SECTION 3 : GROUPES ARMES ET LEUR MOYENS D'ACTION
§1 : CARTOGRAPHIE DES GROUPES ARMES
Les groupes armés ont un caractère
nomade à partir de leurs techniques et mode d'action. Etant donné
que ce sont des acteurs considérés comme hors la loi et qui
agissent dans la clandestinité, leur localisation n'est pas toujours
statique, elle dépend de circonstance et ou des attaques,
etc.
Les groupes armés dans la sous-région
des Grands Lacs datent depuis après les indépendances et à
cette époque, ils étaient moins nomades par rapport à ces
deux dernières décennies. Cela pourrait s'expliquer par deux
facteurs dont : la position stratégique qu'occupaient ces groupes et qui
serait un défi pour le régime en place de les démanteler,
comme c'est le cas du Parti révolutionnaire du peuple (PRP) dans le Nord
du Shaba et dans le Sud-Kivu et de la faiblesse des régimes d'une
part.
1 ADAPAE, Arche d'Alliance & Rio, Au-delà
des « Groupes armés » : conflits locaux et connexion
sousrégionales, exemple de Fizi et Uvira (Sud-Kivu, RDC), 2010, life
& Peace institutes, p 7.
En effet, la joint venture militaire de l'Ouganda et
le Rwanda sous le label de l'Alliance des Forces Démocratique pour la
Libération du Congo (AFDL) mené à partir de 1996 pour
détruire la menace des Ex-FAR et interhamwe, mais aussi de rebelles
Ougandais de la National army for the libration of Uganda (NALU) et des Allied
democratic force (ADF). Pour le Rwanda, le démantèlement de ces
rebelles basés en RDC est nécessaire pour sa
sécurité, mais aussi pour celle des Tutsi Congolais dont certains
ont aidé le FPR à prendre le pouvoir. Cette coalition de 1996 a
occasionné la résurgence des groupes armés dans la sous
région mais aussi a permis à ces Etats comme le Rwanda, l'Ouganda
et le Burundi de profiter de l'opportunité à mettre en
débandade les bases arrière des groupes armés. De ce fait,
une dynamique s'est observée dans les actions de groupes armés
que dans leur comportement. Ils étaient contraints de se déplacer
d'un territoire à un autre, d'un village à l'autre voir
même d'un pays à un autre comme c'est le cas de la LRA qui
opère en Ouganda, en RDC et au sud Soudan.
J.M Balancie a démontré les acteurs
armés et non armés qui existaient dans les années
19961 dans la sous-région des Grands Lacs. Alors que le FPR
venait de conquérir le pouvoir à Kigali, un grand nombre de
rwandais s'était déversé dans la sous région.
Plusieurs catégories d'hommes dont les Ex-FAR, les hommes tenant
différentes idéologies dont les modérés et les
extrémistes composaient cette masse.
Cette catégorisation a permis à des
formations des groupes d'obédiences extrémistes avec de tendances
à se venger.
Ces derniers ont parvenu à former dans de camps
de sorte de milices avec pour finalité de reconquérir le pouvoir
au Rwanda leurs actions se limitaient à des attaques de certains
préfectures Rwandaises proches des frontière et de leur
camps.
En effet, l'analyse de groupes armés d'origine
rwandaise a une particularité de celle des autres pays de la
région. Par sa méthode d'attaque préventive à
l'encontre des Ex-FAR et interhamwe, qui lui a
1 J-M Balancie et A. De la Grange, Op. cit,
pp 325-407, 485-492
épargné une menace directe de bandes
armées au sein de son territoire mais plutôt en dehors de ses
frontières.
Dès 1996, une recomposition de la
sous-région occasionnée par des guerres a été
observée et causant : la destruction des camps des réfugies et
entraîna le déplacement de ses occupants au fin fond de montagnes
des Kivu et dans les forêts congolaises, une forte prolifération
de milices (groupes armés) dans la région liée à la
« fragilité » des régimes politiques et la
porosité d'armes à feu, ainsi que la circulation des troupes
armés étrangères sans tenir compte des frontières
et de principe du respect de la souveraineté et de non
ingérence.
La formation des groupes Rwandais sur le sol congolais
est restée incertaine jusqu'à ce que les Forces
Démocratiques pour la Libération du Rwanda (FDLR) en sigle
apparaissent et remplace l'ALIR.
