Chapitre 1 : partie théorique
Le langage humain est très différent du langage
animal : d'une part la communication humaine est symbolique et grammaticale,
d'autre part un humain peut apprendre différentes langues, même
à l'âge adulte. Cette capacité qu'a l'homme de parler
plusieurs langues fascine les chercheurs dans de nombreux domaines : les
sociolinguistes ont été les premiers à travailler dans ce
domaine, avec une approche sociale et culturelle du bilinguisme, à
travers l'étude des contacts de langue. Cette recherche sur cette
faculté à apprendre plusieurs langues s'est étendue dans
le domaine la didactique, c'est-à-dire l'enseignement des langues
étrangères pour l'adulte et plus généralement celui
de la linguistique.
Au début du siècle, des chercheurs en
acquisition, confrontés à une situation de bilinguisme
précoce se sont à leur tour penchés sur un
phénomène bien particulier du bilinguisme : le bilinguisme
précoce. L'acquisition du langage chez le bilingue c'est
développé, mais à moindre vitesse que l'enfant monolingue
et certains domaines en phonétique, prosodie, syntaxe, sémantique
restent encore inconnus.
Dans ce mémoire nous allons nous pencher sur le
problème de l'acquisition du genre, qui reste à ce jour,
très peu étudiée.
Pour réaliser cette étude, nous allons
travailler dans des domaines divers pour les relier à la
problématique du bilinguisme en acquisition : dans la première
partie, la psycholinguistique et la sociolinguistique nous servirons à
définir les différents types de bilinguisme qu'il existe. Dans la
seconde partie les neurosciences vont nous apporter des connaissances sur le
fonctionnement du cerveau, et sur le fonctionnement du cerveau bilingue, pour
expliquer cette facilité qu'a l'enfant, par rapport à un adulte,
à apprendre les langues.
Dans une troisième partie, nous rentrerons plus
particulièrement dans une étude du bilingue précoce, sur
son développement et son fonctionnement dans ses productions.
Cette partie servira à établir un tableau
théorique qui pose les bases de la partie expérimentale.
L'étude expérimentale se fait sur un enfant bilingue
français/anglais. Après avoir défini le type de
bilinguisme dans lequel il se place, nous entrerons dans une étude de
l'acquisition du genre chez cet enfant bilingue, étude qui servira
à valider ou pas l'hypothèse de départ.
Rimbaud Sophie L'acquisition du genre et le code mixing chez
le bilingue précoce 2009 1. 1. Différents types de
bilinguisme :
Dans le bilinguisme il existe des degrés d'acquisition
d'une ou plusieurs langues qui vont dépendre, entre autres, de
l'âge auquel l'enfant apprend les deux langues et du contexte
d'apprentissage (famille monolingue dans un pays étranger, famille
bilingue...), cette acquisition ne peut donc pas se généraliser
sous un seul terme et des sous-catégories doivent être
établies. En effet, cette définition du bilinguisme étant
trop littérale, le problème s'est posé de redéfinir
la problématique du bilinguisme. Ainsi la littérature
scientifique et populaire parle plutôt chez les enfants bilingues de
« type de bilinguisme » : par cette expression, les auteurs entendent
parler des différents stades d'acquisition où une
différence sera perceptible en ce qui concerne l'acquisition des deux
langues.
Les classements des types de bilinguismes sont nombreux et
dépendent souvent de l'angle d'approche théorique des chercheurs.
De plus, ces classifications contextuelles, c'est-à-dire en lien avec
l'environnement proche de l'enfant, seront à mettre en relation avec le
développement du cerveau : en effet, comme nous le verrons dans une
seconde partie1, c'est l'interaction avec le contexte qui
développera la structure mentale du langage, permettant d'expliquer les
différences marquantes au niveau de l'enfant que ce soit sur le plan
cognitif, développemental ou interactionnel.
De ce point de vue, il sera intéressant de
définir ces différents « types de bilinguisme », ainsi
que les critères dans la littérature scientifique, afin de les
confronter d'un point de vue critique. Ainsi nous pourrons en dégager
une problématique nouvelle qui sera celle de ce mémoire qui sera
traitée dans l'analyse du corpus. Au vue des difficultés
rencontrées, je prendrais position d'une façon argumentée
afin de donner un point de vue différent ou complémentaire aux
problèmes rencontrés.
Etablir une définition du bilinguisme et surtout des
types de bilinguisme existants permettra de présenter le corpus à
analyser et de présenter l'enfant en fonction du type d'environnement
bilingue.
1. 1. Classification en fonction de la compétence
dans les deux langues
1 Cf. infra partie « Les bases neurologiques dans
le fonctionnement du langage »
Dans l'évaluation de la compétence linguistique,
il est nécessaire de prendre en compte l'âge auquel l'enfant est
exposé à la deuxième langue , si l'exposition aux deux
langues se produit en même temps ou si la seconde langue est acquise
après. De l'âge d'acquisition de la seconde langue dépendra
le type de bilinguisme
Cette partie traite de l'évaluation comparative des
compétences dans les deux langues afin de qualifier un premier type de
bilinguisme. Une distinction sera d'abord faite entre le bilinguisme
équilibré, dans lequel les compétences de l'enfant sont au
même niveau dans les deux langues, et le bilinguisme dominant dans lequel
une des langues est acquise après la langue maternelle. Bien entendu,
dans cette étude, la terminologie de « comparaison du niveau de
compétence » (Hamers et Blanc, 1990) des langues est
étudiée par opposition à l'acquisition de sa langue
maternelle par un enfant monolingue. En effet on ne peut pas comparer
l'acquisition de deux langues chez l'enfant avec l'apprentissage d'une langue
étrangère chez l'adulte.
Un bilinguisme équilibré n'est pas non plus la
capacité d'un enfant à utiliser de la même manière
les deux langues dans tous les domaines et toutes les utilisations possibles,
mais sa capacité à atteindre un relatif niveau d'équilibre
dans ses utilisations. C'est le contexte qui va déterminer le type de
bilinguisme : quand l'enfant commence à parler et reste dans la cellule
familiale, il va avoir une compétence orale équilibrée
dans les deux langues, s'il est scolarisé dans une école
monolingue il favorisera, à ses dépends et s'il ne suit pas le
même apprentissage, une compétence (par exemple l'écriture)
qui développera un déséquilibre dans une des fonctions du
langage (l'écriture) de l'autre langue. En effet, la perception du
contexte constitue un élément pragmatique qui sera relié
à l'utilisation des langues, favorisant ou non l'utilisation d'une des
deux langues (Lambert, Havelka et Crosby, 1958 cité par Hamers et Blanc,
1990) autrement dit selon le contexte l'enfant se trouve dans la
nécessité d'employer d'avantage une langue qu'une autre, ce qui
est le principe de la diglossie2. Dans le cas d'un bilinguisme
équilibré, l'enfant est confronté à un contexte
familial bilingue et possède le même avancement dans la
maîtrise du système des deux langues.
Dans le cas d'un bilinguisme dominant, l'enfant se trouve soit
dans un contexte bilingue où l'utilisation d'une seule langue est
privilégiée et l'enfant acquiert avant tout la langue la plus
appropriée pour communiquer avec son entourage proche (Hamers et Blanc,
1990) ; L'enfant peut également évoluer dans une famille
monolingue mais une autre langue est parlée dans un contexte
extérieur généralement au titre de langue officielle,
impliquant que l'enfant soit plus avancé dans une langue qu'une autre
(Abddelilah-Bauer, 2006). Cet
2 Cf. partie sur la diglossie
avancement dans l'apprentissage de la langue n'est pas
statique car il dépend de l'exposition à la langue : avant 3 ans
l'enfant sera majoritairement au contact de la langue de ses parents, entre 3
et 6 ans, il sera de plus en plus souvent en contact avec d'autres enfants
parlant une autre langue et enfin à partir de 6 ans il sera
scolarisé dans une école où il va approfondir
l'apprentissage de la langue du pays tout en développant de nouvelles
compétences (lecture, écriture) d'une manière plus
régulière et normée. C'est pour cela qu'il faut souligner
que le bilinguisme équilibré représente le type de
bilinguisme le plus rare voir utopique, car dans son usage, il
présuppose d'une part que dans le cadre de la cellule familiale, il
existe un usage indifférent d'une langue ou d'une autre, et d'autre part
qu'il en soit de même dans le contexte social dans lequel évolue
l'enfant.
Pourtant, dans un contexte social, il n'existe pas d'exemple
dans lequel des individus puissent employer indifféremment une langue ou
l'autre, en fonction des idéologies linguistiques présentes dans
la société. Une langue est toujours favorisée, soit parce
qu'elle est la plus répandue, soit parce qu'elle représente le
prestige, l'ascension sociale ou la langue de la communauté ou la langue
officielle du pays. Ces idéologies se retrouvent dans la
communauté linguistique et la cellule familiale, c'est pourquoi il
paraît difficile de certifier l'existence de ce type de bilinguisme. Il
semble alors cohérent de soutenir l'existence d'un bilinguisme
exclusivement dominant, non pas au niveau de la maîtrise que l'enfant a
des deux langues, mais au niveau de la favorisation faite pour une langue, soit
par le locuteur, selon la représentation qu'il a des langues, soit par
une contrainte de type sociale.
La maîtrise des deux langues n'est alors pas à
remettre en question. Ce qui varie, essentiellement, que ce soit dans la
cellule familiale ou dans un contexte social, c'est la compétence de
communication. En effet, dans le cadre d'un bilinguisme dominant, les deux
langues ne sont pas sollicitées dans les mêmes contextes ni
à la même fréquence. Il est alors possible que dans une des
deux langues, la compétence de communication soit incomplète ou
affaiblie. C'est sur la compétence de communication que repose la
définition de ce type de bilinguisme, et le bilinguisme
équilibré serait alors une maîtrise égale de la
compétence de communication dans les deux langues. Cela est
favorisé, dans un premier temps, si les parents ne parlent pas la
même langue et dont l'usage sera partagé et alloué aux
mêmes tâches dans la vie quotidienne. Cependant, une fois l'enfant
placé dans un milieu social tel que le contexte scolaire ou dans sa
relation avec les autres enfants, il va favoriser d'une manière plus
explicite une des deux langues car le contexte social implique souvent de
favoriser une langue au détriment de l'autre.
Le bilinguisme équilibré ou dominant est de loin
la compétence la plus difficile à définir et à
évaluer. En effet, l'acquisition d'une compétence bilingue dans
tous les domaines
dépend non seulement du contexte dans lequel
évolue l'enfant mais surtout de ses capacités cognitives. Chaque
personne a sa propre configuration et celle-ci n'est pas fixe, mais cette
définition est indispensable dans notre recherche car elle est
indissociable de la vie et du développement de l'enfant et aura des
conséquences sur son développement linguistique et cognitif.
1. 2 . Classification en fonction de l'organisation
cognitive de la langue
Dans l'évaluation de la compétence cognitive de
la langue, on prend en compte la manière dont se fait l'acquisition du
lexique dans les deux langues et dans un même contexte. Cela revient
à se demander s'il existe un ou deux systèmes. Dans cette partie,
nous n'allons va pas rentrer dans le débat pour savoir s'il existe un ou
deux systèmes nous allons présenter les différentes
théories qui existent en donnant, si nécessaire, leurs
limites.
La classification est inspirée par Weinrich (1968
cité par Hamers et Blanc, 1990) et Hagège (1996) : il est
difficile de donner une terminologie exacte à la classification de
Weinrich (1968) mais Hagège parle « d'organisation des
connaissances de mots dans les situations de bilinguisme ». Wienrich part
de la structuration du lexique mental d'un enfant, lexique qui construit
progressivement au contact de la langue. L'acquisition du lexique se fait dans
le temps mais selon lui, c'est l'exposition à la langue qui a construit
le type de bilinguisme : tout d'abord on parle de « bilinguisme
composé» » pour caractériser un enfant qui apprend les
deux langues dans un même contexte et dans une même situation. De
ce fait, deux mots peuvent avoir un référent et un
signifié commun, ainsi le langage se construit dans une
interdépendance des deux langues sur le plan sémantique et de
l'organisation cognitive du sens et de la perception des éléments
du contexte.
En effet, la catégorisation cognitive et
sémantique des éléments contextuels perçus sera
équivalente dans les deux langues. Par ailleurs, le bilinguisme est
coordonné quand il se construit au sein d'une indépendance entre
les deux langues. En effet, l'enfant apprend deux langues dans un contexte
propre associé à chacune ; ainsi, chaque mot de chaque langue
possède son propre référent et sa propre signification,
impliquant deux signifiés et deux référents dans deux
langues différentes. Selon cette classification, il y aurait deux
systèmes linguistiques et conceptuels parfaitement distincts.
Enfin, Weinrich est le seul à parler de bilinguisme «
sous-coordonné » (Sub-coordinate3) dans le cadre d'un
bilinguisme où les deux langues sont acquises mais
3 Selon notre propre traduction.
l'une d'elles va devenir « langue la plus forte »
(stronger language (SL)) et l'autre « langue la plus faible » (weaker
language (WL)) et la représentation du même mot dans les deux
langues ne se fera que dans la langue forte (SL). Dans un «bilinguisme
coordonné» une des deux langues va rendre l'ascendant sur l'autre,
ce qui représente l'aboutissement d'un conflit diglossique.
Dans l'acquisition du bilinguisme vont donc opposer deux
définitions : la première où l'on parle de «
bilinguisme composé», c'est-à-dire que l'enfant va avoir
dans chaque langue un signifiant pour un signifié4. La
seconde désigne un bilinguisme dit coordonné, où l'enfant
va se représenter le monde de la même façon dans les deux
langues et va donc avoir pour un mot, un signifié pour deux signifiants.
La construction du monde se fait dans deux langues différentes. Dans la
troisième définition, l'une des deux langues domine l'autre ; la
structure de base sera toujours la langue fondamentale (maternelle et
dominante) et l'utilisation d'une autre langue nécessitera un encodage
supplémentaire qui se superposera à celui de la langue maternelle
qui nécessite un traitement cognitif différent de celui de la
langue maternelle, cependant selon Padilla et Liebman (1975 cité par
Hamers et Blanc, 1990), l'implication précoce et importante de
l'hémisphère droit chez un bilingue équilibré (par
rapport à un monolingue où la mobilisation de
l'hémisphère droit est relative), reste proche de celle d'un
bilingue à tendance dominante si la seconde langue est apprise avant 6
ans.
La première définition (« bilinguisme
composé») s'applique facilement à des contextes de
bilinguisme familial dans lequel les parents alternent sans distinction les
deux langues dans leur parler. Le «bilinguisme coordonné»
quant à lui s'applique à des situations plus scolaires où
une seconde langue étrangère est apprise : c'est souvent le cas
lorsque l'enfant est élevé dans une famille monolingue dans un
pays qui parle une langue différente. Lorsqu'il se retrouve dans une
situation d'apprentissage avec d'autres enfants il entre en contact avec une
nouvelle langue, ce contact se fait par un enseignement, il n'est pas «
naturel » (dans l'interaction discursive avec les parents) ainsi, l'enfant
va apprendre à dire le monde qu'il connaissait déjà, dans
une autre langue et d'une certaine manière va le réapprendre. La
distinction entre les types composé et coordonné n'est pas
exclusive pour Ervin et Osgood (1954) : ces types constitueraient les deux
pôles du bilinguisme et les sujets bilingues se situeraient entre les
deux, leur position variant en fonction des situations d'apprentissage et
d'utilisation de la langue, ainsi que de l'âge de confrontation aux
deux
4 Le signifiant est la forme concrète (image
acoustique) du signe linguistique. Alors que le signifié est le contenu
sémantique du signe linguistique
langues. Par conséquent le bilinguisme tiendrait plus
à des stratégies cognitives adaptées à un contexte
qu'à des modèles figés.
Cette classification concentre le bilinguisme presque
exclusivement sur un plan sémantique et lexical. Dans le cas du
«bilinguisme coordonné» il se développe, selon les
langues, une variation en fonction de la construction de la dimension
sémantique et organisationnelle qui va également modifier la
perception et la catégorisation d'éléments du monde. Cette
définition présuppose que les deux systèmes linguistiques
soient reliés à des systèmes indépendants. Il
existerait alors deux représentations du monde, une pour chaque langue.
Cette dimension implique, par exemple, que le référent de «
forêt », en français, ne soit le même qu'en anglais.
Cette perspective, qui peut se rapprocher de l'hypothèse SapirWhorf,
impliquerait que la langue construit la vision du monde. La
catégorisation cognitive impliquerait deux systèmes, donc deux
fonctionnements neurolinguistiques différents. De même, on
conceptualiserait le monde dans deux langues et la perception du monde s'en
trouverait changée.
Mais il est également intéressant de souligner
que, si cette classification s'avère empiriquement exacte, le
fonctionnement organisationnel du lexique et de la perception du contexte varie
non seulement d'une langue à l'autre mais aussi d'un individu à
l'autre en fonction à leur propre fonctionnement cognitif individuel. De
ce fait, la classification ne servirait pas seulement à décrire
différents types de bilinguisme, mais aussi les fonctionnements
cognitifs et les stratégies d'apprentissage propres à chaque
individu.
1. 3. Classification en fonction du contexte
d'acquisition
Dans cette partie nous allons parler de la langue
présente dans l'entourage immédiat de l'enfant (sa famille et la
communauté dans laquelle il évolue) indépendamment du
statut des langues dans le pays. Dans le cadre du bilinguisme (pour le
différencier du plurilinguisme plus souvent évoqué par les
sociolinguistes), l'enfant va être en contact avec deux langues mais
selon le type de contact, le bilinguisme sera endogène ou
exogène.
Pour Hamers et Blanc (1986), le bilinguisme est dit
endogène5, si les deux langues sont considérées
comme maternelles, si elles sont toutes deux utilisées en contexte
social formel et informel et considérées socialement. Le
bilinguisme endogène implique, à l'origine, que les deux langues
soient acquises en même temps, dans le contexte familial, et qu'elles
aient le co-statut de langues maternelles, si l'on peut poser
l'hypothèse de l'existence possible de
5 Du grec evãov dedans et
yevoç origine.
deux langues maternelles chez un seul locuteur. Les impacts
cognitifs du bilinguisme sont également dépendants de
l'environnement socioculturel, en particulier du statut respectif des deux
langues au sein d'une même communauté.
Nous parlerons de bilinguisme exogène6 dans
un contexte linguistique où l'une des deux langues apprises est la ou
une des langues officielles, mais pas celle de la communauté (c'est le
cas lors d'un contexte migratoire) Cette définition introduit la notion
de conflit diglossique. En effet, c'est souvent le contexte exogène qui
est à l'origine d'un bilinguisme diglossique, car il privilégie
souvent une langue au détriment de l'autre. La langue
privilégiée est alors la langue de la société,
officielle, majoritaire, majorée, valorisée.
Si l'on considère qu'il y a un impact social sur
l'acquisition des langues, alors cet impact peut se faire de deux
manières : si deux langues sont bien considérées par la
société, alors l'enfant va avoir une vision positive qui va le
pousser à apprendre la langue du pays tout en continuant à
pratiquer la ou les langues de ses parents. En revanche dans un contexte
migratoire, l'enfant aura plus de difficulté à apprendre sa
langue maternelle qu'un enfant monolingue ou bien, comme on le voit en France
dans les communautés arabophones, la langue de la famille qui a
immigré disparaît au bout de trois ou quatre
générations.
1. 4. Classification en fonction du statut des langues
Dans cette partie nous allons définir le bilinguisme en
fonction de la place des langues acquises par l'enfant. Cette partie est
très importante car c'est ici que nous allons enfin ce définir le
terme de diglossie tel qu'il a été étudié par les
sociolinguistes depuis Psichari (1928). Cette partie représente
l'aboutissement d'une longue réflexion entamée au début de
ce chapitre : lorsque nous parlons de bilinguisme en acquisition, est-ce que,
au même titre que pour les adultes, il existe un bilinguisme diglossique
chez les enfants ?
Quand les phénomènes de contact des langues sont
évoqués nous nous trouvons souvent confronté au concept de
diglossie. Il nous semble important de définir plus en détail ce
concept et de monter son articulation dans le développement du
bilinguisme chez les jeunes enfants. Le terme de diglossie est employé
pour la première fois en 1928, dans Le Mercure de France, par
l'écrivain Jean Psichari mais son emploi s'est ensuite
généralisé. Le terme servait à qualifier la
situation linguistique de la Grèce où deux variétés
de Grec coexistaient : le Katharevoussa, qui est l'héritage linguistique
parlé par l'élite et le Démotiki, langue
revendiquée par les jeunes mais refusée par l'élite. De
cette opposition entre les
6 Du grec, e÷o au-dehors et
yerjrjcxv engendrer.
langues naît le conflit diglossique. Selon Psichari, la
diglossie sert à définir la coexistence de deux langues en
conflit dans une société donnée. Ce concept émerge
de situations concrètes c'est pourquoi il y a plusieurs
interprétations du concept même de diglossie.
Le deuxième modèle est celui
développé par Fergusson : selon lui, il y a diglossie quand il y
a deux variétés de la même langue en usage dans une
communauté, une variété haute et une variété
basse. La variété basse est acquise par transmission et la
variété haute est apprise. La répartition des usages,
contrairement au modèle grec, fait l'objet d'un consensus non
problématique.
La troisième école est celle de
Bâle-Neuchâtel avec, entre autres chercheurs, Lüdi et Py
(2000). Ce groupe accepte en partie le concept de diglossie mais en corrige la
notion de prestige avec une variété haute et une
variété basse :
« diglossie : situation d'un groupe social (famille,
ethnie, ville, région, etc...) qui utilise deux ou plusieurs
variétés (langues, idiomes, dialectes, etc...) à des fins
de communication, fonctionnellement différenciées, pour quelques
raisons que ce soit ». Lüdi et Py (2000 :15).
La diglossie devient ainsi un modèle consensuel à
la base d'une stratégie de coopération, où le bilinguisme
ou le plurilinguisme ne sont plus une source de conflit.
Enfin dans une optique complètement différente
celle de Lüdi et Py mais plus proche de celle de Psichari, Lafont (1960)
définit la diglossie en prenant l'exemple du modèle
catalano-occitan, comme conflictuelle : s'il y a contact de langue il y a
compétition donc antagonisme.
Pour résumer, quand il y a contact de langue il y une
domination et une minoration plus ou moins importante qui parfois engendre un
conflit. Les sociolinguistes ont surtout étudié ces
phénomènes chez les adultes mais les enfants ne sont pas à
l'abri des conflits de langue puisque dans des contextes bilingues ils sont
confrontés à plusieurs des contacts de langues. Ce contact peut
se faire au sein de la famille (famille bilingue) ou lors d'un contexte de
migration (famille monolingue qui immigre dans un pays étranger). Dans
le premier cas, l'enfant apprendra les deux langues en même temps et la
disparité entre les langues sera moins grande ou apparaîtra plus
tardivement dans le second cas la langue seconde sera apprise après la
langue maternelle et le choc des deux langues sera peut-être plus
violent.
Pour résumer nous avons pu constater l'existence de
situations conflictuelles dans lesquelles certaines langues acquises par
l'enfant sont dévalorisées, dévaluées dans la
société, alors que d'autres sont valorisées. Par exemple,
en France, le français tient une
place prépondérante qui écrase toutes les
autres langues non officielles. Un enfant bilingue, en France, sera alors la
plupart du temps, confronté à la forte représentation
sociale de la langue française et au poids que cette dernière
prend dans la société, comme langue de culture, d'ascension
sociale, de langue officielle de la République.
En faisant des recherches, un problème s'est
posé au niveau de la terminologie : d'une part, deux auteurs utilisaient
les mêmes termes pour parler de représentations
différentes, d'autre part, une erreur dans le choix des termes a
été relevée. Le conflit porte sur l 'utilisation des
termes de bilinguisme additif et soustractif. D'une part Abdelilah-Bauer (2006
: 29) va utiliser la terminologie de bilinguisme additif et de bilinguisme
neutre (ou soustractif) pour caractériser le développement d'une
compétence à partir de l'impact cognitif qu'a le contexte sur
cette langue, c'est-à-dire l'augmentation ou pas des compétences
intellectuelles dans la dite langue.
D'autre part, Hamers et Blanc (1990)7 parlent aussi
d'impact cognitif valorisé ou pas mais dépendant du statut de la
langue et non pas de son contexte d'acquisition : autrement dit, si les deux
langues sont socialement valorisées, l'enfant les apprendra plus
facilement que si l'une d'entre elles est valorisée aux dépens de
l'autre. L'autre problème se pose au niveau de la sémantique :
les termes d'additif et de soustractif sont très vagues, de plus un
bilinguisme ne peut pas être à la fois neutre et soustractif.
Par conséquent, étant donné les
divergences terminologiques, pour parler du statut des langues nous
préfèrerons utiliser, dans ce mémoire, le terme de
bilinguisme neutre si les deux langues sont valorisées au même
niveau ou de bilinguisme hiérarchique si l'une d'elles a un statut plus
important. Mais le bilinguisme neutre au même titre que le bilinguisme
équilibré est rare à notre connaissance le bilinguisme
n'est jamais équilibré et bien qu'il soit utopique, il nous
semble important d'aborder les différentes possibilités de
bilinguisme sous ces deux angles.
1. 5. Classification en fonction de l'âge
Le développement du cerveau au cours des années
qui suivent la naissance qui va permettre à cette capacité de se
développer, autrement dit l'acquisition de la langue maternelle
dépendra de la maturation des différentes régions du
cerveau et de la relation au
7 Ils citent Lambert W. E. (1974) « Culture
and language as factors in learning and education » in F. E. Aboud &
R. D. Meade (eds.) Cultural factors in learning, Bellingham : Western
Washington State Union;
contexte. Il en va de même pour l'acquisition d'une
autre langue : En fonction de la période à laquelle l'enfant est
exposé à la seconde langue, les conséquences en termes
d'acquisition et de développement seront différentes. L'âge
d'acquisition joue un rôle dans le développement cognitif de
l'enfant mais aussi dans son développement linguistique,
neuropsychologique et socioculturel. L'âge d'acquisition est
également à mettre en relation avec le contexte et l'usage des
deux langues. Ces trois facteurs se combinent souvent ensemble pour donner des
variétés différentes de bilinguisme : ainsi de l'âge
d'acquisition dépendra un contexte (si les deux langues sont
déjà présentes en contexte familial bilingue, ou si l'une
des deux langues n'est pas celle de la communauté mais une des langues
parlées dans la société).
