CHAPITRE I : LES CULTURES MARAICHERES
Ces dernières années sont marquées par un
accroissement sensible de l'intérêt porté aux cultures
maraîchères dans certaines régions de l'Afrique de l'Ouest.
Cet accroissement est düen grande partie aux efforts accomplis
par les gouvernements en vue d'équilibrer la nutrition
des populations, de ravitailler les grandes villes. Mais
également au fait que l'exportation de légumes vers les pays
étrangers présente un intérêt économique
certain. Il est de tradition que les paysans africains fassent pousser, en
mélange avec leurs cultures vivrières habituelles, quelques
légumes comme la tomate, le gombo, les aubergines. Ces légumes
sont principalement utilisés par leurs producteurs pour la consommation
familiale et les excédents sont écoulés sur les
marchés locaux. Peu à peu, cependant, les modes de cultures ont
évolué sous l'influence de la pression démographique, de
l'augmentation de la demande, de l'urbanisation croissante et d'une incitation
à la culture industrielle. C'est ainsi que les cultures
maraichères se sont installées (constituées principalement
de légumes de types africains ou européens) aux abords des
grandes villes (Dakar, Abidjan, Bobo-Dioulasso) vers lesquelles s'amorce,
d'autre part, un transport de légumes depuis l'intérieur. La
pratique des cultures maraîchères au Sénégal
constitue une activité très ancienne. Les premiers jardins
potagers ayant été créés dans la presqu'île
du Cap Vert dès le début du XIX' siècle20. A
l'origine orientée essentiellement vers la satisfaction des besoins de
la capitale, la principale zone de production est la région des
niayes21, le long de l'océan, qui
bénéficie de conditions pédo-climatiques très
favorables. Par la suite, des ceintures maraîchères se sont
développées à proximité des principales villes du
pays. Il est donc normal dans ces conditions que le gouvernement du
Sénégal se préoccupe de développer les cultures
maraichères. Au point que dans son 6ème Plan de
Développement Economique et Social 1981-1985, il considère le
secteur maraîcher comme un des secteurs prioritaires. En effet, ces
cultures permettent : de diversifier rapidement la production agricole,
d'améliorer l'équilibre nutritionnel de la population. Mais aussi
d'augmenter les revenus des agriculteurs, d'améliorer les conditions de
vie du monde rural et de réduire le déficit de la balance des
paiements. Mais les cultures maraîchères sont une
spéculation difficile et délicate tant dans leur production que
dans le cheminement des produits après la
récolte22.
20 Pagès J. 1995. Les systèmes de culture
maraîchers dans la vallée du fleuve Sénégal.
Pratiques paysannes, évolution : Nianga, laboratoire de
l'agriculture irriguée en moyenne vallée du
Sénégal. Paris : ORSTOM, p.171-187. Nianga, laboratoire de
la culture irriguée, 1993-10-19/1993-10-21, (Saint-Louis,
Sénégal).
21 Idem
22 C.D.H, 1986, Les cultures maraîchères au : Bilan
des activités de 1972-1985 du CENTRE POUR LE DEVELOPPEMENT DE
L'HORTICULTURE
Cette agriculture maraichère pratiquée à
la périphérie de la ville, fournit 60% des légumes
consommés en ville23. C'est dans cette
méme optique que la ville de Thiès voit se développer dans
ses alentours des activités maraichères qui deviennent de plus en
plus importante. Dans la zone de KSN le maraichage est pratiqué toute la
saison sèche dans la vallée (zone barrage), ainsi que dans les
cuvettes. Cependant, l'importance du maraichage d'hivernage constitue de plus
en plus une stratégie de réponse aux difficultés
liées à la disponibilité de l'eau durant toute la saison
sèche.
Dans cette zone comme partout au Sénégal ou le
maraichage s'est développé, les cultures maraichères sont
caractérisées par une très grande diversité aussi
bien sur le plan des techniques culturales que des spéculations
produites.
1- Les techniques culturales
Le maraichage est une activité
caractérisée par une diversité de techniques culturales
dans les pays sahéliens vu les nombreux paramètres :
pédologiques, hydrographique, moyens utilisés,
disponibilité de l'eau etc....
