ARKOUN Mohamed, essais sur la pensée
islamique, Maisonneuve et Larose, Paris, 1984, 351p.
Mohammed Arkoun (1928-2010) est un philosophe et historien de
l'islam, il enseigna l'histoire de la pensée islamique à
l'université Paris III.
Mr Arkoun insiste sur le concept d' « islamologie
appliqué » comme une nouvelle forme de la pensée
islamique. Le livre regroupe une dizaine d'essais publics de l'auteur dans
diverses revues.
Cette « nouvelle pensée » adopte
une attitude critique vis-à-vis de la tradition et de la
modernité en même temps; elle intègre les traditions
culturelles minoritaires; enfin et cela par une « adoption et
adaptation, au cas de l'Islam, de tous les moyens d'investigation scientifique
».
L'auteur prône la démythologisation et une
désidéologisation de la pensée religieuse en Islam,
« une libération des formulations dogmatiques, "orthodoxes",
sectaires, accumulées par les divers groupes socio-culturels au cours de
treize siècles ». Et cela par le fait « de montrer
les limites, les défaillances d'une pensée qui prétend
designer le véritable Islam ».
Dans cette logique, l'auteur analyse l'attitude de l'islam
vis-à-vis du « culte des objets », ainsi dans la
tradition musulman l'immortalité est accordé exclusivement au
divin, et nul objets ou personne ne peut prétendre à ce
privilège, ainsi tous les objets sont voué à la finitude
et ne mérite pas la vénération, d'un autre coté
insiste sur l'aspect immatériel avec « l'essence des objets
» et la transmission des savoirs et des traditions. Cette
démarche se situe à porte à faux de la notion de
« patrimoine matériel », qui peut être
assimilé à une manifestation de la vénération des
objets.
Mais cela n'empêche pas le développement de
traditions de conservation d'objets matériels, comme les
mosquées, les tombeaux des saints patrons, et même des objets
ayant appartenus au prophète Mohamed (s.a.w.s) et son
entourage. Ces objets sont considérés comme la
propriété de tous les musulmans et accède au statut de
« Habous » qui les rend inaliénable et impose
à la communauté de les entretenir.
CORMIER Christelle Proulx, La Conversion D'églises
Pour Des Usages Artistiques Et Culturel, Communication présentée
lors de la 6e édition du Colloque de la relève :
Réalités et transformations des milieux urbains, mai 2009,
Montréal.
Christelle Proulx Cormier a complété une
maîtrise en études urbaines à l'Université du
Québec à Montréal et diplômée du programme de
baccalauréat en design de l'environnement. Elle s'intéresse
à la requalification des espaces et des objets architecturaux en milieu
urbain dans une optique de développement durable et de façon plus
particulière, à la conciliation entre patrimoine et interventions
contemporaines.
Elle s'intéresse également au rôle des
artistes en ville comme facteur de régénération des
milieux urbains. Sous la direction de M. Luc Noppen, sa recherche menée
dans le cadre de son programme de maîtrise se penche sur le potentiel de
conversion des églises en milieu urbain en espace de création et
de diffusion artistique et sur la conciliation des symboliques religieuses et
artistiques dans ces lieux.114
114 Chaire de recherche du Canada en patrimoine urbain,
http://www.patrimoine.uqam.ca.
Dans son analyse des opérations de conversion
d'églises au Québec, l'auteur insiste sur « la valeur
d'urbanité » de ces lieux de culte, définie comme
« la combinaison des vocations sacrées et profanes »
, ainsi la conversion de ces espaces en des lieux de création artistique
implique une réflexion sur la substitution de nouvelles fonctions
à celles qu'assurait l'édifice auparavant, et cela en prenant en
compte sa nature et son usage premier, ainsi « Habiter le patrimoine,
c'est donc construire une relation durable avec le temps, adopter un mode de
vie qui se nourrit d'une relation privilégiée avec le
passé ».
En plus de l'aspect architectural et la
spécificité de l'espace, la symbolique religieuse d'un lieu de
culte est un élément majeur à prendre en compte lors de sa
conversion, ainsi on peut définir l'opération de conversion comme
une « Nouvelle couche significative qui est donnée à
l'église~qui se superpose aux significations déjà
existantes. Ceci permet de comprendre la dualité entre la symbolique
religieuse (couche actuelle de sens) et la symbolique artistique (nouvelle
couche de sens) qui doivent être conciliées dans la future
conversion d'un bâtiment ». Il faut néanmoins que la
population prend part à ses actes de conversions, pour une meilleur
acceptation du projet, par rapport à ça, l'auteur constate que la
transition d'un usage religieux à un usage purement culturel et
artistique du lieu est « généralement bien accueillis
par la population résidante », tout en concédant que la
réversibilité de ces actions constitue un critère dans
décision de la population.
On constate que l'affectation de ce nouvel usage participe
à « la conservation de la vocation sociale et
communautaire» de l'ancien lieu de culte.
