donnaient une réponse tu vois donc je ne pense pas qu'il y ait des
choses qui aujourd'hui me surprennent encore.
Tibo
Cool super. Donc du coup ton verdict tu penses que c'est un
séjour très réussi, t'es contente de ce que t'as fait?
De ce que j'ai fait au Brésil?
Tibo
Voilà, de ton séjour comment tu vois les choses?
T'es contente? Aujourd'hui tu te dis que c'était...
M
C'était une excellente expérience mais je peux en
vivre des mieux, pour moi je reste sur un sentiment d'inachevé, il m'en
faudrait encore.
Tibo
Donc c'est que le début de quelque chose d'autre?
M
Ouais voilà c'est ça pour moi c'est un début
maintenant quoi, c'est autre chose qui commence mais qui va être plus
grand (rire).
Tibo
Ok. Bon et bin écoute très bien hein.
M
Bon bin j'espère que je t'ai aidé.
Tibo
Bien sûr, c'était très très utile.
Merci beaucoup de ta participation ///
Table des matières
Introduction 6
CADRE THEORIQUE 8
1. Contexte 8
1.1. Origines des travaux 8
1.2. Intérêts de la recherche 8
2. Concepts clés 11
2.1. Les transformations socioculturelles 11
2.1.1. Dimension culturelle 12
2.1.1.1. Composante : la culture 12
2.1.1.2. Indicateurs 14
2.1.2. Dimension sociale 16
2.1.2.1.Composante : le phénomène d'acculturation
16
2.1.2.2. Indicateurs 17
2.1.3. Dimension psychologique 19
2.1.3.1. Composante : le choc culturel 20
2.1.3.2. Indicateurs 22
2.1.4. Autres facteurs de variabilité des
transformations socioculturelles 25
2.1.4.1. La durée de séjour 25
2.1.4.2. L'exposition interculturelle antérieure 25
2.2. La compétence interculturelle 26
2.2.1. Ambiguïté du syntagme 27
2.2.2. Exemples de conceptualisation 28
2.2.2.1. Byram et le modèle multidimensionnel de
compétence interculturelle 29
2.2.2.2. Bennett et le modèle de
développement de la sensibilité
interculturelle 31
2.2.3. Notre approche 35
2.2.3.1. Synthèse des modèles 35
2.2.3.2. Définition du concept 38
2.2.3.3. Pondération 40
3. Problématique 42
METHDOLOGIE DE RECHERCHE 43
1. Présentation de la population de recherche
43
2. Instrumentation 44
2.1. Procédure 44
2.2. Présentation des questionnaires
45
2.2.1. Le Questionnaire général 45
2.2.2. L'Échelle de communication interculturelle 45
2.2.3. L'Échelle de distance culturelle 45
2.2.4. L'Échelle de sensibilité interculturelle
45
2.2.5. L'Échelle de soutien social 46
2.2.6. L'Échelle d'efficacité interculturelle 46
2.2.7. L'Échelle d'adaptation académique 46
2.2.8. L'Échelle de stress d'acculturation 46
2.2.9. L'Échelle de bien-être 47
2.2.10. Brief COPE 47
2.3. Présentation de la grille d'entretien
47
3. Grille de lecture 48
3.1. Transformations socioculturelles 48
3.2. Compétence interculturelle 48
3.3. Pondération 48
ANALYSE DES RESULTATS 50
1. Le cas de P 50
1.1. Contexte 50
1.2. Transformations socioculturelles 51
1.2.1. Dimension culturelle 51
1.2.1.1. Compétences de communication 51
1.2.1.2. Distance culturelle 52
1.2.1.3. Sensibilité interculturelle 56
1.2.2. Dimension sociale 57
1.2.2.1. Capital social 57
1.2.2.2. Orientation d'acculturation de la société
d'accueil 60
1.2.3. Dimension psychologique 60
1.2.3.1. Soutien social 60
1.2.3.2. Auto-efficacité 61
1.2.3.3. Réussite académique et professionnelle
61
1.2.3.4. Stress d'acculturation 62
1.3. Compétence interculturelle 70
1.3.1. Sens du séjour à l'étranger 70
1.3.2. Ressenti sur le séjour 70
1.3.3. Tensions éprouvées 71
1.3.4. Évolution personnelle 72
1.3.5. Projets d'avenir 72
2. Le cas de C 73
2.1. Contexte 73
2.2. Transformations socioculturelles 74
2.2.1. Dimension culturelle 74
2.2.1.1. Compétences de communication 74
2.2.1.2. Distance culturelle 75
2.2.1.3. Sensibilité interculturelle 76
2.2.2. Dimension sociale 76
2.2.2.1. Capital social 77
2.2.2.2. Orientation d'acculturation de la société
d'accueil 79
2.2.3. Dimension psychologique 80
2.2.3.1. Soutien social 80
2.2.3.2. Auto-efficacité 82
2.2.3.3. Réussite académique et professionnelle
82
2.2.3.4. Stress d'acculturation 83
2.3. Compétence interculturelle 87
2.3.1. Sens du séjour à l'étranger 88
2.3.2. Ressenti sur le séjour 88
2.3.3. Tensions éprouvées 90
2.3.4. Évolution personnelle 90
2.3.5. Projets d'avenir 91
3. Le cas de M 92
3.1. Contexte 92
3.2. Transformations socioculturelles 93
3.2.1. Dimension culturelle 93
3.2.1.1. Compétences de communication 93
3.2.1.2. Distance culturelle 94
3.2.1.3. Sensibilité interculturelle 95
3.2.2. Dimension sociale 95
3.2.2.1. Capital social 96
3.2.2.2. Orientation d'acculturation de la société
