SECTION II : LES CRISES DE LEADERSHIP
Le pouvoir, le prestige, la légitimation font partie
des objectifs poursuivis par les institutions internationales. Il va de soi que
des guéguerres naissent entre elles, alimentées par un
militantisme politiques souvent affiché.
§1-Les rivalités entre institutions
Les conventions universelles conclues sous la houlette des
Nations Unies ont des répondants régionaux ou
sous-régionaux. Au delà de la nécessité de
particulariser la norme universelle aux réalités continentales,
il y a que les OIG régionales y trouvent une opportunité pour
s'exprimer, voire pour contrecarrer le crédit porté aux
institutions universelles au profit d'une vision particulière dont elles
sont les promotrices. En fait, ces normes voulues forcement régionales,
ne diffèrent pas
45 Conseil d'État français ; Rapport
d'activité 1991
46 RAF : Reformes Agraires et Foncières
47 Politiques Commune Environnementale (PEC) 2008
(CEDEAO) ; Politiques Commune d'Amélioration de
l'Environnement (PCAE) 2007 (UEMOA)
beaucoup des principes universels, ce qui accentue davantage
la fragmentation du DIE (Convention de Bâle et Convention de Bamako).
Au niveau national, le manque de définition claire
d'une stratégie se traduit sur le terrain par une concurrence parfois
acerbe entre les divers intervenants. Chacun tente d'expérimenter son
approche et veut s'attribuer une certaine paternité des projets
environnementaux. Et pour légitimer leur vision, les institutions
internationales s'attèlent souvent à la recherche
effrénée de résultats rapides et quantifiables, oubliant
que l'environnement intègre aussi des résultats subjectifs et non
quantifiables (éducation environnementale), qui ne peuvent se produire
que dans le temps.
Toujours, dans la conquête de leadership, des
réseaux se constituent autour d'institutions leader (SPONG, CCEPA)
[48], exacerbant les antagonismes. Quelques fois ces réseaux
paient les frais des rebellions de leurs membres et finissent par se
désagréger à l'exemple du COPOD (Comité de Pilotage
des Organisations Non Gouvernementales sur la lutte contre la
Désertification). Institué pour converger les points de vue des
ONG dans la mise en oeuvre de la convention contre la désertification,
cet organe de coordination n'a pas survécu aux nombreuses querelles de
leadership auxquelles il a été confronté.
Les politiques aussi disposent d'une main mise sur les
institutions internationales.
§2-Le favoritisme politiques
Les leaders des OIG sont nommés par les organes
politiques des différents États parties. Dans le contexte
sous-régional, le Burkina joue souvent un rôle
prépondérant dans la nomination de ces fonctionnaires
internationaux. Il n'est alors pas surprenant que ces «
protégés du Burkina » nourrissent un sentiment
d'allégeance à l'égard des autorités
burkinabés et déploient des efforts pour la sauvegarde des
intérêts politiques de ces autorités. Cela évidement
déteindra sur l'autonomie et l'efficacité des OIG.
Les ONG non plus ne parviennent toujours pas à
s'émanciper de cette emprise politique. En effet leur connaissance du
terrain les place en première ligne pour alerter l'opinion sur des
réalités que les autorités préfèrent
ignorer. Face alors au gouvernement d'un pays pas très
démocratique comme le Burkina Faso, qui affiche de plus en plus une
volonté manifeste d'imposer leur musellement, les ONG sont alors
confronter au dilemme de la dénonciation : se taire pour rester ou
parler et risquer d'être expulsé ? Jusque là, la tendance
est qu'elles préfèrent être « well fed slaves
» [49], puisque les cas de dénonciation, en dépit
des nombreux constats sur le terrain (activité minières par
exemple), sont quasi inexistants. Aussi, à cause de la faiblesse des
moyens et de la concurrence sauvage des spécialistes du «
marketing du don », les ONG sont condamnées à se
rapprocher de l'État, voire à cautionner aveuglement l'action
politique.
48 SPONG : Secrétariat Permanent
des ONG / CCEPA : Cadre de Concertation des ONG et
associations du secteur de l'Eau Potable, l'hygiène et
l'Assainissement au Burkina Faso
49 Lucky Dube in « Taxman ». Expression
désignant les personnes qui
préfèrent garder le profil bas en contre partie de
quelques avantages
Le droit de l'environnement est victime de son succès.
Trop de normes sont édictées mais elles ne vont pas plus loin que
leur adoption. Le champ reste toujours ouvert à toutes les initiatives
d'où les incohérences.
En définitive, l'influence des institutions
internationales est limitée par la persistance de la souveraineté
étatique et l'effet cacophonique de leurs interventions.
Résultat, « l'obésité » est entrain de
gagner certains domaines du droit de l'environnement burkinabé (droit de
la désertification), pendant que d'autres parties du corps sont
émaciées (droit des déchets).
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