Le terme de bilinguisme précoce (« childhood
bilinguality ») sert à désigner une acquisition de deux
langues avant l'âge de 6 ans. Avant cet âge, le cerveau n'est pas
suffisamment mûr pour traiter séparément les informations
de la seconde langue. A l'intérieur de cette catégorie , nous
classerons deux sous-types de bilinguisme en fonction de l'exposition au
contexte8. Le bilinguisme sera précoce et simultané
dans le cas d'une exposition aux deux langues dans la cellule familiale
dès la naissance ; on parlera de bilinguisme précoce et
consécutif lorsque l'enfant, avant l'âge de six ans, évolue
dans un milieu familial monolingue et apprend la langue étrangère
du pays dans un contexte (hors du cadre familial) ou si la seconde langue est,
d'une quelconque manière, introduite après l'âge de trois
ans.
Par opposition au bilinguisme précoce, on parlera de
bilinguisme tardif dans le cadre d'un apprentissage intervenant après 6
ans où, soit la langue est celle du pays (différente de la langue
maternelle), soit la langue est apprise dans la cadre d'un enseignement dans
une institution. En effet, après 6 ans il devient de plus en plus
difficile d'acquérir une langue de manière intuitive. De
même, il est difficile dans les écrits scientifiques
français de trouver une terminologie appropriée. Cet
apprentissage peut être divisé en sous-catégories selon
s'il se
8 En réalité certains auteurs parlent
de « bilingual first language acquisition » et de «
bilingual second language acquisition » mais cela nous
paraît plus approprié d'en dresser une définition et d'en
établir les limites dans notre partie sur le bilinguisme
précoce.
fait entre 6 et 10 ans dans ce cas se sera un bilinguisme de
l'enfance9, s'il se fait à l'adolescence (« adolescent
bilinguality 10») entre 8 et 17 ans, soit à l'âge
adulte (« adult bilinguality ») après 17 ans.
Dans les cas de bilinguisme précoce consécutif
et de bilinguisme tardif, si les compétences de communications acquises
dans les deux langues sont identiques, alors on parlera de bilinguisme additif.
Mais si l'enfant possède une plus grande compétence de
communication dans une langue que dans une autre, on parlera de bilinguisme
neutre ou soustractif. Les différences vont alors reposer sur
l'influence du contexte social. En effet, la représentation des langues
dans la société va peser sur le développement des
compétences de communication dans la langue acquise après la
langue maternelle, selon le fait que la langue soit pratiquée ou non,
valorisée ou non.
Cette classification en fonction de l'âge fait
apparaître, en transparence, l'influence des concepts piagétiens
selon lesquels l'acquisition dépend, avant tout, de constructions. Les
bases génétiques de l'individu sont en relation avec une
confrontation contextuelle qui, selon divers types de confrontation au
contexte, va impliquer le développement des compétences sociales
dont le langage et la langue. Dans un contexte bilingue, l'enfant est alors
confronté à deux langues, et sa compétence
langagière va alors se construire et s'exprimer dans deux langues
différentes. La classification en fonction de l'âge implique
l'idée de seuil, idée selon laquelle il existe un âge
critique après lequel il devient beaucoup plus difficile d'apprendre une
seconde langue, même dans son contexte. Comme cela a été
abordé dans la partie sur le cerveau, l'âge implique des
mobilisations diverses du cerveau, en relation avec le type de confrontation
que l'individu a avec le contexte.
Il apparaît alors que cette classification repose sur le
fait que le type de bilinguisme dépend de l'âge au cours duquel la
seconde langue est introduite.
En résumé, les recherches que nous avons
présentées ont montré qu'il existe différents types
de bilinguisme. Le bilinguisme peut être classé en fonction de
critères psychologiques : en premier lieu en fonction de la
compétence dans les deux langues c'està-dire qu'il peut
être équilibré si l'enfant a le même niveau dans les
deux langues ou
9 Par opposition à la petite enfance qui
désigne les enfants en dessous de 6 ans. Je n'ai pas trouvé de
terminologie permettant de désigner les enfants bilingues de 6 à
10 ans.
10 N'ayant pas trouvé de correspondance dans
des livres en français, la traduction ne dépend que de l'auteur
et peut être soumise à des modifications terminologiques
ultérieures. Les correspondances originelles en anglais étaient
entre parenthèses et sont tirées de Hamers et Blanc (1990 :
10-11).
dominant s'il est plus exposé à une langue
qu'à l'autre et ainsi il va mieux parler la première langue que
la seconde.
Ensuite, le bilinguisme peut être classé en
fonction de l'organisation cognitive de la langue, on parle d'un
«bilinguisme composé» si pour un même
référent la langue 1 et la langue 2 ont un même signifiant
et un «bilinguisme coordonné» si pour un même
référent la langue 1 et la langue 2 ont un signifiant respectif
dans chaque langue.
Dans une troisième partie nous avons abordé le
bilinguisme en fonction de critères contextuels : dans un premier temps
le statut de la langue a été étudié d'un point de
vue général au sein de la communauté. Cependant au regard
de l'analyse détaillée faite sur les différents types de
bilinguisme, un problème s'est posé, en effet pour une même
terminologie trois auteurs posaient une définition différente
ainsi c'est posée la nécessité de proposer une
terminologie nouvelle : j'ai parlé de bilinguisme à tendance
neutre pour désigner deux langues qui sont valorisées au
même niveau dans une même communauté, par opposition au
bilinguisme à tendance hiérarchique où une langue domine
l'autre11, ce qui me semble plus réaliste car le bilinguisme
à tendance neutre me semble utopique, il n'existe par de situation dans
laquelle une langue n'a pas de domination sur l'autre (cela n'induit pas
toujours un conflit).
D'un autre point de vue, le bilinguisme en fonction du
contexte d'acquisition peut se définir comme la présence des deux
langues dans la communauté. Dans ce cas le bilinguisme est appelé
endogène alors que si la seconde langue n'est pas parlée dans la
communauté on parlera de bilinguisme exogène.
La dernière partie définit le bilinguisme en se
fondant sur l'âge d'acquisition de la langue seconde. En effet,
après 6 ans, on parlera d'apprentissage d'une langue
étrangère ou de bilinguisme tardif, que ce soit hors du cadre
familial (à l'école), à l'adolescence (entre 12 et 17 ans)
ou à l'âge adulte (après 17 ans). Par opposition, on
parlera d'acquisition ou de bilinguisme précoce lorsque la langue 2 est
apprise avant 6 ans. Abdelilah-Bauer (2006) définit le bilinguisme
précoce lorsque les langues 1 et 2 sont apprises avant 3 ans et parle de
bilinguisme tardif lorsque la langue 2 est apprise seulement après 3
ans. Dans ce mémoire on préfèrera utiliser le terme de
bilinguisme précoce pour désigner un bilinguisme acquis avant 6
ans qui se divise également en deux sous-catégories, lorsque les
langues 1 et 2 sont acquises avant 3 ans on parlera de bilinguisme
simultané alors qu'après 3 ans lorsque l'enfant est suffisamment
grand pour distinguer les langues, s'il apprend une seconde langue on
préfèrera le terme de bilinguisme consécutif.
11 Cette domination, communément appelée
« diglossie » n'est pas forcément conflictuelle. C'est la
problématique de la diglossie qui fait qu'il ne pourra pas y avoir de
bilinguisme équilibré.
Notre nouvelle définition va se construire en fonction
du traitement cognitif et du développement de l'enfant en fonction de
son âge, car ce sont les plus pertinents dans le sens où ils sont
démontrables dans la dimension empirique.
Il est apparu, dans les différents types du
bilinguisme, que les définitions étaient élaborées
selon trois critères essentiels : la mobilisation des compétences
cognitives, le contexte et l'âge d'acquisition. Il paraît
évident que chaque critère a une pertinence et est essentiel dans
une définition du bilinguisme qui cherche à être la plus
précise possible. De ce point de vue, la définition en fonction
de l'âge, qui prend également en compte le contexte, semble
être la plus aboutie. Toutefois, il est nécessaire de constater
que cette définition ne précise pas, selon les contextes, s'il y
a un bilinguisme équilibré ou dominant. Il apparaît
nécessaire de définir également le bilinguisme selon les
critères de la diglossie. Ainsi, en reprenant les terminologies de la
dernière définition, il sera nécessaire d'apporter, entre
autres, la précision d'un bilinguisme équilibré ou
dominant.
Facteurs du bilinguisme
|
Type de bilinguisme
|
Définition
|
Compétence dans les deux langues
|
1. Bilinguisme équilibré
2. Bilinguisme dominant
|
Compétence dans la L1 = Compétence dans la L2
|
Compétence dans la L1< ou > compétence dans
la L2
|
Organisation cognitive de la langue
|
1. «bilinguisme composé»
2. «bilinguisme coordonné»
|
3.
|
Un signifiant pour deux signifiés pour L1 et L2
Un signifiant pour un signifié dans chaque langue
|
Contexte d'acquisition
|
1. Bilinguisme endogène
2. Bilinguisme exogène
|
3.
|
Présence de la L2 dans la communauté
|
|
Absence de la L2 dans la communauté
|
Statut des deux langues
|
1. Bilinguisme à tendance neutre
2. Bilinguisme à tendance hiérarchique
|
L1 et L2 sont valorisées au même niveau
L1 est valorisée aux dépens de L2
|
Age d'acquisition
|
1. Bilinguisme précoce (acquisition)
(a) Bilinguisme simultané
(b) Bilinguisme consécutif
|
L2 acquise avant 6 ans
L1 et L2 = langues apprises avant 3 ans
L2 apprise de 3 à 6 ans
|
2. Bilinguisme tardif (apprentissage)
(a) Apprentissage hors du cadre familial
(b) Apprentissage à l'adolescence
(c) Apprentissage à l'âge adulte
|
L2 apprise après 6 ans
L2 apprise entre 10 et 17 ans L2 apprise après 17 ans
|
Tableau 1 : Tableau récapitulatif des différents
types de bilinguisme sur critères psychologiques, contextuels et selon
l'âge d'acquisition (inspiré de Hamers et Blanc, 1990 : 9)
L1 : Langue 1, par défaut, la langue maternelle enfant
L2 : Langue 2, par défaut la seconde langue maternelle ou
la première langue étrangère
Rimbaud Sophie L'acquisition du genre et le code mixing chez
le bilingue précoce 2009 2. Les bases neurologiques dans le
fonctionnement du langage
Dès le début du XXème
siècle de nombreuses études scientifiques ont été
conduites sur le bilinguisme. Au début, ces études furent
menées par des linguistes sur leurs enfants parce qu'ils
évoluaient dans un contexte bilingue. Dès le
XVIIème et XIXème siècles,
l'hypothèse de l'existence de certaines zones du cerveau
impliquées dans le traitement et la production du
langage12 était mise en avant mais les
théories sur l'interdépendance entre le cerveau et le
fonctionnement du langage n'en étaient qu'à leurs débuts ;
C'est pourquoi les premiers travaux sur le bilinguisme débutèrent
avec l'étude de l'enfant dans divers environnements linguistiques, sur
la base de collecte de corpus et portaient uniquement sur le
développement linguistique (syntaxe, lexique) dans les deux langues en
parallèle et les études neuropsychologiques, bien qu'existantes
chez les sujets monolingues, furent laissées de côté.
Depuis deux siècles mais encore plus aujourd'hui,
grâce au développement de technologies perfectionnées, les
travaux sur les bases neuropsychologiques du langage tiennent une place
centrale dans la compréhension du processus d'acquisition. En effet,
aujourd'hui, toute étude de l'émergence du langage que ce soit
chez l'enfant monolingue ou bilingue présuppose l'existence de bases
neurologiques et cognitives qui entrent en jeu dans le processus de production
de la parole. Ainsi, l'émergence du langage implique également le
développement neurologique parallèle et complémentaire
à l'émergence de la parole qui va passer par différents
stades de maturation que nous expliquerons dans cette partie comme la
myélinisation des connections neuronales, la latéralisation des
hémisphères, la spécialisation des
hémisphères et la malléabilité du cerveau et son
adaptation à des situations linguistiques particulières ou encore
la modulation de certaines zones du cerveau .
Pendant longtemps la plupart des recherches menées
à ce sujet l'ont été sur des individus monolingues mais il
paraît évident que, puisque à partir du moment où il
y a émergence du langage, l'étude de ce processus sera pertinente
que ce soit pour un enfant monolingue ou chez les enfants bilingues. Le langage
humain repose sur l'existence et la fonction d'un système nerveux
central et d'organes périphériques comme les organes
articulateurs de la parole, mais également un fonctionnement
neurologique spécifique. Ces moteurs de la parole ne sont pas effectifs
dès la naissance et peuvent mettre de nombreuses années avant que
leur maturation n'arrive à son terme. Le développement du
12 En réalité les égyptiens
déjà avaient émis l'hypothèse de la présence
dans le cerveau de régions dont dépendent le langage, en
étudiant certains hommes atteints d'aphasie mais leur recherches nous
sont mal connues.
langage dépend d'une interaction humaine dans un
contexte : en effet, lorsqu'il naît, l'enfant ne parle pas encore mais
est capable d'entendre. Il possède une grande sensibilité aux
éléments acoustiques du fait de la précocité de la
maturation de son système auditif et des zones neurologiques du
traitement acoustique. Cette précocité serait fonctionnelle
dès 5-6 mois au stade foetal (c'est un éveil fonctionnel qui peut
être plus tardif) : à la naissance in identifie la voix de sa
mère parmi les autres. Quand il naît l'enfant est physiquement
capable de produire des sons mais l'acquisition des langues est progressive, en
effet, pour comprendre et acquérir le langage, le bébé
doit découper le signal sonore afin d'isoler des unités
linguistiques pertinentes. Par la suite le développement du langage va
passer par différentes étapes successives d'acquisition et de
développement Alors que la première étape de perception et
distinction des phonèmes est rapide, la seconde étape de
l'apprentissage linguistique mettra de nombreuses années car elle
dépend de processus qui ne s'achèvent que vers 15 ans.
2. 1. Les courants théoriques dans la relation
langage/cerveau 2. 1. 1. La localisation
hémisphérique
La neuropsychologie est l'étude des relations entre les
fonctions psychologiques supérieures et les structures
cérébrales. A la base de tout fonctionnement organique il y a une
entrée neurologique autrement dit « les processus mentaux sont
sous-tendus par des évènements physico-chimiques ayant leur
siège dans le cerveau » (Faure, 2003-2004 : 1) 13. Dans
les années 1800 le neuro-anatomiste allemand Franz Joseph Gall
(1757-1828) se place en précurseur dans son domaine en mettant en avant
l'hypothèse selon laquelle l'esprit possède des sous-fonctions
localisées à l'intérieur de modules dans le cerveau ; il
lance les bases de l'existence de régions spécialisées
dans des fonctions mentales dans le cortex cérébral.
Gall se place parmi les partisans des « localisateurs
» mais avec ses idées il s'oppose au clan des « unitaires
» dont fait partie Flourens (1794-1867) . Entre les années 1820 et
1861 le clan des unitaires prône l'idée selon laquelle le cerveau
fonctionne comme un tout inséparable, il n'y aurait donc pas de zones
spécifiques pour chaque faculté. Ce débat prendra fin avec
les théories de Broca et Wernickle. A partir de ces constatations sur
les lésions cérébrales et l'aphasie, divers scientifiques
ont commencé à élaborer des théories sur le
fonctionnement neurologique, notamment au niveau du langage. Les travaux de
Gall seront repris par Jean Baptiste Bouillaud (1796-1881) qui, en
étudiant des
13 La plupart des indications historiques et
scientifiques sont tirées des documents de cours de S. Faure sauf
indication contraire.
traumatismes crâniens accidentels et les lésions
cérébrales, va les mettre en relation avec la perte de la parole
:
« Bouillaud inaugure l'anatomo-pathologie du langage
qui deviendra la neuropsychologie. Il établit l'existence de cas de
paralysie sélective de la langue et des organes phonateurs sans atteinte
des membres » (Changeux, 1987 : 29).
Broca s'inspire des travaux de Bouillaud en apportant, par
l'examen du patient, des preuves scientifiques concrètes que des
lésions de l'hémisphère gauche (désormais HG) sont
responsables des troubles du langage même si les deux
hémisphères sont lésés. Cette lésion
unilatérale qui suffit à provoquer une aphasie chez le patient
atteint ce qui montre l'asymétrie des hémisphères, ce que
n'avait pas découvert Bouillaud. Cette découverte le conduit le
18 avril 1861 à faire une allocution devant la Société
d'Anthropologie de Paris : c'est en observant le cerveau de M. Leborgne,
patient aphasique, lors de son autopsie pratiquée la veille, que Broca
confirma l'hypothèse de Bouillaud quant à la localisation du
centre du langage :
« La perte de la parole sans paralysie articulatoire
et sans destruction de l'intelligence serait liée à des
lésions de la troisième circonvolution frontale de
l'hémisphère gauche du cerveau » (Broca, 1865 cité
par Melher et Dupoux, 2002 : 210).
L'aphémie, ainsi nommée par l'étude de
cas de Broca, est nommée « aphasie de Broca. Il démontre que
des lésions affectant les zones de l'hémisphère gauche
impliquées dans le langage, déclenche des troubles langagiers,
d'abord au niveau de la production, sur le plan syntaxique avant tout, mais
aussi phonétique et lexical, puis au niveau de la
compréhension.
Illustration 2 : Lésions du cortex entraînant des
troubles du langage.
Image réalisée par scanographie
(Changeux, 1987: 153)
L'aphasie de Broca est dite « aphasie motrice » (B)
par opposition à l'aphasie de Wernicke, dite « aphasie sensorielle
» (C) où le patient développe des troubles de
compréhension du langage mais cette aphasie est elle aussi causée
par les lésions de l'hémisphère gauche (désormais
HG). Les facultés mentales de l'hémisphère droit (HD) ont
été identifiées beaucoup plus tard et n'ont que des liens
indirects avec le langage : d'une manière globalisante HD est
responsable des émotions, de l'espace et de la
perception14. Les régions du cerveau ont
été neurologiquement situées puis cartographiées
par Brodmann en 1909 : il divise le cortex en cinquante-deux aires, chacune
possédant un numéro et une fonction.
2. 1. 1. Une nouvelle approche du cerveau : la
théorie unitaire
En 1842, Flourens développe une conception globaliste
du cerveau selon laquelle il fonctionnerait comme un organe uni. Cette
théorie de l'unité du cerveau est reprise un siècle plus
tard par Lashley:
«[...] le cerveau est équipotentiel
c'est-à-dire que n'importe quelle des parties peut prendre
à
son propre compte les différentes aptitudes cognitives
» (Melher et Dupoux, 2002, 204).
Autrement dit, aucune des aires du cerveau n'est pleinement
spécialisée : il a été observé des cas de
lésions dans les aires dites du langage qui entraînaient une perte
momentanée de la parole, le temps qu'une autre aire développe la
fonction endommagée. Lashley a appelé cette
propriété la vicariance de la fonction.
Bien que la théorie de la spécialisation
hémisphérique fasse toujours foi dans les écoles de
médecine, on assiste à un revirement des études sur le
cerveau en faveur de la théorie de Lashley. En mars 2009 Hugues Duffau,
le spécialiste en chirurgie cérébrale, a pratiqué
une opération sur la zone de Broca chez un patient cancéreux qui
n'a pas perdu la parole suite à l'intervention. Voici un extrait de
l'interview qu'il a accordé à Midi Libre (mars
2009)15 :
« J'ai enlevé la zone de Broca,
considérée comme la zone de la parole, chez le patient, qui
continuera à parler.[...] On est en train de redéfinir le
fonctionnement du système nerveux central, c'est une nouvelle porte qui
s'ouvre dans l'approche des neurosciences. [...] L'imagerie a montré
qu'après la première intervention, le cerveau s'est
complètement réorganisé ».
14 La médecine actuelle sait que HD peut
compenser la perte des facultés langagières de HG mais plus les
lésions sont importantes et plus le patient touché est vieux,
moins vite se fera la reconstitution des fonctions.
15 Cf. annexe fig. 1.
Le cerveau implique un fonctionnement composé de
réseaux parallèles c'est-à-dire quand il effectue une
tâche il mobilise plusieurs zones, ce que les connexionnistes ont
appelé les structures associées : une zone est allouée
à une tache mais elle est mobilisée de façon secondaire
par une autre tâche et mobilise elle-même d'autres aires. De cette
façon lorsqu'une aire, comme celle qui participe au langage, est
lésée dans son fonctionnement principal, une autre prend le
relais. Dans ce cas, s'il y a une lésion sur des zones du langage qui
entraîne une aphasie, alors c'est que les réseaux conducteurs (les
fibres nerveuses) seraient touchés et ne feraient plus la jonction entre
les zones.
2. 2. Langage et cerveau
2. 2. 1. Les zones du langage
Comme les autres activités du système nerveux
central, le langage repose sur une organisation sensori-motrice complexe du
cerveau, en particulier de l'hémisphère gauche pour tout ce qui
relève du plan linguistique du langage, contrairement à
l'hémisphère droit, alloué à d'autres fonctions
(traitement de l'espace, des émotions, etc.).
Illustration 3 : Localisation des aires du langage
L'enchaînement de ces divers mécanismes corticaux et
sous-corticaux sont de mieux en mieux connus.
1. L'aire de Broca : c'est par cette zone que passent les
phénomènes moteurs de la parole (l'aphasie de Broca implique les
phénomènes phonétiques, syntaxiques et lexicaux,
essentiellement au niveau de la production).
2. Une aire motrice supplémentaire située sur la
face interne et supérieure de l'hémisphère.
3. L'aire temporo-pariétale ou région de Wernicke
(dont l'aphasie implique essentiellement des troubles de la perception et de la
compréhension du langage,
mais peuvent impliquer également une production souvent
chaotique, incompréhensible ou imprécise).
Illustration 4 : Anatomie du cerveau
Les sièges des mécanismes d'enchaînement des
idées sont dispersés dans plusieurs zones communes à celle
du langage. Voici les trois localisations :
1. Dans la zone temporale postérieure et pariétale
postéro-inférieure, ce siège est en partie rattaché
à l'aire de Wernicke.
2. Dans la partie postérieure de la troisième
circonvolution frontale c'est-à-dire en avant de l'aire de Broca.
3. Dans une partie de l'aire motrice supplémentaire dans
la scissure de Rolando. Remarque : l'aphasie sensorielle ou aphasie de Wernicke
est causée par une interruption du faisceau arqué qui relie le
cortex temporo-pariétal.
2. 2. 2. La myélinisation du système
nerveux
En partant de l'hypothèse qu'il existe un rapport entre
l'évolution de la myélinisation d'un système et les
capacités fonctionnelles qui en dépendent (Chevrie/Narbonna,
2007), les travaux de Roch-Lecours ont mis en évidence la relation entre
l'évolution des acquisitions et les cycles de
myélinisation16 des différents
systèmes et zones du cerveau. Parmi la masse d'informations
médicales voici quelques extraits en lien direct avec l'acquisition du
langage et les fonctions langagières qui se développent au cours
de la maturation, ainsi que les déductions que nous pouvons en tirer
:
1. La myélinisation des voies acoustiques
pré-thalamiques commence au 5ème mois de la vie
foetale et elle est pratiquement achevée au 5ème mois
de la vie extra-utérine. La précocité de la
myélinisation des voies acoustiques justifie l'importance du rôle
de l'audition chez l'enfant nouveau-né ; cela explique également
qu'au 6ème mois, l'enfant ne perçoit plus
16 La myéline est une substance lipidique et
protéique formant une gaine autour de certaines fibres nerveuses et
servant à accélérer la conduction des messages nerveux.
que les sons de sa langue maternelle : comme si le placement
d'un filtre auditif achevait la construction du système auditif. Cela
explique également le fait que le foetus soit sensible à la voix
de sa mère et aux paramètres prosodiques (Mehler et Dupoux,
1990), mais également que l'enfant, avant l'âge de six mois, soit
capable de discriminer les sons de toutes les langues, puisque son
système neuro-cognitif se spécialise, ne retenant que les sons
pertinents de sa langue maternelle sous la forme de phonèmes. Dans le
cas d'un enfant bilingue précoce, la sensibilité acoustique sera
plus variée, s'étendant à un nombre plus important de
sons, que ce soit des phonèmes communs aux deux langues et des
phonèmes qui leur sont propres. De ce point de vue, il serait
intéressant de considérer le fait que le système perceptif
de l'enfant se spécialise pour ne retenir que les sons de sa langue
maternelle et donc, s'il retient deux systèmes phonologiques, et qu'en
plus il est capable de switcher avec, alors il serait possible que l'enfant
bilingue développe deux langues maternelles en parallèle, sans
que cela remette en cause le statut de la langue dans le débat sur la
diglossie et le développement des compétences de communication.
En résumé à la fin de la première année
suivant la naissance l'enfant quitte le stade du babillage et rentre dans celui
du lexique franchissant le cap du premier mot. Sur le plan phonologique
l'enfant discrimine les sons de sa langue (à 6 mois les voyelles puis
à 10-12 mois les consonnes).
2. La myélinisation des voies post-thalamiques et des
voies d'association commence à peu près à la naissance et
se poursuit jusqu'à la 5ème année. Cette lente
évolution montre que la stabilisation des mécanismes de
fonctionnement ne sont pas tous simultanés et que la mise en place du
fonctionnement du langage peut se prolonger au-delà de la période
d'acquisition habituellement observée ; autrement dit les
éléments complexes du langage vont continuer à se
développer après la phase de myélinisation.
