B. MEGC et les biocarburants
Pour mieux appréhender, les différents aspects
entourant le développement des biocarburants et de leurs effets, de
nombreux auteurs ont choisi d'utiliser des modèles d'équilibre
général calculable.
C'est notamment le cas de Benfica et al. (2009), qui analysent
les implications d'un investissement à grande échelle dans les
biocarburants, au Mozambique, sur la répartition des
revenus et la croissance. Pour se faire, ils utilisent un
modèle dynamique et adoptent une structure avec plusieurs marchés
comprenant le marché du travail, celui du capital et des
commodités. Le Mozambique est un pays largement pourvu de terres ce qui
permet d'envisager une offre de terre endogène. On notera
également que dans le modèle développé par ces
auteurs, le stock de capital est immobile, ceci pour mieux capter les
rigidités institutionnelles et l'imperfection des marchés. Le
travail est quant à lui divisé en trois grands groupes
(qualifié, semi-qualifié et non qualifié).
De plus, le travail est supposé mobile entre les
différents secteurs et pleinement employé. Enfin, les auteurs
utilisent une grande quantité de main-d'oeuvre non qualifiée dans
leur modèle. Ils aboutissent à une diminution de la
pauvreté de 6%, et à une augmentation du taux de croissance du
pays de 0.6%. Il faut toutefois préciser que ces résultats ont
été obtenus, en faisant des suppositions fortes, sur le taux de
croissance espéré du Mozambique sur une période allant de
2003 à 2015, soit 12 ans.
Parallèlement à ces travaux, Benfica et al.
(2010) ont réalisé une autre étude en lien avec le
thème précédent, mais la problématique étant
axée cette fois-ci, sur l'efficacité du travail par genre et son
effet sur la croissance et la réduction de la pauvreté. Les
auteurs y développent plusieurs scénarios avec des
différences dans l'intensité du travail par genre. Tous les
scénarios présentés permettent d'aboutir à la
même conclusion, soit que les biocarburants permettent de réduire
la pauvreté et créer de la croissance. De plus, un lien fort peut
être établi entre les biocarburants et la quantité de
nourriture disponible, quand le travail des femmes est utilisé de
manière intensive. L'explication est intuitive car la main
d'oeuvre qui devait servir à assurer les productions
maraîchères et vivrières est utilisée pour la
production des biocarburants.
Les différentes simulations effectuées montrent
également qu'une légère amélioration de
l'éducation des femmes et le rendement des cultures vivrières est
nécessaire, pour résoudre les problèmes potentiels de
sécurité alimentaire et assurer une plus grande production des
biocarburants en général et du jatropha en
particulier.
Banse et al. (2008) évaluent quant à eux les
implications de la mise en place de la directive européenne relative aux
biocarburants en insérant une fonction de demande pour la terre
endogène, et arrivent à la conclusion que ces directives ont un
impact à la fois sur les marchés agricoles au niveau mondial et
au sein de l'Europe. Une de ces conséquences n'étant autre que la
hausse du prix de la terre et le revenu des fermes. Une critique peut cependant
être émise à ce niveau lorsque l'on sait que les auteurs
ont utilisé des données provenant de la base données GTAP,
qui agrège la plupart des pays africains en un seul pays, niant ainsi de
faites, les grandes disparités qui pourraient exister entre ces pays.
C. La robustesse dans les MEGC
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Les modèles d'équilibre générale
calculables sont un programme complexe d'équations, appelés
formes fonctionnelles qui traduisent différents comportements
économiques Annabi et al. (2003). Comme la production, la consommation,
l'épargne, les transferts entre agents, etc. Ces formes fonctionnelles
peuvent revêtir plusieurs formes, l'obligation qu'elles ont
d'être
continues, homogènes de degré zéro et
d'obéir à la loi de Walras (Shoven et Walley, 1984), pousse
généralement les chercheurs à ne se pencher que sur
certaines fonctions usuelles.