BURESI Pascal, « Les conversions d'églises et
de mosquées en Espagne aux XIe XIIIe siècles », Dans :
Religion et société urbaine au moyen âge, Publications de
la Sorbonne, Paris, 2000.
Pascal BURESI est un historien arabisant et hispanisant, il
enseigne au département des études arabes et
hébraïques, à l'Université Paris IV Sorbonne et
à l'Ecole Pratique des Hautes Études115.
Suite à la reconquete, la disparition des
mosquées de la péninsule ibérique s'est faite avec
en
deux étapes : « la première, au moment de la
conquête, voit la réutilisation d'un certain
115 Source :
http://www.iesr.ephe.sorbonne.fr/index4352.html.
nombre de mosquées transformées en
églises ou en cathédrales ; la seconde, après quelques
dizaines d'années, se traduit par la destruction de ces édifices
et par l'érection de nouveaux bâtiments ». Les
premières opérations de conversion des mosquées en les
purifiants interviennent juste après l'occupation des villes, et
après une dizaine d'années on procède à la
transformation totales des mosquées -- du point de vue architectural-,
voir même à quelques opération de
destruction-reconstruction. Le choix de garder, modifier ou détruire un
lieu de culte traduit « un rapport de force entre différentes
communautés », ainsi ces conversions de mosquées sont
des actes de pouvoir qui font partie de l'idéologie de la
reconquête, de ce fait les textes racontant ces évènements
sont souvent des récits engagés qu'il faut prendre avec
précaution.
Ainsi la conversion des lieux de culte en Espagne du
XIème au XVème siècle est marquée par quatre
étapes, et cela suivant les victoires militaires qui procédaient
à chaque fois à la conversion-reconversion de ces
mosquées-églises.
Dans le culte chrétien les rites de conversion sont
ceux de la consécration de l'église avec dans un premier temps
« la purification par aspersion d'eau sur le sol et les murs, la
conversion se manifeste par un certain nombre de modifications
mobilières ou décoratives », ainsi que par le
changement de l'orientation de la mosquée --de l'orientation
méridienne vers la Mecque à l'orientation orientale
chrétienne-, « du côté musulman ses rites sont
moins connu ».
Ainsi la conversion est perçue à
l'époque à la fois comme le but et la motivation de la guerre
« entreprise en vue de convertir un espace profane », ou de
récupérer des anciens lieux sacrées.
BARON Mathilde, Conversion des lieux de culte à
Tolède : le témoignage de l'historiographie, le
témoignage du bâti, Mémoire de maîtrise,
Université LYON 2- LUMIÈRE, 2003.
En utilisant les outils de l'archéologie et
historiographie, l'auteur analyse le processus de conversions des lieux de
culte dans la ville de Tolède, ainsi on peut parler de « deux
phases dans le processus de réalisation et de distinguer deux termes :
conversion et transformation », la conversion étant lié
au changement de la fonction de l'édifice sans transformations
architecturales majeurs, par contre la transformation implique une intervention
architecturale sur le bâtiment « en changent l'apparence et qui
permettent
d'harmoniser nature, fonction et forme de l'édifice
» afin de résoudre « la contradiction portée
par les pierres ».
A travers une analyse historique, l'auteur démontre
les raisons de la réutilisation de ces lieux de cultes au lieu de leurs
destructions par le symbolisme de l'acte de conversion et le lien avec la
victoire et la reconquête et par le fait que la reconquête s'est
faite progressivement, d'où la mobilisation de toutes les ressources
pour la poursuite de la conquête vers le sud. Les Almoravides ont eu le
même comportement lors de la reconquête de villes comme Valence et
Talavera. .ce qui constitue un autre enjeu de cette guerre qu'ai la
récupération et la réutilisation des bâtiments.
La conversion commence avec le retrait des objets liés
à l'ancien culte, ainsi dans un premier temps minbar, mihrab, tapis et
corans sont retiré des mosquées, la conversion est
complétée après par les « rituels de purification
et de consécration » qui sont les mêmes « que
pour l'inauguration d'un temple construit ex nihilo » ses rituels
s'achève par la célébration d'une messe solennelle qui
marque la conversion de la mosquée en église.
Après cette transformations spirituelle du lieu, des
aménagements sont réalisés pour adapté
l'édifice à sa nouvelle fonction, avec un changement de
l'orientation de l'édifice, l'introduction de l'iconographie et la
transformation du minaret en clocher ainsi « La superposition des
fonctions facilite la transformation immédiate ».
La conversion des lieux de cultes à Tolède suit
en premier lieu des considérations pratiques, puisque les
mosquées constituées le coeur des villes et ne pouvait être
effacés hâtivement du paysage urbain, ainsi la transformation et
la substitution de ces édifices sur le long terme a été
préconisée. Et cela parallèlement au côté
symbolique que revêtit ces opérations en procédant à
la purification de ces lieux de culte et par extension des cités.