3. La myélinisation des fibres associatives reliant
les aires de Broca et de Wernicke débute dès le 1er ou
2ème mois et se poursuit jusqu'à 6-7 ans ce qui
justifierait qu'après cette période on passe de l'acquisition
d'une seconde langue à l'apprentissage d'une langue
étrangère. A 10 ans l'enfant a un système phonologique et
syntaxique complet.
4. La myélinisation des fibres
inter-hémisphériques se poursuit jusqu'à 15 ans pour le
traitement du vocabulaire autrement dit après cette période on
apprend plus difficilement des mots nouveaux.
Ainsi, ces quatre étapes représentent les trois
stades d'acquisition du langage. Elles confirment, comme cela sera
développé dans la partie suivante, la théorie de Changeux
(sur la sélection et la stabilisation de réseaux neurologiques
parmi les possibilités multiples proposées par le système
génétique et développées par le contexte). La
spécialisation des réseaux est alors en relation avec le
système linguistique de la langue, avec la sélection d'un
système phonologique, syntaxique, puis lexical. La position de Changeux
implique deux
constatations, la première selon laquelle une dimension
interactionniste (Vygotski, 1930) entre en jeu, certains éléments
(linguistiques) que l'individu va percevoir, vont spécialiser les
réseaux neuronaux ; la seconde que l'enfant bilingue possèderait
des réseaux neuronaux spécialisés différemment,
dans une reconnaissance de deux systèmes, ainsi qu'un réseau
spécifique au code switching.
2. 2. 3. Le fonctionnement du cerveau chez l'enfant
bilingue 2. 2. 3. 1. Changeux et la théorie
épigénétique
Le développement du langage consiste en une succession
d'états d'activités cérébrales. A partir d'un
état d'activité organique primitif, la maturation amène
l'organisme à des stades successifs, biologiquement
déterminés dans leur ordre, qui vont le sensibiliser à
l'environnement et le rendre capable de traiter les informations
présentes dans son contexte immédiat ou pas. Le
développement du langage est lié à l'accroissement des
connexions dans le cortex cérébral : autrement dit l'augmentation
des systèmes de fibres de liaison va faciliter la coordination des aires
sous-corticales, des activités fonctionnelles corticales et vont les
intégrer dans l'ensemble des activités
cérébrales.
Pour résumer, le développement du système
neuronal dans l'activité langagière dépendra des stimuli
du contexte dans lequel l'enfant va évoluer. Changeux n'aborde pas le
langage par l'analyse des manifestations linguistiques mais exclusivement par
l'analyse du développement du cerveau et des structures biologiques.
Cela n'étant pas explicite, son étude est liée au
développement du monolingue mais sa théorie est suffisamment
aboutie pour que l'on puisse l'étendre à l'approche bilingue.
Selon ses observations l'acquisition du langage implique une relation entre le
système nerveux, des connexions neuronales et l'exposition au contexte
dans l'émergence du langage. Autrement dit lors de la naissance l'enfant
possède des zones génétiquement déterminées
à la réception de certains stimuli. Lorsque ces stimuli sont
présents dans le contexte immédiat, ils vont activer lesdites
zones et participer au développement du langage qui, au fur et à
mesure de la maturation du cerveau, vont se stabiliser. C'est pour cela qu'un
enfant qui n'est jamais exposé au langage ne le développera plus
ou très mal après le stade critique.
Sa théorie étendue au bilinguisme explique que
les stimuli présents dans le contexte bilingue étant
différents de ceux de l'enfant monolingue, l'enfant bilingue devrait
développer des structures neurologiques différentes qui vont
elles aussi se spécialiser et se stabiliser. De là, on peut
émettre l'hypothèse que ces zones mobilisées par l'enfant
bilingue, existent
chez le monolingue, en sommeil, et que lorsqu'il sera en
situation d'apprentissage d'une seconde langue, ces structures vont se
réveiller, mais se développer plus lentement si le processus de
maturation est à un stade avancé, ce qui explique qu'après
10 ans il soit plus difficile d'apprendre une nouvelle langue. Le bilingue
précoce développe donc des facultés mentales
présentes chez tous les humains mais qui ne se développeront que
dans un contexte d'acquisition spécifique : cela va donner lieu à
une sélection puis une stabilisation d'un certain système
neuronal bilingue mais seulement si l'enfant reste dans son contexte bilingue
jusqu'à la maturation de son cerveau, c'est-à-dire entre 7 et 10
ans.
2. 2. 3. 2. La période critique pour une seconde
langue
C'est la difficulté qu'ont les adultes à
apprendre une langue étrangère qui nous amène à
penser que l'acquisition d'une ou de deux langues est limitée dans le
temps. En effet dans notre première partie nous avons établi
différents types de bilinguisme, parmi lequel le bilinguisme tardif qui
s'oppose au bilinguisme précoce selon la période d'immersion dans
la langue. L'enfant développe un bilinguisme hors du cadre familial donc
nous parlerons d'apprentissage, mais le cerveau de l'enfant étant encore
malléable ses capacités d'apprentissage ne dépendent
uniquement pas d'un facteur physique, nous pouvons dire que l'enfant est dans
une période pivot où la limite entre acquisition et apprentissage
est encore fragile et où une relation affective à telle ou telle
langue facilitera son acquisition.
A la base de cette rapidité d'acquisition des deux
langues, chez le bilingue précoce, se trouve le phénomène
de plasticité du cerveau :
« A travers sa plasticité, la synapse serait
en outre à la source de la capacité d'apprentissage. [...] la
synapse est un objet dynamique, susceptible d'être modifié par son
activité ou son inactivité. ». Debru (1987 : 205).
La synapse dans sa dynamique propre, forme une des bases de la
plasticité du cerveau. Changeux17 fait
l'hypothèse que les contacts entre neurones, les synapses,
véhiculent les informations à travers le système. Ainsi
l'acquisition sera une stabilisation sélective de synapses, celles-ci
créant un chemin dans le système. Nous avons une
interdépendance entre les deux : la synapse crée le chemin dans
le système et, le système, par la confrontation au contexte,
oriente le développement de sa structure.
Le processus de myélinisation paraît jouer un
rôle fondamental dans la spécialisation de structures cognitives
propres aux langues présentes dans le contexte, impliquant l'existence
d'une limite dans l'acquisition des deux langues, celle de la fin du processus
de myélinisation. C'est à-peu-près vers l'âge de
sept ans que les connections nerveuses entre
17 Cité par Debru (1987)
les régions du langage dans le cerveau arrivent
à maturation, au-delà de cette période l'acquisition de la
seconde langue se fera avec moins d'aisance et relèvera d'un processus
d'apprentissage.
Grâce à l'avancée technologique et
scientifique de ces dernières années, notamment le
développement des recherches en imagerie par résonance
magnétique, le fonctionnement du cerveau est mieux connu. Un point
important a été mis en évidence : en fonction de
l'âge d'acquisition des deux langues ou d'apprentissage d'une langue
étrangère (chez un public adulte), les zones du cerveau qui sont
sollicitées ne sont pas les mêmes (Fayol et Kail, 2000). En
observant le cerveau d'un adulte bilingue nous remarquons que les zones
sollicitées par la langue seconde se trouvent dans des régions
différentes de la langue maternelle, alors que chez les bilingues
précoces les zones du cerveau sont superposées ce qui signifie
que les langues sont traitées indifféremment l'une de l'autre, ou
plutôt, qu'elles sont traitées par les mêmes systèmes
neuro-cognitifs (Abdelilah-Bauer 2006).
La maturation neuropsychologique entraîne une prise en
compte de l'âge auquel l'enfant est exposé à la seconde
langue : l'exposition à la seconde langue sera traitée
différemment selon le degré de maturation du cerveau et des
processus de myélinisation. Par conséquent les zones du cerveau
mobilisées pour le traitement linguistique bilingue ne seront pas
forcément les mêmes et la vitesse d'acquisition/apprentissage de
la langue seconde sera touchée.
Ainsi, l'interaction avec la seconde langue ne permettra pas
de mobiliser les mêmes structures neuronales et cognitives après 7
ans, et ne permettra plus d'influer sur ces structures et de considérer
que la langue étrangère pourrait être traitée comme
langue maternelle. Il ne serait alors plus possible d'acquérir une
langue maternelle à la fin du processus de myélinisation,
processus pendant lequel l'interaction avec les langues acquises a permis de
spécialiser et stabiliser les structures neuro-cognitives du langage.
Toutefois, il est apparu clairement que les critères de la maturation
cognitive et de l'âge sont fondamentaux pour la classification des
différents types de bilinguisme.
2. 2. 3. 3. La latéralisation des
hémisphères
La latéralisation des hémisphères est un
processus qui commence très tôt et qui serait déjà
bien en place, voire achevé entre 4 et 5 ans (Hamers et Blanc, 1986). La
mobilisation de l'hémisphère droit pour le traitement
(linguistique et analytique comme la syntaxe, la phonétique ou le
lexique) du langage est limité chez un monolingue, alors qu'il est
largement mobilisé chez un bilingue précoce. Ainsi, la
mobilisation diversifiée et beaucoup plus partagées des
hémisphères entre en jeu dans la perception et le traitement de
divers stimuli linguistiques.
Il semble alors évident que la construction du
bilinguisme a une influence majeure sur le fonctionnement neurologique et la
dominance d'un hémisphère sur l'autre. De ce fait, les bilingues
apparaissent plus bilatéraux (selon la terminologie de Jackson
cité par Faure18) que les monolingues dans
l'utilisation systématique qu'ils font de leur hémisphère
droit dans le traitement linguistique. Selon Albert et Obler (1978), cela
semble beaucoup plus important chez les bilingues à tendance dominante,
entraînant souvent la dominance d'un hémisphère sur
l'autre. Il apparaît alors que le degré de compétence de
communication dans la langue seconde influence l'implication des
hémisphères dans le traitement linguistique. Cette domination
d'une langue sur l'autre, si importante dans le débat d'une ou deux
langues maternelles, ne serait pas sans influence dans la répartition
hémisphérique des tâches linguistiques. En effet, comme
cela a été mentionné (cf. supra),
l'hémisphère droit est en relation avec le traitement de
l'espace, de la prosodie et surtout des émotions. Cet argument pourrait
influer le fait qu'il n'existerait alors qu'une langue maternelle ou alors
qu'une des deux langues est toutefois fortement favorisée par l'enfant
sur le plan affectif. Ainsi la hiérarchisation des langues ne
dépendrait pas toujours d'un contexte diglossique mais simplement d'une
relation affective à cette langue.
2. 3. Le traitement cognitif et neurologique du bilingue 2.
3. 1. La cohabitation des deux langues
Les diverses expériences menées sur les enfants
bilingues ont permis d'aboutir à la conclusion selon laquelle les
bilingues construisent puis mobilisent différentes stratégies
cognitives du traitement linguistique et communicationnel. En effet, si les
bases fondamentales du langage sont neurologiquement les mêmes que celles
d'un monolingue, un enfant bilingue possède des systèmes
neurocognitifs qui lui sont propres, qui ont été
développés pour un traitement spécifique des deux langues.
Des expériences portées sur l'aphasie chez des bilingues ont
conduit (Vaid et Lambert,1979) à considérer qu'il existait un
18 « Introduction à la neuropsychologie »,
psychologie cognitive, cours de S. Faure, documents de cours 2003-2004.
traitement neurologique du bilinguisme différent de celui
d'un monolingue, l'enfant possédant une organisation
cérébrale et cognitive propre à chaque langue.
Les diverses expériences (Walters et Zatorre,1978) ont
permis de montrer une plus grande implication de l'hémisphère
droit chez les enfants bilingues que chez les enfants monolingues, en raison
d'une hiérarchisation affective des deux langues. De plus, il a pu
être constaté que l'implication des hémisphères ne
variait pas selon les langues impliquées dans le bilinguisme, et que
chacune des deux langues possédait la même mobilisation
neurologique des hémisphères droit et gauche. Il n'existe donc
pas de discrimination sur le plan neurologique, entre les langues
impliquées dans le bilinguisme, ni entre les deux langues d'un bilingue
et donc indépendamment du degré de compétence de
communication dans chacune des langues. Il apparaît alors que la
mobilisation neurologique est identique pour les deux langues dans le cas du
bilinguisme précoce. Les deux langues relèvent de la mobilisation
des mêmes zones neurologiques. Toutefois, la différence se situe
dans le type de système cognitif et linguistique mobilisé,
permettant ainsi la compréhension et la production de deux
systèmes différents, même si ces systèmes sont
traités par les mêmes zones neurologiques. Les différences
cognitives vont alors porter, en relation avec la notion de
hiérarchisation affective, sur les compétences de communication
dans chacune des langues. Ces différences sont (comme cela a
été défini ; cf. partie sur la diglossie) à
caractère diglossique, impliquant le fait que sur le plan affectif et/ou
contextuel, une langue est favorisée, impliquant des compétences
de communication différentes. Ces différences de
compétences vont alors peut-être avoir des influences sur la
maîtrise d'un des deux systèmes, essentiellement la taille du
vocabulaire dans chacune des deux langues, qui ne sera pas le même.
2. 3. 2. L'impact de la seconde langue sur le
système cognitif
L'âge auquel un enfant est confronté à la
seconde langue a une importance non négligeable dans la
latéralisation des hémisphères et va jouer un rôle
important dans le rôle de chaque hémisphère dans le
traitement linguistique (Chevrie/Narbonna, 2007). Il existe alors diverses
stratégies cérébrales et divers mécanismes
neuropsychologiques impliqués dans le traitement du bilinguisme et des
deux langues, sans pour autant avoir un quelconque rapport, comme cela a
été expliqué avant, avec la compétence de
communication dans chacune des langues : bien que les facteurs dont
dépend l'acquisition liée à des prédispositions
génétiques, c'est l'exposition au contexte qui va être
déterminant dans le bilinguisme de l'enfant.
Mais pour Caroll (1978), l'âge de la confrontation
à la seconde langue aurait une importance majeure dans le rôle
joué par chaque hémisphère dans le traitement linguistique
comme, par exemple, le degré d'implication de l'hémisphère
droit. Il est apparu que le bilinguisme équilibré impliquait une
plus grande dominance de l'hémisphère gauche (donc un traitement
analytique et linguistique des deux langues, ainsi qu'un code switching
parfait, sans erreur ni interlangue), alors que le bilinguisme dominant
impliquerait une plus grande dominance de l'hémisphère droit,
sans pour autant, nous le rappelons, avoir une incidence sur le degré de
compétence linguistique. A ce stade, seul le fait d'une mobilisation de
stratégies cognitives différentes peut être
avancé.
Les différences hémisphériques seraient
alors provoquées par la perception du contexte et l'âge auquel
l'enfant est confronté à ce contexte, nécessitant un
traitement catégoriel et organisationnel du monde différent de
celui d'un enfant monolingue et dépendrait du degré d'implication
des deux langues en contexte, ainsi que la fréquence de sollicitation de
chacune. Cela serait alors les variations de la fréquence d'usage qui
influeraient sur la compétence de communication. Ainsi, les
considérations neurologiques du bilinguisme tendent à souligner
une cause diglossique aux variations des compétences de communication,
à la domination d'une langue sur l'autre. Cependant, si la confrontation
aux contextes et l'âge d'exposition à la seconde langue
influenceraient la dominance d'un hémisphère sur l'autre, une
fois le processus de latéralisation établi, chaque langue semble
neurologiquement mobilisée de la même manière et selon les
mêmes processus neuropsychologiques établis (cf. supra : « la
théorie unitaire »).
Ces deux stades sont à mettre en relation avec le fait
que l'enfant développe, dans un premier temps, des règles qui
sont communes aux deux langues, puis, dans un second temps, des règles
de différenciation des deux langues (Hamers et Blanc, 1986). Ces
règles de différenciation relèvent d'une plus grande
influence de l'hémisphère droit, ce qui justifierait que l'enfant
bilingue possède une plus forte implication de cet
hémisphère dans la pratique langagière.
Pour conclure sur cette partie, je dirais que les implications
du cerveau dans le bilinguisme semblent être de première
importance. En effet, le cerveau est apparu comme étant à la fois
à la base et au centre du développement du langage, celui-ci
étant totalement dépendant d'abord au niveau des
procédures de myélinisation puis de latéralisation des
hémisphères, ce qui a conduit à considérer que le
fonctionnement neurocognitif d'un enfant bilingue est légèrement
différent de celui d'un enfant monolingue au niveau de la mobilisation
des hémisphères dans le sens où ce ne sont non pas une
langue mais deux qui
doivent être différenciées et
traitées. Par conséquent un enfant bilingue possède un
hémisphère droit beaucoup plus impliqué dans les processus
linguistiques qu'un enfant monolingue. Avant tout, il va créer des
règles cognitives communes aux deux langues, puis développer des
stratégies de différenciation. Cependant, il faut souligner
qu'aucune de ces particularités de l'enfant bilingue n'a d'incidence sur
la compétence de communication qui, elle, semble être
contextuellement déterminée.
3. Le bilinguisme précoce
Parmi les différents types de bilinguisme, il a
été mis en évidence l'existence d'un bilinguisme
précoce simultané, lorsque les deux langues sont présentes
dans l'environnement de l'enfant dès sa naissance, et d'un bilinguisme
précoce consécutif lorsque la seconde langue est introduite avant
l'âge de trois ans. Dans cette partie, ne sera développé
que le type de bilinguisme en relation avec le corpus étudié dans
le cadre de ce mémoire, le bilinguisme précoce simultané.
Le bilinguisme lié à une acquisition (par opposition à
apprentissage), est dit précoce car il se construit avant 6 ans. C'est
ce type de bilinguisme qui se trouve actuellement au centre des
préoccupations des chercheurs et des parents bilingues ou monolingues
expatriés. Dans cette étude nous préférerons parler
de bilinguisme simultané et consécutif.
3. 1. Le contexte du bilinguisme précoce
simultané
Dans la plupart des cas, le bilinguisme précoce
simultané intervient lorsqu'un enfant naît au sein d'un couple
mixte dont chacun des parents possède une langue maternelle
différente de celle de l'autre, mais dont chacun possède
également une certaine compétence de communication dans la langue
maternelle de son conjoint. Dans ce genre de contextes, il n'est jamais
à exclure l'existence d'idéologies liées à la
langue, si l'une est dévalorisée car n'étant pas celle de
la communauté ou la langue officielle du pays, selon qu'elle
représente l'ascension sociale ou non, etc.
Ainsi, les parents pourront adopter certaines attitudes
spécifiques qui pourront influencer la perception que l'enfant va avoir
de chacune des langues, pouvant entraîner parfois un bilinguisme dominant
dès les premières années. Toutefois, de nos jours,
l'importance que requièrent des maîtrises plurilingues sur le plan
professionnel, incite de nombreux parents à transmettre les deux langues
à leur enfant.
Rimbaud Sophie L'acquisition du genre et le code mixing
chez le bilingue précoce 2009 3. 2. Le système langagier
en construction : un ou deux systèmes ?
La première idée qui s'est
développée au début de la recherche, était que les
enfants bilingues de naissance acquièrent dès le début de
leur acquisition, un système commun aux deux langues qui va, avec le
temps, se scinder en deux systèmes, un pour chaque langue. Cette
hypothèse a été rapidement acceptée par la
communauté scientifique et ses défenseurs les plus fervents
furent Volterra et Taeschner (1978)19 ces chercheurs ont
tenté de prouver cette théorie selon laquelle les enfants entrent
dans le langage avec un système linguistique qui deviendra deux
systèmes au fur et à mesure de l'acquisition du langage. Volterra
et Taeschner ont dénombré trois stades d'acquisition de la
grammaire qui montreraient que les systèmes passeraient progressivement
de un à deux en étudiant en parallèle, les
stratégies mises en place par les enfants pour acquérir chaque
langue.
Tout d'abord, l'enfant entre dans le langage avec un
système uniquement lexical pour les deux langues, dans un second temps,
alors qu'il va développer un système syntaxique pour les deux
langues, le répertoire lexical commun va se diviser créant deux
systèmes pour chaque langue. Enfin, dans un troisième et dernier
temps, le système syntaxique se divise en deux ainsi l'enfant, parti
d'un seul système linguistique commun aux deux langues fini par en
développer deux, un pour chaque langue. Selon Volterra et Taeschner
cette différence de système n'apparaît que lorsqu'un enfant
adapte sa langue à celle de l'interlocuteur. Cette théorie fut un
pas important dans l'étude de l'acquisition du bilinguisme
précoce chez les enfants car elle avance que d'une part les enfants ne
naissent pas avec deux systèmes linguistiques, ceux-ci se
développent en trois temps dès que l'enfant commence à
parler, et d'autre part les enfants sont psychologiquement capables de
comprendre qu'ils parlent deux langues différentes et linguistiquement
capables de s'adapter spontanément à la langue de leur
interlocuteur.
Cette hypothèse fut reprise et améliorée
en particulier par les travaux de Genesee en 1989. Contre l'idée
communément acquise que les enfants apprennent à parler deux
langues en construisant dès le début deux systèmes
linguistiques différents, il développe l'hypothèse selon
laquelle les enfants passent par un stade durant lequel ils ne sont pas
capables de faire de différence entre les deux langues. Il a
élaboré cette théorie en analysant la capacité
qu'avaient les enfants à mélanger les langues : si les enfants
mélangeaient les langues c'est qu'au début ils ne pouvaient pas
faire de différence entre les deux et qu'ils n'avaient donc qu'un
système de représentation. Il confirmera cette hypothèse
en ajoutant qu'à partir de l'étude d'expériences
empiriques basées sur l'étude du code
19 cité par Deuchar et Quay, 2000)
switching, les enfants sont psychologiquement et
linguistiquement capables de faire la différence entre les deux langues
apprises et parlées et qu'en fonction des contextes ils s'adaptent
à la langue de l'interlocuteur. En utilisant la langue de
l'interlocuteur, l'enfant montre « sa conscience du contexte social »
nous parlerons alors de différenciation pragmatique (Abdelilah-Bauer
2006 : 77).
À la suite de ces considérations, plusieurs
éléments peuvent être soulevés : à quel
niveau de leur développement les enfants bilingues utilisent-ils deux
systèmes langagiers distincts ? Swain (1972) donne l'hypothèse
suivante : l'enfant développe d'abord des règles linguistiques
communes aux deux langues. L'enfant bilingue doit développer
différentes stratégies qui vont lui permettre de
différencier les deux langues. Elle va plus loin en disant que l'enfant
développe un système commun pour les règles
partagées par les deux systèmes et deux systèmes
différents pour certaines règles. Le temps de l'acquisition de
certaines règles sont attribuées au fait que les enfants
bilingues doivent développer différentes stratégies.
Il est très possible que la confrontation à deux
langues, à deux systèmes linguistiques, implique un
élargissement du traitement cognitif des deux langues. En effet,
l'enfant mobilise des stratégies de différenciation qui lui
permettent de traiter différemment les systèmes syntaxiques,
lexicaux et sémantiques.
3. 3 Les premiers mots de l'enfant bilingue
En parlant de l'enfant bilingue précoce
simultané, Genesee (2005) indique que, la plupart du temps, les travaux
sur le devenir bilingue donnent une approche souvent calquée sur le
développement d'un monolingue. Cependant, depuis les travaux de Volterra
et Taeschner (1978, cité par Genesee 2005), il a été mis
en évidence que les étapes du développement du bilingue
étaient différentes de celles d'un monolingue parce que le
bilingue développe deux systèmes au lieu d'un seul (Cantone
2007).
Les premiers mots d'un enfant bilingue vont varier selon les
langues qu'il emploie ; nous ne pouvons pas donner d'explication sur le choix
du type de mot que va d'abord employer un enfant. Ces différences sont
d'abord dues à la fréquence à laquelle l'enfant est
confronté à chacune des langues, et à quelle
fréquence il est sollicité dans chacune d'entre elles. Si les
mêmes mots ne sont pas appris dans les deux langues en même temps,
alors les deux lexiques ne progressent pas de la même manière en
même temps. D'une part, il développera plus rapidment le lexique
de la langue dominante, d'autre part, les mots que
l'enfant va employer sera également en relation avec le
type de lexique auquel il est confronté dans le cadre familial. Il
existerait donc un rapport statistique entre ce qui sera perçu (ainsi
que la fréquence de perception de chaque langue) et ce qui sera produit
par l'enfant (Grosjean, 2008).
En nous référant aux travaux de Volterra et
Taeschner dans un premiers temps, l'enfant bilingue précoce se constitue
un seul système lexical, contenant à la fois les mots des deux
langues.
« In the first stage the child has one lexical system
which includes words from both languages, in this stage the language
development of the bilingual child seems to be like the language development of
the monolingual child. »(Volterra et Taeschner 1978, cité par
Genesee et Nicoladis, 2005, 1).
Durant cette période, l'enfant ne distingue pas les
deux langues et a un système de développement proche de l'enfant
monolingue : l'enfant bilingue, comme le monolingue, ne possède qu'un
seul système, essentiellement composé d'éléments
lexicaux : il prononce indifféremment des mots de chacune des langues,
quelque soit le contexte (Genesee 2005. C'est à ce stade que vont
apparaître les premiers éléments de code-mixing (cf.
définition infr), dans lequel l'enfant fait intervenir, dans le mot
d'une langue, des éléments (phonétiques, morphologiques)
de l'autre langue. Néanmoins il n'existe pas encore de relation
pragmatique, de ce fait l'enfant ne va pas utiliser qu'une langue en fonction
du contexte ou de la langue du locuteur.
Cependant, Genesee et Nicoladis (2005) constatent que
l'exposition aux deux langues va faire que ces deux langues ont une influence
l'une sur l'autre, conduisant à la formation de
patterns20 qui vont progressivement se dissocier du type de
patterns d'un monolingue.
« An additional issue is whether exposure to two
languages simultaneously influences the pattern of development so that it
differs from that observed in monolingual learners. Evidence that the patterns
are different could give us insights as to how the processes that underlie
language acquisition cope with dual language input. » (Genesee et
Nicoladis, 2005 : 1).