Elles reposent essentiellement sur les techniques d'exhaure,
les méthodes d'irrigation, les moyens utilisés et la
fertilisation des sols. La maîtrise des itinéraires techniques
dans la production maraichère est à promouvoir même si d'un
site à un autre ou d'un type d'exploitation à un autre, il existe
des différences. Ainsi, selon la spécialité du site de
production, les connaissances se limitent à l'augmentation des
rendements par l'accroissement des surfaces conditionné également
par l'exhaure et les méthodes d'irrigation. Ici dans la zone de KSN, les
techniques utilisées ne sont pas très modernes certes mais
très diverses.
- Le mode d'irrigation
Le mode d'irrigation : est une opération consistant
à apporter artificiellement de l'eau aux cultures permettant leur
développement normal en cas de déficit. Le plus répandu
est le mode d'irrigation manuelle par arrosoir qui est utilisé à
100 % dans la zone. En effet seuls deux maraichers sur les 65 de
l'échantillon (soit 3 %) ont une motopompe. Mis à part ces deux
producteurs tous les autres qui utilisent l'eau des puits pratiquent une
exhaure manuelle à l'aide d'une poulie. Mais le constat est que la
motopompe est destinée à faire sortir l'eau du puits, de la
mettre dans des bassins et non pour arroser les cultures. La suprématie
de ce mode d'irrigation s'explique par le fait que les superficies
exploitées par chaque maraicher en
23 Niang S, Girardet A.G, Sall A, octobre 2006, Agriculteur en
eau trouble, agriculture urbaine bulletin no 33
44
moyenne 799 m2, ne sont pas de grandes tailles. Ces
petites exploitations renferment une diversité de système et de
techniques de cultures. Avec en réalité une stratégie
visant à saisir toutes les occasions de vendre et à
réduire les risques liés à la production d'une ou de deux
cultures seulement, vu la fluctuation des cours. Ainsi il n'est pas rare de
voire une association de culture sur une méme planche d'environ 7,5
m2 (5m longueur x 1.5m largeur) : association salade et chou ;
tomate et salade ; oignon et salade.
- Les moyens utilisés
Les moyens utilisés par ces maraichers exploitant des
domaines relativement petits, sont de petit matériel agricole de binage,
de désherbage, d'émondage, de sarclage et de repiquage. La
formation des planches se fait avec l'aide de houe et de râteau. Ces
planches sont destinées à accueillir des spéculations tels
que la salade, le chou, le persil, la menthe etc..... Les autres
spéculations tels que le piment, les aubergines (douce et amère),
sont repiquées après avoir quitté la
pépinière, dans des trous d'environ 40 cm de diamètre,
dont le sable a été retourné et mélangé avec
du fumier ou de l'engrais. Le désherbage se fait également
à la main ou à l'aide d'une houe. La lutte phytosanitaire et les
modes d'utilisation des engrais sont des plus précaires surtout au
niveau des petites exploitations. Le problème est d'autant plus alarmant
que les connaissances sur les rémanences des produits utilisés
sont quasi nulles (vu le manque de scolarisation élevé). Et les
délais d'attente pour la dégradation de ces produits
utilisés sont largement déterminés par les
opportunités sur le marché. Les techniques de fertilisation sont
mal maîtrisées parfois surtout en ce qui concerne l'utilisation
des engrais minéraux et des produits phytosanitaires
particulièrement chez les petits producteurs. En ce qui concerne la
gestion de l'eau, (voire dans la première partie du mémoire
chapitre II, 1-2).
L'analyse de cette partie montre que l'utilisation de
techniques culturales modernes n'est pas encore effective à KSN.
L'absence totale de machine ou du maraichage de table, ou méme d'autre
matériel de nouvelle génération dans la pratique du
maraichage est à mettre en rapport avec l'absence d'organisation des
maraichers. Mais ces techniques de cultures aussi traditionnelles soit elles
cachent par contre une grande diversité dans l'utilisation des intrants
pour le développement des cultures.
