II. Discussion
Plusieurs paramètres peuvent être à l'origine
de la présence ou l'absence de l'activité antimicrobienne.
La taille de l'inoculum : un inoculum trop dense peut conduire
à des résultats faussement négatifs. Un inoculum trop
faible peut conduire à des résultats faussement positifs. Pour
notre étude on a choisi un inoculum dont la densité est de 0,08-
0,10, pour avoir un tapis régulier
D'après les résultats des tests
antibactériens, on constate que trois souches bactériennes sur
quatre présentent une certaine sensibilité.
Ces résultats montrent une activité
vis-à-vis des Gram positifs que les Gram négatifs. D'après
(Nikaido, 2003), ces résultats pourraient être
dus à la composition de la membrane des bactéries Gram
négatifs. En effet, ces dernières possèdent une membrane
qui présente une perméabilité sélective; la surface
des lipopolysacharides contient des charges négatives, qui
empêchent la diffusion des molécules hydrophobes, et des porines
qui bloquent le passage des molécules à haut poids
moléculaire (Garrett et Grisham, 2000). Pseudomonas
aeruginosa contient dans sa membrane des porines de faibles
perméabilités. Contrairement aux Gram négatif, les
bactéries à Gram positif se sont montrées plus
sensibles.
Nos observations concordent avec les résultats obtenus
sur l'activité antimicrobienne des huiles essentielles de Juniperus
phoenicea sur les bactéries à Gram positifs à Gram
négatifs (Bouzouita et al, 2008) et avec
d'autres travaux sur le fait Pseudomonas aerogenosa résistait
aux extraits de J. phoenicea. (Mazari et al,
2010)
On constate également que les zones d'inhibition
étaient inférieures à celles des antibiotiques, qui ont
montré des zones d'inhibition larges par apport à celles obtenues
en testant l'huile essentielle de J. phoenicea.
Divers paramètres contribuent à expliquer cette
différence d'efficacité entre les antibiotiques et les huiles
essentielles :
- la concentration (peut être exagérée dans
les disques !) ;
- le degré de pureté;
- la toxicité elle-même.
Les huiles essentielles de J. phoenicea ont
été examinées également pour l'activité
antifongique contre Aspergillus flavus. Les résultats ont
prouvé que les huiles essentielles ont modérément
réduit la croissance de ce champignon. Ces résultats sont
conformes à ceux obtenus dans une autre étude en Algérie
(Mazari et al ,2010). Après 7 jours
d'incubation à 28 C°, il y a eu croissance d'A. flavus
dans les zones d'inhibition, ce qui nous conduit à déduire
que l'effet de l'huile essentielle de J.phoenicea sur la souche
fongique testée est fongistatique.
L'activité antimicrobienne des huiles essentielles des
feuilles de J. phoenicea pourrait, en grande partie, être
associés à ses principaux constituants : les monoterpénes
hydrocarbures tels #177;- pinène, 2-phellandrène et
2-pinène, qui ont montré les propriétés
antimicrobiennes (Derwich et al, 2010b ; Mazari et
al, 2010). ). En effet #177;-pinène, est connu pour
exercer une activité inhibitrice sur E.coli, S.aureus et B.
subtilis (Bourkhiss et al, 2007), les
mêmes espèces que nous avons détectées comme
sensibles. Ces activités ont été reliées aux
terpènes C10 et C15 avec les noyaux aromatiques et les groupes
d'hydroxyles phénoliques capables de former des liaisons
hydrogène avec les sites actifs des enzymes des cellules-cibles
( Derwich et al, 2010 b). D'autres terpènes
actifs comme des alcools, des aldéhydes et des esters puissent
contribuer à l'effet antimicrobien global des huiles essentielles
(Belletti et al, 2004 ; Derwich et al, 2010
b).
De plus, divers composants mineurs peuvent également
contribuer à l'activité antimicrobienne des huiles essentielles
impliquant une synergie avec les autres composés actifs (Mazari
et al, 2010).