En effet, l'enfant acquiert des mots de traduction
équivalente dans l'une et l'autre
langue de façon très importante dès 1 ; 6,
ce qui penche en faveur du fait que l'enfant
commence à développer deux systèmes lexicaux
distincts, malgré un usage indifférencié.
« However, evidence that bilingual children acquire
translation equivalents could be used to argue that they are not acquiring one
language, but two (Patterson & Pearson, 2004). [...]The high rate of
translation equivalents, a clear violation of mutual exclusivity, suggests that
at
20 C'est un concept qui n'a pas d'équivalent en
linguistique. La traduction française est « modèle »
least from this age on children have two distinct lexical
systems. » (Genesee et Nicoladis, 2005 : , 6-7).
Ensuite vient la seconde étape mentionnée par
Volterra et Taeschner (1978, cité par
Genesee et Nicoladis 2005), étape pendant laquelle
l'enfant possède deux systèmes
lexicaux différenciés, mais employés dans un
seul et même système syntaxique.
« [...] In the second stage, the child distinguishes two
different lexicons, but applies the same syntactic rules to both languages .
» (Genesee et Nicoladis 2005 ; 1).
L'enfant, au niveau du lexique, différencie les deux
systèmes mais quand il commence à acquérir la syntaxe il
commence au début et ne développe qu'un système pour les
deux langues. Durant cette période, le code-mixing (cf. partie infra sur
la définition du code mixing) va prendre une place importante dans les
productions de l'enfant. Le fait qu'il n'y ait qu'un seul système pour
les deux langues impliquerait une interférence de mots d'une langue sur
l'autre.
Souvent, le code-mixing se situe alors au niveau de l'ordre
des mots comme la construction d'un verbe d'une langue avec un pronom personnel
sujet de l'autre langue, ou alors l'insertion d'un adjectif de l'autre langue,
ou encore l'insertion, dans le cas d'un bilinguisme français-anglais,
d'adjectifs français avant le nom anglais, alors qu'en français,
l'adjectif est postposé au nom. Il y aurait donc, à ce stade, des
transferts translinguistiques d'éléments morphosyntaxiques d'une
langue à une autre :
« A mitigating factor in cross-linguistic transfer
could be language dominance. Children might be more likely to incorporate
structures from their dominant into their weaker language, than vice versa
(Döpke, 1998; Yip & Matthews, 2000; Petersen, 1988). [...] At the same
time, there is evidence of cross-linguistic transfer of specific
morphosyntactic features from one language into the other. » (Genesee et
Nicoladis 2005 , 1).
L'interférence est un signe de dominance linguistique,
celle-ci pourrait apparaître plus tôt mais comme le fait remarque
Genesee, les chercheurs en bilinguisme se focalisent plus sur la production que
sur la perception. À cette étape du développement bilingue
apparaîtrait la dominance d'une des deux langues : le système
linguistique de la langue dominante va imposer son fonctionnement sur le
système linguistique de la langue dominée. Le transfert
translinguistique n'opèrerait alors que dans un sens unique, de la
langue dominée vers la langue dominante, et non l'inverse.
Enfin, dans un troisième temps, l'enfant maîtrise et
différencie les systèmes lexicaux et syntaxiques dans chaque
langue :
« In the third stage the child speaks two languages
differentiated both in lexicon and syntax... » (Genesee et Nicoladis 2005
, 1).
La différence entre les deux langues se fait
très tôt, dès que les systèmes se séparent :
à notre connaissance les auteurs ne donnent pas d'âge pour la
maîtrise des deux systèmes mais si nous partons du même
postulat que chez le monolingue, l'enfant bilingue devrait acquérir un
système syntaxique plus complexe que l'association de deux mots, entre 3
et 4 ans. Cependant, Cantone (2007) rappelle qu'un enfant bilingue
précoce, étant exposé à deux langues,
possède un temps d'exposition à chacune des langues
inférieur au temps d'exposition d'un monolingue à sa langue
maternelle, ce qui entraînerait un léger retard du
développement des systèmes de ses deux langues chez le bilingue,
mais que ce retard est très rapidement comblé à partir de
l'âge de deux ans.
3. 4. Définition du code mixing
Le code-mixing est défini, chez un bilingue (Genesee
2005 ; Cantone 2007), comme l'usage d'éléments d'une langue
parlée (phonétique, syntaxique, lexical), dans l'autre langue
parlée.
« It is the use of elements (phonological, lexical,
morphosyntactic) from two languages in the same utterance or stretch of
conversation. It can occur within an utterance (intra-utterance mixin-e.g.,
«see cheval»[horse]) or between utterances (inter-utterance mixing).
Rates of code-mixing in children vary depending on the form of mixing (intra
versus inter-utterance), the nature of the mixed element (function versus
content words), the language of the conversation (the child's less versus the
child's more proficient language), and the context (with interlocutors who are
bilingual versus those who are monolingual, for example). » (Genesee et
Nicoladis 2005 , 12).
Au cours du premier stade, dans l'acquisition lexicale d'une
langue à l'autre de mots qui peuvent avoir une traduction dans l'autre
langue. Il arrive qu'un mot soit sujet au code-mixing, mais que ce même
mot possède un équivalent traduit, dans l'autre langue, et que
cet équivalent ne soit pas sujet au code-mixing. Cela
révèle alors une probable dominance d'une langue sur l'autre.
Au second stade, la syntaxe est, la plupart du temps,
respectée, la syntaxe appelle une certaine structure (lexicale,
phonologique, e. g. : un déterminant appelle un nom). En effet, selon
Genesee (2005) le mélange n'interviendrait qu'au moment où les
deux systèmes syntaxiques sont parfaitement parallèles et
superposables.
« Evidence for grammatical-gap filling comes from
Petersen (1988) and Lanza (1997b) who report that bilingual children often mix
function words and inflectional morphemes from their more proficient language
with content words from their less proficient language, but seldom
the reverse, and from Gawlitzek-Maiwald & Tracy (1996)
who argue that young bilingual children use syntactic patterns from their
stronger language to bootstrap into the grammar of their less proficient
language. » (Genesee et Nicoladis 2005 , 15).
Le code-mixing dépend alors de la nature de
l'élément mélangé, du statut de la langue
utilisée par l'interlocuteur. De ce point de vue, le code-mixing est
presque indissociable du choix de la langue et du développement d'une
compétence pragmatique basée sur le choix de la langue et de la
nature de cette langue (dominante ou dominée). Par conséquent le
mélange est à un sens, c'est la langue dominante qui fait
irruption dans la langue dominée, et non l'inverse. En effet, la
domination a été constatée du fait que l'enfant
était parfaitement capable de différencier les deux langues, mais
que seule une faisait irruption dans l'autre (Paradis et Genesee 1996,
cité par Cantone 2007). Il y aurait donc à un moment, comme nous
l'avons évoqué précédemment, un système
linguistique plus élaboré que l'autre, plus abouti,
peut-être en relation avec le temps d'exposition à chaque langue
(Cantone 2007).
L'existence d'un seul système syntaxique pour les deux
langues induirait des cas de particularités qui seraient agrammaticaux,
mais nous n'en n'avons pas trouvé. Le code-mixing est alors
grammaticalement contraint et suit une syntaxe précise. Il est toujours
grammatical. Il garde la syntaxe de la langue dominante par exemple dans
l'occurrence « une red chaise », l'enfant bilingue considère
l'anglais comme langue dominante et dans le code switching c'est la syntaxe de
cette langue qui dominera mais il ne dira jamais « une rouge chaise »
car il n'y a pas concurrence de systèmes et qu'en français
l'adjectif est postposé.
Selon Genesee (2005) le troisième stade est
l'interférence linguistique ; elle est due au fait que l'enfant est en
train de séparer l'usage des deux langues :
« In the third stage the child speaks two languages
differentiated both in lexicon and syntax... » (Genesee et Nicoladis 2005,
1).
Cette séparation est liée à l'acquisition
d'une compétence pragmatique de l'usage des langues : selon les
contextes et les interlocuteurs, l'enfant adapte sa langue à celle de
son interlocuteur. Il faut également souligner, selon Genesee (1989,
cité par Cantone 2007), que le code-mixing interviendrait, dans
certaines situations pour pallier à un manque dans une des deux langues,
au niveau d'un manque dans le répertoire ou s'il lui manque un aspect
syntaxique. Le développement et la maîtrise du système
linguistique ne sont pas les mêmes dans les deux langues, et une langue
est plus développée que l'autre, peut-être que
se serait la langue la dominante la plus avancée. Le
temps d'exposition aux langues n'étant pas la même dans le
contexte, l'enfant a pu acquérir des mots dans une langue qu'il n'a pas
dans l'autre : il utilisera alors le mot qu'il connaît dans la langue
où il ne le connaît pas. Dans ce cas, l'interférence de la
langue dominante serait pour compléter la langue dominée, et le
code-mixing disparaîtrait dans le temps avec la maîtrise des deux
systèmes.
En résumé, le code-mixing serait
révélateur d'une dominance d'une langue sur l'autre. Au premier
stade, l'existence de mots sémantiquement équivalents peut donner
lieu, sur l'un des mots d'une langue, à un code-mixing de niveau
phonologique ou morphologique, sans que le mot de l'autre langue soit sujet au
code-mixing. Au second stade, une syntaxe dominée par un modèle
qui est proche de celui de la langue dominante. Au troisième stade,
l'interférence lexicale peut pallier à un manque de vocabulaire
dans la langue dominée et un système syntaxique de la langue
dominante peut pallier au manque de celui de la langue dominée.
« While mixing to fill lexical gaps because of
incomplete mastery of their languages is one explanation of child code-mixing
[...]. »(Genesee et Nicoladis 2005, 15).
Les enfants bilingues ne mixeraient alors pas les structures
et les mots appris plus vite dans une langue que dans une autre, alors que les
structures acquises plus tardivement dans une langue que dans une autre
seraient plus souvent sujettes au code-mixing. Le code-mixing pourrait alors
être en relation avec la précocité du système : ce
qui est acquis plus tôt dans une langue, par rapport à une autre,
sera moins sujet au code-mixing, et, au contraire, serait plus susceptible de
faire irruption dans la langue où l'équivalent n'existe pas
encore. La langue qui se construirait le plus vite, avec un temps d'exposition
à la langue supérieure à celui de l'autre langue, serait
celle dite « dominante ». Cantone (2007) et Genesee(2005) posent le
postulat que les enfants bilingues mixeraient plus dans une langue que dans une
autre, et que la langue la plus sujette au code-mixing serait la langue
dominée.
« [...] Gawlitzek-Maiwald & Tracy (1996) who argue
that young bilingual children use syntactic
patterns from their stronger language to bootstrap into the
grammar of their less proficient
language. Both lexical and morpho-syntactic mixing attest to
the young bilingual child's ability
to access and use creatively the lexical and
morpho-syntactic resources of both languages
on-line during language production. » (Genesee et
Nicoladis 2005, 15).
Néanmoins Genesee (2005) fait aussi part d'une
constatation selon laquelle l'enfant reproduit le fonctionnement parental :
l'enfant reproduit le code-mixing de ses parents, c'està-dire qu'il
mélange dans la même langue que ses parents produisent du
code-mixing.
« In particular, parents who adopt what Lanza dubs
«bilingual discourse strategies», such as
«move-on» or «expressed guess»
strategies that imply that the parent has understood what the
children are saying when they code-mix, tolerate and
encourage further code-mixing. Parental discourse strategies may, therefore, be
one way in which children learn to make appropriate language choices, at least
with familiar interlocutors, and as well offers an explanation of some of the
variation that characterizes children in different families » (Genesee et
Nicoladis 2005, 18-19).
L'enfant se fonde alors sur certains patterns du code-mixing
parental qu'il mémorise et reproduit.
3. 5. Le code mixing chez le bilingue précoce
Lorsque l'enfant bilingue possède la traduction
équivalente d'un mot dans l'autre langue, ce n'est pas pour autant qu'il
emploiera indistinctement les deux mots. Si au premier stade, l'utilisation de
mots des deux langues est indistinct quelque soit le contexte, à partir
du second stade, l'utilisation d'un mot plutôt que sa traduction peut
s'expliquer de deux façons : la première, parce que le mot
prononcé appartient à une langue considérée comme
dominante par l'enfant, la seconde en fonction du contexte et de la langue
parlée par l'interlocuteur. L'adaptation à l'interlocuteur est
très importante : en effet, Lanza (1997, cité par Deuchar et
Quay, 2000), dit que l'enfant préfère utiliser la même
langue que son interlocuteur.
Ce choix des langues est souvent lié au
développement d'une compétence pragmatique : l'enfant relie un
usage à un contexte, souvent un interlocuteur, spécifique. Il a
été constaté alors que l'enfant bilingue était
très tôt capable d'adapter sa langue à celle de son
interlocuteur (Deuchar et Quay, 2003 et Genesee et Nicoladis, 2005) :
« There is considerable evidence that bilingual
children's code-mixing is sensitive to contextual variables, including those
related to interlocutor [...] topic (Lanvers, 2001), and the purpose of the
interaction (Vihman, 1998). » (Genesee et Nicoladis 2005, 15-16).
Les enfants bilingues ont tous la capacité d'adapter
leur langue à la situation (Romaine 1984 et Andersen 1990, cités
par Deuchar et Quay 2003). L'enfant peut choisir une langue de façon
arbitraire : ce choix est aussi en relation avec le développement de la
compétence de communication21 qui, si elle est
inégale, peut favoriser une langue au profit d'une autre. Comme nous
l'avons dit précédemment la langue dominante est souvent
considérée comme celle où la compétence de
communication est la plus grande : c'est la langue dans laquelle l'enfant
s'exprime le plus facilement et dans un plus grand nombre de situations que
dans l'autre langue. Le choix de cette langue est alors souvent
conditionné par le contexte, car pour développer une plus grande
compétence de communication, il faut que l'enfant ait
été
21 La compétence de communication se
définit comme la capacité de communiquer avec différents
locuteurs dans leur langue respective.
exposé plus longtemps à cette langue qu'à
l'autre. L'enfant maîtrise le choix de sa langue en fonction du contexte,
mais ce choix, imposé par une plus grande exposition à une des
deux langues, peut révéler, dans l'environnement de l'enfant,
l'existence d'un contexte diglossique dans lequel les deux langues auxquelles
l'enfant est exposé, n'ont pas le même statut, ni la même
répartition temporelle et contextuelle dans la communauté.
Il apparaît alors que le choix de la langue
dépende fortement de paramètres contextuels diglossiques,
développés dans la partie qui y a été
consacrée. Si l'enfant montre un grand attachement identitaire à
la langue il préfèrera parler la langue qu'il aura
associée comme tenant de son identité (McClure 1981, cité
par Deuchar et Quay). Le code-mixing révèle la langue dominante,
celle choisie pour être mixée avec l'autre langue, que ce soit
pour s'adapter un interlocuteur, ou pour pallier à un
développement plus tardif de la deuxième langue : les carences
lexicales ou syntaxiques peuvent être compensées par la langue qui
possède les éléments qui n'existent pas encore dans
l'autre langue. Mais le choix de la langue ne peut avoir lieu (Nicoladis et
Genesee 1996, cités par Deuchar et Quay) que si les deux langues
possèdent un répertoire suffisamment important pour être
employées dans des contextes variés et spécifiques, et
lorsque les traductions d'une langue à l'autre sont en nombre suffisant
et significatifs. Ces choix des langues dépendent alors d'une
compétence pragmatique qui s'acquiert parallèlement au
développement des deux langues et qui lui permet d'apprendre quelle
langue il faut utiliser en fonction du contexte.
Lorsque le choix de la langue devient purement contextuel et
diglossique alors la quantité de code-mixing diminue : l'enfant ne
mixera plus avec un interlocuteur dont il parle la même langue. Au fur et
à mesure que l'enfant grandit le code-mixing devient plus une pratique
linguistique délibérée qu'un simple automatisme
d'acquisition ; Dans ce cas, Genesee et Nicoladis (2005) notent que le choix du
code-mixing a une fonction pragmatique, par exemple une fonction d'emphase,
afin d'insister sur un mot.
« Lanvers (2001) reports that her two German-English
children (1;6 to 2:11) used language for emphasis (see also Goodz, 1989) and
appeal, to quote a parent, and for topic shift (see also Vihman, 1998 ). »
(Genesee et Nicoladis 2005, 16).
Ce choix paraît contributeur de la compréhension
de l'échange, par la facilité du décodage de l'intention
de l'information. Lorsque l'enfant se trouve dans un contexte où il doit
parler la langue qu'il maîtrise le moins il pourra utiliser le
code-mixing pour pallier à ce manque linguistique : dans ce cas c'est la
compétence de communication qui sera l'élément
déclencheur du code-mixing. Cependant, les problèmes liés
à la compétence de communication se comblent vite, dans la mesure
où l'enfant développe très rapidement les
compétences qui lui manquent. Lorsque l'enfant
évolue dans un contexte social, hors du cadre familial, il va vite
combler ce manque dans sa compétence de communication, car ce retard est
lié au processus de socialisation : parallèlement à la
nécessité de communiquer avec des interlocuteurs, nous assistons
à un développement rapide des
compétences22.
L'usage du code-mixing peut alors faire partie
intégrante de la compétence de communication, et plus encore s'il
appartient au processus de socialisation langagière dans la mesure
où dans les communautés bilingues il faut s'insérer,
pratiquer des formes spécifiques de code-mixing. Ainsi, comme cela a
été abordé, le choix de la langue ou/et du code-mixing
dépend fortement du contexte diglossique dans lequel l'enfant
évolue. Un enfant qui évolue dans un cadre familial dans lequel
les parents imposent un contexte monolingue l'enfant réduira
conséquemment son code-mixing, voire le fera disparaître.
3. 6. Le code switching
Le code switching peut apparaître à n'importe
quel moment dans le discours d'un bilingue (Cantone 2007). Sur un plan
cognitif, les deux langues sont toujours actives, mais le sont encore plus dans
un contexte bilingue. Cette particularité cognitive permet
d'établir la définition du code switching : ce serait alors la
capacité volontaire à faire intervenir la deuxième langue
dans le discours. Passer ainsi d'une langue à l'autre dans un discours
se rapproche de l'utilisation du code-mixing mais nécessite un effort
supplémentaire : en contexte monolingue l'enfant ne mixe pas mais
switche et cette opération demande un effort cognitif
supplémentaire. Nous pouvons néanmoins observer l'existence d'un
code switching en contexte bilingue à condition qu'il soit le
résultat d'une intention volontaire soulignant ou facilitant le
décodage de l'intention communicative pour l'interlocuteur. En effet,
dans ce dernier cas, si l'emphase n'était pas volontaire nous aurions
affaire à du code-mixing, code défini précédemment,
dans tout contexte bilingue. Dans ce contexte les deux langues sont
cognitivement activées, beaucoup plus qu'en contexte monolingue. Au
niveau cognitif si l'enfant ne fait pas d'effort pour passer d'une langue
à l'autre nous parlerons de code-mixing alors que s'il y a un mouvement
volontaire de la part de l'enfant nous parlerons de code switching.
La frontière entre code-mixing et code swicthing est
fine et la différence est délicate et la différence
diverge selon les auteurs : C'est pour cela que nous nous
réfèrerons à la définition de Myusken :
22 Cependant si la langue dominée n'est pas
parlée hors du cadre familial, alors le fossé créé
entre les deux langues ne se comblera pas et l'enfant parlera la langue
dominée sans en développer toutes les compétences de
communication.
« [...] all cases where lexical items and grammatical
features from two languages appears in one sentence [...] the more commonly
used term code switching will be reserved for the rapid succession of several
languages in a single speech event » (Muysken 200023,
cité par Cantone 2007 ; 56).
Le code switching apparaît alors comme un choix
délibéré en fonction de l'interlocuteur, du contexte, du
sujet de la conversation, et de l'utilité pragmatique de recourir au
code switching, sans enfreindre les codes sociolinguistiques, et en respectant
les contraintes grammaticales spécifiques à l'intérieur de
laquelle s'insère le code switching (Cantone 2007). Mais avant tout, il
faut souligner les effets communicatifs du code switching, brièvement
abordés auparavant. Le code switching est alors appréhendé
comme une stratégie communicative (Cantone 2007). Son usage peut
être sémantique, afin d'employer un mot qui n'a pas
d'équivalent exact dans l'autre langue, ou qui apporte une nuance que
l'autre mot n'a pas dans sa définition ; il peut être pragmatique,
en posant une emphase sur le mot objet du switch ; il peut être social et
faire partie d'un style socioculturel ; il peut également être
purement rhétorique, afin de capter l'attention de l'interlocuteur.
Le code switching se manifeste à travers trois
phénomènes spécifiques (Cantone 2007), l'insertion,
lorsque des éléments d'une deuxième langue sont
insérés dans la langue parlée. Le transfert qui
présuppose un calque parfait des structures syntaxiques des deux
langues, et l'alternance d'un élément par un autre dans la
même position syntaxique, en plaçant un mot pouvant exercer
l'exacte fonction syntaxique du mot substitué.
23 MUYSKEN P. (2000) Bilingual speech : a typology
of code mixing, Cambridge : Cambridge University Press.
3. 7. Synthèse de développement du langage chez
le monolingue :
L'acquisition est un processus naturel, long et complexe. Si
cette acquisition vient naturellement en interaction avec un contexte, elle
doit passer par des étapes successives. Le processus par étapes
est le même pour l'enfant monolingue et bilingue : dans une étude
sur le bilinguisme précoce simultané, il est nécessaire
d'établir un parallèle entre ces deux processus d'acquisition,
pour pouvoir établir le profil de l'enfant que nous allons
étudier, à la fois dans l'acquisition du langage et genre.
Néanmoins, l'acquisition du monolingue n'étant pas notre sujet,
nous ne rentrerons pas dans les détails de cette acquisition.
La période pré-linguistique
précède l'installation du langage. Pendant les six premiers mois
de la vie l'activité du bébé est centrée sur la
perception : à cet âge sa compétence de discrimination est
particulièrement développée, il est capable de discriminer
des sons qui ne sont pas dans sa langue maternelle. Cette particularité
explique pourquoi, dans le cadre du bilinguisme, un enfant est réceptif
à deux langues différentes ou plus. De la naissance à 6
mois l'enfant produit des vocalisations qui vont se structurer pour donner
entre 6 et 10 mois un babillage « canonique » (les syllabes sont
soumises à un ordre tel qu'il sera dans le langage normé).
Dès 9 mois, l'enfant est capable de comprendre des mots isolés
qu'il a fréquemment entendu.
La période linguistique commence, du point de vue de la
production, vers 12-13 mois lorsque l'enfant prononce son premier mot. Alors
qu'il babille encore il est capable de nommer des noms (papa, maman, son
prénom) et les objets les plus fréquent de son environnement. Il
commence à acquérir des éléments de syntaxe : on
parle alors de babillage mixte.
Entre 18 et 24 mois l'enfant connaît une explosion
lexicale. Cette explosion s'exprimer dans les productions de l'enfant vers la
fin de la première année, au début de la seconde,
associé à un début de complexité syntaxique :
l'enfant s'exprime en style télégraphique sans morphèmes
grammaticaux. L'explosion grammaticale a lieu entre 2 et 3 ans avec
l'acquisition des morphèmes (conjugaison de verbes, accord de genre de
l'adjectif, mots fonctionnels). A partir de là, sa production gagnera en
complexité syntaxique et ne cessera de se développer. Ainsi vers
4 ans la parole de l'enfant est construite et intelligible. Néanmoins
certaines acquisition continuerons de se développer encore longtemps
(jusqu'à 15 ans pour le vocabulaire).
Chapitre 2 : Partie expérimentale
1. Méthodologie
Dans cette étude expérimentale, nous avons
choisi un corpus sur la base de données CHILDES24, acronyme
pour « Child Language Data Exchange System ». Il permet la
transcription et l'analyse d'une large base de données à partir
de vidéos et d'enregistrements audio. Les corpus sont
élaborés avec un ensemble de normes de transcription
spécialement construites pour l'étude des situations naturelles
de dialogue. Ces normes sont connues sous le nom de CHAT (« Codes for the
Human Analysis of Transcripts »). CHILDES se compose ainsi d'un «
Editeur » (traitement de texte) qui permet la transcription selon les
normes CHAT et permet une transcription phonétique selon le code SAMPA.
SAMPA est l'acronyme de (« Speech Assessment Methods Phonetic Alphabet
»), c'est un jeu de caractères phonétiques utilisable
basé sur l'alphabet phonétique international (API).
Les programmes permettant de transcrire des vidéos sont
connus sous le nom CLAN (Computerized Language Analysis). Sous CLAN il est non
seulement possible de faire des transcriptions mais aussi de lancer des
requêtes pour trouver une occurrence simple ou codée.
Au-delà de l'utilisation que nous allons en avoir pour cette
étude il propose également des décomptes
fréquentiels et des analyses de co-occurrences, des analyses
phonétiques, lexicales, morphosyntaxiques, les calculs automatiques de
divers indices utiles dans l'examen des productions langagières
notamment le MLU (« Mean Lengh of Utterance » ou Longueur Moyenne des
Enoncés).
L'enfant a été choisit parmi d'autres enfants
dans des corpus sur le bilinguisme français/anglais de CHILDES. Nous
avons essayé de prendre un enfant qui a été suivit
longtemps, qui avait le plus de transcriptions et qui utilisait le plus le code
mixing.
1.1. Présentation de l'enfant et de la famille
La famille vit à Montréal au Québec. La
situation linguistique du Canada est particulière puisque c'est un pays
bilingue le français et l'anglais cohabitent avec différents
statuts selon la région. A Montréal, le français est la
langue officielle, c'est-à-dire la langue utilisée dans
l'administration. La moitié de la population ne parle que
français, et un tiers des habitants sont bilingues. Les parents de
l'enfant sont bilingues, avec pour la mère, l'anglais comme langue
dominante, et pour le père, le français comme langue dominante.