2- Les facteurs de productions
2-1 : Le fondier
Il est considéré comme un facteur de production,
c'est-à-dire un élément physique de l'unité
d'exploitation qui lui permet de se reproduire. Le foncier (terre) occupe la
première place dans la pratique le maraichage.
Tableau No 3 : Répartition de la
superficie des exploitations en m2
Superficie (en m2)
|
Nombre de fois cité
|
Fréquence
|
Moins de 400
|
04
|
6,2%
|
400 - 800
|
39
|
60%
|
800 - 1200
|
02
|
3.1%
|
Plus de 1200
|
20
|
30,8%
|
Total
|
65
|
100%
|
Sources : Données d'enquêtes T.M. NDIONE, 2010
Dans cette zone les exploitations maraichères sont de
petites à moyennes tailles avec des superficies comprises entre 300 et
2500 m2. En effet, 66,2 % des maraichers ont des exploitations
allant de 300 à 800 m2, alors que 33,9 exploitent des
superficies de 800 à 2500 m2. La taille moyenne des
exploitations est plus ou moins faible 799,23 m2, ce qui explique
l'absence de la pratique de la jachère dans la zone qui est source
d'appauvrissement des sols. Pourtant l'importance de la jachère dans le
processus de restauration de la fertilité des sols n'est pas inconnue
des maraichers. Par conséquent, les superficies totales correspondent
aux superficies cultivables et cultivées. Ainsi même si des
maraichers souhaitaient étendre leur exploitation à la suite de
la disponibilité de l'eau ou d'une augmentation de la demande des
populations, cette volonté d'extension déboucherait surement sur
des conflits fonciers car y'a plus d'espace libre.
Concernant le statut foncier de ces maraichers
c'est-à-dire sur qu'elle base ils occupent et exploitent les parcelles,
les réponses suivantes ont été obtenu :
46
Figure No 8 : La répartition des
maraichers selon leur statut foncier
Sources : Données d'enquêtes T.M. NDIONE, 2010
A keur Saïb Ndoye, 54% des maraichers affirment etre
propritaire de leur parcelle et 46% occupent leur exploitation sur la base de
différentes modalités. Ces dernieres sont la location (21% des
maraichers) et le métayage (25% des maraichers).
Sur les 35 maraichers qui affirment etre propriétaire,
27 d'entre eux l'ont eu par héritage (soit 77,15%), et les 8 restants
par achat (soit 22,85). Les prix d'achat varient entre 100000f et 250000f cfa
pour des superficies comprises entre 500 et 1900 m2.
S'agissant de la location des parcelles celle-ci se fait
généralement annuellement et les prix avancés sont compris
entre 10000f et 30000f CFA pour les mêmes superficies citées
précédemment. (Cf. figure no11).
Figure No 9 : La répartition des
maraichers locataires de parcelle selon les prix
Sources : Données d'enquêtes T.M. NDIONE, 2010
2-2 : Les intrants
Ils sont considérés comme l'ensemble des
données qui entrent dans le cadre d'une production, se sont les
semences, les fertilisants et les équipements. Dans le cadre de ce
mémoire, l'accent est mis sur les semences et les fertilisants. Car le
maraichage qui se développe dans la zone utilise de petites
exploitations ne nécessitant pas beaucoup d'équipements. En ce
qui concerne les quantités de semences des différentes
spéculations l'absence de données nécessaires a
compliqué le travail. Mais selon Faye M.C (2009)24 qui a
travaillé dans le secteur, une légère augmentation de la
quantité de semence a été notée sur les maraichers
ayant accès aux eaux épurées de la STEP. Toutefois cette
petite augmentation de la quantité des semences ne concerne que
certaines spéculations : persil, aubergine douce et chou. Toujours selon
elle cette légère augmentation de la quantité des semences
par une portion des maraichers s'explique par la disponibilité des eaux
usées épurées. En effet ces derniers espèrent
accroitre leur production en augmentant les semences cumulées aux eaux
épurées contenant des éléments fertilisants.
Pour les fertilisants, deux types sont généralement
utilisés dans la zone : il s'agit de l'engrais organique et de l'engrais
chimique.
