5.2.2. Les formes de
« treizalités »
5.2.2.1. « La
treizalité du pouvoir »
C'est elle dont nous avons largement exploité en
parlant du pouvoir. L'OPJ comme l'APJ sont des instances du pouvoir. Ils
« treizent » le pouvoir de l'Etat pour s'instituer en lui.
C'est dans ce cadre que les deux acteurs s'érigent en
« magistrat », « juge »,
« législateur » et incarnent même la police
en tant qu'institution. Il s'agit de voir les policiers en tenue, l'on voit
directement la police ou l'Etat.
5.2.2.2. « La
treizalité financière »
Est celle qui concerne l'argent. Elle est aussi appelée
la « treizalité » économique. La
treizalité horizontale et verticale traduisent celle dite
financière ou économique. C'est comme l'amende transactionnelle,
le « ya makolo », les frais de plainte, d'instruction...
5.2.2.3.
« La treizalité relationnelle »
Les relations sont aussi objet de treizalité. Au lieu
de treizer financièrement, l'OPJ parfois renvoie l'avantage qu'il peut
se procurer immédiatement, en les reléguant dans le futur. C'est
ce que nous avons illustré dans l'introduction par l'adage
« mebele makange, amenanga » (les maïs
grillés peuvent germer, c'est-à-dire, l'on profite des relations
qui peuvent payer dans l'avenir sous forme de service ou autres avantages.
C'est dans ce contexte que lorsqu'un policier entre dans un bar pour consommer
une bière, il peut en sortir ivre suite aux offres émanant des
personnes qu'il a aidées. Cette treizalité se fonde sur les
affinités, les amitiés ou connaissances.
5.2.2.4. « La
treizalité tribale ou ethnique »
Elle est fondée sur l'appartenance tribale ou ethnique.
Au nom de l'ethnie, l'OPJ peut refuser de percevoir l'argent. C'est dans ce
sens que l'on dit « Kupite umo, lume lubapu » (si
quelqu'un passe devant dans un sentier, il élimine la rosé. Ceci
traduit que lorsqu'un des siens occupe une place de choix et ici l'OPJ est une
instance de pouvoir, il peut faciliter la tâche aux siens. Dans le cadre
de l'OPJ, il libère sans caution. C'est la
« trezalité » culturelle.
5.2.2.5.
« La treizalié du poste ou
détachement »
Elle concerne le poste, la fonction ou le service. Pour les
conserver, il faut les « treizer ». C'est dans ce cadre que
l'OPJ donne le rapport à son chef hiérarchique pour conserver son
poste ou sa fonction. C'est dans ce sens que nous avons parlé de savoir
bien conjuguer le verbe manger puisque le poste est
« treizable ».
La « treizalité » du poste implique
la puissance et le prestige. A ce propos, cette citation de Wright MILLS sous
la plume de VAN CAMPENOUDT L. tombe à point :
« l'élite, ce n'est pas simplement les
hommes les plus favorisés, car ils ne pourraient pas
« être favorisés » sans les postes qu'ils
occupent au sein de grandes institutions. En effet, ces institutions sont les
bases nécessaires du pouvoir, de la richesse et du prestige, et en
même temps les moyens principaux d'exercer le pouvoir d'acquérir
et de conserver la richesse et d'obtenir le haut degré de prestige que
l'on revendique.
... Les puissants sont évidemment ceux qui peuvent
réaliser leur volonté même si d'autres s'y opposent. Les
policiers et les hauts fonctionnaires disposent de ce pouvoir
institutionnel...
Les membres de l'élite du pouvoir sont
célébrés à causes des postes qu'ils occupent et des
décisions qu'ils peuvent prendre. Ils sont des
célébrités parce qu'ils ont le prestige et ont le prestige
parce que le public pense qu'ils sont puissants ou riches »
(2001 : 213-214).
En effet, le poste est « treizable »
puisqu'il procure l'argent et le prestige. L'OPJ s'estime puissant puisqu'il a
le pouvoir d'arrêter et de libérer. Pour montrer sa puissance et
son prestige, il peut arrêter et libérer parfois sans
« treizer ».
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