Section II : FONDEMENT ET ETENDUE DE L'IMMUNITE DE
JURIDICTION
Comme le titre le précise, il sera question, dans cette
section, d'aborder, tour à tour, les notions de fondement et de
l'étendue de l'immunité de juridiction.
§.1. Fondement de l'immunité de juridiction
Connaître la raison d'être de l'immunité de
juridiction a soulevé plusieurs interrogations et discussions en
doctrine.
Plusieurs théories one été
avancées mais de toutes, une semble l'emporter. Il s'agit de la
théorie de l'intérêt de la fonction.
Au côté de celle-là, une autre lève
la tête ; celle de l'extraterritorialité. L'analyse de cette
dernière constituera le point premier de ce paragraphe et celle de la
première le second point.
A. Théorie de l'extraterritorialité
Prenant en compte l'idée ou l'allégation que
tout ce qui est sur le territoire doit être soumis à
l'autorité de l'Etat et que tout ce qui est en dehors du territoire doit
lui échapper ou lui être soustrait, les anciens auteurs, dont
GROTIUS, considéré comme le père du droit international,
ont prétendu fonder les immunités diplomatiques dans la fiction
de l'extraterritorialité.
Ils en concluaient que les personnes vivant sur le territoire
d'un Etat et exemptées de son autorité sont traitées comme
étant hors de ce territoire.30(*)
Les agents diplomatiques sont, pour ce faire, supposés
rester chez eux.
Même s'ils sont physiquement sur le territoire de l'Etat
d'accueil ; juridiquement ils n'y sont pas.
Toute fois, cette théorie fut battue en brèche
car son application aboutissait à des résultats
insoutenables.31(*)
Selon cette théorie, on considère en enfant
né, par exemple à l'ambassade des Etats-Unis en République
démocratique du Congo comme né aux Etats-Unis.
Nous estimons que ce n'est pas parce qu'il est censé
demeurer hors du pays où il réside que l'agent diplomatique est
exempté mais parce que, par contre il est, par la nature de ses
fonctions, indépendant de l'autorité du pays hôte.
Qu'en est-il alors de ceux qui soutiennent la théorie
de l'intérêt de la fonction ou l'intérêt
fonctionnel?
B. Théorie de l'intérêt de la
fonction
Selon cette théorie, l'immunité de juridiction
trouve son fondement dans les nécessités de la fonction.
Cette assertion fut consacrée par la Convention de
Vienne de 1961 dans son préambule : « Convaincus que
but des dits privilèges et immunités est non pas d'avantager les
individus mais d'assurer l'accomplissement efficace des fonctions des missions
diplomatiques en tant que représentants des Etats ».32(*)
Il importe de souligner que forcément tous les
privilèges accordés à cette catégorie des personnes
ne sont pas nécessaires à leurs fonctions.
C'est ici que la coutume, la courtoisie ou la
réciprocité entre les Etats interviennent.
Les fonctionnaires internationaux, on ne le dira jamais assez
que, jouissent de cette immunité pour les actes accomplis dans le cadre
de leurs fonctions.
Cela ressort très clairement de la section 20 de la
Convention de Vienne de 1961 évoquée précédemment
qui veut que : « les privilèges et immunités
soient accordés aux fonctionnaires uniquement dans
l'intérêt des Nations Unies et nos à leurs avantage
personnel ».
Les privilèges et immunités des fonctionnaires
internationaux et agents internationaux ne visent pas à procurer
à leurs bénéficiaires des avantages qui sont
généralement refusés au commun des mortels. Les
fonctionnaires internationaux et agents internationaux sont, comme toute
personne sur le territoire de l'Etat, soumises aux lois de celui-ci.
Leurs privilèges et immunités s'inscrivent
plutôt dans le cadre général de la protection
accordée aux organisations.
Dans la mesure où les fonctionnaires et agents
internationaux sont le moteur de l'organisation internationale, il importe de
protéger celle-ci contre tout ce qui pourrait en gripper le
mécanisme. Concrètement, l'objet des privilèges et
immunités de juridiction est donc :
- de protéger l'organisation contre les actions
intempestives des Etats susceptibles d'entraver ses activités et la
réalisation de ses objectifs et
- protéger l'agent contre les pressions dont il
pourrait être l'objet de la part de son Etat d'origine ou de l'Etat de
séjour et à travers lui, préserver l'indépendance
de l'organisation internationale.
Quelles sont alors les raisons d'être de cette
immunité dégagée ? Que contient-elle alors ? A
quels actes s'étend-elle ?
Il s'agira des notions qui feront objet du prochain
développement.
* 30 L. CAVARE, Le Droit
international public positif, T.II, Paris, Pédone, 1962, p.24.
* 31 Y. LOUSSOUARN et P.
BOUREL, Droit international privé, Paris, Dalloz, 1996, p.528.
* 32 Préambule de la
Convention de Vienne de 1961 sur les relations diplomatiques disponible sur
http://www.admin.ch/ch/f/rs/0_191_02/index.html
et sur
http://perspective.usherbrooke.ca/bilan/servlet/BMDictionnaire?iddictionnaire=1573
consultés ce 24 décembre 2009 à 12h54
|