VII.2.2- LA COUPe
A la différence de la déforestation, la coupe
est plutôt sélective. Donc, les pressions s'exercent d'une
façon quotidienne sur les mêmes espèces. Elles sont les
cibles de la construction (photo 17) et de l'énergie. L'usage d'une
telle plante par rapport à une autre est dicté par la tradition :
exemple le « Mendoravy >> (Mendoravia sp.) pour la
construction des cercueils. Un autre ligneux plus exploité est le genre
Cedrelopsis (Katrafay). Actuellement, cette espèce dispose
d'une large fréquence mais à l'état de
régénération. Le « Hompy >> de BEHOMPY dont les
villageois ne cessent de dire : « cette espèce couvrait notre
région >> a quasiment disparu. Même dans les milieux
les plus reculés de Behompy, sa fréquence est faible.
Ainsi, la pénurie en bois se fait sentir. Les
villageois doivent parcourir plusieurs kilomètres pour trouver des
espèces dont la taille permet l'exploitation. Face à une telle
crise, l'Homme s'adapte à court terme à la disparition de la
flore. Là où les arbustes n'existent plus ou en passe de
disparaître, les peuplements chétifs et constitués
d'espèces rabougries subissent des coupes abusives. Leur valeur
énergétique est très faible. Pour y compenser les
collecteurs augmentent le volume des tiges. A défaut de bois, les arbres
fruitiers (manguiers, tamariniers,...) et les ligneux à caractère
touristique comme « Sony >> (Didierea madagascariensis)
sont charbonnés. Ici notre regard se porte surtout sur les dunes roux de
Belalanda. L'exploitation abusive des mangroves pour la carbonisation et la
construction conduit à leur dégradation.
Le caractère illégal du
prélèvement et le problème du transport poussent les
collecteurs à opérer sur des zones restreintes qui sont ainsi
totalement déboisées. Pire encore, les formations
forestières situées à proximité de la R.N.9. et de
la R.N.7. sont totalement dégradées. Désormais, ces routes
conçues pour le développement, ne parviennent plus à
cohabiter avec la flore. Elles facilitent la pénétration dans ces
milieux jadis difficilement accessibles et accélèrent la
dégradation floristique. Avec, l'appui et la comparaison des images
satellitaires (LANDSAT/1999 et GOOGLE /2007, Annexe VIII) il est constatable
que la superficie forestière sur le plateau calcaire diminue et que la
zone à forte déforestation est traversée par la R.N.7.
alors que vers l'intérieur de Behompy, la flore est plus ou moins
conservée. Dans le premier cas, la carbonisation est un métier
définitif, elle est le moyen le plus rapide pour avoir de l'argent, le
transport mobilise des camions. Le second cas au contraire, les paysans se
contentent d'une carbonisation temporaire pour survivre pendant qu'ils
attendent leur récolte. Le transport est assuré par charrette.
Une étude récente a confirmé que la ville
de Toliara consomme annuellement 300.000 m3 de bois d'énergie dont 93 %
pour le charbon et 7% pour le bois de feu (Vintsy, n°51- 2006).
A l'échelle régionale, les forêts denses
sèches décidues et les fourrées xérophiles du Sud
fournissent un volume de bois de 29 m3/ha pour 850 tiges en moyenne
(données fournies par la DGEF/IEFN, 1996).
A notre échelle, les forêts denses sèches
à Commiphora et les forêts denses sclérophylles de
moyenne altitude présentent en moyenne une potentialité de 38
m3/ha pour 4545 tiges.
Ces valeurs vont permettre d'estimer d'abord la superficie
qui disparaît annuellement à l'échelle régionale.
Ensuite, nous pouvons estimer la superficie qui disparaît ou qui a
disparu pour un tel volume de 300 000 m3 à notre
échelle (tableau 33). Les superficies de ces formations
végétales dans la province de Toliara figurent en annexe VII.
Tableau 33 : Estimation des superficies
ravagées
Indicateurs
|
Superficie régionale (ha/an)
|
V. commun en m3 pour Toliara
|
Superficie sectorielle (ha)
|
Bois du charbon
|
9621
|
279000
|
7342
|
Bois du feu
|
724
|
21000
|
553
|
Total
|
10345
|
300000
|
7895
|
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Source : statistiques de l'auteur
La carbonisation pour l'alimentation de la ville de Toliara
connaît une recrudescence alarmante. Dans la région, au
début des années 1980, 5000 ha de forêt étaient
détruits par an (Cf. SALOMON, 1981 et 1987). Aujourd'hui, le chiffre
atteint 9621 ha/an. Au total (bois du charbon et du feu), 10345 ha
disparaissent annuellement. Pour notre cas, il faut raser 7895 ha pour obtenir
les 300000 m3 de bois qui ravitaillent Toliara.
Ces coupes ne sont pas conduites de telle sorte à
ménager notre patrimoine pour l'avenir. « Les grands
responsables de cet état de fait sont des populations rurales vivant au
bord de la pauvreté » (SALOMON, 1987) et plus
particulièrement des migrants ayant des motivations économiques.
Ces gens submergés dans leurs profits semblent ignorer qu'un arbre ou un
arbuste peut mettre plusieurs années avant d'atteindre une taille
acceptable pour être abattu (NOURDDINE, 2005) : « Arofy » met
plus de 200 ans avant d'atteindre le diamètre d'une coupe acceptable;
« Hazomalany » exige même 800 ans ! (SALOMON, 1981). Ces bois
sont très recherchés.
De cette manière, beaucoup d'espèces floristiques
rares et endémiques disparaîtront et le charbon se fera rare dans
le centre ville de Toliara.
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