Les résultats de l'aromatogramme sur milieu liquide de
l'HE ont montré une diminution prolongée de la densité
optique des suspensions bactériennes des germes testés ; cela ne
peut être dû qu'à une mort cellulaire, Ce qui nous conduit
à déduire que l'effet de l'HE sur les bactéries
testées est bactéricide. En effet les huiles essentielles peuvent
avoir : une activité létale (bactéricide) et une
inhibition de la croissance (bactériostatique). L'activité des
huiles essentielles est souvent assimilée à une activité
bactériostatique. Cependant des études ont montré que les
huiles essentielles peuvent avoir aussi des propriétés
bactéricides (Lambert et al, 2001).
De plus, si les résultats obtenus en milieu liquide
sont supérieurs à ceux obtenus en milieu solide, c'est que
surtout, en milieu liquide, l'évaporation des huiles essentielles est
nulle et donc ces huiles exercent leur activité de manière plus
efficace et plus prolongée.
Les tests en micro-atmosphère ont donné une
inhibition certaine, dans la mesure où on n'observe une inhibition qu'au
dessus des zones correspondantes à l'exposition aux vapeurs des huiles
essentielles.
Pour les composés phénoliques de
J.phoenicea, les résultats obtenus n'ont indiqué aucune
zone d'inhibition, donc aucune activité antimicrobienne vis a vis des
cinq souches utilisées, que ça soit les souches
bactériennes ou Aspergillus flavus, et ceci contrairement aux
résultats obtenus dans d'autres études (Hayouni et
al, 2007).
Nos extraits phénoliques ne sont pas actifs sur aucune
des différentes souches testées, cela peut être dû
à la méthode ou le solvant utilisé pour l'extraction. En
effet Hayouni et al (2007) ont montré que la
méthode d'extraction et la nature du solvant peuvent influencer sur
l'activité antibactérienne des composés phénoliques
de J.phoenicea. La sensibilité des germes utilisés aux
extraits phénoliques peut aussi être dû au fait que
J.phoenicea utilisée durant notre étude contient peu de
composés phénoliques qui peuvent exhiber une activité
antimicrobienne.
Les résultats montrent que l'activité
antimicrobienne du genévrier est un fait confirmé. Dans le cas de
notre échantillon cette activité semble véhiculée
uniquement par les huiles essentielles. Nos résultats montrent que cette
activité reste efficace sur les germes sensibles quel que soit le mode
d'administration : liquide, solide ou gazeux (vapeurs).
De plus les germes testés positifs justifient l'usage
populaire de cette plante et confirme son activité thérapeutique
anti-diarrhéique: S.aureus, E.coli et Bacillus sont des germes
très souvent impliqués dans les toxi-infections alimentaires.
Nous regrettons beaucoup que des problèmes de contaminations nous aient
empêchées de tester ces huiles sur une star des intoxications
alimentaires : Salmonella.
Nous terminerons en mentionnant une extraction
effectuée avec un échantillon identique à tous ceux qui
ont été utilisés dans cette étude et dont l'huile
essentielle s'est pourtant montrée totalement inactive sur toutes les
souches testées.
Ceci souligne le défaut majeur qui est toujours
reproché aux plantes médicinales : un manque de stabilité
des principes actifs.
Cette instabilité a des origines multiples:
- caractéristiques régionales et variétales
(Melani et al, 2006 ; Adams ,2002) ; - période
de la récolte/cueillette ;
- notions de chemotype (Mazur et al, 2003)
;
- manipulations et /ou prétraitements ;
- mode de conservation&.etc.
Malgré toutes ces réserves le potentiel
thérapeutique des plantes est indiscutable et si elles ont beaucoup de
mal à s'imposer comme véritable alternative pour la
pharmaco-synthèse c'est uniquement pour des raisons
politico-économiques.
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