Section 1 : Nuitées touristiques
1.1 Nuitées
Notre étude recouvre l'ensemble du plateau dogon. Plus de
7000 kilomètres ont ainsi été parcourus en voiture et
à pied, couvrant l'essentiel du phénomène spatial. En
regard de l'absence ou du manque de crédibilité des
éléments statistiques au Mali et à plus forte raison au
pays dogon, il nous a fallu élaborer une méthode de collecte des
données qui soit originale, efficace et à la portée des
propriétaires de campements, des maraîchers et de nos contacts.
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Interprétation graphique :
Ces chiffres montrent une évolution quantitative
très dépendante de la situation politique, notamment celle en
rapport avec la rébellion touareg.
Lorsqu'en 1990, le conflit se déclenche suite à
l'attaque d'un poste de police à Ménaka près de la
frontière du Niger, les deux tiers du Mali, dont les territoires de
Tombouctou, Kidal et Gao, sont déclarés zones interdites par les
autorités, entraînant la chute du tourisme au Mali.
Nous avons imaginé un système de registres pour le
tourisme dans lequel seraient consignées les nuitées
touristiques, la nationalité des visiteurs ainsi que leur mode de
voyage, par agences ou individuel, un autre système de registre pour les
maraîchers.
Les données récoltées donnent une
appréciation journalière du phénomène touristique
dans 29 campements villageois.
Graphique.1 Arrivées et nuitées touristiques au
Mali, 1990-1998
Sources : WHO
200000
150000
100000
50000
0
1990 1991 1992 1993 1994 1995 1996 1997 1998
Nuitées
Nuitées
Arrivées
Jusqu'en 1995, la situation se détériore du fait de
la guerre. La reprise touristique, en 1996, coïncide avec la dissolution
des différents fronts rebelles touareg, maures et songhaï.
Aujourd'hui, même si le tourisme est en croissance, un
certain banditisme au nord de Tombouctou, affecte cette croissance, citons
entre autre le décès de trois touristes néerlandais
à Tessalit en mars 2000 et de nombreux enlèvements
d'européens de 2002 à nos jours.
1.2 Arrivée touristique
Le tourisme au pays dogon extrêmement dépendant des
conditions saisonnières qui règnent en zone sahélienne.
Celle-ci est caractérisée, nous l'avons vu, par l'alternance
d'une saison des pluies, appelée hivernage en Afrique
subsaharienne, dont la durée est très variable d'une année
à l'autre mais qui peut s'étendre de juillet à septembre
et d'une saison sèche qui occupe le reste de l'année, soit
d'octobre à juin.
Graphique 2 : nombre de nuitées à
l'hôtel du Kambary de Bandiagara en 2008
(Source: Enquêtes NENE- Novembre 2008 Le
Kambary)4.
Les statistiques que nous avons produites nous permettent de
connaître l'évolution des nuitées touristiques pour chaque
jour de la période considérée.
Nous observons que le nombre des nuitées augmente de
manière constante mais non linéaire jusqu'à atteindre un
premier maximum du 17au 22 décembre, suivi
d'une brusque diminution.
4 A partir des enquêtes réalisées
sur le site
Les premiers jours de janvier voient la diminution constante du
nombre de nuitées. La fin du mois de janvier et le mois de
février totalisent des nuitées moyennes qui évoluent de
manière non linéaire: de légers creux de
fréquentation alternent avec des pics, sans qu'une
régularité puisse être mise en évidence.
L'interprétation de cet histogramme est à mettre
en relation avec les périodes de vacances, surtout celles qui concernent
les touristes français, qui représentent plus de 40% du total,
ainsi qu'avec les arrivées des vols internationaux à Bamako ou
Gao. Ainsi s'expliquent les pics de fin décembre et du début du
mois de février.
En ce qui concerne la brusque chute du nombre de
nuitées entre le 28 et le 31 décembre, nous pensons qu'il est
possible que les touristes planifient leur départ juste avant ou
après le Nouvel An. Aucune régularité hebdomadaire n'a pu
être remarquée, principalement parce que les circuits
touristiques, même s'ils dépendent des vols internationaux, sont
organisés dans plusieurs sens.
Non seulement les revenus ne sont assurés que sur trois
ou quatre mois de l'année, mais en plus, à l'intérieur de
ces périodes touristiques, le nombre de clients peut fluctuer de
manière très significative.
Au niveau socioculturel, le phénomène touristique
est donc limité pour les villageois qui, neuf mois par année, ne
fréquentent pas de touristes.
Le tourisme correspond à la période de repos
agricole et permet à certains, moyennant des investissements peu
coûteux en cellule familiale, d'assurer un revenu.
Quant aux arrivées touristiques en 2007, le Mali a
reçu 221 328 touristes et en 2008 ce chiffre est passé à
490 000 touristes dont 57 000 venus de France qui se positionne aujourd'hui
comme le 1er émetteur de touristes du Mali et depuis 2008, le
Mali fait partie désormais des 100 premières destinations
préférées des français, le 2e en Afrique
de l'Ouest derrière le Sénégal.
Au niveau du Pays Dogon, les chiffres officiels disponibles sont
rares et disparates. Actuellement, au Mali, personne n'est en mesure de dire
précisément combien de touristes visitent la région,
quelles sont les nationalités les plus représentées et
quelle est la durée moyenne du séjour.
La majorité des hôteliers est extrêmement peu
concernée par l'établissement de données et il semble bien
que ce soit essentiellement par crainte de l'Etat.
Il existe une culture de la dissimulation autour de tout ce qui
se rapporte aux activités économiques, lesquelles restent dans
l'informel.
Graphique 3: Répartition des nationalités des
touristes dans les 29 campements de la Falaise de Bandiagara, du 11.12.2008 au
15.02.2009
France 42 % Italie 12 % USA 10 % Holland e 10 %
Suisse 5 % U K 4 %
Belgique/Lux 4 %
Espagn e 3 % Allemagn e 3 %
Canad a 2 % Divers 1 % Autre s Europ e 1 %
Australi e 1 % Japo n 1 % Mali 1%
Source : NENE Décembre 20095
En outre, à la lecture de ces chiffres, on peut
remarquer que 83 % des nuitées sont réalisées par des
touristes en provenance d'Europe occidentale, ce qui est considérable.
La forte proportion de nuitées de touristes d'origine américaine
s'explique certainement par l'attrait que représente la ville de
Tombouctou aux USA.
En effet, une forte proportion des nombreux touristes
américains qui se rendent au Mali pour visiter la "ville
mystérieuse", passent aussi par le pays dogon.
Remarquons qu'il n'existe presque pas de "tourisme africain"
au sens où les africains visiteraient leur continent de manière
touristique. Les nuitées touristiques provenant de maliens
représentent moins d'un pour-cent des nuitées totales.
Si les données statistiques sont rares et incertaines pour
quantifier le phénomène touristique au Mali, elles n'en marquent
pas moins l'émergence d'une destination spécialisée, ainsi
que la nécessité actuelle d'une étude quantitative plus
approfondie.
5 source obtenue à partir des recherches de
terrain
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