En tant que mouvement armé, les FDLR sont d'une
création relativement récente, en 2003 dans la ville congolaise
Lubumbashi. Il est fortement enraciné dans les différentes
structures crées au sein et par les réfugiés et
combattants rwandais ayant fuit le pays après le génocide de
1994. Le leadership des FDLR reste encore dominé par les anciens chefs
militaires de l'armée rwandaise ainsi que par des hommes politiques du
régime qui ont dirigé le Rwanda avant et durant ce
génocide. Cependant, les FDLR ont réussi également
à intégrer plusieurs éléments notamment des jeunes
recrutés au sein de la communauté des réfugiés en
RDC et qui n'ont jamais été impliqués personnellement dans
le génocide.
Le mouvement entend renverser le gouvernement rwandais
et prétend promouvoir une plus grande démocratie au Rwanda.
Toutefois, son discours interne s'appuis sur des considérations
extrémistes et ethniques. En outre, plusieurs responsables des FDLR
utilisent le mouvement pour se protéger. Ceci concerne
spécifiquement ceux directement impliqués en tant que
commanditaires ou auteurs du génocide de 1994. Ce groupe armé
sévit dans les provinces du Nord et Sud-Kivu de la RDC, où on
retrouve un grand nombre de ses combattants et de ses
activités1
1 Hans Romkema, Op Cit, p 8
Outre les FDLR, il s'est constitué de mouvement
d'obédience modérée, qui n'ont pas des idéologies
extrémistes ils avaient pour but d'engager de pourparler avec le
régime en place pour une rentrée pacifique de
réfugié rwandais ils se sont constitués au lendemain de la
traversée de réfugiés. A ce titre, nous avons1
:
- le Mouvement pour la réconciliation nationale
au Rwanda crée en Août 1994
- Rassemblement pour le retour de la démocratie
au Rwanda (RDR) crée le 3 avril 1995 à Goma. En 1996 il constitue
un principal mouvement de la nouvelle opposition hutu. Il est dirigé par
d'anciennes personnalités modérées de moyenne envergure du
régime Habyarimana. Les principaux dirigeants sont installés en
Europe, l'appareil administratif du mouvement est implanté au
kenya.
- Rwanda pour tous : ce petit mouvement de taille
groupusculaire regroupait qu'une trentaine de personnalité de l'ancienne
opposition modéré ayant survécue aux massacrés du
printemps 1994 et déçues par le FPR. Ses principaux responsables
sont : Dismas Nsengiyamenye et James Gasana
- Force de résistance pour la Démocratie
(FRD)
Mouvement crée en mars 1996 en Belgique. Ses
principaux fondateurs sont deux « déçus » de FPR :
Faustin Twagiramungu et Seth Sendashongo (ancien membre hutu du FPR «
rébellion »). Ces deux anciens responsables gouvernementaux
très critiques envers la dérive autoritaire du FPR, les deux
leaders militent en faveur d'un Rwanda ouvert à tous sans
considération ethnique
- Palir : peuple en armes pour libérer le
Rwanda
C'est le dernier venu sur la scène hutu, ce
groupuscule mystérieux a fait parler de lui pour la première fois
le 1er Juin 1996 et annonçant la création d'un «
front intérieur » armé « au Rwanda destiné
à lutter
1 J.M. Balancier & A. de la Grange, Op
Cit, p 366-368
contre » l'occupation FPR le mouvement Serait
basé à Cyangugu et dirigé par un individu surnommé
commandant Muhinza1.
Outre ces mouvements rwandais, du coté
burundais, les mouvements considérés comme d'apposition, et en
plus liées aux ethnies, possédaient chacun d'une branche
armée.
A ce titre J.M Balancie a dénombré
plusieurs mouvements agissant dans une dimension plus régionale que
nationale2
- CNDD : Conseil National pour la Défense de la
Démocratie il avait comme branche militaire les FDD (Force pour la
Défense de la Démocratie) il est le mouvement venu dès les
dernières ères sur la scène burundaise, mais marqué
par une pleine ascension. c'est l'actuel parti au pouvoir après une
longue lutte et négociation entre le gouvernement en place. Ils
succèdent au gouvernement de transition établi par les accords
d'Arusha.
Le mouvement fut crée au début de 1994
par Léonard Nyangoma, alors membre influent du Frodebu et surtout
ministre de l'intérieur du président Ndadaye. Il décide de
suivre un destin personnel au début de 1994, en rompant avec le parti
hutu modéré au lendemain des événements de 1993. Il
refuse d'entériner les importantes concessions acceptées par les
responsables gouvernementaux hutu en faveur de l'opposition tutsi qui cherche
insidieusement à reconquérir le pouvoir.
