I-2-2-NGOYANG
I- 2-2-1-L'origine ethnonymique
Ngoyang, selon les informations recueillies sur le terrain
nous enseignent que le village porte le nom de la longue chaîne
montagneuse qui délimite la frontière naturelle de ce village. Ce
récif montagneux qui culmine sur plus de 1000m se nomme dans les langues
environnantes soit Ngoyang (Ewondo), Ngoboyo (Ngoumba), Ngovayang(Fang) et Ngo
Yang chez les Bassa. Le village avait été occupé
premièrement par les Bassa qui par la suite ont été
repoussés au Nord vers Eséka par les nouveaux venus.
I- 2-2-2-L'origine du peuplement
Ngoyang, est un village dont les principales composantes
ethniques sont au nombre de trois (Ewondo, Ngoumba et Bakola). Pour ce qui est
de l'occupation de l'espace par les Ewondo qui sont majoritaires, on retrouve
les Essom à l'ouest, les Tsinga à l'est et les Kombé au
centre du village. On ne peut pas dire avec la certitude la plus absolue
comment s'est fondé le village. Les écrits sur ce point sont
rares, voire inexistants. Il existe néanmoins une forte oralité
d'ailleurs en constante disparition du fait même de la disparition des
anciens. On s'accorde tout de même à dire que Ngoyang est un
village qui s'est bâti à partir d'une immigration qu'on peut
qualifier d'alimentaire. Rappelons en effet que l'océan atlantique est
à vol d'oiseau à environ 100 km de là et que chez les
peuples Ewondo comme chez les autres, le sel est un élément
essentiel de la dégustation des aliments. Tout comme on a connu pour
l'Asie une route des épices, on peut faire un parallèle
certainement maladroit en parlant de la route du sel. En effet, Tsinga, Essom
et Kombé n'ont pas vraiment leurs racines à Ngoyang
comme les Pygmées pourraient prétendre l'avoir
pour les forêts environnantes. Ce sont des clans qui viennent des
environs, pour les Tsinga et Essom, de la région de Yaoundé et
pour les Kombé de la région de Mbalmayo dans le centre du
Cameroun.
Pour de nombreux anciens, leurs ancêtres seraient partis
de leur zone d'origine à la quête du sel. Mais quand on
connaît un peu la géographie du sud du Cameroun, on peut se
demander pourquoi ces clans se sont installés là à Ngoyang
à plus ou moins 100 km et pas beaucoup plus près de
l'océan, source de sel. Les explications là aussi sont
nombreuses. L'une de ces explications consiste à dire que les
bâtisseurs de Ngoyang ne sont jamais arrivés à la mer,
source de sel. Perdus dans la jungle, ne sachant plus trop où se
trouvait le chemin les menant au sel, et ne pouvant même plus rebrousser
chemin, ils se sont installés sur place. On a également dit que
les peuples, batanga par exemple se trouvant à côté de la
mer n'avaient pas particulièrement apprécié l'invasion de
ces Ewondo venus des régions de Yaoundé ou Mbalmayo. Cela aurait
entraîné des conflits obligeant "les envahisseurs" à se
replier vers les zones forestières situées plus loin de la
côte. Cela pourrait notamment expliquer le fait que certaines tribus
Ewondo soient aujourd'hui installées géographiquement bien
après "le sel".
I- 2-2-3-L'aspect socioculturel et
économique
I- 2-2-3-1-L'organisation sociale
a. Vie politique L'organisation sociale
s'articule autour d'une institution: la chefferie, qui représente
à
la fois l'autorité traditionnelle et l'autorité de
l'Etat. La chefferie est calquée sur un modèle de divisions
claniques et/ou de regroupements de familles ayant un ancêtre commun.
b. Vie religieuse On note qu'à Ngoyang,
les croyances sont multiples et cohabitent en parfaite
harmonie: Catholiques, Protestants (Eglise
Néo-Apostolique) et Animistes.
I- 2-2-3-2-L' Education
Le taux de scolarisation des enfants en âge de
fréquenter est très faible à Ngoyang. La
majeure partie des effectifs de l'école publique de la
localité est composée de quelques enfants bantous restés
au village et des enfants Bakola en majorité. Toutefois, il faut
souligner que, malgré le nombre important d'élèves en
début d'année scolaire, le phénomène des
déperditions scolaires observé à Ngoyang est un handicap
sérieux à l'émancipation intellectuelle des jeunes
pygmées.
Ci-dessous deux tableaux qui résument clairement la
situation scolaire à Ngoyang. Le premier tableau, présente les
effectifs de l'école publique de Ngoyang au cours des trois
dernières années scolaires (2007-2008, 2008-2009, 2009-2010). Le
second tableau, nous montre la progression scolaire par niveau d'apprentissage
des enfants Bakola.
