5- NOTION DE TERMINOLOGIE
Les différentes formations végétales de
la région comme dans la plupart des formations forestières de
l'Algérie ne sont pas en équilibre. Toutes les strates ne sont
pas toujours présentes d'où une structure et même une
composition floristique différentes sous des conditions
écologiques sensiblement identiques. Cette structure particulière
est surtout imposée aux diverses formations végétales par
les pressions humaines et animales (incendies, coupes, surpâturage) qui
s'exercent et qui se sont toujours exercées sur la
végétation. Ces dernières impriment sur le paysage
végétal des formes qu'on ne peut passer sous silence. Ainsi il
est quasiment impossible de dissocier l'action anthropozoogène de la
diagnose et de la dynamique de toutes les formations végétales
rencontrées. Cela se traduit par une structure et une physionomie
particulières imposées par le degré d'artificialisation de
la formation en parfaite relation avec
55
« Aspects physionomico- structuraux de la
végétation forestière ligneuse face à la pression
anthropozoogène dans les
monts de Tlemcen et les monts de Dhaya (Algérie
occidentale)
l'intensité et le type de pression. Souvent même
les travaux d'aménagement (ouverture de pistes, de tranchées
pare-feu, repeuplement) se traduisent par des dégradations assez
importantes induites par une absence d'étude et surtout de savoir
faire.
Cette situation particulière nécessite une
analyse qui débouchera probablement sur des propositions de correction
de certains termes utilisés pour identifier et définir les
formations végétales. L'analyse qui sera initiée se
justifie puisque nous considérons et, nous le prouverons, que les
actions de l'homme dans leur ensemble agissent sur la végétation
comme un facteur naturel incontournable du milieu. Depuis toujours les
activités humaines et leurs impact sur la végétation de
l'Algérie occidentale ont fait partie prenante et intégrante du
milieu qu'il est inconcevable de dissocier.
5-1. SITUATION ACTUELLE
Une formation végétale selon REY (1960) est " un
groupement botanique caractérisé par sa forme biologique
dominante, expression actuelle de conditions de vie déterminés".
Les différentes formations pouvant être présentes dans
notre région sont:
- la forêt: formation arborescente de
hauteur supérieure à 4 m et de densité variable. -
la forêt mixte: dominance non spécifique.
- le taillis: intéresse les formations de
chêne vert issues de rejets de souche ou de drageons constituées
par une juxtaposition de cépées.
- le taillis arboré: taillis avec des
arbres isolés d'espèces différentes de celles qui
constituent le maquis.
- matorral: toutes les formations
intermédiaires entre la forêt, le taillis et la steppe
arborée, végétation dont la hauteur est inférieure
à 4 m issue de dégradation.
- steppe arborée: formation basse
ouverte à xérophytes en touffes dominantes où l'alfa
impose sa physionomie. Ponctuée par des arbres ou des arbrisseaux
isolés le plus souvent mutilés et une végétation
buissonnante latente très basse.
- steppe buissonneuse: absence d'arbres et
d'arbustes isolés.
Classiquement on peut distinguer la futaie et le taillis comme
mode de traitement utilisé par les forestiers, les termes usuels
décrivant la physionomie de la végétation ligneuse seront
abordés ultérieurement. Dans des conditions de
développement naturelles et optimales on assiste pour les principales
espèces aux stades d'évolution suivants:
-semis: jeunes sujets issus de graines dont la
hauteur est inférieure à 0,40 cm,
-rejets: jeunes tiges issues d'une souche ou
d'une racine après exploitation ou mutilation de la tige principale,
-fourré: ensemble de tiges ligneuses
issues de graines, ramifiées, elles ont entre 0,40 et 1,50 cm de hauteur
et de 1 à 2 cm de diamètre en moyenne,
-gaulis: jeunes tiges flexibles issues de 2
à 6 m de hauteur et de 2 à 6 cm de diamètre, on assiste
à un début de formation de houppier et de fut net de branche
grâce à l'élagage naturel,
-perchis: diamètre de la tige
individualisée de 6 à 24 cm avec un élagage naturel
intense où la section est soit naturelle soit guidée par
l'homme,
-futaie: arbre ayant acquis sa forme et son port
définitifs, l'accroissement en hauteur est ralenti et en diamètre
maintenu.
On peut de cette manière distinguer des formations
végétales en se basant essentiellement sur les espèces
principales pouvant atteindre le stade arborescent suivant leur stade de
développement. Cette formation physionomique dont la
détermination est axé essentiellement sur la taille et le
diamètre est limitative et ne peut s'appliquer aux espèces
arbustives et buissonnantes, les plus prépondérantes dans
l'analyse phytoécologique mais ignorées par cette classification.
Il est possible de classer toutes ces dernières espèces dans le
terme de taillis qui regroupe toute la végétation ligneuse issue
de rejet de souche et de semis, mais il y aurait une double identification: une
pour les espèces forestières intéressantes (pouvant
atteindre la strate arborescente) et une autre pour le reste des
espèces. Convenez que ce n'est pas du tout pratique
« Aspects physionomico- structuraux de la
végétation forestière ligneuse face à la pression
anthropozoogène dans les
monts de Tlemcen et les monts de Dhaya (Algérie
occidentale)
et claire et que cette proposition même si elle
mérite une attention dans certains cas bien précis ne peut
être retenue.
Pour clarifier la description des formations
végétales loin de toute spécialisation on de base
généralement et exclusivement sur les notions suivantes:
- l'arbre: plante ligneuse à tige unique,
dépourvue de branches vers le bas et dont la hauteur dépasse 7
mètres,
- l'arbuste: plante ligneuse à tige
unique dépourvue de branche vers le bas et dont la hauteur ne
dépasse pas 7 m,
- l'arbrisseau: plante ligneuse, tige
ramifiée dés la base, sans tronc distinct, la hauteur se situe
entre 1 et 2 m,
- le sous-arbrisseau: plante ligneuse ayant
moins de 1 m de hauteur.