d'accueil 98
3.2.3. Dimension psychologique 99
3.2.3.1. Soutien social 99
3.2.3.2. Auto-efficacité 100
3.2.3.3. Réussite académique et professionnelle
100
3.2.3.4. Stress d'acculturation 101
3.3. Compétence interculturelle 104
3.3.1. Sens du séjour à l'étranger 104
3.3.2. Ressenti sur le séjour 104
3.3.3. Tensions éprouvées 105
3.3.4. Évolution personnelle 106
3.3.5. Projets d'avenir 107
INTERPRETATION DES RESULTATS ET DISCUSSION
109
1. Le cas de P 109
1.1. Transformations socioculturelles 109
1.1.1. Dimension culturelle - Composante : la culture 109
1.1.2. Dimension sociale - Composante : le
phénomène d'acculturation 110
1.1.3. Dimension psychologique - Composante : le choc culturel
110
1.2. Compétence interculturelle 110
1.3. Synthèse 111
2. Le cas de C 112
2.1. Transformations socioculturelles 112
2.1.1. Dimension culturelle - Composante : la culture 112
2.1.2. Dimension sociale - Composante : le
phénomène d'acculturation 112
2.1.3. Dimension psychologique - Composante : le choc culturel
113
2.2. Compétence interculturelle 113
2.3. Synthèse 113
3. Le cas de M 114
3.1. Transformations socioculturelles 114
3.1.1. Dimension culturelle - Composante : la culture 114
3.1.2. Dimension sociale - Composante : le
phénomène d'acculturation 114
3.1.3. Dimension psychologique - Composante : le choc culturel
114
3.2. Compétence interculturelle 115
3.3. Synthèse 115
4. Discussion 116
Conclusion 118
Bibliographie 120
Sitographie 135
Index Auteurs 136
Index Mots clés 138
Index Graphiques 139
Index Tableaux 139
Annexe 1 : questionnaires et résultats de P, C
et M 140
Annexe 2 : questionnaires originaux
168
Annexe 3 : retranscription des entretiens
186
Table des matières 269
Université Lumière Lyon 2-Institut des
Sciences et Pratiques d'Éducation et de Formation
Mémoire de Master 2 RECHERCHE «Sciences et
pratiques de l'éducation et de la formation»
Année universitaire 2011-2012
Nom de naissance et prénom : Pourhadi Thibault N°
étudiant(e) : 5112093
Titre :
Impacts des échanges universitaires internationaux sur les
étudiants de l'Université Lumière Lyon 2 : cap sur le
Brésil
|
Problématique :
Comment peut-on envisager les liens entre les transformations
socioculturelles et le développement de la compétence
interculturelle chez les étudiants à l'issue de leur
séjour au Brésil ?
|
Résumé (15 à 20 lignes) :
Cette recherche se propose de situer les effets des
échanges universitaires internationaux chez trois étudiantes de
l'Université Lumière Lyon 2 séjournant au Brésil
pour des durées de deux à six mois. Notre objectif est d'explorer
les liens qu'entretiennent les transformations socioculturelles des
étudiantes sur place avec leur niveau de compétence
interculturelle. Pour mener à bien ce travail, nous nous appuyons en
premier lieu sur de nombreux travaux issus de la littérature
scientifique pour clarifier le concept de transformations socioculturelles et
celui de compétence interculturelle. Ensuite, nous présentons
notre méthodologie. Initialement, nous avions prévu d'interroger
les participants avant leur départ pour le Brésil puis à
leur retour en France. Cependant, en raison des difficultés
rencontrées lors de la composition de l'échantillon, ce suivi n'a
pu être mis en place. En conséquence, les données sur
lesquelles repose notre étude sont rétrospectives. Pour les
recueillir, nous avons d'abord administré au retour de nos trois
étudiantes en France une série de dix questionnaires
présentés sous forme d'auto-évaluation avant de conduire
un entretien semi-dirigé avec chacune d'elles. Notre procédure de
recueil de données nous a ainsi fourni une large quantité
d'informations sur la base desquelles de multiples facteurs de transformations
et d'évolution ont pu être analysés à la
lumière de notre cadre théorique, puis recoupés. À
l'issue de notre étude, et par delà les limites de notre
méthodologie, nous constatons qu'en dépit de
caractéristiques uniques à chaque séjour tous ont
été un véritable agent de changement chez les
étudiantes. Il ressort également que la nature des
expériences vécues sur place a affecté positivement le
développement respectif de la compétence interculturelle chez
l'ensemble des participantes.
|
Mots-clés :
Transformations socioculturelles, Compétence
interculturelle, Études intégrées, Échanges
universitaires internationaux, Séjour d'étude à
l'étranger, Interculturalité
|
Directeur de mémoire : Jean-Claude Régnier Date de
soutenance :