> Dans cette zone l'engrais organique le plus
utilisé est le fumier de cheval, de boeuf etc.... Ce type de fumier
provenant des enclos des animaux est très utilisé ici, du
début de la plantation jusqu'à la récolte. Les maraichers
sont ravitaillés par des charretiers qui acheminent le fumier dans les
champs à défaut de 2000 franc CFA par charge. Ce prix jugé
trop chère par 56,9 % des maraichers, connait des fluctuations selon la
période et la position de l'exploitation et varie entre 1500 et 3000
franc Cfa. Ce qui pousse les producteurs à allier les fertilisants
organiques et chimiques.
> Pour ce qui est des fertilisants chimiques, les plus
utilisés par les maraichers de la zone sont : l'urée et le
NPK25 qu'ils appellent « Alam ». ces fertilisants sont
utilisés selon les types de cultures. Celles à fleures tels que
la salade, le persil, le bissap nécessite beaucoup plus d'urée
car elle permet un bon développement du feuillage. Par contre le NPK qui
favorise un développement végétatif est utilisé en
grande quantité pour les cultures à fruits tels que le piment,
les aubergines (douce et amère) etc.... La aussi les prix sont
jugés trop chères par prés de 60 % des producteurs. La
quantité totale d'urée
24 FAYE M. C, 2009, Evaluation des effets
socioéconomiques de l'épuration biologique de la STEP de Keur
Saïb Ndoye sur les exploitations agricoles des villages riverains,
Mémoire de fin d'étude ENEA. 82 pages
25 Les lettres N P K sont les symboles chimiques des trois
principaux constituants atomiques des engrais : N = Azote, P = Phosphore, K =
Potassium
48
ou de NPK utilisée par chaque exploitant dépend
des types de spéculations cultivées. Cependant il est difficile
de connaitre les quantités totale de fertilisant utilisés car ces
maraichers évoluent dans l'informel et ne répertorient pas
très souvent les quantités qu'ils utilisent pour chaque
spéculation. Mais d'après leur estimation c'est le NPK qui est le
plus utilisé car les spéculations ayant besoin de ce produit
même s'ils ne sont pas en tête des produits les plus
cultivés, occupent cependant beaucoup plus d'espace.
En résumé, l'utilisation aussi bien des engrais
chimiques qu'organiques par les producteurs conduits au bon
développement des cultures. D'après nos enquêtes 100 % des
maraichers utilisent des engrais organiques et 84,6 % d'entre eux les combinent
avec les engrais chimiques. Cependant le taux d'analphabètes très
élevé au sein des producteurs fait qu'il existe un réel
risque sanitaire lié à la non maîtrise des dosages de ces
fertilisants chimiques. Mais avec l'appui de l'ONG RODALE INTERNATIONAL qui
initie les maraichers à la pratique du maraichage biologique, 15,4 % des
maraichers affirment ne pas avoir recours aux engrais chimiques l'espoir est
peut être permis. Ces différents types de fertilisants
précités sont utilisés sur une diversité de
spéculation.
3- Les principales spéculations
cultivées
Les systèmes de productions maraichères
péri-urbaines à Thiès sont très diversifiés
en termes de spéculations produites. Cependant cette diversification
semble suivre une logique de spécialisation en fonction de la typologie
des sols, du site, de la taille des exploitations et des moyens
utilisés. Ainsi dans les zones dépressionnaires situées au
Sud- sud -- Ouest et au Sud -- sud - Est de KSN (camb yi 1 et 2)
caractérisées par leur exigüité, des sols ferrugineux
tropicaux peu ou pas lessivés. Et soumis aux contraintes hydriques
particulières dans la zone, dominantes les cultures telles que la
salade, le persil, la menthe, le bissap etc..... La menthe joue un rôle
important notamment en apport financier substantiel permettant le financement
en intrants divers et des besoins quotidiens des exploitations grâce
à sa facilité de production. Ce dernier aspect fait qu'on la
retrouve quasiment dans 40 % des exploitations. Dans 92 % des exploitations de
ces deux sites la salade est majoritaire.