Mais nous ne savons pas s'ils sont bilingues de naissance. Ils ont un enfant,
Olivier, qui sera le sujet de notre étude mais il ne sera
mentionné que sous le terme neutre d'« enfant ». Il a
été enregistré de 1;10.05 à 4;00.19. Le temps
d'étude s'étale du 29 février 1992 au 15
24 Le site du CHILDES
http://childes.psy.cmu.edu.
septembre 1994. Nous avons très peu de renseignements
sur la famille mais nous savons que l'enfant passe ses journées à
la crèche (« daycare ») où il n'est en contact qu'avec
des enfants parlant français. La famille utilise la règle de
« la langue unique » c'est-à-dire « un parent-une langue
» ou en anglais « one parent-one language rule » autrement dit
le parent ne s'adresse à l'enfant que dans sa langue maternelle et
n'utilise pas la langue de l'autre parent.
1. 2. L'enregistrement du corpus
La famille a été filmée pendant 4 ans par
deux chercheuses en bilinguisme dans trois situations différentes :
lorsque l'enfant interagit avec ses deux parents (trois enregistrements),
lorsqu'il n'est qu'avec sa mère (sept enregistrements) et lorsqu'il
interagit avec son père (sept enregistrements). Sur ces 17
enregistrements un enregistrement a été fait avec le père
pendant le repas de l'enfant, les autres se passent durant des moments de jeux
dans le salon. Les séances varient de 20 min à 55 min pour celles
qui ont été filmé mais ne sont pas communiquées
pour celles enregistrées sur cassette25.Ce sont les seules
informations dont nous disposons et nous manquons d'informations
complémentaires quant aux modalités des enregistrements
(notamment sur la régularité des enregistrements).
1. 3. La transcription du corpus
Les enregistrements sont transcrits avec non seulement les
productions de l'enfant mais aussi celles des interlocuteurs. Les
transcriptions peuvent être sous la forme de transcriptions simples ou
accompagnées de vidéos.
Le corpus que nous avons étudié est dit
longitudinal car il suit l'évolution du langage chez un même
enfant sur plusieurs années avec des enregistrements réguliers.
Il n'est constitué que de transcriptions et s'ils existent, sur CHILDES
nous n'avons pas les enregistrements vidéo correspondants. Les
transcriptions ont été effectuées par une étudiante
native du Québec français mais parlant couramment l'anglais. La
transcription se fait avec le logiciel CLAN sous ce modèle :
- Tous les dialogues sont retranscrits : MOT (mother) signifie
que c'est la mère qui parle, FAT (father) signifie que c'est le
père qui parle, l'enfant est transcrit sous le terme CHI (child) et la
personne qui filme est l'expérimentateur ou EXP
(experiment)26
25 Cette partie est beaucoup plus
détaillée dans l'analyse des résultats, premier
tableau.
26 Ce n'est pas forcément le transcripteur.
- Les tours de parole des parents et de
l'expérimentateur sont transcrits orthographiquement. Les tours de
parole de l'enfant sont transcrits orthographiquement et phonétiquement.
Pour les transcriptions phonétiques le code utilisé est le code
Sampa.
- Sous les lignes principales transcrites (orthographiques
pour les parents et phonétiques pour l'enfant) est placée une
ligne secondaire où est marqué « % COD : $LAN:E $ADD »,
c'est la référence du codage phonétique pour pouvoir
décoder la transcription de l'enfant. Cela clarifie aussi à qui
s'adresse la personne qui parle, par exemple : « *MOT: who's at the park ?
%cod : $LAN:E $ADD:CHI», la mère (MOT) s'adresse à l'enfant
(CHI).
- La situation de l'interaction est décrite en
début de corpus par exemple : « Parents playing with Olivier and
toys in living room. » mais les actions des participants peuvent
être codées « %com » sur une ligne secondaire si elles
participent à la compréhension du discours. Le transcripteur peut
aussi clarifier la prononciation de l'enfant ou de l'adulte, exemple «
%com : the "r" is French, but he also noticeably pronounces the "k" at the end,
like in English ».
1. 4. Le codage
Le codage du genre n'existant pas sur le corpus utilisé
nous l'avons créé. Il sert à marquer les occurrences que
nous étudions, et à se repérer dans le corpus pour
établir des proportions. Notre codage se divise en trois parties :
- Le signe @ (arobase) est une convention qui marque le
début d'un codage.
- La ou les deux lettres qui suivent l'arobase servent à
définir la catégorie de l'unité grammaticale.
- La lettre m, f, ou n sert à donner le genre (m=masculin,
f=féminin, n= neutre)
- Enfin, la dernière lettre code la validité ou pas
de l'occurrence de l'enfant par rapport à la norme (v=valide,
e=erroné). Par exemple : ame signifie article masculin
erroné27.
1. 5. Le contexte et l'interaction
Etudier un enfant dans son contexte permet d'avoir une
production naturelle : c'est de l'interaction que va naître la
production. L'acquisition suis le même fonctionnement que l'apprentissage
: de la rencontre entre le contexte et un enfant va émerger une
interaction qui elle-même va provoquer la production de nouvelles
compétences de communication ou va faire évoluer les
compétences antérieures.
27 Cf. la transcription en annexe avec des exemples de
codage
En effet, l'apprentissage est dépendant du contexte :
s'est dans l'interaction qu'il se construit. Les processus interactionnels
constituent les premières étapes des processus acquisitionnels.
Pour qu'il y ait interaction de la part de l'enfant il faut provoquer le
discours par le discours, et pour cela il faut maintenir une communication via
une tâche communicative, comme des jeux (histoire, puzzles,
lecture...).
Hypothèse : En observant des adultes
monolingues qui apprennent une langue étrangère nous avons
remarqué que les erreurs de genre sont les plus fréquentes et
sont celles qui persistent dans le temps. Les occurrences de genre
prononcées, pour une même structure syntaxique, peuvent être
aussi bien valides qu'erronées, ce qui est le signe d'une interlangue.
Nous posons l'hypothèse que l'enfant bilingue précoce va suivre
la même évolution, dans l'alternance des occurrences de genre
valide et erroné, mais contrairement à un adulte, les erreurs
vont se concentrer sur une courte période et ne vont pas perdurer.
1. 6. La syntaxe française28
Les déterminants :
L'article défini
|
Singulier
|
Masculin
|
le
|
Féminin
|
la
|
Codage :
@amv : article masculin valide @ame : article masculin
erroné @afv : article féminin valide @afe : article
féminin erroné
L'article indéfini
|
Singulier
|
Masculin
|
un
|
Féminin
|
une
|
Codage :
@aimv : article indéfini masculin valide @aime : article
indéfini masculin erroné @aifv : article indéfini
féminin valide @aife : article indéfini féminin
erroné
L'article partitif
|
Singulier
|
Masculin
|
du
|
Féminin
|
de la
|
Codage
28 Les éléments de syntaxe qui
n'apparaissent pas dans le corpus n'ont pas été retenus dans les
classifications. La grammaire utilisée est celle de Riegel, Pellat,
Rioul (1994).
@apmv : partitif masculin valide
@apme : partitif possessif masculin erroné @apmv :
partitif possessif féminin valide @apme: partitif féminin
erroné
Le déterminant démonstratif
|
Singulier
|
Masculin
|
ce
|
Féminin
|
cette
|
Codage :
@dmv : déterminant masculin valide @dme :
déterminant masculin erroné @dfv : déterminant
féminin valide @dfe : déterminant féminin erroné
Déterminant Possessif
|
Singulier
|
Masculin
|
mon
|
Féminin
|
ma
|
Masculin
|
ton
|
Féminin
|
ta
|
Masculin
|
son
|
Féminin
|
sa
|
Codage :
@dpmv : déterminant possessif masculin valide @dpme :
déterminant possessif masculin erroné @dpfv : déterminant
possessif féminin valide @dpfe : déterminant possessif
féminin erroné
Les pronoms :
Rimbaud Sophie L'acquisition du genre et le code mixing chez
le bilingue précoce 2009 Pronoms personnels :
|
Singulier
|
Pluriel
|
Masculin
|
il
|
Ils
|
Féminin
|
elle
|
elles
|
Masculin
|
lui
|
eux
|
Féminin
|
elle
|
elles
|
Codage
@pmv : pronom masculin valide @pme : pronom masculin
erroné @pfv : pronom féminin valide @pfe : pronom féminin
erroné
Les noms :
En français certains noms portent la marque du genre,
comme les noms de métiers. Le codage vaut à la fois pour le
singulier et le pluriel. Ils seront codés :
@nmv : nom masculin valide
@nme : nom masculin erroné
@nfv : nom féminin valide
@nfe : nom féminin erroné
L'adjectif qualificatif :
En français l'adjectif qualificatif s'accorde en genre
avec le nom qu'il qualifie. Ils seront codés :
@admv : adjectif masculin valide @adme : adjectif masculin
erroné @adfv : adjectif féminin valide @adfe : adjectif
féminin erroné
1. 7. La syntaxe anglaise 29
29 Larreya et Rivière (2005).33
Dans la grammaire anglaise le genre n'est pas marqué dans
la forme du nom lui-même
(sauf pour certains noms de métier en -er :
waiter/waitress) ni dans la forme du déterminant.
Le genre en anglais est naturel c'est-à-dire que
l'alternance des genres correspond à la
distinction physique de sexe ou l'absence de sexe. Cependant il
existe des exceptions :
- pour les petits enfants et les grands mammifères,
nous employons le neutre quand on ignore le sexe. Mais si les personnes
connaissent le sexe ils emploieront le genre approprié pour les enfants
et les animaux (si il y a un rapport affectif à l'animal).
- dans certains cas on peut ignorer le sexe de la personne :
il est possible de considérer que le masculin l'emporte et on utilise le
« he », le choix peut être ouvert en employant la formule
« he » ou « she », enfin on peut utiliser des termes
neutres comme « person » ou « they ».
- pour les animaux dits inférieurs (oiseux, insectes...)
nous pouvons employer le neutre ou le sexe « he/she ».
- pour les objets inanimés l'emploie du neutre est la
règle générale, pourtant pour marquer de l'affection
envers un objet on peut employer le genre masculin ou féminin.
Remarque : dans cette étude nous ferons le choix
d'une grammaire normée. Les objets et les animaux seront
considérés comme neutre et une dérogation à cette
règle de la part de l'enfant tiendra de l'erreur.
Les pronoms :
|
Singulier
|
Masculin
|
he
|
Féminin
|
she
|
Neutre
|
it
|
Masculin
|
him
|
Féminin
|
her
|
Neutre
|
it
|
Codage :
@ppemv: pronom personnel masculin valide @ppeme : pronom
personnel masculin erroné @ppefv : pronom personnel féminin
valide
@ppefe : pronom personnel féminin erroné @ppenv
: pronom personnel neutre valide @ppene : pronom personnel neutre
erroné
Pronoms possessifs :
|
Singulier
|
Masculin
|
his
|
Féminin
|
her
|
Neutre
|
its
|
Masculin
|
his
|
Féminin
|
hers
|
Codage
@ppmv : pronom possessif masculin valide @ppme : pronom possessif
masculin erroné @ppfv : pronom possessif féminin valide @ppfe :
pronom possessif féminin erroné @ppnv : pronom possessif neutre
valide @ppne : pronom possessif neutre erroné
Rimbaud Sophie L'acquisition du genre et le code mixing chez
le bilingue précoce 2009 2. Analyse des résultats
2. 1. Présentation du corpus
Age
|
Contexte
|
Durée*
|
nbre produc.
|
français
|
anglais
|
mixing
|
Non linguistique
|
1;10.05
|
both
|
45 min
|
190
|
92
|
38
|
1
|
59
|
1;11.10
|
father
|
40 min
|
113
|
68
|
7
|
2
|
36
|
1;11.13
|
father
|
55 min
|
236
|
157
|
0
|
1
|
78
|
1;11.15
|
mother
|
40 min
|
115
|
30
|
51
|
3
|
31
|
2;01.29
|
mother
|
55 min
|
254
|
77
|
28
|
15
|
134
|
2;03.13
|
father
|
40 min
|
297
|
214
|
6
|
3
|
74
|
2;03.20
|
mother
|
40 min
|
206
|
107
|
23
|
1
|
75
|
2;05.00
|
both
|
50 min
|
213
|
120
|
17
|
1
|
75
|
2;06.03
|
mother
|
NC
|
198
|
107
|
30
|
10
|
51
|
2;09.03
|
father
|
NC
|
151
|
98
|
11
|
2
|
40
|
2;09.07
|
mother
|
20 min
|
282
|
12
|
186
|
1
|
83
|
2;10.29
|
father
|
45 min
|
361
|
249
|
4
|
1
|
107
|
2;10.29 **
|
mother
|
45 min
|
343
|
4
|
223
|
0
|
116
|
2;11.15
|
both
|
45 min
|
321
|
130
|
60
|
0
|
131
|
3;06.09
|
mother
|
NC
|
186
|
10
|
139
|
0
|
37
|
3;06.14
|
father
|
NC
|
265
|
204
|
17
|
0
|
44
|
4;00.9
|
father
|
NC
|
217
|
183
|
0
|
1
|
32
|
Total
|
|
|
3948
|
1862
|
840
|
42
|
1203
|
Tableau 1:Tableau productions totales de l'enfant, en
français, en anglais et avec le code mixing
* Pour les enregistrements audio (« audio tape »), le
temps n'est pas indiqué dans le corpus ** Il y a une erreur dans le
corpus : la date, l'âge, l'heure, et la personne qui filme sont les
mêmes dans les deux fichiers, seul le contexte et les dialogues montrent
que ce sont deux enregistrements différents.
Figure 2 : Histogramme représentant les productions de
l'enfant
Age
|
Contexte
|
Production
|
Français
|
% Français
|
Anglais
|
% Anglais
|
Mixing
|
% Mixing
|
Non linguistique
|
% Non linguistique
|
1;10.05
|
both
|
190
|
92
|
48.42%
|
38
|
20%
|
1
|
0.53%
|
59
|
31.05%
|
1;11.10
|
father
|
113
|
68
|
60.18%
|
7
|
6.19%
|
2
|
1.77%
|
36
|
31.86%
|
1;11.13
|
father
|
236
|
157
|
66.52%
|
0
|
0%
|
1
|
0.42%
|
78
|
33.05%
|
1;11.15
|
mother
|
115
|
30
|
39.40%
|
51
|
44.35%
|
3
|
2.61%
|
31
|
26.96%
|
2;01.29
|
mother
|
254
|
77
|
30.31%
|
28
|
11.02%
|
15
|
5.10%
|
134
|
87%
|
2;03.13
|
father
|
297
|
214
|
72.05%
|
6
|
2.02%
|
3
|
1.01%
|
74
|
24.92%
|
2;03.20
|
mother
|
206
|
107
|
51.94%
|
23
|
11.17%
|
1
|
0.48%
|
75
|
36.41%
|
2;05.00
|
both
|
213
|
120
|
56.34%
|
17
|
8%
|
1
|
0.47%
|
75
|
35.21%
|
2;06.03
|
mother
|
198
|
107
|
54.04%
|
30
|
15.15%
|
10
|
5.05%
|
51
|
25.76%
|
2;09.03
|
father
|
151
|
98
|
64.90%
|
11
|
7.28%
|
2
|
1.32%
|
40
|
26.49%
|
2;09.07
|
mother
|
282
|
12
|
4.25%
|
186
|
65.96%
|
1
|
0.35%
|
83
|
29.43%
|
2;10.29
|
father
|
361
|
249
|
68.98%
|
4
|
1.11%
|
1
|
0.28%
|
107
|
29.64%
|
2;10.29 **
|
mother
|
343
|
4
|
1.17%
|
223
|
65.01%
|
0
|
0%
|
116
|
33.82%
|
2;11.15
|
both
|
321
|
130
|
40.50%
|
60
|
18.69%
|
0
|
0%
|
131
|
40.81%
|
3;06.09
|
mother
|
186
|
10
|
5.38%
|
139
|
74.73%
|
0
|
0%
|
37
|
19.90%
|
3;06.14
|
father
|
265
|
204
|
76.98%
|
117
|
6.42%
|
0
|
0%
|
44
|
16.60%
|
4;00.9
|
father
|
217
|
183
|
84.33%
|
0
|
0%
|
1
|
0.46%
|
32
|
14.75%
|
Total
|
|
3948
|
1862
|
49.92%
|
840
|
21.30%
|
42
|
1.06%
|
1203
|
30.47%
|
Tableau 3 : Tableau en proportion des productions en
français, anglais et en code mixing (%)
Dans cette partie nous allons présenter le corpus.
L'enfant a été suivi de 1;10,05 à 4;00,19 avec des
séances irrégulières d'enregistrement. Les durées
des séances varient de 20 min (1 fois) à 40 min (4 fois), 45 min
(4 fois), 50 min (1 fois) et 55 min (2 fois). Plusieurs problèmes se
sont posés pour étudier l'évolution de l'acquisition :
nous ne savons pas de quelle manière a été
récolté le corpus : même si le contexte qui semble
régulier (7 fois avec le père, 7 fois avec la mère et 3
fois avec les deux), les vidéos ne sont pas aux mêmes intervalles
et de même durée. S'il y avait des conventions pour la collecte du
corpus nous n'y avons pas eu accès.
Le premier tableau représente la classification des
productions30 de l'enfant : elle se fait en fonction de
l'âge, du contexte de l'interaction, de la durée de
l'enregistrement et de la totalité des tours de parole par âge. A
l'intérieur de ces productions ont été
développées les productions dans les deux langues et dans
l'utilisation du code mixing. La dernière colonne représente
toutes les productions non linguistiques de l'enfant (babillage, rire,
production non compréhensible...). Toutes les situations se passe dans
le salon, l'enfant joue avec ses parents sauf à 1;11.10 où la
séance se passe pendant le repas,
La figure 2 représente un graphique qui illustre les
productions de l'enfant dans les deux langues et dans le code mixing. La
création d'un graphique permet une compréhension plus rapide des
résultats mais exclu des données telles que le contexte et la
durée des enregistrements.
Le second tableau fait écho au premier dans le sens
où il représente toutes les productions de l'enfant dans le
corpus, mais pour mieux cibler l`évolution des productions nous avons
fait calculé des proportions sous la forme de pourcentages. Par souci de
clarté et de pertinence pour notre analyse, les pourcentages des
productions par âge ont été calculés par rapport au
nombre de tours de parole pour chaque âge. Il est plus facile pour nous
de mener cette analyse en nous référent aux proportions, puisque
la durée des séances varie ou ne nous est pas indiquée.
Nous avons calculé le nombre total de production par
âge pour arriver, à la fin du corpus, à un total de 3948
occurrences. Parmi ces 3948 occurrences nous observons 1862 occurrences en
français, 840 occurrences en anglais et 42 formes de code mixing. Le
reste correspond aux productions non linguistiques.
Le français apparaît clairement comme la langue
dominante31 :
« Il est important de savoir si le français
est la langue dominante de l'enfant, c'est-à-dire celle à
laquelle il est le plus exposé. Il s'agit généralement
[...] de la langue parlée dans le milieu de garde. » Paradis,
Crago, Belanger, 2005, 28.
30 Par production nous entendons le nombre de tour de
parole de l'enfant.
31 Nous rappellons que l'efant passe ses
journées dans une crèche « daycare ».
En effet sur 3948 productions il en produit un peu moins de la
moitié en français (49.92%), et l'anglais est la langue
dominée avec 840 occurrences, moitié moins que les productions en
français avec 21.30%. Suivant le contexte dans lequel interagit l'enfant
une langue peut être plus utilisée que l'autre. Le père
interagit en français avec l'enfant et la mère lui parle en
anglais. L'enfant ne parle pas beaucoup anglais avec sa mère, il montre
une préférence pour le français pourtant il semble
comprendre et parler anglais comme nous le montre les productions
(réduites) dans cette langue.
Les productions en anglais sont très limitée par
exemple à 1;10.05 elles se limitent à un verbe « open
», et des noms « baby » et « daddy » qu'il adresse
indifféremment à son père ou à sa mère (il
ne différencierait pas encore les langues puisqu'il n'a pas encore
associé un interlocuteur à une langue lorsqu'il y a ses deux
parents). Par contre, lorsqu'il interagit avec son père il parle
essentiellement français (avec un minimum de 60% lorsqu'il n'a
même pas deux ans et un maximum de 84.33% pour un âge plus
avancé) et utilise très peu l'anglais (avec un maximum de 7.28%
dans une période qui précède l'explosion lexicale en
anglais). Nous remarquons que l'enfant utilise le code mixing très
tôt avec son père, dès les première séances :
si l'on s'en réfère à la définition du code mixing
(nous parlons de code mixing lors que dans une même phrase est
inséré un mot de l'autre langue, alors que le code switchnig
qualifie l'alternance des langues dans un discours) sa présence serait
le signe d'une incompétence en français, rattrapée par
l'usage du français. Mais le code mixing avec le père est
dominé par l'utilisation du terme « daddy ». Nous sommes dans
une fonction pragmatique du code mixing telle qu'elle a été
décrite par Genesee (cf. partie 3.5, p. 37). Cette explication est
justifiée par le discours du père à 1;11.10 (cf. annexe 3.
§ 1).
A cet âge, pour les mots familiers, nous somme
déjà, au-delà d'une imitation, dans une pratique
délibérée du code mixing.
En présence de sa mère l'enfant utilise,
jusqu'à un certain âge, utilise les deux langues avec une
construction grammaticale beaucoup plus développée en
français. Les mots anglais seront employés isolés, souvent
par répétition du discours de la mère (cf. annexe 3 §
2). Il en va de même dans l'utilisation du code mixing : (cf. annexe 3.
§ 3).
La répétition est un phénomène
naturel dans l'acquisition, c'est dans la répétition que l'enfant
apprend le vocabulaire, la phonétique etc.
Alors que l'explosion lexicale est présente très
tôt en français, elle se fait beaucoup plus tard en anglais
puisque c'est la langue dominée. La première explosion en anglais
à lieu 2;09.07 (dans le corpus) nous remarquons qu'à partir de
cet âge les phrases sont syntaxiquement très
développées et l`enfant ne va s'adresser à sa mère
qu'en anglais. Lors des contextes où les eux parents sont
présents il n'est pas évident pour nous de savoir quelle est la
part de l'interaction avec les parents mais ces résultats montrent que,
même si l'enfant a le français comme langue dominante l'anglais
est très présent.
2. 2. Présentation des productions de genre
Age
|
Contexte
|
Total genre
|
Genre français
|
Genre anglais
|
Genre dans le code mixing32
|
1;10.05
|
both
|
9
|
9
|
0
|
0
|
1;11.10
|
father
|
4
|
4
|
0
|
0
|
1;11.13
|
father
|
64
|
64
|
0
|
0
|
1;11.15
|
mother
|
6
|
5
|
1
|
0
|
2;01.29
|
mother
|
21
|
19
|
0
|
2
|
2;03.13
|
father
|
95
|
95
|
0
|
0
|
2;03.20
|
mother
|
64
|
60
|
|
0
|
2;05.00
|
both
|
56
|
56
|
0
|
0
|
2;06.03
|
mother
|
28
|
22
|
3
|
3
|
2;09.03
|
father
|
30
|
30
|
0
|
0
|
2;09.07
|
mother
|
28
|
0
|
28
|
0
|
2;10.29
|
father
|
26
|
26
|
0
|
0
|
2;10.29
|
mother
|
24
|
0
|
24
|
0
|
2;11.15
|
both
|
31
|
29
|
2
|
0
|
3;06.09
|
mother
|
27
|
5
|
22
|
0
|
3;06.14
|
father
|
59
|
58
|
1
|
0
|
4;00.9
|
father
|
64
|
63
|
|
0
|
Total
|
|
636
|
545
|
81
|
5
|
Tableau 4: Tableau des productions totales de genre en
français, en anglais et dans le code mixing
32 Il n'y a que des genres français dans les
occurrences de code mixing.
Figure 5 : Histogramme représentant les productions de
genre en français et en anglais
.
Age
|
Contexte
|
Français*
|
Genre français
|
% Genre français
|
Anglais*
|
Anglais
|
% Anglais
|
Mixing*
|
Genre dans le code mixing
|
% code mixing
|
1;10.05
|
both
|
92
|
9
|
9.78%
|
38
|
0
|
0%
|
1
|
0
|
0%
|
1;11.10
|
father
|
68
|
4
|
5.88%
|
7
|
0
|
0%
|
2
|
0
|
0%
|
1;11.13
|
father
|
157
|
64
|
36.57%
|
0
|
0
|
0%
|
1
|
0
|
0%
|
1;11.15
|
mother
|
30
|
5
|
16.67%
|
51
|
1
|
1.96%
|
3
|
0
|
0%
|
2;01.29
|
mother
|
77
|
19
|
24.68%
|
28
|
0
|
0%
|
15
|
2
|
13.33%
|
2;03.13
|
father
|
214
|
95
|
42.22%
|
6
|
0
|
0%
|
3
|
0
|
0%
|
2;03.20
|
mother
|
107
|
60
|
56.07%
|
23
|
|
0%
|
1
|
0
|
0%
|
2;05.00
|
both
|
120
|
56
|
46.67%
|
17
|
0
|
0%
|
1
|
0
|
0%
|
2;06.03
|
mother
|
107
|
22
|
20.56%
|
30
|
3
|
10%
|
10
|
3
|
30%
|
2;09.03
|
father
|
98
|
30
|
30.61%
|
11
|
0
|
0%
|
2
|
0
|
0%
|
2;09.07
|
mother
|
12
|
0
|
0%
|
186
|
28
|
15.05%
|
1
|
0
|
0%
|
2;10.29
|
father
|
249
|
26
|
17.45%
|
4
|
0
|
0%
|
1
|
0
|
0%
|
2;10.29
|
mother
|
4
|
0
|
0%
|
223
|
24
|
10.76%
|
0
|
0
|
0%
|
2;11.15
|
both
|
130
|
29
|
22.32%
|
60
|
2
|
3.33%
|
0
|
0
|
0%
|
3;06.09
|
mother
|
10
|
5
|
50%
|
139
|
22
|
15.83%
|
0
|
0
|
0%
|
3;06.14
|
father
|
204
|
58
|
55.77%
|
17
|
1
|
5.88%
|
0
|
0
|
0%
|
4;00.9
|
father
|
183
|
63
|
24.43%
|
0
|
0
|
0%
|
1
|
0
|
0%
|
Total
|
|
1862
|
545
|
29.27%**
|
840
|
81
|
9.64%%
|
42
|
5
|
11.90%
|
Tableau 6 : Tableau des proportions des productions de genre
*Productions totales dans la langue
**Comme pour le reste du tableau nous calculons les pourcentages
par rapport aux productions totales.