Son bras armé, les forces pour la
défense de la Démocratie dont les combattant surnommés
« intagebekas »sont commandés par le colonel Ntanyungu. Son
quartier général se trouvait dans la ville Zaïroise d'Uvira.
Cette composante militaire opère principalement à partir du kivu
où sont implantés des camps de réfugiés, qui lui
servent de base arrière et de viviers de recrutement. Ce mouvement
bénéficie du soutien du régime de Kinshasa d'autant plus
que son chef Nyangoma circulait au Zaïre en toute liberté
malgré le mandat d'arrêt international lancé par le
gouvernement burundais.
Palipehutu (parti pour la libération du
peuple)
1 J-M Balancie & A. De la Grange, Op.
Cit. p368
2 Idem, pp 380-386
Il a comme branche armée les Forces Nationales
de Libération FNL en sigle. C'est le plus ancien mouvement de lutte
armée Hutu, il a été fondé en 1980 dans le camp de
réfugié de Mishamo en Tanzanie par Remy Gahutu.
Ce mouvement dénonce le monothélisme
prévalant au sein de l'armée et la discrimination frappant les
hutu à l'école dans la fonction publique et dans nombre de
situation de la vie quotidienne.
Ce mouvement à commence ses raids, contre le
régime en place, à partir des camps de réfugiés
situés au Rwanda et en Tanzanie.
Il apparaît actuellement comme principal partie
de lutte, armée après la prise du pouvoir par le CNDD.
Malgré différents processus de réconciliation et
d'intégration du mouvement dans la gestion du pays, celui-ci
n'aboutissant pas et ce mouvement à toujours tendance de garde cette
branche armé pour servir de fil de sécurité comme l'a
démontré les récentes élections qui ont
amené le président Peter Nkurunziza a brigué un
deuxième mandat devant le désistement et le retour au maquis des
leaders de l'opposition
Ubumwe
Il a comme branche armée le Front de
libération national FROLINA en sigle. C'est une formation
extrémiste apparue vers la fin des années 1980 par clément
Nderayabandi.
Ces membres et combattans ont été
recrutés dans le camp de réfugiés en Tanzanie. Le FROLINA
et les FDD collaborent sur le terrain d'autant plus facilement que leurs bases
arrière et leurs zones d'opération sont complémentaires.
Les bandes FROLINA interviennent dans le sud et l'est du pays.
A ces trois mouvements considérer comme hutu
malgré la faible représentation de tutsi s'ajoutent, d'autres
mouvements d'extrémistes tutsi qui constituent une nébuleuse
centrée autour de quelques personnalité phares, telles que
l'ancien président Jean-Baptiste Bagaza ou le politicien Mathias
Hitimana. Ils disposent d'importants réseaux d'influence au sein de
l'armée, de l'administration et rejettent le processus
démocratique initié sous le régime
Buyoya et remettant en cause la légitime du président
Ntibantuganya.
Ce « système Bagaza » se composait
d'une façade politique dont le PARENA (Parti pour le redressement
national) fondé en 1994. Ce parti est très influent au sein des
jeunes officiers et des jeunes cadres tutsi, inquiets pour leur avenir en cas
de main mise hutu sur le pouvoir. Il possédait un bras armés dont
la solidarité jeune pour la défense de minorité JOJEDEM en
sigle dirigé par l'abbé Déogratias Niyanzimana. Ce
système encadrait également financièrement des milices
telles que les « sans défaite » et « sans échec
» dans le but de coordonner leurs actions avec la JOJEDEM.
Outre ces mouvements, il existant d'autres petites
formations composées des tutsis partisans des positions
extrémistes :
- le Parti pour la réconciliation du peuple (PRP)
l'ancien parti monarchiste, dirigé par de racistes de haute volée
;
- le Raddés (Rassemblement pour la
démocratie et le développement économique et
social)
- l'Inkizo (le bouclier)
- l'Abasa (alliance burundo-africain pour le
salut)
- l'Annada (Alliance nationale pour le droit et le
développement) - le PSD (Parti Social
Démocrate)
Ces formations possédaient ou pas de bras
armés ou du moins elles Sont caractérisées par
l'éthnicisme et qui les incitait à soutenir d'une manière
ou d'une les milices actifs des autres mouvements.
Le contexte actuel de la région est
différent des années antérieures. Pour certains, leur
revendications étant prises en compte, il n'y a aucun
intérêt de continuer la lutte mais cela n'assure pas souvent le
désengagement du groupe plutôt on pourrait assister à une
duplication ; d'un coté le groupe intègre le processus de paix et
de l'autre qui se forme et reste dans la logique de combat profitant de la
faiblesse des Etats de la région.
