1.1.2 La confiance : Un concept sociologique ou
économique ?
A l'origine, le discours économique revendiquant son
indépendance, ceci a entraàýnédes vastes mouvements
qui ont vu l'ordre économique étroitement imbriquédans le
tissu social. C'est ainsi que pour L. Dumont, dans la pr'eface a` la grande
transformation , le discours économique veut se séparer de la
sociétéet constituer a` lui seul un système distinct
auquel le reste du social doit être soumis (La théorie
économique de la confiance et ses limites, AndréOrléan,
2000). Cependant, la marchandise étant incapable de gérer a`
elle seule la complexitédes liens sociaux fondamentaux, il va sans
dire que cette prétention des valeurs économiques a` dominer
la totalitésociale se trouve être un dangereux
émiettement de l'expérience sociale (K. Polanyi, la grande
transformation4, Edition Gallimard, 1983.). D'o`u le débat
sur ce vaste mouvement avec d'une part, l'autonomie progressive que
la valeur économique veut acquérir par rapport a` l'ensemble
des valeurs globales et d'autre part, l'incapacitédans laquelle elle
se trouve de parvenir a` ces fins.
Ainsi, voulant montrer comment l'économie cherche a`
rendre l'ordre économique indépendant des autres dimensions
sociales, a` en faire un domaine séparéet partiellement autonome
d'activités; et comment elle échoue, AndréOrléan
dans son ouvrage intituléla théorie économique de la
confiance et ses limites, 2000, a pu établir précisément
que la capacitéd'engagement d'un individu, qui n'est rien moins que sa
capacitéa` promouvoir une action collective en convoquant la confiance
d'autrui, ne trouve pas dans l'ordre économique des ressources
suffisantes. Pour lui, un individu pour s'engager de manière
crédible
2wikipedia
3Andre Orléan, "La théorie
économique de la confiance et ses limites" (2000), Cahier de sociologie,
pp.2 4Andre Orléan, "La théorie économique de
la confiance et ses limites", Cahier de sociologie, pp.3
Th`eme : Mesures et déterminants de la confiance
des ménages sur la situation économique au Cameroun: Cas de la
yille de Yaoundé.
doit pouvoir mobiliser une valeur plus solide, moins
précaire que celle qui caractérise les relations marchandes. Plus
précisément, il soutient la thèse selon laquelle l'on se
rend crédible auprès d'autrui par une représentation de
soi plus complète que sa seule appartenance économique, c'est ce
qu'on appelle l'être social. Par conséquent, la confiance se
trouve être un concept a` la fois sociologique et économique. On
dit donc que la confiance est un concept socio économique.
1.1.3 Illustration: Un jeu de confiance
L'illustration faite ici se base sur la notion du << jeu
de confiance >> développépar D. Kreps5. Ici,
l'auteur considère deux individus A et B pour un échange
séquentiel de deux biens : la chaise de A contre la montre de B. Cet
échange permettrait a` chacun d'améliorer sa situation, car ce
qu'il recoit est plus important que ce qu'il donne. Dans le tableau
qui suit, le couple de nombres (x, y) signifie que, dans la situation
considérée, l'utilitéde l'individu A vaut x et celle de B
vaut y. Ces nombres n'ont qu'une valeur ordinale.
TAB. 1.1 - Illustration théorique de la confiance dans
les échanges entre individus
JOTJETJR A
|
|
JOTJETJR B
|
TRICHER
|
HONORER
|
FAIRE CONFIANCE
|
(-5 ;20)
|
(5 ;5)
|
NE PAS FAIRE CONFIANCE
|
(0 ;0)
|
(0 ;0)
|
Source : Andre Orléan, "La théorie
économique de la confiance et ses limites", Cahier de sociologie,
pp.3
Par la suite, D. Kreps formalise l'interaction de la
manière suivante : La réalisation de l'échange ferait
passer de l'état (0,0) a` (5,5). Cependant, l'échange
étant séquentiel, il est nécessaire que, dans un premier
temps, A donne a` B sa chaise, pour que, dans un second temps, B livre a` A sa
montre. Aussi, quand B a recu la chaise, s'ouvre la
possibilitépour lui de s'en emparer sans livrer sa montre. On obtient
alors la situation (-5, 20). A a perdu sa chaise et B obtient, pour rien,
celle-ci. C'est bien le problème de la confiance qui est
5Andre Orléan, "La théorie
économique de la confiance et ses limites" 2000, Cahier de sociologie,
pp.3
Th`eme : Mesures et déterminants de la confiance
des ménages sur la situation économique au Cameroun: Cas de la
yille de Yaoundé.
ici pos'e. Pour que A entre en relation avec B, A doit faire
confiance a` B; il doit supposer que B ne tirera pas avantage de la
situation. Cette confiance est source d'utilit'e collective puisqu'elle
permet que se r'ealise l''etat (5,5), nettement pr'ef'erable a` l''etat de
nature (0,0).
Cependant cette confiance peut être trahie. La trahison
met A dans une situation pire que celle qu'il connaissait dans l''etat de
nature. Mais, si la confiance fait d'efaut, aucune relation n'est nou'ee et la
soci'et'e demeure dans l''etat de nature (0,0) sans b'en'eficier des effets
positifs de la coop'eration. Donc la confiance, bien qu'elle soit n'ecessaire
a` la formation de liens sociaux est probl'ematique.
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