A l'instar de la fonction Cobb-Douglas (avec ou sans
élasticité constante), impliquant que certaines
élasticités comme, l'élasticité prix,
l'élasticité revenu et l'élasticité de substitution
entre chaque bien ou chaque paire de bien est égale à
l'unité (Annabi et al. 2003). De manière générale,
De Janvry et Sadoulet et (1995), nous apprennent également que de
nombreux auteurs se sont intéressés au choix des formes
fonctionnelles et la détermination des paramètres dans
différents modèles, présentant des marchés
multiples et les MEGC.
Citons notamment le système de demande linéaire
(LES) développé par Stone (1954), le système de demande
presqu'idéal (AIDS) développé par Deaton et Muellbauer
(1980), et la combinaison de ces deux systèmes (GAIDS), proposé
par Bollino (1990). D'autres systèmes existent, moins utilisés,
comme celui de Rotterdam de Theil (1976) et Barten (1969) et le modèle
translog de Christensen et al. (1975). Et enfin, la fonction de type Leontief,
qui implique des élasticités égale à
zéro.
Ces équations de comportements imposent le calcul de
certains paramètres. On parle alors de calibrage. De manière plus
formelle, nous proposerons ici la définition d'Annabi et al. (2003).
À savoir que le calibrage consiste à choisir des valeurs
numériques des différents paramètres des formes
fonctionnelles, ceci tel qu'ils soient compatibles avec la matrice de
comptabilité sociale initiale (MCS). Il est important de préciser
à ce niveau, que le premier cas de calibrage est celui où
certains paramètres sont des coefficients pour reproduire l'année
de
référence, mais ne sont pas des
élasticités à proprement dit. Le modèle comporte
néanmoins des élasticités.
C'est le choix de ces formes fonctionnelles ou fonctions
retenues, qui impliquent que ces élasticités sont
imposées, ou que l'on aura le choix de les prendre, hors du
modèle. Il faut alors utiliser d'autres méthodes pour les
déterminer.
C'est pourquoi dans le choix de la valeur des
élasticités trois méthodes peuvent être retenues.
- Étude économétrique
spécifique du projet. À l'instar de Boccanfuso et al. (2012)
où on procède à une analyse comparative des régimes
de financement pour les dépenses publiques d'infrastructure au
Québec. On peut également citer Abdelkhalek, Touhami (2012), qui
estime les élasticités pour le commerce extérieur au
Maroc.
- Élasticité d'autres études
économétriques sans lien direct. Elles ont permis à de
nombreux auteurs de fixer leur élasticité de substitution pour
les graines (de soja, de maïs, etc.) à moins de 2.6 Hertel et al.
(2007). Cette option est souvent rencontrée également, par les
auteurs qui travaillent sur des pays en voies de
développement29, où on rencontre une absence de
données pour procéder à certaines analyses.
- La fixation selon les informations, connaissances et faits
stylisés de l'économie. Ainsi Yapaudian-Thibault et al.
(2003), justifient le choix de leurs élasticités par le
consensus
29 Il faut faire preuve de prudence dans le choix de
ces élasticités Decaluwé et al (2001). Car il ne serait
pas pertinent de prendre des élasticités de pays
développés pour travailler sur des pays en voies de
développement (exemple élasticité de la France et du
Canada, pour travailler sur le Népal).
relatif qui existe dans la littérature
économétrique sur certaines élasticités
(élasticité de substitution entre le travail et le capital).
Dans les trois cas, il est primordial de procéder par
la suite à des analyses de sensibilités pour s'assurer de la
crédibilité des résultats obtenus, ou tout simplement pour
conforter le chercheur dans l'appréciation des tendances
observées. En résumé, plusieurs critères peuvent
concourir au choix de la valeur des élasticités, mais ce choix
repose généralement sur :
- L'observation d'anciennes études
économétriques;
- Le consensus entourant la valeur de certaines
élasticités;
- Les connaissances des chercheurs dans le domaine;
Des critères qui présideront aux choix des valeurs
de nos élasticités lors de nos simulations.
La prochaine partie présente la base de données
utilisée pour arriver à construire un MEGC, ainsi qu'une
présentation succincte des MEGC.
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