INTRODUCTION
Les institutions internationales sont à la fois
l'aboutissement et le cadre des relations inter étatiques. En effet,
l'histoire des institutions internationales commence avec celle de
l'État, même si quelques auteurs voient dans les amphictyonies de
la Grèce Antique les ancêtres des organes internationaux.
L'État, dans sa forme moderne, est apparu au Moyen Age. Dès lors,
une certaine hiérarchie s'est construite en Europe avec des
entités superposées. Au sommet se trouvait le Pape, ensuite
venaient l'Empereur, les Princes, les Ducs, les Barons et les Seigneurs. Mais
cette Société Médiévale, imparfaitement
institutionnalisée va tomber dans une situation de conflits
récurrents et, pour y mettre fin, seront consacrés le «
principe d'équilibre » et le « principe de non
intervention ». Au sortir de la Révolution Française de
1789 seront institués la Sainte Alliance, pour empêcher le retour
à la guerre, et le Concert Européens pour favoriser les
échanges commerciaux entre États de l'Europe. La
conséquence de cette ébauche d'organisation de la
société internationale est la création des
premières unions administratives à travers les commissions
fluviales considérées comme les prémices des institutions
spécialisées. Toutefois, la structuration de la
société internationale ne restera pas seulement une affaire inter
étatique. Les personnes privées vont également s'y lancer
pour suppléer l'action étatique, et ainsi donner naissance aux
premières ONG.
Mais qu'est ce qu'une institution internationale ?
Les institutions internationales peuvent être
définies comme les organisations, les traditions et les règles
fondamentales qui caractérisent la société
internationales. Parmi les organisations, il convient de mentionner les
États, les organisations internationales, les sociétés
transnationales, les Peuples et dans une moindre mesure les Individus. Quant
aux règles, il s'agit de celles qui s'imposent aux acteurs de la
société internationales au titre de conventions ou de coutumes.
Les institutions internationales stabilisent les rapports de force, consolident
les équilibres entre intérêts divergents et constituent le
cadre dans lequel se développent les relations internationales, en en
fixant les principes et en en déterminant les mécanismes. Elles
sont donc le lieu où les États, conscients de leurs insuffisances
intrinsèques, se mettent ensembles pour mieux s'attaquer à leurs
problèmes communs.
D'abord focalisées vers la recherche de la paix et de
la prospérité économique, la seconde moitié du
XXème siècle va marquer une nouvelle orientation des
relations entre les États. En effet dès 1960, les scientifiques
vont commencer à alerter avec insistance la communauté
internationale sur les dangers que l'activité humaine fait courir
à l'environnement. Cette nouvelle donne, dépassant le cadre des
compétences étatiques sera traitée sur la scène
internationale avec, bien entendu, le concours des institutions
internationales. Et, plus la menace scientifique se fait omniprésente,
plus les institutions internationales s'y intéressent. Les
préexistantes adjoignent cette problématique à leur
objectif initial, concomitamment de nouvelles se créent, se
spécialisant plus ou moins aux questions environnementales. On assistera
donc à la prolifération des institutions qui se réclament
défenseurs de l'environnement.
La problématique de l'environnement est assez
récente. Elle nécessite une approche spécifique et est
difficile à intégrer dans l'architecture internationale
classique. C'est ainsi que tout d'abord des institutions furent
créées pour prendre en charge un aspect sectoriel de la lutte,
telle la protection de certaines espèces menacées, pour lutter
contre la désertification ou les pollutions. Mais l'environnement est
une notion à multidimensionnelle. Cela aura donc pour conséquence
la multiplication des efforts internationaux pour couvrir chacune de ses
nouvelles facettes qui ne cessent de s'afficher. Cette nouvelle «
mode » [1] aura un retentissement régional. Les
continents et
1 L'environnement est une mode parce que chacun
s'y intéresse sans pour autant savoir les tenants et les
aboutissants de son acte
les sous-régions se dotent à leurs tours de
cadres restreints de coopérations pour s'occuper de leurs
problèmes spécifiques. Mieux, des instruments bilatéraux
sont institués, tous pour contribuer à l'assainissement de notre
très chère « Perle Bleue » [2].
Mais de façon générale, la prolifération des
institutions internationales en matière environnementale est la
résultante de la fragmentation du Droit International
Général et du développement du Droit International de
l'Environnement (DIE), qui s'est accompagnée de la création d'une
multitude de tribunaux judiciaires. Chacune des institutions
créées à vocation de promouvoir une rationalité qui
lui est propre, le plus souvent contribuant à exacerber ou à
tempérer l'opposition Droit International du Commerce vs. Droit
International de l'Environnement.