Année scolaire
|
|
2007-2008
|
|
2008-2009
|
|
2009-2010
|
Effectif des élèves Bakola
|
|
94
|
|
104
|
|
84
|
Répartition par sexe des élèves Bakola
|
G
|
|
F
|
G
|
|
F
|
G
|
|
F
|
58
|
|
36
|
65
|
|
39
|
46
|
|
38
|
Effectif des élèves de l'école publique
de Ngoyang
|
|
162
|
|
157
|
|
154
|
Pourcentage de
représentativité des élèves Bakola
|
|
58%
|
|
66%
|
|
54%
|
Nombre d'élèves
Bakola certifiés
|
|
2
|
|
1
|
|
1
|
Tableau 3 : Effectif des enfants Bakola inscrits a
l'école publique de Ngoyang
Source : Aristide Bitouga/ Mme OYONO ANDEGUE Joséphine
(Directrice de l'école publique de Ngoyang
2009-2010)
Niveau d'apprentissage
|
Pourcentage d'élèves Bakola
|
SIL-CP
|
50%
|
CE1-CE2
|
40%
|
CM1-CM2
|
10%
|
Total
|
100
|
Tableau 4 : Progression scolaire des enfants Bakola par
niveau d'apprentissage
Source : Aristide Bitouga/ Mme OYONO ANDEGUE Joséphine,
(Directrice de l'école publique de Ngoyang
2009-2010)
L'école publique de Ngoyang, est une école
à cycle complet qui a été construit avec l'appui financier
du projet SAILD/APE. Elle reçoit tous les enfants Bakola qui viennent
des différents villages pygmées qui composent le groupement
Bakola de Ngoyang (Nkouonguio,
Ngo Manguèlè ; Mimbiti, Matindi, Nkouampboer, Meh,
etc....). La photo ci-après, montre le bâtiment principal de
l'école publique de Ngoyang.
Photo 2 : Ecole publique de Ngoyang Source :
Aristide Bitouga (Ngoyang 2009)
I- 2-2-3-3-L'aspect économique a- Activités
agricoles
Les méthodes culturales sont fondées sur une
agriculture forestière extensive sur brûlis,
caractéristique des espaces à faible densité de
population, mais également à bas niveau technologique.
L'agriculture sur brûlis consiste à défricher un terrain
dans la forêt, à brûler la végétation et
à cultiver le champ ainsi préparé pendant deux à
trois mois avant de l'abandonner en jachère afin de restituer la
fertilité du sol. En raison d'une grande disponibilité des sols,
la jachère dure en général plus de huit ans. L'abondance
des pluies permet la mise en place à longueur d'année d'un grand
nombre de cultures. La période de mise en culture d'une parcelle de
culture est de deux à quatre ans.
b- Activités
cynégétiques
La chasse
La chasse est une composante des différentes
stratégies de diversification des sources de nourriture et de revenus
pour la survie des ménages. La plupart des grands animaux sauvages ont
pratiquement disparu. Les animaux les plus couramment chassés sont : le
singe, l'antilope, le porc-épic, le lièvre, le rat et les
serpents. La chasse se fait avec des collets, des arcs et des flèches.
La chasse au fusil se pratique la nuit avec des torches. Cette forme
d'activité est le plus souvent collective car on va de plus en plus loin
du village pour plusieurs
jours. Les grandes chasses se font en période de pluies
car le bruit des feuilles mortes en saison sèche met les animaux en
alerte. Cependant la chasse se pratique toute l'année mais de
façon plus intense en dehors des périodes favorables.
Photo 3:Gibier (pangolin) pris au piège et
destiné à la commercialisation Source : Aristide Bitouga
(Ngoyang 2009)
c- Les activités commerciales
Il concerne d'une part le commerce des produits vivriers et
d'autre part la vente des denrées de première
nécessité. La première forme concerne surtout les femmes ;
celles-ci vendent leurs produits sur les marchés de Lolodorf et
d'Eséka. La proximité avec la route bitumée facilite
l'écoulement des produits vivriers. On peut même observer de
passage à Ngoyang que des acheteurs viennent sur place acheter les
produits dont ils ont besoin. Parmi ces produits on peut citer les produits
forestiers non ligneux, la viande de brousse, etc.
A Ngoyang, le petit commerce est très peu
développé. Cette situation peut s'expliquer par la
proximité du village avec les principales villes de ravitaillement que
sont Lolodorf et Eséka. On y retrouve la plupart des cas de petites
échoppes tenues par quelques villageois. Le savon, le sel, le sucre, le
pétrole, la cigarette et même les produits pharmaceutiques sont
proposés aux paysans. De même, les femmes et les enfants proposent
des denrées alimentaires crues ou cuisinées. On peut
également mentionner par la même lancée la vente des
produits comestibles tels que : le poisson sec ou boucané, les beignets,
les bâtons de manioc, mets de courges, etc. On observe aussi une
activité très lucrative : le commerce de l'écorce de
l'arbre à ail (Scorodophloeus Zenkéri) appelé
dans la région Womi. Cette écorce est
un condiment très prisée par les Bassa et d'autres peuples pour
assaisonner leurs différentes cuissons. Les
femmes Bakola vont en brousse chercher cette écorce et
viennent ensuite les empaquetées pour les déposer en bordure de
route à l'attente d'une éventuelle acheteuse qui viendra de
Yaoundé ou de Douala pour en acheter. Le paquet de 40 écorces de
Womi s'élève à cinq mille francs
CFA.
Photo 4:Womi (Scorodophloeus Zenkéri)
séché a l'intérieur d'une cuisine à
Ngoyang prêt pour être vendu
Source : Aristide Bitouga (Ngoyang 2009)
L'artisanat : L'artisanat constitue la cinquième plus
importante activité sociale et économique chez les Bakola et
Bagyelli de Lolodorf et Bipindi14. Il vient en troisième
position comme source de revenus. Une fois les produits préts, ils
n'hésitent pas à les proposer à des femmes bantoues qui
sont très nombreuses à s'en procurer pour le transport des
tubercules des champs vers le village.
La photographie ci-dessous, fait l'étalage de quelques
produits issus de l'artisanat Bakola de Ngoyang.
14 Arrêté n°0648/MINFOF du 10 décembre
2006 fixant la liste des animaux des classes de protection A, B et C.
Photo 5: Produits issus de l'artisanat Bakola
Source : Aristide Bitouga (Ngoyang 2009)
|