Dans cette partie nous allons faire une présentation
générale des productions de genre, en français, en anglais
et dans le code mixing. Nous ferons un parallèle entre les productions
de genre de l'enfant et le contexte auquel elles sont associées. La
figure 5 représente un graphique qui illustre les productions en genre
de l'enfant dans les deux langues et dans le code mixing et cela à
chaque âge. La création d'un graphique permet une
compréhension plus rapide des résultats mais exclu des
données telles que le contexte d'où la nécessité de
faire un premier tableau. Dans le second tableau (figure 6) nous avons
calculé les proportions de genre dans les tours de parole de l'enfant et
pour chaque âge.
L'enfant produit en français 29.27% de genre pour 1862
productions alors qu'il n'en produit que 9.64% en anglais et 11.90% en code
mixing33. Le genre en français suit une
évolution stable avec quelques fluctuations. L'enfant parle beaucoup
avec son père (entre 30.61% à 2;09.03 et 56.07% à
2;03.20), le français étant sa langue dominante et le genre
étant intrinsèque à cette langue c'est normal qu'il
utilise beaucoup de genre. Néanmoins avec sa mère il utilise peu
le genre que se soit en français ou en anglais (avec un maximum de 22
genres pour 139 occurrences ou 15.83%). D'où vient cette
différence ? D'abord lors de la première séance l'enfant
parle peu puisqu'il est jeune (1;11.05) ensuite il parle moins quand il est
filmé avec ces deux parents, enfin dans la seconde séance il
produit moins d'occurrences avec son père parce qu'il a
été filmé pendant le repas.
Cette différence de nombre de production entre le
père et la mère est la conséquence directe de la
manière dont le parent gère l'interaction : le père fait
beaucoup d'exercices à base d'images, d'histoires ou de chansons
où le discours l'enfant est très sollicité, surtout sur la
syntaxe (cf. annexe 3. § 4). La mère n'interagit pas de la
même manière, elle concentre son interaction sur les jouets de
l'enfant, ce qu'il fait avec mais quand elle lui demande de raconter ce qu'il a
fait la veille ou à la crèche nous observons une augmentation de
les occurrences de genre : en français à 2;01.29, 2;03.20 et
2;06.03, alors que les occurrences de genre en anglais augmente en
parallèle de l'explosion lexicale. Nous parlerons à la fois
d'explosion lexicale et syntaxique à 2;09.07 : avec l'augmentation des
occurrences augmente le genre en anglais. Nous verrons dans la partie suivante
que cette augmentation est lié à l'acquisition du pronom neutre
qui n'existe pas en français, est très présent en anglais
au même titre que le genre français est intrinsèque
à la langue.
Le genre en code mixing n'apparait que deux fois, sur 13
séances où l'enfant produit du code mixing : Le genre est
toujours employé dans les productions avec la mère. Nous allons
voir, dans la partie suivante, de quelle langue dépend cette utilisation
du genre.
33 Proportionnellement il en produit plus en code
mixing mais si nous comparons les données brutes, il ne produit que 5
tours de parole en code mixing.
Rimbaud Sophie L'acquisition du genre et le code mixing chez
le bilingue précoce 2009 2. 3. Analyse des occurrences de
genre
Age
|
Contexte
|
Français
|
Genre français valide
|
Genre français erroné
|
Genre valide dans Code mixing
|
Genre erroné dans code mixing
|
1;10.05
|
both
|
9
|
9
|
0
|
|
|
1;11.10
|
father
|
4
|
3
|
1
|
|
|
1;11.13
|
father
|
64
|
62
|
2
|
|
|
1;11.15
|
mother
|
5
|
5
|
0
|
|
|
2;01.29
|
mother
|
21
|
17
|
2
|
2
|
|
2;03.13
|
father
|
95
|
84
|
10
|
|
|
2;03.20
|
mother
|
60
|
35
|
25
|
|
|
2;05.00
|
both
|
56
|
46
|
8
|
|
|
2;06.03
|
mother
|
25
|
19
|
3
|
2
|
1
|
2;09.03
|
father
|
30
|
27
|
3
|
|
|
2;09.07
|
mother
|
0
|
0
|
0
|
|
|
2;10.29
|
father
|
26
|
26
|
0
|
|
|
2;10.29
|
mother
|
0
|
0
|
0
|
|
|
2;11.15
|
both
|
30
|
29
|
1
|
|
|
3;06.09
|
mother
|
5
|
5
|
0
|
|
|
3;06.14
|
father
|
58
|
50
|
8
|
|
|
4;00.9
|
father
|
63
|
58
|
5
|
|
|
Total
|
|
550
|
472
|
73
|
4
|
1
|
Tableau 7 : Evolution du genre en
français
Figure 8 : Evolution des structures syntaxiques en
français34.
Pour une présentation plus détaillée de
l'évolution des occurrences cf. annexes 12 et 13 p. 121.
34
Dans cette partie nous allons faire les analyses
détaillées des occurrences de genre valides et erronées en
français et dans le code mixing Dans la partie suivant nous nous
concentrerons sur l'anglais.
Nous avons fait le choix de ne pas mettre le code mixing dans
un tableau séparé, d'une part parce que il y a trop peu
d'occurrences et d'autre part il n'y a dans le code mixing que du genre
français.
Nous allons monter à quelle période chaque
structure syntaxique apparait et si elle est liée à un emploi
valide ou erroné, ce qui nous servira de comparaison avec le monolingue
dans la discussion.
Les trois premières séances se passent à
8 jours d'intervalles : l'article féminin et l'article indéfini
masculin qui apparaissent les premiers, suivit du pronom masculin,
féminin et de l'adjectif masculin et enfin de l'article masculin,
l'article partitif masculin et le déterminant possessif masculin, et ce
dans un même contexte (avec le père). A cette période, bien
qu'il acquière beaucoup d'occurrences syntaxiques, certaines complexes
dans leur utilisation (comme l'article partitif ou le déterminant
possessif) il fait peu d'erreur. Elles se portent sur des occurrences qu'il va
utiliser très souvent35, le pronom masculin à 1;11.10
et à 1;11.13, sur l'article féminin (1) et l'article
indéfini masculin (1).
A 2;03.13 et 2;03.20, à quelques jours d'intervalle et
dans deux contextes différents : avec le père, à 2;03.13
l'enfant acquière l'article indéfini et le nom féminin, le
déterminant et le déterminant possessif masculin. L'enfant va
faire beaucoup d'erreurs sur l'article féminin et l'article partitif
masculin, erreurs qu'il ne faisait pas lorsqu'il a acquit ces structures. En
seulement quatre mois l'enfant connaît déjà la
moitié des structures syntaxiques qu'il va apprendre en quatre ans.
A 2;03.20, l'enfant va utiliser pour la première fois
un adjectif féminin et sur 15 occurrences il va se tromper 12 fois. Nous
remarquons que l'enfant n'acquière pas les deux genres (féminin
et masculin) au même moment pour une même structure et que
l'acquisition du féminin passe souvent par une erreur. Les
dernières structures syntaxiques du corpus, vont être acquises
plus tard et seront très peu utilisées le nom masculin (1)
à 2;05.00 et l'article partitif féminin (1) à 2;09.03. Les
emplois sont valides.
L'enfant utilise cinq occurrences de genre dans le code mixing
(cf. annexe 3. § 4) : il produit trois articles masculins et deux
féminins dont un erroné. Il ne produit de genre en code mixing
qu'en français.
L'article féminin, l'adjectif féminin et le pronom
féminin sont les trois occurrences où l'enfant fait le plus
d'erreur. Il semble avoir des difficultés à acquérir le
féminin
35 Plus il va utiliser une occurrence, plus il a de
chances de faire des erreurs. De ce fait il est difficile de dire si une
structure syntaxique est acquise si elle n'est pas utilisée souvent.
Age
|
Contexte
|
Anglais
|
Genre anglais valide
|
Genre anglais erroné
|
1;10.05
|
Both
|
|
|
|
1;11.10
|
Father
|
|
|
|
1;11.13
|
Father
|
|
|
|
1;11.15
|
Mother
|
1
|
1
|
|
2;01.29
|
Mother
|
|
|
|
2;03.13
|
Father
|
|
|
|
2;03.20
|
Mother
|
|
|
|
2;05.00
|
Both
|
|
|
|
2;06.03
|
Mother
|
3
|
3
|
|
2;09.03
|
Father
|
|
|
|
2;09.07
|
Mother
|
28
|
28
|
|
2;10.29
|
Father
|
|
|
|
2;10.29
|
Mother
|
24
|
24
|
|
2;11.15
|
Both
|
2
|
2
|
|
3;06.09
|
Mother
|
22
|
22
|
|
3;06.14
|
Father
|
1
|
1
|
|
4;00.9
|
Father
|
|
|
|
Total
|
|
81
|
81
|
0
|
Tableau 9 : Tableau des productions de genre en anglais
Figure 10 : Les structures syntaxiques en anglais
Dans cette dernière partie des analyses de
résultats, nous étudierons la part du genre en anglais dans les
productions de l'enfant. Nous verrons non seulement à quel âge
apparaissent les structures syntaxiques mais aussi dans quelles proportions
l'enfant produit des occurrences valides et erronées.
Tout d'abord nous pouvons établir plusieurs constats :
l'enfant ne produit pas de genre anglais dans le code mixing, ensuite, il
produit à deux reprises des occurrences de genre en anglais avec son
père, qui parle français, enfin, sur 81 productions de genre, il
ne fait pas d'erreur avec sa mère.
Les premières occurrences de genre en anglais sont peu
nombreuses : à 1;11.15 il produit une occurrence valide d'un pronom
personnel neutre sous l'insistance et la répétion de ce pronom
par sa mère :
« *CHI: open the door .
*MOT: open it .
*CHI: open the (.) it
*MOT: open it (.) please ! »
Nous sentons une instabilité dans l'utilisation du pronom,
mais à ce stade il est possible que l'enfant commence à
comprendre que le pronom « it » sert à remplacer le nom «
door ».
Il commence à utiliser le pronom personnel masculin et
féminin à 2;06.03 (3 occurrences) mais c'est à 2;09.07 que
vont se produire les occurrences les plus importantes avec l'explosion lexicale
et syntaxique : l'enfant produit 28 occurrences portant du genre avec, en plus
des occurrences déjà acquises (les pronoms masculins et
féminins) l'apparition du pronom possessif neutre (14), le pronom
possessif neutre (8) et le pronom possessif féminin (1). Jusqu'à
la fin des séances avec la mère, se seront les pronoms personnels
(masculin, féminin et neutre) qui seront les plus utilisés, ce
qui est normal puisqu'au même titre que les articles en français,
ce sont les occurrences syntaxiques les plus courantes.
Enfin, en interaction avec le père, l'enfant va
produire une première occurrence de genre à 3;06.14 : la
mère arrive dans le salon et l'enfant s'adresse spontanément
à elle en anglais pour parler de son petit frère qui vient de
naître.
3. Discussion
Pour vérifier l'hypothèse nous avons eu recours
à une méthodologie bien précise pour analyser un corpus
qui, dans l'argumentation logique d'une étude scientifique, s'inscrit en
continuité avec les recherches théoriques préalables. Il
s'avère alors que la partie expérimentale établit une
relation directe avec la partie théorique.
Dans une première partie nous allons situer le
bilinguisme de l'enfant en fonction de l'âge d'acquisition des langues,
puis sur des critères psychologiques et contextuels selon les
définitions qui ont été données au
préalable.
3. 1. Le bilinguisme de l'enfant étudié dans
le corpus
L'enfant est né dans un environnement bilingue, en ce
sens nous pouvons dire, qu'il se situe dans un bilinguisme précoce et
simultané, ce qui signifie que dans le cerveau les informations des deux
langues ne sont pas traitées séparément. L'âge
d'acquisition est à mettre en relation avec des critères
contextuels c'est-à-dire le contexte et l'usage des deux langues.
L'enfant étant né au Québec, à Montréal avec
un père ayant pour langue maternelle le français et une
mère parlant anglais, le bilinguisme de l'enfant se place donc dans un
bilinguisme exogène puisque la langue seconde (l'anglais) n'est pas
présente dans la communauté36. Cela nous amène
à évoquer le statut des deux langues, à la fois au sein de
la communauté et au sein de la famille : pour cet enfant, la situation
de la communauté est particulière, le Canada étant
divisé en zones francophones et anglophones et à
l'intérieur des ces zones l'autre langue est tolérée et
comprise. Néanmoins, pour le contexte extérieur nous parlerons de
bilinguisme à tendance hiérarchique puisque le français
est plus valorisé et que l'enfant va aussi dans une crèche
française.
Au sein de la famille, comme nous le voyons tout au long des
enregistrements, les parents essaient d'appliquer la règle de « la
langue unique » c'est-à-dire « un parentune langue » ou
en anglais le « one parent one language rule , autrement dit le parent ne
s'adresse à l'enfant que dans sa langue maternelle et n'utilise pas la
langue de l'autre parent ; Dans la famille le bilinguisme se situe alors dans
une tendance neutre au sens ou les deux langues sont valorisées.
36 Ce constat reste mitigé, par absence de
la langue seconde dans la communauté nous voulons dire que la langue
officielle de Montréal est le français, l'anglais est
considéré comme une langue étrangère (ce qui est
l'inverse à Vancouver).
Pour finir cette partie sur la classification des
différents types de bilinguisme de l'enfant nous allons nous concentrer
sur les critères psychologiques autrement dit d'une part l'organisation
cognitive de la langue, d'autre part la compétence dans les deux
langues. Comme il a été dit dans la première partie sur
les types de bilinguisme, la présence de ce code mixing / code switching
est révélateur, dans l'organisation cognitive de la langue, d'un
bilinguisme composé or en étudiant les productions de l'enfant
nous n'observons qu'une proportion de code mixing trop faible pour que le type
de bilinguisme de l'enfant soit dit « composé ». Nous arrivons
à cette conclusion : le bilinguisme de cet enfant est dit
coordonné puisque la représentation du monde se fait dans deux
langues : il y a un signifiant pour un signifié dans chaque langue.
Le dernier type de bilinguisme sur critères
psychologiques dépend de la compétence de l'enfant dans les deux
langues, analyse qui découle directement de notre étude sur les
productions totales de l'enfant dans chaque langue et de la production de genre
qui en résulte. D'une part de la production en français dans les
productions totales montre une dominance de la langue française chez cet
enfant. D'autre part, non seulement la dominance de la langue française
mais la forte propension d'occurrences de genre en français et peu
d'erreurs, par rapport à la langue anglaise, montreraient une
compétence supérieure du français sur l'anglais. Bien que
la compétence en anglais soit très basse en début de
corpus, l'enfant la développe tout au long des enregistrements, pour
arriver à une bonne compétence de communication en anglais, mais
la situation contextuelle extérieure fait qu'il y a quand même une
forte différence entre les deux langues.
L'enfant ne développe que certaines structures syntaxiques
qu'en relation avec la production des parents.
Nous allons maintenant nous pencher sur le bilinguisme
précoce de l'enfant, en essayant de caractériser à quel
stade du développement syntaxique il se situe :
Au début des enregistrements qui constituent le corpus,
l'enfant semble se situer dans la seconde étape décrite par
Volterra et Taeschner (1978)37 autrement dit il va avoir un
répertoire lexical dans chacune des deux langues et un système
syntaxique dans les deux langues. C'est à cette période que va
apparaître la dominance langagière dans l'alternance des langues.
Vers le milieu de l'étude l'enfant rentre dans la troisième phase
: le système syntaxique se divise en deux ainsi l'enfant a
développé deux systèmes linguistiques indépendants,
cette différence de système n'apparaît que lorsqu'un enfant
adapte sa langue à celle de l'interlocuteur.
37 cité par Deuchar et Quay, 2000.
C'est dans la seconde étape que va se manifester le
plus souvent le code mixing : à ce moment le code mixing est le
manifeste d'une syntaxe dominée par un modèle qui est celui de la
langue dominante. Chez le bilingue précoce ce qui est appris plus tard
dans une langue sera souvent l'objet du code mixing. Ainsi lorsque l'enfant
entre dans la troisième étape, le code mixing n'est presque plus
présent : d'une part l'anglais est presque aussi bien
maîtrisé que le français et l'enfant n'a plus besoin de
pallier un manque et d'autre part le code mixing deviendrait volontaire
c'est-à-dire que ce n'est plus un simple automatisme mais une pratique
volontaire qui n'est utilisée que dans certains cas (pour Genesee et
Nicoladis, 2005, il a une fonction pragmatique).
Nous sommes face à une enfant possédant un
bilinguisme précoce simultané, puisqu'il évolue dans un
contexte bilingue dès la naissance. Mais c'est aussi un bilinguisme
exogène puisque la langue 2 n'est pas ou peu présente dans la
communauté, le Québec étant une région francophone
; De ce fait nous allons observer à travers une dominance de la langue
française par rapport à l'anglais, une tendance à un
bilinguisme à tendance neutre dans la famille où il n'y a pas de
hiérarchie des langues contrairement à la situation
sociolinguistique du pays. Enfin, nous parlerons de bilinguisme dominant
puisque le français est la langue dominante. Bien que la
compétence de l'enfant dans la langue dominée va évoluer
pour atteindre, à la fin de l'étude, un niveau proche de la
langue dominante, il y aura toujours une langue dominante. C'est au niveau de
l'organisation cognitive de la langue que le constat sera plus mitigé :
puisque d'une part la compétence de l'enfant évolue graduellement
selon les trois étapes de Volterra et Taeschner
(1978)38 et d'autre part qu'il y aura toujours une langue
dominante, le bilinguisme de l'enfant se place entre un bilinguisme
coordonné et composé.
La distinction entre les types composé et
coordonné n'est pas exclusive pour Ervin et Osgood (1954) : ces types
constitueraient les deux pôles du bilinguisme et les sujets bilingues se
situeraient entre les deux, leur position variant en fonction des situations
d'apprentissage et d'utilisation de la langue, ainsi que de l'âge de
confrontation aux deux langues. Par conséquent le bilinguisme tiendrait
plus à des stratégies cognitives adaptées à un
contexte qu'à des modèles figés.
Hypothèse de départ : En observant
des adultes monolingues qui apprennent une langue étrangère nous
avons remarqué que les erreurs de genre sont les plus fréquentes
et sont celles qui persistent dans le temps. Les occurrences de genre
prononcées, pour une même structure syntaxique peuvent être
aussi bien valides qu'erronées, ce qui est le signe
38 cité par Deuchar et Quay, 2000
d'une interlangue (une langue se construit sur une seconde
déjà établie). Nous posons l'hypothèse que l'enfant
bilingue précoce va passer par le même processus d'apprentissage
dans l'acquisition du genre, mais contrairement à un adulte, les erreurs
vont se concentrer sur une courte période et ne vont pas
perdurer.
3. 2. Discussion des résultats
Dans la seconde partie de notre travail qui constitue la
partie expérimentale, nous avons codé et recensé toutes
les tours de parole produits par l'enfant et nous y avaons placé la part
des occurrences de genre.
Ce paysage que nous allons décrire présente un
traitement des données des plus générales aux plus
particulières, du dénombrement des productions totales de
l'enfant à la présentation du nombre de cas par âge pour
chaque structure syntaxique. Nous allons d'abord étudier
l'évolution générale des productions pour après y
situer les productions de français, d'anglais et de code mixing.
Ultérieurement ces résultats nous servirons à
établir un parallèle entre les productions de genre en
français et en anglais d'abord les occurrences valides puis les
occurrences erronées. Après nous nous concentrerons sur quelques
exemples de productions de genre erronées dans l'interaction pour finir
sur une comparaison de l'acquisition du genre dans les deux langues et
répondre à l'hypothèse.
L'enfant vit à Montréal, ville dont la langue
officielle est le français mais dont les habitants sont bilingues.
L'étude d'un enfant bilingue pose d'abord la question de la langue
dominante ; au vu des résultats, nous avons défini le
français comme étant la langue dominante, puisque la
moitié de ses tours de parole se fait en français. De plus
l'enfant passe ses journées dans une institution françaises, ce
qui facilite de développement d'une langue par rapport à l'autre
:
« Il est important de savoir si le français
est la langue dominante de l'enfant, c'est-à-dire celle à
laquelle il est le plus exposé. Il s'agit généralement
[...] de la langue parlée dans le milieu de garde. » Paradis,
Crago, Belanger, 2005, 28.
L'enfant a été filmé à partir de
1;10.05 mais ses productions montrent qu'en français il a
dépassé le stade du premier mot dans les deux langues. Le
bilinguisme ne provoque donc pas un retard dans le développement lexical
du langage chez l'enfant. Il n'y a pas non plus de retard dans le
développement syntaxique de l'enfant en français : comme un
enfant monolingue il commence à maîtriser les bases syntaxiques du
français qui vont être suivies, vers 2 ans d'un l'explosion
syntaxique. A ce stade nous pouvons dire que l'enfant suit, en français,
le même développement qu'un monolingue alors que nous allons
observer un
retard dans le développement de l'anglais, qui est la
langue dominée. Avec sa mère, qui a l'anglais comme langue
dominante, l'enfant va parler très tard en anglais, au sens d'un
discours syntaxiquement et lexicalement construit. C'est presque un an
après le français que l'explosion lexicale et syntaxique se
produisent. A partir de 2;09.03 il va non seulement parler en anglais durant
les séances avec sa mère, mais il va aussi spontanément
l'utiliser pour s'adresser à sa mère, si elle passe dans la
pièce alors que la séance se passe avec son père.
Durant cette phase de construction de la langue nous avons
observé la présence de code mixing, dans deux utilisations
différentes très spécifiques et liée au
développement de l'enfant bilingue. Le code mixing a d'abord
été définit comme le moyen qu'a l'enfant de pallier
à un manque dans une langue par l'utilisation d'une autre. Ensuite,
Genesse l'a définit comme une compétence pragmatique : l'enfant
ayant une compétence suffisante dans une langue n'a plus besoin de
recourir à l'autre langue. Ces deux phénomènes, typiques
chez le bilingue, nous renseignent sur le développement des deux
langues. Nous avons vu que lorsque l'enfant utilise l'anglais avec son
père, dans l'emploi de la langue française, le code mixing aura
une compétence pragmatique dans le sens où il est utilisé
pour parler des être ou objets auxquels l'enfant à un affect
très fort, par exemple « daddy ». En anglais nous n'observons
pas la même utilisation du code mixing : non seulement l'enfant l'utilise
beaucoup avec sa mère, mais à deux reprises, il va produire un
grand nombre de phrase en code mixing : ces deux utilisations
précèdent l'explosion lexicale et syntaxiques, et dans leur
utilisation (le code mixing, avec la mère sert à pallier un
manque en anglais) ils nous indique que l'anglais est encore à un stade
intermédiaire, il n'est pas encore maîtrisé, l'enfant est
au même stade de développement syntaxique et lexical où il
était à 1;10.05 en français.
Le français étant la langue dominante, il va
produire non seulement beaucoup plus d'occurrences mais aussi beaucoup de
genre. Nous allons retrouver du genre français dans le code mixing
puisque le français étant la langue dominante, c'est elle qui va
s'insérer dans les productions de la langue dominée. L'explosion
syntaxique se situe, comme pour un enfant monolingue vers 2 ans. L'article
définit et indéfini vont être les structures syntaxiques
les plus présentes chez l'enfant, ce qui parait normal puisque se sont
les srtucture les plus utilisée en français, de même que
les pronoms (masculin, féminin et indéfinis) en anglais. Mais
dans les deux langues, les fautes vont porter sur des fautes de genre
féminin : l'enfant en français (et dans les deux contextes)
maîtrise beaucoup mieux le genre masculin que le genre féminin.
Peut être est-ce lié au contexte : l'enfant met plus d'occurrences
de genre masculin parce que son père parle français ?
3. 3. L'erreur de genre : étude de cas
L'erreur de genre se porte surtout sur les structures
féminines : l'enfant place un masculin au lieu d'un féminin. Dans
le corpus, il est arrivé que sur un même nom, l'enfant alterne une
production valide et une production erronée. Nous allons étudier
deux exemples pour essayer de comprendre le phénomène en
observant la méthode d'enseignement de la langue des parents. Les objets
sur lesquelles vont porter les erreurs sont la bicyclette (interaction avec le
père) et l'auto (interaction avec la
mère).39
Nous allons commencer par étudier la manière
dont l'enfant parle de sa bicyclette, et si le genre valide se stabilise,
comment cela se passe. Le dialogue sur la bicyclette va se faire sur trois
âges :
D'abord à 1 ; 11 . 13 : dans la première partie
de l'échange l'enfant prononce trois fois une occurrence erronée
avant d'être repris par son père. Sur les deux occurrences qui
suivront cette reprise l'enfant ne fera pas d'erreur sur bicyclette. L'erreur
de l'enfant peut être calquée sur celle du père : nous
avons relevé une occurrence où le père se trompe lui aussi
dans le genre. A cet âge-là, puisque le genre n'est pas encore
stabilisé, la moindre erreur du parent peut être reprise par
imitation. C'est ce même phénomène qui se passe quand
l'enfant fait une production valide.