L'environnement a pris une place particulière dans
notre société ; les médias, les politiques, les citoyens,
chacun perçoit cet engouement que suscite ce que certains appellent
« la révolution verte ». La société
internationale a pris petit à petit conscience que c'est notre bien
commun à tous qui est en péril, et cela interroge à la
fois notre façon de vivre ensemble et notre engagement au quotidien.
Cette préoccupation doit donc être considérée comme
une réflexion sociétale nouvelle. Elle s'impose comme un fait
social majeur. La considération de notre environnement est essentielle
face aux problèmes globaux qu'engendre sa gestion dans notre
société contemporaine. Comme le rappelle un nombre important
d'acteurs internationaux, « l'humanité ne tiendra pas face au
problème écologique si on ne fait rien ». Dans un
contexte actuel de crise économique, il est important de rappeler que
l'écologie peut être le moyen de prendre en considération
et de développer un avenir plus respectueux de la nature qui l'entoure
en y intégrant des modes de productions et de consommation
différents. Cet engagement n'épargne aucune des multiples
facettes de l'environnement.
Une très grande diversité de
domaines concernés
La liste ci-après montre la diversité des
domaines abordés ainsi que des exemples de sujets traités par les
institutions environnementales. Leurs actions peuvent toucher en même
temps à divers domaines. On a :
-Agriculture : Agriculture Bio / Agriculture
raisonnée / OGM / Pesticides...
-Air : Pollution atmosphérique
industrielle ou ménagère...
-Bruit : Nuisances sonores pour l'homme ou pour
la faune...
-Déchets (Industriels et ménagers)
: Gestion des déchets chimiques ou autres / Recyclage des ordures
ménagères / Implantation des déchetteries...
-Eau : Pollution / Gestion de son accès
...
-Énergies : Énergies renouvelables
(Éoliennes, énergie solaire...)
-Protection des espèces animales et des
espèces végétales : Surveillance / Actions de
protection / Actions politiques...
-Préservation des milieux naturels /
Préservation du Patrimoine Culturel et Humain / Préservation des
sols / sous-sols : Création ou Gestion de Parcs ou
Réserves...
-Risques industriels : Pollutions industrielles
/ Centrale nucléaire / Implantation des déchetteries / Transports
routiers de produits chimiques ...
-Éducation à l'environnement / Information
: Sensibilisation auprès de différents publics...
-Culture scientifique / Technique / Information :
Études / Interlocuteur des pouvoirs publics...
-Tourisme équitable / durable : Promotion et
sensibilisation au commerce équitable (ex : Création et promotion
de label...)
-Commerce équitable : Promotion et
développement du commerce équitable / Labels...
-Santé : Pollutions / Alimentation Bio /
Maladies professionnelles (intoxications à l'amiante, au plomb, aux
pesticides...)...
2 Expression désignant la planète Terre
in « Aventure Planétaire » de BAYALA B. Parfait
-Aménagement urbain : Voitures en ville /
Dépenses énergétique liées à
l'éclairage urbain -Transports : Émissions de
Gaz à effet de serre...
En somme, les institutions environnementales remplissent un
nombre important de missions. Il est illusoire de prétendre en faire une
liste exhaustive, mais de manière globale on peut déjà
situer trois champs d'actions dominants :
- Comprendre, par la collecte, le traitement et
la diffusion de l'information environnementale ; - Agir sur
l'environnement, par des activités opérationnelles sur
le terrain ;
- Agir sur les parties prenantes, par la
conception de normes et la convergence des acteurs vers un même but.
Problématique
En résume, les institutions internationales ont pour
vocation de coaliser des entités, d'origine étatique, en vue de
l'atteinte d'un objectif précis. C'est le lieu où chacun
cède un morceau de sa souveraineté pour la résolution d'un
problème commun. Ainsi certaines institutions internationales finissent
par développer leurs propres compétences et se détacher de
la simple volonté de leurs composants, les États membres. Mieux,
elles parviennent parfois à impacter le comportement de ces derniers sur
le plan international que national. De nos jours, de nombreuses institutions
internationales, plus ou moins affranchies de l'hégémonie
étatique et, avec des degrés d'autorité divers, se sont
lancées dans cette lutte pour infléchir la souveraineté
étatique et amener les États à adopter des mesures plus
protectrices de l'environnement, voire à reconfigurer leur
législation nationale en matière d'environnement.