Au niveau des sols decks et deck diors
localisés respectivement dans la vallée et les hautes terres
qui bordent celle-ci, se développent principalement les cultures
suivantes : le piment, l'aubergine douce, le diaxatou, le chou etc..... Ces
cultures poussent sur ces sols plus compacts et bénéficient de
leur humidité du fait de leur capacité de rétention d'eau.
En dehors de ces spéculations citées se retrouvent
également d'autres cultures occupant de très faibles
superficies. L'autre aspect remarqué dans la zone et
qui mérite d'être signalé aussi bien au niveau des sols
diors, decks et deck-diors c'est l'intégration de
l'arboriculture dans le maraichage. Avec une production essentiellement
constituée de mangues, d'agrumes, etc..... En effet 63,1 % des
maraichers de la zone ont des arbres fruitiers dans leur exploitation.
Photo No 4 : Importance de
l'exploitation fruitière
Sources : T.M. NDIONE, 2010
D'une manière générale neuf types de
légumes ont été identifiés et peuvent être
classés en deux grandes catégories :
> Les légumes feuilles : salade, persil, menthe,
bissap etc..... Ces spéculations sont produites
généralement durant toute la saison sèche car ne
supportant pas trop les eaux de pluies.
> Les légumes fruits : piment, aubergines (douce et
amère), tomate etc. ..... Leur
production dans la vallée connait un arrêt total du
fait de l'impraticabilité du site.
Tableau No4 : Les principaux types de
légumes
Feuilles
|
Fruits
|
Salade ; Menthe ; Persil ; Chou ; Bissap
|
Piment ; Aubergine douce ; Diaxatou, Gombo
|
Sources : Données d'enquêtes T.M. NDIONE, 2010
Il apparait à la lumière de cette analyse que la
production maraichère est très diversifiée en termes de
spéculation. Parmi cette dizaine de spéculations les plus
cultivées sont : la salade, la menthe, le piment, le persil etc.... Mais
les spéculations tels que la salade, la tomate sont susceptibles
d'être consommées crues, ce qui accroit le risque sanitaire
lié à l'utilisation des
50
eaux usées même si elles sont traitées.
Cependant toutes ces spéculations ne sont pas produites dans la
même période. En effet, le choix des maraichers dépend de
la demande du marché et des conditions physiques qui prévalent
dans la zone.
Malgré leur statut de petits exploitants les maraichers
de keur saïb ndoye essaient tant bien que mal d'apporter des innovations
dans leurs pratiques maraichères, méme s'il est vrai que beaucoup
de chose reste à faire pour une forte évolution de la
production.
CHAPITRE II : LA PRODUCTION MARAICHERE : REPARTITION,
EVOLUTION
La production maraichère constitue le résultat
final de l'ensemble des facteurs de productions. Au Sénégal le
développement des cultures maraichères péri-urbain s'est
accompagné d'un accroissement important des connaissances de la
production. Cette production qui dépend de plusieurs facteurs est
composée comme tantôt signalée par les légumes
feuilles et fruits, et dominée par la salade, le piment, la menthe
etc... Les principaux sites de production ont déjà
été identifiés. Il s'agit des cuvettes situées sur
toute la partie allant du Sud - Est vers le Sud - Quest du quartier ainsi que
de la zone du barrage situé au Nord - Est de KSN dans la vallée
de Fandène. Cette production est cependant assurée par
différentes personnes qui travaillent selon plusieurs statuts.
1- Les acteurs de la production
Parmi les 65 maraichers enquêtés 41,5 % d'entre
eux affirment qu'ils étaient dans d'autres secteurs d'activités
que certains d'entre eux n'ont pas totalement délaissés. Ces
derniers se définissent comme des maçons, des chauffeurs, des
laveurs de voitures, des marchands ambulants présent dans le maraichage
soit parce qu'ils n'ont plus d'emploi. Soit parce qu'ils veulent de quoi
acheter du matériel (maçon, marchands ambulants) ou de quoi payer
les frais afférents à l'obtention du permis de conduire (laveurs
de voiture). Les autres qui étaient soit des élèves ou des
dans de petits métiers instables, ont préférés se
reconvertir dans le maraichage. Ce choix s'explique selon les
intéressés par plusieurs raisons dont l'existence d'un potentiel,
les revenus générés et surtout par le fait qu'ils ont
grandi dans l'environnement du maraichage, car étant issus pour la
plupart de famille ayant pratiqué le maraichage. Signalons au passage
que 65,8 % des maraichers de la zone habitent à KSN, 26,51 % Viennent
des quartiers et villages environnants (Médina Fall, Fandène,
Kawsara, Keur Mbaye Diakhaté, Thiallé etc.....) et 7,69 % sont
issue de milieux lointains.