Ensuite, à 2 ; 3. 13, nous avons cinq tours de parole
de l'enfant où cette occurrence apparaît associée à
une structure syntaxique qui implique le genre. La première occurrence,
n'est pas erronée mais elle est importante dans notre argumentation pour
comprendre pourquoi l'enfant fait une erreur sur le mot bicyclette : le mot
« bicycle » est propre au vocabulaire québécois, le
mot, de genre masculin, sert à désigner une bicyclette ; Il est
alors fort possible que l'enfant calque le genre masculin sur le modèle
du mot québécois. L'enfant est repris par le père dans le
dernier tour de parole.
1 ; 10. 29 : l'espace de temps entre cet enregistrement et le
précédent est trop grand pour mesurer directement l'impact de la
reprise du genre sur la bicyclette par le père, cependant il est fort
possible, étant donné que l'enfant ne semble plus faire d'erreur,
que dans cette période de sept mois le feedback du père ait eu un
impact suffisamment fort pour que l'enfant ne fasse plus d'erreur sur cette
occurrence.
Le second dialogue que nous avons choisi tourne autour du mot
« auto ». Cet exemple est très intéressant car il
montre une approche différente de l'erreur. L'interaction se passe avec
la mère : alors qu'elle lui parle l'enfant interagit en français
ce qui va provoquer des complications dans la rectification de l'erreur.
39 Les dialogues sont placés en annexe, fig.
14.
L'échange se passe avec la mère à 2 ; 03.
20 et concerne une auto, à la fois le jouet de l'enfant et la voiture
familiale. L'enfant fait des alternances entre des erreurs et des productions
valides à la fois dans le même discours et dans la même
phrase : le genre féminin est encore très instable (nous avons pu
voir qu'il constitue quasiment l'ensemble des erreurs de l'enfant sur les 17
transcriptions). Sur ce discours l'enfant ne va pas faire une phrase
entière sans faire d'erreur sur une occurrence (adjectif, article,
pronom) et nous n'observons pas de retour négatif de la mère,
puisqu'elle ne lui répond qu'en anglais. Dans la production « MOT:
I don't know where the gros auto is . » la mère va valider l'erreur
de l'enfant « gros auto » et cette erreur validée va se
stabiliser dans les productions suivantes de l'enfant.
Ces deux exemples montrent l'importance du rôle des
parents dans l'acquisition du genre : l'enfant est très sensible
à la production du père ou de la mère et va imiter
lesdites productions. Ceci est entièrement valable pour l'exemple de
l'auto. L'exemple de la bicyclette montre que l'enfant bilingue peut aussi
être confronté à un parler régionnela auquel il doit
s'adapter.
Pendant le processus d'acquisition nous avons pu mettre en
évidence qu'en français les étapes du monolingues sont
retrouvées, il n'y pas de retard. Par contre nous avons observé
un retard en anglais qui n'est sûrement pas dû à un trouble
du langage chez le bilingue, mais à un contexte qui va faire que
l'enfant est amené, hors de la maison à plus parler
français. L'évolution du développement syntaxique est
aussi liée à la manière dont les parents gèrent
l'interaction : l'enfant utilisera beaucoup plus d'occurrences de genre avec
son père qui lui fait raconter des histoires, reconnaître des
images ou chanter, alors qu'avec sa mère il ne fera que s'amuser avec
ses jouets et sera moins amener à parler. Au final le
développement du langage se trouve toujours lié à
l'interaction.
C'est dans la langue dominante, le français, que vont
se faire le plus d'erreurs mais le nombre d'occurrences erronées va
être beaucoup moins important que le nombre de productions valides. Le
français est bien la langue dominante puisque l'anglais ne fait pas
interférence. L'enfant peut faire des erreurs non pas par
interférence directe de l'anglais mais d'une part par imitation des
parents et d'autre part, par interférence du dialecte régional,
fortement influencé par l'anglais. L'enfant utilise le plus souvent les
articles en français et le pronom neutre en anglais mais l'erreur de
genre n'est pas forcément la preuve de la mise en place de deux
systèmes, sinon l'enfant n'en ferait pas.
Ce que l'on a mis en évidence chez l'enfant ne va pas
durer dans le sens où la période transitoire est plus courte que
chez l'adulte si le parent a une bonne pédagogie, c'est-à-dire
qu'il reprend l'enfant en validant ses bonnes productions et en corrigeant les
mauvaises. L'acquisition du bilinguisme chez l'enfant est plus rapide que chez
l'adulte parce qu'elle se passe pendant les processus de myélinisation
des fibres nerveuses. A ce moment-là le cerveau est beaucoup plus
réceptif au développement bilingue. Le temps de transition est
plus long chez l'adulte parce que ces procédures sont achevées :
il y aura donc une seconde langue qui va se développer sur une
première langue dite maternelle. La question est maintenant de savoir,
étant donné que l'enfant et l'adulte suivent les mêmes
processus à différents degrés, si l'enfant possède
une ou deux langues maternelles.
L'étude du bilinguisme est un univers au carrefour de
beaucoup de discipline que nous avons pu évoquer dans ce mémoire.
La sociolinguistique et la psycholinguistique nous ont servi à placer
l'enfant que nous avons étudié dans un bilinguisme à
plusieurs niveaux : précoce et simultané, à tendance
neutre au sein de la famille, exogène, coordonné et dominant.
Le cerveau nous a permis de comprendre le fonctionnement du
cerveau bilingue : plus l'enfant est jeune, plus la plasticité du
cerveau lui permet d'acquérir les langues de son environnement. Au
contact de son environnement l'enfant va développer diverses
stratégies dans ses productions.
Parmi ces stratégies le code mixing tient une place
important, car en début d'acquisition il est le signe de la dominance
d'une langue, ici le français, pour devenir plus tard une production
volontaire et contrôlée dans une intention pragmatique.
Notre étude, pour laquelle un corpus important a
été traité, c'est concentrée sur l'acquisition du
genre : elle nous a permis de voir une évolution sur un peu plus de
quatre années dans le développement de l'enfant. Celui-ci
développe très rapidement des occurrences de genre
français mais plus tardivement de l'anglais, ce qui parait normal
puisque l'une est langue dominante et l'autre langue dominée. Les
erreurs de genre se portent, dans les deux langues sur le féminin, genre
qui semble le plus difficile à acquérir pour l'enfant.
L'adulte est capable d'apprendre deux langues, que se soit en
immersion ou par un enseignement. Mais cet apprentissage n'est pas de l'ordre
de l'acquisition car les deux, pour une même finalité, ne suivent
pas les même processus .L'évolution de l'acquisition des genres
dans les deux langues suit les mêmes processus puisqu'à ce stade
le cerveau traite les deux langues de la même manière, ce sont les
contraintes sociales qui impliquent la dominance du français qui vont
provoquer un retard en anglais. Autrement dit à cet âge l'enfant
est tout à fait capable d'appréhender les deux langues comme
maternelles.
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ANNEXES
Rimbaud Sophie L'acquisition du genre et le code mixing chez
le bilingue précoce 2009
Figure 1 : Article du Midi Livre, mars 2009
80
@Begin
@Languages: en, fr
@Participants: CHI Olivier Target_Child, MOT Cheryl Mother, FAT
Bruno Father, EXP Elena Investigator
@ID: en, fr|genesee|CHI|1;10.05||||Target_Child||
@ID: en, fr|genesee|MOT|||||Mother||
@ID: en, fr|genesee|FAT|||||Father||
@ID: en, fr|genesee|EXP|||||Investigator||
@Birth of CHI: 28-AUG-1990
@Coder: Elena Nicoladis
@Date: 03-JUL-1992
@Location: Montreal
@Situation: Parents playing with Olivier and toys in living
room.
@Time Duration: 18:50-19:45
*CHI: oh !
%cod: $LAN:B $ADD:MOT
*MOT: are you gonna [: going to] crawl in the back ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: ooh .
%pho: 3:
%cod: $LAN:B $ADD:MOT
*CHI: yy open .
%pho: An6 opan
%cod: $LAN:E $ADD:MOT
*MOT: open ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: kay [: okay] open what ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: what do you say ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: what's the magic word ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: open .
%pho: opEn
%cod: $LAN:E $ADD:MOT
*MOT: open ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: yy .
%pho: d&
%cod: $LAN:I $ADD:MOT
*MOT: open ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: Olivier, qu'est ce que'on dit ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*MOT: what do you say after ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: qu'est ce qu'on dit, Olivier ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: qu'est ce qu'on dit ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: Olivier ?
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*CHI: yy yy yy .
%pho: A bu: dEn
%cod: $LAN:I $ADD:MOT
*CHI: open .
%pho: opEn
%cod: $LAN:E $ADD:MOT
*MOT: open (.) what's the magic word ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: Olivier, qu'est ce qu'on dit ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*MOT: what's the magic word ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: please ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: please .
%pho: pi:z
%cod: $LAN:E $ADD:MOT
*MOT: there you go .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: say thank you merci .
%cod: $LAN:M $ADD:CHI
*CHI: yy yy .
%pho: Aj6 jAj6
%cod: $LAN:I $ADD:MOT
*CHI: open .
%pho: opEn
%cod: $LAN:E $ADD:MOT
*MOT: sorry, Mommy forgot to open (.) there .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: open .
%pho: op
%cod: $LAN:E $ADD:MOT
*MOT: yeah .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: say merci .
%cod: $LAN:M $ADD:CHI
*MOT: hmm ?
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*MOT: merci .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: yy !
%pho: Ap
%cod: $LAN:I $ADD:MOT
*MOT: is it stuck ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: is it stuck in there, honey ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: I think it's stuck .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: oh !
%pho: o
%cod: $LAN:B $ADD:MOT
*CHI: yy !
%pho: wa
%cod: $LAN:I $ADD:MOT
*FAT: Olivier ?
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*FAT: yé [= il est] où ton garage ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: uh !
%pho: A
%cod: $LAN:B $ADD:FAT
*CHI: yy !
%pho: A
%cod: $LAN:I $ADD:FAT
*CHI: yy (.) là^bas .
%pho: AZ6Z6 # abA
%cod: $LAN:I $ADD:FAT
*FAT: amène ton garage ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*MOT: bring it over here .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: c'est quoi un garage ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: toutou .
%pho: tutu
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: un toutou .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: yy .
%pho: S6
%cod: $LAN:I $ADD:FAT
*FAT: un cheval !
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: Olivier ?
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*CHI: uh !
%pho: A
%cod: $LAN:B $ADD:FAT
*FAT: c'est quoi ça ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: baby .
%pho: bebi
%cod: $LAN:E $ADD:FAT
*CHI: ooh bobo .
%pho: u: bobo
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: bobo ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*EXP: O@u .
%cod: $LAN:B $ADD:CHI $MOT $FAT
*FAT: bébé un bobo ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: ah !
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*CHI: bobo .
%pho: bobo
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: bobo !
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: bobo yy .
%pho: bobo bebo
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: bobo bébé .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: bobo bébé .
%pho: bobo bebe
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: qu'est ce t'as [: tu as] mangé comme souper ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: poulet .
%pho: pulE
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: t'as [: tu as] mangé du [: de le] poulet ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: avec quoi ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: des patates ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: oh !
%pho: o
%cod: $LAN:B $ADD:FAT
%com: whispered
*FAT: du [: de le] poulet des patates ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*MOT: come here, honey .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: what's that ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: what's that ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: what's that ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: yy .
%pho: Ado
%cod: $LAN:I $ADD:MOT
*MOT: huh ?
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*MOT: what's that over there ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: Daddy's bike ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: Olivier, where's Daddy's bike ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: ah !
%pho: a
%cod: $LAN:B $ADD:FAT
*MOT: what's that ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: yy .
%pho: ga uNg6
%cod: $LAN:I $ADD:MOT
*FAT: Oli(vier) +/.
*MOT: you don't eat that .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: it's not for eating, honey .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: 0.
%act: whines and stamps feet
*MOT: this is not the time for a temper tamtrum !
*EXP: 0.
%act: laughs
*FAT: oh !
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*CHI: oh !
%pho: o
%cod: $LAN:B $ADD:FAT
*MOT: is that soft ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: balle ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: la@AFV balle .
%pho: la ba
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: la balle .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: in [: elle est] quelle couleur la balle ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: balle .
%pho: bal
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: in [: elle est] quelle couleur la balle ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: bleue !
%pho: b3:
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: bleue .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*MOT: can you do something with it ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: booboo baby .
%pho: bubu bebi
%cod: $LAN:E $ADD:MOT
*FAT: Olivier ?
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*CHI: yy .
%pho: ai
%cod: $LAN:I $ADD:FAT
*CHI: yy .
%pho: Anu
%cod: $LAN:I $ADD:FAT
*FAT: xxx Olivier ?
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*CHI: yy .
%pho: AZu
%cod: $LAN:I $ADD:FAT
*CHI: uh ?
%pho: A
%cod: $LAN:B $ADD:FAT
*CHI: uh ?
%pho: A
%cod: $LAN:B $ADD:FAT
*CHI: encore ?
%pho: AkO
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: encore ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*MOT: don't touch !
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: don't touch .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: dis bonjour .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: yy ?
%pho: nA:
%cod: $LAN:I $ADD:FAT
*FAT: Olivier, dis bonjour .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: yy ?
%pho: nA
%cod: $LAN:I $ADD:FAT $EXP
*FAT: Olivier, dis bonjour à Eléna .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: bonjour Eléna .
%pho: bo~Z3 elena
%cod: $LAN:F $ADD:EXP
*CHI: bonjour yy .
%pho: bo~Z3 na
%cod: $LAN:F $ADD:EXP
*MOT: that's a good boy, honey .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: bravo !
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*FAT: Olivier ?
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*FAT: y sont ou tes chaussures ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: chaussure .
%pho: SoSu
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: chaussures ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: chau(ssure) .
%pho: So
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: oh !
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*CHI: yy .
%pho: A d6 A
%cod: $LAN:I $ADD:FAT
*MOT: where are your shoes ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: yy Daddy .
%pho: rA d&di
%cod: $LAN:B $ADD:MOT
*MOT: huh ?
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*FAT: ça c'est parce que c'est le temps de parler .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: normalement là .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: yy .
%pho: A s& A
%cod: $LAN:I $ADD:FAT
*FAT: Olivier, non .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: ooh .
%pho: u:
%cod: $LAN:B $ADD:FAT
*FAT: Olivier, on le mange pas chéri .
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*FAT: qu'est ce que t'as [: tu as] mangé pour souper ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: hein ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: qu'est ce que t'as [: tu as] mangé pour souper ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: yy !
%pho: 6dA
%cod: $LAN:I $ADD:FAT
*MOT: a carrot ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: qu'est ce que t'as [: tu as] mangé ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*MOT: carrot [>] ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: <du [: de le] poisson> [<] ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: yy !
%pho: 6pA
%cod: $LAN:I $ADD:MOT
*CHI: yy .
%pho: 6pA
%cod: $LAN:I $ADD:MOT
*CHI: yy .
%pho: ka:
*MOT: you want some juice, honey ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: no no .
%pho: no no
%cod: $LAN:E $ADD:MOT
*MOT: no juice .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: open .
%pho: obEn
%cod: $LAN:E $ADD:MOT
*MOT: open ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: open ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: close ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: yy ?
%pho: do:
%cod: $LAN:I $ADD:FAT
*CHI: dodo ?
%pho: do:do
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*EXP: 0.
%act: laughs
*CHI: yy .
%pho: dodu
%cod: $LAN:I $ADD:FAT
*MOT: there .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: Olivier garde [: regarde] .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: c'est quoi Olivier ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: c'est du [: de le] yogourt ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: open .
%pho: bEn
%cod: $LAN:E $ADD:MOT
*MOT: open ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: there .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: Olivier opened it all by himself .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: what's this ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: uh ?
%pho: a
%cod: $LAN:I $ADD:MOT
*FAT: bonhomme ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: un bonhomme ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: bonhomme .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*MOT: xxx a little monster (.) I don't know .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: it's Gonzo .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: oh, Gonzo xxx .
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*MOT: Gonzo !
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*MOT: Gonzo !
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*MOT: eh ?
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*MOT: Gonzo .
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*MOT: can you say Gonzo ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: yy .
%pho: A
%cod: $LAN:I $ADD:MOT
*EXP: qu'est ce tu vois ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: yy .
%pho: nA
%cod: $LAN:I $ADD:EXP
*MOT: what is that ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: what is that ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: Olivier, il est où ton chapeau ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: uh ?
%pho: A
%cod: $LAN:I $ADD:FAT
*FAT: ton chapeau ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: chamb(re) .
%pho: Sa~m
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: il est où ton chapeau ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: chamb(re) .
%pho: Sa~m
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: dans ta chambre ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: va le chercher .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: ton chapeau ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: caché .
%pho: kEze:
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*MOT: go get your hat, honey .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: go get your hat .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: 0aux 0 subj wanna [: want to] put your hat on ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: oh .
%pho: o
%cod: $LAN:B $ADD:MOT
*EXP: 0.
%act: laughs
*MOT: where's Daddy's car ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: ow !
%pho: au
%cod: $LAN:E $ADD:MOT
*CHI: yy .
%pho: goz3
%cod: $LAN:I $ADD:MOT
*MOT: chaussure !
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: yy gone .
%pho: i gan
%cod: $LAN:E $ADD:MOT
*MOT: where's Daddy's car, honey ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: yyy done .
%pho: a di da~
%cod: $LAN:E $ADD:MOT
*MOT: huh ?
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*CHI: là^bas !
%pho: apa
%cod: $LAN:F $ADD:MOT
*FAT: là^bas ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*MOT: that's Daddy's bike .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: Olivier .
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*EXP: 0.
%act: laughs
*CHI: là^bas !
%pho: apa
%cod: $LAN:F $ADD:FAT $MOT
*FAT: tu parles bien d'habitude .
%cod: $LAN:F $ADD:EXP
*CHI: elle est là .
%pho: Elela
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: elle est là ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: bike !
%pho: bi:k
%cod: $LAN:E $ADD:FAT
*FAT: bike .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: bike no .
%pho: bi:k6 no
%cod: $LAN:E $ADD:FAT
*FAT: c'est à qui la bicyclette Olivier ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: bicycle(tte) .
%pho: bisibEt
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: y'é [= il est] où ton bike ?
%cod: $LAN:M $ADD:CHI
*CHI: uh !
%pho: A
%cod: $LAN:I $ADD:FAT
*CHI: là^bas .
%pho: a ba
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: là^bas .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*MOT: là^bas .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*MOT: what's your name ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: ah parti .
%pho: O badi
%cod: $LAN:F $ADD:MOT
%com: his parents later explained that this meant "ah parti"
*EXP: abadi@u [=! laughs] ?
%cod: $LAN:I $ADD:FAT $MOT
*FAT: comment [/] comment tu t'appelles ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: Olivier Lasalle ?
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*FAT: hein ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: oh !
%pho: o
%cod: $LAN:B $ADD:MOT
*CHI: open .
%pho: opEn
%cod: $LAN:E $ADD:MOT
*MOT: open, there .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: yy balle .
%pho: 6ZA b&l
%cod: $LAN:F $ADD:MOT
*MOT: ball ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: are you gonna [: going to] throw the ball to Daddy ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: throw the ball to Daddy .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: ah bravo !
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*CHI: encore encore .
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: encore ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: okay .
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*FAT: attrape .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: mets tes mains .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: mets tes mains comme ça .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: (a)ttrappe .
%pho: trap
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*MOT: oh, be nice .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: give me five ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: xxx Papa .
%cod: $LAN:B $ADD:FAT
*FAT: qu'est ce qu'on dit ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: uh please .
%pho: A piz
%cod: $LAN:E $ADD:FAT
*FAT: please .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: Maman xxx yy .
%pho: mama~ xxx na
%cod: $LAN:B $ADD:FAT
*FAT: Eléna ?
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*EXP: xxx vas^y .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: xxx .
*EXP: 0.
%act: laughs
*FAT: Olivier, est ce que tu sautes ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: Olivier, est ce que tu sautes ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*MOT: all done .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: all done .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: all done .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: Olivier, gar [= regarde] .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: regar [= regarde] .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
%act: winds musical unicorn
*MOT: unicorn !
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: 0.
%act: audible intake of breath
*MOT: xx music ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: xxx .
*FAT: gar [= regarde] .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*MOT: wow !
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*MOT: xx music ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: yy !
%pho: gE
%cod: $LAN:I $ADD:MOT
*CHI: yy .
%pho: dYt
%cod: $LAN:I $ADD:MOT
*MOT: 0aux that a horse ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: is that a horse ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: est ce que tu dis bonjour ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: no bonjour .
%pho: no bo~Z3
%cod: $LAN:M $ADD:FAT
*FAT: no bonjour !
%cod: $LAN:M $ADD:CHI
*MOT: how come ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: 0aux you want some milk ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: would you like some milk, Olivier ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: oh open .
%pho: o opEn
%cod: $LAN:E $ADD:MOT
*MOT: it's open .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: 0aux you want me to take it out ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: do you want me to take it out for you ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: ou(t) .
%pho: au
%cod: $LAN:E $ADD:MOT
*MOT: take out please ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: please .
%pho: piz
%cod: $LAN:E $ADD:MOT
*FAT: <est ce qu'on joue au casse+tête> [?] ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: Olivier y'é [: il est ] où le
casse+tête ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: oh .
%pho: o
%cod: $LAN:B $ADD:FAT
*CHI: yy .
%pho: gaip6
%cod: $LAN:I $ADD:FAT
*MOT: Olivier look !
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: it's broken .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: it's broken .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: yy !
%pho: 6da
%cod: $LAN:I $ADD:MOT
@Comment: 10 minutes
*MOT: Olivier look !
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: it's broken .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: see ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: it's broken .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: cassé, Olivier ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: ooh ?
%pho: u
%cod: $LAN:B $ADD:MOT
*MOT: is it broken ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: is it broken , Olivier ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: xxx .
*MOT: is it broken ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: (br)oken .
%pho: okEn
%cod: $LAN:E $ADD:MOT
*FAT: he's always like this when you want him talking xxx .
%cod: $LAN:E $ADD:EXP
*EXP: xxx .
*MOT: Olivier ?
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*EXP: xxx .
100
*MOT: it's broken again .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: it's broken .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: encore !
%pho: a~kO
%cod: $LAN:F $ADD:MOT
*EXP: encore [=! laughs] !
%cod: $LAN:F $ADD:FAT $MOT
*CHI: all done !
%pho: O dAn
%cod: $LAN:E $ADD:MOT
*FAT: <all done> [>] .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: <all done> [<] .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: okay we'll put <it away> [>] .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: Olivier, Daddy fait dodo .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
%act: pretends to be asleep
*CHI: non [=! whines] .
%pho: no~
%cod: $LAN:F $ADD:MOT
*MOT: you said all done .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: all done .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: we put it away .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: all done .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: Daddy's sleeping honey .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: xxx .
*MOT: Olivier go get +/.
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
101
*MOT: <do we go get> [//] do you wanna [: want to] get your
hat ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: go put your hat on .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: Olivier, est ce qu'on va au [: à le] parc ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: au parc ?
%pho: o park
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
%com: the "r" is French, but he also noticeably pronounces the
"k" at the
end, like in English
*MOT: who's at the park ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: who's at the park ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: est ce que tu joues au [: à le] ballon au [:
à le] parc ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: au parc yy balo(n) +...
%pho: o park i balo~
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: ballon ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: avec Georges ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: avec Georges ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: ballon pas Geo(rges) .
%pho: balO~ pA Z6
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*CHI: open .
%pho: obEn
%cod: $LAN:E $ADD:MOT
*MOT: open .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: open .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: dis ton chapeau ?
102
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: il est où ton chapeau ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: yy bike .
%pho: ake bEk
%cod: $LAN:E $ADD:FAT
*FAT: à Québec ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*MOT: 0.
%act: laughs
*EXP: 0.
%act: laughs
*FAT: oh !
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*FAT: Daddy's bike .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: oh !
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*MOT: the bike .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: prends ton chapeau .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*MOT: there .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: bring your hat over .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: chapeau ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: c'est à qui le chapeau ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: xxx .
*FAT: Olivier .
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*FAT: comment tu t'appelles ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: Olivier .
%pho: Olive
103
%cod: $LAN:B $ADD:FAT
*FAT: Olivier Laselle ?
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*MOT: what's your name ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: comment tu t'appelles ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: encore .
%pho: a~kO
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*CHI: au parc .
%pho: o park
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*MOT: 0.
%act: laughs
*MOT: not now, honey .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: later .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: later .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: soon .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: we'll go soon, okay, Olivier [>] ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: < Olivier, tantôt> [<] .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: au parc ?
%pho: o park
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: tantôt .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: yy ?
%pho: d6di
%cod: $LAN:I $ADD:FAT
*FAT: l'auto Audi ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
104
*FAT: elle est quelle couleur l'Audi ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: yy done .
%pho: i dAn
%cod: $LAN:E $ADD:MOT
*CHI: yy done .
%pho: i dAn
%cod: $LAN:E $ADD:MOT
*MOT: all done .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: Olivier, est ce qu'on a vu un camion cet après+midi
?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: hein ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: un camion ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*MOT: xxx .
*CHI: ah !
%pho: a
%cod: $LAN:B $ADD:FAT
*FAT: is it broken ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: cassé .
%pho: kase:
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: cassé .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: eh !
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*MOT: don't eat .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: don't eat .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: c'est [: ce n'est] pas bon .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*MOT: don't eat .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
105
*CHI: eat .
%pho: it
%cod: $LAN:E $ADD:FAT $MOT
*FAT: non .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: open .
%pho: opEn
%cod: $LAN:E $ADD:MOT
*MOT: open .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: 0aux you want me to take it out ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: tu veux du [: de le] jus, Olivier ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: Olivier ?
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*FAT: tu veux du [: de le] jus ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*MOT: stuck !
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: it's stuck !
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: who's in the park, Olivier ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: au parc .
%pho: o park
%cod: $LAN:F $ADD:MOT
*MOT: who's in the park ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: ah Nana .
%pho: a n&na
%cod: $LAN:B $ADD:MOT
*MOT: Nana .