En 1963 GAUSSEN, pour apprécier l'aspect
général de la végétation et en prenant comme
critère la taille du végétal, propose l'échelle de
classification suivante:
0
|
Sol nu
|
6
|
Sous-arbrisseaux
|
1
|
Pelouse rase
|
7
|
Sous-arbrisseaux et arbrisseaux
|
2
|
Formation herbacée
|
8
|
Formation d'arbrisseaux
|
3
|
Arbuste bas
|
9
|
Arbrisseaux et arbres
|
4
|
Formation ligneuse d'arbustes
|
10
|
Formation d'arbres
|
5
|
Arbustes et sous arbrisseaux
|
|
|
Cette classification est trop détaillée et
difficilement identifiable sur le terrain par son manque de précision et
ne peut être utilisée car elle n'apporte aucune information
descriptive supplémentaire.
La classification qui synthétise les différents
stades physionomique de la région et qui est utilisée à
travers toute la région méditerranéenne est celle
d'EMBERGER (1930), SAUVAGE (1961), IONESCO (1962) où six termes sont
retenus:
- Steppe: formation naturelle herbacée
où les graminées jouent un rôle primordiale et où
domine Stipa tenacissima,
- Erme: formation herbacée basse à
rythme saisonnier dérivant de la dégradation du matorral,
- Matorral: formation de végétaux
ligneux n'excédant pas 4 m de haut et où dominent les
espèces arbustives,
- Maquis: matorral dense élevé de
pénétration difficile issu de la dégradation d'une
forêt,
- Forêt: formation de
végétaux ligneux dominés par la strate arborescente
où les arbres se concurrencent par leurs racines ou leurs houppiers.
TOMASELLI (1976) donne quelques définitions importantes
des types fondamentaux de végétation:
- Forêt méditerranéenne:
toutes les formations d'arbre de plus de 2 m de hauteur où se
distingue selon le degré de recouvrement des forêts denses des
forêts claires et des forêts trouées,
- Matorral: formation de
végétaux ligneux nanophanérophytes ou chamephytes dont la
taille et le port sont soit naturels soit artificiels et résultant alors
de traitements dégradants. Cette définition est de SAUVAGE qui la
commente: " Le mot espagnol-matorral- n'a pas d'équivalent en
français, bien qu'il corresponde dans les pays
méditerranéens à un aspect très répandu. Les
auteurs de langue française ne disposent guère que des noms de
maquis et de garrigue, qui désignent des types de
végétation particuliers auxquels il est souhaitable de conserver
leur valeur précise. C'est la raison pour laquelle il a semblé
utile d'aborder ici le nom de -matorral-, dont on ne saurait trop recommander
l'emploi dans la description physionomique de la végétation
méditerranéenne ". RUIZ DE LA TORRE (1971) définit le
matorral comme : " Une formation de plantes ligneuses dont la partie
aérienne n'arrive pas à se différencier en tronc et en
frondaison,
57
« Aspects physionomico- structuraux de la
végétation forestière ligneuse face à la pression
anthropozoogène dans les
monts de Tlemcen et les monts de Dhaya (Algérie
occidentale)
étant en général très
ramifiée dés la base, et pouvant atteindre un port d'arbuste
même prostré ". Pour plus de précision TOMASELLI (1972)
propose la définition suivante: " Formation de plantes ligneuses
xérophiles toujours vertes, dont la partie aérienne n'arrive pas
à se différencier nettement en tronc et en frondaison, mais qui
se présente en général très ramifiée
à la base ".
-Maquis: MOLINIER (1959) l'a défini: "
Peuplement d'arbustes et d'arbrisseaux xérophiles à
feuilles persistantes, toujours vertes et
généralement très dense, au point de devenir
impénétrable ". SAUVAGE (1961) donne le mon de maquis à
toute formation de nanophanérophytes dense et difficilement
pénétrable, sur sol dépourvu de calcaire. TOMASELLI (1976)
complète par: " Il vaut mieux ne pas prendre cette dernière
limitation en considération, et laisser au mot maquis sa signification
la plus ample, exclusivement physionomico-structurale ".
- Garrigue: matorral moyen clair sur sol plus
sec que celui du maquis, sur substrat calcaire. " Pour
simplifier, il semble préférable de se
référer exclusivement à la structure de la
végétation, indépendamment du substrat" note TOMASELLI
(1972).
Il y a lieu de noter que CELLES (1980) donne une classification
plus simple pour les zones à
conditions édapho-climatiques difficiles, axée
essentiellement sur la forêt, le matorral et la steppe. 5-1.1.
Conclusion.
Les types de formations les plus fréquentes et
représentatives de la dynamique des principaux groupements
végétaux sont au nombre de trois: la forêt, le maquis et le
buisson. Tous les stades de dégradation sont importants mais le plus
déterminant c'est la forme d'équilibre où la
végétation trouve son optimum face aux conditions où elle
est appelée à se développer.
La végétation potentielle para-climacique est
dans la majorité des cas représentée par la forêt
(aspect physionomico-structural en relation étroite avec les conditions
du milieu) qui ne subsiste à l'état optimal
qu'exceptionnellement.
La multitude de définitions et d'approches ne simplifie
pas la tâche pour celui qui tente de décrire avec précision
les formations végétales; il est important de prendre en charge
ce volet pour tenter de le simplifier afin de rendre la terminologie utilisable
pour notre région et pourquoi pas pour le territoire national. Une
nouvelle approche s'impose et est dictée par la nécessité
d'uniformiser les termes et de les adapter surtout à la
réalité de la végétation.
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