52
Figure No 10 : la répartition des
maraichers selon leur lieu de résidence
Sources : Données d'enquêtes T.M. NDIONE, 2010
De méme des fonctionnaires à la retraite ou non,
s'active aussi dans le maraichage grâce à l'utilisation des
saisonniers (30,8 %) communément appelés « sourgas ».
L'utilisation de ces derniers se fait suivant différents modes.
> I 'eP Sloi : le saisonnier est
employé et rémunéré en espèces
mensuellement. Celui qui l'engage met à sa disposition le champ, le
matériel, les intrants et est propriétaire de la production. Il
est aussi son logeur dans la plupart des cas et s'occupe de sa nourriture.
> Le confiage ou « mbéy
séddo » : tout est mis à la disposition du
« sourga »qui se charge de produire. A la récolte, les
contractants se partagent de façon équitable les recettes
après déduction ou non des charges par le propriétaire.
> Le prêt de planches : Le «
surga » peut y mener ses propres cultures, mensuelles. Pour cela
il faut être sûr de disposer d'assez d'eau. Il travaille pour son
employeur puis pour lui. Cette méthode permet au maraîcher de ne
pas dépenser d'argent pour le travail, le « surga »
se rémunérant sur la vente des produits des planches qu'il
exploite pour son compte.
Dans la zone de keur saïb 18,5 % des producteurs
utilisaient comme mains d'oeuvre leurs enfants ou leurs frères et dans
ces condition il été difficile voire impossible pour nous de
connaitre les méthodes de rémunération. Cependant pour les
43,1 % des producteurs restants, soit ils exploitent eux-mémes leur
champs sans aide extérieure, soit ils n'ont pas souhaités
répondre à cette question.
La journée de travail des maraichers varie de 4 à
15 heures de temps. En effet les maraichers vont aux champs au plutôt
vers 5 heurs du matin et au plus tard à 10 heures. Ils rentrent au
plutôt vers 12 heures et au plus tard vers 21 heures. Ces
maraichers établissent par la suite un calendrier cultural selon
différents critères.
2- Répartition des cultures selon les
différentes périodes de l'année D'après
les enquêtes, la production de légumes à KSN est fonction
des conditions écologiques (permettant un bon rendement) et commerciales
(possibilité d'écoulement des produits). Cette production est
largement influencée par la demande sur le marché. Ce qui fait
que les maraichers essaient d'adapter leur calendrier cultural aux
réalités de ce dernier. Tout en occultant pas le facteur
écologique pour pouvoir tirer le maximum de profit de leur
activité. De ce fait, il est fréquent de voire plusieurs cultures
adoptées à la même période par la plupart des
maraichers.
Tableau No5 : Calendrier cultural
Mois Légumes
|
J
|
F
|
M
|
A
|
M
|
J
|
J
|
A
|
S
|
O
|
N
|
D
|
Salade
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|
|
|
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|
|
|
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Menthe
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Piment
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Persil
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Aubergines
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Chou
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Bissap
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Oignon
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Gombo
|
|
|
|
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|
|
|
|
|
|
|
Sources : Données d'enquêtes T.M. NDIONE, 2010
Légende :
Salade
Menthe
Piment Chou Gombo
Aubergines
Persil
ignon
Bissap
Ce tableau montre nettement que hormis les aubergines, le chou,
le gombo, toutes les autres spéculations ne sont pas cultivées
ou bien en très faible quantité durant l'hivernage. Car
les mois en blanc ne signifient pas forcément un arrêt total de
leur production mais peuvent
54
correspondre à une baisse drastique due notamment
à plusieurs facteurs. En effet selon les maraichers interrogés la
culture de la salade, de la menthe et du persil est fortement réduite
durant l'hivernage car ces derniers ne supportent pas les eaux de pluies. En
outre la salade et la menthe sont aussi des cultures qui ne se
développent pas très bien en période de fraicheur
(décembre - février). L'arrêt de la culture du piment
durant l'hivernage est par contre lié à l'occupation du site ou
il est cultivé en grande partie (Nord de KSN, zone barrage) par les eaux
de ruissellement. La pratique du maraichage sur ce site est impossible car les
eaux stagnent ici avec des hauteurs atteignant parfois deux mètres.