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*MOT: who else is in the park ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: Georges ?
106
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*CHI: Georges ?
%pho: ZAZ
%cod: $LAN:B $ADD:FAT
*FAT: Tim ?
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*CHI: parti Tim ?
%pho: p6ti tIm
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: parti Tim ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: parti Tim .
%pho: p6ti tIm
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*CHI: parti Tim .
%pho: p6ti tIm
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*MOT: can you slide in the park, honey ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: 0.
%act: laughs
*MOT: do you slide in the park ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: tu glisses !
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: oh !
%pho: o:
%cod: $LAN:B $ADD:MOT
*MOT: oh !
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*MOT: ah !
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*CHI: oh cassé .
%pho: a kase:
%cod: $LAN:F $ADD:MOT
*MOT: passé .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
107
*FAT: Olivier ?
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*CHI: tu glisses !
%pho: ty glis
%cod: $LAN:F $ADD:MOT
*FAT: c'est qui ça, hein ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: hein ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: c'est qui ça ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: all gone !
%pho: a gAn
%cod: $LAN:E $ADD:FAT $MOT $EXP
*MOT: all gone .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: c'est qui ça ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: ah cassé !
%pho: a k&de
%cod: $LAN:F $ADD:MOT
*MOT: cassé .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: cassé .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: c'est qui ça ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: Caillou ?
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*FAT: Olivier ?
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*FAT: Olivier ?
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*FAT: regar [: regarde] !
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: Caillou ?
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
108
*FAT: Caillou .
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
%com: Caillou is a character in French children's books
*CHI: Caillou .
%pho: kaiju
%cod: $LAN:B $ADD:FAT
*FAT: Caillou .
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*MOT: what's he doing ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: Caillou dans le bain ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: un bain ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: un@AMV bain .
%pho: 8~ be~
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: un bain .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: un bain .
%pho: 8~ be~
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: un bain .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: Caillou il est tout nu ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: tout nu Daddy .
%pho: tu ny dadi
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*MOT: 0.
%act: laughs
*CHI: tout nu .
%pho: tu ny
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: toute [*] nu ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
%err: toute = tout
109
*FAT: tout nu Caillou ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*MOT: 0.
%act: laughs
*CHI: oh !
%cod: $LAN:B $ADD:MOT
*CHI: bobo !
%pho: bobo:
%cod: $LAN:F $ADD:MOT
*MOT: bobo ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*MOT: who's got a bobo ?
%cod: $LAN:M $ADD:CHI
*FAT: c'est qui ça ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: bobo !
%pho: bobo:
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: mais non c'est pas un bobo .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: c'est quoi ça ici ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: un cancan .
%pho: 8~ ka~ka~
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: un quoi ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: canard .
%pho: kaina~
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: un canard .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: canard .
%pho: kaina
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*MOT: a duck ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
110
*FAT: canard .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: a duck .
%pho: 6dA
%cod: $LAN:E $ADD:MOT
*MOT: a duck ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: a duck .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: a duck .
%pho: 6dA
%cod: $LAN:E $ADD:MOT
*FAT: xx ?
*FAT: fait pipi dans le pot .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: uh pipi pot .
%pho: 6 pipi po:
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: pipi pot ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: pipi pot ?
%pho: pibi po
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: pipi pot !
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: pipi pot .
%pho: pibi po
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: pipi pot !
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: pipi pot .
%pho: pipi po
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: pipi pot !
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: pipi pot .
%pho: pipi po
111
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: alors elle a fait un caca ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: un ca(ca) !
%pho: in ka
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: un caca !
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: pot .
%pho: po
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: c'est quoi ça ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: c'est un chapeau ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: yy chat !
%pho: da Sa
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: un chat .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: des poissons ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: 0.
%pho: hums to himself
*FAT: Olivier ?
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*MOT: did you make a poopoo, honey ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: no poopoo .
%pho: no pupu:
%cod: $LAN:E $ADD:MOT
*MOT: no poopoo .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: Olivier regar [: regarde] !
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: Olivier regar [: regarde] !
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
112
*FAT: Olivier ?
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*FAT: les pommes !
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: chat !
%pho: Sa
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: ça c'est un chien .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: dehors <le chat> [>] !
%pho: d6Or l6 ta
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: <ça c'est un chien> [<] .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*MOT: that's right .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: dehors chat !
%pho: d6Or Sa
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: <ça c'est un chat> [>] .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*MOT: xxx [<] puis dehors .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: chat ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: yy baby .
%pho: b6 bebi
%cod: $LAN:E $ADD:MOT
*MOT: the dog is outside ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: des pommes ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: pommes ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: Olivier ?
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*FAT: est ce que t'aimes [: tu aimes] les pommes ?
113
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: est ce que tu manges des pommes ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: est ce que tu manges des pommes ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: Maman !
%pho: mama~
%cod: $LAN:B $ADD:MOT
*MOT: what, sweetie .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: elle est où Maman ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: oh !
%pho: o
%cod: $LAN:B $ADD:FAT
*FAT: elle est où Maman ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: Olivier ?
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*CHI: there Mama .
%pho: dEr mama
%cod: $LAN:E $ADD:FAT
*CHI: there pomme .
%pho: dEr pO~m
%cod: $LAN:M $ADD:FAT
*FAT: c'est quoi ça ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: Olivier ?
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*FAT: Olivier ?
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*FAT: c'est quoi ça ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: yy (.) open .
%pho: 6da obEn
%cod: $LAN:E $ADD:MOT
*FAT: Olivier ?
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*FAT: c'est un chien ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: chien ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: yy .
%pho: 6du6
%cod: $LAN:I $ADD:FAT
*FAT: chien dehors .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*MOT: is Daddy's car outside, Olivier ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: a Daddy car outside +/.
%pho: 6 d&di ka daudaid
%cod: $LAN:E $ADD:MOT
*MOT: outside .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: outside .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: is it outside, honey ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: is this your shoe ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: xxx .
*MOT: whose are these ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: Maman .
%pho: mama~
%cod: $LAN:B $ADD:MOT
*MOT: Mommy's shoes ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: shoes .
%pho: Su:s
%cod: $LAN:E $ADD:MOT
*MOT: shoes .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: Olivier ?
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*FAT: il est où le chat ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: parti .
%pho: pati
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: bien non le chat ici regarde .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: il est où le chat ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: yy .
%pho: i&no
%cod: $LAN:I $ADD:FAT
*FAT: chat ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: il est où le chat ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: hein ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: chat ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: un chat .
%pho: 8~ Sa
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: non .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: ça c'est une grenouille .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: c'est un cochon ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: je .
%pho: Z6
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: un poussin .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: un poussin .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: regar [: regarde] le chat, Olivier .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: un chat !
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: pouce .
%pho: pus
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: pouce .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: Olivier, il est où le canard ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: parti .
%pho: pati
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: non bien non garde [: regarde] y'é [: il est] ici le
canard .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: garde [: regarde] .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: Olivier who are your friends at the day+care ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: ah parti .
%pho: a pati
%cod: $LAN:F $ADD:MOT
*MOT: no, <what are> [/] what are their names ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: Rémi ?
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*CHI: parti .
%pho: pati
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: Rémi ?
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*FAT: y'é [: il est] où Rémi ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*MOT: don't eat , don't eat that Olivier .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*FAT: bon .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: okay .
%cod: $LAN:B $ADD:CHI
*FAT: tiens .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: au parc .
%pho: o park
%cod: $LAN:F $ADD:MOT
*MOT: soon, Olivier .
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: soon, okay ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*MOT: we'll go in the park soon ?
%cod: $LAN:E $ADD:CHI
*CHI: park ?
%pho: bark
%cod: $LAN:E $ADD:FAT $MOT
*FAT: tantôt .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: yy .
%pho: bi
%cod: $LAN:I $ADD:FAT
*FAT: Olivier est ce que tu me donnes un beau bec ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: donne^moi un beau bec .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: donne^moi un beau bec .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: donne^moi un beau bec .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: yy !
%pho: hi
%cod: $LAN:I $ADD:FAT
*CHI: yy (.) bye .
%pho: bOk bai
%cod: $LAN:B $ADD:FAT
*FAT: on le met dans ta poche .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: dans ta poche ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: non .
%pho: no~
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: dans ta poche ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: là (.) là là .
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: tu veux mettre le bonhomme dans ta poche ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: bonhomme dans ta poche ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: tiens .
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: il est où le bonhomme ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*FAT: il est où le bonhomme ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: 0.
%act: whines
*CHI: non (.) non là .
%pho: no~ no~ la
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
*FAT: pas dans la poche ?
%cod: $LAN:F $ADD:CHI
*CHI: pas là (.) là (.) là .
%pho: pa la la la
%cod: $LAN:F $ADD:FAT
@End
Figure 2 : Pranscription du corpus Genesee, 1;10.05
1. 1;11.10
« *EXP: il t'appelle Daddy au [: à le] lieu de
Papa ?
*FAT: ça dépend ça dépend il
faut dire .
*FAT: quand (.) (.) Cheryl est ici il va plus m'appeler
Daddy parce que Cheryl va dire +/. *EXP: Daddy .
*FAT: puis moi xxx appeler Maman xxx Papa . »
2. 2;1.29
« *MOT: can you open it (.) and see what's inside ?
*CHI: 0.
*CHI: inside »
3. 2;1.29
« *MOT: what's in the bag ? *CHI: dans le bag ?
»
4. 2;10.29
« *FAT: qu'est ce que c'est ? *CHI: le cheval !
*FAT: oh !
*FAT: et ici ?
*CHI: ah oui ça .
*CHI: ça c'est à la ferme .
*FAT: c'est des choses qui sont dans la ferme, hein ?
*FAT: qu'est ce que c'est ? *CHI: 0.
*FAT: Olivier, qu'est ce que c'est ?
*CHI: une mache !
*FAT: une vache .
*CHI: une vache . »
4. 2;.6.03
*CHI: conduit le fire engine .
*CHI: <there ano(ther)> [//] there la man . *CHI: je
veux push la neige
2; 01.29
*CHI: dans le bag ?
*CHI: qu'est ce qu'y a dans le bag ?
Figure 3 : exemples cités dans le texte
100
40
60
20
90
80
70
50
30
10
0
Total genre Anglais Français
Figure 3 : Courbe de l'évolution du genre
Figure 5 : Evolution de l'article en français
Figure 6 : Evolution du déterminant en
français
Figure 7 : Evolution du pronom et de l'adjectif en
français
|
Article masc
|
Article fem.
|
Article ind.masc
|
Article ind. Fém.
|
article partitif masc.
|
Article partitif fem.
|
Déterminant masc.
|
Déterminant fem.
|
Déterminant poss. masc
|
Déterminant poss.féminin
|
Total
|
1;10.05
|
|
2
|
7
|
|
|
|
|
|
|
|
9
|
1;11.10
|
|
1
|
1
|
|
|
|
|
|
|
|
2
|
1;11.13
|
23
|
13
|
16
|
|
4
|
|
|
|
1
|
|
59
|
1;11.15
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
2;01.29
|
17
|
1
|
1
|
|
|
|
|
|
|
|
21
|
2;03.13
|
34
|
8
|
6
|
|
1
|
|
3
|
|
2
|
3
|
67
|
2;03.20
|
6
|
17
|
|
|
|
|
|
|
|
|
32
|
2;05.00
|
25
|
4
|
4
|
|
1
|
|
|
|
|
2
|
39
|
2;06.03
|
10
|
6
|
3
|
|
|
|
|
|
2
|
|
23
|
2;09.03
|
13
|
|
1
|
|
6
|
1
|
|
1
|
|
|
22
|
2;09.07
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
2;10.29
|
|
8
|
|
|
|
|
|
|
|
|
8
|
2;10.29
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
2;11.15
|
6
|
1
|
8
|
1
|
1
|
|
|
|
1
|
4
|
23
|
3;06.09
|
1
|
1
|
|
|
|
|
|
|
3
|
|
5
|
3;06.14
|
14
|
4
|
|
|
|
|
|
|
5
|
2
|
33
|
4;00.9
|
6
|
6
|
8
|
|
5
|
|
|
|
|
3
|
32
|
Total
|
163
|
73
|
75
|
6
|
12
|
|
3
|
|
14
|
14
|
405
|
Tableau 8 : Déterminants valides en français
40
50
30
20
10
0
Article masc Article fem. Article ind.masc
Figure 9 : Illustration de l'évolution des occurrences
valides les plus fortes
Age
|
Nom masculin
|
Nom féminin
|
Adjectif masculin
|
Adjectif féminin
|
Pronom masculin
|
Pronom féminin
|
Total
|
1;10.05
|
|
|
|
|
|
|
|
1;11.10
|
|
|
1
|
|
|
|
1
|
1;11.13
|
|
|
5
|
|
|
|
5
|
1;11.15
|
|
|
|
|
5
|
|
5
|
2;01.29
|
|
|
|
|
|
|
|
2;03.13
|
|
|
9
|
|
18
|
|
27
|
2;03.20
|
|
|
|
3
|
5
|
4
|
12
|
2;05.00
|
2
|
|
|
1
|
9
|
|
10
|
2;06.03
|
|
|
|
|
|
|
|
2;09.03
|
|
|
3
|
|
3
|
1
|
7
|
2;09.07
|
|
|
|
|
|
|
1
|
2;10.29
|
2
|
|
7
|
1
|
5
|
3
|
16
|
2;10.29
|
|
|
|
|
|
|
|
2;11.15
|
|
|
1
|
1
|
4
|
|
6
|
3;06.09
|
|
|
|
|
|
|
|
3;06.14
|
|
|
5
|
|
18
|
2
|
25
|
4;00.9
|
|
|
9
|
|
16
|
5
|
30
|
Total
|
4
|
|
40
|
7
|
83
|
15
|
145
|
Tableau 10 : Pronoms et noms valides en français
35
30
25
20
15
10
5
0
Adjectif masculin valide pronom masculin valide pronom
féminin valide
Figure 11 : Evolution des occurrences valides les plus fortes
Age
|
Article masc
|
Article fem.
|
Article ind.masc
|
Article ind. Fém.
|
Article partitif masc.
|
Article partitif fem.
|
Déterminant masc.
|
Déterminant fem.
|
Déterminant poss. masc
|
Déterminant poss.féminin
|
Total
|
1;10.05
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
1;11.10
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
1;11.13
|
|
1
|
1
|
|
|
|
|
|
|
|
2
|
1;11.15
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
2;01.29
|
1
|
1
|
|
|
|
|
|
|
|
|
2
|
2;03.13
|
|
3
|
1
|
1
|
5
|
|
|
|
|
|
10
|
2;03.20
|
1
|
7
|
|
|
1
|
|
|
|
|
|
9
|
2;05.00
|
|
3
|
|
|
|
|
|
|
|
|
3
|
2;06.03
|
2
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
2
|
2;09.03
|
|
|
1
|
1
|
|
|
|
|
|
|
2
|
2;09.07
|
|
1
|
1
|
|
|
|
|
|
|
|
2
|
2;10.29
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
2;10.29
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
2;11.15
|
|
|
|
1
|
|
|
|
|
|
|
1
|
3;06.09
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
|
3;06.14
|
|
4
|
4
|
|
|
|
|
|
|
|
8
|
4;00.9
|
|
1
|
|
|
|
|
|
|
3
|
|
4
|
Total
|
4
|
21
|
8
|
3
|
6
|
|
|
|
3
|
|
46
|
Tableau 12 : Déterminants erronés en
français
Article masc Article fem.
8
7
6
5
4
3
2
1
0
Figure 13 : Evolution des occurrences erronées les plus
fortes
128
Age
|
Nom masculin
|
Nom féminin
|
Adjectif masculin
|
Adjectif féminin
|
Pronom masculin
|
Pronom féminin
|
Total
|
1;10.05
|
|
|
|
|
|
|
|
1;11.10
|
|
|
|
|
1
|
|
1
|
1;11.13
|
|
|
|
|
|
|
|
1;11.15
|
|
|
|
|
|
|
|
2;01.29
|
|
|
|
|
|
|
|
2;03.13
|
|
|
|
1
|
|
|
1
|
2;03.20
|
|
|
|
12
|
|
4
|
16
|
2;05.00
|
|
|
|
3
|
|
2
|
5
|
2;06.03
|
|
|
|
|
|
2
|
2
|
2;09.03
|
|
|
|
|
|
1
|
1
|
2;09.07
|
|
|
|
|
|
|
|
2;10.29
|
|
|
|
|
|
|
|
2;10.29
|
|
|
|
|
|
|
|
2;11.15
|
|
|
|
|
|
|
|
3;06.09
|
|
|
|
|
|
|
|
3;06.14
|
|
|
|
|
|
|
|
4;00.9
|
|
|
|
|
|
1
|
1
|
Total
|
|
|
|
16
|
1
|
10
|
27
|
Tableau 14 : Pronoms et noms erronés en français
14
12
10
8
6
4
2
0
Adjectif erroné pronom féminin erroné
Figure 15 : Evolution des occurrences erronées les plus
fortes
Figure 15 : Evolution des occurrences de genre en anglais
Age
|
Pronoms perso. masc
|
Pronoms perso. fem.
|
Pronoms perso. neutre.
|
Pronoms poss. masc
|
Pronoms poss. fem.
|
Pronoms poss. neutre
|
total
|
1;10.05
|
|
|
|
|
|
|
|
1;11.10
|
|
|
|
|
|
|
|
1;11.13
|
|
|
|
|
|
|
|
1;11.15
|
|
|
1
|
|
|
|
1
|
2;01.29
|
|
|
|
|
|
|
|
2;03.13
|
|
|
|
|
|
|
|
2;03.20
|
|
|
|
|
|
|
|
2;05.00
|
|
|
|
|
|
|
|
2;06.03
|
2
|
|
|
1
|
|
|
3
|
2;09.03
|
|
|
|
|
|
|
15
|
2;09.07
|
3
|
1
|
8
|
1
|
1
|
14
|
13
|
2;10.29
|
|
|
|
|
|
|
|
2;10.29 **
|
2
|
3
|
19
|
|
|
|
24
|
2;11.15
|
|
|
1
|
|
|
|
&1
|
3;06.09
|
6
|
4
|
10
|
2
|
|
|
22
|
3;06.14
|
1
|
|
|
|
|
|
1
|
4;00.9
|
|
|
|
|
|
|
|
Total
|
15
|
8
|
39
|
4
|
1
|
14
|
81
|
Tableau 16 : Pronoms valide en anglais
pronom personnel masculin valide pronom personnel neutre
valide
20 18 16 14 12 10 8 6 4 2 0
|
|
|
|
Figure 17 : Evolution des occurrences valides les plus fortes
|
133
|
Age
|
Pronoms perso. masc
|
Pronoms perso. fem.
|
Pronoms perso. neutre.
|
Pronoms poss. masc
|
Pronoms poss. fem.
|
Pronoms poss. neutre
|
total
|
1;10.05
|
|
|
|
|
|
|
|
1;11.10
|
|
|
|
|
|
|
|
1;11.13
|
|
|
|
|
|
|
|
1;11.15
|
|
|
|
|
|
|
|
2;01.29
|
|
|
|
|
|
|
|
2;03.13
|
|
|
|
|
|
|
|
2;03.20
|
|
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2;05.00
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2;06.03
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2;09.03
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2;09.07
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2;10.29
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2;10.29 **
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2;11.15
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3;06.09
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3;06.14
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4;00.9
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1
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1
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Total
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1
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1
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Tableau 18 : Pronoms erronés en anglais
pronom personnel féminin erroné
Figure 19 : Evolution des occurrences erronées les plus
fortes
*CHI: où il est la petite auto ?
*CHI: là le gros l'auto ? *CHI: où il est le gros
auto ?
*CHI: xx le gros auto ?
*CHI: où elle est la gros auto ?
*CHI: où il est le gros auto ?
*CHI: <où elle est> [<] la gros auto ?
[*CHI: où elle est la gros auto ?
*MOT: I don't know where the gros auto is .]
*CHI: où elle est la gros auto, Elena
*CHI: là le gros auto ? *CHI: là le gros auto ?
*CHI: là gros auto ? *CHI: là la gros auto ?
1 ; 11. 13
*CHI: un bicyclette ! 40*CHI: un bicyclette ! *CHI:
un bicyclette !
41 [*CHI: un bicyclette ! *FAT: c'est une bicyclette
!]
*CHI: où est la bicyclette à Olivier ? *CHI:
où la bicyclette à Olivier ? Remarque : *FAT: il est ici la
bicyclette .
2 ; 3. 13
*CHI: il va ici le bicycle ? *CHI: il va ici (.) le bicyclette
!
*CHI: il va ici (.) le bicyclette
*CHI: il va ici (.) le bicyclette !
[*FAT: ma bicyclette .
*CHI: ah xxx ma bicyclette !]
2 ; 10. 29
*CHI: avec ma grosse bicyclette xxx ! *CHI: à la
bicyclette
Figure 20 : Productions erronées
2 ; 3. 20
40 C'est une répétition de l'enfant non
pas une erreur ;
41 Lorsque les deux interagissent, le discours suit
une mise en page spécifique.
Rimbaud Sophie L'acquisition du genre et le code mixing chez
le bilingue précoce 2009
TABLE DES
ILLUSTRATIONS
Chapitre 1 : Partie théorique
Tableau 1 : Tableau récapitulatif des différents
types de bilinguisme sur critères psychologiques,
contextuels et selon l'âge d'acquisition .15
Illustration 2 : Lésions du cortex entraînant des
troubles du langage 18
Illustration 3 : Localisation des aires du cerveau 20
Illustration 4 : Anatomie du cerveau ..21
Chapitre 2 : Partie expérimentale
Tableau 1 : Tableau des productions totales en français,
en français, en anglias et en utilisant le code
mixing 51
Figure 2 : Histogramme représentant les productions de
l'enfant 52
Tableau 3 : Tableau des proportions des productions de l'enfant
53
Tableau 4 : Tableau des productions totales de genre, en
français, anglais et code mixing .56
Figure 5 : Histogramme des productions de genre 57
Tableau 6 : Tableau des proportions des productions de genre
58
Tableau 7 : Evolution du genre en français 60
Figure 8 : Evolution des structures syntaxiques en
français 60
Tableau 9 : Proportion des genres en anglais 63
Figure 10 : Evolution des structures syntaxiques en anglais
64
Annexes
Figure 1 : Article du Midi Libre 80
Figure 2 : Transcritpion du corpus Genesee 1;10.05 81-119
Figure 3 : Exemples cités dans le texte 120
Figure 4 : Courbe de l'évolution du genre 121
Figure 5: Evolution de l'article en français .122
Figure 6: Evolution du déterminant en français
122
Figure 7 : Evolution du pronom et du déterminant en
français ..122
Tableau 8: Tableau des déterminants valides en
français 123
Figure 9 : Evolution des occurrences syntaxiques les plus
fortes 124
Tableau 10 : Tableau des pronoms er noms valides en
français .125
Figure 11 : Evolution des occcurences valides les plus fortes
126
Tableau 12 : Tableau des déterminants erronés en
français 127
Figure 13 : Evolution des occurrences erronées en
français 128
Tableau 14 : Tableau des noms et pronoms erronés en
français 129
Figure 15 : Evolution des occurrences de genre en anglais 130
Tableau 16 : Tableau des pronoms valides en anglais .131
Figure 17 : Evolution des occurrences valides les plus fortes
132
Tableau 18 : Tableau des pronoms erronés en anglais 133
Figure 19 : Evolution des occcurrences erronées les plus
fortes .134
Figure 20 : Les productions erronées 135
Table des matières
: Partie théorique
1. Différents types de bilinguisme .2
1.1. Classification en fonction de la compétence dans
les deux langues 2
1.2. Classification en fonction de l'organisation cognitive de
la langue 5
1. 3. Classification en fonction du contexte d'acquisition
7
1. 4. Classification en fonction du statut des langues
8
1. 5. Classification en fonction de l'âge 10
2. Les bases neurologiques dans le fonctionnement du
langage 16
2. 1. Les courants théoriques dans la relation
langage/cerveau 17
2. 1. 1. La localisation hémisphérique
17
2. 1. 1 Une nouvelle approche du cerveau : la théorie
unitaire ..19
2. 2. Langage et cerveau 20
2. 2. 1. Les zones du
langage 20
2. 2. 2. La myélinisation du système nerveux
...
....21
2. 2. 3. Le fonctionnement du cerveau chez l'enfant bilingue
22
2. 2. 3. 1. Changeux et la théorie
épigénétique 22
2. 2. 3. 2. La période critique pour une seconde langue
24
2. 2. 3. 3. La latéralisation des
hémisphères 25
2. 3. Le traitement cognitif et neurologique du bilingue
26
2. 3. 1. La cohabitation des deux langues 26
2. 3. 2. L'impact de la seconde langue sur le système
cognitif 27
3. Le bilinguisme précoce 30
3. 1. Le contexte du bilinguisme précoce
simultané 30
3. 2. Le système langagier en construction : un ou deux
systèmes ? 29
3. 3. Les premiers mots de l'enfant bilingue .30
3. 4. Définition du code mixing 33
3. 5. Le code mixing chez le bilingue précoce 36
3. 6. Le code switching 39
3. 7. Synthèse du développement langagier chez
l'enfant monolingue 41
: Partie expérimentale
1. Méthodologie 42
1.1. Présentation de l'enfant et de la famille 42
1. 2. L'enregistrement du corpus 43
1. 3. La transcription du corpus 43
1. 4. Le codage 44
1. 5. Le contexte et l'interaction 44
1. 6. La syntaxe française 46
1. 7. La syntaxe anglaise ..49
2. Analyse des résultats 51
2. 1. Présentation du corpus 51
2. 2. Présentation des productions de genre 56
2. 3. Analyse des occurrences de genre 60
3. Discussion 66
3. 1. Le bilinguisme de l'enfant étudié dans le
corpus .66
3. 2. Discussion des résultats 69
3. 3. L'erreur de genre : étude de cas 71
CONCLUSION 74
Annexes 75
Table des matières 137