Pour le Burundi après les négociations
qui ont abouti à l'accord d'Arusha en 2003 la situation s'est
montrée promettant partant du processus électoral sur l'assise du
régime transitoire et l'installation du 2e gouvernement élu.
Toutefois, les menaces sont jusqu'aujourd'hui d'actualité étant
donné que nombreux partis formés au Burundi sont issus des
fractions armés et déstabilisent quelque fois les institutions
mise en place.
De sa part le Rwanda demeure avec les FDLR. Cependant,
cette menace existe toujours malgré que ces mouvements oeuvrent en
dehors de ses frontières.
En RDC, plusieurs groupes se sont formés avec
une faible intensité de coloration ethnique, omis le district d'Ituri,
par rapport des autres pays sous analyse.
- Les groupes de libération nationale
:
Ces différents groupes se situent depuis lors
de la libération du Zaïre par la coalition de troupes de l'AFDL
avec celles de l'armée rwandaise, ougandaise et burundaise.
En effet, cette coalition qui a mené L.D. Kabila
au pouvoir a mis sur le devant de la scène le mouvement AFDL. Ce dernier
va donc avoir très rapidement pour objectif, poussé par le Rwanda
et l'Ouganda, la prise du pouvoir à Kinshasa. Pari réussi. Une
fois au pouvoir, Kabila trahit un accord secret signé en 1996 avec le
Rwanda et l'Ouganda, qui prévoyait une cession du Kivu à ces deux
pays. L'Ouganda et le Rwanda ne tardent pas intervenir et tentent en 1998 ce
qui aurait du être un démantèlement de l'AFDL dans
Kinshasa. L'échec est total car Kabila a su mobilisé ses
alliés contre cette intervention aéroportée.
Ainsi cette intervention du Rwanda et Ouganda aura
comme conséquence la création des mouvements de libération
congolais inféodés à ces deux pays.
Le premier mouvement fut le RCD (Rassemblement des
congolais pour la démocratie) soutenu à la fois par le Rwanda et
l'Ouganda. Mais ce
mouvement est fragilisé par diverses tensions
(Tutsi / non Tutsis ; rivalité parmi les Tutsis ; ex-mobutistes /
ex-cadres de l'AFDL) qui provoquent sa scission et la naissance de deux
mouvements issus de cette implosion : le RCD-Goma d'un côté,
inféodé au Rwanda et à la tête duquel se
trouve
Ilunga, et le RCD-ML de l'autre, dirigé par Wamba
dia Wamba et soutenu par l'Ouganda. A côté de ces deux mouvements
actifs dans l'Est de la RDC se crée en novembre 1998 un mouvement de
libération du Congo (MLC) dirigé par J-P Bemba, actif dans le
nord du pays. Ce mouvement bénéficie du soutien de
l'Ouganda.
Ces grands mouvements armés prirent fin avec la
transition de 2003 qui prévoyait le partage du pouvoir entre les
protagonistes et le retrait de troupes armées étrangères
alliées à ces mouvements.
Cependant, d'autres mouvements se sont crées
dans le district de l'Ituri qui presque tous étaient soutenus par
Ouganda, d'autre dans le nord et Sud-Kivu soutenu par le Rwanda. A ce titre
nous pouvons citer : l'union de patriote congolais (UPC) ; le Parti pour
l'Unité et la Sauvegarde de l'Intégrité du Congo (PUSIC),
les Forces Populaires pour la Démocratie au Congo (FPDC), le Front
Nationaliste et Intégratif (FNI), la Force de Résistance
Patriotique en Ituri (FRPI), etc.
En dehors de ces mouvements situés dans la
province orientale un autre groupe s'est formé dans le Nord-kivu dont le
CNDP du Général dissident Laurent NKUNDA qui se partagent le
territoire avec le gouvernement, le mai-mai.
Mais aussi la RDC est toujours affectés par les
actions des groupes armés étrangère qui oeuvrent toujours
sur son territoire tels que les FDLR qui sont situés dans les montagnes
du nord et Sud-Kivu ; la LRA les ADF/NALU qui oeuvrent dans la province
orientale.
Toutefois nombreux de ces groupes ne sont pas
d'actualité, néanmoins les groupes Maï-Maï persistent
toujours et tant d'autre tels que le FRF dans le Minembwe, les
FDLR.
La RD.Congo compte sur son territoire d'autres
mouvements armés étrangers dont la LRA et la coalition
ADF/NALU. Ces deux mouvements
oeuvrent dans les provinces du Nord et Nord Est de
l'Ouganda et dans les zones montagneuses de Ruwenzori.
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