Quant aux aubergines elles sont cultivées toute l'année car ces
spéculations sont très résistantes, méme une forte
baisse de leur production est enregistrée durant l'hivernage liée
aux mémes raisons que pour le piment. La culture du chou et du gombo est
pratiquée d'avril à octobre, car ne supportant pas la fraicheur.
Idem pour le bissap qui en plus de cela n'est pas cultivé pendant
l'hivernage car subissant la concurrence du bissap cultivé sous la
pluie. Toutes ces spéculations connaissent cependant différentes
fréquences de récoltes. La salade dure un mois après avoir
quitté la pépinière, le piment et les aubergines sont
récoltés chaque semaine et parfois même deux fois dans la
semaine. La menthe et le persil sont coupés à chaque quinzaine
pour leur permettre de retrouver un feuillage normal. Cependant des
spéculations comme le chou et l'oignon dure beaucoup plus longtemps (3
à 4 mois),ainsi les maraichers sont obligés d'avoir recours aux
cultures à cycle court pour disposer à tout moment de revenus
monétaires.
D'une manière générale le calendrier
cultural du maraichage dans la zone de KSN est fortement influencé par
les conditions physiques mais aussi par la demande du marché. Mais
malgré ces contraintes physiques, les maraichers font des cultures de
contre saison, car ces dernières apportent beaucoup plus d'argent. A
cela s'ajoute la diversification des cultures sur une même période
pour éviter les surproductions et avoir tout le temps quelque chose
à vendre.
3- L'évolution de la production
maraichère
Durant ces deux dernières décennies, la
production maraichère a connue un grand essor au Sénégal,
ou elle est perçue comme une alternative pouvant permettre aux
producteurs de trouver des revenus et aux marchés de se ravitailler en
légumes frais. Cette production évolue cependant selon les zones
de la vallée du fleuve jusqu'aux Niayes de Dakar en passant par Mboro et
les cuvettes de KSN etc...., la tendance de la production n'est pas la
méme.
D'après les données d'enquêtes, la
production maraichère connait une forte évolution dans la zone de
keur saïb grâce à plusieurs facteurs. En effet 92,3 % des
maraichers interrogés affirment avoir noté une croissance de leur
production sur ces trois dernières années. Seuls 7,7 % disent ne
pas avoir constaté une évolution positive de leurs
récoltes. Cependant cette croissance de la production est liée
à plusieurs éléments. Parmi les maraichers ayant
constatés une croissance, 61,4 % d'entre eux pensent que c'est
liés à l'augmentation de la demande, car il est évident
qu'on produit plus si on est sur de trouver des acheteurs. Ensuite 31,6 %
d'entre eux considèrent que cette croissance est due à la
disponibilité de l'eau avec la présence de la STEP. La
quasi-totalité des maraichers ayant donnés cette réponse
sont alimentés en eaux par la station. Les 7 % restants lient cette
croissance de la production à d'autres facteurs comme la
disponibilité de la main d'oeuvre bon marché etc..... Fait
important à relever cette évolution de la production ne s'est pas
accompagnée d'une augmentation des superficies cultivées. Ces
dernières sont restées pratiquement les mêmes durant toutes
ces deux dernières années du fait que tout l'espace cultivable
est déjà exploité, que ça soit au niveau du barrage
ou dans les carrières. Ainsi sur des superficies plus ou moins
réduites les maraichers de keur saïb ont réussi à
augmenter leurs productions. Notamment grace à leur volonté de
satisfaire une demande de plus en plus croissante d'une part et d'autre part
à l'utilisation des eaux usées épurées. En effet
ces eaux étant disponible, les maraichers gagnent du temps et
dépensent moins d'énergie pour s'approvisionner en eau, donc
peuvent intensifier et diversifier leurs productions. Cependant l'absence d'une
structure d'organisation des producteurs fait qu'il est difficile d'avoir un
tonnage des produits récoltés durant ces dernières
années. Mais pour la salade, les récoltes tourne autour de 175
pieds par planche car elle est cultivée dans des planches de
7,5m2 environ (5 pieds de salades sur la largeur et 25 pieds sur la
longueur).