Dans le cas du Burkina Faso, quelle est la contribution des
institutions internationales, si plurielles, à l'érection d'un
droit de l'environnement efficace, effectif et efficient ?
Si la question se pose c'est que d'une part l'environnement
est actuellement l'un des défis majeurs de notre siècle suscitant
l'implication de plusieurs centaines d'acteurs internationaux à
l'assainissement de l'environnement du Burkina Faso ; et que d'autre part le
désert continue d'avancer, la diversité biologique s'appauvrit de
plus en plus, le tout soutenu par la récurrence des catastrophes
environnementaux avec en face une certaine nonchalance du droit
burkinabé à prendre en compte cette nouvelle
réalité sociale.
Méthodologie
Pour les besoins de la présente étude, nous
avons adopté la recherche documentaire portant d'une part sur le
dispositif juridique et institutionnel en vigueur en matière
environnementale et d'autre part, au niveau d'ouvrages portant sur le DIP
classique, le DIE, les institutions internationales...
Compte tenu de la complexité des questions
environnementales, l'approche systémique a été
privilégiée. La collecte d'information s'est faite
également par des interviews et des entretiens auprès de
personnes ressources, de personnel d'Organisations Non Gouvernementales (ONG),
d'Organisations Intergouvernementales (OIG), d'Administration publiques. Pour
ce faire, un questionnaire a été élaboré en
fonction des spécificités de chaque catégorie d'acteur,
une analyse des données s'en est suivie, s'appuyant sur les ouvrages,
les textes officiels et aussi les entretiens réalisés et les
NTIC. L'analyse des données a abouti à la confirmation des
hypothèses énoncées pour cette étude.
Mais cette étude ne s'est pas réalisée sans
difficultés, surtout qu'elle est pluridisciplinaire.
Difficultés
La première difficulté rencontrée lorsque
l'on cherche à étudier les institutions environnementales tient
à l'ambiguïté même de leur définition. Il est
difficile de définir précisément ce que l'on entend par le
terme « environnement » qui renferme à la fois
l'idée de «nature», «d'espace de
vie», voire de «mode de vie». Ainsi les
problèmes environnementaux débouchent sur la question du
développement qui est une notion multisectorielle et pluridisciplinaire
que l'étude n'a pue contourner.
La seconde difficulté tient à
l'accessibilité de la documentation. Nous avons pu constater combien
récentes sont les questions environnementales. Dans un pays sous
développé comme le Burkina Faso, la documentation y est
également sous développée. Elle concerne plus la guerre,
la politique ou l'économie.
Enfin les personnes ressources au niveau des institutions
représentées au Burkina et au niveau de l'Administration publique
ont été difficiles d'accès.
Objet de l'étude
L'intérêt de cette étude n'est pas tant de
montrer la quantité et la qualité de l'influence normative des
institutions internationales dans la rédaction de la législation
environnementale burkinabé, que d'éclairer ses vecteurs et les
conditions qui lui sont favorables. En un mot il s'agira de comprendre le
mécanisme de cette influence et ses limites. Cela contribuera à
optimiser l'apport des institutions internationales, si plurielles, à
l'édification d'un droit éco-responsable qui renforcera la lutte
contre les problèmes environnementaux qui sont de plus en plus nombreux
et menaçants au Burkina Faso. Cet objectif est pris en compte dans de
nombreux plans, programmes, stratégies et études tels que Agendas
21 [3] et le Rapport National sur le Développement Humain
2010 du PNUD [4] sur le Burkina Faso.
En sus de cet objectif, se juxtaposent des objectifs
spécifiques :
- élucider l'univers institutionnel de la
société internationale en matière d'environnement; -
comprendre les stratégies de pénétration dans le droit
national d'un État ;
- dégager la sensibilité étatique à
l'action de ces institutions internationales et
- recenser les limites de leur impact en vue d'une meilleure
efficacité.
Plan
Notre travail sera subdivisé en deux grandes parties.
Tout d'abord, nous explorerons le contenu de la pluralité des
institutions internationales, puis il sera question de leur impact sur le Droit
de l'Environnement burkinabé.
3 Agenda 21 : document adopté lors de la
conférence des Nations Unies sur l'Environnement à Rio de Janeiro
en juin 1992. Les Articles 37 et 38, traitent de l'efficacité des
institutions internationales dans leur élan pour le sauvetage
de la terre.
4 Rapport National sur le Développement Humain 2010 :
l'Environnement et le Développement Humain au Burkina Faso PNUD-BF
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