Figure 11 : Facteurs favorables au développement
du maraichage à Keur Saïb Ndoye
Sources : Données d'enquêtes T.M. NDIONE, 2010
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A la lumière de ces résultats disons que le
développement de la production maraichère à keur saïb
est lié à la forte demande de la population de la ville de
Thiès ce qui confirme notre première hypothèse de
recherche, méme s'il est vrai que ce n'est pas l'unique raison. De la
production à la consommation de ces produits, beaucoup de
paramètres et d'acteurs interagissent, ce qui pousse à analyser
le mode d'écoulement des légumes.
4- Les difficultés rencontrées par les
maraichers
Elles sont diverse et peuvent se résumer comme suit :
la principale difficulté est relative à l'eau surtout pour les
maraichers utilisant les céanes simples et les
puits. Les céanes sont confrontés
à un assèchement vers les mois d'avril-mai-juin (cf Photo
No 5). Tandis que 90 % des maraichers utilisant les puits
disent rencontré des problèmes liés à la baisse du
niveau de l'eau en période forte chaleur. La détérioration
des conditions climatiques dans la zone sahélienne durant ces
dernières années combinée à l'intensification de la
pratique du maraichage font que la nappe phréatique s'appauvrit
d'année en année. Les autres problèmes rencontrés
par ces maraichers sont les dégâts causés par les parasites
principalement sur le piment, les aubergines, le chou etc..... La cherté
des intrants, le manque de matériels modernes, le manque d'encadrement,
d'assistance technique et de financement affectent aussi l'activité. En
effet ces maraichers sont laissés à eux méme et ne
bénéficient quasiment d'aucune aide des structures agricoles ou
des autorités locales. Tous ces difficulté font qu'ils
éprouvent d'énormes difficultés de la semence et la
récolte, mais surtout au début de la campagne maraichère.
Ces problèmes de manque d'encadrement et de financement risquent de
perdurer vu le manque d'organisation des maraichers, car il est beaucoup plus
facile pour les structures d'appui et les partenaires au développement
de travailler avec des associations, des G.I.E etc....
Il est nécessairement qu'ils s'organisent s'ils veulent
recevoir des financements, des séances de formation de la part des
autorités et des acteurs du développement (ONG, projet etc.....),
enfin de booster le maraichage à keur saïb ndoye. Ainsi l'avenir du
maraîchage dépend aussi de la capacité d'organisation de
ces producteurs péri-urbains.
Photo No 5 : Céane
asséchée
Source : T.M NDIONE 2010
La pratique du maraichage à KSN se caractérise
en gros par une diversité de techniques culturales marquées par
l'utilisation de l'arrosage manuelle, de matériel rudimentaire. Mais
aussi par une large gamme de spéculations cultivées
réparties en deux grands groupes les légumes feuilles et les
légumes fruits. Ceux-ci se développent avec l'apport des engrais
(chimiques et organiques) qu'ils reçoivent. Les maraichers de la zone
sont originaires de KSN dans leur grande majorité et utilisent une main
d'oeuvre variée rémunérée selon différentes
manières. Ils adoptent un calendrier cultural bien établi pour
mieux tirer profit du milieu. C'est ainsi qu'ils ont enregistré une
évolution significative de leur production liée à de
nombreux facteurs dont celui de la demande de plus en plus importante en
provenance du marché central de Thiès. Mais tout ceci
s'accompagne de certaines difficultés. Pour mieux comprendre
l'activité maraichère à KSN, l'étude de
l'écoulement des produits ainsi que des revenus des producteurs semble
nécessaire.
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